« Une société doit décider de ce qu’elle met en commun »

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  • « Une société doit décider de ce qu’elle met en commun »
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    L’émergence du commun comme principe s’explique d’abord sur fond de résistance historique à la généralisation de la logique propriétaire qui s’est manifestée un peu partout sous des formes différentes mais convergentes : les #terres, les #semences, les #gènes, le #littoral, l’#éducation, les #connaissances, etc. Les #privatisations des biens publics depuis trente ans en sont l’un des aspects importants. Cette réponse est d’abord apparue sous la forme d’un « retour aux communs ». Par communs, on entend moins des biens à proprement parler que des institutions qui visent à produire, sauvegarder, entretenir une ressource destinée à une communauté d’usagers, restreinte ou large.
    L’essentiel est justement que les #communs ne sont pas « produits » mais « institués » : c’est la raison pour laquelle nous sommes très réticents à l’égard de la notion de « biens communs ». Car tous les « biens » ainsi considérés partagent cette qualité d’être « produits ». Il nous semble qu’on doit renverser le raisonnement : tout commun institué (ressource naturelle, connaissances, lieu culturel, etc.) est un bien, mais aucun bien n’est par lui-même commun. Une fois institué, un commun n’est pas aliénable ni appropriable, il n’est pas une « chose ». Au sens où nous l’entendons, un commun est le lien vivant entre, d’une part, une chose, un objet ou un lieu et, d’autre part, l’activité du collectif qui le prend en charge, l’entretient et le garde.

    De quelle façon les mouvements sociaux et écologistes actuels s’appuient-ils sur les communs ?

    Parler de communs, dans le mouvement altermondialiste et écologiste, c’est refuser les « nouvelles enclosures », c’est-à-dire la manière dont la propriété absolutiste et exclusiviste limite les accès à ces ressources et à ces productions qui doivent être communes. Les enclosures sur les ressources naturelles conduisent à leur gâchis et à des effets externes de plus en plus nuisibles, comme la pollution de l’environnement. Dans le cas de la production de ressources nouvelles (les connaissances, par exemple), la logique propriétaire conduit à leur sous-production et à leur sous-utilisation, comme on s’en aperçoit avec les brevets qui freinent la circulation des résultats de la recherche. Mais ces conséquences négatives des enclosures ne peuvent pas être séparées d’un effet global de désintégration sociale et de crise de la démocratie due aux inégalités croissantes et aux pouvoirs accrus du capital. Propriété et démocratie s’opposent désormais de manière directe. C’est pourquoi le commun est d’abord une rationalité anti-« propriétariste » et donc radicalement anticapitaliste.

    Essai sur la révolution au XXIe siècle de Pierre Dardot et Christian Laval

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