*Notes sur la lecture de « L’invention de la science » de Guillaume Carnino. -2-* Partie 1 ici :

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  • Conclusions sur la lecture de "L’invention de la science" de Guillaume Carnino. -7-

    Partie 1 : ►►http://seenthis.net/messages/428937
    Partie 2 : ►►http://seenthis.net/messages/429289
    Partie 3 : ►►http://seenthis.net/messages/429820
    Partie 4 : ▻►http://seenthis.net/messages/430316
    Partie 5 : ▻http://seenthis.net/messages/430951
    Partie 6 : http://seenthis.net/messages/432385

    Conclusion.
    Dans sa conclusion l’auteur ne se contente pas de résumer la perspective générale de son travail et ce qu’il met en relief, mais rentre dans un débat politique et philosophique. Politique sur la question de l’origine d’une partie de la disqualification de la population à la participation politique, et philosophique en questionnant la démarcation entre science et non-science, et au final « pourquoi la science » ?
    Carnino soutient que « la science est la première puissance de transformation du réel, soit une force politique du premier ordre. » Et… en même temps qu’elle serait exclue du champ politique. [La seule manière de bien comprendre à mon avis cette assertion, et qu’elle est présentée comme objective et qu’on ne peut pas la remettre en question. Mais la formulation est particulièrement mauvaise].
    Cela aurait pour conséquence d’ exclure légitimement de la démocratie « un pan entier du social ». Et en même temps la science serait alors capable de tout promettre, sans être responsable de rien.
    [Je suis en désaccord avec cette conclusion. Je ne peux pas juger le travail de l’historien, et je ne peux que dire, qu’il apporte des connaissances intéressantes (sur ce qu’est la longueur réelle de la révolution par ex.), et permet effectivement de préciser pas mal de chose, et de déconstruire des idées reçues sur l’image que l’on a de la science (Une science pure, désintéressée. Des personnages charismatiques, entièrement rationnels, en fait fruit d’une reconstruction propagantiste tardive). Mais d’une manière qui a mon avis n’est pas la plus optimale (car au final il est difficile de mobiliser ses arguments dans un débat) voire organise une confusion sur ce que ce terme recouvre (puisqu’au final cette critique de « la science » ne parle que d’une image que l’on a, et ne permet pas d’en voir les différents sens qui sont souvent employés).
    La science en tant qu’image existe, mais cette image est différente et ne condamne pas les sciences en elle-même. Le problème réside dans l’État, le patronat, et aujourd’hui la culture qu’ils nous ont légués, qui nous donne des préjugés sur ce qu’est la science. Par ex. sur les promesses de la science… certains scientifiques font des promesses pour obtenir un budget, alors qu’ils savent qu’ils ne sont pas sur de ce qu’ils trouveront. D’autres soutiennent largement tel gouvernement ou action politique en mettant en avant leur aura de scientifique, ou leur travail, ils peuvent donc aussi avoir des responsabilités (mais l’on ne peux pas tirer de ces observations que la science en général à tout pouvoir et aucune responsabilité !).
    Si malgré une connaissance réelle de la science, on voit qu’elle sert les dominants, c’est aussi d’une part parce que des scientifiques eux-même adhère à ce projet, et d’autres part parce que ce sont les gouvernements et les patrons (d’industrie, de banques, des marchés) qui permettent a beaucoup de scientifiques de travailler, ou pas (en leur confiant un budget, ou pas), ainsi que des instruments et des sujets qui seront favorisés.
    Rappelons que les scientifiques ne sont même pas propriétaire de leurs publications scientifiques qu’ils doivent racheter (par ex). Et que contrairement à ce qu’a cru voir Carnino, la science a un besoin de la reproductibilité, et d’une évaluation transparente, alors que l’industrie à intérêt à cacher ses recherches, à faire du secret industriel… bref : de la propriété et du brevet.
    Si aujourd’hui un pan entier du social est exclue de la démocratie, ce n’est pas parce que la science là voulue, mais parce que c’est un mouvement de fond des gouvernants et des marchands que d’exclure la population de la décision politique. Et c’est dans cette perspective qu’ils font passer certains sujets comme étant purement techniques et/ou scientifique. Or la science ne dit pas ce qui est gentil ou méchant, bon ou mauvais, mais permet (et cela répond à la question « pourquoi la science ? ») parfois d’anticiper, de prévoir, et d’autrefois : de comprendre, d’envisager, d’éclaircir.]

    Autre chose : elle garantirai « la cohérence du progrès perpétuel et de l’univers infini – et engendre l’illusion d’une croissance illimitée possible et souhaitable. »
    [Décidément non. Le « progrès » est un terme qui connaît différent sens qui change en fonction des critères que vous prenez en compte. Il n’y a pas de raison de se laisser voler l’emploi et le sens des mots. Il suffit de demander, analyser, voir quels critères sont employés et d’en retirer, compléter ou proposer. Par ex. le progrès au lieu de n’être l’accumulation de savoir (positivisme) ou encore des techniques industrielles, peu au contraire être redéfini avec des critères comme durabilité, difficultés d’accés, capacités pour le maintenir et l’utiliser etc.
    Quand à la croissance illimité possible et souhaitable, ça ne vient pas de la science. Mais d’ambition politique qui tente de faire d’un savoir (l’économie) une science d’une part, et ensuite de réduire et biaisés les variables que peu prendre en compte ce savoir pour faire comme si les ressources était illimités par ex. Mais plus grave encore : le savoir économique n’a rien a faire avec l’idée du « souhaitable ». Quand on dit ce qui est souhaitable, on parle politique. Cette confusion est grave, car précisément, c’est se retirer la possibilité de dire non politiquement, que d’accepter l’idée que c’est la science, ou un savoir qui défini le bon ou le mauvais.]

    L’auteur revient sur la définition de la science, en critiquant l’épistémologie à charge. Pour lui elle « fournit le canevas interprétatif de toute connaissance et statue sur la scientificité ou l’irrationalité des jugements humains ». [Or c’est la relecture par les pairs qui statue sur la qualité d’un travail, pas l’épistémologie qui se pose des questions sur les critères employés… et même quand elle les critiques, elle n’est que rarement connues par des scientifiques eux-mêmes a qui ont ne laisse pas forcément le temps de s’en soucier. On voit d’ailleurs que la seule idée bien souvent qu’il reste serait la proposition de démarcation de Popper… celle-ci à pourtant largement était débattu et connaît de nombreuses limites.]

    L’auteur a l’air même de penser qu’aujourd’hui en quelque sorte, la question de l’épistémologie est réglée, qu’elle aurait accompli en quelque sorte son travail en faisant tombé « la rhétorique surplombante du vrai » .
    [Il n’en est rien, la question de la démarcation entre ce qui relève de la science et n’en est pas est toujours d’actualité, avec des débats sur ce qu’on appelle par ex. les pseudo-sciences, la différence entre science et savoir, l’explication du paranormal etc. (voir par ex. le livre Nonsense on Stilts de Massimo Pigliucci, ou son article The Demarcation Problem, A (Belated) Response to Laudan). Sans parler des débats engendrés par le confusionnisme et l’adhésion grandissante au complotisme. Qui d’ailleurs pose certainement à des historiens des problèmes importants concernant a minima la réception de leurs travaux.
    Il semblerai en fait que Carnino soit victime d’une confusion courante entre Épistémologie et Philosophie des sciences. On entends souvent l’épistémologie comme l’idée que chaque science questionne ses propres méthodes et la philosophie des sciences comme un raisonnement encore plus général sur ce mouvement d’ensemble, et entre autre qu’es ce qui constitue ou pas une science (par ex. traduit en français, le livre de Chalmers : Qu’est ce que la science ?). Le problème étant ici que quand Carnino parle d’épistémologie, il cite en fait des livres qui pourrait être rattaché à la philosophie des sciences.]

    [Enfin, je finirai en disant que la proposition que met en avant Carnino, selon laquelle la science est pour certains une religion (qui pour moi est une image de la science, qui par ailleurs à servi a des gourous) est aujourd’hui remise en cause, et pas seulement par des libertaires rationalisant, mais par divers conspirationnistes qui n’hésite pas à rejeter l’Histoire pour y préférer le Récentisme (voir le négationnisme), et l’Archéologie, pour l’idée des Anciens astronautes…].

    #science #pseudo-science #démarcation #industrie #politique #démocratie

  • Notes sur la lecture de "L’invention de la science" de Guillaume Carnino. -6-

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    Ch. VIII. Résistance au progrès et religion de la science . Carnino montre que la science vient concurrencer la religion sur le domaine de la foi [de fides en latin, qui peu être compris comme « confiance ». Et de fait, on a confiance en un procédé, quand on ne peux pas l’expliquer soi-même] et que le « progrès scientifique » succéda a la vision eschatologique de l’église. L’auteur met en avant des procédés rhétoriques que les gouvernants utilisent pour justifier leurs emplois d’une certaine science (mythologie d’un avenir dans un progrès certains, martyrologie [où pourrait-on dire victimisation]).
    [Sa critique de « La science » et du « progrès scientifique » qui est en fait l’image d’une certaine science, construite par le pouvoir ; ne met pas en valeur, le fait qu’il y aie aussi des scientifiques (même minoritaires) qui critiquent les propositions du gouvernement. De même ce que l’on peut entendre par progrès ou progrès scientifique est discutable, mais Carnino semble en laisser la possibilité de définition qu’aux dominants. De fait, l’erreur est alors facile pour le lecteur : la science serai contre la population. Comme si cette rhétorique était spécifique, alors qu’il s’agit de procédés classiques de propagande. Les gouvernants ne s’y trompent pas, puisqu’ils qualifient leurs propres discours de : « propagande scientifique », comme le relève Carnino lui-même, mais par un autre angle].
    A travers la science et l’autorité qu’ils peuvent en tirer le gouvernement cherchent à perpétuer ses objectifs et trouve des alliés dans ceux qui peuvent en tirer bénéfices (dans l’ex. Que donne Carnino sur le maintient par la ville de Paris de l’irrigation de ses égouts, il s’agit des « cultivateurs qui s’enrichissent grâce à l’engrais »).
    [D’un point de vue libertaire, par ailleurs, je ne comprends pas que Carnino insiste tant sur des procédé rhétorique classique et peu sur le fait qu’un des problèmes est le refus de tout avis politique des administrés, pour n’entendre que des avis scientifiques (qui eux-mêmes seront sujets a des débats politico-scientifique comme par ailleurs, il l’indique sur l’origine de pathologies, entre un tenant d’une causalité microbienne, et un autre d’une causalité climatique)].
    Ch.IX La science est indiquée comme le moyen inédit pour stabiliser l’alliance industrielle et gouvernementale, en lieu et place de l’alliance royauté et chrétienté de l’Ancien Régime.
    [Il semble que l’auteur confonde une fois ce plus ce qui est scientifique, et ce qui se réclame scientifique. Ainsi, si on trouve effectivement des texte qui réclame un bon gouvernement par la science… ça ne signifie en rien, que c’est la science qui gouverne d’une part (et on se demande bien comment ?) et d’autre part en quoi le gouvernement en question serait scientifique ? Tout tiendrai dans la force d’un discours dont se revendiquent ceux qui encouragent, valident, ou tiennent le pouvoir.
    Qu’une science, et même des savants, travaillent activement à la monopolisation du vocabulaire de ordre, progrès, science et industrie par le pouvoir, doit-il empêcher par ex. des anarchistes d’indiquer que l’anarchie c’est l’ordre moins le pouvoir ? Doit-on préférer l’anomie, le désordre, à l’anarchie, parce que d’autres personnes définissent leur force comme étant celle de l’odre ? De la même façon qu’il y a différents ordres, ne peut-on concevoir qu’il existe différentes sciences (à conditions qu’elles aient par ex. en commun d’être toutes basées sur des preuves ?)]
    Ferry institue l’école, scientifique, non seulement comme lieu de connaissance, mais aussi de morale, afin de régler à la fois les problèmes intellectuels (soumissions à la religion) et politique (désordre civils) . Il fait de la propriété, un bien « légitime » en l’honorant car elle participe a une bonne cause : permettre l’éducation de tous, pauvres compris, à travers son imposition.
    Carnino, relève, enfin, ou tout de même, que les gouvernants ne suivent pas la science jusqu’au bout, mais tant qu’elle leur permet d’asseoir leur domination . Ainsi pour Ferry, si les élèves vont à l’école, ce n’est pas pour en fait des savants, mais pour les instruites de « certaines doctrines d’État qui importent à sa conservation. » (Jules Ferry). [Ce qui n’empêchera pas Carnino, d’entretenir la confusion en écrivant juste après que c’est « la science » qui va infuser la masse du peuple etc. Alors qu’il s’agit des professeurs, de leurs croyances et pratiques (et dans une moindre mesure des gouvernants et de leur législation].
    Finalement l’auteur rappelle l’ignorance, très actuelle à cette époque du sophisme naturaliste . C’est-à-dire que beaucoup de personnes confondent les « lois de la nature » avec des « lois morales » qu’il faudrait établir [malheureusement, il suffit de voir l’eugénisme que l’on appelle abusivement « darwinisme social » pour le comprendre].

    #pouvoir #science #école #ferry

  • Notes sur la lecture de "L’invention de la science" de Guillaume Carnino. -5-

    Partie 1 : http://seenthis.net/messages/428937
    Partie 2 : http://seenthis.net/messages/429289
    Partie 3 : http://seenthis.net/messages/429820
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    Ch. VII.
    Le sens de « technologie » à changé au cours de l’histoire avec la science et l’industrie. Le terme servait d’abord a désigner et collecter l’ensemble des moyens permettant d’agir sur la matière. Il incluait aussi bien les métiers, les procédés techniques, que les machines. Les métiers en ont été exclus, les machines y sont resté mais procédés d’une collection et classification sas expérimentation ni causologie (connaissance des causes), et au cœur de ce grand ensemble se trouvait la « science des machines » proprement dite avec entre autre la cinétique.
    Cette modification sémantique est aussi pratique , puisque les manières de produire suivent aussi cette évolution , dans le vocabulaire d’une part, dans des descriptions de procédé qui devient de plus en plus précis et chimique, dans les lieux de production (qui de fabrique deviennent usine, industrie), et enfin dans le remplacement final du savoir faire artisanal par un ensemble de machine et procédé mécanique qui visent a obtenir scientifiquement la production (Carnino prend l’exemple de la fabrique de la bière, et plus loin celle de la pisciculture).
    Changement dans l’organisation du travail . Apparaît aussi l’incitation à la division en tâches et travaux, là ou l’artisan gérer ses pauses et pouvait être lié à sa vie familiale. Par ailleurs les machines sont valorisées en comparaison de la main d’œuvre susceptible d’être irrégulière ou de se composer en rapport de force. Plus besoin de travailleuses et travailleurs qualifiée, il suffit de suivre les manuels.
    [Des propositions qui cette fois relève plus clairement d’une politique qui à travers l’économie veux se faire passer pour science. Mais l’auteur enchaîne cette disposition aux précédentes puisque elles apparaissent dans les mêmes publications.
    Notons par ailleurs, que le remplacement des humains par les machines dans certaines activités n’est pas un problème en soi, cela pourrait nous libérer du temps si nous avions les moyens matériels à côté pour vivre… Autrement dit, à part les questions qualitatives, et de santé (pollution, mais aussi parfois psychologique [le travail aliénant existe avec ou sans machine]), la machine pose problème surtout à cause de l’organisation capitaliste. Celles-ci réclament un accroissement infini du capital, quel qu’en soit les moyens, et le plus rapidement possible.]
    Changement dans le marché et sa législation . L’auteur rappelle aussi plus tard que le train a pour ainsi dire forcé pratiquement « aux transformations légales et douanières, achève de faire pénétrer les règles du marché international au sein des régions les plus éloignées de la capitale. »
    [Je me permets de préciser sur ce point, qu’effectivement, Paris, à longtemps considéré les autres régions de la France comme ses colonies, ou elle allait puiser des ressources, y compris culturelle originale, qui furent mis en stéréotypes sous la forme du folklore. Cet extension de l’administration est aussi une occasion nouvelle de l’imposition autoritaire de la langue française].
    Science et industrie un même objectif et démarche . Ce que veux montrer Carnino c’est que « les postures scientifique et industrielle coïncident, non seulement dans leur objectif, mais bien dans leur démarche même. » La science se met pour ainsi dire à disposition de la réalisation industrielle, elle épouse ses difficultés pour tenter de les résoudre.
    Il ose même cette proposition : « L’exigence de reproductibilité, que les épistémologues ont toujours présentée comme étant l’apanage de la scientificité, est en réalité une dimension industrielle de la science elle-même : <citant Pasteur> « l’industrie a besoin de plus de stabilité et d’uniformité, soit dans la production, soit dans l’écoulement de ses marchandises » ». [Mais es-ce que cela veut dire qu’il peut existe une science sans reproductibilité ? Car c’est aussi une condition d’un savoir certains que de pouvoir vérifier les propositions d’autres chercheurs ? Cette corrélation n’implique pas à mon avis que toute science qui l’emploi travaille pour l’industrie… Carnino pense que cet argument de la science peux faire vitre pour l’industrie… mais aujourd’hui que voit-on ? Des brevets, un « secret industriel », ce n’est pas la reproduction publique ou comparative que veux l’industrie, c’est sa stabilité privée.]
    Le problème de l’invention scientifique . Semble complexe, d’un côté localement, avec des savoirs locaux, non-théorisés certain-e-s peuvent aboutir à une production originale, de l’autre des théoriciens voit la possibilité, mais pas sa mise en œuvre et vont in fine, recourir aux savoirs locaux pour ensuite mettre au point sa production industrielle.
    [Dans le cadre du capitalisme, les coopérations de ce genre ne sont peu appréciés, et l’on va chercher QUI est l’auteur de l’invention. Selon on récompensera les théoriciens, ou les pratiquants locaux, qui après tout, produisait aussi, mais juste pas avec une méthode industrielle… Le capitalisme va seulement reconnaître ce qui participe à son extension, alors qu’il serait possible de voir qu’il s’agit ici de deux types de savoirs, l’un théorique et l’autre pratique d’une part, mais aussi de deux types de possibilité quantitative de production, l’une artisanale, l’autre industrielle. Si on voit ces types de productions concurrentielles, parce que l’on cherche a produire « plus » et « plus vite » inévitablement on va en évincer une, pour reconnaître l’autre. Alors que si les besoins différents peuvent apporter des productions différentes et qu’ils sont satisfaits par elles, pourquoi chercher à en choisir un, au lieu d’apprécier au contraire l’inventivité de chacun-e qui permettrai de répondre à des besoins différents].
    Nous assistons au début de l’exploitation industrielle du vivant avec une forme particulière de pisciculture, mais surtout l’institution, le 10/02/1854 de la Société zoologique d’acclimatation (qui sera réformé en 1910 pour devenir la Société de protection de la nature et d’acclimatation de France) qui réuni différents acteurs, économique, gouvernementaux et scientifique pour organiser une nouvelle reproduction et exploitation du vivant.
    Carnino, insiste plutôt sur l’idée que c’est dans ce type de structure que naît pratiquement ce qu’on appelle la techno-science, ou plutôt la technologie. En tant que « alliance des pouvoirs politiques de la science et de l’industrie, c’est-à-dire en tant qu’association des macrosystèmes techniques et de rationalisation scientifique des processus productifs » [Toutefois je n’y vois pas quelque chose qui serait « plus science » que politique. Pour moi, il s’agit juste plutôt de politiciens qui enrôle a leur fin des scientifiques, qui par ailleurs ne demande pas mieux parce qu’ils en partagent une partie, si ce n’est totalement les objectifs. Ce que je veux dire, c’est que cette pratique me semble plus nécessaire à cause de l’objectif capitaliste, qu’à cause de la structure même de la science. Même s’il est clair que c’est une structure particulière de la science qui va alors être mis en avant, et prise comme si elle était « la science ». De même l’Histoire ne va alors retenir comme scientifique que les personnes qui, et Carnino le relève, vont se faire connaître ou légitimer.
    Il existe plusieurs modalités du savoir différentes (avec aussi des qualités différentes) qui co-existes, mais on ne retiendra, pas que les « vrai », mais que ceux qui correspondent au type de mode et de qualité de production exigé par le capitalisme. Ce n’est pas pour moi, contrairement à ce que dit Carnino, une science qui dépossède l’artisanat à des fins économiques [1], mais les fins économiques, qui légitimes un savoir contre un autre.
    Au final, mon impression profonde est que l’on se retrouve, comme c’est souvent le cas avec la critique des techniques et/ou des sciences, avec un axe qui est fondamentalement plus écologique que social, et qui donne priorité critique à des idées comme la croissance, le productivisme, l’extractivisme, la prédation, le remplacement du vivant par des machines, l’hybridation, la rationalisation au lieu d’une critique du capitalisme (ou anarchiste complète, c’est-à-dire pas seulement écologique, mais aussi sociale), qui par ailleurs peu comprendre les autres critiques (ou en écarter) mais qui dans tous les cas, les organisent et les reconnaîts différemment]
    [Carnino, relève cette citation fameuse : « Le pisciculteur doit étudier les lois biologiques, observer les faits naturels comme le voleur étudie le code pénal et observe le gendarme pour savoir jusqu’où et comment les défier sans trop de danger » (AN, F10 2630, conclusion de la troisième conférence de Chabot-Karlen.) Ce qui me permet de voir que le discours à évoluer, puisque Francis Bacon disait qu’il fallait « violer » la nature par les sciences, Descartes, s’en rendre comme maître et possesseurs, ici on parle de voler, aujourd’hui il me semble que l’on parle de connaître et mimer.]
    Toujours est-il que l’on passe de nombreux savoirs, et sciences, à l’idée qu’il existerai « La science » unique, produite en partenariat avec les différentes industries et gouvernements. Et ce changement semble bien avoir lieu aux alentours de 1850. [Mais il me semble important dès lors de ne pas rentrer dans une logique d’idéalisation de avant 1850, ni dans un dégoût de l’activité scientifique en général, mais bien de considérer que d’autres formes de production du savoir existes, dont certains peuvent répondre tout autant a une exigence de vérité, et ne pas servir que les moyens et les ambitions capitalistes].

    [1] Ch. VII, Les mutations de la technologie, §La technologie : du discours sur les techniques à la techno-science.

    #science #industrie #savoirs_locaux #technologie #inventions

  • Notes sur la lecture de "L’invention de la science" de Guillaume Carnino. -4-

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    L’état des conditions matérielles permettant la recherche dans les universités est mauvais. Bien que le gouvernement envisage une rénovation, ce sont finalement les craintes de la guerre qui vont intéresser à la science, afin qu’elle participe à l’amélioration de l’armement. On est loin d’une recherche « pure », c’est-à-dire désintéressée à l’intérieur de ces bâtiments. « La science pour la nation, c’est […] la science pour tous, mais la science par certains seulement », aux premiers rangs desquels, l’industrie. L’industrie est autorisée à financer les centres universitaires, et la plus grande part est « employée à la construction de laboratoires de « sciences appliquées aux besoins de l’industrie » ».
    La notion même de science pure , semble « quasiment inédite avant 1850 ». Elle permet de faire croire à un désintéressement de la part des chercheurs ou des personnes qui investissent en elle. Quand elle est employée pourtant, c’est pour l’intérêt des applications, c’est « la poule aux œufs d’or [1] ». Elle ne semble pas faire l’objet d’une opposition aux applications comme on en trouve les formes rhétorique aujourd’hui. Comme Carnino, le relève dans un rapport de Pasteur : « il n’existe pas une catégorie de sciences auxquelles on puisse donner le nom de sciences appliquées. Il y a la science et les applications de la science, liées entre elles comme le fruit à l’arbre qui l’a porté. » (Quelques réflexions sur la science en France).
    3ième Partie, chapitre VI . Carnino montre à travers Jean Baptiste Dumas et Louis Pasteur que la science ne s’occupe pas que de la production de savoir fondamentaux, mais devient aussi le moyen d’une amélioration, d’une évaluation, et d’un tri de nouvelles techniques et capacités techniques [2].
    Le savant y est aussi exposé dans sa recherche intéressée de financement n’hésitant pas à mettre en avant les bénéfices spécifiques qui pourrait éventuellement en être obtenu dans des domaines majeurs. Ou encore a breveté secrètement et rapidement le résultat de ses recherches. D’autres procédés plus exotiques sont aussi indiqués, comme des mise en scènes plus ou moins spectaculaires

    [1] Armand de Quatrefages, « De l’enseignement scientifique en France », Revue des deux mondes, t. XXII, 15/05/1848
    [2] « « La science » s’institutionnalise […] en tant qu’elle participe d’une stratégie délibérée de nombreux acteurs, pour qui l’expertise savante en matière de procédures industrielles apparaît comme une option cohérente permettant d’engrammer le progrès productif au sein de structures pérennes situées à l’interface de la connaissance scientifique et de la fabrication manufacturière. L’émergence de la science répond donc aussi à un besoin engendré par la complexification de la production industrielle, qui nécessite désormais moins le concours d’organisme économiques incitatifs que d’instances savantes de « tri » au sein de la masse des innovations techniques, puis de diffusion auprès des populations. Après 1850, « la science » recouvre donc un double effort de centralisation et d’expertise industrielle. ».

    #science #industrie #science_pure #budget

  • Notes sur la lecture de "L’invention de la science" de Guillaume Carnino. -3-

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    Partie 2 : http://seenthis.net/messages/429289

    Dans un premier temps, les nouvelles connaissances accessibles par la science sont accessibles à ceux des domaines concernés, ou à des personnes très éduquées. Mais différents mouvements de popularisation vont changer la donne avec des moyens et des objectifs différents.
    Il faut distinguer a) la vulgarisation (qui tente de donner une idée a la population générale de la science au quotidien ), sous forme de conférences, salons, foires et imprimés. Le livre de vulgarisation scientifique n’est « Ni manuel scolaire, ni guide pratique, ni texte scientifique, ni roman illustré » il est « à la croisée de chacun de ces genres. » b) les arts , « qui se saisissent de « la science » pour en faire un de leurs objets esthético-politiques, flirtant parfois avec la propagande », et enfin, c) la spectacularisation par « les expositions universelles , dont l’ampleur et la publicité suscitent l’enthousiasme des foules et visent, in fine, à prouver l’utilité de la science par l’industrie. »
    Chacun de ses moyens font l’objet d’ ambition politique .
    Pour la vulgarisation . Comte donne des cours gratuit et non rémunéré d’astronomie populaire. Henri Lecouturier, socialiste et anticlérical diffuse La Science pour tous et participera a de nombreuses autres publications [entre autre de la presse de science, qui se fait déjà passé pour « presse scientifique »]. Victor Meunier n’hésite pas a dire : « Socialisme est le mot, Science est la chose. » « François-Vincent Raspail, […] défenseur de la médecine populaire, prend […] particulièrement à coeur sa mission d’instruction et d’éducation pour le peuple. Il dénonce inlassablement, avant même l’essor de la presse de science populaire, les collusions entre l’Académie et le pouvoir, et bataille contre l’archaïsme de la faculté. » Apparaît aussi de nombreuses tendances d’éducation populaire . Née en marge un début de science populaire, qui sera en partie reconnu par les professionnels en astronomie notamment (en 1893 par l’observation de comète). [Je modère un peu ici l’idée que une science populaire en général serait reconnu, sur ce même sujet, on peu lire par ex. le livre de Bernardette Bensaude-Vincent, La science contre l’opinion, Histoire d’un divorce, 1999, 2003].
    Certains ont au contraire, une vision réduite du progrès , comme Émile de Girardin il est possible d’évincer les questions intellectuelles par ex. pour le réduire à une économie du même à moins chers, et de techniques productive en moins de temps1. Ou encore une vision scientiste , qui sous-couvert de débarrasser le réel de l’obscurantisme, réduit la diversité des progrès à celui possible par la science.
    [On touche là, a la limite de l’approche historique, elle montre une tendance ; alors qu’en philosophie ou politique, on pourrait relever les possibles.
    La tendance qu’il y a eu chez certains à lier et confondre science et certaines applications, n’a pas a faire de la science l’origine de tout progrès. En effet, si certes la science peu y jouer une part, en nous permettant une pensée plus rigoureuse, une meilleure compréhension, et aussi dans certaines recherches applicatives, a nous apporter des choses positives et accessibles, il est évident que le progrès politique et social, permettrai éventuellement de rejeter aussi ce qui à partir de la science réussissent à améliorer la propagande, et a produire des choses négatives (de nombreuses activités polluantes, ou génératrices de maladie), ou bien positives, mais uniquement accessibles à une aristocratie dans la population, ou aux prix de nombreuses dépendances dangereuse (toute dépendance n’étant pas forcément mauvaises)].
    Il y aussi des tendances épistémologiques . La vulgarisation recherche l’unité parmi la diversité des sciences . [Sans faire de procès d’intention, j’ai l’impression que Carnino confond ce point de vue épistémologique, avec l’idée politique, que la science doit être « partout » au sens de physique… L’idée d’un monde régit par une Unité de lois qu’une science pourra mettre a jour remonte pourtant au moins a Platon, et persiste encore chez tous ses adeptes qui croit en la vérité mathématique, et pourquoi pas à un « fin ajustement » de l’univers chez les plus religieux.] Et propose et diffuse une nouvelle vision du réel , non religieux, mais fait d’atomes et de réactions chimiques . [Ce qui en soit ne me semble pas problématique tant que l’on se fait pas reprocher de parler du quotidien autrement. Par ailleurs, ne pas voir d’âmes ne me semble pas une mauvaise chose.]
    Dans les arts . On observe, par Jules Verne une proposition de substitution de l’imaginaire féerique à un merveilleux scientifique . Cependant les techniques toutes naissante, ne sont pas considéré majoritairement comme un sujet de haute valeur artistique, et bien que certaines publications se vendent bien, la critique et le milieu artistique n’y semble pas si favorable (en tant que thème).
    L’aspect politique y est ambivalent, la science y est fantasmé, mais aussi vertement critiqué, il ne semble pas que l’on fasse la différence avec les applications. Et certains la confondent même avec l’Industrie (qui est un mode de production).
    Mais le levier majeur de propagation d’une certaine image de la science sont les expositions universelles. Loin d’un détachement de l’application que l’on donne souvent à la science, les expositions sont l’occasion de la mise en valeur des liens possibles, et au passage, valorise le colonialisme. La foi dans une vision du progrès qui serait lié à la science est mise en scène… mais dans le même mouvement des méfiances apparaissent au sujet de « certains effets délétères du travail mécanique sur l’activité humaine. » Toutefois l’idée que la science serait liée a l’industrie serait entérinée par ces pratiques, et les savants de leur côté, ne semble pas désintéressée à cette occasion de diffuser leurs travaux.

    #science #industrie #vulgarisation #propagande