A force de dormir dehors, ils ne savent plus ce qu’est un sommeil réparateur. Dimanche 20 décembre, quelque 80 #Afghans ont émergé de leurs couvertures bigarrées, place de la République, à Paris. La veille, à l’issue de la #manifestation de soutien aux #migrants qui a réuni un bon millier de personnes dans les rues de la capitale, une partie des 150 Afghans de la place Raoul-Follereau, non loin de la gare de l’Est, dans le Xe arrondissement, avaient décidé de se délocaliser dans l’espoir de devenir enfin visibles.
Noor Agha est l’un d’entre eux. Le jeudi 17 décembre a été une bonne journée pour lui. « J’ai enfin obtenu mon récépissé de #demandeur_d’asile », confie-t-il le soir même, un sourire dans ses yeux tristes. « J’avais déclaré le 10 novembre vouloir demander le statut en France, j’ai même dormi sur le trottoir en face de France Terre d’asile pour avoir vite mon rendez-vous. Et je viens d’avoir le papier », raconte le maçon de 27 ans, arrivé il y a trois mois après un voyage de cinq mois depuis Kaboul. Fièrement, il sort de son sac le récépissé qui n’a encore rien changé à ses nuits à la belle étoile. Et c’est la même chose pour ses camarades d’infortune.
« Les sanisettes débordent »
Noor ignore que la France est hors-la-loi lorsqu’elle met quarante jours à enregistrer sa demande d’asile alors qu’elle doit légalement le faire en trois jours. En revanche, Noor sait désormais que le pays sous la protection duquel il souhaite se placer s’est engagé à héberger ses demandeurs d’asile. Or, square Raoul-Follereau, la très grande majorité de ses 150 camarades ont comme lui déjà demandé refuge, ou sont en attente d’un enregistrement de leur dossier. Mais ils restent les oubliés d’une capitale pourtant membre de l’association des villes refuges.
Depuis des mois, Noor, Ali, Ahmid et les autres se faisaient discrets, croyant inutile de revendiquer un dû au pays des droits l’homme. Mais ils ont été obligés de changer de stratégie. Si la présence de leur campement place Raoul-Follereau a été longtemps tolérée par des résidents peu enclins à « chasser des migrants », la peur a finalement gagné le lieu, au point que les policiers venaient à dix chaque matin déloger les campeurs. (...)
Jeudi 17 décembre, après que les résidents ont insisté auprès de la mairie d’arrondissement et de l’Hôtel de ville, une réunion a eu lieu. Le ministère de l’intérieur comme la préfecture d’Ile-de-France, responsables des demandeurs d’asile, ne se sont pas déplacés. Pas plus qu’ils n’ont répondu aux sollicitations du Monde. La Ville de Paris a déclaré, elle, le sujet « prioritaire ».
Une mosaïque de misère
Tellement « prioritaire » que, au moment où la réunion se concluait sans engagement, le campement des Afghans reprenait sa forme nocturne. (...) #paywall