• Le cas italien détruit le mythe européen Marc Botenga - 24 Mai 2018 - Solidaire
    http://solidaire.org/articles/le-cas-italien-detruit-le-mythe-europeen

    L’Italie a presque un nouveau gouvernement. Cette alliance entre populistes du Mouvement 5 Étoiles et extrême-droite de la Ligue inquiète l’Union européenne. Le nouvel exécutif pourrait ne plus respecter les traités européens. Mais c’est surtout l’émergence de ce gouvernement même qui devrait inquiéter. Parce qu’il illustre toutes les limites de l’intégration européenne.

    « Nous ne pouvons que conseiller de maintenir le cap en matière de politique économique et financière, de promouvoir la croissance via des réformes et de maintenir le déficit budgétaire sous contrôle. »


    Avant même sa formation officielle, Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne, menaçait déjà le nouveau gouvernement italien. « Ils jouent avec le feu, parce que l’Italie est très endettée. Des actions irrationnelles ou populistes peuvent causer une nouvelle crise européenne », ajoutait Manfred Weber, le dirigeant allemand du parti populaire, au Parlement européen. « Si le nouveau gouvernement prenait le risque de ne pas respecter ses engagements sur la dette, le déficit, mais aussi l’assainissement des banques, c’est toute la stabilité financière de la zone euro qui serait menacée », avertissait de son côté Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie.

    Des recettes européennes en faillite
    C’est comme prescrire un régime à un affamé. Depuis un quart de siècle ce sont précisément les recettes européennes, appliquées par les gouvernements de gauche et de droite, qui ont mené l’Italie au bord du gouffre. La libéralisation du marché du travail qu’impose maintenant le président Emmanuel Macron en France a commencé même avant les réformes Hartz en Allemagne. Le travail précaire et hyper-flexible deviendra la nouvelle norme. Certes, l’Italie est toujours la troisième économie de la zone euro. Elle en est même la deuxième puissance industrielle. Mais les choses changent. La chercheuse italienne Marta Fana a expliqué que depuis 25 ans, l’Italie devient de plus en plus une périphérie européenne, est soumise toujours davantage au leadership économique qu’incarnent l’Allemagne et la France. Pendant que l’Allemagne a profité de ces 25 dernières années pour faire des investissements très forts dans l’industrie, l’Italie a quasiment arrêté de faire des investissements. Rome s’est pliée entièrement à toutes les directives européennes, sur les aides de l’État, l’euro, le déficit, perdant 25 % de structure de production. Cette tendance a été renforcée par la crise de 2008. En 2017, la production industrielle italienne était toujours inférieure de 20 % à son niveau d’avant la crise. L’Italie, synthétise Fana, est en train d’être déclassée : « Nous n’avons pas qu’une perte de structure de production parce que les entreprises ferment, mais on a une perte de structure de production nationale parce que les entreprises italiennes sont achetées par des multinationales françaises et souvent allemandes. Celles-ci utilisent l’Italie comme main d’œuvre mais déplacent les centres de décision, et la recherche et développement vers leurs pays. »1

    Après des décennies de gouvernance européenne, les partis traditionnels se sont effondrés lors des dernières élections. La droite berlusconienne a raté son grand retour. L’ancien Premier ministre social-démocrate Matteo Renzi, grand exemple d’Emmanuel Macron, a payé le prix fort pour ses libéralisations. Après 25 ans de promesses non-tenues, les Italiens ne les croient plus. Face à un taux de chômage élevé et un avenir morose, des millions de jeunes quittent le pays pour trouver du travail à Berlin, Bruxelles ou Paris. D’autres se tournent vers ceux qui promettent de rompre radicalement avec le modèle européen. Ce sont les populistes du Mouvement 5 Etoiles et l’extrême-droite qui ont le mieux incarné ces aspirations de rupture.

    Un néolibéralisme national ?
    Toutefois, dans le programme de gouvernement, les deux partis n’offrent pas un modèle social radicalement différent. Certes, il y a des mesures populaires. A défaut d’une allocation de chômage, l’introduction d’un « revenu citoyen » de 780 euros pendant deux ans est surtout populaire au sud du pays. Ces mesures ont fait le succès de la rhétorique des 5 Étoiles. Néanmoins, le programme du nouveau gouvernement italien ressemble davantage à un « néolibéralisme dans un seul pays », comme le décrit le journaliste anglais Paul Mason, destiné à redonner de la force aux entreprises italiennes.2 Il s’agit en effet avant tout de favoriser le patronat italien qui considère que la lutte avec ses concurrents allemands est perdue. Aucune mesure concrète contre le travail précaire, par exemple. Pour chaque geste vers la gauche, il y a donc trois mesures fortes de droite. L’introduction d’un salaire minimum va de pair avec la réintroduction de « vouchers » (généralisation de titres-services) permettant de contourner toute législation sociale et éviter même de passer par un contrat de travail. Le nouveau revenu citoyen est accompagné d’une obligation d’accepter certaines offres d’emploi. La mise sur pied d’une banque d’investissements, pour subventionner des entreprises privées, va de pair avec l’instauration d’une « flat tax » où les grandes entreprises et les très riches paieront bien moins d’impôts. Les moyens promis pour les soins de santé viendront en premier lieu de rationalisations plutôt que d’investissements nouveaux.

    A ces mesures socio-économiques s’ajoute une matrice fortement nationaliste et raciste. C’est une technique utilisée aussi par Viktor Orban, Premier ministre hongrois, pour obtenir une certaine adhésion populaire. Quelques mesures de gauche et une bonne dose de nationalisme doivent ranger les travailleurs derrière « leur » patronat. Parce qu’il s’agit bien de défendre le patronat local. Cet objectif fait que l’accord de gouvernement fait l’impasse sur une vérité toute simple : c’est l’alliance étroite entre fédération patronale et gouvernement italiens qui est le principal responsable de la crise sociale aujourd’hui. Mais cela reste tabou. Afin de dédouaner le patronat italien de sa responsabilité, l’accord gouvernemental s’en prend aux migrants. L’Italie aurait beaucoup de raisons de critiquer le manque de solidarité des autres États européens qui lui laissent la gestion d’une bonne partie des réfugiés. Les migrants sont d’ailleurs souvent les premières victimes du travail précaire. Mais le programme du gouvernement italien n’en a cure et ne fait qu’attiser le racisme et la discrimination. Les migrants sont sans détour ni preuves associés au terrorisme et même aux mauvais comptes publics. Pour y pallier, le gouvernement propose la mise sur pied de « centres de rassemblement » d’environ un demi-million d’immigrés pour les renvoyer en Afrique.

    Clash avec l’Europe ?
    Ces potentielles déportations massives n’inquiètent pas le moins du monde l’Union européenne. Ni le fait qu’un parti d’extrême-droite comme la Ligue rentre au gouvernement. Ni que Marine Le Pen lui apporte son soutien. Non, c’est bien la volonté du gouvernement italien à renégocier les traités qui inquiète. Contrairement à leurs promesses de campagne, les deux partis au gouvernement n’envisagent plus explicitement une sortie de l’euro, mais leur programme est clairement trop coûteux pour les règles budgétaires européennes. Ceci reflète une contradiction au sein du patronat italien, dont une partie a profité et profite du marché unique européen, mais qui en même temps veut davantage de soutien de « son » État. Les mesures de soutien promises à l’industrie italienne de l’armement dans la compétition européenne en sont une conséquence logique. Ce libéralisme plus « national » ne promet rien de bon pour les travailleurs. Au contraire, dans la course à la compétitivité, ils seront poussés à davantage de sacrifices pour « renforcer » l’économie. Donc, le patronat italien. L’absence de mesures concrètes pour améliorer les droits sociaux n’est pas une coïncidence.

    Entre néolibéralisme européen et libéralisme xénophobe italien, des arrangements sont possibles. Néanmoins, le risque d’un affrontement entre les deux est réel. Les institutions européennes, et leurs alliés à droite et à gauche en Italie, feront tout pour faire marcher l’Italie au pas des traités. Dans le contexte actuel, une pression agressive ne pourra que renforcer le national-libéralisme raciste. De la Hongrie, à la France, de l’Autriche à l’Italie, voici la perspective qu’offre l’actuelle intégration européenne : libéralisme autoritaire européen ou national-libéralisme xénophobe. Le défi pour la gauche italienne, et pour la gauche européenne en général, est de sortir de ce faux choix pour imposer un changement social qui en finit avec la précarité et le déclin social. Un projet de gauche qui rompt avec les diktats européens, non pas en faveur du patronat national, mais pour les travailleurs.

    #Italie #populisme #nationalisme #racisme #xénophobie #néolibéralisme #traités-européens #euro #M5S #Union-européenne #UE #intégration-européenne #crise-européenne #Bruno-Le-Maire #Manfred-Weber #Libéralisation #Travail #précarité #flexibilité #Industrie #Allemagne #France #euro #déficit #dette #crise #multinationales #Matteo-Renzi #flat-tax #patronat #migrants #droits-sociaux #banque #finance #national-libéralisme #Social

    • « Les marchés vont apprendre aux Italiens à bien voter »
      Günther Oettinger, commissaire européen au budget

      Tout y est : l’arrogance brutale des dirigeants allemands qui considèrent l’Europe du sud comme un « club med », la violence des dirigeants de la Commission européenne qui veulent mater les récalcitrants quel qu’en soit le prix pour les peuples. Ceux qui tuent le projet européen sont là. « L’union européenne » se tourne cette fois-ci contre un de ses pays fondateurs. La fin s’approche pour ce système.
      Jlm

  • Les étudiants et le personnel des universités britanniques luttent ensemble pour des pensions décentes

    Le personnel des universités britanniques est en lutte contre la réforme du régime de pension de l’enseignement. Le succès de la grève menée par les professeurs et la solidarité des étudiants a été tel que, le 13 mars, la maigre concession octroyée par le pouvoir employeur a été rejetée par le personnel qui a décidé de poursuivre les actions. Aux piquets de grève, cette lutte suscite aussi un large débat de société entre étudiants et profs sur le rôle de l’enseignement et sur la répartition de la richesse.


    En Grande-Bretagne, le personnel de l’enseignement supérieur est actuellement dans la plus grande et la plus longue vague de grèves que ce secteur ait jamais connue. Depuis mi-février, professeurs et chercheurs s’insurgent ensemble, avec entre autres le personnel bibliothécaire et informatique, contre les réformes prévues en matière de pensions. La caisse de pension à laquelle ils cotisent depuis des années est déficitaire de 6,8 milliards de livres (environ 7,7 milliards d’euros), ce qui est en partie dû aux mauvais résultats en bourse de ce fonds. L’UUK – l’organisation des pouvoirs employeurs de l’enseignement supérieur – veut désormais combler ce déficit au moyen d’un plan de pension qui remplacera la pension garantie basée sur les cotisations par une pension qui varie directement selon les fluctuations de la bourse. L’UCU – le syndicat du personnel des universities et colleges – estime que cette mesure d’économie fera perdre en moyenne 10 000 livres (environ 11 300 euros) par an pension au salarié moyen de l’enseignement supérieur.

    Des travailleurs saisonniers dans les universités
    Ce nouveau plan de pensions aura pour conséquence de plonger les enseignants dans une telle précarité que ceux-ci n’ont pu qu’entrer en résistance. Leur combativité s’explique aussi par la dévalorisation subie par le personnel depuis plusieurs années : baisses de salaire, pression de travail de plus en plus forte et multiplication de contrats de plus en plus précaires. 54% du personnel académique n’a un emploi assuré que pour les prochaines années et une grande partie d’entre eux travaillent même par missions à durée déterminée. Entre celles-ci, ils retombent sur une allocation ou ils travaillent en free-lance. Le professeur de sociologie Steve Hanson se compare à un travailleur saisonnier : au début de chaque semestre, il espère à chaque fois obtenir un nouveau contrat. Si l’on ajoute à tout cela un environnement de compétition, on trouve l’explication aux chiffres consternants en matière de problèmes de santé mentale au sein du personnel académique. 40% des chercheurs souffrent de problèmes liés au stress, de dépression ou d’autres plaintes. Dans une telle situation, difficile de mener à bien une recherche novatrice ou de se consacrer de manière optimale aux étudiants.

    Entre-temps, les directions d’universités de l’UUK ont riposté par une fausse affirmation : il leur faudrait tailler dans d’autres postes, comme l’accompagnement aux études et la recherche, si le personnel n’acceptait pas les mesures prévues. Les étudiants ne se laissent toutefois pas diviser par de tels arguments. Dans leur soutien exprimé aux grévistes, le dirigeant travailliste Jeremy Corbyn et le syndicat des étudiants NUC soulignent qu’un enseignement qualitatif ne peut pas exister sans des contrats stables et corrects pour ceux qui sont chargés de l’éducation des prochaines générations. Si la société veut encore que des jeunes choisissent une carrière dans l’enseignement, il est impératif que ceux-ci soient certains que leur salaire et leur pension leur permettront de payer le loyer. Un activiste du mouvement faisait par ailleurs remarquer que les étudiants comprennent que les conditions de travail du personnel sont aussi les conditions dans lesquelles ils étudient.

    Étudiants et personnel tirent à la même corde
    Le pouvoir employeur tente par cette sorte d’arguments de dresser les étudiants contre le personnel. Toutefois, le syndicat du personnel et les jeunes sont proches dans ce conflit. 80 000 étudiants ont déjà signé des pétitions soutenant la lutte du personnel et il ressort d’un sondage que 61% de étudiants soutiennent les grévistes. La semaine dernière, des centaines d’étudiants ont même occupé les bâtiments de neuf universités et collèges pour renforcer la lutte des grévistes et chaque jour, un solidari-tea est servi par des étudiants à de nombreux piquets syndicaux.


    L’UUC prend également la défense des étudiants. Le syndicat veut que soit instaurée une business education tax, une taxe pour faire contribuer les grandes entreprises au coût des études pour les jeunes. Actuellement, les étudiants britanniques paient 9 250 livres de minerval (environ 10 500 euros) et doivent ainsi faire face à une très grosse dette. L’argument de l’UUC est basé que le fait que les entreprises qui peuvent faire du profit grâce à leur main-d’œuvre hautement qualifiée doivent contribuer au coût de cette formation. Une telle taxe court-circuiterait en partie un mécanisme de base du capitalisme, à savoir l’externalisation des activités économiques non-rentables.

    De plus en plus de cheveux gris
    Bien que les mesures concrètes diffèrent dans chaque pays, c’est partout en Europe que l’on taille dans les pensions. Le défi est de relier les mouvements de résistance entre eux afin de renforcer la lutte contre l’Europe néolibérale et les gouvernements des différents pays. Car, là où, autrefois, dans la mine tout le monde avait le visage noir, aujourd’hui, en Europe, la population a de plus en plus les cheveux gris. L’idée est partout la même : travailler plus longtemps, et pour moins de pension. Les gens restent ainsi plus longtemps sur le marché du travail et ce sont les travailleurs qui paient pour les avantages fiscaux dont bénéficient les grandes entreprises partout en Europe. En Grande-Bretagne, la pension de base est en outre très basse, et les gens sont en grande partie dépendants d’une pension qu’ils doivent se constituer dans le privé. C’est pourquoi la lutte contre les directions d’universités britanniques s’élargit à une lutte pour une pension publique forte pour tous les travailleurs.

    Un débat de société fondamental
    Après des semaines d’actions impressionnantes, l’UUK a invité le personnel la semaine dernière à la table des négociations, mais l’accord qui a été proposé a été rejeté par le personnel. Celui-ci reste combatif et constate qu’il est de plus en plus gagnant suite à l’importante participation à la grève et à la solidarité des étudiants.
    Des propositions comme la business education tax montrent que les discussions sur les pensions, qui semblaient au début porter seulement sur une question matérielle, entraînent en fait un débat de société fondamental. Allons-nous économiser sur le dos des gens qui travaillent ou allons-nous aussi faire contribuer les entreprises qui font du profit sur notre travail ? Dans tous les cercles du pouvoir, on nous répète que les pensions sont impayables. Or, ces dernières décennies, la productivité a augmenté à plusieurs reprises. Nous créons tous plus de richesse que jamais auparavant, et il est grand temps que cette richesse revienne à ceux qui l’ont créée. C’est pourquoi les discussions aux piquets de grève ne portent pas seulement sur les pensions, mais aussi sur les conditions de travail, sur la manière dont on peut démocratiser l’enseignement et sur une autre vision de la société, centrée sur l’émancipation des gens pour un monde meilleur.

    Source : http://solidaire.org/articles/les-etudiants-et-le-personnel-des-universites-britanniques-luttent-ensemb
    #Angleterre #grève #université #précarisation #pauvreté #retraite #pension #précaires #travail #précarité #exploitation #Theresa_May #société #profit #université

  • Passagers et personnel décident de lutter contre Ryanair Solidaire - 26 Septembre 2017
    http://solidaire.org/articles/passagers-et-personnel-decident-de-lutter-contre-ryanair

    Ce qui a débuté par l’annulation de six vols en Italie et en Espagne a abouti à la suppression, fin octobre, de 40 à 50 vols par jour. Des vacances bien méritées s’envolent donc en fumée pour de nombreuses personnes. Mais le personnel lui aussi subit la politique de #Ryanair.

    Les passagers laissés en plan
    En tout, ce sont environ 315 000 passagers qui sont concernés. Toutes ces personnes doivent trouver une alternative pour atteindre leur destination. Quant au montant de la compensation qu’ils toucheront, il faut encore attendre. Introduire une réclamation auprès de Ryanair n’est pas simple. Même via un bureau d’avocats ou un bureau spécialisé, il faut attendre un certain temps pour voir si l’on obtiendra la moindre compensation. 

    La raison pour laquelle tant de vols sont subitement supprimés aujourd’hui, c’est que Ryanair s’est vu ordonner de la part des autorités irlandaises de navigation aérienne d’aligner dès l’an prochain son calendrier des congés avec l’année civile. Ryanair doit « vider » toutes ses réserves de congés constituées avant la fin de l’année, donc donner les congés auxquels ont droit les travailleurs de l’entreprise, et il n’y a plus assez de pilotes et de personnel de bord disponibles pour maintenir la flotte au complet jusqu’au début de la saison d’hiver.

    Un personnel exploité 
    Ryanair n’est pas seulement le champion dans l’offre de billets à bas prix, les conditions de travail de la compagnie #low-cost font également partie des plus déplorables de toute l’#Europe. Les pilotes et le personnel de cabine travaillent sous statut irlandais, même s’ils travaillent à partir d’autres pays. C’est ainsi, par exemple, que la compagnie contourne la législation belge du travail. En cas de maladie, les travailleurs ne bénéficient pas d’un salaire mensuel garanti et les salaires eux-mêmes sont plus bas que les salaires belges.

    Chez Ryanair, les pilotes débutent avec un salaire situé entre 2 500 et 3 500 euros par mois. Après déduction de tous les coûts, il ne reste parfois qu’à peine plus de 1 000 euros. Les pilotes n’ont pas le choix, car ils sont obligés de voler s’ils ne veulent pas perdre leur licence. Et bien des pilotes se sont lourdement endettés pour payer leurs études de pilotage. Et, souvent, ils sont mis au travail sous un statut de pseudo-indépendant.
    Aussi, dès qu’ils en ont l’occasion, ils sont nombreux à s’engager dans d’autres compagnies aériennes. L’ancienneté moyenne à Ryanair n’est que de quatre ans.

    Le personnel entre en résistance, tant en Belgique que dans le reste de l’Europe
    Début septembre, dans notre pays, le syndicat francophone des employés de la CSC, la CNE, obtenait une grande victoire pour les hôtesses et les pilotes. La compagnie aérienne était déjà obligée de respecter l’accès de ses travailleurs en Belgique à notre sécurité sociale. Cette fois, le tribunal obligeait Ryanair à faire pareil avec la législation belge du travail. Cet arrêt a son importance aussi pour d’autres secteurs qui sont concernés par ce genre de problème, comme le secteur des transports.

    Mais au niveau européen aussi, la résistance s’organise. Des représentants des pilotes de 17 bases européennes, dont ceux de #Zaventem et de #Charleroi, réclament de meilleures conditions de travail. Ils rejettent également le bonus que la direction leur a proposé afin de supprimer leurs congés, peut-on lire dans une lettre que La Libre Belgique s’est procurée. 

    Les pilotes déposent eux-mêmes leurs revendications sur la table. Ils veulent travailler selon des contrats locaux – et non plus irlandais –, qui respectent les lois et droits du pays dans lequel ils travaillent. Ceux-ci doivent également proposer de meilleures conditions de travail.

    Une compagnie qui a réalisé 1,2 milliard de bénéfices
    La compagnie irlandaise low-cost engrange de plantureux #bénéfices. La lutte concurrentielle menée par les compagnies aériennes soumet le personnel à d’énormes pressions. Il s’agit non seulement de ses propres travailleurs, mais aussi des bagagistes, du catering et des entreprises de nettoyage. Les sociétés de gestion des bagages recourent massivement à des contrats intérimaires, temporaires et à temps partiel pour répondre rapidement aux exigences des compagnies aériennes. Outre les contrats, la flexibilité dans le secteur est elle aussi intenable. Rappelez-vous la grève à Zaventem, fin août, chez #Swissport.

    Voici quelques semaines, le patron de Ryanair, Michael O’Leary, s’en prenait encore aux syndicats. Aujourd’hui, il doit s’excuser ouvertement auprès des passagers et il est obligé de s’asseoir avec les syndicats à la table des négociations.

    Source :

  • Make Mexico great again Isabelle Vanbrabant - Solidaire - 22 Mai 2017
    http://solidaire.org/articles/make-mexico-great-again


    À droite, la ville de Tijuana, au Mexique, où sont installées de nombreuses usines de production qui dépendent de multinationales américaines. À gauche, les États-Unis. Entre, la frontière, sur laquelle s’érige déjà une imposante barrière. (Photo Gordon Hyde / Wikimedia)

    « Pas besoin des Mexicains. Je n’ai pas besoin du Mexique. Ils vont payer pour ce mur, qu’ils le veuillent ou non. » Ce n’est qu’une des déclarations offensantes – et pas la plus raciste – de Donald Trump contre le Mexique et les résidents mexicains aux États-Unis. César Vargas, politologue mexicain habitant à Gand, nous donne son éclairage.

    Comment les relations entre le Mexique et les États-Unis sont-elles en train d’évoluer ? 
    César Vargas. Trump et ceux qui pensent comme lui peuvent présenter le Mexique comme le « super-vilain », la cause de tous les maux dans la société étasunienne, mais la réalité est plus complexe. Les économies étasunienne et mexicaine sont très liées depuis l’accord de libre-échange entre États-Unis, Canada et Mexique (Alena) en 1994. 

    On a parfois l’impression que le Mexique n’exporte que des produits agricoles – des tomates, des avocats… – vers son voisin du nord, mais ce n’est pas juste. L’industrie mexicaine est un des rouages du processus de production étasunien. Un avion nord-américain est fabriqué avec des turbines produites au Mexique. Si Trump veut couper ce circuit, il menace à court terme des millions d’emplois aux États-Unis. Des calculs font état de quatre millions d’emplois étasuniens supprimés.

    Comment réagit le Mexique ?
    César Vargas. Ce qui change, du coup, c’est que, vu l’agressivité et la manière grotesque dont Trump et son entourage parlent des Mexicains, ce qui semblait impossible est en train de se produire : les élites politiques, économiques et culturelles mexicains reviennent à un discours nationaliste.

    Tous les partis politiques mexicains, très opposés entre eux, sont maintenant unis contre Trump. L’année prochaine est une année électorale au Mexique, et il semble que le candidat de gauche Lopez Obrador ait vu sa popularité augmenter très fort grâce à un « effet Trump ». La gauche a toujours été nationaliste au Mexique mais, ce qui est remarquable, c’est que la droite s’y mette aussi. Les faiseurs d’opinions de l’ « establishment », qui soutenaient les États-Unis, sont désormais totalement discrédités. 

    Qu’en pensent les gens ? 
    César Vargas. Il y a évidemment une certaine crainte de ce qui va se passer. L’enjeu est de taille pour le pays, mais il y a aussi beaucoup de colère et de résistance. Il y a eu une manifestation anti-Trump dont l’appel a été relayé à la télévision, et qui a été un succès. Cela dit, je pense que le potentiel est encore plus grand. Beaucoup de citoyens critiques s’expriment sur les réseaux sociaux. 

    Il y a aussi une alliance croissante entre les mouvements de gauche au Mexique même et les latinos – dont notamment la communauté mexicaine – aux États-Unis. Ceux-ci sont très combatifs et s’organisent activement contre les déportations et le racisme. La coordination de ces mouvements est très positive, et je crois qu’elle va se renforcer dans les années à venir. 

    À mon avis, Antonio Villaraigosa, fils d’immigrés mexicains et ancien maire de Los Angeles, deviendra gouverneur de Californie et sera une voix d’opposition à Trump.

    #Trump #Californie #Mexique #mur #alena #emplois #establishment 

  • Selon des documents internes, Frontex laisse délibérément les réfugiés se noyer Solidaire - Max Vancauwenberge - 18 Avril 2017
    http://solidaire.org/articles/selon-des-documents-internes-frontex-laisse-deliberement-les-refugies-se-

    Frontex, l’agence européenne des garde-frontières et garde-côtes européens, laisse délibérément les réfugiés se noyer. C’est ce que nous apprennent des documents internes ayant « fuités ». Depuis le début de l’année, 7 personnes meurent chaque jour en tentant la traversée de la Méditerranée…

    Zach Campbell, journaliste d’investigation, a pu mettre la main sur des documents internes de Frontex indiquant que les navires de l’agence européenne naviguent délibérément loin des zones maritimes où ont lieu la grande majorité des naufrages. Ses articles1 ont été publiés sur The Intercept, le magazine en ligne créé par le journaliste Glenn Greenwald qui y a notamment révélé l’affaire Snowden.

    « En ce moment même, nous sommes occupés sur une dizaine de sauvetages dans les eaux internationales. Un millier de personnes ont été sauvées par nos moyens depuis ce matin. Alors, on se pose une question : où est l’Union européenne ? Où sont les pays membres ? » demande Stefano Argenziano, coordinateur des opérations de Médecins Sans Frontières (MSF).2 En réalité, les navires de Frontex sont délibérément absent des zones maritimes où ont lieu la grande majorité des noyades. C’est ce que nous apprennent des documents internes de Frontex ayant fuité.

    En octobre 2013, suite aux naufrages qui avaient coûté la vie à plus de 500 hommes, femmes et enfants au large des côtes italiennes de Lampedusa, l’Italie avait lancé l’opération Mare Nostrum. Avec un budget de 9.5 millions d’euros et des moyens considérables, cette opération a permis de sauver la vie à plus de 155.000 personnes en mer. Mais, devant le trop faible soutien reçu par l’Union européenne et ses États membres, l’Italie a mis fin à l’opération en novembre 2014.3

    La Commission européenne a alors mis en place l’opération Triton, une opération européenne à laquelle participent 21 États membres et pays associés à l’Espace Schengen. Cette opération n’a cependant jamais eu l’ambition de remplacer l’opération Mare Nostrum. Elle a plutôt pour rôle de surveiller les frontières, même si elle est légalement obligée de porter secours aux navires en détresse. Son budget est d’ailleurs à l’époque nettement moins élevé – 2.9 millions d’euros contre 9.5 pour l’opération Mare Nostrum – et elle ne se rend pas dans les eaux internationales où ont lieu la majorité des naufrages. Une lettre interne4 envoyée par Frontex aux autorités italiennes en novembre 2014 nous apprend par ailleurs que le directeur de l’époque indiquait que ses navires ne devaient pas être appelés pour des opérations de sauvetage en mer en dehors des zones maritimes italiennes, alors même qu’il s’agit d’une obligation légale en droit maritime de venir en aide à d’autres navires en détresse. L’opération Triton a depuis été renforcée en termes de budget et de moyens d’interventions, mais celle-ci ne se rend toujours pas dans les zones maritimes où ont lieu le plus de noyades.

    Une seule mission européenne – la mission EUNavFor/Sophia – navigue près des eaux libyennes. Cette mission a pour objectif de casser le business des passeurs et est composée de plusieurs navires militaires ainsi que de plusieurs hélicoptères et de drones. Cet équipement leur permet de savoir en permanence et en temps réel si des personnes tentent la traversée de la Méditerranée, et également si leur embarcation est capable de résister à un tel voyage. Ces informations ne sont cependant pas transmises ni aux autorités italiennes ni aux ONG.
    Rien que cette année, 663 personnes5 se sont ainsi déjà noyées en tentant la traversée, soit 7 par jour.

    Les ONG prises pour cible
    Si Frontex ne navigue pas dans les eaux où ont lieu le plus de noyades, les ONG comme Médecins Sans Frontières le font. Ces dernières sont cependant prises pour cible par Frontex. Dans une récente interview donnée au quotidien allemand Die Welt6, le directeur actuel de Frontex, Fabrice Leggeri, affirmait qu’il « fallait éviter de renforcer le business de réseaux criminels et des passeurs en Libye en repêchant les migrants trop près des côtes libyennes ».

    Le 21 mars dernier, notre secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration Theo Francken reprenait également cette idée en accusant Médecins Sans Frontières de faire du « trafic d’êtres humains ». Face aux nombreuses réactions choquées et à la demande du Premier ministre Charles Michel, Theo Francken a accepté de « nuancer » ses propos. « Comment nuancer ce genre de propos ? Il demande à MSF de les laisser dans la mer. Comment fait-on pour se noyer "un peu" ? Ces propos sont intolérables ! » affirmera Raoul Hedebouw, parlementaire du PTB au Parlement jeudi 23 mars.

    Le secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration n’a en effet pas changer de position sur le fond. Dans une interview donnée à De Morgen, Francken confirmait une nouvelle fois que la présence d’ONG menant des opérations de sauvetage constituait un « appel d’air » pour les réfugiés. « Cet appel d’air est incontestable. Pourquoi ces gens partent-ils ? Si on achète un ticket pour un tel bateau, tu achètes aussi un ticket d’accès à l’Europe », affirme-t-il.7 Une étude réalisée par deux chercheurs d’Oxford démontre cependant que cet appel d’air est un mythe.

    Réduire les opérations de sauvetage ne fera qu’augmenter les noyades
    En effet, une étude réalisée par les chercheurs Elias Steinhilper et Rob Gruijters de l’université d’Oxford8 nous apprend que cet appel d’air est un mythe. Les deux chercheurs ont comparé les périodes comptant de nombreuses missions de sauvetage et celles où elles étaient faibles. Leur conclusion est que les missions de sauvetage n’ont aucune influence sur le nombre de personnes tentant la traversée. Réduire les opérations de sauvetage n’aurait que comme conséquence d’augmenter le nombre de noyades expliquent les deux chercheurs.

    Francken préfère cependant se ranger derrière l’avis de Frontex, qu’il considère comme « une voix importante. Celle des gens se trouvant sur le terrain. Qui est tout aussi importante que les recherches d’un professeur d’université ? »9.

    La seule manière véritable d’arrêter les noyades est d’améliorer les conditions d’accueil dans la région et d’ouvrir des procédures d’accès légales et sûres, basées sur des critères clairs, pour pouvoir se rendre en Europe afin d’y recevoir une protection internationale. Il faut en effet des corridors humanitaires. De sorte que les gens qui veulent demander asile et protection en Europe ne doivent plus recourir à des passeurs au risque de leur vie.

    1.https://theintercept.com/2017/04/01/europe-keeps-its-rescue-ships-far-from-the-coast-of-libya-where-thousa
    2. La Dernière Heure, 18 avril 2017
    3. Myria (Centre fédéral Migration), La migration en chiffres et en droits, 2015, p.54
    4. Le lien de cette lettre se trouve dans l’article de Zach Campbell https://theintercept.com/2017/04/01/europe-keeps-its-rescue-ships-far-from-the-coast-of-libya-where-thousa
    5. Organisation Internationale pour les Migrations (IOM), à la date du 4 avril
    6. Die Welt, 27 février 2017
    7. De Morgen, 2 avril 2017
    8. https://www.law.ox.ac.uk/research-subject-groups/centre-criminology/centreborder-criminologies/blog/2017/03/border-deaths
    9. De Morgen, 2 avril 2017

    #frontex #Zach_Campbell #union_européenne #commission_européenne #Triton #schengen #Mare_Nostrum #Belgique #theo_francken

  • Il y a 40 ans, le premier clash Solidaire - Han Soete - Jonathan Lefèvre - 10 Avril 2017
    http://solidaire.org/articles/il-y-40-ans-le-premier-clash

    8 avril 1977, Angleterre. Un album débarque dans les bacs. Son titre est explicite : The Clash. C’est le premier album du groupe du même nom, qui débarquait de manière fracassante pour changer la musique et le monde. 
    Les Sex Pistols ont été le premier groupe punk a savoir sortir des squats pour affronter les studios de TV de la BBC. Leur slogan : « No future ». Sur tout le continent européen, le chômage sévit chez les jeunes. Beaucoup se reconnaissent dans le nihilisme des Sex Pistols, d’Iggy Pop, des Ramones et autres groupes punk de cette époque. 

    The Clash , fondé en 1976, a emprunté une autre voie, celle de l’engagement dans la musique. « Je crois dans le socialisme, parce qu’il est plus humain, affirmait le chanteur Joe Strummer dans une interview. Il faut choisir au-delà du chacun pour soi, de l’égoïsme ou de ces salauds d’hommes d’affaires qui vont ramasser du pognon à la pelle. J’ai décidé pour ma part de considérer la société sous cet angle et de prendre mes décisions sur base de cela. C’est pourquoi je crois dans le socialisme. » Outre Strummer au chant et à la guitare, les Clash sont composés de Paul Simonon à la basse, Mick Jones à la guitare et Topper Headon à la batterie.

    Appel à la révolte


    En mars 1977 sort le premier morceau du groupe : White Riot (Émeute blanche). La chanson parle des émeutes du carnaval de Notting Hill de l’été 1976 où des jeunes Noirs ont affronté la police. Joe Strummer, qui a participé à la révolte des jeunes avec le guitariste Mick Jones, appelle les jeunes de la classe ouvrière à se révolter aussi contre le pouvoir.

    Un mois plus tard sort leur premier album, The Clash. Sur Career opportunities, ils parlent de la situation socioéconomique en Angleterre, du chômage des jeunes et du manque d’emplois corrects. En guise d’alternative, tout ce qu’on fait miroiter aux jeunes, c’est une carrière dans l’armée ou dans la police. La petite phrase « I won’t open letter bombs for you » (Je ne vais pas ouvrir des lettres piégées pour vous) renvoie à un boulot que le guitariste Mick Jones avait eu auprès de l’État britannique. Il devait ouvrir des lettres pour voir si celles-ci n’étaient pas piégées. 

    La bande sonore des années Thatcher et Reagan


    Les Clash connaissent sa grande percée avec son troisième album, London Calling, qui ne contient pas un, mais deux disques. Ils exigent cependant de leur maison de disques que le prix de ce double album soit le même que pour un simple. Enregistré en 1979, soit l’année où Margaret Thatcher est arrivée au pouvoir, « l’appel de Londres » va asseoir la popularité du groupe.

    Aujourd’hui encore, l’album, sorti dans les bacs en janvier 1980, est considéré par la revue Rolling Stone comme le meilleur album de cette décennie. 

    Dans London Calling, les Clash explorent des voies musicales plus larges. Le groupe s’essaie au reggae, à la pop, au rockabilly, au blues… Et presque chaque chanson a, comme dans les albums précédents, un sens politique. 


    L’album suivant, Sandinista !, un triple LP de 36 morceaux, est leur album le plus diversifié, mais aussi le plus difficile d’accès, le plus bordélique. Peut-être le plus riche aussi. Les Clash poursuivent leur voyage musical et politique et découvre le hip-hop, un genre qui a vu le jour quelque temps auparavant à New York, qu’ils intègrent à leur catalogue d’influence. Sur le plan musical, l’album annonce longtemps à l’avance la percée de la musique du monde et de son métissage avec la pop et le rock, qui se popularisera vers la fin des années 1980. L’accueil de la presse spécialisée est glacial, mais Sandinista ! allait finir par acquérir le statut de disque culte.

    Sandinista ! sort à une époque où, dans bien des pays – en Belgique notmamment – des gens de gauche et des syndicalistes se rendent au Nicaragua pendant leurs congés pour contribuer la révolution. Aussi la révolution sandiniste (le mouvement socialiste au Nicaragua) et l’anti-impérialisme (Washington Bullets) occupent-ils une position centrale.

    Combat rock


    En 1982 sort Combat Rock, le cinquième album du quartet. Le disque fait du groupe le plus grand groupe de rock du moment. Pendant 61 semaines, il ne quittera pas les charts américains.

    Entre-temps, les membres des Clash continuent en tant que militants politiques à participer à chaque combat de leur époque. Lors de la montée du Front national britannique (extrême droite), ils participent à la campagne « Rock Against Racism ». Et quand les mineurs entament leur grève historique contre Thatcher, les Clash vont jouer aux piquets de grève. 


    Lors de leurs tournées, sans argent en poche, ils vont parfois passer la nuit chez des fans. Une manière pour eux de rester connectés au monde, aux problèmes économiques, à l’injustice, au racisme… Le groupe se dissout en 1984 en raison de frictions internes et des problèmes de drogue du batteur Topper Headon. Il n’aura pas existé pendant dix ans mais aura changé la musique et inspiré des millions des jeunes dans le monde entier. En guise d’épitaphe du groupe, Joe Strummer résumera : « On est venu, on a dit ce qu’on avait à dire, on s’est cassé. »

    Et aussi https://seenthis.net/messages/574340 (Articles repérés par Hervé Le Crosnier)
    #The_Clash #rock #punk #musique_et_politique #Angleterre #margaret_thatcher #Nicaragua #Rock_Against_Racism

  • Naomi Klein : « Le cabinet de copains de Trump a peut-être l’air très fort, mais ces gens ont peur » Solidaire - Naomi Klein - 15 Février 2017

    L’activiste canadienne Naomi Klein voit dans le nouveau gouvernement des États-Unis un coup d’État très clair des grandes entreprises. Dans un article qu’elle a écrit pour The Nation et que nous publions ci-dessous traduit en français, elle explique comment ce coup d’État a été inspiré par la peur. En effet, dans le monde entier, l’influence des mouvements sociaux qui menacent les intérêts de l’establishment ne cessent de croître. Klein estime donc que ces mouvements ont désormais une tâche difficile mais nécessaire. Et que « nous pouvons toujours les vaincre ».

    Zoomons sur Washington et observons ce qui s’y passe. Les gens qui possèdent déjà une part absolument obscène de la richesse de notre planète, et dont la fortune ne cesse d’augmenter d’année en année – les derniers chiffres montrent que huit hommes possèdent autant que la moitié de l’humanité –, sont bien déterminés à s’emparer d’encore davantage. Les personnalités-clés qui composent le cabinet de Donald sont non seulement des ultra-riches, mais ces individus ont amassé leur argent en nuisant aux personnes les plus vulnérables de notre planète, et à la planète elle-même. Cela fait apparemment partie du profil requis pour le job.

    Les gens qui possèdent déjà une part absolument obscène de la richesse de notre planète sont bien déterminés à s’emparer d’encore davantage.
    Il y a le banquier des produits pourris, Steve Mnuchin, le choix de Trump pour occuper les fonctions de ministre van Finances. Sa « machine à expulsions », illégale, a mis des dizaines de milliers de gens à la porte de leur logement.

    Passons des hypothèques à la malbouffe, c’est-à-dire à Andrew Puzder, que Trump a nommé ministre de l’Emploi. En tant que CEO de son empire du fast-food, cela ne lui suffisait pas de payer ses travailleurs d’un salaire scandaleux tout à fait insuffisant pour vivre, mais son entreprise a également été condamnée pour vol dans divers procès : des travailleurs n’étaient pas payés pour leur tâche et pour leurs heures supplémentaires.

    Après la malbouffe, la fausse science. Pour diriger les Affaires étrangères, Trump a désigné Rex Tillerson. En tant que cadre de direction puis CEO d’Exxon Mobil, Tillerson a financé des recherches prétendument scientifiques et en amplifié la diffusion, tout en exerçant en coulisses un lobbying intense contre les actions internationales totalement pertinentes en faveur du climat. Ces manœuvres ont fortement contribué au fait que le monde a perdu des décennies pour sortir des combustibles fossiles et ont grandement accéléré la crise climatique. En conséquence, d’innombrables personnes perdent déjà actuellement leur habitation à cause de tempêtes et de la montée du niveau des océans, meurent à cause de sécheresses et de canicules et, au bout du compte, des millions de gens verront leur pays être submergé par les eaux. Comme toujours, les gens qui sont frappés en premier lieu et le plus fortement sont les plus pauvres, et essentiellement des non-Blancs.

    Des logements volés. Des salaires volés. Des cultures et des pays volés. Tout cela est immoral. Et tout cela rapporte énormément d’argent.

    Sous le feu
    Mais un contre-courant populaire s’est développé. Et c’est précisément la raison pour laquelle ce gang de CEO – et les secteurs dont ils sont issus – se sont inquiétés à juste titre de voir leur fête approcher de la fin. Ils ont pris peur. Les banquiers comme Mnuchin se rappellent l’écroulement financier de 2008, lors duquel on a ouvertement parlé de nationalisation des banques. Ils ont assisté à la montée du mouvement Occupy et vu la résonance qu’a eue le message anti-banques de Bernie Sanders durant sa campagne.

    Des patrons du secteur des services comme Andrew Puzder ont une peur bleue de la force croissante de Fight for $15 (le mouvement qui lutte pour le salaire horaire minimum de 15 dollars, NdlR), qui a engrangé des victoires dans des villes et des États de tout le pays. Et, si Bernie avait gagné cette primaire qui fut étonnamment serrée, le mouvement aurait bien pu avoir un champion à la Maison blanche. On peut imaginer l’effroi que cela représente pour un secteur qui repose fondamentalement sur l’exploitation du travail afin de maintenir les prix très bas et les profits très hauts.

    Il ne faut pas se leurrer : le mouvement pour le climat constitue pour Exxon Mobil une menace existentielle.
    Et personne n’a plus de raisons de craindre la montée des mouvements sociaux que Tillerson. Suite à l’essor mondial du mouvement pour le climat, Exxon Mobil est sous le feu sur tous les fronts. Des oléoducs transportant son pétrole sont bloqués non seulement aux Etats-Unis mais aussi ailleurs dans le monde. Les campagnes pour le désinvestissement s’étendent comme des feux de forêt et entraînent l’incertitude pour les marchés. Et, au cours de l’année dernière, diverses tromperies effectuées par Exxon ont fait l’objet d’enquêtes judiciaires. Il ne faut pas se leurrer : le mouvement pour le climat constitue pour Exxon Mobil une menace existentielle. Les objectifs concernant le réchauffement de la Terre figurant dans les accords climatiques de Paris sont totalement incompatibles avec la consommation de tous les combustibles fossiles que des entreprises comme Exxon ont dans leurs réserves, ce qui constitue la source de leur valeur sur le marché. C’est pourquoi les propres actionnaires d’Exxon ont posé de plus en plus de questions embêtantes pour savoir s’ils étaient sur le point de se retrouver avec des paquets d’actions n’ayant plus aucune valeur.

    Le monde de l’entreprise prend le contrôle du gouvernement
    Telle est la toile de fond de la victoire de Trump. Nos mouvements ont commencé à gagner. Je ne dis pas qu’ils étaient assez forts. Ils ne l’étaient pas. Je ne dis pas que nous étions suffisamment unis. Nous ne l’étions pas. Mais quelque chose était bel et bien en train de basculer. Et, plutôt que de courir le risque que les mouvements continuent à progresser, ce gang de porte-parole de l’industrie des combustibles fossiles, de colporteurs de malbouffe et de prêteurs prédateurs se sont alliés pour prendre le contrôle du gouvernement et protéger leurs richesses mal acquises.

    Trump et ses lieutenants rigolent bien des faibles protestations quant aux conflits d’intérêts – toute l’affaire n’est qu’un seul très grand conflit d’intérêts.
    Que ce soit clair : ceci n’est pas un changement pacifique du pouvoir. C’est une prise de contrôle des commandes par le monde de l’entreprise. Ceux qui achetaient les deux plus grands partis pour défendre leurs intérêts ont décidé qu’ils en avaient marre de jouer le jeu. Apparemment, tous ces dîners fins avec les politiciens, toutes ces cajoleries et pots-de-vin légalisés insultaient leur sentiment de pouvoir de droit divin.

    Désormais, ils suppriment l’intermédiaire et font ce que tout grand chef fait quand il veut que quelque chose soit fait comme il l’entend : ils le font eux-mêmes. C’est Exxon qui est ministre des Affaires étrangères. C’est Hardee qui est ministre de l’Emploi. C’est General Dynamics qui est ministre de la Défense. Et, pour tout le reste, ce sont les types de Goldman Sachs. Après avoir privatisé l’État par petits morceaux pendant des décennies, ils ont décidé de s’emparer du gouvernement lui-même. La dernière frontière du néolibéralisme. C’est pourquoi Trump et tous ses lieutenants qu’il a nommés rigolent bien des faibles protestations quant aux conflits d’intérêts – toute l’affaire n’est qu’un seul très grand conflit d’intérêts.

    Surfer sur la peur de Trump
    Bon, alors, que faisons-nous ? En premier lieu, nous devons toujours nous rappeler leurs faiblesses, même s’ils exercent le pouvoir de manière brute. La raison pour laquelle le masque est tombé et que nous voyons maintenant sans fard la manière dont les grandes entreprises dirigent les choses, ce n’est pas parce que ces grandes entreprises se sentaient toutes-puissantes, c’est parce qu’elles étaient en panique.

    Une partie de la base de Trump regrette déjà son vote, et cette partie ne fera qu’augmenter.
    En outre, une majorité d’Américains n’a pas voté pour Trump. 40 % sont restés chez eux et parmi ceux qui sont allés voter, une nette majorité a voté pour Clinton. Trump a gagné grâce à un système truqué. Et même dans ce système, il n’a pas gagné. Ce sont Clinton et l’establishment du Parti démocrate qui ont perdu. Trump n’a pas gagné avec un enthousiasme débordant et un haut pourcentage de voix. L’establishment du Parti démocrate n’a pas jugé important de mener campagne autour d’améliorations concrètes de la vie des gens. Ils n’avaient pour ainsi dire rien à offrir aux gens dont la vie a été ruinée par les attaques néolibérales. Ils ont pensé qu’ils pouvaient surfer sur la peur de Trump, et cela n’a pas marché.

    La bonne nouvelle, c’est : tout ceci rend Donald Trump incroyablement vulnérable. C’est le type qui est arrivé au pouvoir en racontant les plus gros et les plus éhontés de mensonges, en se vendant comme le champion des travailleurs qui s’opposerait enfin au pouvoir des grandes entreprises et à leur influence à Washington. Une partie de sa base regrette déjà son vote, et cette partie ne fera qu’augmenter.

    L’heure est à l’optimisme
    Qu’est-ce qui nous attend d’autre ? Ce gouvernement va très vite tomber sur le dos de tout le monde. On parle d’un budget du « choc et de l’effroi », (« shock and awe » est un terme militaire qui désigne l’écrasement de l’adversaire et l’anéantissement de sa volonté de combattre par l’emploi d’une très grande puissance de feu et des démonstration de force spectaculaires, NdlR) : en dix ans, 10 trillions ( c’est-à-dire 10 milliards de milliards) de dollars seront supprimés. La tronçonneuse sévira sur tout, des programmes contre la violence envers les femmes aux arts, du soutien aux énergies renouvelables aux polices de proximité. Ils pensent clairement que cette stratégie de Blitzkrieg va nous renverser. Mais ils pourraient être surpris – cela pourrait bien tous nous unir pour une cause commune. Si l’ampleur de la Marche des femmes en est un signe, nous sommes alors bien partis.

    Ce gouvernement va très vite tomber sur le dos de tout le monde.
    Construire des coalitions solides en des temps de politique de bunker est un dur travail. Il faut affronter des questions difficiles avant que le progrès soit possible. Et le financement de fondations et la culture de la célébrité parmi les activistes peuvent monter les gens et les mouvements les uns contre les autres au lieu d’encourager la collaboration. Mais les difficultés ne peuvent pas mener au désespoir. Pour reprendre une phrase populaire de la gauche en France, « l’heure est à l’optimisme, laissons le pessimisme pour des temps meilleurs ».

    Personnellement, je ne peux pas vraiment mobiliser de l’optimisme. Mais, en ce moment où tout est menacé, nous pouvons et nous devons faire appel à notre détermination la plus inébranlable.

    Naomi Klein

    #Naomi_Klein #Etats_Unis #Trump #Peur #mouvements_sociaux #establishment #Steve_Mnuchin #malbouffe #Andrew_Puzder #fausse_science #Rex_Tillerson #Exxon_Mobil #Climat #vol #CEO #Mnuchin #Andrew_Puzder #prêteurs_prédateurs #General_Dynamics #Goldman_Sachs #Hardee #shock_and_awe #Blitzkrieg

  • Des entreprises allemandes s’arrangent pour payer des salaires de misère illégaux Solidaire - Susan Bonath (junge Welt) - 14 Février 2017
    http://solidaire.org/articles/des-entreprises-allemandes-s-arrangent-pour-payer-des-salaires-de-misere-

    Le secrétaire d’État à la Lutte contre la fraude fiscale Philippe De Backer (OpenVLD) veut davantage de flexi-jobs. Il a également démantelé l’Inspection sociale. Les mini-jobs et des contrôles très affaiblis forment un cocktail dangereux : c’est ce que montre la situation en Allemagne. Dans ce pays, des millions de travailleurs ne gagnent même pas le salaire minimum, les entreprises falsifiant les heures de travail comptabilisées, explique le journal allemand Junge Welt. Est-ce vraiment la direction que doit prendre la Belgique ?

    En Allemagne, malgré l’instauration du salaire minimum, la situation de millions de gens ayant un mini-job ne s’est pas du tout améliorée. Quand il s’agit de contourner le salaire minimum, de nombreuses entreprises se montrent bien plus inventives que ce qu’on aurait pu imaginer. En Allemagne, en 2015, près de la moitié des gens ayant un mini-job ont dû se contenter in fine d’un salaire horaire brut au-dessous de 8,50 euros. Une personne sur cinq ayant un mini-job perçoit même moins de 5,50 euros de l’heure. Tel est le constat d’une étude réalisée par le Wirtschafts- und Sozialwissenschaftliche Institut (WSI, Institut d’économie et de sciences sociales, qui collabore étroitement avec les syndicats) et présentée au début de ce mois de février.


    Le salaire minimum n’a donc apporté qu’une amélioration minime à la situation des gens ayant un mini-job, constatent les auteurs de l’étude, Toralf Pusch en Hartmut Seifert. Avant l’instauration du salaire minimum en 2014, environ 60 % des gens ayant un emploi précaire gagnaient moins de 8,50 euros per heure. Une demi-année après l’entrée en application effective du salaire minimum, c’était toujours le cas pour 44 % de ces travailleurs. La plus grande partie d’entre eux touchait maximum 7,50 euros.

    Les victimes du système sont en majorité des femmes
    « Les salaires horaires extrêmement bas sont certes devenus plus rares, mais il sont loin d’avoir disparu », précisent les chercheurs, qui mettent par ailleurs en garde : « Le non-respect de la loi sur le salaire minimum commence à faire partie du système des conditions de travail problématiques qui sont très souvent la caractéristique des mini-jobs. » Des études précédentes avaient déjà montré que les personnes travaillant dans un mini-job n’étaient souvent pas payées en cas de maladie ou quand elles prenaient leurs congés, alors même qu’elles y ont légalement droit.

    Pour les auteurs, le résultat de cette étude indique donc qu’ « il ne suffit pas d’instaurer légalement un salaire minimum ». Selon eux, il faudrait que des contrôles soient appliqués dans tout le pays. Mais ceux-ci ne résoudront pas à eux seuls le problème de la pauvreté due aux bas revenus. « Le salaire minimum est désormais fixé à 8,84 euros, ce qui est toujours au-dessous du seuil de bas salaire d’environ 9,50 euros », soulignent les chercheurs. Le vice-président du groupe de Die Linke (la gauche) au Parlement fédéral allemand, Klaus Ernst, a parlé de tromperie qui devait enfin être sanctionnée. Ernst a insisté sur le fait que ce sont le plus souvent des femmes qui sont victimes de ce système et il a déclaré qu’il était « intolérable que ce modèle d’exploitation soit en plus encore subsidié par l’État par des primes sociales supplémentaires ».

    Se taire de peur de perdre son travail
    L’étude n’explique pas de manière précise comment le salaire minimum est contourné, alors que les entreprises sont légalement tenues de comptabiliser le temps de travail de manière correcte. Mais un des auteurs de l’étude, Toralf Pusch, déclare dans une interview à Junge Welt que « l’on s’y prend clairement de manière très créative. Dans la pratique, cela a souvent l’air correct sur papier, mais le temps de travail effectivement presté est en réalité bien supérieur à ce qui est mentionné ». Les travailleurs pourraient dénoncer ce fait, mais ils se taisent par peur de perdre leur travail.

    Pour leur étude, les chercheurs ont analysé le « panel socio-économique » et le « panel marché du travail » qui rassemblent les informations du Deutsche Institut für Wirtschaftsforschung (DIW, Institut allemand de recherche économique) collectées auprès de 27 000 personnes et de l’Institut für Arbeitsmarkt- und Berufsforschung (IAB, Institut de recherche sur le marché du travail et la formation professionnelle) auprès de 13 000 personnes à propos de leurs conditions de vie et de travail. Les travailleurs ayant un mini-job pour lesquels ont été fixés en 2015 des salaires minimum plus bas au niveau sectoriel – comme les livreurs de journaux et les coiffeurs –, ont été le plus possible écartés de l’étude, expliquent les chercheurs. Les stagiaires et les chômeurs de longue durée, à qui le salaire minimum ne s’applique pas, n’ont pas non plus été pris en compte. Les travailleurs pris en compte par l’étude sont ceux pour qui le mini-job ne constitue pas un travail complémentaire mais bien l’emploi principal. Selon la Bundesagentur für Arbeit (l’agence fédérale allemande pour l’Emploi), il s’agit de près de 5 millions de personnes sur les 7,4 millions ayant un mini-job.

    #Allemagne #flexi-jobs #salaire_minimum #mini-job #conditions_de_travail #Femmes #misère #pauvreté

  • Des maisons de repos sans soins ? Solidaire - Michelle Heijens - 3 Février 2017
    http://solidaire.org/articles/des-maisons-de-repos-sans-soins

    Aujourd’hui, travailler dans une maison de repos n’a rien d’une partie de plaisir. Le personnel soignant tire la sonnette d’alarme : neuf soignants sur dix estiment que les personnes âgées ne reçoivent plus les soins dont elles ont besoin à cause de la pression croissante sur le personnel. Comment en est-on arrivé là ?


    Nous voulons tous que nos vieux jours et ceux de nos parents ou grands-parents soient agréables. Or cela devient de moins en moins évident. C’est ce qui ressort d’une enquête de la CSC. Le syndicat a interrogé plus d’un millier de membres du personnel soignant dans le secteur des maisons de repos. Les résultats sont consternants. 87 % des soignants estiment que les résidents des maisons de repos ne reçoivent pas les soins nécessaires. La mission principale de ce secteur – dispenser des soins – ne peut plus être assurée. Il est donc logique que les tâches moins indispensables, mais pourtant également très importantes, ne puissent être effectuées. Quatre soignant(e) sur cinq disent ne pas avoir le temps d’écouter les préoccupations des personnes âgées. Le manque de personnel mène même à des erreurs et à des accidents. Près de quatre sur dix signalent qu’au cours de la dernière année, le manque de personnel a entraîné des incidents comme l’octroi d’une mauvaise médication ou une chute d’une personne âgée.

    Choisir entre du personnel supplémentaire ou des langes
    Voilà pour ce qui est des chiffres. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement pour les résidents et pour le personnel ? Un membre du personnel soignant d’une maison de repos témoigne : « Le matin, nous sommes deux pour faire la toilette de 24 personnes. C’est un travail intensif. Tout doit être fait entre sept heures et neuf heures et demie. À neuf heures et demie, les résidents doivent être attablés pour le petit déjeuner. Le soir, on commence à les mettre au lit à six heures. Ils doivent être couchés à huit heures parce qu’après il n’y a plus assez de personnel. Pour moi, le plus grave, c’est que nous ne pouvons plus rien faire d’autre avec les gens. On n’a même plus le temps pour papoter un peu avec eux. Dernièrement, on nous a dit qu’on pourrait peut-être avoir une personne soignante en plus si on ne devait pas dépenser autant en langes. Je trouve ça vraiment grave : on ne peut avoir une personne en plus que si on laisse les personnes âgées dans des langes sales ! On économise déjà maintenant sur la nourriture des résidents. Et il faudrait en plus économiser sur les langes ? Et ça, alors que les résidents paient 1 700 euros par mois. »

    Pas le temps d’un peu parler avec les personnes âgées
    Tant les chiffres que les témoignages de l’enquête montrent les conséquences atterrantes du manque de personnel dans les soins aux personnes âgées. Comment en est-on arrivé à ce manque de personnel ? Une première cause est le sous-financement des soins pour les personnes de grande dépendance. Ces dernières années, le nombre de ces personnes a augmenté jusqu’à 14 000. À cause du manque de lits, le gouvernement incite les personnes âgées à rester le plus longtemps possible chez elles. Ce n’est que quand ce n’est vraiment plus possible autrement que l’on entre dans une maison de repos. Ce qui fait que trois personnes âgées sur quatre en maison de repos ont aujourd’hui besoin de soins intensifs. Mais les maisons de repos et de soins ne reçoivent pas l’argent nécessaire à ces soins intensifs. Le personnel en place doit donc faire plus avec moins. Avec, comme conséquence, que le personnel n’a plus la possibilité de converser avec les résidents. Pour nombre d’entre eux, aller au lit à six heures du soir est une réalité.

    Deuxième cause : les normes basses en matière de personnel. Une récente étude de Steunpunt Welzijn, Volksgezondheid en Gezin (bien-être, santé publique et famille) nous apprend que les homes pour personnes âgées ont plus de personnel en service que ce qui est prescrit par la loi. La norme légale est si basse que le secteur public emploie quatre soignants en plus par dix travailleurs que ce qui est légalement exigé. Ce personnel supplémentaire n’est pas financé par les pouvoirs publics. L’argent provient principalement des résidents qui année après année doivent payer de plus en plus cher. En décembre dernier, on constatait que le prix du séjour dans une maison de repos avait augmenté pour atteindre le prix moyen de 1 640 euros, sans compter les frais médicaux ou les frais de lessive.

    Diminuer la pression sur le personnel et les résidents
    Tant pour les résidents que pour le personnel, il est très important de réduire la pression de travail dans les maisons de repos et de soins. Pour les personnes âgées, c’est leur « chez eux ». Elle y passent en général chaque heure de la journée. Elles y mangent, y dorment, y vivent, et la personne soignante est parfois la seule personne à qui elles parlent dans une journée. Une norme d’encadrement plus haute et plus de financement pour le personnel constituent donc une nécessité. Mais il faut aussi un juste financement des lits pour personnes de grande dépendance, actuellement sous-financés. Le ministre flamand du Bien-Être Jo Vandeurzen (CD&V) a déclaré que le gouvernement flamand investira cette année 26 millions d’euros dans du personnel supplémentaire. Or selon l’étude de Welzijn, Volksgezondheid en Gezin, le coût total de personnel dans les maisons de repos et de soins pour personnes âgées s’élève à 2,4 milliards d’euros. Les 26 millions d’euros de subsides supplémentaires pour le personnel promis par le ministre Vandeurzen représentent donc 1,1 %. Des cacahuètes.

    Par ailleurs, il faut aussi penser de manière novatrice pour s’attaquer au problème de la forte pression de travail dans les maisons de repos. En 2014, les autorités de la Ville de Göteborg, en Suède, ont décidé de mener une expérience. Pendant deux ans, le personnel soignant de la maison de repos et de soins Svartedalen ne travaillerait plus que six heures par jour. Ce changement a eu un effet important sur le personnel soignant. La diminution de la pression et du stress a été très bénéfique. Le rapport est très clair à ce sujet. Trois quarts des soignants de Svartedalen se sentent bien, calmes et en forme. Les sentiments positifs se sont rapidement traduits par une évolution positive dans l’absentéisme pour maladie. Alors qu’à Svartedalen, le nombre total de jours d’absence pour maladie par membre du personnel était de quinze jours par an, dans d’autres maisons de repos il est 31 jours ! Par ailleurs, à Svartedalen, il y a trois fois moins de malades de longue durée que dans les autres maisons de repos. Chez nous, le personnel et nos vieux parents méritent aussi ces résultats positifs. 

    #maisons_de_repos #Personnel_soignant #EPHAD #Hospice #Retraite #Vieux #Fin_de_vie #France #Belgique #Civilisation #Civilisation #Infirmiére #personnes_âgées #Suède #Göteborg #Soins #parents #grands-parents #normes

  • « J’ai décidé de me faire baptiser. Nue. » Solidaire - Iman Ben Madhkour - 28 Décembre 2016
    http://solidaire.org/articles/j-ai-decide-de-me-faire-baptiser-nue

    Nous sommes en 2016 et, lors des baptêmes d’étudiants à la VUB, les étudiantes se font toujours intimider sur le plan sexuel. Le sexisme est d’ailleurs un problème qui sévit dans toute la société. Il est temps de remettre en question les normes dominantes sur le rôle de la femme.


    Il y a quatre ans, je débarquais à la Vrije Universiteit Brussel (VUB) comme jeune étudiante en sociologie. Pour moi, faire des études signifiait repousser ses limites, faire des choses dont on ne se serait pas cru capable, se mettre en quête de son identité réelle. Bien vite, j’ai été attirée par les cercles d’étudiants et leur folklore, ainsi que par leur « liberté de pensée ». 

    J’ai décidé de me faire baptiser. Nue. L’idée sous-jacente – tout le monde est égal quel que soit son contexte social, économique ou culturel – était quelque chose dans lequel je pouvais me retrouver. Dans la réalité, l’idéal de l’égalité entre homme et femme ne collait vraiment pas car, en tant que femme, on m’évaluait différemment d’un homme. Après le baptême, nous sommes sorties avec un petit groupe de bleues et on nous a adressé des remarques du genre : « Tiens, voilà celle avec ses beaux nichons ! » 

    Ces derniers jours, il y a eu beaucoup de réactions à un article sur le sexisme dans les milieux étudiants qui est paru dans le journal étudiant de la VUB De Moeial. Un article dont l’écriture a demandé du courage, car on sait que les réactions ne seront pas toujours positives. Mais, aujourd’hui, cela a lancé un débat qui, espérons-le, remettra en question les normes et valeurs en vigueur à propos du rôle de la femme dans la société. 

    Dominant (m), dominée (f)
    Les modèles de rôle pour les hommes et les femmes nous sont inculqués dès la maternelle. On nous en imprègne par les médias, le cinéma, la télévision et la publicité. Cela s’exprime différemment selon les endroits. Dans un quartier populaire, on vous sifflera peut-être ouvertement en pleine rue. Dans notre université, c’est en « tout honneur » que l’ancien doyen Willem Elias – après ses déclarations contestées qui justifiaient le viol après une plainte pour intimidation sexuelle – a pu présenter sa démission en tant que doyen et qu’il continue toujours à donner cours aujourd’hui. 

    À la maison, les femmes assument toujours le plus gros des tâches ménagères. Au travail, en Belgique, pour exactement les mêmes tâches, les femmes touchent toujours 9 % de moins que les hommes. Et, dans les cercles étudiants aussi, les modèles de rôle du séducteur dominant à la grande gueule (m) face au modeste et soumis objet de son désir (f) sont parfois renforcés par d’objectivantes élections de miss, des séances de baptême humiliantes et des traditions festives avec attouchements à la clé. La question n’est donc pas de savoir ce qui ne tourne pas rond dans la vie du cercle en soi – ce n’est d’ailleurs pas le cas – mais bien de savoir si l’on se penche suffisamment sur le contexte social et sociétal du sexisme. 

    Quelle (in)égalité ? 
    Ce n’est pas en élisant un « gigolo de l’année » en plus d’une « salope de l’année » lors des baptêmes étudiants qu’on va résoudre le fait que les femmes aujourd’hui gagnent moins que les hommes, exercent moins souvent des fonctions à responsabilités, bref, qu’elles ne sont pas perçues socialement comme les égales des hommes. Si, dans la mentalité dominante, la femme est systématiquement présentée comme un objet de désir, cela n’aidera pas, dans la vie à l’université, d’humilier de la même façon hommes et femmes. L’impact sera en effet bien plus sévère pour une femme que pour un homme, parce qu’elle subit ce genre d’humiliation dès sa plus tendre enfance. 
    Le sexisme ne se rencontre pas que dans les cercles étudiants, mais dans toutes les couches de la société, et il s’agit d’un problème structurel. Le sexisme divise la société en mettant en concurrence des personnes aux salaires différents. La reproduction (inconsciente) du sexisme au sein de nos cercles étudiants, de l’université et de la société, légitime à cet égard l’inégalité structurelle. 

    Un glissement des valeurs
    Le fait qu’il y a un aussi grand débat autour du sexisme est un signe positif. Celui ou celle qui a peur de ce débat au point de détruire des magazines présentant des articles critiques (une partie de l’édition de De Moeial avec l’article en question a été détruite par des inconnus) devrait peut-être s’interroger sur ce qu’il ou elle vient chercher dans une université qui, parmi ses principales valeurs, compte une culture du débat ouverte. Qu’un article paraisse aujourd’hui sur des phénomènes par lesquels le sexisme se reproduit dans notre société est la preuve que nos valeurs et normes sont en train de subir un glissement. Grâce au développement de la connaissance, les fausses idées et les préjugés ont fait place à la libre pensée. En tant que membres de la communauté universitaire, embrassons donc ces idées au lieu de nous figer sur nous-mêmes dès que nos (mauvaises) traditions sont remises en question. 

    Si votre but est de remettre en question les normes de la société, il faut vous attendre à une certaine résistance. Demandez donc ce qu’il en est à la femme courageuse qui a collecté les témoignages sur le sexisme dans la vie des cercles et qui les a fait connaître. Nous ne devons cependant pas nous laisser intimider par ces réactions, mais continuer à lutter pour notre bon droit et notre égalité. Pour cela, il est nécessaire que les hommes et les femmes, les étudiants baptisés et non baptisés conjuguent leurs efforts. Soyons le berceau d’une société sans sexisme, où l’homme et la femme peuvent l’un et l’autre se dire des égaux. Ce ne sera possible que lorsque les étudiants seront disposés à modifier cette mentalité et à entreprendre activement des démarches en vue de rendre nos cercles, notre université ainsi que notre société plus égalitaires. 
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    _ Les faits
    Dans le journal estudiantin de la VUB, De Moeial, quatre étudiantes ont témoigné des intimidations sexuelles subies durant le baptême des bleus. Les histoires concernant des « lap dances » forcées, des simulations de viols et l’élection d’une « salope de l’année » ont provoqué pas mal de remous à la VUB et en dehors. Iman Ben Madhkour est présidente de Comac-VUB, la section locale du mouvement étudiant du PTB. Elle aussi, en son temps, s’est fait baptiser. Dans cette tribune, elle exprime l’espoir de voir le débat remettre en question les normes et valeurs sur le rôle de la femme dans notre société. _

    #VUB #Belgique #Dominant #dominée #Université #Baptéme #Vrije_Universiteit_Brussel #Sexisme #Résistance #Femmes #Egalité #Etudiantes #Willem_Elias #Miss #Nue #Comac

  • La KUL aide Israël à améliorer ses techniques d’interrogatoires Solidaire - Robin Bruyère - 11 Décembre 2016
    http://solidaire.org/articles/la-kul-aide-israel-ameliorer-ses-techniques-d-interrogatoires

    Le 26 septembre 2016, une trentaine d’académiciens de la KUL (université catholique de Louvain) ont adressé une lettre ouverte à leur recteur Rik Torfs pour demander l’arrêt d’un partenariat académique avec une université israélienne. Celle-ci sert le gouvernement israélien pour améliorer ses méthodes illégales d’interrogatoires contre des Palestiniens.

    Presque toutes les universités belges ont des liens avec les universités israéliennes (via des partenariats académiques et financements de projets directs et indirects).1 Sachant que certains de ces établissements universitaires sont complices de crimes de guerres et collaborent à leur manière l’occupation, tout partenariat académique avec eux est déjà en soi un problème éthique. Par exemple, la KUL collabore avec l’université israélienne de Bar Illan et ce partenariat sert directement le gouvernement israélien dans sa traque de la résistance palestinienne.


    Le projet « Law Train » est coordonné par l’Union européenne dans le cadre de son plan Horizon 2020, le grand programme européen pour la recherche et l’innovation. Celui-ci contient des partenariats et projets internationaux de recherche, notamment avec Israël. Ce projet, financé avec de l’argent public par les fonds européens à hauteur de 5 millions d’euros, est organisé en collaboration avec les ministères de la Justice et de l’Intérieur de Belgique et d’Espagne, le ministère de la Justice portugais, mais aussi avec le ministère de la Sécurité publique israélien.2 Problème : ce ministère gère notamment la police et les prisons israéliennes. Bien que l’argent soit 100 % fourni par des fonds européens, le projet est coordonné officiellement par l’université de Bar Illan. Les partenaires israéliens reçoivent donc 2,3 millions d’argent public pour ce projet. 

    Lutter contre le terrorisme ou contre la résistance ?
    Le projet consiste en une recherche menée par les psychologues des différentes universités pour améliorer les techniques d’interrogatoires des services partenaires du projet (les services de police, de la justice et des prisons donc). En créant une plateforme virtuelle qui fabrique des prototypes de criminels, les psychologues peuvent tester de nouvelles méthodes d’interrogatoire plus efficaces et les uniformiser sur une base commune, au delà des différentes « culture, législations et méthodes ».3 Ceci afin de mieux « interroger des suspects dans le domaine du crime international ». L’objectif principal, d’après les textes du projet, est de lutter contre le terrorisme. Si la lutte contre le terrorisme en Europe est liée à la lutte contre les mouvements djihadistes et les attentats qu’ils perpètrent, la vision de l’État israélien du terrorisme est tout autre. L’État israélien qualifie de « terroriste » toute forme de résistance de la part du peuple palestinien contre l’occupation et les crimes qu’ils subissent. 

    Les « méthodes différentes » d’interrogatoire et de lutte contre le terrorisme en Israël correspondent par exemple à l’emprisonnement d’enfants de 12 ans pour complicité de terrorisme, le viol et diverses pratiques de torture physique et psychologique condamnées chaque année par les rapports d’Amnesty International, entre autres.
    Le 26 septembre dernier, une trentaine de chercheurs de la KUL ont donc adressé une lettre ouverte à Rik Torfs, leur recteur, pour exiger l’arrêt de ce partenariat. « La KU Leuven est objectivement complice d’une politique qui nie leurs droits les plus fondamentaux aux Palestiniens », expliquent ainsi les signataires de la lettre ouverte. « La police et les forces de l’ordre impliquées dans les prisons israéliennes ont été inculpées à de nombreuses reprises par des institutions internationales comme l’ONU et l’Union européenne, et par des organisations de défense des droits humains comme Amnesty International et Human Rights Watch. Elles sont critiquées pour diverses pratiques violant les droits humains fondamentaux : l’utilisation systématique de la violence, la torture et d’autres violations flagrantes des droits de l’Homme. Le siège de la police nationale est également situé à Jérusalem-Est, occupée illégalement par Israël. La coopération avec eux est contraire au droit international. La coopération avec le ministère israélien de la Sécurité publique et ses organismes d’application de la loi est par conséquent inacceptable d’un point de vue éthique, sinon juridique. »

    Soutenir les droits des Palestiniens
    Depuis son lancement, le PTB soutien la campagne de boycott académique à l’égard de l’État d’Israël (la campagne BACBI). Cet appel, signé par des centaines de professeurs et chercheurs, vise à mener le débat au sein des établissements universitaires pour mettre un terme aux partenariats académiques avec Israël. C’est par la pression et les actions politiques comme le boycott que des États d’apartheid comme l’Afrique du Sud ont fini par être renversés. L’État colonial qu’est Israël se renforce par ses nombreux soutiens extérieurs, notamment en recherche militaire et policière comme le projet Law Train. Ce projet soulève également l’indignation ailleurs, puisque le Portugal s’est retiré depuis lors du partenariat, sous la pression du mouvement de boycott.

    1. « Les liens entre la Belgique et l’occupation israélienne », Katarzyna Lemanska, 2014 • 2. www.law-train.eu • 3. http://cordis.europa.eu

    #KUL #Belgique #Louvain #Israel #union_européenne #fonds_européens #UE #UEF #Université #prisons #psychologue #palestine #torture #viol #police_israélienne #projet_law_train #résistance #partenariat_académique #droits_de_l_Homme #KU_Leuven

    • « Monsieur le Recteur Torfs, les violations des droits de l’homme ne sont pas un sujet de plaisanterie (de mauvais goût) »
      Publié le 14 décembre 2016
      http://www.pourlapalestine.be/monsieur-le-recteur-torfs-les-violations-des-droits-de-lhomme-ne-son

      Le recteur Torfs de la KUL a posté un tweet des plus condescendants à propos d’un article de Solidaire qui critiquait la participation de la KUL au projet de recherche « Law-Train » de l’UE, mis sur pied en collaboration avec une université israélienne et la police d’Israël. Le professeur émérite Herman De Ley réagit par le biais de la présente lettre ouverte.

      Cher et estimé Recteur Torfs,

      N’étant pas moi-même un usager de Twitter, j’ai été informé par quelques lecteurs indignés du tweet que vous avez fait circuler : « “La KU Leuven aide Israël dans ses techniques d’interrogatoire illégales.” Enfin, un peu d’humour dans le journal communiste Solidaire ! », et ce, à propos d’un article de ce périodique concernant la participation de la KU Leuven au projet « Law-Train » d’Horizon 2000.

      Par votre réaction, vous semblez à première vue mettre en doute les inquiétudes justifiées – les faisant même passer pour « ridicules », lis-je dans l’une des réactions – exprimées par certains collègues de votre propre institution. Plus encore, vous suscitez l’impression que la politique israélienne de violation du droit international et des droits de l’homme peut faire l’objet de plaisanteries (de mauvais goût).

      Mais sans doute cela avait-il trait au titre de l’article, « La KU Leuven aide Israël dans ses techniques d’interrogatoire illégales » ? À ce propos, je voudrais vous renvoyer aux « Ethical Guidelines and Ethical Procedures » (Directives et procédures éthiques) élaborées par l’Université coordinatrice de Bar-Ilan et qui engagent tous les partenaires du projet « Law-Train ».

      J’y lis les exigences suivantes : « Chaque partenaire respectera les lois et réglementations des autres pays partenaires participants » (par. 2.4) et « (…) ce concept est fondamental pour l’exécution de Law-Train » (ibid., p. 14). Mais il est possible que cette clause ait échappé aux commissions éthiques de votre université qui ont approuvé le projet. (...)

    • Monsieur Rik Torfs est diplomé en droit canonique, et membre du (CD&V).
      Il a travaillé pour la Roumanie sur les sujet de la protection des minorités religieuses.
      Il a participé aux Assises de l’Interculturalité en 2009.
      C’est dire le boulot qu’il a réussi à y faire

      Un trés sale bonhomme.

  • Après deux gouvernements non-élus, les Italiens votent pour la démocratie Solidaire - Marc Botenga - 5 Décembre 2016
    http://solidaire.org/articles/apres-deux-gouvernements-non-elus-les-italiens-votent-pour-la-democratie

      No ! » Les Italiens ont été clairs. Lors du référendum qui a eu lieu ce dimanche 4 décembre, ils ont majoritairement rejeté la réforme de la Constitution. Un message clair au social-démocrate Renzi, à toute la classe politique italienne, mais aussi à l’Union européenne : les gens veulent plus de participation populaire. Après deux gouvernements non-élus, les Italiens disent « Basta ! ».

    Le résultat du référendum est sans appel, avec un taux de participation de 65 % et 60 % des votants qui ont dit « non » au projet du premier ministre Matteo Renzi. Il s’agit d’un message clair des Italiens au social-démocrate Renzi, à toute la classe politique italienne, mais aussi à l’Union européenne. Un message de démocratie à cette classe politique qui a voulu exclure le peuple. Parce que c’est bien de cela qu’il s’agissait : une constitution moins démocratique, avec moins de participation populaire. Après deux gouvernements non-élus, les Italiens ont maintenant dit : Basta !


    Des gouvernements sans et contre le peuple
    La campagne pour le « Non » a en premier lieu été une campagne démocratique. Son succès est celui des militants de base et du travail de terrain d’une grande variété d’acteurs.

    Après la chute de Berlusconi, en 2011, l’Union européenne avait imposé – sans élections - Mario Monti comme premier ministre et ministre de l’économie. Ancien conseiller de la banque d’affaires Goldman Sachs et de Coca-Cola, Monti avait passé dix ans à la Commission européenne. Il en profitait pour faire passer des mesures d’austérité et des coupes dans les pensions. Monti avait aussi initié la réforme du marché du travail que Renzi terminera.

    En 2014, Renzi devient le deuxième Premier ministre (Président du Conseil, selon la terminologie italienne) non-élu en trois ans, remplaçant son collègue de parti Enrico Letta. Renzi se fait un ardent défenseur des « réformes structurelles » de l’Union européenne. Sa loi Peeters à lui, qu’il appelle « Jobs Act », facilitera les licenciements collectifs, et supprime l’article 18 de la loi du travail. Cet article 18, dont la portée avait déjà été fortement affaiblie, garantissait une protection en cas de licenciement illégal. Berlusconi avait essayé d’abolir cet article, mais les travailleurs italiens s’étaient mobilisés en masse. Sans aucun mandat populaire, Renzi a ensuite forcé la main, là où les gouvernements de droite avaient échoué.

    Marre
    C’est ce même Renzi, non-élu et anti-social, qui voulait maintenant réformer la Constitution à son image. Le Sénat ne serait plus élu directement, et proposer une loi au Parlement deviendrait plus difficile pour les citoyens. Pas question, rétorquent donc les Italiens en masse.

    Des années faites de cadeaux aux banques et aux multinationales, des années d’austérité et de concurrence européenne ont quasiment mis à genoux l’économie italienne. C’est aussi cette politique qu’a refusé la population. Pour Eleonora Forenza, parlementaire européenne italienne du groupe de la Gauche unie européenne (GUE/NGL), Renzi appliquait à la lettre ce que demandent le capital financier, l’Europe des banques et notamment la banque d’affaires américaine JP Morgan. En 2013, cette société financière américaine affirmait que les systèmes politiques des pays du Sud paraissaient inadaptées à favoriser une plus grande intégration de la zone européenne.

    Face à l’ampleur du désaveu de ce dimanche 4 décembre, Renzi a démissionné. Durant la campagne pour le référendum, il avait en effet annoncé qu’il démissionnerait en cas de victoire du « non ». Cela avait encore davantage transformé le référendum en plébiscite pour sa politique. Avec un résultat éloquent.

    Il n’est cependant pas sûr que la classe politique, ni l’Union européenne, comprenne réellement le message. Au sein de l’establishment, des voix s’élèvent pour que le président italien Sergio Matarella nomme un « gouvernement technocratique ». Le nom de Pier Carlo Padoan circule notamment. Padoan a été directeur du Fonds Monétaire international (FMI) et vice-secrétaire général de l’OCDE. Imposer un autre gouvernement technocrate pour appliquer la politique des banques et de l’Union européenne. Voilà la première réaction de ceux d’en haut.

    Un message solidaire à porter
    C’est se voiler la face que de penser pouvoir ignorer le message du référendum. La droite traditionnelle et le richissime Silvio Berlusconi l’ont bien compris. Ainsi, dans une première réaction, même d’anciens ministres de Berlusconi se présentent désormais comme anti-élite. L’extrême droite, elle, veut donner une interprétation étroitement nationaliste ou même raciste à ce référendum.

    Ce serait une grossière manipulation. La campagne pour le « Non » a été portée très largement. Elle a en premier lieu été une campagne démocratique. Son succès est celui des militants de base et du travail de terrain d’une grande variété d’acteurs. Le Mouvement des 5 Étoiles (Movimento 5 Stelle) de Beppe Grillo y a joué un rôle important, mais il y avait aussi le grand syndicat CGIL, tous les comités locaux et les syndicats de base. Des militants des syndicats de base USB étaient d’ailleurs les premiers à descendre dans la rue devant le siège du Premier ministre pour exiger sa démission.

    Un sentiment de colère justifiée se répand contre cette élite qui essaie d’exclure la population de la politique, ainsi qu’un dégoût justifié des politiques qui ne favorisent que les grandes fortunes. Les Italiens ont voté en masse contre un gouvernement asocial au service des banques, contre l’Europe de la concurrence, pour davantage de démocratie. Le défi pour la gauche, pour tous ces militants qui se sont battus corps et âme, sera de donner une expression politique à la hauteur des aspirations de la population. Ce vote prouve une nouvelle fois que l’Europe doit changer de cap. Soit nous construisons une Europe de la solidarité et de la coopération, soit des tendances nationalistes qui devraient rester au 20e siècle domineront les années à venir.

    #Italie #Renzi #référendum #Constitution #anti-social #banques #silvio_berlusconi #fmi #ocde #Basta

  • CETA : au Parlement européen, les socialistes et la droite cadenassent le débat _ Solidaire - 22 Novembre 2016 *
    http://solidaire.org/articles/ceta-au-parlement-europeen-les-socialistes-et-la-droite-cadenassent-le-de

    Le CETA, l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, vient d’arriver au Parlement européen. Une coalition des socialistes et des partis de droite veut forcer une procédure accélérée. Mercredi 23 novembre, l’enceinte parlementaire pourrait même refuser la saisine de la Cour de Justice sur les tribunaux spéciaux. Le PTB dénonce un coup de force antidémocratique et demande un référendum européen sur ce traité.

    La résistance wallonne contre le CETA oubliée, au Parlement européen, une « grande coalition », allant de la droite aux socialistes, promeut maintenant une approbation rapide du traité. L’objectif est d’en permettre l’application provisoire dès mars 2017, comme voulu par la Commission européenne.

    Les partis traditionnels craignent qu’un débat parlementaire au niveau européen fasse dérailler les projets de la Commission européenne. Sous pression des mobilisations syndicales et citoyennes, c’est ce genre de débat qui avait poussé les parlements wallon et bruxellois à refuser la signature du traité en octobre. Afin d’éviter toute entrave au traité, cheval de Troie pour les multinationales américaines, cette « grande coalition » étouffe le débat au parlement.

    La Commission commerce international du Parlement a ainsi refusé d’écrire la résolution habituelle. Même au sein de cette commission il n’y aura donc aucun débat approfondi sur le texte du traité. Socialistes et démocrates-chrétiens se sont ensuite servis de la dite « Conférence des présidents », où siègent les présidents des fractions parlementaires et le président - socialiste - du Parlement, pour écarter les opinions d’autres commissions. Ainsi, les opinions critiques de la commission Environnement et de la commission Emploi ne seront pas prises en compte. Même un débat sur la légalité du CETA a été écarté par la Conférence des présidents. Décision confirmée par un vote rapide lundi. Sans pression sur les députés européens, il y a fort à parier que la majorité du Parlement européen vote contre la saisine de la Cour de justice de l’UE sur la légalité du système des tribunaux spéciaux pour multinationales.

    Vu l’importance du traité, le groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE/NGL) a demandé au minimum le respect de la procédure parlementaire et l’implication des organisations de la société civile. La procédure traditionnelle implique notamment jusqu’à 6 mois de débats en profondeur dans les différentes commissions parlementaires. Une telle procédure permet aussi l’audition d’experts et de représentants de la société civile.

    Le PTB, membre associé de la GUE/NGL dénonce un coup de force antidémocratique. Il est inacceptable que les partis traditionnels cadenassent le débat démocratique. L’Europe a besoin de plus, pas de moins de démocratie. Il faut donc non seulement respecter les procédures parlementaires habituelles, mais aussi préparer un référendum européen sur ce traité. En septembre 2016, 320 000 personnes manifestaient en Allemagne contre les accords de libre-échange avec les États-Unis (TTIP) et le Canada (CETA). La majorité des Français se sont opposé aux négociations du TTIP. Outre les parlements wallon, bruxellois et de la Communauté française, le Sénat irlandais a également conseillé à son gouvernement de voter contre le CETA. Et en Autriche, en Slovénie, en Pologne et en Allemagne, on a hésité. Une pétition européenne a récolté plus de 3 millions de signatures, un record en Europe. Qu’on laisse s’exprimer les citoyens.

    #CETA #union_européenne #démocratie #PS #justice #TTIP #Canada #UE #commission_européenne #parlement_européen #tribunaux #Bruxelles

  • Belgique McKinsey : la multinationale qui s’installe à l’ULB Solidaire, Caroline De Bock 3 Novembre 2016
    http://solidaire.org/articles/mckinsey-la-multinationale-qui-s-installe-l-ulb

    McKinsey, une multinationale de la consultance, a une stratégie bien huilée pour s’implanter dans le paysage de l’enseignement en Belgique.

    Le Vif publiait récemment un article au titre éloquent : « Enseignement : l’étrange omniprésence des consultants de McKinsey ». L’entreprise a en effet été chargée par l’ex-ministre Joëlle Milquet de la consultance pour le Pacte d’Excellence, qui vise à réformer l’enseignement obligatoire. Des travailleurs de l’enseignement ou membres des syndicats et d’associations actives dans le dossier y témoignaient notamment : « L’enjeu de sa présence dans les travaux liés au Pacte d’Excellence est clairement de peser sur les politiques d’éducation ».

    McKinsey prévoit aussi de s’implanter dans le supérieur. Le lundi 10 octobre, le BEA, l’organe représentatif des étudiants de l’ULB, faisait savoir que « M. Englert, nouveau recteur de l’ULB, a exposé (…) un projet de partenariat avec l’entreprise de consulting McKinsey – dont l’un des anciens membres n’est autre que l’actuel président du Conseil d’Administration de l’ULB. L’entreprise financerait partiellement la construction, en échange de quoi l’ULB s’engagerait à lui louer une partie du bâtiment. »

    Le profit des sociétés ou le profit de la société
    Pourtant, McKinsey est clair dans ses intentions. Dans son rapport « Education to Employment – get Europe’s youth into work », l’entreprise affirme qu’ « une raison importante expliquant le taux de chômage chez les jeunes est un manque de compétences pertinentes pour le lieu de travail », qu’il faut que l’enseignement forme les jeunes dans ce sens, et se lie donc davantage aux entreprises.

    En filigrane, on peut y lire une vision de l’enseignement et de la recherche qui réponde strictement au besoin des actionnaires de faire fructifier leurs dividendes, et qui soit même un business en tant que tel. « Le consultant considère en effet l’école comme une entreprise d’enseignement », lit-on encore dans l’article du Vif.

    Le conseil étudiant de l’ULB dénonce également un problème symptomatique de la logique à l’œuvre dans la coopération avec McKinsey : le manque de transparence dans l’université. Les autorités voulaient en effet garder secret ce dossier, allant jusqu’à faire pression sur des étudiants administrateurs.

    Sous-financement chronique
    Les autorités de l’ULB affirment qu’il n’y a pas d’alternative à un financement extérieur privé, à cause du sous-financement de l’enseignement. Or elles ont récemment décidé d’investir plusieurs millions dans un nouveau bâtiment pour le rectorat alors que l’ancien était tout à fait utilisable. Ces millions auraient pu être investis dans la rénovation du grand auditoire Janson pour qu’il arrête de pleuvoir sur les étudiants, ou encore dans la construction du bâtiment de la Plaine afin d’éviter d’avoir recours à McKinsey.
    Cela dit, cet épisode montre comment le sous-financement chronique de l’enseignement pousse à sa privatisation. Un refinancement public de l’enseignement est indispensable afin de garantir un enseignement de qualité, public et accessible à tous.

    #Université #union_européenne #consultant #ULB #Délabrement
    #McKinsey #multinationales

  • Belgique : La crise chez Caterpillar ? Un choix _ Germain Mugemangango Solidaire.org
    http://solidaire.org/articles/la-crise-chez-caterpillar-un-choix


    Ce vendredi 2 septembre, la direction de Caterpillar a annoncé la fermeture du site de Gosselies (Charleroi). 2 200 emplois risquent de passer à la trappe. Une nouvelle étape dans la stratégie mondiale de la multinationale, dont le souci premier est de maintenir les dividendes le plus élevé possible pour les actionnaires.
    L’article ci-dessous a été écrit début octobre 2015, alors que le groupe Caterpillar annonçait la suppression de 10 000 emplois au niveau mondial. Au vu des événements de ce 2 septembre 2016, il apparaît toujours aussi pertinent...

    Voici déjà des années que la direction de cette multinationale harcèle les travailleurs avec sa « Vision 2020 ». Une « vision » qui prévoyait d’obtenir un chiffre d’affaire de 100 milliards de dollars et un dividende important par action (dividende de 20 dollars sur les 15 dernières années du plan). Le plus étonnant était de la voir marteler cette vision malgré la crise économique. Seulement, les chiffres sont là. Au lieu des 100 milliards annoncés, on est plutôt à une prévision de 48 milliards de dollars pour l’année 2015. Un chiffre d’affaire en baisse pour la troisième année.

    Enrichir les actionnaires, appauvrir les travailleurs
    Malgré la crise, Bill Gates a touché 30 millions de dollars de dividendes grâce à ses actions Caterpillar en 2014. Les dividendes ont continué à grimper ces dernières années alors que le chiffre d’affaire, et donc le nombre de machines vendues, était en diminution. Comment expliquer cela ? Ce sont les travailleurs qui ont rémunéré les actionnaires. En 2 ans, la multinationale a détruit 31 000 emplois 1 .

    Tout bénef pour la multinationale : un gain net en réduction de masse salariale, les travailleurs restants cravachent pour produire, le chômage économique permet à la direction de financer une partie de ses travailleurs sur le dos de la collectivité. C’est dans ce cadre-là qu’il faut comprendre l’annonce de ces 10 000 licenciements. 

    La stratégie de Caterpillar, qui est celle des autres multinationales, ne peut que mener au gouffre. La crise économique est créée par la sous-consommation des travailleurs et des États. Ainsi que par le sous-investissement des entreprises qui, vendant moins leurs produits, produisent moins et consomment moins d’énergie (ex : le charbon). Au delà des considérations éthiques et écologiques, la faillite du secteur minier de Caterpillar est générée par le faible niveau de production de l’industrie. Ce faible niveau de production est causé par la baisse de pouvoir d’achat des États et des particuliers. Or que fait Caterpillar ?

    Après avoir mis 31 000 travailleurs sur le carreau, la multinationale se propose d’en mettre à nouveau 10 000 dehors. Aggravant de ce fait le problème de sous consommation.

    Et si les dividendes étaient gelés pour 2015 ?
    Le plan de licenciement de Caterpillar doit rapporter à la boîte 1,5 milliard de dollar sur base annuelle.

    L’actionnariat de l’entreprise a reçu 1,635 milliard de dollars en 2014. En 5 ans (de crise), ils ont pompé 6,4 milliards de dollars aux travailleurs sous forme de dividendes2. Si la direction décidait un gel des dividendes pour l’année 2015, elle aurait l’argent nécessaire pour permettre le maintien de l’emploi. C’est donc un choix.

    À ce raisonnement on pourrait objecter que la multinationale a besoin de la bourse pour se financer. Or Caterpillar dispose de l’argent nécessaire pour se financer. En 2012, les entreprises américaines avaient accumulé un trésor de guerre de 1 450 milliards de dollars et Caterpillar n’a pas échappé à cette règle3. De plus, Caterpillar a procédé ces dernières années au rachat de ses propres actions pour un montant de 7,5 milliards de dollars et a déjà décidé de poursuivre d’ici 2018 ce rachat de ses propres actions pour un montant de 10 milliards de dollars. Soit assez d’argent pour protéger plus de 10 fois les 10 000 emplois menacés actuellement4.
    1. RTBF, 25 septembre 2015
    2. D’après les chiffres officiels parus dans la Review Cat 2014
    3. Easybourse.com, 20 mars 2013
    4. Zonebourse.com, 30 janvier 2014

  • Allemagne : les citoyens au secours de l’armée ? Jelpke Von Ulla, Solidaire.org
    http://solidaire.org/articles/allemagne-les-citoyens-au-secours-de-l-armee
    ❞ Le 24 août, à Berlin, le ministre fédéral allemand de l’Intérieur Thomas de Maizière (CDU) a présenté un nouveau plan de sécurité pour le pays. La protection de la population contre les catastrophes naturelles et les accidents y est à peine évoquée. Le plan, baptisé « Concept de défense civile », présente avant tout sur un scénario de guerre.

    Le nouveau plan décrète que la première tâche des citoyens et des autorités civiles est de porter assistance, non pas à la population menacée, mais à l’armée. Le « concept » souligne que tout doit être mis en œuvre pour protéger et aider le fonctionnement de l’État et des pouvoirs locaux, cela afin que la « liberté opérationnelle de l’armée » soit garantie. Vue sous cet angle, la « défense civile » est d’abord et avant tout une sorte d’engagement civil en cas de guerre.

    Le concept d’« évaluation de la menace » est expressément basé sur le « Livre blanc » (la nouvelle doctrine militaire récemment adoptée par Berlin, NdlR) de l’armée. Celui-ci fait état, depuis la fin de la Guerre froide, d’un rejet clair de la politique de détente. Les menaces les plus probables sont décrites comme des « conflits hybrides entre des adversaires étatiques ou non ». ❞
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    L’armée passe avant tout
    Le document ne donne pas (encore) de directives concrètes, il s’agit d’un « document conceptuel de base » déterminant le cadre fondamental que les différents ministères fédéraux doivent encore remplir de manière plus précise. Le message à l’adresse de ceux-ci est néanmoins clair : tout, et « dans tous les domaines », doit être en concordance avec les plans militaires de l’Otan.

    Jamais, depuis la fin de la Guerre froide, il n’y avait eu de prise de position aussi nette sur la législation liée aux situations d’urgence, et en particulier sur la loi concernant la réquisition de la main d’œuvre. La possibilité est notamment ouverte d’interdire de mettre fin à des contrats de travail qui ont une importance au plan militaire. L’Agence fédérale pour l’emploi se voit ainsi octroyer le droit, en cas de tension et de besoin de défense, de réquisitionner des personnes employées dans des « secteurs qui sont d’intérêt vital et importants pour la défense ». Cela ne vaut que pour les appelés militaires, et le « concept » envisage donc de rétablir le service militaire. Une loi à la majorité simple suffirait à cet effet. Le texte déplore par ailleurs que les femmes puissent « seulement être obligées d’effectuer des tâches en lien avec la santé civile » ou dans des hôpitaux militaires. Il propose donc d’examiner dans quelle mesure cette limitation serait encore « justifiée » – et le service militaire obligatoire pour les femmes pourrait donc également être envisagé. ❞
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    Le « Concept de défense civile »
    Le « Concept de défense civile » (Konzeption Zivile Verteidigung, KZV) souligne le « caractère inséparable de la défense militaire et la défense civile ». La « défense civile » a « la tâche de planifier et d’exécuter toutes les mesures civiles qui sont nécessaires à la mise en place et au maintien de la capacité de défense, y compris l’approvisionnement et la protection de la population. Cela comprend en particulier (…) le soutien des forces armées dans la mise en place et le maintien de leur capacité de défense et leur liberté opérationnelle. »

    « Le partenariat transatlantique dans le cadre de l’Otan est un des principes centraux. (…) Les directives stratégiques et conceptuelles de l’Otan à ce sujet ont ainsi également des conséquences sur le profil de capacité nationale. Pour leur planning, les ministères spécifiques doivent tenir compte à tous les niveaux (...) de ces directives. »
    « Les mesures de renforcement des bâtiments d’habitation et de travail sont recommandées, encouragées ou rendues obligatoires par le gouvernement fédéral » (pour la protection contre des attaques chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires, NdlR).

    Sur la « protection des cibles » : « Les cibles militaires et les cibles civiles ayant un intérêt militaire qui doivent être protégées seront identifiées selon les directives du ministère de la Défense et organisées en priorités. »

    « Le gouvernement fédéral peut prendre des mesures générales pour imposer des limitations dans toute la chaîne des denrées alimentaires en matière de disponibilité et d’obligation de distribution lorsqu’il s’agit de produire, transformer, distribuer et vendre des produits alimentaires. »

    « La loi sur la réquisition de la main-d’œuvre prévoit des compétences exceptionnelles pour l’État afin de réquisitionner des personnes en cas de nécessité pour des prestations pour la défense, y compris la défense civile, quand celles-ci ne peuvent pas être garanties sur une base volontaire. » ❞

  • « Nous refusons d’être la génération burn-out ! » Belgique 20 Mai 2016 Olivier Goessens


    Ce vendredi 20 mai, une vingtaine d’organisations de jeunes de tout le pays se sont rassemblées devant le cabinet du ministre du Travail Kris Peeters pour lancer une « Coalition des jeunes pour le retrait de la loi Peeters », bien décidée à organiser la résistance à sa réforme du travail.

    Les sections des jeunes des syndicats, les syndicats étudiants et les jeunesses politiques de gauche (dont Comac, le mouvement des étudiants du PTB) constituent ensemble la « Coalition des jeunes pour le retrait de la loi Peeters » (https://www.facebook.com/coalitionjeunes/?fref=ts ) et ont lancé un appel à rejeter cette loi. La Coalition a également annoncé vouloir mener des actions en faveur d’une alternative plus vivable. Car, aujourd’hui déjà, de nombreux jeunes souffrent du stress et de l’incertitude du travail flexible et des emplois intérimaires. « Nous n’allons pas devenir la génération du burn-out ! », ont-ils affirmé.


    L’action face au cabinet de Peeters a débuté par la lecture d’un certain nombre de témoignages saisissants de jeunes travailleurs, collectés par les Jeunes Ouvriers chrétiens (KAJ). Els Michiels, présidente des KAJ, explique que son organisation planche depuis très longtemps déjà sur cette problématique : « Il y a cinq ans, nous avons commencé à collecter des témoignages de jeunes dans les agences d’intérim. Nous en avons fait ’’Le livre noir de l’intérim’’ qui répertorie non seulement de multiples abus, mais dénonce également le système même qui place les jeunes dans des situations d’impuissance et d’incertitude. On ne peut pas faire de plans à l’avance, car on ne sait jamais quand on va devoir aller travailler. Le bénévole qui lit aujourd’hui les témoignages a encore reçu un coup de fil ce matin de son agence d’intérim. »

    « Si la loi Peeters passe, les jeunes n’auront tout simplement plus le contrôle sur leur vie », a ajouté Els Michiels en secouant la tête. Jeroen, des KAJ également, appuie sa présidente. « Je travaille à l’aéroport, où beaucoup de jeunes ont des contrats de 20 heures par semaine qui, en été, peuvent être portés à 10 ou 11 heures par jour, six jours sur sept. Et c’est un boulot pénible, vous savez, surtout en plein soleil. On tient ces jeunes au boulot avec la carotte du contrat à durée indéterminée, mais c’est une pure illusion. Ce qui est injuste dans ce système, c’est que les jeunes ne peuvent même pas choisir eux-mêmes quand ils veulent travailler plus ou moins. Le patron seul décide qu’ils doivent travailler plus en été et, en hiver, ils doivent rester chez eux. »


    L’appel de la coalition ne rejette pas seulement la loi Peeters, mais aussi la vision qui la sous-tend : « Des mesures pour créer de l’emploi de qualité existent. Les jeunes sont prêts à apporter des contre-propositions. À ce titre, nous défendons au contraire la réduction collective du temps de travail comme piste à explorer afin de travailler moins, de travailler tou.te.s et de pouvoir vivre mieux. »

    Mais, naturellement, les bons arguments ne suffisent pas pour faire revenir le gouvernement sur ses pas. Comme partout ailleurs en Europe où l’on essaie de libéraliser le marché de l’emploi, les jeunes Belges vont eux aussi devoir descendre dans la rue pour tenter d’y mettre le holà : « Face aux attaques du gouvernement sur l’ensemble des travailleurs et de la jeunesse, nous, élèves, étudiant.e.s, jeunes travailleur.se.s, jeunes chômeur.se.s, appelons tou.te.s les jeunes à se mobiliser pour le retrait du projet de Loi Peeters. »

    Les organisations membres de la coalition :

    ABVV-jongeren
    Jeunes FGTB
    ACV-jongeren
    Jeunes CSC
    FreeZbe – ACLVB jongeren
    FreeZbe – CGSLB jeunes
    FEF
    Unécof
    JOC
    KAJ
    Comac
    Ecolo-J
    Jong Groen
    Conseil de la jeunesse catholique
    Mouvement des jeunes socialistes
    Jongsocialisten
    ProjeuneS
    Les Faucons rouges
    Latitude jeunes

    Source : http://solidaire.org/articles/nous-refusons-d-etre-la-generation-burn-out

    #Belgique #loi_travail #union-eurpéenne

  • Cologne : Nous sommes tous en état de choc, mais à propos de quoi, en réalité ? Jens Berger 

    Le chroniqueur progressiste allemand Jens Berger a écrit cette carte-blanche à propos des agressions de femmes commises à la veille du nouvel an à Cologne. Ce genre d’agressions n’a rien de neuf, affirme-t-il. Mais elles sont de plus en plus fréquentes. Généralement, ce ne sont toutefois pas des femmes des beaux quartiers qui en sont les victimes, mais des femmes des quartiers populaires. Et, dans ce cas, cela ne fait guère de bruit.

    Lors du réveillon du Nouvel an, selon toute vraisemblance, quelques dizaines d’hommes d’origine nord-africaine on dépouillé, menacé, harcelé et même violé un certain nombre de femmes. Des délits immondes, et qui n’ont rien de neuf. Aussi est-il très bizarre que la police et le pouvoir soient si étonnés par ces incidents…


    Des déclarations de témoins et de victimes des incidents de Cologne à la veille du Nouvel an, nous pouvons déduire que la façon de procéder des auteurs n’a rien d’inédit. La victime est entourée par un groupe et, ensuite, dépouillée ou agressée. À Cologne, surtout, la police connaît bien ce genre de phénomène. Généralement, les suspects sont jeunes et, selon le ministère de l’Intérieur, d’origine nord-africaine.

    Ils opèrent systématiquement en groupe. Vu que le droit pénal allemand n’autorise aucune sanction collective et que la victime ne peut désigner d’agresseur bien précis, les « suspects » restent donc généralement impunis. Lorsqu’on lit dans les médias les déclarations des victimes et des témoins sur les incidents de Cologne, il s’agit précisément de ce qui s’est passé durant les fêtes de fin d’année.

    Que l’on puisse se faire dépouiller à proximité de la cathédrale de Cologne à la veille du Nouvel an n’a rien de surprenant. La différence avec la criminalité quotidienne « normale » était que, pendant la fête même, les auteurs étaient sous l’influence de l’alcool et qu’ils étaient devenus plus agressifs sur le plan sexuel.

    Cependant, généralement, ce genre d’incidents ont lieu dans les quartiers plus démunis et les victimes font partie de la même classe sociale que les auteurs. Mais cela ne suscite aucun intérêt : ni du politique, ni des autorités, ni des médias.

    Les faits du réveillon du Nouvel an se sont toutefois produits en un endroit très public, souvent visité par des gens que l’on situerait plutôt dans la classe moyenne ou dans les classes supérieures. Et voilà que le politique parle d’un coup d’une « nouvelle dimension du crime organisé » et que toute la ville est « en état de choc ». Ces méfaits, qui ne sont pas neufs, choquent beaucoup de gens, brusquement, parce que, maintenant, ce ne sont pas les classes inférieures, mais la classe moyenne et les classes supérieures qui font partie des victimes potentielles.

    Il est particulièrement malhonnête d’associer désormais les événements de Cologne à la politique allemande des réfugiés. D’après l’état actuel des choses, les suspects n’étaient ni des réfugiés ni des demandeurs d’asile, mais des membres du crime organisé.

    Un débat de société très important est sans nul doute nécessaire pour en arriver à comprendre pourquoi quelques immigrés sont incapables d’avoir prise sur leur existence et dérivent vers le crime organisé. Mais ces questions ne sont pas posées. 

    On pourrait se demander aussi pourquoi la police ne parvient pas à assurer la sécurité des espaces publics dans le centre même de Cologne, ce qui est pourtant sa première tâche. Avant non plus, la police de la ville n’est pas parvenue à maîtriser les bagarres entre « hooligans et salafistes ». Il s’agissait alors d’entre 3 000 et 5 000 voyous violents et non d’un petit nombre de jeunes Nord-Africains. 

    Quand on lit maintenant que même des agentes de police en civil se sont faites agresser sexuellement lors du réveillon du Nouvel an et que leurs collègues s’en sont trouvés « profondément attristés », mais qu’ils ne sont naturellement pas parvenus à intervenir avec la détermination nécessaire contre les auteurs, on se demande s’il ne s’agit pas d’une question de négligence ou même si cette situation n’a pas été créée intentionnellement.
    Source : http://solidaire.org/articles/cologne-nous-sommes-tous-en-etat-de-choc-mais-propos-de-quoi-en-realite
    #Cologne #agression_sexuelle #viols #police_allemande

    • Ce texte me semble vraiment problematique.
      L’auteur ne parle pas des femmes agressées, ni des femmes et de la peur que ce type d’evenement provoquent en elles. L’auteur, un homme, n’en a que pour ses frères et dit tout un tas de contre vérités flous dans le but de disculper ses frères réfugiés forcement innocents. On a presque l’impression que puisque ca serait des agressions de femmes de classes moyennes ca ne compte pas.

      Il prétend que ce type d’agression sexuelle de masse est ancienne et courrante. A mon avis il joue sur les mots et veux dire que les agressions sexuelles contre les femmes sont commune lors des saint sylvestres. Mais là on est pas face à une agression sexuelle, mais des agressions sexuelles de masse. L’auteur manie aussi pas mal l’euphémisme, preferant insister sur les vols comme si c’etait le mobil principal des agresseurs, alors qu’on a au moins 170 dépots de plaintes pour agression sexuelles à Cologne.

      La seule fois ou j’ai entendu parler de ce mode opératoire c’etait place Tahir. Je n’ai jamais entendu parler de cette technique en Allemagne.

  • « La gauche doit apprendre à communiquer autrement » Entretien entre Peter Mertens et Owen Jones, extrait

    En Grande-Bretagne, Owen Jones est non seulement une des voix les plus importantes de la gauche, il est aussi conseiller de Jeremy Corbyn, le nouveau dirigeant du Labour. à l’occasion d’une visite en Belgique, il a rencontré Peter Mertens, le président du PTB. Tous deux se sont entretenus sur la situation de la gauche et sur la nécessité de renvoyer la droite dans une position défensive. 

    Avec son espièglerie et son visage juvénile, on n’imaginerait pas d’emblée qu’Owen Jones est un intellectuel très écouté dans toute la gauche européenne. A 31 ans, il a déjà écrit deux best-sellers (Chavs et The Establishment, tous deux sur la société de classes britannique), est un des chroniqueurs les plus lus au Royaume-Uni et en outre conseiller de Jeremy Corbyn, l’homme de la gauche au sein du Labour qui, de manière surprenante, a été élu à la tête du parti social-démocrate britannique.

    Peter Mertens. Après la crise de 2008, cela a pris pas mal de temps avant qu’en Europe, des forces de gauche conséquente se lèvent à nouveau pour remettre le système en question. Pourquoi cela a-t-il duré si longtemps ? 
    Owen Jones. En 2008, une partie de la gauche pensait que la situation entraînerait automatiquement un effondrement du capitalisme, ce qui revitaliserait la gauche. Vu dans une perspective historique, c’était naïf. La crise économique des années 1930, par exemple, a finalement mené au fascisme en Europe. La crise économique des années 1970 a mené à la montée du néolibéralisme. La gauche ne profite donc pas automatiquement d’une crise économique. 

    Mais cela ne signifie évidemment pas que la gauche doive baisser les bras. En effet, après la Deuxième Guerre mondiale, les néolibéraux étaient tout à fait isolés. A cette époque, leurs idées constituaient un courant marginal. Et ils en étaient conscients. Mais Milton Friedman, un de leurs leaders, disait : « Seule une crise – véritable ou supposée – amène un réel changement. Et si cette crise se produit, ce qui se passe dépend des idées qui existent déjà. » Et ce qui semblait d’abord « politiquement impossible » devient subitement « politiquement inévitable ». Et c’est bien ce qui s’est passé après la crise de 1973. La droite était prête avec ses idées qui, après la crise, ont su conquérir le monde.

    Mais, après la crise de 2008, la gauche n’avait pas immédiatement une réponse à avancer. Elle était donc dans une position relativement défensive. Le message de la gauche, c’était : « Stop à l’austérité, stop aux privatisations, stop à ceci, stop à cela », sans qu’elle ait une alternative cohérente ou une vision différente pour une autre sorte de société. La gauche manquait en outre totalement de confiance en elle. Mais elle n’avait simplement pas les réponses aux problèmes quotidiens de notre société. 

    Peter Mertens. N’y a-t-il pas aussi un problème de « discours nostalgique » ? Par exemple, en 1945, le mouvement ouvrier britannique a obtenu beaucoup de choses. Un système national de santé a été instauré, les secteurs clés ont été nationalisés, un ambitieux plan de logement social a été établi. Plus tard cependant, la bureaucratie au sein de ces institutions a été de plus en plus critiquée. Ce reproche légitime a été utilisé par les néolibéraux, non pas pour améliorer le système social, mais pour le démanteler et le vendre. La réponse de la gauche ne peut tout de même pas être : retour aux années 1960, retour au passé ?
    Owen Jones  : Il y a là beaucoup de vrai. Pour une grande part, la gauche en Grande-Bretagne est restée bloquée en 1945. Le dernier gouvernement réellement de gauche que l’on ait connu, et de l’avis même de la gauche britannique, c’est le gouvernement de Clement Attlee, de 1945 à 1951. Ce gouvernement a mené de grandes réformes sociales, il a instauré l’Etat-providence avec les soins de santé nationaux, les droits des travailleurs... 

    Mais, de cette manière, la gauche est présentée comme un courant qui veut inverser le cours des aiguilles de l’horloge pour remonter vers une sorte de passé idyllique. Alors que, justement, la gauche a toujours été le courant qui regardait vers l’avant et qui modernisait pour donner forme à la société du futur. 

    Or ce sont précisément les néolibéraux qui ont su se présenter comme ceux qui étaient tournés vers l’avenir et modernisaient les choses. C’est à la gauche qu’ils ont volé des mots comme « réforme ». Auparavant, réforme signifiait une législation progressiste, sociale. Maintenant, c’est souvent un euphémisme pour privatiser, économiser et attaquer les droits des travailleurs. 

    Une partie de la critique était cependant justifiée. Les nationalisations que nous avons connues en Grande-Bretagne, mais aussi ailleurs, étaient très bureaucratiques et « top-down » (hiérarchisées, fonctionnant du sommet vers la base, NdlR). Elles n’allaient pas de pair avec une participation démocratique des travailleurs ou des clients. Les gens n’y étaient quasiment pas impliqués. 

    Peter Mertens. Comment envisagez-vous ce processus de nationalisation démocratique ? Cela signifierait-il que les syndicats participeraient à la gouvernance ? Et, dans le cas des chemins de fer, également les voyageurs ? 
    Owen Jones  : Le syndicat du personnel du chemin de fer en Grande-Bretagne avait une proposition intéressante. Celle-ci suggérait que l’on instaure un conseil d’administration qui serait composé pour un tiers par des représentants des voyageurs, un autre tiers par des représentants du personnel et le dernier tiers par des représentants du gouvernement. On peut ainsi diriger une organisation de manière démocratique où l’on peut concilier à la fois les besoins du personnel et des passagers, sans perdre de vue les intérêts à long terme de la collectivité. 

    Ce que nous ne voulons certainement pas, c’est que les actionnaires soient remplacés par des bureaucrates. Ça, ce n’est pas du socialisme, mais plutôt du capitalisme d’Etat. 

    Peter Mertens. Qu’en est-il de la situation des soins de santé britanniques ? Les plans se multiplient pour privatiser des parties des soins de santé. Ce débat est également en cours aux Pays-Bas, et chez nous, la colère gronde à nouveau dans ce secteur. 
    Owen Jones  : Le National Health Service (NHS, le service national des soins de santé, NdlR) est une des institutions les plus prestigieuses en Grande-Bretagne. Les gens y sont particulièrement attachés. Un ministre a un jour dit que, pour les Britanniques, le NHS était presque une religion. Le gouvernement prétendra donc toujours qu’il ne privatise rien du tout. 

    Sous le New Labour (les sociaux-démocrates britanniques sous Tony Blair et Gordon Brown, 1997-2010, NdlR), il y a eu aussi des privatisations, seulement on appelait ça « private finance initiative », des initiatives pour le financement privé. Construire des entreprises privées, par exemple un hôpital. Via un contrat de location-achat sur trente ans, le bâtiment aboutit finalement dans les mains d’une institution de soins. Les amortissements annuels sont cependant si élevés que certaines institutions de soins se sont retrouvées au bord de la faillite.

    L’actuel gouvernement conservateur a alors instauré une législation qui scinde le NHS en petites entités. Il ouvre ainsi la porte au capital privé. Depuis cette politique de commercialisation et de privatisation, le montant alloué aux services administratifs a augmenté de manière dramatique. Evidemment puisque, si l’on scinde les services, il faut beaucoup plus de bureaucratie pour faire fonctionner le tout. C’est extrêmement inefficace. 

    Peter Mertens. En Belgique, des discussions sont en cours en commission de la Chambre sur la privatisation des chemins de fer ...
    Owen Jones  : Vraiment ? Ça, je vous le jure, il faut vous battre bec et ongles contre cela. En Grande-Bretagne, les pouvoirs publics donnent maintenant quatre fois plus de subsides au chemin de fer qu’au temps où celui-ci était encore public ! Nous avons à peu près les tarifs les plus hauts de toute l’Europe. Et les navetteurs sont entassés comme des sardines dans une boîte ... 

    Il y a plusieurs entreprises de chemin de fer qui sont actives sur le réseau. L’une a tellement mal fait son boulot que les pouvoirs publics ont dû reprendre les lignes en main. Conséquence : les lignes reprises par l’État sont précisément celles qui sont devenues les plus efficaces de tout le réseau. En Grande-Bretagne, chaque sondage d’opinion montre que deux tiers des gens veulent que le chemin de fer soit à nouveau nationalisé. Même les plus conservateurs considèrent la privatisation du chemin de fer comme une catastrophe.

    Peter Mertens. A Anvers, on a laissé les chantiers navals tomber en faillite. On a ainsi laissé disparaître un secteur aux professionnels qualifiés, avec un syndicat fort qui s’impliquait énormément dans la sécurité sur le lieu de travail, et cent ans de savoir-faire... A la place sont venues des entreprises douteuses qui travaillent avec une masse de sous-traitants. Maintenant, ce sont des travailleurs des pays baltes et d’Europe de l’Est qui travaillent pour 5 ou 6 euros de l’heure, sans syndicat, et qui ne disposent quasiment pas de protection. En septembre, il y a encore eu un accident où deux travailleurs bulgares ont perdu la vie, et, un mois et demi plus tard, on ne sait toujours pas pour quelle firme travaillaient ces deux ouvriers...
    Owen Jones  : Nous devons bien sûr combattre ce dumping social. Les salaires et conditions de travail existants sont minés par l’embauche de main-d’œuvre bon marché pour laquelle les syndicats n’ont en outre pas de possibilité d’action. 

    Chaque travailleur doit être engagé selon les mêmes conditions de travail. Il faut qu’il y ait un salaire minimum. En Grande-Bretagne, c’est un grand problème, en particulier pour le secteur de la construction. Les ouvriers polonais veulent venir travailler pour moins d’argent. Ils sont entassés dans des logements et sont exploités par les employeurs et par les propriétaires. Il faut aussi remédier à cela. 

    Le dumping social ne concerne d’ailleurs pas seulement les travailleurs étrangers. Il y a aussi les intérimaires, les travailleurs temporaires, les faux indépendants, les gens sous contrat à zéro heure. Ce n’est pas non plus leur faute, et encore moins celle des immigrés. C’est la faute des employeurs qui engagent de la main-d’œuvre qui vient ou non de l’étranger pour saper les normes salariales existantes. 

    Peter Mertens. Selon une récente étude, la Grande-Bretagne compte 1 million de travailleurs sous contrat de zéro heure : on signe pour un job dont le nombre d’heures n’est pas précisé à l’avance. La flexibilité to-ta-le. Avec, par exemple, une semaine à temps plein puis une semaine sans une seule heure. Vous êtes censé être disponible à tout moment, mais vous êtes payé seulement pour les heures effectivement prestées. Chez nous, on veut maintenant introduire aussi ces flexi-jobs dans l’horeca. Qu’en pensez-vous ? 
    Owen Jones  : Avec de tels contrats à zéro heure, le patron peut décider de manière hyper flexible quand il a besoin de gens ou pas. Le travailleur est livré à son bon vouloir. 

    En Grande-Bretagne, des centaines de milliers de gens dépendent des banques alimentaires. Une des raisons à cela, c’est justement ces contrats à zéro heure, puisque les gens ne savent pas combien d’heures ils vont pouvoir travailler cette semaine. Parfois, ils n’ont rien. Et, en plus, certains de ces contrats stipulent qu’on ne peut pas travailler ailleurs si on n’a pas assez d’heures attribuées. Les gens sont alors coincés. Cette semaine, vous ne pouvez pas payer votre loyer ou donner à manger à vos enfants. Vous n’avez en fait pas de droits, mais, quand on cherche désespérément du boulot, eh bien, oui, alors on accepte même un tel contrat.

    Même chose pour les faux indépendants. En Grande-Bretagne, un travailleur sur sept est actuellement indépendant. Le noyau des travailleurs fixes se réduit donc toujours plus et le groupe des travailleurs temporaires, des contrats à zéro heure et des indépendants ne cesse de grandir. 

    Peter Mertens. Une révolution est en cours sur le marché du travail. En Europe, cela s’appelle joliment « la réforme du marché du travail ». On veut en finir avec les emplois fixes et les remplacer par une armée de contrats individuels à la carte. Pour mon livre Comment osent-ils ?, j’avais examiné les statistiques en Allemagne. Dans ce pays, entre 1999 et 2008, 180 000 emplois à temps plein ont disparu. Et 2,7 millions de petits boulots à temps partiel sont apparus. Dès qu’on travaille une seule heure par semaine, dans les statistiques, vous avez « un emploi ». Les emplois fixes sont donc divisés en 6 ou 7 mini-jobs ou intérims. 
    Owen Jones  : Nous devons lutter pour des emplois fixes. Mais il y a une différence entre des gens pour qui travailler à temps partiel est un choix et ceux pour qui ce ne l’est pas. Pour certaines personnes, c’est plus pratique de travailler à temps partiel. En Grande-Bretagne, par exemple, les crèches sont très chères. En moyenne, les parents dépensent un tiers jusque parfois même la moitié de leurs revenus à la garde des enfants. Le travail à temps partiel est souvent une solution. 

    Mais il est inacceptable que l’on doive être toujours prêt pour son employeur. La flexibilité doit être une chose sur laquelle les deux parties sont d’accord, et ce n’est pas le cas actuellement. Travailler à temps plein reste très important. 

    Peter Mertens. Vous parlez souvent de stratégie politique. Dans le néolibéralisme, les « think-tanks », ces cénacles d’études et de réflexion, jouent là un rôle important. Ils préparent les réformes néolibérales et font en sorte que des idées du genre « le secteur public est inefficace » se répandent dans toute la société. Comment voyez-vous cette bataille des idées ? 
    Owen Jones  : La droite communique souvent mieux que nous. C’est la réalité. Ces think-tanks font passer leurs idées selon une sorte de « Overton window », une « fenêtre d’Overton ». Vous connaissez ? C’est un concept de la droite américaine qui porte le nom de Joseph Overton, un homme qui était à la tête d’un think-tank de droite. C’est une sorte de fenêtre, de cadre qui délimite les idées : tout ce qui tombe dans ce cadre est acceptable et un signe de bon sens ; et tout ce qui n’entre pas dans ce cadre est extrémiste, utopique, trompeur... 

    Mais ce cadre peut toutefois se déplacer. Un exemple : la privatisation des chemins de fer aurait été complètement impensable dans les années 1970 – même pour la droite – parce que trop extrême ; mais depuis, c’est quasiment devenu une politique standard partout. Ce cadre, nous devons le repousser. 

    Je crois que la gauche doit apprendre à communiquer d’une autre manière, par exemple par le « story-telling » (le fait de raconter des histoires, NdlR), une chose que la droite fait souvent. La droite va par exemple raconter des histoires extrêmes sur des chômeurs qui ont plein d’enfants et qui possèdent pourtant une télévision sophistiquée et un smartphone très cher. Et la réponse de la gauche, c’est souvent une chose comme : « Oh, mais seulement 0,7% de tous les allocataires sociaux ont été suspendus l’an dernier. » Cela ne convainc personne, n’est-ce pas.

    Non, on ferait mieux de raconter alors l’histoire de Stephen Taylor de Manchester, un ex-soldat de 60 ans au chômage qui vendait des fleurs pour récolter de l’argent pour les vétérans de guerre blessés ou mutilés. On lui a supprimé quatre fois ses allocations parce qu’il était actif bénévolement pour une organisation caritative. Une telle histoire est bien plus efficace qu’une statistique à la « ces derniers 18 mois, un million de personnes ont perdu leur allocation ». 

    En Grande-Bretagne, il y a maintenant tout un projet de vente des logements sociaux. L’Etat fait cela sous le principe du « right to buy », le droit d’acheter. Et, si vous vous opposez à cela, vous entendez : « Comment ? Vous êtes donc contre le droit des gens ? ». Tout cela est évidemment pensé de manière très intelligente. 
    La droite diffuse des idées vraiment très extrêmes, mais elle les présente comme modérées et logiques. Nous pouvons apprendre de cela. 

    Peter Mertens. Les think-tanks de gauche réalisent des études et écrivent de gros rapports. Mais la droite a aussi des think-tanks qui réfléchissent à la manière dont ils peuvent communiquer au mieux leur message auprès d’un large public. Comment se fait-il que la gauche n’ait pas de tels think-tanks ? 
    Owen Jones  : D’abord, il y a moins de think-tanks de gauche. La droite a beaucoup de think-tanks parce que de grandes entreprises y mettent beaucoup d’argent pour qu’ils fournissent du matériau auquel elles ont un intérêt. Ces think-tanks traitent invariablement de diminution d’impôts, de rabotage des droits des travailleurs, de privatisation. En Grande-Bretagne, un think-tank a sorti un rapport sur la privatisation des prisons. Et qui a payé cette étude ? Tout juste : des entreprises actives dans les services de sécurité et qui exploitent déjà des prisons privées ! 

    Les syndicats ont une responsabilité dans la mise sur pied de bons groupes de réflexion. Il existe des professeurs d’université et des économistes de gauche, mais ils travaillent encore trop chacun dans leur petit coin. De tels think-tanks pourraient rassembler ces gens pour travailler à une alternative bien étayée. Mais alors, dans une langue que les gens peuvent comprendre.

    C’est assez ironique, n’est-ce pas ? Nos adversaires prêchent l’individualisme, mais eux-mêmes travaillent d’une manière très collective. Nous, nous plaidons pour le collectif, mais nous travaillons de manière très individualiste. 

    Peter Mertens. Au sein du PTB, nous avons nous-mêmes longtemps discuté de l’importance de la communication, du langage et des images. L’analyse vient en premier lieu, et ce travail d’étude fondamental doit rester la base, sinon on tombe vite dans le superficiel et l’opportunisme. Mais, à côté de cela, il faut consacrer tout autant de temps à la communication, à la question : comment maintenant transmettre notre message ? Parce que ce n’est pas parce qu’on a raison qu’on vous donne nécessairement raison. Souvent, cette deuxième étape est sautée, parce que beaucoup de gens de gauche trouvent apparemment cela moins important. 
    Owen Jones  : Exactly. Nous devons repousser nos adversaires dans la défensive, car nous-mêmes, nous y sommes trop souvent. Je ne cite pas souvent Ronald Reagan (président des Etats-Unis de 1981 à 1989, NdlR), mais il a dit : « When you’re explaining, you’re losing », quand vous devez commencer à vous expliquer, vous êtes en train de perdre la partie. Il y a beaucoup de vrai là-dedans. Nous devons amener nos adversaires à devoir expliquer pourquoi leur politique devrait marcher. 

    C’est pourquoi nous devons aussi mieux choisir quelle lutte nous entamons, car nous nous investissons souvent dans des thèmes pour lesquels nous savons que nous allons perdre. En Grande-Bretagne, un débat est actuellement en cours sur la diminution des crédits d’impôts. Trois millions de familles vont perdre par là une moyenne de 1.350 livres par an. Ça, c’est un thème sur lequel nous pouvons attaquer la droite : les gens qui travaillent dur sont sanctionnés.

    Peter Mertens. Dans votre dernier livre, The Establishment, vous évoquez le pouvoir des magnats des médias en Grande-Bretagne. Il s’agit d’une presse extrêmement idéologique et agressive, écrivez-vous. Et vous dites ensuite : nous devons développer nous-mêmes une stratégie médiatique. Pour certains, cela peut paraître contradictoire : comment peut-on développer une stratégie de communication dans la presse de l’establishment lui-même ?
    Owen Jones  : Les grands médias nous sont hostiles, et ils le resteront. Et, malheureusement, ces médias sont le lieu où des dizaines de millions de gens s’informent et se forgent une opinion. Mais, que l’on ignore ou pas les médias, vos adversaires vont quand même vous attaquer. Donc, il vaut mieux essayer d’être présent dans les médias, où l’on peut au moins tenter de faire passer son message. 
    Quand Jeremy Corbyn est interviewé en télévision, il passe souvent très bien. Mais, les premiers jours après son élection à la tête du Labour, il est resté loin des médias alors qu’il se faisait tirer dessus à boulets rouges et même à l’artillerie lourde. Le Premier ministre Cameron l’a carrément qualifié de menace pour la sécurité nationale, mais Corbyn n’était pas présent pour répliquer. Je m’arrachais les cheveux, c’était incroyablement frustrant. Il faut passer dans les médias, c’est incontournable. 

    Beaucoup de gens pensent qu’actuellement on y arrive aussi en utilisant les médias sociaux, mais on n’atteint qu’un nombre limité de gens par ceux-ci. On mobilise des gens qui ont déjà dans une certaine mesure de la sympathie pour vous. Les médias sociaux sont un complément pour votre stratégie médiatique. Il est aussi important de construire un mouvement d’en bas, évidemment et on peut ainsi en partie contourner les médias. Mais, à nouveau : c’est un complément.
     
    Il faut passer sur les grandes chaînes des magnats de droite et il faut être interviewé dans leurs journaux. C’est comme si on emprunte un mégaphone à quelqu’un que l’on n’apprécie pas, on préfèrerait ne pas le faire mais, au moins, les gens peuvent vous entendre. Même si ce mégaphone vous est ensuite immédiatement arraché des mains.

    Peter Mertens. Dans une vidéo sur YouTube, vous déclarez que le « sentiment de la Grande-Bretagne » ne peut pas être laissé à la droite. Et vous donnez un contenu à ce sentiment national, avec les fières traditions de la gauche : la lutte des classes. Pourquoi est-il important pour vous d’amener aussi ce thème-là dans le débat public ?
    Owen Jones  : La fierté est importante. Tous les droits et libertés que nous avons maintenant ont été arrachés par la lutte. Des masses de gens ont payé un prix très lourd pour cela, et certains y ont même laissé leur vie. Faire en sorte que les gens soient à nouveau fiers de cette histoire est une manière de lutter contre le patriotisme que la droite manipule pour ses propres buts.  

    Jeremy Corbyn a été attaqué parce qu’il serait antipatriotique, mais qu’y a-t-il de plus patriotique que de vouloir bannir l’injustice de son pays ? Il n’y a rien de patriotique au fait que, dans un des pays les plus riches du monde, on rende des centaines de milliers de gens si pauvres qu’ils n’arrivent même plus à s’acheter à manger. Il n’y a rien de patriotique au fait de faire payer les gens qui travaillent pour une crise avec laquelle ils n’ont rien à voir.

    Pour moi, cette fierté n’est pas en contradiction avec ma perspective internationaliste. Car oui, il faut construire la solidarité internationale. La mondialisation rend cela encore plus nécessaire. 
    Mais la gauche s’est toujours vu reprocher de se montrer hostile envers son propre pays. Or on peut facilement réfuter cela en disant à quel point nous sommes fiers de notre passé de lutte. Nous luttons dans la même tradition que celle de nos aïeux et nous continuerons à lutter jusqu’à ce que nous ayons construit une société qui sert les intérêts de la majorité au lieu de ceux de la couche supérieure. C’est ce pour quoi nos aïeux ont lutté, et nous allons continuer leur travail. 

    Peter Mertens. Etes-vous optimiste ?
    Owen Jones  : Je suis tout à fait optimiste. Toutes les injustices et tous les problèmes peuvent être vaincus avec suffisamment de détermination. OK, dans notre parcours vers un monde plus juste, nous devons certes momentanément passer par des détours, mais nous y arriverons bien. 

    Nous devrions prendre exemple sur les néolibéraux. Dans les années 1940, ils étaient totalement dans les cordes, mais ils ont surmonté cela. C’est l’illusion de chaque époque de croire que cela dure éternellement. Les choses peuvent changer, et parfois même assez vite. Cela ne sera pas facile, certes. La gauche a parfois tendance à se complaire dans les défaites, mais je suis plus intéressé par les victoires et par le réflexion sur la manière de pouvoir gagner davantage. Et, en fin de compte, nous finirons par gagner. Cela peut juste encore prendre un peu de temps.

    Article publié dans le mensuel Solidaire de janvier 2016 - Extrait
    http://solidaire.org/articles/entretien-entre-peter-mertens-et-owen-jones-la-gauche-doit-apprendre-comm

    #médias #Owen_Jones #Jeremy Corbyn #idées #Joseph_Overton #think-tank #journaux #médias_sociaux #stratégie

  • Belgique - Les « centrales-épaves » d’Electrabel mettent en danger la sécurité

    Le redémarrage de la centrale défectueuse Doel 3 a été de nouveau reporté en raison d’une nouvelle panne. Dans un entretien à la matinale de Radio 1, Tom De Meester, spécialiste énergie du PTB, s’est indigné contre Electrabel.

    « C’est incident après incident, fustige Tom De Meester. La semaine dernière, Doel 3 s’est arrêtée en raison d’une fuite d’eau. Aujourd’hui, il semble y avoir un problème avec l’installation électrique. La liste s’allonge. La semaine dernière, un incendie a eu lieu à Tihange, et fin octobre, un transformateur a explosé également à Doel. »

    « Au propre comme au figuré, nous jouons avec le feu, continue De Meester dans un entretien donné à notre rédaction. #Electrabel est tout simplement incapable de garantir notre sécurité. Dans les médias allemands, ces derniers jours, on se moque avec ironie des “ #centrales_épaves ” belges, et le gouvernement allemand a demandé des explications écrites au Premier ministre #Charles_Michel. #Tihange se trouve près de la frontière allemande, et les maladresses d’#Electrabel n’amusent absolument pas la ministre Barbara Hendricks, responsable de la sécurité nucléaire en Allemagne. »

    Lors de l’émission De Ochtend, vous avez déclaré que les centrales nucléaires de Doel sont complétement inutiles pour notre approvisionnement en énergie. N’est-ce pas un peu exagéré ?

    Tom De Meester . Je ne suis pas le seul à le dire, Elia, le gestionnaire du réseau des lignes à haute tension, l’affirme également. Si nous fermons Doel 1 et Doel 2, les lumières ne vont pas s’éteindre. Durant cet hiver ainsi que pendant l’hiver prochain, il n’y a pas eu et il n’y aura pas de problème. D’ailleurs, comment les centrales nucléaires peuvent-elles garantir notre approvisionnement énergétique ? Elles tombent sans arrêt en panne. L’année dernière, elles sont restées inactives pendant 40 % du temps. Pannes, actes de #sabotage, fissures dans deux cuves de réacteurs, le feu à deux reprises et une explosion. Tout est dit, non ? Nous ferions mieux d’investir dans la production durable et fiable d’énergie, sous le contrôle de la collectivité.

    Cependant, selon Electrabel, ses centrales nucléaires figurent parmi les meilleures d’Europe ?

    Tom De Meester . Cela me fait beaucoup penser à cet empereur qui courait nu dans les rues, mais à qui tout le monde faisait croire qu’il portait un magnifique costume de brocart doré. Doel 1 et 2 ont été conçus pour durer trente ans, mais elles tournent depuis quarante ans. Continuer encore pendant dix ans, c’est irresponsable. La seule raison pour laquelle elles restent ouvertes, c’est parce qu’elles rapportent beaucoup d’argent. Les profits du nucléaire pour 2014 sont estimés par la CREG de 421 à 506 millions d’euros. On compte pour l’année prochaine sur 630 à 760 millions d’euros. Et ce encore pendant dix ans. Les #centrales_nucléaires sont surtout des machines à billets.

    Pouvons-nous faire machine arrière ?

    Tom De Meester . Bien sûr. Il le faudra même. Nous ne pouvons pas imposer encore dix ans de déchets nucléaires aux générations futures. Sans parler du problème de sécurité qui perdure. Si quelque chose tournait mal à #Doel, il faudrait faire évacuer 900 000 personnes, et les dommages économiques d’une explosion pourraient atteindre 1 400 milliards d’euros. Nous devons inverser la tendance. La façon dont le gouvernement a décidé la prolongation de l’ouverture de Doel 1 et 2 défie toute imagination. Aucun rapport sur l’impact environnemental n’a été publié, aucun débat parlementaire n’a eu lieu. Il n’a même pas été fait état de l’avis des organisations publiques ou environnementales. Tout a été réglé dans les salons du pouvoir, derrière des portes closes. On ne peut se résigner à cela.

    28 Décembre 2015, dans le journal #Solidaire http://solidaire.org/articles/les-centrales-epaves-d-electrabel-mettent-en-danger-la-securite

    #Electrabel c’est #gdf-suez