• De la légitime défense des femmes victimes de violences « conjugales » | Blog | Le Club de Mediapart
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    En 2012, Jacqueline Sauvage a tué son mari, Norbert Marot. Un mari violent. Un « père » violent. Pendant 47 ans, elle a supporté ses violences physiques, psychiques, sexuelles. Elle a tenté de protéger ses quatre enfants des coups et des humiliations.

    Des violences commises par le mari en toute impunité

    En octobre 2014, elle a été condamnée à 10 ans de réclusion criminelle par la Cour d’assises d’Orléans. Cette peine a été confirmée le 3 décembre 2015 par la Cour d’assises de Blois, au terme d’un procès au cours duquel fut dévoilée la gravité et la fréquence des violences commises par son mari, contre Mme Sauvage, mais aussi contre ses filles (deux d’entre elles ont été violées, la troisième agressée sexuellement), contre son fils (victime de maltraitances graves, il se suicidera) et contre le voisinage (victimes d’injures, de menaces de mort). « Il terrorisait tout le monde ».

    Lors du procès, tous les témoins ont été remarquables de courage, d’humilité, de dignité. Elles-ils ont su décrire les violences, la permanence tout autant que l’imprévisibilité des coups, des humiliations, l’impossibilité de les dénoncer par peur des représailles. Tout l’entourage de la famille savait. Les voisins savaient. Le maire savait. Les médecins savaient. Les gendarmes savaient.

    Et… Les violences à l’encontre de Mme Sauvage et de ses enfants ont duré 47 ans.

    Une témoin, ancienne victime de violences, s’est excusée de n’avoir pas compris ce que Mme Sauvage vivait. A aucun moment les représentant-e-s de la justice n’ont eu cette honnêteté de reconnaître la responsabilité de l’Etat qui a laissé N. Marot perpétré ses violences en toute impunité.

    Bien au contraire, pendant les trois jours de ce procès en appel, la présidente, l’avocat général et l’avocate de la partie civile, sourdes et sourd à tous les témoignages entendus, n’ont eu de cesse de reporter la responsabilité de sa situation sur Mme Sauvage : Pourquoi n’est-elle pas partie ? Pourquoi n’a-t-elle pas déposé plainte ? Pourquoi n’a-t-elle pas protégé ses enfants ? Des questions que, compte tenu des connaissances que l’on a aujourd’hui des mécanismes des violences « conjugales », des professionnel-les de la justice ne devraient plus pouvoir poser en ces termes.