Contributions des inventeurs d’incroyances appliquées à un changement de perspective, libertaire, marxiste, situationniste, écologique, alternatif, systémique, pragmatique, constructiviste...

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  • LE POUVOIR COMME PERVERSION NARCISSIQUE
    http://inventin.lautre.net/contributions.html#hirigoyen

    Les nouvelles formes de travail, qui visent à accroître les performances des entreprises en laissant de côté tous les éléments humains sont génératrices de stress et créent ainsi les conditions favorables à l’expression de la perversité. L’entreprise peut elle-même devenir un système pervers lorsque la fin justifie le moyens et qu’elle est prête à tout, y compris à détruire les individus pour parvenir à ses objectifs.

  • NE RÉPAREZ-PAS CE QUI VOUS DÉTRUIT, pamphlet pour une bonne vie
    http://inventin.lautre.net/contributions.html#streifzuege

    Le Travail est la rumeur centrale de la convention. Il passe pour être une nécessité naturelle, alors qu’il n’est rien d’autre que la forme sous laquelle le capitalisme façonne l’activité humaine. Or, être actif est autre chose dès lors que cette activité se fait non en fonction de l’argent et du marché, mais sous la forme du cadeau, du don, de la contribution, de la création pour nous-mêmes, pour la vie individuelle et collective d’individus librement associés. Nous ne voulons plus être ceux que nous sommes forcés d’être.

  • DE LA CONTAGION À L’ÉPIDÉMIE

    Les dettes se répandent comme des virus, l’épidémie envahit une société de crise qui s’est grippée. La fièvre monte dans un État fébrile, la lassitude gagne et les défenses immunitaires s’écroulent...
« Pour contenir les populations plongées dans la pauvreté, la propagande de la peur peut être utilisée à propos du changement climatique, des catastrophes naturelles et des attaques terroristes à grande échelle, comme outil de contrôle des populations. » 
Rapport de la Fondation Rockefeller, 2010

    
L’insistance permanente et obsessionnelle du spectacle médiatique à nous faire peur par tous les moyens, nous pousse à nous recroqueviller dans la servitude, chacun « chez soi », embourbé par nos habitudes casanières et solitaires. Mais la propagande tapageuse en fait parfois beaucoup trop et perd son emprise dans un dysfonctionnement latent, des relations apparaissent là où on ne les attend pas, les croyances se dérobent et la servitude se décompose en petits morceaux. 
Le matraquage répétitif et permanent du spectacle de cette réalité des choses marchandes, déforme nos perceptions et notre compréhension de la situation, dans une surabondance de détails parasites qui nous placent dans un état de confusion permanente. 
La société a considérablement protégé son fonctionnement depuis 1968 en surdéveloppant son discours spectaculaire, et la contestation de la société n’a pas compris les conséquences de cette mutation, l’empêchant d’effectuer le changement de perspective nécessaire à l’émergence d’un mouvement de transformation radicale. L’internationale s’est réalisée dans la mondialisation et l’abolition de l’État est en cours, il a déjà perdu tout contrôle sur l’économie et la finance. Les politiques gèrent au jour le jour un système dont le fonctionnement leur échappe, en justifiant très mal leurs mesures de rafistolage. Ce sont des escrocs bonimenteurs, et la contestation marche dans les pas de leurs embrouilles, se rendant complice de l’arnaque générale mal dissimulée par sa représentation spectaculaire.

    
Dans ce monde de communications numériques à sens unique, nous ne sommes pas informés, mais mis en conformité avec les faits objectifs du monde des marchandises.
« Notre croyance en l’objectivité entrave la compréhension que nous avons de nous-mêmes et des autres. L’objectivité du monde n’est qu’apparente. Le lien de cause à effet n’est pas dans la réalité, mais dans une explication de la réalité. C’est l’opération de distinction qui fait distinguer les choses. La réalité est une construction de l’esprit, elle est ce que nous en faisons. La question n’est plus de savoir ce qui est vrai, mais de chercher ce qui est utile pour agir selon nos désirs. » 
Lukas Stella, Stratagèmes du changement
Le concept de cause, tel que le définit le scientisme déterministe, se fonde sur les présuppositions que l’on peut expliquer n’importe quel phénomène en le réduisant à l’étude de ses parties et qu’aucun autre élément n’entre en jeu. L’erreur commise par ce réductionnisme aveugle est de ne pas reconnaître avoir détruit le système des relations et interactions qui forment un tout en effectuant ces dissections et découpages arbitraires. Cette conception schizophrénique d’un monde fragmenté ne mène jamais qu’à un obscurantisme sans devenir, à un blocage des possibles.

    
Ce réalisme qui considère qu’une cause génère son effet, en dehors de tout contexte et de toute interaction n’est qu’une prétention scientiste erronée. La science peut se décrire comme un mode de perception, d’organisation et d’attribution de sens aux observations, qui construit par là même des théories subjectives qui peuvent être confirmées par l’expérience et dont la valeur n’est pas définitive.
Aucune science ne peut proposer une explication de la réalité absolument vraie et inaltérable. Il n’y a pas une seule, mais de multiples réalités, selon le point de vue de l’observateur et des instruments qu’il utilise à des fins d’observation. Ainsi est réfuté tout modèle d’interprétation présupposant une explication de la nature et du comportement de l’Homme qui se veut absolument vraie et définitive, parce qu’un tel modèle tombe inévitablement dans le piège idéologique d’autoréférenciation, sorte de discours qui génère sa propre justification, construite sur ses hypothèses de départ.

    Le système doit être étudié dans sa totalité, car la totalité représente davantage que la simple somme de ses parties ; elle est autre et bien plus que le total. Toute tentative d’étudier les composantes de façon isolée détruirait la totalité et produirait des résultats qui altéreraient la compréhension du système.
« Ce sont ces liens, conceptuels ou opérationnels, qui sont les prérequis pour interpréter les structures et la fonction d’un organisme vivant vu comme un organisme autonome autoréférent. Quand ces liens sont ignorés, le concept "d’organisme" est vide, et ses pièces détachées deviennent des problèmes triviaux ou restent des mystères. » 
Heinz von Foerster, Seconde cybernétique et complexité
Par opposition au mode de pensée conformiste, qui découpe les champs de connaissances et les compartimente, la pensée situationnelle relie, associe, recadre, coopère, harmonise, s’implique, interagit avec les autres, invente des possibilités et du plaisir partagé. Un mouvement de transformation sociale peut alors se comprendre comme la congruence d’une danse synchrone de coordinations d’actions, d’où émerge une évolution comportementale dans de nouveaux rapports relationnels, au cours de dérives individuelles et collectives sans plan préétabli. Selon ce point de vue, les règles de la concurrence, la loi du plus fort, la hiérarchie, l’exploitation et la prédation font place à l’entraide interactive, la coopération sociale, l’association fédérative, la commune à échelle humaine.

    
Les réseaux interactifs d’éléments autonomes sont à la base de comportements émergents non prévisibles, car ils sont non déductibles à partir de ses parties singulières. L’auto-organisation émergente est précisément l’agrandissement de l’espace de possibilités d’une nouvelle globalité issue d’une histoire d’interactions entre des éléments différents et hétérogènes. Lorsque la richesse de ces interactions franchit un certain seuil, le mouvement global produit de façon discontinue de nouveaux comportements d’ensembles tout à fait imprévisibles en fonction de la somme des apports de chaque individu ou groupe d’individus. Ces groupes de relations, en interaction temporaire avec d’autres groupes, peuvent développer, dans de brèves périodes, des capacités et des propriétés nouvelles inconcevables, parce que non déductibles.

    Il s’agit d’abandonner l’état de foi du réalisme, pour adopter le doute et le scepticisme du chercheur. Aucune règle n’est absolument définitive. Il nous appartient de choisir de nous considérer comme des pions dans un jeu dont les règles seraient d’après nous une réalité qui s’impose d’elle-même, ou bien comme des joueurs qui ont compris que les règles ne sont réelles que dans la mesure où nous les avons acceptées et que nous pouvons tout aussi bien jouer avec elles, et ainsi les changer.
Faire surgir des doutes peut rompre la rigidité perceptivo-réactionnelle habituelle en entamant l’armure cognitive et la carapace comportementale. Faire naître un doute sur l’explication logique et rationnelle est particulièrement propre à débloquer des structures mentales rigides et fermées. Semer le doute concernant la logique d’un raisonnement, introduit un petit ver qui mobilise l’entropie du système, amorçant une réaction en chaîne qui est lente, mais dont les effets n’en sont pas moins dévastateurs, car ils peuvent produire des changements dans le système tout entier.
En nous autorisant à libérer nos positions des préjugés déterminés par les certitudes conventionnelles, et en développant nos capacités relationnelles par l’intelligence situationnelle du moment, nous devenons indéterminables et imprévisibles, donc incontrôlables, changeant continuellement nos règles de transformation selon nos relations dans l’action et nos points de vue qui en émergent. Abandonner nos logiques intransigeantes et autoritaires nous ouvre de nouveaux horizons plus libres, nous donnant de nouvelles possibilités propices au changement.

    
Il n’y a pas de véritables règles de changement que l’on pourrait appliquer et contrôler. Dans cette période dure et confuse d’exploitation sans limites, nombreux sont les charlatans qui bradent sur le marché du désespoir leurs solutions miracles. Une rébellion peut être contagieuse, un mouvement de révolte, une insurrection peuvent émerger de l’incubation sociale par expérimentations de jeux sur les règles du jeu, développées sans aucun respect des conventions. Il s’agit d’inventer l’amorce d’un changement effréné, le susciter par agitations, provocations et rage de vivre, l’activer dans sa propagation pandémique, et ainsi permettre à la fièvre de se répandre par plaisir...

    _Lukas Stella, 2012 (Extrait)
    http://inventin.lautre.net/linvecris.html_

  • A ROADMAP TO A JUST WORLD
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    Extrait du discours de Noam Chomsky au DW Global Media Forum, Bonn, Allemagne, le 17 juin 2013
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    (…) Selon la doctrine reçue, nous vivons dans des démocraties capitalistes, qui sont le meilleur système possible, malgré quelques imperfections. Il y a eu un débat intéressant au fil des ans sur la relation entre le capitalisme et la démocratie, par exemple, sont-ils même compatibles ? Je ne vais pas poursuivre là-dessus parce que je souhaite parler d’un système différent – ce que nous pourrions appeler la « démocratie capitaliste qui existe vraiment », RECD en abrégé, prononcé « wrecked » par accident (jeu de mots : « really existing capitalist democracy », RECD, ou « wrecked », qui veut dire « brisée », « démolie », « naufragée », ndt). Pour commencer, comment comparer RECD à la démocratie ? Et bien cela dépend de ce que nous entendons par « démocratie ». Il y a plusieurs versions de cela. D’une part, il y a une sorte de version retenue. C’est de la rhétorique emphatique du même genre que celle d’Obama, des discours patriotiques, ce qu’apprennent les enfants à l’école, &c. Dans la version US, c’est le gouvernement « du peuple, pour et avec le peuple ». Et c’est plutôt facile de comparer cela à RECD.
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    Aux USA, l’un des sujets principaux de la science politique académique est l’étude des attitudes et des politiques et de leur corrélation. L’étude des attitudes est relativement facile aux USA : une société lourdement sondée, des sondages plutôt sérieux et précis, et des politiques que vous pouvez voir, et comparer. Et les résultats sont intéressants. Dans le travail qui représente essentiellement l’étalon-or du domaine, il a été conclu qu’à peu près 70% de la population – les 70% du bas de l’échelle des richesses/revenus – ils n’ont aucune influence du tout sur la politique. Ils sont véritablement laissés pour compte. Comme vous montez dans l’échelle des richesses/revenus, vous obtenez un peu plus d’influence sur la politique. Quand vous arrivez en haut, ce qui représente peut-être le dixième d’un pour cent, les gens obtiennent à peu près tout ce qu’ils veulent, c’est-à-dire qu’ils décident de la politique. Donc le terme correct pour çà n’est pas la démocratie ; c’est la ploutocratie.
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    Des enquêtes de ce genre s’avèrent être du matériel dangereux parce qu’elles peuvent en dire trop aux gens sur la nature de la société dans laquelle nous vivons. Et donc malheureusement, le Congrès a interdit leur financement, et nous n’avons donc pas à nous en soucier à l’avenir.
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    Ces caractéristiques de RECD se révèlent tout le temps. Le thème central aux USA est donc celui des emplois. Les sondages le démontrent très clairement. Pour les très riches et les institutions financières, le thème principal, c’est le déficit. Et qu’en est-il de la politique ? Il y a à présent une séquestration aux USA, une grande réduction des financements. Est-ce à cause des emplois ou du déficit ? Et bien, du déficit.
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    En Europe, incidemment, c’est bien pire – tant et si bien que même le Wall Street Journal était horrifié par la disparition de la démocratie en Europe. Ils avaient un article il y a une quinzaine de jours qui concluait que « les Français, les Espagnols, les Irlandais, les Néerlandais, les Portugais, les Grecs, les Slovènes, les Slovaques et les Chypriotes ont voté contre le modèle économique de la monnaie unique à des degrés différents depuis que la crise a commencé il y a trois ans. Pourtant les politiques économiques ont peu changé en réponse à chaque défaite électorale subie à la suite de l’autre. La gauche a remplacé la droite ; la droite a sorti la gauche. Même le centre-droite a dérouillé les communistes (à Chypre) – mais les politiques économiques sont essentiellement restées les mêmes : les gouvernements vont continuer à couper dans les dépenses et augmenter les impôts. » Ce que pensent les gens importe peu et « les gouvernements nationaux doivent suivre les directives macro-économiques édictées par la Commission Européenne ». Les élections sont presque insignifiantes, presque comme dans les pays du Tiers-Monde qui sont dirigés par les institutions financières internationales. C’est ce qu’a décidé de devenir l’Europe. Elle n’y est pas obligée.
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    Revenant aux USA, où la situation n’est pas tout à fait aussi mauvaise, il y a la même disparité entre l’opinion publique et la politique sur une gamme très large de sujets. Prenez par exemple le sujet du salaire minimum. Une opinion est que le salaire minimum devrait être indexé sur le coût de la vie et assez haut pour empêcher de tomber sous le seuil de pauvreté. 80% du public soutient cela et 40% des riches. Quel est le salaire minimum ? En train de descendre, bien en-deçà de ces niveaux. C’est la même chose avec les lois qui facilitent l’action des syndicats ; fortement soutenues par le public ; recevant l’opposition des très riches – et disparaissant. C’est aussi vrai pour le système de santé national. Les USA, comme vous le savez sans doute, ont un système de santé qui est un scandale international, ils en sont au double du coût par personne en comparaison aux autres pays de l’OCDE et avec des résultats relativement pauvres. Le seul système de santé privatisé, et grosso modo dérégulé. Le public ne l’aime pas. Ils ont réclamé un système national intégré, des options publiques, pendant des années, mais les institutions financières pensent qu’il est très bien, alors il reste : stagnation. En fait, si les USA avaient un système de santé comme d’autres pays développés comparables il n’y aurait pas de déficit. Le fameux déficit serait effacé, ce qui ne compte pas tant que çà de toute façon.
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    L’un des cas les plus intéressants concerne les impôts. Pendant 35 ans il y a eu des sondages sur ‘que pensez-vous que devraient être les impôts ?’ De larges majorités ont soutenu que les corporations et les riches devraient payer plus d’impôts. Ils se sont constamment réduits pendant cette période.
Encore et encore, la politique est toujours l’inverse presque exact de l’opinion publique, ce qui est une propriété typique de RECD.
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    Dans le passé, les USA ont parfois, un peu sardoniquement, été décrits comme un état à un parti unique : le parti des affaires avec deux factions appelées Démocrates et Républicains. Ceci n’est plus vrai. C’est toujours un pays à parti unique, le parti des affaires. Mais il n’a qu’une seule faction. C’est la faction des Républicains modérés, qui s’appellent aujourd’hui Démocrates. Il n’y a presque pas de Républicains modérés dans ce qui s’appelle le Parti Républicain et presque pas de Démocrates libéraux (note : dans le monde anglophone, les libéraux sont de gauche, ndt) dans ce qui s’appelle le Parti Démocrate [sic]. C’est en gros ce que seraient des Républicains modérés et par analogie, Richard Nixon serait loin à gauche de l’éventail politique aujourd’hui. Eisenhower serait hors de l’orbite terrestre.
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    Il y a toujours quelque chose qui s’appelle le Parti Républicain, mais il a depuis longtemps abandonné toute prétention à être un parti parlementaire normal. Il est au service, au doigt et à l’œil, des très riches et du secteur corporatiste et a un catéchisme que tout le monde doit chanter à l’unisson, un peu comme l’ancien Parti Communiste. Le fameux commentateur conservateur, l’un des plus respectés – Norman Ornstein – décrit le Parti Républicain d’aujourd’hui comme, en ses termes, « une insurrection radicale – idéologiquement extrême, dédaigneuse des faits et du compromis, rejetant son opposition politique » – une sérieuse menace à la société, comme il le souligne.
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    Bref, RECD est très éloignée de la rhétorique emphatique à propos de la démocratie. Mais il existe une autre version de la démocratie. En réalité il s’agit de la doctrine de base de la théorie démocratique libérale contemporaine. Je vais donc vous donner des citations illustratives de la part de personnages éminents – incidemment pas des personnages de la droite. Ce sont tous des libéraux à la Woodrow Wilson-FDR-Kenndy, des figures consensuelles, en fait. Donc selon cette version de la démocratie, « le public est fait d’étrangers ignorants et importuns. Ils doivent être mis à leur place. Les décisions doivent être entre les mains d’une minorité intelligente d’hommes responsables, qui doivent être protégés du piétinement et de la clameur du troupeau abruti ». Le troupeau a une fonction, il se trouve. Il est attendu d’eux qu’ils portent leur poids une fois toutes les quelques années, à un choix entre les hommes responsables. Mais à part cela, leur fonction est d’être des « spectateurs, pas des participants à l’action » – et c’est pour leur propre bien. Parce que comme l’avait souligné le fondateur de la science politique progressiste, nous ne devrions pas succomber à des « dogmatismes démocratiques sur les gens étant les meilleurs juges de leurs propres intérêts ». Ils ne le sont pas. Nous sommes les meilleurs juges, et il serait donc irresponsable de les laisser prendre des décisions tout comme il serait irresponsable de laisser un enfant de trois ans courir en pleine rue. Les attitudes et les opinions ont donc besoin d’être contrôlées pour le bénéfice de ceux que vous contrôlez. Il est nécessaire de « régenter leurs esprits ». Il est aussi nécessaire de discipliner les institutions responsables de « l’endoctrinement de la jeunesse. » Toutes des citations, au fait. Et si nous pouvons accomplir cela, nous pourrions revenir aux bons vieux jours où « Truman avait été capable de gouverner le pays avec la collaboration d’un nombre assez réduit d’avocats et de banquiers de Wall Street. » Tout ceci provient d’icônes de l’establishment libéral, les théoriciens en pointe de la démocratie progressiste. Certains d’entre vous reconnaîtront peut-être certaines des citations.
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    Les racines de ces attitudes remontent plutôt loin. Elles remontent aux premiers soubresauts de la démocratie moderne. Les premiers survinrent en Angleterre au 17è siècle. Comme vous savez, plus tard aux USA. Et elles persistent de façon fondamentale. La première révolution démocratique fut l’Angleterre des années 1640. Il y a eu une guerre civile entre le roi et le parlement. Mais la noblesse, les gens qui s’appelaient eux-mêmes « les hommes de meilleure qualité », étaient horrifiés par les forces populaires en plein essor qui commençaient à faire leur apparition dans l’arène publique. Ils ne voulaient soutenir ni le roi ni le parlement. Citez leurs pamphlets, ils ne voulaient pas être dirigés par des « chevaliers et des gentilshommes, qui ne font que nous oppresser, mais nous voulons être gouvernés par des compatriotes tels que nous-mêmes, qui connaissons les maux du peuple ». Voilà une chose assez terrifiante à considérer. Maintenant, la populace a été une chose assez terrifiante à voir depuis. En réalité elle l’était déjà depuis longtemps auparavant. Elle l’est restée un siècle après la révolution démocratique britannique. Les fondateurs de la la république états-unienne avaient à peu près la même opinion de la populace. Ils ont donc déterminé que « le pouvoir doit être entre les mains de la richesse de la nation, le lot d’hommes plus responsables. Ceux qui ont de la sympathie pour les propriétaires et pour leurs droits », et bien sûr pour les propriétaires d’esclaves à l’époque. En général, les hommes qui comprennent qu’une tâche fondamentale du gouvernement est « de protéger la minorité opulente de la majorité ». Ce sont des citations de James Madison, l’encadrant principal – ceci était dans la Convention Constitutionnelle, qui est beaucoup plus révélatrice que les Papiers Fédéralistes que lisent les gens. Les Papiers Fédéralistes étaient tout simplement un effort de propagande pour tenter de faire que le public soit d’accord avec le système. Mais les débats dans la Convention Constitutionnelle sont beaucoup plus révélateurs. Et en fait le système constitutionnel a été créé sur ces bases. Je n’ai pas le temps d’entrer dans le détail, mais il adhérait globalement au principe qui a été énoncé simplement par John Jay, le président du Congrès Continental, puis tout premier Premier Président de la Cour Suprême, et comme il le disait, « ceux à qui appartiennent le pays devraient le gouverner ». Ceci est la doctrine centrale de RECD jusqu’à aujourd’hui.
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    Il y a eu beaucoup de combats populaires depuis – et ils ont gagné beaucoup de victoires. Les maîtres, par contre, ne relâchent rien. Le plus il y a de liberté qui est gagnée, plus intenses deviennent les efforts pour réorienter la société vers une trajectoire plus appropriée. Et la théorie démocratique progressiste du 20è siècle que je viens d’échantillonner n’est pas très différente de la RECD qui a été accomplie, hormis pour la question de : quels hommes responsables devraient régner ? Cela devrait-il être les banquiers ou les élites intellectuelles ? Ou à ce propos cela devrait-il être le Comité Central dans une version différente de doctrines similaires ?
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    Et bien, un autre aspect important de RECD est que le public doit être maintenu dans l’ignorance de ce qui est en train de lui arriver. Le « troupeau » doit rester « abruti ». Les raisons en ont été expliquées de façon lucide par le professeur en science des gouvernements de Harvard – c’est le titre officiel – une autre figure libérale respectée, Samuel Huntington. Comme il l’a souligné, « le pouvoir reste fort tant qu’il reste dans l’ombre. Exposé à la lumière, il commence à s’évaporer ». (…)
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    Une feuille de route vers un monde juste, le peuple ranimant la démocratie —
    http://inventin.lautre.net/livres/Chomsky-Feuille-de-route.pdf
    -- (Le texte complet en PDF)

  • [BBS] Internet et le lave-vaisselle (lettre à Michel Serres)- Ecrans
    http://www.ecrans.fr/BBS-Internet-et-le-lave-vaisselle,16803.html

    Je sais pas toi, mais moi je n’ai pas pour habitude de rester devant la machine, en l’ouvrant de temps en temps pour voir où elle en est dans la vaisselle : je mets les assiettes et le produit dedans, j’appuie sur le bouton, et je vaque. Visiblement j’ai faux.

    Donc je lui dis « je ne sais pas », et la dame m’explique que si je ne réponds pas à ses questions elle ne va pas pouvoir m’aider.

    Texto.

    Le #SAV dans le vrai monde vs le SAV sur internet. Comme toujours, Laurent Chemla est pédago et rigolo.

  • NIQUE LE PAPE

    Monsieur Joseph Ratzinger, ci-devant chef d’une association de malfaisants qui diffuse depuis des siècles le poison de la soumission aux pouvoirs, vient de rappeler urbi et orbi l’obligation imposée aux moutons de se reproduire pour fournir à leurs maîtres la main d’œuvre dont ils ont besoin. Autrement dit : les petits hommes asservis ont le devoir de s’accoupler pour faire des gosses à l’économie, c’est-à-dire à l’État. Dans ce but, les prêtres ont institué un permis de niquer appelé «   mariage   », dont l’obtention est nécessaire pour ne pas être poursuivi, embastillé, voire torturé, exécuté, pour toute relation dite « sexuelle ». Les petits d’hommes sont ainsi assimilés par leurs bergers à n’importe quelle espèce domestiquée - bovins, ovins, gallinacées - et tenus de respecter la « loi naturelle » de la saillie contrôlée en vue du renouvellement du cheptel. Autrement dit encore : chaque mâle est habilité à niquer une femelle identifiée pour l’engrosser.

    N’oublions pas que le même Ratzinger, avant de se cacher sous le pseudo de Benoît numéro 16 à la tête de l’église dite catholique, dirigeait la Congrégation de la Foi, c’est-à-dire en fait la Sainte Inquisition, organisation de malfaiteurs internationaux en soutanes qui, plusieurs siècles durant, a fait torturer des milliers, voire des millions de gens dont la conduite s’écartait des règles imposées par le pouvoir de droit divin. Ce vieillard souffreteux est l’héritier d’une horde de prêtres assassins qui n’aimaient rien tant qu’envoyer les sodomites sur le bûcher.

    Pour ce grimaçant prélat, l’autonomie individuelle, la liberté de conscience et de conduite, le plaisir de vivre, la jouissance sans entraves, sont autant d’inventions du diable qu’il s’agit d’éradiquer par tous les moyens. Eh quoi, l’État français voudrait accorder aux sodomites le même permis de niquer qu’aux bons et loyaux serviteurs de la «   morale naturelle    »    ? Certes, cela permettrait de redonner au «   mariage   » un peu de l’attrait qu’il a perdu. Mais prendre pour normale l’inversion   ? Accepter des couples se livrant à l’abomination des abominations   ? Ce serait installer le démon sur le trône de Saint-Pierre.

    Pourtant les bonnes âmes qui ont concocté le projet du «    mariage pour tous    » ne visent d’autre but que relooker à la sauce moderne la vieille institution matrimoniale. En accordant aux « gays » le droit de se passer la bague au doigt, ils déplacent seulement d’un cran la limite au delà de laquelle les conduites sexuelles cessent d’être acceptables. OK pour «   papa-papa    » ou pour «   maman-maman   », mais pas question de liberté tout azimut. Comme pour les hétéros, il y aura les homos convenables – et les autres. L’Inquisition laïque saura trouver moyen de poursuivre les hérétiques.

    Des humoristes irrévérencieux ont relevé qu’il n’y aurait bientôt que les pédés et les curés pour vouloir se «   marier    ». N’oublions pas les bourgeois bien-pensant, qui ont toujours aimé s’afficher à la messe avant de rejoindre leurs maîtresses ou leurs gitons dans des alcôves secrètes. En cela, ils prenaient la suite des prêtres qui, chacun le sait, ont grâce à la confession la possibilité de se constituer un fichier de toutes les perversions de leur paroisse et d’y puiser pour leurs petites manies personnelles. Quitte à s’en repentir à chaudes larmes pour remettre le couvert à la première occasion. Car plus sévère est l’inquisition, plus grande est l’hypocrisie. Il y a peu, chacun savait que les religieux chargés de l’éducation des enfants abritaient dans leurs ordres de vicieux tartuffes qui profitaient de leur position pour repérer parmi leurs protégés ceux qui seraient les plus enclins à céder aux tentations de leurs fantasmes. Le pire n’était pas qu’ils fussent «   pédophiles    », mais en même temps curés, frères, ou autres masques grâce auxquels ils soufflaient en même temps sur le feu qu’ils étaient chargés d’étouffer. En somme, des pompiers pyromanes de la pire espèce, puisqu’usant de l’autorité pour soumettre les faibles à leur pouvoir de séduction. Mais au fond, de leur point de vue, n’était-ce pas le meilleur moyen d’éliminer les pulsions dangereuses que leur montrer la pourriture comme seul objectif   ? D’ailleurs ne dit-on pas «   je te nique    » à celui ou celle qu’on humilie    ? Et l’humilité est la vertu du serviteur soumis. La femme à son mari ou le giton à son curé. Du moment que la nuque est pliée, peu importe la méthode. C’est dire qu’il n’y a pas tant de contradiction pour un prêtre à pouvoir à la fois consacrer des époux et séduire des enfants de chœur.

    En notre époque de tsunamis sociaux et d’apocalypses écologiques, alors que l’économie mondiale ne sait plus comment empêcher de s’écrouler tout l’édifice grâce auquel une poignée de nantis imbéciles asservit une multitude domestiquée, alors que les conditions mêmes de la vie sont menacées d’extinction par le développement de la production des marchandises, alors que des conflits moyenâgeux conduisent à des massacres de masse grâce à l’emploi de technologies de guerre moderne, il est réjouissant de constater qu’il existe un pays où le combat politique consiste à mobiliser dans la rue les partisans et les ennemis d’un permis de niquer nouvelle formule. Comme disait Einstein, la bêtise n’a pas de limite.

    Même quand on menaçait de les pendre, écarteler, brûler vifs, les jouisseurs et jouisseuses de toutes tendances ont continué de satisfaire leurs penchants particuliers. Gageons qu’en ces temps de désordre et de tumulte, ils ou elles sauront tirer profit des vaines querelles de leurs mentors pour s’en payer en douce de bonnes et juteuses tranches. La morale, disait Rimbaud, est une faiblesse de la cervelle. Laissons-en donc l’usage aux mous du cerveau   : les benêts et leurs bouffons de maîtres. Comme aurait dit Claudel, s’il n’avait trempé sa queue dans un bénitier pour écrire des fadaises   : rira toujours bien mieux, qui rira le dernier.

    Paul, janvier 2013

    • Au nom de l’égalité des droits, des millions de personnes célibataires vivants en unions libres, exigent l’abolition des privilèges octroyés aux couples mariés.
      L’égalité est pour tous ou bien pas du tout.
      Il s’agit aujourd’hui de critiquer la normalité conformiste d’où quelle vienne.
      --
      Le premier mai 1971, le Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire gueulait dans la rue :
      A bas la famille !
      A bas la dictature des « nornaux » !
      --
      FHAR, Rapport contre la normalité
      http://inventin.lautre.net/livres/FHAR.pdf

  • « Notre-Dame-des-Luttes », un documentaire intimiste sur la résistance à l’aéroport | Une Zapnet Rue89 Planète

    http://www.rue89.com/rue89-planete/zapnet/2012/12/25/notre-dame-des-luttes-un-documentaire-intimiste-sur-la-resistance
    25/12/2012 à 18h25

    Le documentariste Jean-François Castell a passé trois semaines au cœur de la Zone à défendre de Notre-Dame-des-Landes et nous livre, pour Noël, son regard « à hauteur d’homme » sur cette lutte qui a pris une ampleur exceptionnelle depuis le début de la répression policière le 16 octobre et surtout avec la manifestation de réoccupation du 17 novembre.

    #résistances #aéroport #notre-dame-des-landes #espace-privé #espace-public

  • PRÉSAGES D’IMPOSTEURS

    « Le passé et le futur sont des manières d’être au présent. »
    Humberto Maturana et Francisco Varela, L’arbre de la connaissance.

    Dans le contexte de la crise, le changement apparaît momentanément en panne à tous ceux qui recherchent la solution finale en se projetant dans un avenir abstrait qui n’est qu’une projection de cette crise en représentation. Le futur est alors déterminé par une prédiction issue de cette représentation. Mais une prédiction ne peut se vérifier d’elle-même que si, et seulement si on lui porte une croyance aveugle.

    Personne ne peut prédire l’avenir, encore moins en ces temps d’incertitude et de confusion.
    L’hypothèse d’une catastrophe imminente permet de faire disparaître artificiellement le désastre mortifère qui est déjà là. Ainsi, le spectre de la catastrophe est utilisé comme conditionnement d’une soumission renforcée.

    La condition humaine n’est pas un destin marqué par une histoire déjà écrite, mais l’émergence de mouvements, d’accidents et d’erreurs qui se font et se défont dans le cours de situations imprévues...
    Si l’on se permet de ne plus considérer le futur comme une projection que le présent consomme en le précipitant dans un passé toujours plus présent, on peut alors se l’approprier comme un devenir désirable vécu au présent, plein de nouvelles possibilités qui ne cherchent qu’à se réaliser, un avenir sans entraves qui se construit ici et maintenant.

    Lukas Stella,
    extraits de "L’invention de la crise, escroquerie sur un futur en perdition".
    http://inventin.lautre.net/linvecris.html

  • #crise
    L’INVENTION DE LA CRISE, 
Escroquerie sur un futur en perdition
    Éditions L’Harmattan, 2012.

    La crise n’est pas une fatalité, ni un accident de parcours, c’est une invention construite de toutes pièces, qui permet au capitalisme financier de parfaire sa domination en usurpant tous les pouvoirs. Nous sommes entrés dans l’État d’urgence d’une guerre ouverte contre les populations. Ce n’est pas le dysfonctionnement du système qui est ici en cause, mais bien l’économie elle-même dans son fonctionnement, son achèvement inévitable.

    Il s’agit maintenant d’appréhender le système sous tous ses aspects et dans toute la complexité de ses interactions, pour mieux comprendre comment la création de richesses a été accaparée par la haute bourgeoisie dans le processus de la mondialisation, accéléré par l’informatisation généralisée, la prolifération des dettes, et par le pillage d’un futur déjà ruiné. L’escroquerie de ce temps décompté se précipite, l’espace se restreint aux marchandages et aux spéculations dévastatrices, c’est alors que notre survie s’amenuise dans les restrictions, la misère et la barbarie.

    Le règne de l’exploitation et de sa servitude, des séparations guerrières et des arnaques mafieuses, paraît se réduire aujourd’hui au scénario d’une catastrophe programmée. Quand il n’y a plus d’avenir, on peut alors abandonner les préjugés réducteurs d’un passé révolu. C’est le moment de prendre le pouvoir sur ses propres conditions d’existence au cours de situations incertaines, par des pratiques libertaires en coopérant tous ensemble à l’auto-organisation d’une démocratie générale.

    http://inventin.lautre.net/linvecris.html

  • CHOISIR SON MAÎTRE N’EST PAS UNE LIBERTÉ
    Lukas Stella, mars 2012
    http://inventin.lautre.net/contributions.html#choisirsonmaitre

    La majorité des électeurs ne croient plus en ce que disent les politiciens, experts en baratin publicitaire. La farce bat son plein, et le plébiscite de Nicoléon a un arrière-goût de tragédie en ces temps de crise, qu’il a lui-même créée. Mais quand les « veaux » votent dans cette guignolerie spectaculaire, ce n’est plus pour un candidat, mais par défaut ou contre les autres qui sont encore pires. On élimine plutôt que l’on sélectionne. La plupart ont compris que les élections sont des « pièges à cons », qu’une fois élu le président ne respecte jamais ce pour quoi il a été élu. Il ne reste que le choix de se faire avoir, trompé et manipulé. Dans cette magouille, l’important n’est pas le choix, mais le show, l’illusion de la démocratie.

  • L’invention de la crise, escroquerie sur un futur en perdition, de Lukas Stella, 2012
    http://inventin.lautre.net/linvecris.html

    La crise n’est pas une fatalité, ni un accident de parcours, c’est une invention construite de toutes pièces, qui permet au capitalisme financier de parfaire sa domination en usurpant tous les pouvoirs. Nous sommes entrés dans l’État d’urgence d’une guerre ouverte contre les populations. Ce n’est pas le dysfonctionnement du système qui est ici en cause, mais bien l’économie elle-même dans son fonctionnement, son achèvement inévitable.

    Il s’agit maintenant d’appréhender le système sous tous ses aspects et dans toute la complexité de ses interactions, pour mieux comprendre comment la création de richesses a été accaparée par la haute bourgeoisie dans le processus de la mondialisation, accéléré par l’informatisation généralisée, la prolifération des dettes, et par le pillage d’un futur déjà ruiné. L’escroquerie de ce temps décompté se précipite, l’espace se restreint aux marchandages et aux spéculations dévastatrices, c’est alors que notre survie s’amenuise dans les restrictions, la misère et la barbarie.