• Le retournement du cycle | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/11/19/le-retournement-du-cycle

    « L’effondrement du commerce mondial est déjà là depuis 2012. Depuis cinq années d’affilée, la croissance des volumes d’échanges mondiaux a été inférieure à la croissance du PIB mondial, alors que le commerce mondial avait connu une croissance explosive au cours des trente dernières années. Cette chute est sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. La démondialisation a déjà commencé, avant même la présidence Trump ».

  • La #victoire des laissés pour compte | Le Monolecte
    http://blog.monolecte.fr/post/2016/11/09/la-victoire-des-laisses-pour-compte

    L’#élection de Trump, c’est la victoire des perdants et de tous ceux (encore plus nombreux) qui ont conscience d’être à présent bien engagés à leur tour sur la planche savonneuse : ceux qui peinent à rembourser le crédit de leur maison en planches, qui se crèvent la vie et la santé avec plusieurs boulots pour continuer à surnager, qui préfèrent payer l’amende Obamacare plutôt que de continuer à se saigner pour une assurance santé qui bouffe leur budget tout en ne les couvrant pour rien, qui jonglent avec leurs cartes de crédit pour arriver à boucler la fin du mois et qui voient bien que malgré tous leurs efforts et leur adhésion aux valeurs du #libéralisme débridé et prétendument méritocratique, ils n’arriveront plus à amasser assez d’argent pour offrir une éducation suffisante à leurs enfants, un avenir, une chance, ni même un lambeau du #rêve américain.

  • L’#Anthropocène nous rend responsables du monde | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/10/07/lanthropocene-nous-rend-responsables-du-monde

    L’article de Nature dont est tirée la citation ci-dessus, justifie la datation la plus récente de l’Anthropocène, autour de 1950, en contestant celles qui se basent sur des données particulières pour faire remonter l’influence de l’homme à de périodes lointaines alors qu’il faut le dater du moment où l’humanité a déséquilibré toute la biosphère, ce qui est tout autre chose et n’a rien d’une bonne nouvelle. Il n’y a donc pas de « clou d’or » pouvant servir de signature géologique à une nouvelle ère mais une accumulation de produits artificiels ou extraits du sol (on a l’embarras du choix) témoignant du fait global de l’humanisation du monde, ou plutôt son industrialisation ou sa modernisation. Il n’est pas sûr, en effet, que ce soit l’homme en tant qu’espèce (anthropos) qui soit en cause mais bien plutôt une évolution techno-scientifique qui est un processus cognitif relativement autonome (assurant la puissance économique et militaire). L’évolution technique est sans aucun doute un prolongement de l’évolution biologique mais qui se situe malgré tout sur un autre plan que le biologique, ce qui est assez souvent la source de conséquences désastreuses sur l’environnement sans qu’on puisse y voir le résultat d’une volonté humaine mais le négatif de notre industrie, ses externalités négatives, effets pervers non voulus du système de production qui menace ses conditions de reproduction.

  • Au-delà de la dépression politique | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/08/16/au-dela-de-la-depression-politique

    Malgré le matraquage publicitaire, la leçon de notre époque pourrait être qu’on n’est pas fait pour le bonheur individuel, pas autant qu’on le prétend en tout cas. En dépit de toutes nos dénégations, nous avons, semble-t-il, bien plus besoin de nous battre ou nous engager dans une grande cause pour justifier notre existence. C’est du moins ce que je ressens, comme d’autres, ne comprenant pas trop les jouisseurs hédonistes contents d’eux-mêmes et de leur petite vie au milieu du désastre. Le bonheur comme bien suprême est à vomir.

  • Le code est la loi ? | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/07/21/le-code-est-la-loi

    Or, la blockchain vient de rencontrer son premier véritable accroc, mettant en pièce son idéologie libertarienne pour corriger un bug et récupérer de l’argent volé, cela au nom de la grande majorité des utilisateurs. Tout-à-coup, on est revenu sur terre avec tous les problèmes qu’on connaît bien, de police comme de régulation des marchés. Que le libéralisme soit beaucoup plus productif que l’étatisme n’implique absolument pas que les marchés ni la monnaie pourraient marcher sans Etat et la prétention d’une loi immuable se heurte rapidement au réel. Comme disaient les anciens Grecs « les lois sont comme des toiles d’araignées qui n’attrapent que les petites mouches mais laissent passer les guêpes et les plus gros bourdons ». On ne peut faire barrage aux puissances réelles, ce dont la blockchain vient de faire l’expérience.

    • Idéalisation des monnaies fiat (étatiques). Par exemple, il parle des crypto-monnaies « comme le Bitcoin, préservée de toute intervention d’une quelconque démocratie » comme si l’euro ou le dollar étaient gérées de manière démocratique !

      Sans compter la confusion entre technique et politique comme lorsqu’il parle de « son [celle de la blockchain] idéologie libertarienne » comme si le code de la blockchain avait une idéologie ! (Les humains en ont une, pas le logiciel.)

    • De nombreux logiciels et plein d’autres techniques complexes (le nucléaire par exemple) ont une idéologie incluses dedans, et cela justement parce que ce sont des humains qui les ont conçu et qu’elles sont le produit d’un moment et d’un mode de pensée particulier. Les techniques complexes contiennent un monde, contiennent en elles-même une direction générale.

      #progressisme

    • http://www.jssj.org/article/deplacer-des-montagnes-avec-le-vent-numerique

      Si les promoteurs des crypto-monnaies prétendent au déploiement d’une nouvelle monnaie – et même d’une nouvelle génération de monnaie –, c’est donc sur la base d’une appréhension bien particulière de ce qu’est (ou devrait être) une monnaie. D’autres conceptions de la monnaie pourraient leur être opposées (Aglietta & Orléan, 2002, Testart, 2001), et notamment par le fait qu’elles stipulent qu’une monnaie est forcément adossée à une institution qui en établit la validité. Ces positions contradictoires, qui contestent mutuellement leurs prémisses respectifs, partagent cependant un principe commun [...] : il existerait un concept général et trans-historique de monnaie qui permettrait d’en tirer un rôle générique et commun aussi bien dans les sociétés de l’antiquité grecque (et même plus anciennes encore) que dans les sociétés modernes de l’ère industrielle. [...]

      La monnaie est donc appréhendée comme une donnée quasi-anthropologique récurrente et stable dans ses fondements, dont les formes peuvent varier, mais dont la signification profonde est établie dès son avènement et pour laquelle ne varient que ses manifestations superficielles, que ce soit de manière contingente ou évolutive. Ainsi, seules des fonctions dérivées et purement techniques caractériseraient les développements les plus récents notamment dans l’expansion de la sphère financière ou la dématérialisation des échanges monétaires. Les variations historiques ne correspondraient qu’à l’avènement de formes de plus en plus sophistiquées, mais aussi épurées, de moyens mis en œuvre pour viser des fins quasi naturelles comme le serait la circulation des biens ou des informations, par exemple. On peut objecter à ces positions diverses et irréconciliables qu’elles ont en commun un biais réducteur : la rétro-projection sur les sociétés pré-capitalistes de catégories qui sont propres à cette forme de synthèse sociale bien particulière. Les particularités en question sont à la fois absentes et omniprésentes dans les théories de la monnaie correspondant à ces positions antagonistes : absentes car non interrogées, omniprésentes car constituant le cadre dans lequel sont rabattus des phénomènes qui relèvent d’une autre logique.

      Il n’entre pas dans le cadre de cet article d’établir quelle théorie de la monnaie serait la plus adéquate pour analyser l’émergence des crypto-monnaies. Il s’agira plutôt d’établir en quoi ce phénomène se situe dans une forme de synthèse sociale bien particulière. S’il convient donc de garder à l’esprit qu’un concept trans-historique de monnaie exprime avant tout une forme de conscience socialement et historiquement située, cette revendication d’une nouvelle monnaie inscrite dans de nouveaux supports peut être interprétée selon deux angles complémentaires. D’une part, comme la marque de « l’illusion du moment » concernant un phénomène considéré à tort comme étant une réalité transposable d’une forme de synthèse sociale à une autre, d’autre part comme l’indice d’une nouvelle phase de la forme de synthèse sociale dans laquelle se déploie cette revendication.

    • Par exemple, il parle des crypto-monnaies « comme le Bitcoin, préservée de toute intervention d’une quelconque démocratie » comme si l’euro ou le dollar étaient gérées de manière démocratique !

      Ce n’est pas parce qu’on remet en cause les crypto-monnaies qu’on adule euro et dollar. Voici ce que dit Jean Zin dans un commentaire plus bas :

      Le néolibéralisme vise à dépolitiser l’Etat, le dé-démocratiser par des institutions régulatrices indépendantes mais c’est une utopie, on ne peut pas faire s’évaporer les forces sociales réellement agissantes. Il ne s’agit pas de dire que la politique c’est bien, j’en pense le plus grand mal, mais que c’est un réel inéliminable, que ce soit au niveau local ou mondial. Je plaide pour une fin du théologico-politique et la reconnaissance de l’échec du politique pour avoir une chance de faire un peu mieux mais cela ne fera pas disparaître la puissance de l’argent et des marchés, ni la nécessité constante d’adaptation et de régulation.

      Il ne s’agit pas de la conception qu’on peut avoir d’une monnaie mais de l’efficacité d’un type de monnaie dans un système de production donné, selon les périodes et les marchés. Il ne s’agit pas de ce qu’on voudrait. En général, le politique se mêle de l’économie quand ça va mal, on ne peut attendre que les Etats restent les bras croisés quand tout s’écroule sous prétexte qu’il ne faudrait pas toucher au code comme à une loi divine.

      Et puis, euro et dollar sont soumis à des rapports de force (dont une partie de ce rapport de force vient d’une variable démocratique certes avec plein de défauts et dysfonctionnements), à tel point que, par exemple, il n’est pas sûr que l’euro survive (au moins sous sa forme actuelle) dans les 10 ans qui viennent.

    • @Rastapopoulos Je ne voulais pas dire que les concepteurs du logiciel n’avaient pas d’opinions politiques (ils en avaient) ni que le logiciel était neutre. Je sais bien que tout système technique encourage certains usages et en décourage d’autres (c’est le « code is law » de Lessig qui, comme beaucoup de phrases fameuses, est souvent cité à contre-sens par des gens qui n’ont pas lu le texte original).

      Je voulais dire que le raccourci « l’idéologie de la blockchain » m’énervait car il suppose que l’idéologie vient du logiciel. Cela dépolitise le débat, je trouve.

    • @alexcorp Les crypto-monnaies sont aussi soumises à des décisions politiques qui dépendent de rappprts de force, et qui ne sont pas plus ou moins démocratiques que celles de l’euro ou du dollar. Deux exemples typiques récents sont l’impossibilité de Bitcoin à prendre une décision ferme sur la question de la taille des blocs, et a contrario la décision (qu’on la juge bonne ou mauvaise) d’Ethereum de changer les règles pour récupérer l’argent de The DAO. Dans les deux cas, on a bien de la politique, et des humains qui décident.

    • [...] il suppose que l’idéologie vient du logiciel. Cela dépolitise le débat, je trouve.

      Si l’on prend le terme idéologie dans le sens (faible) d’opinion, bien évidemment que le logiciel n’a pas d’idéologie car ce sont bien les êtres humains qui se forment une opinion. Mais le terme d’idéologie est loin d’être synonyme d’opinion. Il désigne plutôt le cadre de pensée a priori, les catégories abstraites qui semblent pourtant avoir une existence bien réelles pour les membres d’une société donnée, à tel point qu’elles sont vécues comme des contraintes « naturelles », et non pas issues de leur propre agir inconscient.

      Penser que le logiciel ne fait que véhiculer les opinions de ses concepteurs et qu’à ce titre il suffit de les dénoncer pour désamorcer son potentiel de domination, de nuisance ou d’aliénation, c’est justement écarter tout un pan du questionnement critique (et donc politique) que l’on doit porter sur les techniques numériques.

  • D’une lucidité désabusée, le penseur des Causses du Lot nous prédit l’insurrection qui ne viendra pas.

    A la place de la République | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/04/19/a-la-place-de-la-republique

    Au risque de désespérer la jeunesse, il faut bien dénoncer un démocratisme ambiant assez inconsistant, notamment la prétendue démocratie directe des Assemblées générales et cette dictature du vote majoritaire sur toutes les questions (les sciences montrant bien que la vérité ne se décide pas à la majorité contrairement aux impôts). En 1998, l’assemblée des chômeurs de Jussieu avait au contraire supprimé les votes, chacun suivant ou non les propositions d’action, ce qui avait l’avantage, outre de ne pas s’arroger une fausse légitimité, de moins perdre de temps. D’abord, il faut dire de quoi cette mise en scène est la caricature, car la véritable démocratie, c’est effectivement la démocratie de face à face et donc qui s’exprime d’autant mieux sur des places, démocratie directe légitime en tant que démocratie locale mais qui n’a aucun sens à vouloir décider pour les autres (un pays tout entier si ce n’est le monde) ! On oublie presque toujours qu’aussi bien Aristote que Rousseau considéraient impensable une démocratie qui dépasse la cité, et encore, assez peu nombreuse pour qu’on puisse couvrir l’assemblée du regard.

    #Nuit_debout

  • #Droit du #travail : l’occasion manquée ? | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/03/08/droit-du-travail-loccasion-manquee

    Il est assez douteux que la #mobilisation des #syndicats soit assez forte pour repousser le projet mais ce ne serait que partie remise car le prochain président ne devrait pas prendre de gants pour aller encore plus loin. Le débat parlementaire pourrait quand même l’améliorer un peu mais sans en changer l’essentiel. Cependant, le reproche principal qu’on devrait lui faire, c’est le même qu’à ses opposants, c’est de manquer d’ambition et de vision du futur. La seule mesure relativement positive, c’est le compte personnel d’activité, sous une forme bien trop insuffisante. Chacun voit bien le déséquilibre entre une #précarité accrue, qui est celle de l’accélération technologique plus que du droit du travail, et l’absence de contrepartie pour sécuriser les parcours professionnels. Au lieu de la refuser verbalement, reconnaître cette précarité comme liée à une #économie en évolution rapide permettrait de revendiquer les mesures nécessaires pour y faire face, en premier lieu un #revenu garanti, au lieu de se battre en vain contre l’évolution économique. Les chances pour qu’on prenne cette orientation sont à peu près nulles même si l’idée progresse, rejetée encore très majoritairement aussi bien par la droite que par la gauche (même si on en a déjà une petite préfiguration avec la prime d’activité). La perspective de revenus inférieurs au smic complétés par un revenu de base n’a certes rien d’idéal (rien d’une mesure révolutionnaire) mais vaut peut-être mieux que le chômage de masse ou les travailleurs pauvres sous-payés sans revenu supplémentaire.

  • La naturalisation du #capitalisme | Jean Zin
    http://jeanzin.fr/2016/01/26/la-naturalisation-du-capitalisme

    Il est clair que l’#économie ne renvoie pas du tout à un état de nature originaire puisqu’elle repose largement sur l’Etat de Droit et des constructions juridiques relativement récentes. Rien de plus facile que de rétorquer, au prétendu « ordre spontané » d’Hayek, que sa « constitution de la liberté » est bien épaisse à vouloir empêcher toute intervention étatique (la dérégulation produit une inflation de lois). De plus, chaque étape de la libéralisation peut être considérée comme voulue puisqu’on trouve toujours un ministre ou un vote qui ouvrent la voie au libre-échange et à la financiarisation, pas si spontanés que ça, donc, et en rupture avec le passé. Les théories du complot voudraient en faire un événement contingent, dû à des compromissions personnelles, à la #corruption des oligarchies, au manque de transparence et de #démocratie mais cette contingence peut être mise en doute quand c’est un mouvement d’ensemble de tous les pays.