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  • Le Pain de silence

    « “Sans doute n’as-tu jamais été un enfant ” dit ma mère sans remuer les lèvres, sans prononcer une syllabe ni un mot, avec ces yeux tristes, en veilleuse que je lui ai toujours vus, comme si elle avait en permanence tiré le rideau sur sa vie, comme si elle avait pu bien sûr être là face à moi, avec son corps et sans pouvoir exprimer ce qui l’habitait, nulle syllabe, aucun mot, depuis tant de temps, un temps qui me dépassait, me submergeait… »

    https://www.editionszoe.ch/auteur/adrien-pasquali
    #livre #Adrien_Pasquali #silence #migrations #Suisse #migrants_italiens #émigration_italienne

    • #Adrien_Pasquali, constructeur d’une maison de mots, a été vaincu par le silence

      L’écrivain suisse d’origine italienne Adrien Pasquali s’est donné la mort mardi à Paris. Il a récemment publié son dernier livre, « Le Pain de silence », aux Editions Zoé à Genève. Romancier, traducteur et brillant universitaire, Pasquali était chargé de cours en littérature romande aux Universités de Lausanne et de Genève. Hommage

      A 40 ans, Adrien Pasquali a choisi de mettre fin à ses jours. La nouvelle est brutale, la stupeur, l’émotion, la consternation sont vives chez tous ses amis et collègues. Le Pain de silence, son dernier roman, vient de paraître (Samedi Culturel du 13 mars) : force nous est aujourd’hui de déchiffrer dans ce récit haletant le testament d’un écrivain pris dans un étau implacable. Le silence, qu’il attaque, qu’il conjure, qu’il apprivoise, a été le plus fort, et il n’aura plus été possible à l’écrivain de différer le point final.

      Romancier, traducteur et brillant universitaire, Adrien Pasquali, né en 1958 à Bagnes, appartenait aux immigrés de la « seconde génération », celle qu’on dit parfois maudite, déracinée, sans lieu ni langue. Après le Collège de St-Maurice, Pasquali fait ses études à l’Université de Fribourg. Sa thèse de doctorat, dirigée par Jean Roudaut, porte sur Adam et Eve de Ramuz. Lecteur de français aux Universités de Saint-Gall, puis de Zurich, Pasquali vivait à Paris depuis plusieurs années, près de ses deux fils, qui comptaient pour lui plus que tout. Depuis 1997, il était chargé de cours en littérature romande aux Universités de Lausanne et Genève. Pasquali était associé au projet d’édition des romans de Ramuz en Pléiade.

      Si la déchirure de l’émigration est omniprésente dans l’univers de Pasquali, ce n’est pas sur le mode de la dénonciation ou de l’analyse : elle aura été une toute-puissante incitation à se construire, dans le langage, une maison de mots. La littérature aura été pour lui une façon d’opposer les formes et la fiction au non-être, une façon de rendre éloquent un silence originel. L’impressionnante bibliographie d’Adrien Pasquali témoigne du rempart qu’il a tenté de construire. A relire l’œuvre à la lumière du dernier livre, et du regard douloureusement lucide qu’il porte sur l’incompatibilité, vécue dans l’enfance, d’une langue et d’un monde irréel parce que non transmis, on est frappé par la constance des thèmes et la cohérence obstinée de l’interrogation pathétique reprise de livre en livre, selon des stratégies, un raffinement et un savoir-faire toujours renouvelés.

      En automne 1982, Ecriture publie le premier texte de Pasquali, lauréat du concours « Qui je lis ? » lancé par la revue. Ce texte, avec une sincérité sans équivoque, fait entendre la voix du futur écrivain : il y rend hommage à ses parents, originaires de la région de Gênes, venus en Valais pour y travailler : « Ils n’emportaient que leur statut, leur condition, une image de laggiù et l’amour qui est le leur ». Cette tendresse ne sera jamais démentie. Le premier récit, Eloge du migrant, est d’ailleurs dédié à ses parents. Le thème de la filiation et des origines hante toute l’œuvre, sans acrimonie. La référence à l’Italie est constante, terre de migration, terre d’enfance et de paysages lumineux. En rapport sans doute avec cette quête des origines, la passion de Pasquali pour la critique génétique.

      Dans son texte de 1982, l’écrivain évoque sa passion pour la littérature romande, dans laquelle il va trouver une forme d’identité. Lisant Corinna Bille, Crisinel, Haldas ou, surtout, Ramuz : « Je découvrais le pays de cet autre qui me forçait bien obligeamment à découvrir le mien ». Dans un récit, L’Histoire dérobée, la narration progressera de pastiche en pastiche, imitant successivement le style de sept « grands intercesseurs » romands. Ce premier texte de 1982 conjure aussi « le miracle de l’inachèvement » : de textes fragmentaires et discontinus aux romans en compositions cycliques, d’énigmes en quêtes irrésolues, et jusqu’à la longue phrase éperdue du dernier récit, ou dans les essais qu’il a consacrés à l’inachèvement, on constate chez Pasquali la hantise de la clôture et du point final.

      Le « silence éloquent »

      La plupart des romans contiennent une réflexion sur leur propre statut, sur leur propre dispositif narratif. Après les audaces expérimentales des premiers livres, les deux derniers récits, La Matta et Le Pain de silence, atteignent une transparence et une force d’évocation poétique à la fois plus puissantes et plus souveraines. Autoréflexion et narration s’harmonisent ici grâce à une langue maîtresse de tous ses enjeux.

      La traduction a été une autre manière, pour Pasquali, de pratiquer un « silence éloquent » : il a été le traducteur d’Alice Ceresa et de Giovanni Orelli, de Mario Lavaggetto et tout récemment, d’Aurelio Buletti (Ed. Empreintes, 1998). A l’impossible inscription dans un seul moule linguistique aura fait place, ici, une invitation à habiter dans la diversité des langues.

      Les sections de français des Universités de Lausanne et Genève rendront hommage à l’œuvre d’Adrien Pasquali lors d’une manifestation dans le courant du mois de mai.

      https://www.letemps.ch/culture/adrien-pasquali-constructeur-dune-maison-mots-vaincu-silence

  • A Genève, une sépulture théâtrale pour les victimes du colonialisme allemand

    Dans « #Vielleicht », l’acteur #Cédric_Djedje met en lumière le combat d’activistes berlinois pour que les rues du « #quartier_africain » de la capitale allemande changent de nom. Au Grütli, ce spectacle touche souvent juste, malgré des raccourcis discutables.

    Antigone est leur sœur. Comme l’héroïne de Sophocle, les comédiens afro-descendants Cédric Djedje et #Safi_Martin_Yé aspirent à rendre leur dignité aux morts, à ces dizaines de milliers de #Hereros et de #Namas exterminés en #Namibie par les Allemands entre 1904 et 1908. Un #génocide, reconnaissaient les autorités de Berlin au mois de mai 2021.

    Au Grütli à Genève, avant le Théâtre de Vidy et le Centre de culture ABC à La Chaux-de-Fonds, Cédric Djedje – à l’origine du spectacle – et Safi Martin Yé offrent une sépulture symbolique à ces oubliés de l’Histoire. L’artiste a découvert cette tragédie lors d’un séjour prolongé à Berlin. Il en est revenu avec Vielleicht, plongée personnelle dans l’enfer du #colonialisme. Ce spectacle est militant, c’est sa force et sa limite. Il met en lumière l’inqualifiable, dans l’espoir d’une #réparation. Il ne s’embarrasse pas toujours de subtilité formelle ni intellectuelle dans son épilogue.

    Qu’est-ce que Vielleicht ? Un rituel d’abord, une enquête ensuite, avec le concours de l’historienne #Noémi_Michel. Les deux à la fois en vérité. Un geste poétique et politique. Cédric Djedje et Safi Martin Yé ne vous attendent pas dans l’agora qui sert de lice à leur dialogue. Ils s’affairent déjà autour d’un monticule de terre. Ils y enfouissent des bocaux vides, habitacles des âmes errantes, qui sait ? Vous vous asseyez en arc de cercle, tout près d’eux. En face, une feuille d’arbre géante servira d’écran. Dans le ciel, des cerfs-volants badinent. Dans l’air, une musique répand sa prière lancinante.

    Le poids des noms

    C’est beau et triste à la fois. Ecoutez Cédric Djedje. Il raconte ces semaines à arpenter le quartier berlinois de Wedding, l’« #Afrikanisches_Viertel », son étonnement quand il constate que très peu d’Africains y habitent, sa surprise devant les noms des rues, « #Togostrasse », « #Senegalstrasse « . Que proclame cette nomenclature ? Les appétits de conquête de l’empire allemand à la fin du XIXe siècle. Que masque-t-elle surtout ? Les exactions d’entrepreneurs occidentaux, avidité prédatrice incarnée par l’explorateur et marchand #Adolf_Lüderitz qui fait main basse en 1883 sur #Angra_Pequena, baie de la côte namibienne.

    Cédric Djedje rencontre des activistes allemands d’origine africaine qui se battent pour que les rues changent de nom. Il les a interviewés et filmés. Ce sont ces personnalités qui s’expriment à l’écran. Quarante ans qu’elles œuvrent pour que #Cornelius_Fredericks notamment, chef nama qui a osé défier les troupes impériales entre 1904 et 1907, soit honoré. Vielleicht est la généalogie d’un crime et un appel à une réparation. C’est aussi pour l’artiste un retour sur soi, lui qui est d’origine ivoirienne. Dans une séquence filmée, il demande à sa mère pourquoi elle ne lui a pas parlé le #bété, la #langue de ses ancêtres.

    Si le propos est souvent captivant, les deux insertions théâtrales, heureusement brèves, n’apportent rien, tant elles sont maladroites et outrées – trois minutes pour résumer la fameuse conférence de Berlin qui, entre la fin de 1884 et le début de 1885, a vu les puissances européennes se partager l’Afrique. Le théâtre militant va droit au but, quitte à parfois bâcler la matière ou à asséner des parallèles qui méritent d’être interrogés.

    Le naturaliste genevois Carl Vogt, dont les thèses reposent sur une vision raciste de l’homme hélas courante à l’époque, est-il ainsi comparable aux colonialistes allemands de la fin du XIXe ? Invitée surprise, une activiste genevoise l’affirme à la fin de la pièce, exigeant avec d’autres que le boulevard Carl-Vogt soit débaptisé – le bâtiment universitaire qui portait son nom le sera bientôt, annonçait le rectorat fin septembre. On peut le comprendre, mais le cas Vogt, qui est toujours au cœur d’un débat vif, mériterait en soi une pièce documentée. Toutes les situations, toutes les histoires ne se ressemblent pas. L’amalgame est la tentation de la militance. Exit la nuance. C’est la limite du genre.

    https://www.letemps.ch/culture/geneve-une-sepulture-theatrale-victimes-colonialisme-allemand
    #toponymie #toponymie_politique #colonialisme #Allemagne #colonialisme_allemand #Allemagne_coloniale #art_et_politique #théâtre #Berlin #noms_de_rues

    ping @_kg_ @cede

    • Vielleicht

      Nous arpentons quotidiennement les rues de notre ville, nous y croisons des noms d’hommes (le plus souvent…) qui nous sont totalement inconnus. Qui étaient-ils au fond ? Qu’ont-ils fait de leur vivant pour mériter que leur mémoire soit honorée par un boulevard, une avenue, une place ?
      Cédric Djedje s’est penché sur ces questions en vivant plusieurs mois à Berlin dans le quartier de Wedding, quartier dit « africain » ou Afrikaniches Viertel qui doit son surnom avec vingt-cinq noms de rue se rapportant au passé colonial allemand, lui rendant par là hommage à l’endroit même où vivent, en somme, les descendants des peuples colonisés.
      En s’intéressant aux fantômes de la colonisation dans l’espace urbain contemporain, le comédien s’est interrogé sur comment on s’attache à un espace, comment l’histoire coloniale résonne avec cet attachement et comment dialoguent Histoire et vécu intime et quotidien.
      En imaginant une performance où se mêleront dimensions documentaire et fictionnelle, à la convergence de plusieurs disciplines et en faisant coexister et se frictionner les temporalités, la compagnie Absent.e pour le moment ambitionne de créer un spectacle qui questionne les concepts d’Histoire et de restitution : que veut dire « restituer » ? Est-ce possible ? Et comment ?
      Entre histoire dite « grande » et sentiments personnels vécus par le créateur — lui-même afro-descendant — lors de son enquête, Vielleicht fera peut-être écho chez les spectatrices à l’heure de traverser la place ou le carrefour si souvent empruntés au sortir de chez soi.

      https://grutli.ch/spectacle/vielleicht

  • Margaret Atwood : « La Cour suprême veut faire appliquer des lois du XVIIe siècle » Le Temps.ch
    https://www.letemps.ch/opinions/margaret-atwood-cour-supreme-veut-faire-appliquer-lois-xviie-siecle

    Le droit à l’avortement est en phase terminale aux Etats-Unis, où la Cour suprême envisage d’abroger l’arrêt qui le décriminalise depuis 1973. La grande écrivaine canadienne avait exploré les risques d’une dictature théocratique américaine dès 1985 dans « La Servante écarlate », son chef-d’œuvre dystopique. Voici sa tribune, d’abord publiée dans « The Atlantic » (1)


    Dessin d’abord paru dans le « Washington Spectator », Etats-Unis. — © Edel Rodriguez

    Au début des années 1980, je m’étais embarquée dans l’écriture d’un roman d’anticipation portant sur un futur dans lequel les Etats-Unis s’étaient désunis. Une partie du pays était désormais une dictature théocratique fondée sur la doctrine religieuse et la jurisprudence de la Nouvelle-Angleterre puritaine au XVIIe siècle.

    J’avais planté le décor dans les environs de l’Université Harvard, une institution réputée pour son libéralisme dans les années 1980, mais dont la raison d’être, trois siècles plus tôt, était de former le clergé du puritanisme.

    Retour vers le passé
    Dans la théocratie imaginaire de Galaad, les femmes n’avaient quasiment aucun droit, au même titre qu’en Nouvelle-Angleterre au XVIIe siècle. Les textes bibliques avaient été triés sur le volet, les passages retenus étaient soumis à une interprétation littérale. Dans la Genèse – en particulier dans la famille de Jacob –, les épouses des patriarches disposaient de femmes réduites en esclavage, appelées « servantes ». Ces épouses pouvaient intimer à leur mari d’avoir des enfants avec les servantes, puis elles déclaraient la progéniture comme étant la leur.

    J’ai fini par mettre un point final à ce roman, que j’ai intitulé La Servante écarlate, mais j’ai plusieurs fois suspendu son écriture car le propos me paraissait trop invraisemblable. Quelle idiote je fais. Les dictatures théocratiques ne sont pas cantonnées au temps jadis : il en existe un certain nombre aujourd’hui sur terre. Qu’est-ce qui épargnera ce sort aux Etats-Unis ?

    Prenons un exemple. Nous sommes en 2022, et un projet de décision de la Cour suprême des Etats-Unis a fuité dans la presse le 3 mai : on y lit que l’arrêt Roe v. Wade, jurisprudence en vigueur depuis cinquante ans, serait annulé au motif que l’avortement n’est pas cité dans la Constitution américaine et n’est pas « profondément ancré » dans « notre histoire et notre tradition ». Ce n’est pas faux. La Constitution des Etats-Unis ne mentionne pas la santé reproductive des femmes. A vrai dire, ce document ne fait aucune mention des femmes.

    Les femmes privées de personnalité juridique
    Les femmes ont été délibérément exclues du droit de vote. En 1776, la guerre d’indépendance avait notamment pour slogan « Pas de taxation sans représentation », et un gouvernement ayant l’assentiment des gouvernés était vu d’un bon œil à l’époque, mais rien de tout cela n’était valable pour les femmes. Elles ne pouvaient consentir elles-mêmes à leur représentation ou à leur gouvernement ; toute décision passait par l’intermédiaire de leur père ou époux. Les femmes ne pouvaient pas exprimer leur consentement, pas plus qu’elles ne pouvaient le refuser, car elles étaient privées du droit de vote.

    Cette situation a perduré jusqu’en 1920, année où a été ratifié le dix-neuvième amendement, lequel a suscité une virulente opposition au motif qu’il était contraire à la Constitution dans sa version première. Là encore, ce n’est pas faux.

    Les femmes ont été privées de personnalité juridique dans le droit des Etats-Unis bien plus longtemps qu’elles n’ont eu des droits. Si on commence à revenir sur la jurisprudence constante en s’appuyant sur le raisonnement du juge Samuel Alito [auteur du projet de décision de la Cour suprême divulgué dans la presse], pourquoi ne pas contester le droit de vote des femmes ?

    Notre corps, nous-mêmes
    La santé reproductive est au cœur du tumulte actuel, mais un seul côté de la pièce est visible : le droit de ne pas donner naissance. Cette pièce a un revers : l’Etat peut aussi vous interdire de procréer. L’arrêt Buck v. Bell, rendu en 1927 par la Cour suprême, a autorisé les pouvoirs publics à stériliser des personnes sans leur consentement.

    Cette décision a été invalidée par des affaires ultérieures, et les lois des Etats permettant les campagnes de stérilisation de grande ampleur ont toutes été abrogées, mais l’arrêt Buck v. Bell demeure. Cette forme d’eugénisme était autrefois jugée progressiste, et environ 70 000 stérilisations – d’hommes et de femmes, mais de femmes en majorité – ont eu lieu aux Etats-Unis. On en déduit que la tradition profondément ancrée veut que l’appareil reproductif des femmes n’appartienne pas aux femmes concernées ; il est la seule propriété de l’Etat.

    Je vous vois venir : ce n’est pas une histoire d’organes, mais de bébés ! Ce qui n’est pas sans susciter quelques questionnements. Est-ce qu’un gland est un chêne ? Est-ce qu’un œuf est une poule ? A quel moment l’ovocyte humain fécondé devient-il un être ou une personne à part entière ? Nos traditions – disons celles de la Grèce et de la Rome antiques, celles des premiers chrétiens – sont hésitantes à ce sujet.

    A la conception ? Au rythme cardiaque ? Aux premiers coups de pied ? Pour les plus intraitables des militants anti-IVG actuels, c’est à la conception, soit le moment selon eux où un amas cellulaire se voit doté d’une âme. Cette opinion repose néanmoins sur une conviction religieuse : la croyance en l’âme. Tout le monde ne partage pas cette conviction. Pourtant, tout le monde risque aujourd’hui d’être soumis à des lois rédigées par ces croyants. Ce qui est un péché dans un cadre religieux précis est sur le point d’être érigé en infraction pour tous.

    Une affaire de religion
    Reprenons le premier amendement de la Constitution. « Le Congrès ne fera aucune loi qui touche l’établissement ou interdise le libre exercice d’une religion, ni qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse, ou le droit qu’a le peuple de s’assembler paisiblement et d’adresser des pétitions au gouvernement pour la réparation des torts dont il a à se plaindre. » Les auteurs de la Constitution américaine, conscients des guerres de religion meurtrières qui avaient déchiré l’Europe à l’apparition du protestantisme, souhaitaient éviter cet écueil. Il n’y aurait donc aucune religion d’Etat. Personne ne pourrait être empêché par l’Etat de pratiquer le culte de son choix.

    C’était pourtant simple : si vous croyez que l’âme apparaît à la conception, vous devez vous abstenir de tout avortement, car il constitue un péché dans votre religion. Si cela ne fait pas partie de vos convictions, vous ne devez pas – conformément à la Constitution – être contraint par les convictions religieuses d’autrui.

    En revanche, si l’avis du juge Samuel Alito devient en effet la nouvelle jurisprudence constante, alors les Etats-Unis seront bien partis pour instaurer une religion d’Etat. Il y avait une religion officielle dans le Massachusetts au XVIIe siècle : en conséquence, les puritains soumettaient les quakers à la pendaison.

    Les sorcières au bûcher !
    Le texte rédigé par le juge Alito prétend se fonder sur la Constitution des Etats-Unis, mais il repose sur une jurisprudence anglaise du XVIIe siècle, une époque où les croyances en la sorcellerie ont abouti à la mort de nombreuses innocentes.

    Les procès des sorcières de Salem étaient bel et bien des procès – où siégeaient juges et jurés –, mais y était admise la preuve dite « spectrale », c’est-à-dire l’idée qu’une sorcière pouvait commettre ses méfaits grâce à son double possédé – son spectre. Selon ce raisonnement, même si vous étiez profondément endormie (témoins à l’appui), mais que quelqu’un vous accusait de supposées maltraitances contre une vache à des kilomètres de là, vous étiez coupable de sorcellerie. Et il était impossible de prouver le contraire.

    De la même manière, il sera très difficile de réfuter une fausse accusation d’avortement. Une fausse couche ou les déclarations d’un ex-conjoint suffira à vous assimiler à une meurtrière. Les accusations motivées par la vengeance et la malveillance se multiplieront, tout comme les dénonciations pour sorcellerie il y a cinq cents ans.

    Si le juge Alito veut faire appliquer les lois du XVIIe siècle, vous seriez bien avisé d’étudier ce siècle avec attention. Est-ce bien l’époque à laquelle vous voulez vivre ?
    Margaret Atwood

    (1) « I invented Gilead, the Supreme Court is making it real » https://www.theatlantic.com/ideas/archive/2022/05/supreme-court-roe-handmaids-tale-abortion-margaret-atwood/629833 publiée dans The Atlantic (mai 2022) et traduite par Courrier international.

    #Femmes #usa #Théocratie #bible #Constitution_américaine #avortement #procréation #eugénisme #croyances #convictions_religieuses #puritanisme #sorcières

  • A Genève, des danseuses de la compagnie Alias dénoncent des années d’abus sexuels * Chams Iaz
    https://www.letemps.ch/culture/exclusif-geneve-danseuses-compagnie-alias-denoncent-annees-dabus-sexuels

    Le directeur et chorégraphe de la célèbre compagnie de danse contemporaine Alias est accusé de multiples abus et attouchements sexuels. « Le Temps » a enquêté sur le comportement de ce personnage depuis plus de vingt ans, dont auraient été informés le milieu culturel et les autorités de subvention.

    Obsession de la nudité, massages, attouchements, auditions qui se terminent à son domicile, mains sous les habits ou dans la culotte, relations sexuelles avec les danseuses, jeux de pouvoir : voilà ce que décrivent les témoignages rassemblés par Le Temps sur les comportements du directeur de la compagnie Alias. Une systématique qui dure depuis au moins vingt ans et a bénéficié d’une chape de silence au sein des milieux culturels et des autorités subventionneuses, dans le contexte du succès de la compagnie de danse contemporaine genevoise et de la précarité de cette profession. Une dizaine de personnes, notamment des danseuses, ont décidé de briser l’omerta. . . . . .
    La suite payante
    #Suisse #danse #danse_contemporaine #Femmes #viol #culture_du_viol #viols #violences_sexuelles #violence #domination_masculine #metoo

    • Un audit est demandé sur 20 ans d’abus sexuels au sein de la compagnie Alias Valérie Hauert
      https://www.rts.ch/info/regions/geneve/12563690-un-audit-est-demande-sur-20-ans-dabus-sexuels-au-sein-de-la-compagnie-a
      Le journal Le Temps a publié mercredi une longue enquête sur les abus au sein de la compagnie de danse contemporaine Alias, dont le directeur a été condamné en août. Ces révélations ont déjà une suite politique. Appuyé par un syndicat, un collectif d’artistes demande un audit à la ville de Genève.

      Après les différentes révélations et témoignages autour de l’école et la compagnie du Béjart Ballet, qui ont contraint la ville de Lausanne à lancer un audit externe, c’est au tour de Genève d’être interpellée au sujet d’abus dans le monde de la danse.

      Dans une longue enquête de quatre pages publiée mercredi, le journal Le Temps expose dans le détail plusieurs témoignages de danseuses et danseurs qui ont subi des abus et du harcèlement sexuel de la part du directeur d’Alias.

      Deux décennies d’impunité
      Ce dernier, qui était également le chorégraphe de la compagnie, a été condamné fin août à cinq mois de prison avec sursis pour attouchement sexuel, pour des faits qui remontent à 2018 lors d’un stage donné aux jeunes d’une autre compagnie. Il a fait appel.

      Selon l’enquête du Temps, l’homme aurait commis des actes d’abus et de harcèlement sexuel sur des danseuses de manière systématique pendant plus de 20 ans sans être inquiété, alors même que le milieu culturel et les autorités de subvention auraient été informés.

      Les autorités informées
      Les témoignages détaillés comprennent des attouchements, des rapports sexuels pour décrocher un rôle, des auditions qui se terminaient au domicile du directeur, ou encore des carrières stoppées net après que certains ont osé dénoncer ces abus au Service culturel de la Ville de Genève.

      En outre, trois témoins disent avoir averti les autorités culturelles genevoises à l’époque. Mais ces dernières « ne s’en souviennent pas ». Il a fallu le jugement de cet été pour que les subventions de Pro Helvetia, du canton, de la Ville de Genève et de la commune de Meyrin soient suspendues.

      En réaction, le collectif d’artistes Arts_Sainement appuyé par le Syndicat suisse romand du spectacle (SSRS) a demandé un audit à la Ville de Genève. Le responsable genevois de la culture Sami Kanaan a reçu cette demande mercredi matin. Ils souhaitent savoir exactement ce qui s’est passé et, surtout, comprendre comment de tels agissements ont pu perdurer aussi longtemps dans le silence.

      Parallèlement une motion co-écrite par ce collectif et Ensemble à Gauche a été déposée au Grand Conseil genevois fin août. Elle demande des outils pour lutter efficacement contre les agressions, le harcèlement et les discriminations dans les domaines des arts, de la culture et des sports.

      Un #MeToo de la danse ?
      L’audit doit pouvoir « faire toute la lumière sur ce qu’il s’est passé au sein de cette compagnie, et voir ce qui a pu entraîner cette omerta », explique Anne Papilloud, secrétaire générale du SSRS, qui dit n’avoir eu elle-même connaissance de ces faits que très récemment.

      Après l’affaire du Béjart Ballet Lausanne où un audit est toujours en cours et où il s’agit aussi une compagnie largement subventionnée par des fonds publics, la syndicaliste pense que « nous sommes à un tournant dans le monde de la danse, où la nouvelle génération veut libérer la parole ».

  • #Suisse : Le référendum contre le paquet d’aide aux médias est sur le point d’aboutir ATS

    https://www.letemps.ch/culture/referendum-contre-paquet-daide-aux-medias-point-daboutir

    Le comité « Non aux médias contrôlés » a déposé ce mercredi à Berne plus de 110 000 signatures en faveur de son référendum contre le projet du parlement d’allouer quelque 3 milliards sur sept ans en soutien aux médias

    Le peuple devrait voter sur le paquet d’aide aux médias. Le comité référendaire a déposé mercredi à Berne 113 085 signatures. La Chancellerie fédérale doit encore les valider.


    Le comité a réuni plus du double de paraphes nécessaires au référendum. Cela montre que de nombreux Suisses refusent un financement étatique des médias privés, indique le président du comité « Non aux médias contrôlés » Peter Weigelt. Le subventionnement direct des médias est un « pêché politique et anticonstitutionnel ».

    L’enveloppe prévue par le parlement devrait s’élever à près de 3 milliards sur sept ans. Le comité s’oppose à ce « gaspillage inutile et dangereux de l’argent des impôts. Selon lui, les groupes de médias riches et les éditeurs bien situés sont les profiteurs principaux. « Des médias financés par l’Etat empêchent le débat public et détruisent la liberté d’expression. C’est un poison pour la démocratie », estime Peter Weigelt.

    La votation devrait avoir lieu le 13 février.

    Aide indirecte
    Le train de mesures en faveur des médias propose entre autres d’étendre l’aide indirecte à la presse en soutenant à l’avenir également la distribution matinale des journaux. Une enveloppe de 120 millions est prévue pour ce volet.

    Le paquet crée également une aide aux médias en ligne, dotée de 30 millions de francs par an, et visant à favoriser la transition numérique. Les contributions versées pourront atteindre au maximum 60% du chiffre d’affaires généré par l’entreprise. Une aide est aussi prévue pour les agences de presse, les écoles de journalisme ou encore le Conseil suisse de la presse.

    #gaspillage #propagande #médias (en réalité #merdias) #profiteurs #journalisme #presse #_journaliste #journullistes #mass_merdias #argent

  • Le vaccin divise aussi les artistes - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/vaccin-divise-artistes

    Quel est le point commun entre Eric Clapton, le rappeur Akhénaton (IAM) et le cabarettiste zurichois Marco Rima ? Tous trois se sont récemment positionnés contre le vaccin. Le premier annonçait le mois dernier qu’il ne jouerait plus dans les salles exigeant le passe covid ; le second, positif au Covid-19, a fait un passage remarqué à l’hôpital début août après s’être déclaré « contre le passeport sanitaire et la vaccination obligatoire » sur Twitter ; quant au troisième, il figure parmi les membres du comité d’initiative « Pour la liberté et l’intégrité (STOP à la vaccination obligatoire) », aux côtés de la conseillère nationale UDC Yvette Estermann notamment.

    Ces exemples rappellent que, si la vaccination a souvent été érigée en graal, voire brandie comme une bouée de sauvetage pour les milieux culturels, elle n’y fait pas pour autant l’unanimité. A l’image du reste de la société, il s’y creuse de sérieux clivages, comme l’illustrait encore au début du mois le cas de Peter Prada. Dans un post Instagram, le batteur des Offspring annonçait avoir été évincé du groupe de punk-rock américain pour avoir refusé de se vacciner – sur conseil de son médecin, précise-t-il.

  • #bretzel_liquide

    Nikita Mandryka, le créateur du Concombre masqué, est mort à l’âge de 80 ans - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/nikita-mandryka-createur-concombre-masque-mort-lage-80-ans

    L’auteur de bande dessinée Nikita Mandryka, créateur du personnage comique le Concombre masqué, est mort à 80 ans, a-t-on appris lundi auprès de ses éditeurs.

    Le site officiel du célébrissime concombre :

    http://leconcombre.com

  • Il y a 40 ans sortait « The Burning », premier film produit par Harvey Weinstein, concentré de la culture du viol  Nicolas Dufour

    Première production de Harvey Weinstein avec son frère Bob, le film d’horreur « The Burning » sortait le 8 mai 1981. Slasher dans le sillage de « Halloween », il comprenait aussi des échos de l’idéologie d’assaut sexuel de l’époque

    Elles s’agitent dans la prairie à jouer au baseball en petite tenue. Elles se trémoussent en courant. La caméra serre les jeunes poitrines et fesses. Sur un bord du terrain, les garçons se mettent en appétit en se chambrant sur leurs prochaines audaces, leurs hypothétiques consommations charnelles.

    Après une scène d’ouverture horrifique, ainsi commence The Burning (Carnage), un film de Tony Maylam sorti il y a juste 40 ans, le 8 mai 1981. Il s’agit du premier long métrage produit par Harvey Weinstein, et il est impossible, aujourd’hui, de ne pas le voir en pensant à la tempête #MeToo déclenchée par les révélations sur le producteur, en 2017. Certains amateurs ont (re)découvert le film en 2018, lors d’une soirée spéciale au Festival du film fantastique de Neuchâtel.

    Les Weinstein veulent entrer au cinéma
    A l’orée des années 1980, Harvey Weinstein et son frère Bob cherchent à tout prix à entrer dans le business du cinéma. Enfin, à bas prix surtout : il faut trouver le moyen de produire un film bon marché qui rapporte un maximum d’argent. Ils viennent de créer leur première société, Miramax, et s’intéressent à un genre montant, le slasher, film de tueurs en série en général circonscrits à un lieu ou une ville. En 1978, John Carpenter avait fait peur au monde entier avec Halloween , dont une suite se préparait alors. En 1980, Sean S. Cunningham avait dupliqué l’expérience dans Vendredi 13 , dans lequel Jason Voorhees trucidait des ados dans un camp de vacances. Pour une mise de moins de 600 000 dollars, le long métrage faisait jackpot – à cette heure, il aurait rapporté plus de 58 millions de dollars.

    Pourquoi ne pas retenter le coup ? Les Weinstein se lancent. Harvey se souvient d’une légende urbaine sur un gardien d’un camp de loisir qui aurait agressé des jeunes dans l’Etat de New York. L’histoire est toute trouvée, c’est celle de Cropsy, le concierge à qui des gamins ont mis le feu en voulant lui faire peur, que la médecine a sauvé et qui veut se venger.

    Quelques valeurs sûres
    Malgré tout, les frères se donnent les moyens de leurs ambitions. Quelques jeunes talents – le film révèle notamment Holly Hunter et Jason Alexander – sont dirigés par l’Anglais Tony Maylam, que les Weinstein connaissent pour avoir acheté les droits de films sur Genesis qu’il a réalisés. A la musique, donc aux synthétiseurs, un Anglais aussi : Rick Wakeman, pape du rock progressif passé par Yes. Au montage, Jack Sholder, qui fera l’un des films de la franchise Freddy, Hidden puis Arachnid . Aux effets spéciaux, Tom Savini, déjà une vedette, qui a fait les grimaces et les jets de sang de Zombie de George A. Romero et qui est passé par le tournage de Vendredi 13.

    Le film dépeint de manière bien particulière les relations entre garçons et filles. Réaliste, peut-être, pour les années 1980, mais avec le « bigger than life » cinématographique. Jusqu’à la caricature prémonitoire, s’agissant d’une œuvre « créée par Harvey Weinstein » – le producteur est ainsi crédité au générique.

    A-t-on raison après coup ?
    Bien sûr, il est facile de se donner raison après coup. Mais à voir certaines scènes de The Burning, il est impossible de ne pas penser aux sordides révélations qui tomberont près de quatre décennies plus tard.
    Certes, les filles du Carnage ne sont pas dépeintes comme des sottes. Elles résistent aux jeunes mâles, se rient de leurs maladresses, poussent à l’eau le playboy musclé qui prend d’abordage leur plateforme, sur le lac au bord duquel se trouve le camp. Pourtant, The Burning reflète bien une culture masculine apposée sur ses personnages boutonneux.

    L’obsession de l’assaut sexuel
    Dans la scène du baseball, le dragueur principal, celui qui ose aborder les filles, reluque les fesses de la blonde qu’il convoite en lançant qu’elle lui « appartient de droit divin ». Il rigole, mais est-ce un gag ? Peu après, le maladroit du groupe fait le voyeur dans les douches. Il est enguirlandé par le musclé, celui de la plateforme, pas pour ce qu’il a fait, mais parce qu’il l’a fait en épiant sa présumée copine.

    Plus tard, le musclé, encore lui, n’est pas loin de violer sa soi-disant amie. Dans l’eau, elle se refuse en lui rappelant qu’il « a promis » de se tenir correctement. Mais « elle l’a laissé l’approcher », se défend-t-il, elle « en a envie ». Il la colle, l’enlace avec force. Elle s’en dégage – elle se défile, donc.

    Entre eux, les garçons digressent sur les manières de conquérir les filles, au sens plutôt littéral : les prendre d’assaut, les assiéger, afin d’obtenir l’objet de leurs obsessions.
    Source : https://www.letemps.ch/culture/y-40-ans-sortait-the-burning-premier-film-produit-harvey-weinstein-concentre

    #balancetonporc #culture_du_viol #viol #harcèlement_sexuel #violences_sexuelles #femmes #sexisme #weinstein #harcèlement #féminisme #domination_masculine #harvey_weinstein #cinéma #médias #déni #film #slasher

    • A lire aussi : Harvey Weinstein, vu par ses proies
      https://www.letemps.ch/societe/harvey-weinstein-proies

      Réalisé par Ursula Macfarlane, le documentaire « Untouchable » donne la parole aux femmes victimes du producteur d’Hollywood, dont le procès pour viol et agression sexuelle débutera en septembre à New York.

      https://www.youtube.com/watch?v=b-1fKna9l38

      Un prédateur sexuel assoiffé de pouvoir, aux méthodes de shérif. Untouchable, le documentaire réalisé par la Britannique Ursula Macfarlane, livre un portrait sans concession de Harvey Weinstein. Des témoignages, glaçants, constituent son fil rouge. Des femmes victimes de ses agressions sexuelles se confient, mais également des journalistes, d’anciens collaborateurs et sa secrétaire.

    • Ce qui est parlant aussi c’est le succès de ces films violophiles. Les phallosophe appelent ca « la catharsis », une soit disant purge de l’âme, mais en fait c’est seulement le plaisir sadique des dominants à se donner des idées de sévices à faire subir aux dominées.

  • 24 février 2021, mort cette nuit de Philippe Jaccottet.

    depuis tellement longtemps lu, lecture décisive je m’en serai rendu compte, remercié silencieusement, évoqué, le vaste unilivers découvert par lui ; dans l’article du Temps https://www.letemps.ch/culture/philippe-jaccottet-sen-alle-chemins-terre-mots touché aussi d’y lire le nom d’Anne Perrier).

    ici en hommage, tiré de dès les débuts de L’Effraie , premier lu :

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞ▁▁▁▁▁▁

    Je sais maintenant que je ne possède rien,
    pas même ce bel or qui est feuilles pourries,
    encore moins ces jours volant d’hier à demain
    à grands coups d’ailes vers une heureuse patrie.

    Elle fut avec eux, l’émigrante fanée,
    la beauté faible, avec ses secrets décevants,
    vêtue de brume. On l’aura sans doute emmenée
    ailleurs, par ces forêts pluvieuses. Comme avant,

    je me retrouve au seuil d’un hiver irréel
    où chante le bouvreuil obstiné, seul appel
    qui ne cesse pas, comme le lierre. Mais qui peut dire

    quel est son sens ? Je vois ma santé se réduire,
    pareille au feu bref au-devant du brouillard
    qu’un vent glacial avive, efface... Il se fait tard.

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞ▁▁▁▁▁▁

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞPortovenere

    La mer est de nouveau obscure. Tu comprends,
    c’est la dernière nuit. Mais qui vais-je appelant ?
    Hors l’écho, je ne parle à personne, à personne
    Où s’écroulent les rocs, la mer est noire, et tonne
    dans sa cloche de pluie. Une chauve-souris
    cogne aux barreaux de l’air d’un vol comme surpris,
    tous ces jours sont perdus, déchirés par ses ailes
    noires, la majesté de ces eaux trop fidèles
    me laisse froid, puisque je ne parle toujours
    ni à toi, ni à rien. Qu’ils sombrent, ces « beaux jours » !
    Je pars, je continue à vieillir, peu m’importe,
    sur qui s’en va la mer saura claquer la porte.

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞ▁▁▁▁▁▁

    et puis juste après lu, lu dans L’Ignorant ,
    La patience, La voix,

    et ce poème
    ..

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞL’inattendu

    Je ne fais pas grand-chose contre le démon :
    je travaille, et levant les yeux parfois de mon
    travail, je vois la lune avant qu’il fasse clair.

    Que reste-t-il ainsi qui brille d’un hiver ?
    A la plus petite heure du matin je sors,
    la neige emplit l’espace jusqu’aux plus fins bords,
    l’herbe s’incline devant ce muet salut,
    là se révèle ce que nul n’espérait plus.

    ᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞᅞPhilippe Jaccottet

  • Marc Atallah : « On a besoin de l’imaginaire pour donner forme à l’impensable » - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/marc-atallah-on-besoin-limaginaire-donner-forme-limpensable

    Ce n’est pas son rôle. Les récits de science-fiction apocalyptiques et post-apocalyptiques ont plutôt pour vocation de pointer les fragilités de nos sociétés ou de nos comportements qui, en soi, sont les réelles catastrophes. Quand je parle de « fragilités », je pense notamment à notre illusion de maîtriser la nature ou aux dangers de l’« hybris » humaine. On a par exemple oublié, en Occident, qu’un virus est une des formes de vie les plus répandues, et qu’en tant qu’entités biologiques, nous y sommes particulièrement sensibles. On a aussi oublié la fragilité intrinsèque à la nature humaine en croyant qu’on était protégé de tout.

  • Le philosophe Bernard Stiegler disparaît subitement - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/philosophe-bernard-stiegler-disparait-subitement

    La mort a figé sa vie en roman. Sans bac, tenancier d’un bar à jazz à Toulouse, il a les finances difficiles. Qu’à cela ne tienne, il va régler cela lui-même en décidant d’aller braquer une banque. Ça marche, et il y prend goût. C’est le quatrième braquage à main armée qui lui sera fatal, et lui vaudra 5 ans de prison. C’est là que, grâce à un professeur de philosophie (Gérard Granel) qui l’avait pris en amitié dans son bar, il découvre les grands auteurs, qu’il dévore avec passion.

    Dès sa sortie de prison, il ira à la rencontre de Jacques Derrida ; il se fait remarquer, et sa carrière s’enclenche alors, insolite, hétérodoxe, multiforme mais pas incohérente : professeur de technologie à Compiègne, directeur adjoint de l’INA (Institut national de l’audiovisuel) de 1996 à 1999, fondateur de l’association Ars Industrialis depuis 2005, professeur en Chine, directeur d’un centre de recherche au Centre Pompidou depuis 2006, il voulait dans tous ces domaines combattre la bêtise culturelle que le marché imposait à tous.

    • https://www.youtube.com/watch?v=999kzydPHGgLa

      société automatique, par Bernard Stiegler

      •15.09.2014
      InriaChannel

      Bernard Stiegler , Philosophe, directeur de l’Institut de recherche et d’innovation du Centre Georges-Pompidou . Présentation par Pascal Guitton , Directeur de la recherche Inria.

      La #numérisation_généralisée qui est en cours conduit à l’ #automatisation intégrale, et ce fait emporte des questions épistémologiques aussi bien qu’économiques, sociales et politiques de première grandeur. Cette conférence s’attachera tout d’abord à esquisser le contexte de cette métamorphose des sociétés — qui se décline aussi bien du côté du calcul intensif et de la #smart_city que de la #production_robotisée, de la #neuro-économie, du corps et de la transformation des conditions de la décision dans tous les domaines. Elle tentera ensuite de montrer que toute l’organisation économique qui s’était concrétisée au cours du XXè siècle autour de l’organisation fordiste et keynésienne de la production et de la #consommation s’en trouve compromise. Elle soutiendra enfin qui, d’une part, loin d’être le contraire de l’automatisation, la capacité de décision la suppose, et d’autre part, seule l’automatisation qui permet la désautomatisation est productrice de valeur durable — c’est à dire de néguentropie.

      Biographie :

      Sous la direction de Jacques Derrida, Bernard Stiegler soutient sa thèse à l’École des hautes études en sciences sociales en 1993 et obtient un doctorat de philosophie. Il axe sa réflexion sur les enjeux des mutations actuelles — sociales, politiques, économiques, psychologiques — portées par le développement technologique et notamment les technologies numériques. En 1987, il conçoit l’exposition « Mémoires du futur » et en assure le commissariat au centre Georges Pompidou. A partir de 1988, il enseigne à l’Université de technologie de Compiègne (UTC), et y devient directeur d’une unité de recherche qu’il fonde en 1993, « Connaissances, organisations et systèmes techniques ». Il lance en 1989 le projet LECAO (« lecture et écriture critiques assistées par ordinateur ») avec le soutien du ministère de la Recherche ; il crée et lance également le séminaire de sciences et technologies cognitives de Compiègne, qui se poursuit depuis chaque année au cours de la dernière semaine de janvier, et qui aura reçu plus de mille doctorants et chercheurs français et étrangers ; il lance le programme OPEN (« outil personnalisable d’édition numérique ») puis conçoit la station de lecture audiovisuelle (SLAV) du dépôt légal de l’autiovisuel pour l’INA. Bernard Stiegler devient directeur général adjoint de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) en 1996, directeur général de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (Ircam) en 2001, puis il fonde l’Institut de recherche et d’innovation au Centre Pompidou en 2006, d’où il anime le réseau international digital studies network. Il a été professeur à l’université de Londres de 2008 à 2014, et visiting professor à Northwestern, Cambrige et Zurich. Il est fellow des universités de Lüneburg et de Dublin, et il enseignera à partir de 2015 à l’université Humboldt de Berlin.

      Bernard Stiegler est fondateur et président depuis 2005 d’ARS INDUSTRIALIS, une association d’étude et de réflexion transdisciplinaire sur le nouveau monde industriel qui émerge avec le numérique. Posant qu’il n’y pas de vie de l’esprit sans instruments spirituels, Ars Industrialis s’est fixé pour but de concevoir un nouveau type d’agencement entre culture, technologie, industrie et politique autour d’un renouveau de la vie de l’esprit. Inscrite dans cette démarche, s’est ouverte en septembre 2010 l’école de philosophie d’Epineuil-le-Fleuriel, où Bernard Stiegler propose des cours de philosophie en ligne (www.pharmakon.fr) et anime un séminaire doctoral en visioconférence qui rassemble quarante chercheurs de quinze pays.

      Bernard Stiegler est membre du Conseil national du numérique, du comité de prospective de l’Arcep, du comité d’orientation d’Etalab, du comité d’orientation stratégique France univesité numérique, de l’institut Diderot et de l’Institut de la mémoire B2V. Il est l’auteur de trente ouvrages.

  • De l’amour des cartes (et du territoire)

    Comment se désorienter pour mieux se retrouver

    (…)

    « Ainsi de Mappa Insulae aux éditions marseillaises Parenthèses. Qui a œuvré à cette réussite où plaisir de l’œil et joie de l’esprit se
    combinent ? Un collectif baptisé du nom de l’auteur de L’Ile aux
    trésors, Stevenson, et qui réunit trois philosophes, un artiste et un
    architecte. Collectionneurs de cartes, passionnés par les îles et tout
    cet océan d’imaginaire et de littérature qui les entoure, ils ont mis
    en commun leurs trésors.

    (…)

    L’occasion, à chaque page, de mesurer la distance (ludique, poétique,
    malgré les apparences du sérieux) entre la carte et le territoire,
    entre le réel et sa transposition. Ce qui fait remonter à la mémoire
    une autre pépite, l’Atlas des égarements de Bertrand Westphal. Le
    professeur en littérature générale et comparée de l’Université de
    Limoges y guette les moyens de se désorienter, c’est-à-dire d’ouvrir
    l’esprit à d’autres façons de voir ou de penser. Avec son équipe de
    recherche, il a fondé la géocritique ou l’exploration des relations
    entre espaces, fiction et réel (lire aussi La Géocritique, Minuit,
    2007.) Avec les écrivains et les artistes pour défricheurs, il propose
    de quitter les balises des normes imposées par les vainqueurs (de
    l’histoire, des batailles, etc.). Un autre voyage, le plus important
    de tous sans doute. »

    Mappa Insulae, Stevenson, Parenthèses.

    https://www.letemps.ch/culture/lamour-cartes-territoire

    • Mappa insulae - Editions Parenthèses
      https://www.editionsparentheses.com/Mappa-Insulae

      Dans l’univers sans fin des cartes, les cartes d’îles possèdent un charme tout particulier. Les deux mondes, des cartes et des îles, s’y croisent, laissant émerger des formes riches et colorées.

      Cinq artistes, collectionneurs, chercheurs ont formé le collectif Stevenson pour en explorer et en célébrer les beautés, les incongruités, les fantaisies autant que la précision et la finesse.

      De la mise en commun de leurs trésors cartographiques chinés, dénichés, inhumés et patiemment amassés, est né Mappa insulae. Les îles s’y montrent parfois dans leur isolement absolu, cerclées d’une épaisseur bleue qui les sépare du reste du monde ; parfois en archipel, éparpillées « comme autant de pépins crachés dans l’eau » ; parfois encore simplement suggérées, récifs tapis sous des noms calligraphiés sur les flots. 
      De carte en carte, d’île en île, de pensées en poèmes, nous voilà embarqués pour une traversée érudite et insolite.
      //////////////
      « On me dit que certains ne s’intéressent pas aux cartes ; j’ai peine à le croire… Quand bien même la carte ne serait pas toute l’intrigue, comme dans L’Île au trésor, elle se révélera toujours une mine de suggestions. »
      Robert Louis Stevenson

  • Le cosplay : un outil d’émancipation féminine ? - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/cosplay-un-outil-demancipation-feminine

    Armures, sceptres, masques, épées… Tels sont les outils de travail des cosplayeurs. Créatifs débordant d’imagination, ils créent habilement des costumes à enfiler lors de conventions ou de salons dédiés à la pop culture. Comme des acteurs de théâtre, ils incarnent des personnages en adoptant leur comportement et leur apparence. Ce week-end, une vingtaine d’entre eux seront à l’honneur à Bâle, à l’occasion de Fantasy Basel, et des centaines d’autres arpenteront les allées sous les traits du super-héros Iron Man, de l’héroïne de jeux vidéo Zelda ou encore de la « Mère des dragons » Daenerys.

    Si beaucoup le pratiquent, peu en connaissent la genèse de cette pratique. Le cosplay, mot-valise dérivé de « costume » et de « playing », est née dans années 1930, lors de rassemblements de fans aux Etats-Unis. Mais le terme lui-même vient du Japon, rappelle Antoine Chollet, maître de conférences en sciences de gestion à l’Université de Montpellier et chercheur autour des jeux vidéo : « Le mot a été inventé en 1983 par Nobuyuki Takahashi, un journaliste japonais qui se rendait à une convention sur la science-fiction aux Etats-Unis. Il a transformé le terme américain « costuming » en « cosplay » pour coller davantage à la culture japonaise. » Etonnamment, le cosplay était donc déjà pratiqué avant même d’avoir un nom.

    La communauté, très exigeante sur la qualité des cosplays réalisés, reste plutôt inclusive et bienveillante, du point de vue de Mélanie Bourdaa, maître de conférences en information et communication à l’Université Bordeaux Montaigne : « Ce sont avant tout des espaces dans lesquels se rencontrent des pairs qui ont les mêmes passions et références culturelles. Cependant, comme toute communauté, il est possible que des tensions et des clivages émergent. C’est ce que l’on appelle le toxic fandom. Sous couvert d’authenticité, les publics décrètent alors que tel ou tel cosplayeur ne peut pas incarner tel ou tel personnage. Ce qui est pointé est en général la couleur de peau, le genre ou le poids, donc le corps. » Une analyse confirmée par Lowena, qui dénonce les personnes extérieures à la communauté : « Ce sont elles qui ont les comportements et les remarques les plus sexistes. Celles qui en souffrent le plus sont les femmes qui sortent de la norme du patriarcat, comme les personnes noires ou transgenres. Elles sont souvent poussées à arrêter le cosplay très tôt, et ça prive la communauté d’une plus grande inclusivité. »
    Grandir et s’accepter

    Dans cet univers aussi patriarcal que la société elle-même, les cosplayeuses parviennent tout de même à tirer leur épingle du jeu et à s’émanciper des normes. La mise en valeur de leurs personnalités à travers des personnages de fiction peut ainsi être l’occasion de se réapproprier leurs propres corps. Lowena, comme Juno Stevens, témoignent toutes deux de l’impact du cosplay sur leur relation à leur féminité au quotidien.

    #Cosplay #Fan_studies #Mélanie_Bourdaa

  • Rachid Taha, la triste fin d’un passe-muraille - Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/rachid-taha-triste-fin-dun-passemuraille
    https://assets.letemps.ch/sites/default/files/styles/share/public/media/2018/09/12/file71v630qhhnt14uh13nh.jpg.png?itok=WcpSlEAY

    Rachid Taha incarne ce moment beur en France, avant que le débat sur l’islam mais aussi le terrorisme n’accaparent le récit national. Très au-delà du slogan, avec la constance du cascadeur, le musicien ne cesse de refuser les identités assignées, la petite place qui lui est abandonnée. Ailleurs qu’en France, il aurait peut-être été célébré comme une sorte de Brian Eno rabelaisien. « Il était un visionnaire de la production », dit encore de lui Martin Meissonnier. Ses rencontres avec un autre ressortissant de Sainte-Marie-aux-Mines, Rodolphe Burger, ses derniers albums d’électronique cosmopolite, de guitares brandies, plaident pour lui. Il était l’outrance et la joie, l’ici vu d’ailleurs, et sa vilaine voix de conteur ouvrait dans ce pays postcolonial des terres inconnues.

  • La #cartographie ? Une histoire de #point_de_vue - Le Temps

    https://www.letemps.ch/culture/cartographie-une-histoire-point-vue

    On a déjà signalé cette xposition, mai comme c’est une merveille, on en rajoute !

    https://assets.letemps.ch/sites/default/files/styles/share/public/media/2018/08/07/file71clj4m03eag282054x.jpg.png?itok=8yyvOYeP

    C’est devenu un réflexe. Placé face à une carte du monde, notre œil automatiquement se dirige vers ce qu’il connaît. La Suisse et plus largement l’Europe pour la plupart d’entre nous. L’Amérique, l’Afrique, l’Asie, on y pense bien sûr, mais dans un second temps. Et si l’on changeait ? Et si, une fois n’est pas coutume, on se glissait dans le regard et la pensée des autres pour découvrir Le monde vu d’Asie ?

    Une superbe exposition nous y engage. Conçue notamment par les spécialistes Pierre Singaravélou et Fabrice Argounès, accompagnée d’un magnifique catalogue, elle est à admirer au Musée national des arts asiatiques - Guimet à Paris, jusqu’au 10 septembre. Un voyage à s’offrir à son rythme, en rêvant ou en méditant devant des plans et des cartes qui relèvent autant de l’œuvre d’art que du document.

    #cartoexpériment #imaginaire #asie #exposition #Musée_guimet

  • Politis | Erri de Luca “Porter secours n’est pas un choix mais un devoir”
    https://asile.ch/2018/05/25/politis-erri-de-luca-porter-secours-nest-pas-un-choix-mais-un-devoir

    Selon Erri De Luca, quand la fraternité est illégale, il faut désobéir. L’écrivain italien a lancé un appel en soutien aux « trois de Briançon », une Italienne et deux Suisses qui encourent dix ans de prison pour avoir aidé des migrants à passer la frontière. Dans cet entretien de la revue Politis, il évoque […]

  • En Europe et au-delà, des radios-TV publiques en crise | Le Temps
    https://www.letemps.ch/culture/europe-audela-radiostv-publiques-crise

    Le scrutin helvétique du 4 mars prochain est unique. De mémoire d’experts, jamais une population n’a été consultée en votation populaire à propos de l’existence même du service public audiovisuel, par le biais de la redevance.

    Le courant porté par les partisans de « No Billag » illustre une crispation croissante à propos du financement obligatoire de l’audiovisuel. En Europe, les systèmes de service public sont remaniés, voire remis en cause, dans plusieurs pays. Souvent décrits comme des ensembles qui ont trop grandi, des géants incontrôlables, les diffuseurs publics sont placés au régime. Dans un climat général mélangeant montée en puissance des fausses nouvelles et hostilité à l’égard des médias traditionnels, les radios et TV publiques sont sur la sellette. Tour d’horizon du paysage européen, et au-delà.

    #audiovisuel_public #Suisse #États-Unis #Royaume-Uni #France #Japon #Belgique #Grèce