Nawaat – De quelques films tunisiens : Triomphes de la domination

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  • Nawaat – De quelques films tunisiens : Triomphes de la domination
    http://nawaat.org/portail/2016/02/17/de-quelques-films-tunisiens-triomphes-de-la-domination
    Critique virulente et instructive de quelques récents, notamment A peine j’ouvre les yeux de Layla Bouzid (qui est plutôt bien fait et agréable à regarder).

    sans aucune raison valable narrativement ni dramatiquement, l’on se retrouve à Gafsa, foyer de la révolte du bassin minier. Le père de Farah se dirige vers son lieu de travail et est accueilli par une horde d’ouvriers en colère, pelles et pioches à l’appui, qui éructent contre le bon monsieur et passent à deux doigts de le lyncher s’il ne s’était pas réfugié dans sa voiture et n’avait pris jambes à son cou. Ça sera la première de trois séquences essentielles où les personnages petit-bourgeois seront confrontés au peuple. Nous ne reverrons ni Gafsa, ni sa population, durant le reste du métrage.

    Après le père manquant de se faire agresser par ces ouvriers sauvages qu’il était, en bon colon, venu aider au cours de la seule minute de film que la réalisatrice daigne consacrer aux mineurs de Gafsa (minute qui n’ajoute rien au récit au demeurant), la mère dans une station de louages puis dans un « bar d’hommes » est à son tour confrontée à ces figures du peuple qui effraie. Le peuple ne manque plus laissant l’espace à sa réinvention3. Le peuple est violent, opportuniste, lubrique. Il est la plaie dans le corps social. Systématiquement, sa présence est anxiogène et il joue le rôle de l’antagoniste du héros ou de l’héroïne (bourgeois il va sans dire). Le péril peuple joue à plein poumon dans A peine j’ouvre les yeux, comme dans la fantasmagorie bourgeoise et comme dans l’imagerie médiatique.

    Une chanson est chantée dans un bar populaire et c’est le chahut et le mécontentement parce qu’elle « parle du pays » [sic]. Pour la même raison, la même chanson chantée dans un bar bourgeois provoque l’adhésion et créée l’engouement. Cette vision du monde totalement moulée par l’intelligentsia du pouvoir travaille de même la pièce Violence(s) d’une Jalila Baccar enfermée dans ses certitudes aigris et d’un Fadhel Jaïbi devenu fonctionnaire d’Etat.

    #Tunisie