• Les éclats de silence sont meurtriers | KEDISTAN
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    Les éclats de silence sont meurtriers
    Analyses, Brèves, Chroniques de Daniel Fleury février 26, 2016février 26, 2016 Daniel Fleury
    silence

    Des témoignages « spectaculaires », comme les chaînes d’infos en sont friandes, commencent à être diffusés sur les télés européennes, en provenance des villes du Kurdistan nord, et en particulier de Nusaybin. Un silence rompu donc, mais dont les éclats sont criminels.

    Ces séquences filmées, où généralement ont fait figurer trois ou quatre combattants, le visage masqué derrière des foulards, et porteurs de la Kalachnikov qui effraie ici, nous présentent l’idée qu’une guerre civile se déroule entre un groupe (terroriste) armé, le PKK, et un Etat, la Turquie, qui défend son intégrité nationale. Un nationalisme contre un autre, et des populations civiles en otage, c’est à peu près l’orientation des commentaires en voix off, qui ne traduisent d’ailleurs pas les vrais propos des personnes interrogées. On nous affirme que ces combattants ont « ordre » de tuer le plus possible de militaires turcs, et qu’ils sont là pour cela, dans une spirale de guerre. Les références à Cizîr, se font par des « où le PKK a subi de lourdes pertes »… C’est la guerre, c’est comme ça, circulez y a rien à réfléchir, juste à espèrer que cela n’arrive pas jusque chez nous, ma bonne dame ! Et ces séquences, qui sont aussi rediffusées via les réseaux sociaux, le sont avec le label « Ankara=PKK=guerre », sorte de vérité, parce que vu à la télé, d’abord celle d’Erdogan, puis les nôtres, depuis la dernière explosion et le silence qui avait suivi. C’est du moins ce que vous expliquera en complément, le « spécialiste » en plateau.

    Les « bons Kurdes », aux avant postes contre Daech en Syrie, contre les « méchants PKK » contre Erdogan en Turquie, se succéderont dans la semaine, sur fond de « guerre » et de « réfugiés ».

    Même si la contre information a de grosses difficultés à lutter contre le rideau de fumée médiatique, nous continuerons à diffuser des témoignages d’amis sur place, vérifiés, puisqu’il s’agit de correspondants ou d’amis proches, pour que le silence cesse de tuer dans l’indifférence et le repli sur nos préoccupations.

    Nous allons publier à suivre, un récit très récent, paru en turc il y a quelques jours, qui nous a été transmis pour traduction et publication. Il vérifie et confirme tout ce que nous publions depuis des mois.

    Ce témoignage est une descente de plus dans l’univers de la guerre sur place. Mais parfois, on se demande si les populations européennes finiront par « accepter » cette réalité pourtant quotidienne, comme elles ont fini par « croire » aux vérités des livres d’histoire, sur les périodes sombres, tant d’années après. Quand on parle de massacres à Cizre, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité que des enquêtes finiront par prouver un jour, on a le sentiment qu’un paysage virtuel se tisse entre la réalité et la réception du message. Cette guerre est ailleurs, la Turquie et d’autres frontières nous en protège, la Méditerranée lave les morts, et les réfugiés seront bientôt empêchés par les « hotspots ». On trouvera des milliards pour cela, on fera des « sommets » à Bruxelles, et notre humanité en souffrira un peu, mais nous serons « protégés ». Ne sommes nous pas en « guerre » nous aussi contre le terrorisme ?