• Pierre Rabhi : « L’humanité entière est invitée à imaginer l’avenir » - SudOuest.fr
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    En admettant que nous soyons bien dans une impasse, pensez-vous qu’il soit encore possible d’en sortir ?

    Malheureusement, la conscience collective n’a pas atteint le niveau de lucidité suffisant pour voir l’ensemble des phénomènes et se définir de nouveaux objectifs. Nous vivons encore dans l’illusion selon laquelle l’être humain va redresser la situation. Politiquement, nous faisons de l’acharnement thérapeutique sur un modèle moribond. Il est dans cet état parce qu’il est en dissonance et en contradiction avec les lois fondamentales de la vie. Nous espérons toujours remettre sur les rails le système que nous avons élaboré, mais ce n’est pas possible.

    Quelle est cette loi fondamentale ?

    Nous sommes dans un malentendu. Les religions ont une grande responsabilité pour avoir instauré l’homme prince de la création. Les Peaux-Rouges ne disent pas : « La Terre nous appartient. » Ils disent : « Nous appartenons à la Terre. » Toutes les balivernes qu’on a inventées ont donné un être humain arrogant. Les religions ont proclamé le caractère sacré de la création. Je ne comprends pas qu’elles ne puissent pas être les premières écologistes. Tous ces malentendus nous font croire qu’il y a la nature et nous. Mais nous sommes nature. Le fait d’être doté d’une pensée - pour le meilleur et pour le pire, d’ailleurs - nous donne une spécificité, source d’angoisse ou de libération. Nous avons laissé l’angoisse prendre le dessus parce que nous avons peur de la vie et de la mort, et, d’une planète paradis, nous avons fait un enfer.

    N’avez-vous pas parfois l’impression de prêcher dans le désert ?

    Souvent. Mais, aujourd’hui, il y a une écoute plus profonde. Parce que nous sortons de cette griserie. Le modèle que l’on disait triomphant est en train de se déliter lamentablement. La peur du lendemain ne cesse de grandir. Nous nous rendons compte que nous sommes très, très faibles.

    Nous bombons le torse avec nos innovations, nos machines et nos trucs. Nous sommes sur une pyramide de milliards, mais ce n’est pas cela qui nous rend plus heureux.