L’objectif de l’opération militaire turque dans l’enclave kurde d’Afrine est d’établir une « zone de sécurité » d’une profondeur de 30 km à partir de la frontière entre la Turquie et la Syrie. Florence Parly, la ministre française des armées, a appelé la Turquie à cesser ses opérations contre les Kurdes syriens, craignant qu’ils ne détournent leur forces, très engagées au sein de la coalition à laquelle la France appartient, « du combat primordial » contre le terrorisme. La France demande une réunion urgente du Conseil de sécurité de l’ONU. Les Kurdes sont en première ligne dans la guerre contre l’organisation État islamique, et notamment sa capitale autoproclamée, Rakka, qu’ils ont libérée en octobre dernier.
Dans Le Monde.fr, Marie Jego, correspondante à Istanbul, détaille les intentions affichées du gouvernement turc : « faire en sorte d’éviter que la Turquie « ne perde son contact géographique avec le monde arabe ». Bizarre… En fait, la principale crainte des Turcs est de voir la région d’Afrine et celle de Kobané former une continuité territoriale pour achever le « corridor » qui permettrait aux Kurdes de « gagner la Méditerranée ».
Et puis il s’agirait aussi « de favoriser le retour chez eux de trois millions de réfugiés syriens ». Mais la région d’Afrine héberge déjà 800 000 personnes, dont beaucoup de déplacés venus des autres régions de Syrie.
Si le gouvernement syrien s’est offusqué de l’intervention, menaçant d’abattre les avions turcs sur son territoire, son allié russe semble s’en accommoder à seule fin de préserver le « Congrès pour le dialogue national syrien », les 29 et 30 janvier à Sotchi. « Erdogan semble dire à Poutine, donne-moi Afrine et je te rends Idlib », avance un diplomate. La lutte d’influence et d’intérêts contradictoires des puissances étrangères se poursuit donc sur le territoire syrien, au détriment des populations.
En Turquie, où le chef de l’Etat a mis en garde le principal parti pro-kurde, dont les leaders sont en prison, contre toute tentative d’organiser des manifestations d’opposition à cette offensive, ce parti était le seul à appeler à manifester à Istanbul et à Diyarbakir. Hier après-midi, sur la rive asiatique du Bosphore, les forces de police étaient plus nombreuses que les manifestants.