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  • Les jeunes avocates, harcelées et sans recours | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2018/05/04/les-jeunes-avocates-harcelees-et-sans-recours

    A mesure qu’elle raconte son harcèlement, elle hésite, s’essouffle, puis reprend avec peine son récit. A., comme la plupart des avocates, tient à l’anonymat pour avoir une chance de garder une place dans la profession. Jeune collaboratrice dans un grand cabinet d’affaires, elle est rapidement devenue la cible d’un associé du patron. D’abord sur le ton de la plaisanterie, puis les remarques se sont faites plus dégradantes, les gestes plus pesants. Il est allé jusqu’à se déshabiller devant elle alors qu’ils étaient seuls au bureau, sous prétexte de changer de tenue. Le harcèlement sexuel est devenu moral lorsque l’associé a compris qu’elle ne céderait pas.

    Cernée, Me A pouvait difficilement se tourner vers les autorités : « Les ressources humaines ont été prévenues de certains dérapages, mais personne n’intervient parce que l’associé « fait du chiffre » ». Fin manipulateur, « il a détruit ma confiance en moi. Il a tout fait pour m’isoler et bloquer mes perspectives d’évolution. Il m’a tendu un piège pour tenter de saboter mon avenir professionnel ». Comme elle, Me B. décrit le « contexte libidineux » de sa première collaboration. Elle n’y est restée qu’un mois à mi-temps, tant la situation devenait insupportable. Elle avait « la boule au ventre en allant au cabinet. C’était un climat oppressant, dégueulasse ». Un jour, la jeune femme cherchait accroupie quelque chose dans son sac et a entendu un associé lui lancer, « ce n’est pas la peine de te mettre à genoux ; je l’ai déjà signé ton contrat ».
    Le ténor sûr de lui et dominateur

    Si la féminisation de la profession ne cesse d’augmenter avec 55,4% de femmes avocates en 2017 contre 49,7% il y a dix ans, elle se heurte à la figure bien ancrée du ténor sûr de lui et dominateur, particulièrement au pénal. Le pénaliste reste « la rock star du barreau avec ses groupies », indique Me Elise Arfi. L’image de « l’homme à femmes, libertin en duo avec une collaboratrice sexy en jupe » participe de cette dépréciation de l’avocate. Me Solène Debarre remarque que « lors du ‘‘procès Jawad’’, vous avez retenu quel avocat ? Xavier Nogueras, alors qu’il avait aussi une avocate, Marie-Pompei Cullin ». Cette schizophrénie de la profession n’étonne personne. Pourtant, qui de mieux qu’une avocate connaît le système judiciaire et les recours possibles ? Il n’y en a en réalité fort peu : dénoncer un confrère, c’est tirer une croix sur sa carrière. « Dénoncer un harcèlement est souvent un suicide professionnel, explique Me D., on est définitivement grillé dans la profession. Personne ne nous acceptera dans un cabinet puisque tout le monde se connaît ».

    Les critères physiques des jeunes avocates sont d’ailleurs parfois davantage retenus que leurs compétences. Me Adèle Vidal-Giraud raconte son quotidien de remarques sexistes sur sa tenue, sa coiffure ou sa démarche lorsqu’elle était collaboratrice. Elle ne pouvait faire aucun commentaire sur un dossier sans qu’on lui réponde avec violence, « et toi, habillée comme tu es, si tu vas en prison, les gars pourront se branler sur toi comme ils se branlent sur une actrice porno. Il n’y aura aucune différence ». La collaboratrice est en effet devenue un faire-valoir, un objet de prestige : « c’est la première fois que je me paye une collaboratrice ! » se vantait le patron de Me B. Mais le harcèlement sexuel peut également venir d’un client, parfois couvert par le patron. Me C. a ainsi fait les frais des désirs d’un client qui n’hésitait pas à lui caresser le cou pendant la signature du contrat ou à lui réclamer sans cesse un déjeuner en tête à tête. Lorsqu’elle s’en est plainte, son patron a balayé l’accusation : « ma petite, il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités ».

    « Plaider, c’est bander »

    Les jeunes collaboratrices sont d’ailleurs souvent considérées au pénal comme incapables de porter la robe d’avocat, qui passe curieusement pour un attribut masculin : « Plaider, c’est bander ; convaincre, c’est jouir », n’a pas craint de déclarer au Point Me Dupond-Moretti, en reprenant la vieille formule d’Henri Torrès. Me Julia Katlama s’en est vite rendue compte. Alors qu’elle était désignée dans une affaire d’homicide entre bandes rivales, un confrère commis par l’Ordre s’est présenté à sa place le jour des assises et a fait un incident à l’audience. L’accusé a confirmé vouloir garder Me Katlama, mais son confrère, humilié, a quitté la salle en lui glissant à l’oreille « t’as raison de faire la pute, ça rapporte plus ». Abasourdie, l’avocate n’a pas réagi et n’a pas poursuivi son confrère, ce qu’elle regrette aujourd’hui. Mais sa carrière venait de commencer. Elle reconnaît que « cette remarque en dit long sur le sexisme de la profession. Comme si au pénal, une femme ne pouvait pas avoir de gros dossiers sans coucher ».

    Pourquoi ce silence ? L’opacité sert parfois à contourner les situations de harcèlement.
    Solenne Brugère, membre du conseil de l’Ordre parisien, remarque que jusqu’à présent certaines plaintes se soldaient par des « conciliations à l’amiable », sans poursuites disciplinaires ou judiciaires. « Cette ère devrait être révolue. Nous qui sommes les premiers à monter au front pour défendre les intérêts des justiciables, et nous sommes déterminés pour ne plus laisser passer de tels actes », affirme l’avocate. Pourtant, saisir le bâtonnier de l’Ordre s’avère parfois inutile. « J’ai travaillé dans cinq cabinets en trois ans et demi, tant ça s’est mal passé, raconte Me Adèle Vidal-Giraud. J’ai vécu dans une ambiance immonde ». Harcelée et impayée lors d’une collaboration chez un pénaliste, elle s’est tournée vers l’Ordre. Après deux longues années de procédure, sa demande n’a débouché sur rien de significatif.
    Serrer les dents

    Dans le cas du harcèlement, « on en revient souvent au problème majeur : c’est parole contre parole », résume Me Avi Bitton. Cette parole se fait d’autant plus fragile qu’elle est menacée par la précarité : « Les collaborateurs relèvent du statut de profession libérale, donc ils ne bénéficient pas du code du travail. En conséquence, la rupture de leur contrat peut se faire sans motif, du jour au lendemain ». Isolées, les collaboratrices maltraitées se sentent coupables, humiliées et souvent ne réagissent pas. « Lorsque j’avais 26 ans et que j’ai subi un harcèlement sexuel, j’étais pétrie de culpabilité. Je n’osais même pas en parler à mon compagnon, se souvient Me Céline Giraud. C’est ce qui est pernicieux dans ce système de harcèlement. Aujourd’hui, avec la maturité, ce serait différent. Non, ce n’est pas une honte d’avoir été harcelée. Cela ne fait pas de moi une coupable ».

    La précarité du statut assoit la domination des harceleurs qui jouent du rapport de force. Une jeune stagiaire sans carnet d’adresses qui veut obtenir un stage de fin d’étude ne peut qu’accepter ce qu’on lui propose. Me C. a ainsi poussé la porte du bureau des stages à l’EFB (l’Ecole de formation du barreau), dans les années 1990 : « l’homme qui m’a reçu m’a regardé de la tête aux pieds et m’a lancé , ah, vous ! Je sais où je vais vous envoyer ». Chez un grand avocat, spécialiste en droit des affaires dont la réputation de coureur de jeunes jupons était bien connue de l’EFB. « J’ai d’abord refusé mais on m’a répondu que je n’avais pas le choix. » L’homme n’a cessé de la harceler pendant ses six longs mois de stage. Il a même prétexté un entretien avec un juge pour coincer sa stagiaire dans un coin du tribunal et « se jeter » sur elle. Il est revenu à la charge quelques semaines plus tard dans son bureau. Excédée, la jeune femme a voulu quitter le cabinet, mais la validation de son diplôme était en jeu et le harceleur « était haut placé à l’EFB ». L’élève-avocate n’a d’autre choix que de « serrer les dents » jusqu’à la fin du stage. « J’ai été jetée dans la gueule du loup alors que j’avais dit non. Cet homme s’est servi de son pouvoir pour me piéger. »
    L’Ordre est d’un faible secours

    L’amorce d’une libération de la parole incite dorénavant les institutions à réagir. Marie-Aimée Peyron, nouveau bâtonnier de Paris, a fait de la discrimination des femmes l’un des piliers de son mandat avec des mesures annoncées le 8 mars pour lutter contre « les violences, le sexisme et les inégalités ». A lui seul, le barreau de Paris représente 42% des avocats, mais il n’est évidemment pas le seul concerné. Lyon a mis en place une ligne d’écoute anonyme et indépendante, Bordeaux un « pôle confraternel ». Pour autant, beaucoup de victimes ne saisissent pas l’Ordre. Le dernier sondage du syndicat Avocats Conseils d’Entreprises en mai 2017 révèle en effet que sur 2 242 réponses, seules 28,2% des avocates affirment avoir subi un harcèlement, dont moins de 5% uniquement sexuel. Me Solenne Brugère juge ces chiffres sous-estimés, d’autant que peu de consœurs ont répondu : « Cela témoigne d’une vraie difficulté à en parler. N’oublions pas que c’est la première fois que cette question a été posée dans la profession, et l’omerta semble encore très forte, le sujet reste tabou ».

    Il n’est pas plus simple de saisir un procureur qui pourrait envoyer les gendarmes au cabinet. Ainsi, dans une grande solitude, des avocates harcelées tentent de trouver des parades sans recourir à la loi. Me C. explique comment elle s’est enlaidie pour repousser son harceleur pendant son stage de fin d’étude : « Je ne pouvais pas me plaindre, donc j’ai mis en place une stratégie. Je mettais tous les jours mes lunettes à double foyers, pas de maquillage, pas de talons, pas de jupes et que des pantalons histoire d’être la moins féminine possible ». D’autres décident de claquer la porte et de se mettre à leur compte, comme Me Céline Giraud qui « ne veut plus dépendre d’un rapport de force », son indépendance étant « trop précieuse », mais l’opération est risquée et il n’est pas facile de trouver une clientèle.

    La vague #metoo a posé un nouveau regard sur les rapports homme-femme, et jusque chez les avocats. La vision foncièrement conservatrice du métier est aujourd’hui remise en cause : « ce sont souvent ces avocats anciens qui utilisent leurs contacts et leur puissance pour faire taire toute contestation, affirme Me D. Nous, on représente une nouvelle génération qui bouleverse les codes de la profession ». Et la présidente de la commission Egalité-Diversité du Conseil national des barreaux, Me Valérie Duez-Ruff, se souvient de « la douche froide au Conseil de l’Ordre de Paris » lorsqu’elle a proposé une modification du règlement intérieur sur le harcèlement.

    #sexisme #discrimination #misogynie #injustice #harcèlement #culture_du_viol

  • Relation sexuelle à 11 ans : le parquet de Pontoise ne poursuit pas pour viol
    25 septembre 2017 Par Michaël Hajdenberg
    https://www.mediapart.fr/journal/france/250917/relation-sexuelle-11-ans-le-parquet-de-pontoise-ne-poursuit-pas-pour-viol?

    Dans le Val-d’Oise, une enfant de 11 ans a eu une relation sexuelle avec un inconnu de 28 ans. Elle l’a suivi, puis a subi l’acte sans protester, ce qui fait dire au parquet qu’elle était consentante. Mardi, l’homme sera jugé pour « atteinte sexuelle », et non pour viol. Une spécificité française.

  • Le délit de consultation des sites terroristes : l’éblouissante démonstration de François Sureau | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2017/02/08/apologie-du-terrorisme-la-brillante-demonstration-de-francois-

    L’excellente leçon de droit, d’histoire, et d’éthique de Me François Sureau devant le Conseil constitutionnel, le 31 janvier pour la Ligue des droits de l’homme. Il s’agissait, lors d’une question prioritaire de constitutionnalité, de contester l’article 421-2-5-2, créé par la loi du 3 juin 2016 :

    Le fait de consulter habituellement un service de communication au public en ligne mettant à disposition des messages, images ou représentations soit provoquant directement à la commission d’actes de terrorisme, soit faisant l’apologie de ces actes lorsque, à cette fin, ce service comporte des images ou représentations montrant la commission de tels actes consistant en des atteintes volontaires à la vie est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.

    Le présent article n’est pas applicable lorsque la consultation est effectuée de bonne foi, résulte de l’exercice normal d’une profession ayant pour objet d’informer le public, intervient dans le cadre de recherches scientifiques ou est réalisée afin de servir de preuve en justice.

    Voir l’article du Monde, la décision est attendue vendredi 10 février. On trouvera utilement l’intégralité des plaidoiries devant le Conseil (48’42 »), notamment l’analyse de Claire Waquet. Et bien sûr, le morceau de bravoure de François Sureau, dont on comprend assez vite pourquoi il est aussi écrivain.

    Note du 10 février : le Conseil constitutionnel a censuré l’infraction, voir le très clair article de Martin Untersinger et la décision intégrale du Conseil.

    #censure #flicage #démocratie

  • Le délit de consultation des sites terroristes : l’éblouissante démonstration de François Sureau | #libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2017/02/08/apologie-du-terrorisme-la-brillante-demonstration-de-francois-

    L’excellente leçon de #droit, d’histoire, et d’éthique de Me François Sureau devant le Conseil constitutionnel français, le 31 janvier pour la Ligue des droits de l’homme. Il s’agissait, lors d’une question prioritaire de constitutionnalité, de contester l’article de loi [créant le délit de consultation des sites terroristes]. — Permalink

    #justice #terrorisme

  • Gestion de la « #Radicalisation » en #Prison : à qui profite le crime ?
    http://contre-attaques.org/magazine/article/gestion-de-la

    Depuis quelques années, la question de la gestion de la « radicalisation » en prison est sous le feu des projecteurs...occultant, bien souvent, les problématiques liées à la réinsertion et aux conditions de détention. « Un dispositif créé dans la précipitation, voire l’improvisation, avec des résultats potentiellement contre-productifs » : voilà la conclusion du rapport remis le 6 juillet 2016 par Adeline Hazan, Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, au sujet des cinq « unités dédiées » à (...)

    #Magazine

    / #carousel, #Analyses, Prison, Radicalisation

    "http://www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2016/07/Rapport-radicalisation_unit%C3%A9s-d%C3%A9di%C3%A9es_2016_DEF.pdf"
    "http://www.presse.justice.gouv.fr/art_pix/Discours%20audition%20terrorisme%20-%20Assembl%E9e%20nationale%2"
    "http://www.politis.fr/articles/2016/01/prison-la-resistance-dun-detenu-victime-de-letat-durgence-33652"
    "http://www.rtl.fr/actu/societe-faits-divers/prisons-vers-un-retablissement-de-la-fouille-integrale-des-detenus-7782973265"
    "http://www.senat.fr/petite-loi-ameli/2015-2016/606.html"
    "http://www.actusoins.com/277836/prisons-secret-medical-mis-a-mal.html"
    "http://www.humanite.fr/menacee-de-revocation-pour-avoir-parle-dans-lhumanite-608367"
    "http://www.francetvinfo.fr/france/jihadistes-francais/pourquoi-les-unites-dediees-aux-prisonniers-radicalises-sont-une-fausse"
    "http://www.la-croix.com/France/Securite/Vingt-sept-prisons-vont-tester-des-programmes-de-deradicalisation-2016-06-"
    "http://la1ere.francetvinfo.fr/nombre-record-de-detenus-en-prison-les-outre-mer-en-premiere-lig"
    "http://la1ere.francetvinfo.fr/2014/07/08/vetuste-surpopulation-le-tableau-des-prisons-ultramarines-en-201"
    "http://libertes.blog.lemonde.fr/2014/05/31/martine-herzog-evans-vif-requisitoire-contre-la-reforme-penale"
    "https://blogs.mediapart.fr/observatoire-international-des-prisons-section-francaise/blog/180816/la-prison-une-cite-avec-des-barreaux"
    "http://oip.org/index.php/publications-et-ressources/dedans-dehors/1284-dedans-dehors-n-92-juillet-2016-quartiers-et-prison"
    "http://www.liberation.fr/debats/2015/02/06/didier-fassin-pour-certains-la-prison-n-est-qu-un-lieu-vide-d-activite-et"
    "http://rue89.nouvelobs.com/2010/05/15/nourriture-tele-la-prison-fait-son-beurre-sur-les-cantines-151412"
    "http://multinationales.org/La-privatisation-rampante-des-prisons-francaises#nb3"

  • #État_d’urgence et l’#urgence_d’en_sortir : l’analyse juridique | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2016/01/28/etat-durgence-et-lurgence-den-sortir-lanalyse-juridique

    Une série de juristes de gauche ont publié une analyse fine (mais copieuse) de l’état d’urgence, en trois temps - ce sont des universitaires : la conformité aux engagements internationaux, l’analyse critique du régime, puis celle du projet de loi constitutionnel.
    Le texte est signé par le Syndicat de la magistrature (SM) ; le Syndicat des avocats de France (SAF) ; l’Observatoire international des prisons (OIP) ; la Quadrature du Net (LQDN) ; le Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI) ; Jeanne Sulzer et Charlotte Bernard, d’Amnesty International France ; Serge Slama, maître de conférences en droit public ; Jean-Philippe Foegle, doctorant, Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense ; Aurélien Camus, docteur, chargé d’enseignements ; et Kenza Belghiti Alaloui, Olivier Berlin Claros, Laetitia Braconnier Moreno, Anaïs Gollanes, Nina Korchi, Anaïs Lambert, Etienne Lemichel, Matthieu Quinquis, étudiant.e.s du Master II Droits de l’Homme de l’Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense.

    Le document, de 75 pages !, est fourni en pdf (Scribd) téléchargeable. Il ne comporte pas d’executive summary, je ne sais pas si la presse va prendre le temps d’en analyser et résumer le contenu…

    • Quelques extraits.

      L’introduction

      Ce document est le fruit d’un travail collectif de juristes conscients de leur rôle et de leur responsabilité dans une société démocratique1. Ses auteur(e)s y ont pris part soit à titre personnel, soit comme représentant(e)s d’une association ou d’une organisation syndicale. Ils ont tous en commun la volonté de faire vivre l’exigence posée par la Cour européenne des droits de l’homme dans son arrêt Klass c/ Allemagne du 6 septembre 1978, qui énonce que « les États [...] ne disposent pas [...] d’une latitude illimitée pour assujettir à des mesures de surveillance secrète les personnes soumises à leur juridiction. Consciente du danger, inhérent à pareille loi, de saper, voire de détruire, la démocratie au motif de la défendre, elle affirme qu’ils ne sauraient prendre, au nom de la lutte contre l’espionnage et le terrorisme, n’importe quelle mesure jugée par eux appropriée ».
      Profondément inquièt(e)s des conditions dans lesquelles la constitutionnalisation de l’état d’urgence est présentée et discutée, et des risques d’une intégration des mesures d’exception dans le droit commun, ils et elles ont tou(te)s été animé(e)s par la volonté de mettre à la disposition du public une analyse approfondie du régime de l’état d’urgence et des implications de son inscription dans le texte de la Constitution. Ils et elles souhaitent contribuer ainsi à nourrir le débat qu’exige un texte aussi lourd de conséquences pour les droits et libertés les plus fondamentales.
      Si des nuances peuvent exister dans l’appréciation portée par chacun(e) des auteur(e)s sur le principe même d’une constitutionnalisation de l’état d’urgence, leurs contributions ont pour objectif commun, en développant une analyse critique du texte qui va être soumis à la représentation nationale, d’en décrypter les enjeux et la portée.
      Le danger pour la démocratie est en effet double. Le risque d’une répression aveugle et disproportionnée que porte l’état d’urgence ne menace pas simplement l’exercice quotidien par le citoyen de ses libertés. En contribuant, par un surcroît d’arbitraire, à la dispersion des forces répressives, il est tout autant susceptible de menacer notre droit à la sûreté en diminuant sensiblement la capacité des autorités à faire face au phénomène criminel que l’on prétend combattre.

      Afin de répondre à ces interrogations essentielles, l’analyse se subdivise en trois parties :
      – Une présentation des principes internationaux qui gouvernent la proclamation d’un état d’exception temporaire ;
      – Une analyse critique du régime d’exception issu de la loi du 3 avril 1955, par comparaison avec les dispositions de droit commun et la législation pénale anti- terroriste ;
      – Une analyse critique de l’article 1er du projet de loi tel qu’éclairé par l’exposé des motifs du gouvernement.

    • L’introduction de la partie II et son plan

      PARTIE 2. ANALYSE CRITIQUE DU RÉGIME DE L’ÉTAT D’URGENCE

      Décrété le lendemain des assassinats terroristes du 13 novembre 2015, l’état d’urgence a été, moins d’une semaine plus tard, prolongé jusqu’au 26 février 2016 par un Parlement ayant approuvé à la quasi-unanimité le projet du gouvernement.
      Pareille précipitation ne peut qu’interpeller dès lors que l’on mesure l’ampleur des atteintes à l’Etat de droit que permet le régime d’exception institué par la loi du 3 avril 1955 et qui a été encore aggravé par la loi du 20 novembre 2015. Une ampleur telle que le gouvernement a dû officiellement notifier au Conseil de l’Europe et au comité des droits de l’homme des Nations Unies qu’il risquait de déroger aux droits respectivement garantis par la convention européenne des droits de l’homme et par le pacte international relatif aux droits civils et politiques.
      La seule question qui se pose est donc celle de la nécessité, dans une société démocratique, d’une telle atteinte aux libertés publiques. A cet égard, passé l’effet de sidération suscité par les attentats, le motif avancé par le gouvernement pour justifier la mise en place d’un tel régime d’exception – la lutte contre le terrorisme – doit être sérieusement discuté. D’abord, parce que l’état d’urgence n’a pas été introduit dans notre législation pour cette fin mais essentiellement, dans le contexte de la guerre d’Algérie, pour donner toute latitude à l’autorité administrative pour la répression des opposants au régime colonial.
      Ensuite et surtout parce que notre système répressif s’est doté, depuis 1986, d’une législation spécifique à la poursuite, l’instruction et au jugement des infractions terroristes, qui prévoit notamment la spécialisation des juridictions et la possibilité de mettre en œuvre des modes d’investigation dérogatoire au droit commun afin de tenir compte du caractère organisé de ce type de criminalité. Cet arsenal répressif est en outre construit autour d’une infraction très spécifique, l’association de malfaiteurs à visée terroriste, qui conduit à sanctionner de manière extrêmement large et précoce des actes préparatoires à un acte de terrorisme47.
      C’est pourquoi, on peut très légitimement se demander si le recours à l’état d’urgence est, sinon indispensable, du moins utile à la prévention et la sanction des infractions terroristes. Or, l’analyse minutieuse de ce régime d’exception et des mesures qu’il autorise permet d’affirmer que, loin de renforcer l’aptitude des pouvoirs publics à faire face à ce type de criminalité, il contribue au contraire à accroître le risque qu’il prétend combattre.
      La présente étude s’attachera donc à exposer pour quelles raisons l’état d’urgence ne peut, d’une façon générale, être considéré comme une atteinte aux libertés légitime dans une société démocratique (I), avant de présenter de façon détaillée l’analyse de chaque mesure, de la nature et du sens de leurs spécificités par rapport au droit commun (II).

      I. UNE ATTEINTE ILLÉGITIME DANS UNE SOCIÉTÉ DÉMOCRATIQUE
      1. TOUTES LES MESURES PERMISES AU TITRE DE L’ÉTAT D’URGENCE SONT DÉJÀ PRÉVUES EN DROIT COMMUN
      2. LA SPÉCIFICITÉ DE L’ÉTAT D’URGENCE NE RÉSIDE PAS DANS UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DU PHÉNOMÈNE TERRORISTE, MAIS DANS UNE POUSSÉE GÉNÉRALISÉE DE L’ARBITRAIRE
      3. CETTE PROPENSION À L’ARBITRAIRE ACCROÎT LE RISQUE TERRORISTE

      II. ANALYSE DÉTAILLÉE DES MESURES PERMISES PAR L’ÉTAT D’URGENCE

  • De « l’esprit du 11 janvier » à la « déchéance de la nationalité » : chronique d’une année de régression culturaliste

    Saïd Bouamama
    1er janvier 2016

    Trois séries de faits ont marqués l’année 2015. La première borne l’année par les attentats ignobles de janvier et de novembre. La seconde est constituée des instrumentalisations de l’émotion publique, qu’ils ont suscités dans une logique froide de réal-politique gouvernementale : elle va de « l’esprit du 11 janvier » à la déchéance de la nationalité en passant par le double consensus pour la poursuite de la guerre et pour l’Etat d’urgence renouvelable. La troisième est une conséquence logique de la précédente et se traduit par la banalisation des « abus » de l’Etat d’urgence, par la montée des actes islamophobes, par les résultats électoraux du Front National et par la manifestation raciste et islamophobe d’Ajaccio. Le discours médiatique et politique dominant, en présentant les deux premières séries de faits comme reliées par un ordre de causalité, légitime l’Etat d’urgence et la guerre comme nécessités de la sécurité publique. Par le procédé exactement inverse c’est-à-dire en refusant d’interroger les interactions entre les deux dernières séries de faits, les mêmes discours masquent les responsabilités gouvernementales dans le développement rapide de rapports sociaux racistes dans notre société.



    Une question de méthode

    Comprendre une dynamique sociale et politique suppose la recherche des liens de causalités entre des faits sociaux et politiques. Séparer ce qui est relié, nier les relations de causalités entre les faits, est une première erreur méthodologique diffusée lorsqu’un dominant, individu ou groupe social, a intérêt à masquer les causes réelles de ses décisions et de ses pratiques. 



    Des causes générales et abstraites sont alors mises en avant pour masquer les causes matérielles réelles. Des mots lourds envahissent alors le champ lexical. C’est ainsi que nous serions en guerre pour lutter contre la « barbarie » en Syrie aujourd’hui ou pour défendre le « droit des femmes » en Afghanistan hier et non pour des raisons de contrôle des sources pétro-gazières de la région. 



    C’est de même pour défendre la « laïcité » que la loi interdisant le port du foulard à l’école a été votées en 2004 et non pour détourner l’attention des effets d’un libéralisme économique destructeur. La montée de l’islamophobie, les résultats électoraux du Front National et la manifestation islamophobe d’Ajaccio sont incompréhensibles en partant de causalités générales et abstraites. 



    Ces faits sont le résultat de causalités matérielles précises : les décisions économiques, militaires et policières internationales et nationales de l’Etat français. La politique de guerre là-bas, de dérégulation économique et de détournement des colères sociales ici, sont, selon nous, les causalités matérielles que masquent les causalités abstraites et générales mises en avant par le discours politique et médiatique. 



    La recherche des causalités ne peut en outre se réduire à une approche chronologique. Ce qui précède n’est pas automatiquement la cause de ce qui succède. De même que le jour n’ a pas pour cause la nuit, le vote de l’Etat d’urgence n’a pas pour cause les attentats ignobles de novembre et la guerre en Syrie n’est pas la conséquence de l’existence de DAESH. 



    Deux procédés idéologiques des mécanismes de domination peuvent à ce niveau être repérés. Le premier consiste à confondre prétexte et cause. L’invasion du Koweït par l’Irak est ainsi un prétexte qui a médiatiquement et politiquement été construit comme cause pour justifier la guerre du golfe. Le second mécanisme classique des processus de domination est l’inversion de l’ordre des causes et des conséquences. 



    « L’esprit du 11 janvier », « l’unité nationale » et « l’état d’urgence » ne sont pas des conséquences logiques et inéluctables des attentats de janvier et décembre mais sont le résultat d’une instrumentalisation de l’émotion publique à des fins politiques et économiques libérales et guerrières.

    Théorie du complot ou temporalités différenciées ?

    Il est de bon ton aujourd’hui d’amalgamer l’effort de compréhension des stratégies des classes dominantes pour imposer une vision du monde conforme à leurs intérêts matériels d’une part et la « théorie du complot » d’autre part. L’accusation de « conspirationnisme », de « complotisme » ou de « confusionnisme » est même devenue une étiquette infamante brandie face à chaque effort critique. De cette façon s’opère un désarmement idéologique des contestations sociales de l’ordre dominant. Il s’agit bien d’un amalgame au sens de la confusion réductrice entre deux phénomènes hétérogènes.

    

La théorie du complot présente les événements politiquement signifiants comme le résultat d’une conspiration globale orchestrée en secret par un groupe social plus ou moins important. L’approche stratégique c’est-à-dire matérialiste analyse l’histoire comme le résultat de la lutte entre les groupes dominés (classes, minorités nationale et/ou ethniques, nations, femmes, etc.) et les groupes dominants basée sur une divergence d’intérêt matériel. 

La première approche explique la révolution française par un complot maçonnique et la seconde par la lutte entre les féodaux, les serfs et la bourgeoisie. La première explique les luttes de libération nationale de la seconde moitié du vingtième siècle comme le résultat d’un complot communiste alors que la seconde recherche la causalité de ces luttes dans les changements du rapport des forces mondiales ouvrant de nouvelles possibilités de luttes aux colonisés. La première explique l’histoire et ses événements par l’existence d’un complot juif mondial pour dominer le monde alors que la seconde recherche les déterminants historiques dans Les évolutions des rapports de forces entre dominants et dominés. La première explique les guerres contemporaines par un complot de la société des illuminati de Bavière alors que la seconde analyse ces guerres comme conséquences de la lutte pour contrôler les sources des matières premières stratégiques. 



    Si l’histoire n’est donc pas faite de complots, il existe en revanche une histoire des théories du complot, des moments de leur émergence et de leur développement. Celles-ci fleurissent dans les séquences historiques de crises marquées par une crainte sur l’avenir lointain, une incertitude sur l’avenir proche, la peur du déclassement social, l’affaiblissement des facteurs de sécurités sociales et le relâchement des liens sociaux de solidarité. Cette première série de facteurs ne suffit pas. Pour que se développe les théories du complot de manière conséquente, il faut de surcroît qu’aucune explication crédible ne soit suffisamment disponible pour expliquer cette première série de faits.

    

C’est à ce niveau qu’apparaît la responsabilité de Hollande et Valls pour ne parler que de la société française. La nécessité vitale pour eux de masquer les véritables raisons de leurs choix politiques et économiques les orientent vers une temporalité de court terme. Les grilles explicatives proposées sont en permanence conjoncturelles, de réaction à une situation, de mensonge sur les résultats logiques de leurs choix (qui eux sont bien structurels et inscrits dans la longue durée).

    

Expliquer les guerres par leur véritable cause c’est-à-dire les matières premières ou le contrôle d’espaces géostratégiques les rendraient impopulaires. Expliquer la régression sociale généralisée par sa véritable cause c’est-à-dire l’enrichissement d’une minorité la rendrait impossible. La décrédibilisation de ces explications de court terme conduit à l’émergence du terreau des théories du complot comme elle conduit d’ailleurs à la construction de populations bouc-émissaires servant de base au développement des idées et groupes fascisants. 

 L’instrumentalisation de la réalité immédiate pour lui faire servir les choix économiques et politiques structurels de dérégulation globale devient dès lors un impératif de légitimation. Si « l’esprit du 11 janvier », « l’unité nationale » ou le consensus sur la guerre et l’Etat d’urgence ne sont pas le résultat d’un complot où l’ensemble des actes du scénario était prévu, ils sont en revanche le résultat de l’instrumentalisation des attentats et de l’émotion qu’ils ont suscités.

    La lepénisation des esprits

    La temporalité de court terme à des fins de légitimation de décisions illégitimes porte un autre effet important : l’emprunt au Front National de son vocabulaire, de ses logiques de raisonnement, de ses manières de problématiser la société. Il s’agit en effet de tenter de rassurer une angoisse sociale en ne s’attaquant pas à ses bases matérielles en attendant la prochaine échéance électorale. A ce jeu les explications univoques et simplistes du Front National restent les plus efficaces quitte à les nuancer à des fins de distinction. Ce processus décrit il y a bien longtemps par Pierre Tevanian et Sylvie Tissoti est en œuvre depuis plusieurs décennies c’est-à-dire depuis la contre-révolution libérale. D’emprunt en emprunt c’est progressivement l’ensemble du paysage idéologique français qui se trouve modifié. 



    Problématiser les faits et crises sociales à partir de logiques culturalistes, accepter même en les nuançant les théories faisant de l’Islam et des musulmans un problème (pour la démocratie, pour le droit des femmes, pour la laïcité, etc.), reprendre la thématique d’une « identité nationale » en danger par le défaut d’intégration d’une composante de notre société, expliquer les guerres au Sud de la planète par des facteurs uniquement religieux et/ou tribaux, présenter des groupes meurtriers comme DAESH comme surgissement inexplicable de la barbarie ou pire comme conséquence logique d’une religion meurtrière en essence, etc., voilà des décennies que l’hégémonie de cette vision du monde se renforce par emprunts successifs.

    

Le résultat est au rendez-vous : le développement des rapports sociaux racistes dans notre société. Loin d’être une situation isolée, la manifestation islamophobe d’Ajaccio reflète le développement bien réel de ces rapports sociaux sur l’ensemble du territoire. De telles manifestations existent en potentialité ailleurs. Bien sûr ni Sarkozy, ni Hollande ne souhaitent un tel résultat mais celui-ci reste la conséquence logique de décisions de court-terme prisent pour répondre aux besoins de légitimation immédiats de leurs projets de régression sociale. 



    La lepénisation des esprits est un processus c’est-à-dire qu’elle ne peut être stoppée que par la rupture franche et nette avec la logique qui la porte. Or une telle rupture n’est pas possible pour un parti socialiste qui a définitivement fait le choix de la mondialisation capitaliste et de ses nécessités que sont les guerres et la régression sociale généralisée. Elle débouche inévitablement sur une lepénisation des actes. Elle ouvre enfin pour le Front National à une logique de surenchère qui n’a aucune raison de s’arrêter.

    

La proposition du gouvernement d’instaurer une « déchéance de la nationalité » pour les « binationaux » condamnés pour terrorisme est, non seulement, approuvée par le Front National mais celui-ci propose de l’élargir à d’autres situations. « Une fois que le principe a été réhabilité par François Hollande, précise Florian Philippot, nous allons passer à l’étape numéro 2, c’est-à-dire faire pression pour que cette déchéance soit appliquée concrètement beaucoup plus largement (2)." 



    La même logique de surenchère est repérable sur de nombreuses autres questions : L’islamophobie qui se déploie de l’interdiction initiales de porter le foulard au sein de l’école publique à une demande d’extension dans les hôpitaux, les entreprises, la rue, etc. ; La sécurité qui se traduit par une demande d’armements plus conséquents des policiers puis s’étend à l’armement de la police municipale et pourquoi pas demain à la vente libre des armes comme aux Etats-Unis ; Les conditions exigées pour le regroupement familial qui ne cesse de croître depuis trente ans, etc. Sur toutes ces questions ce que le Front National propose devient ultérieurement une réalité mise en œuvre par la droite et/ou le parti socialiste.

    

 L’acceptation d’un champ idéologique entraîne inévitablement les conséquences pratiques de ce champ. L’acceptation pour des raisons de légitimation de court-terme et/ou pour des raisons de détournement des colères sociales et/ou pour des raisons électorales du culturalisme comme grille de lecture du monde conduit inévitablement à un développement des rapports sociaux racistes concrets.



    L’approche culturaliste de la nationalité et logique d’exception

    Les processus culturalistes que nous décrivons s’inscrivent désormais dans la longue durée c’est-à-dire qu’ils se déploient depuis plusieurs décennies. Toutes les mesures culturalistes ne se valent cependant pas. Certaines d’entre-elles signifient des basculements qualitatifs au sens où elles marquent l’éclatement d’un verrou idéologique issu des luttes sociales passées et en particulier de la lutte contre le fascisme au mitan du vingtième siècle et des luttes anticolonialistes des décennies suivantes. Rendre possible la déchéance de la nationalité est une mesure signifiant une telle rupture qualitative.

    

La colonisation instaure un clivage légal entre d’une part des citoyens français et d’autre par des « sujets français ». Elle crée pour les indigènes selon le juriste Jacques Aumont-Thiéville une position « intermédiaire entre celle du citoyen français et celle de l’étranger puisqu’ils sont sujets français (3) ». 



    Ce faisant, elle fonde un droit d’exception s’appliquant à certains français et non à d’autres. Une fois la logique d’exception posée, elle s’étend inéluctablement comme en témoigne la distinction entre « français de papier » et « français de souche » qui date de l’époque coloniale. La hiérarchisation des « français » en fonction de leurs origines touche ainsi les « naturalisés » même européens : 

 

    « Compagnons de France ! A l’appel ! Martinez ! – Présent. Navarro ! – Présent. Esclapez ! – Présent. Napolitano ! Canelli ! Présent ! Présent ! ». Sur les places des villages et des villes d’Oranie, les dimanches matins du salut aux couleurs, le défilé des noms des « compagnons »’ lancés avec l’accent râpeux d’Oran donnait une bonne idée des origines de ceux que les Français « authentiques » appelèrent longtemps avec mépris les « néo-français », ou mieux encore « les Français à 2,75 F » (du prix du papier timbré sur lequel s’établissait la demande de naturalisation) 



    Le décret-loi du 22 juillet 1940 du maréchal Pétain prévoit pour sa part dans son article 1 « la révision de toutes les acquisitions de nationalité française ». Bien sûr nous n’en sommes pas là mais il s’agit bien d’autoriser une déchéance pour des personnes nées françaises sur le seul critère de l’origine. François Hollande le précise nettement le 16 novembre devant le congrès :
    

Nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou un acte de terrorisme, même s’il est né Français, je dis bien même s’il est né Français, dès lors qu’il bénéficie d’une autre nationalité (4). 



    Quant à la veine idéologique d’une telle mesure, le ministre de la justice de Pétain Raphaël Alibert la précise en argumentant le décret-loi avec un vocabulaire que l’on pourrait croire contemporain : « les étrangers ne doivent pas oublier que la qualité de Français se mérite (5). » 



    Les réponses de Manuel Valls ont, bien entendu été une dénonciation offusquée de l’amalgame entre des situations incomparables. Son argumentaire ne peut cependant pas nous rassurer. Selon lui cette mesure n’est pas nécessaire pour des raisons d’efficacité dans la lutte contre le terrorisme. Elle est de nature symbolique :
    

« Oui, c’est une mesure symbolique". Mais "quand des Français prennent les armes contre d’autres Français, prônant la haine de la France, brûlant d’ailleurs le passeport, reniant tout ce que nous sommes, l’Etat, la République peuvent être amenés à prendre un certain nombre de mesures, qui sont à la fois symboliques et concrètes (6). » 



    Si la mesure n’a aucune efficacité, si elle est entièrement de nature symbolique, c’est qu’il s’agit bien de faire éclater un verrou idéologique. Il ne faut jamais sous-estimer les effets d’un tel éclatement quand bien même celui-ci se limiterait à la sphère symbolique. La disparition d’un verrou idéologique libère et autorise, invite et incite, légitime et rend utilisable, des termes et des concepts, des logiques de pensées et des modes de raisonnement, jusque-là prohibés par l’état du rapport de forces. Ce qui est autorisé par l’éclatement de la nationalité homogène qu’instaure la déchéance de la nationalité se sont des pratiques d’exception jusque-là prohibées, ce sont des traitements inégalitaires légaux sur la seule base de l’origine. 



    Nous sommes bien en présence d’une politique de la race construite par en haut pour des raisons de légitimation de court-terme mais imprégnant désormais largement la société française comme en témoigne les derniers sondages comme la manifestation d’Ajaccio. 



    Le peuple de France (comme tous les autres peuples) n’est pas et n’a jamais été raciste par essence. En revanche, il le devient dans certaines périodes historiques, quand se conjuguent des discours culturalistes durables et des incertitudes sociales. Ce fut le cas à l’époque coloniale, telle est aussi notre situation actuelle. La seule réponse est le développement d’une autre explication du présent et d’une autre vision de l’avenir. Mais pour cela une première étape est nécessaire qui consiste à briser les consensus idéologiques que l’on tente de nous imposer. La lutte contre les guerres, l’Etat d’urgence et l’islamophobie revêt désormais le caractère d’une urgence sociale et politique.

    Notes :
    1) - Pierre Tevanian et Sylvie Tissot, Mots à Maux, Dictionnaire de la lepenisation des esprits, Dogorno, Paris, 1998.
    2) - OBS2111/quand-le-fn-proposait-la-decheance-de-nationalite-pour-de-simples-faits-delictuels.html,
    3) - Jacques Aumont-Thiéville, Du régime de l’indigénat en Algérie, cité in Olivier Le Cour Grandmaison, La découverte, Paris, 2010, p. 57.
    4) - http://libertes.blog.lemonde.fr/2015/12/05/decheance-de-nationalite-le-precedent-de-vichy
    5)- Journal de débats du 24 juillet 1940.
    6) - http://www.bfmtv.com/politique/pour-valls-la-decheance-de-nationalite-est-une-mesure-symbolique-936124.html

    Source : Investig’Action http://www.michelcollon.info/De-l-esprit-du-11-janvier-a-la.html?lang=fr

  • Vigipirate et le fantôme de la guerre d’Algérie | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2015/09/07/vigipirate-et-le-fantome-de-la-guerre-dalgerie

    Le plan Vigipirate reste mystérieux - et pas seulement parce qu’on se demande ce qui a bien pu passer dans la tête du gouvernement pour choisir un nom aussi ridicule et le conserver, depuis près de vingt ans d’application ininterrompue. Le dispositif Vigipirate, d’exceptionnel est devenu permanent bien que tous les professionnels de la sécurité en soient d’accord : il n’est d’aucune efficacité contre le terrorisme. Il n’a permis aucune arrestation, n’a aucun effet dissuasif - tous les auteurs d’attentats sont nés alors qu’il s’appliquait déjà - et il coûte un million d’euros par jour, selon la propre estimation du ministre de la défense Jean-Yves Le Drian.

    Si le plan Vigipirate n’a pas de fonction opérationnelle, il en a nécessairement d’autres : une fonction politique assurément, mais qui s’émousse au bout de vingt ans, et une fonction sociale, plus subtile, mais plus dangereuse : entretenir, par le quadrillage militaire, une confusion entre la guerre et la paix. Et ancrer en passant ce non-sens aujourd’hui largement partagé qui veut que « la sécurité soit la première des libertés ».

    • Et aussi :

      C’est tout l’intérêt de Vigipirate : le plan trouve sa source dans l’ordonnance du 7 janvier 1959 qui organise la défense nationale, en pleine guerre d’Algérie, et ses présupposés restent imprégnés de culture du maintien de l’ordre colonial. La pensée militaire, après le déclin de la menace soviétique, se construit sur l’idée que la population est à la fois le corps à protéger et « le milieu de prolifération de la subversion » : il n’est plus possible de distinguer l’ennemi extérieur de l’ennemi intérieur, qui se cache à l’intérieur même du corps social, comme le fellagha de la guerre d’Algérie.

  • Renseignement : un texte sur mesure pour les services spéciaux | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2015/03/23/renseignement-un-texte-sur-mesure-pour-les-services-speciaux

    Le gouvernement a choisi d’énumérer les sept missions qui autorisent les services spéciaux à porter atteinte aux libertés - « la #sécurité nationale, les intérêts économiques et scientifiques essentiels, la prévention du #terrorisme, de la reconstitution de groupements dissous », et « la prévention de la criminalité et de la délinquance organisée » (L 811-3). Deux d’entre elles sont nouvelles, « les intérêts essentiels de la #politique étrangère et l’exécution des engagements internationaux de la France », et « la prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ».

    « L’exécution des engagements internationaux » est une notion particulièrement floue, tant les conventions signées par la France sont nombreuses et protéiformes. Peut-on désormais surveiller les personnels du Tunnel sous la Manche ? Les pêcheurs de morue, les étudiants à l’étranger ou les fonctionnaires du Conseil de l’Europe ? De la même manière, « la prévention des violences collectives » vise, à la lettre, et quoique s’en défende Matignon, aussi bien les hooligans, les manifestants de Sivens ou ceux de Notre-Dame-des-Landes.

    Bien plus de gens surveillés

    Il fallait jusqu’ici, pour faire l’objet d’une écoute administrative (c’est-à-dire non judiciaire), avoir « un lien personnel et direct » avec une infraction présumée : pas question d’écouter le boulanger ou le voisin du suspect. Désormais, « lorsqu’une ou plusieurs personnes appartenant à l’entourage de la personne visée sont susceptibles de jouer un rôle d’intermédiaire, volontaire ou non, pour le compte de celle-ci ou de fournir des informations », il est possible de les surveiller (L 852-1). L’autorisation de #surveillance concerne explicitement « la ou les personnes », « le ou les lieux ou véhicules concernés » (L 821-2).
    Il y a pire. « Pour les seuls besoins de la prévention du terrorisme, le recueil des informations et documents relatifs à des personnes préalablement identifiés comme présentant une menace, peut-être opéré en temps réel sur les réseaux des opérateurs » (L 851-3, L 851-4). Il est ainsi possible d’espionner les téléphones et les réseaux internet de, par exemple, tous les habitants de Tarnac, de tous les Tchétchènes ou Kurdes de France, voire de tous les Corses ou les Basques : il s’agit bien de légaliser une surveillance de masse de l’internet, constamment dénoncée, notamment par Le Monde, et toujours officiellement démentie.

    #big_brother

  • La réforme pénale amputée sous pression de l’Elysée | Mediapart, 6 juin 2014, par Mathieu Magnaudeix cc @chirine
    http://www.mediapart.fr/journal/france/060614/taubira-fait-adopter-sa-reforme-penale-amputee-sous-pression-de-lelysee?on

    L’affirmation dans le #Code_pénal que les peines doivent être individualisées, la fin des sorties sèches de #prison, la césure du procès pénal afin d’ajuster la peine une fois la culpabilité prononcée, et bien sûr la fin des très décriées peines plancher, qui fixaient une sanction automatique en cas de récidive, sont autant de mesures importantes. L’Assemblée a par ailleurs voté la suspension des peines de prison pour les femmes enceintes.

    Pour autant, aucun des nouveaux délits créés par la droite entre 2002 et 2012 n’a été supprimé du Code pénal. Il n’a pas été question de “dépénaliser” ou de “contraventionnaliser” une série d’infractions (routières notamment) qui avaient été transformées en délits sous Chirac et Sarkozy, ou encore la détention de stupéfiants. De même, l’échelle des peines encourues pour certains délits n’a pas été revue à la baisse, toujours afin d’éviter un procès en laxisme. Le texte se fait même plus sécuritaire que certaines lois votées sous la droite lorsqu’il réduit la possibilité pour les juges de procéder à des aménagements de peine.

    Les débats ont plusieurs fois prouvé la gêne d’une partie de la majorité face à un texte édulcoré. Mercredi dans la nuit, un curieux face-à-face a ainsi opposé la majorité, convaincue de la nécessité de supprimer les tribunaux correctionnels spéciaux pour mineurs, à une ministre d’accord avec eux mais qui n’avait pas le feu vert de l’Élysée et de Matignon pour abroger cette mesure phare des années Sarkozy, comme François Hollande s’y était engagé. (...)

    « L’engagement du président de la République sera respecté », mais « pas par amendement », a promis Jean-Jacques Urvoas, un proche de Manuel Valls. Pascal Cherki (aile gauche du PS) lui a rétorqué que le crédit impôt pour les entreprises, lui, avait bien été voté par amendement à l’automne 2012.

    Une autre passe d’armes a eu lieu sur la contrainte pénale, cette peine alternative à la prison instaurée par la loi. La semaine dernière, en commission, la garde des Sceaux avait volontairement laissé passer un amendement l’étendant des délits passibles de moins de cinq ans de prison à tous les délits (dix ans de prison maximum). Elle avait été rappelée à l’ordre par l’Élysée. Dès mardi, un accord avait été trouvé entre le groupe PS de l’Assemblée et le gouvernement : l’extension aux délits les plus graves ne se fera que dans trois ans, au 1er janvier 2017. « Ce sont les parlementaires qui votent la loi ! » a rappelé l’ancienne ministre écologiste Cécile Duflot, redevenue députée. En vain : une fois de plus, le gouvernement a imposé ses vues.

    L’Assemblée nationale a par ailleurs rejeté la suppression de la rétention de sûreté, instaurée en 2008, qui prévoyait de priver de liberté des criminels dangereux ayant déjà purgé leur peine. Une loi « honteuse » (...)

    Christiane Taubira a convenu que leur suppression était une « nécessité ». Mais elle a donné rendez-vous à plus tard. Rien n’indique pourtant que le gouvernement, en grande difficulté politique et convaincu que le pays se droitise à toute vitesse, fera voter de sitôt un nouveau texte pénal.

    #paywall certes mais j’ai mis l’essentiel je crois #droit_pénal

    Et sur le blog Libertés surveillées :
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2014/06/08/reforme-penale-adoption-a-lassemblee-nationale-de-la-loi-taubi

  • Tribune : Bernard Ripert, un avocat condamné pour excès de langage – une question de principe
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2014/04/15/tribune-bernard-ripert-un-avocat-condamne-pour-exces-de-langag

    Bernard Ripert est avocat. Le 2 décembre 2013, la cour d’appel de Grenoble lui a interdit d’exercer son métier pour une durée d’une année. Que lui a-t-elle donc reproché pour le condamner à une peine aussi sévère ?

    D’après les termes de son arrêt, d’avoir dit lors d’un procès à un autre avocat, qui s’en est plaint : « cessez d’aboyer comme un roquet », et à un juré tiré au sort : « dommage ». Mais aussi d’avoir grondé : « je saurai trouver les bons juges », soupçonnant le président de « faire preuve de tricherie et de mensonges ». Et encore de s’être moqué d’un tribunal pour « sa légèreté et son incompétence habituelles »… Des mots, des propos, que vous pouvez trouver agressifs, choquants, excessifs ou déplacés de la part d’un avocat, mais des mots, seulement des mots.

    […]

    Mais d’actes contraires à la probité, aucun, et pour cause : Bernard Ripert est un homme d’une parfaite intégrité, qui a toujours méprisé l’argent et les honneurs, pour se vouer à son métier d’avocat, avec passion. Une passion qui s’est gonflée de colère avec le temps, le poussant à crier toujours plus fort sa révolte envers la justice criminelle qu’il considérait comme excessivement injuste, répressive et discriminatoire : une justice de classe, à ses yeux de vieux militant marxiste.

  • Géolocalisation : ce qui est désormais autorisé – presque tout | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2014/05/09/geolocalisation-ce-qui-est-desormais-autorise-presque-tout

    On peut en effet géolocaliser presque tout. Les téléphones et voitures des suspects bien sûr, mais pas seulement : une circulaire du ministère de la justice confirme qu’il est possible de géolocaliser « tout individu (environnement familial ou amical du suspect notamment) dès lors que les nécessités de l’enquête l’exigent ». Si votre fils, votre voisin ou votre collègue de bureau s’est égaré dans un trafic de stupéfiants, vous pouvez être suivi en temps réel par la police.

    SOC-1814-GEOLOCALISATION web2 (2)

    Pour qu’un juge d’instruction ou un procureur ait le droit d’ordonner une géolocalisation, il faut que l’infraction soit punie d’au moins cinq ans de prison, c’est-à-dire tous les crimes, mais aussi beaucoup de délits. Il existe même une longue liste d’infractions, punis d’un maximum de trois ans d’emprisonnement, qui l’autorise : violence sur mineur, sur ascendant, conjoint, pompier, enseignant ou gardien d’immeuble. C’est aussi le cas des escroqueries, menaces de morts, dégradations lourdes, incendies de forêt, défaut de secours à personne en péril ou diffusion d’images de violence et même exploitation de vendeurs à la sauvette.

    #Police_partout

  • Géolocalisation : ce qui est désormais autorisé – presque tout | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2014/05/09/geolocalisation-ce-qui-est-desormais-autorise-presque-tout

    La géolocalisation d’un suspect, c’est-à-dire la possibilité de savoir en temps réel où il est, d’où il vient et où il va, est désormais parfaitement encadrée par la loi. Elle ne remplace pas les bonnes vieilles filatures, mais démultiplie les moyens des policiers, qui en font grand usage. Personne ne sait exactement jusqu’à quel point : on peut mesurer précisément les demandes de géolocalisation des magistrats, principalement sur les téléphones, pas les pratiques : la géolocalisation par balise, dans la plupart des cas un mouchard placé sous une voiture, « n’apparaît qu’exceptionnellement en procédure », reconnaît la chancellerie.

    #géolocalisation #surveillance #législation

  • L’OIP s’inquiète de « l’impasse sur les prisons » du projet de réforme pénale | Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2013/11/05/loip-sinquiete-de-limpasse-sur-les-prisons-du-projet-de-reform

    L’OIP s’inquiète de « l’impasse sur les prisons » du projet de réforme pénale❞

    L’OIP est inquiète : le projet de réforme pénale adopté le 9 octobre en conseil des ministres « fait l’impasse sur une préconisation essentielle de la conférence de consensus : réformer la prison ».

    Le jury de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive, qui a rendu ses conclusions en février au premier ministre, appelait à « une réforme profonde des conditions d’exécution de la peine privative de liberté », et le candidat Hollande avait lui aussi souhaiter « adapter les lieux d’enfermement à leur objectif de réinsertion dans la société ». L’observatoire international des prisons constate qu’il n’en est plus vraiment question dans le projet de réforme pénale.

    Pour l’association, les prisons restent régies « par une logique archaïque de bannissement et de châtiment » ; « les conditions de survie en milieu carcéral sont antinomiques avec la prise de conscience, la sociabilisation et l’acquisition des compétences », autant « d’effets nocifs, qui favorisent la récidive ».

    L’OIP publie ainsi une longue note, restée sans suite, adressée au ministère de la justice en juin dernier, en soulignant 12 points, inspirés des principes préconisés par le Conseil de l’Europe.

    #prison #réforme_pénale#OIP

  • La France condamnée après l’expulsion de gens du voyage
    Libertés surveillées
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2013/10/18/la-france-condamnee-apres-lexpulsion-de-gens-du-voyage/#more-3027

    C’est la victoire du bois du Trou-Poulet : la France a été condamnée, jeudi 17 octobre – journée mondiale du refus de la misère – par la Cour européenne des droits de l’homme pour avoir expulsé des gens du voyage sans leur proposer un relogement.

  • Philippe El Shennawy : sortie de prison prévue en 2032 (Libertés surveillées)
    http://libertes.blog.lemonde.fr/2012/06/17/philippe-el-shennawy-sortie-de-prison-prevue-en-2032

    Philippe El Shennawy est fatigué. Il a mis pour la première fois les pieds en prison en janvier 1972, et il devrait en sortir en août 2032, à l’âge de 78 ans. Il n’a pas de sang sur les mains, mais a accumulé au fil des années les condamnations pour braquage. La cour d’appel de Versailles lui a refusé le 18 mai une confusion significative de ses peines, et il ne voit plus bien aujourd’hui quel sens a sa vie. Il a cessé de s’alimenter le 23 mai. Ce n’est pas une grève de la faim, il n’attend rien. (...) Source : Libertés surveillées