• Quelques extraits du
    Compte rendu Mission d’information sur les moyens de Daech
    – Table ronde : « ressources tirées des matières premières et de la contrebande ».

    M. Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme ;
    M. Sébastien Abis, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) ;
    M. Francis Perrin, président de Stratégies et politiques énergétiques (SPE) ;
    M. Francis Duseux, président de l’Union française des industries pétrolières (UFIP).

    Le pdf complet peut être récupéré sur :
    http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/cr-mimdaesh/15-16/c1516018.pdf

    « La puissance financière est l’un des principaux traits caractéristiques de l’État islamique. Son modèle économique, inédit pour une organisation terroriste, présente trois spécificités.

    Premièrement, il s’appuie sur le contrôle territorial. Dans un document stratégique interne à l’organisation, l’un des fondateurs de l’État Islamique écrivait : « l’État ne peut se maintenir sans l’existence de la terre (...) et les richesses de la terre sont la composante et la
    source de financement principale pour toutes les opérations intérieures et extérieures ».
    C’est donc l’assise territoriale qui procure à l’EI l’essentiel de ses ressources, et qui lui confère l’autosuffisance depuis 2005.

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    Il s’agit un changement radical de modèle économique par rapport à des organisations telles qu’Al-Qaïda, qui dépendaient de financements extérieurs. Le territoire de l’EI représente aujourd’hui environ 70 000 kilomètres carrés en Syrie et en Irak, pour environ 8 millions d’habitants. Ce territoire s’est réduit d’à peu près 25 % depuis janvier 2015, à la suite de l’action de la coalition internationale, réduisant mécaniquement son accès aux ressources. Pour autant, les frappes de la coalition et l’action de la communauté internationale n’ont pas permis de réduire de manière significative les revenus de l’EI, ni sa capacité à effectuer des transactions.

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    la deuxième spécificité de l’État islamique : sa capacité d’accès à des sources de financement diversifiées et multiples. Il s’appuie non seulement sur l’exploitation de ressources naturelles (pétrole, gaz naturel, phosphates, agriculture, eau) mais également sur des revenus d’origine criminelle (extorsion – impôts et taxes de toute nature, redevances, confiscations, rançons et commerce illicite – et trafic d’antiquités).

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    la troisième spécificité du modèle économique de l’EI réside dans sa flexibilité et sa capacité d’adaptation. Ainsi, au cours de l’année 2015, afin de compenser la baisse des revenus pétroliers, l’EI a adapté ses capacités de production et de distribution,
    réduit ses dépenses et accru une autre source de revenus en généralisant l’extorsion ; utilisant ainsi la population sous son contrôle comme variable d’ajustement.

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    Selon nos estimations, le revenu annuel de l’EI s’établit aujourd’hui à un peu plus de 2 milliards de dollars, et sa richesse théorique – c’est
    –à-dire la valorisation de l’ensemble des actifs sous son contrôle, y compris les réserves prouvées de pétrole et de gaz naturel
    serait proche de 2 000 milliards de dollars.L’État islamique exerce actuellement son contrôle sur une quinzaine de champs pétroliers en Syrie et une dizaine en Irak. La seule province syrienne de Deir ez-Zor procure les deux tiers des revenus pétroliers de l’EI. Pour l’année 2015, nous estimons la production quotidienne moyenne à environ 40 000 barils, pour un revenu annuel de 600 millions de dollars, contre un milliard de dollars en 2014. D’après des sources locales convergentes, les transactions s’effectuent à un prix variant entre 25 et 45 dollars par baril,

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    Par ailleurs, l’État islamique contrôlait en 2015 une douzaine de gisements de gaz naturel en Irak et en Syrie, notamment Akkas, la plus grande réserve irakienne de gaz naturel, située dans la province d’Al-Anbar, et les champs de la région de Palmyre en Syrie, comptant pour près de la moitié de la production syrienne de gaz naturel. Suite aux avancées du régime syrien dans la région de Palmyre, cette situation est amenée à changer.Nous estimons que l’exploitation de ces gisements a rapporté 350 millions de dollars à l’État islamique en 2015, ce qui représente une forte baisse par rapport à 2014.

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    Le trafic d’êtres humains constitue en effet une autre source importante de financement de l’État islamique. Il s’agit de rançons suite à des prises d’otages. On a beaucoup parlé des otages occidentaux, mais beaucoup moins des communautés locales visées par ce type de pratiques criminelles. Les notables peuvent également faire l’objet de telles prises d’otages et il existe de rares cas d’esclavage. C’est une part marginale du financement de l’État islamique, mais elle représente néanmoins une centaine de millions de dollars annuellement.

    Viennent s’y ajouter les revenus du commerce illicite, non pas de drogues, mais d’antiquités et d’œuvres d’art extraites des pillages systématiques qui font partie de la propagande de Daech : ils montrent que ces icônes sont détruites, et alimentent également un commerce florissant. Là encore, ce phénomène est assez marginal. Des pièces ont été retrouvées çà et là,
    au Liban, en Jordanie, et même en Europe, par exemple à Londres. Le gouvernement américain estime que ces activités rapportent entre 30 et 50 millions de dollars par an à Daech.Le salaire des combattants de Daech a été divisé par deux pour réduire ses dépenses,
    notamment suite à la baisse des revenus pétroliers. Le salaire de base est de 100 dollars par mois et une grille de salaire fait varier ce salaire selon le nombre d’enfants sur le territoire.
    Des aides en nature sont également apportées aux combattants, notamment le logement. Nous avons cette grille, qui s’avère très précise, car l’État islamique est également une bureaucratie qui sait gérer de manière comptable ses effectifs et ses revenus »

    #EI
    #Daesh