Goéland – Réinventer Calais

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  • Goéland – Réinventer #Calais
    par Gilles Clément
    pour PEROU
    (à lire absolument)
    https://reinventercalais.org/articles/goeland

    Depuis des millions d’années les continents nagent. Ils se séparent, se rapprochent, s’éloignent, changent d’angle et de position par rapport au nord géographique. Mais le nord change à son tour et tout tourne.

    Les plantes et les animaux se sont organisés sur cette plaque tournante. Ils migrent à chaque fois que changent le climat et les conditions de vie. Ils n’ont pas de frontière. Ceux qui habitent la terre se limitent aux contours des continents et des îles. Ceux qui habitent la mer n’ont d’autres limites territoriales que les conditions vitales : température de l’eau, acidité, sources de nourritures, habitats. Tous sont inféodés à un ensemble de compatibilité de vie qui correspond à une zone climatique planétaire : un biome.

    Les humains ont inventé les prothèses : vêtements , maisons , véhicules etc… Ils ont accru leur amplitude biologique et sont capables de franchir tous les biomes. Ils peuvent vivre sur la glace, dans les déserts, sous les tropiques et sous la mer. Ils n’ont pas de limite biologique territoriale.

    Pour jouer, se battre, se cantonner en ghettos de couleurs, ils ont inventé les frontières et les drapeaux. Ils aiment leurs frontières. Ils sont capables de les franchir sans difficulté mais ils tiennent à leur existence. Cela leur donne le sentiment de maîtriser l’espace ainsi délimité. Ils en revendiquent la propriété.

    #Gilles_Clément #territoire #frontières #jungle

    • #mots #terminologie #vocabulaire #campement #réfugiés #asile #migrations

      A Calais on parle de « jungle » car tout fait penser au désordre et à la perdition. Abus de langage, erreur d’aiguillage. Les migrants de Calais tentent, c’est vrai, de reconstituer un milieu de vie et s’ils parvenaient à reconstituer la jungle-milieu d’équilibre, ils pourraient espérer vivre. On ne leur laissera pas le temps de vivre. Il faut les chasser puisqu’ils viennent d’ailleurs. Ils n’ont pas le droit de vivre. Ils doivent mourir ou partir. Pour l’administration des frontières (de la guerre, de l’argent et du jeu), cela revient au même : ils doivent disparaître.

      La Jungle de Calais n’est pas la jungle de la nature. C’est un camp transitoire de chair humaine, disqualifiée par les humains eux-mêmes, à jeter à la mer ou encore à brader au plus offrant des joueurs dont les jetons de poker se heurtent aux frontières.

      #cpa_camps