La carte des pensées écologiques
La carte des pensées écologiques est enfin disponible !
Il aura fallu des mois de discussions et de travail collectif pour aboutir à cette #carte qui a l’ambition de représenter dans toute leurs pluralités les pensées de l’#écologie_politique en montrant les liens entre ses principaux courants, penseurs et penseuses, luttes et organisations.
L’objectif premier est de montrer que l’#écologie est un #champ_de_bataille, un terrain où s’affrontent des #idées. En conséquence figurent sur cette carte des « #écoles » pauvres en apports théoriques mais riches en capitaux et en relais d’influence. Comme toute cartographie également, elle fige des positions par nature dynamiques, des espaces mouvants, et impose une vision qui lui est propre.
Cette citation d’André Gorz résume bien la situation :
“Si tu pars de l’impératif écologique, tu peux aussi bien arriver à un anticapitalisme radical qu’à un pétainisme vert, à un écofascisme ou à un communautarisme naturaliste”.
La carte des pensées écologiques n’aurait jamais vu le jour sans un formidable travail de toute l’équipe du média Fracas. Nous avons décidé de la laisser gratuitement en accès libre. Pour soutenir Fracas et avoir la version poster, vous pouvez acheter leur premier numéro directement sur ce lien. Abonnez-vous pour soutenir la presse indépendante !
La carte des pensées écologiques
Voici la carte des pensées écologiques. 8 grandes familles, plus de 150 personnalités représentées :
Les 8 grandes familles des pensées écologiques
Pour vous y retrouver plus facilement, voici en détail les 8 grandes familles des pensées écologiques, avec leurs autrices et auteurs clés. Si vous souhaitez aller plus loin, plus de 150 noms sont à retrouver sur la carte, et des sources sont disponibles à la fin de cet article.
1/ ÉCOLOGIES ANTI-INDUSTRIELLES
Les #écologies_anti-industrielles rejettent le productivisme et l’hyper-mécanisation du travail issus de l’ère industrielle. Elles développent une approche technocritique tout au long du XXe siècle. Critiques du gigantisme de l’appareil productif et de l’État pour les ravages qu’ils causent aux écosystèmes et à la personne humaine, les écologies anti-industrielles prônent la petite échelle et refusent une certaine idéologie du Progrès.
Elles critiquent vertement la dépossession des populations de leurs propres moyens de subsistance. Elles encouragent enfin le fait de considérer l’industrie et la technique comme un système avec ses logiques propres, dont on ne peut se contenter de critiquer tel ou tel effet pris isolément.
Autrices et auteurs clés : #Ivan_Illich, #Jacques_Ellul et #Günther_Anders
2/ ÉCOLOGIES LIBERTAIRES
Les #écologies_libertaires s’inscrivent en filiation des traditions du socialisme ouvrier anglais et de l’anarchisme, et entretiennent une grande proximité avec les écologies anti-industrielles. L’idéal d’émancipation et d’autonomie des libertaires se trouve régénéré par une analogie : les dominations de l’homme sur l’homme, de l’homme sur la femme et de l’homme sur la nature ne peuvent être prises séparément, et doivent être combattues d’un bloc.
En conséquence, elles aspirent à la constitution d’éco-communautés et d’institutions autogérées et démocratiques à l’échelon local et défendent des principes fédératifs contre les dynamiques centralisatrices de l’État. La vision de la société s’articule autour du champ, de l’usine et de l’atelier, et d’une démocratie radicale, parfois exprimée par le recours au tirage au sort.
Autrices et auteurs clés : #Murray_Bookchin, #Kristin_Ross, #Bernard_Charbonneau
3/ ÉCOFÉMINISMES
Né dans les années 1970 sous la plume de Françoise d’Eaubonne, l’#écoféminisme est une famille qui propose une analyse de la catastrophe écologique fondée sur le genre et sur l’oppression des femmes sous le capitalisme patriarcal. Nébuleuse aux contours flous, l’écoféminisme se conjugue dès le départ au pluriel, soulignant la diversité des origines géographiques et des influences idéologiques qui composent ce courant : socialisme, spiritualisme, queer, marxisme, pensées décoloniales, etc.
Elles partagent pour la plupart le constat que, d’une part, le rôle des femmes a été subordonné à une fonction purement reproductive et, d’autre part, que la nature a été associée à l’image de cette femme dominée, que le capitalisme doit soumettre, exploiter, et même violer.
Autrices et auteurs clés : #Françoise_d’Eaubonne, #Vandana_Shiva, #Starhawk
4/ ÉTHIQUES ENVIRONNEMENTALES
Les #éthiques_environnementales émergent au sein de la philosophie de l’environnement aux États-Unis, et explorent, chacune avec des options parfois radicalement différentes, le lien qu’entretient l’homme avec la « nature ». Certaines écoles défendent que les espaces naturels ont une valeur intrinsèque, d’aucunes qu’on ne peut juger de la nature que par son utilité pour l’homme, d’autres encore que nous devons nous concevoir comme une espèce au sein d’une « communauté biotique ».
Faut-il préserver des espaces vierges ? Faut-il au contraire être les stewards d’espaces dont l’homme ne s’exclue pas ? Les polémiques et conflits n’ont certainement pas manqué au sein de cette famille…
Autrices et auteurs clés : #Aldo_Leopold, #Imanishi_Kinji
5/ #ÉCOSOCIALISME
La famille écosocialiste émerge comme un prolongement du #marxisme mais s’oppose à ses interprétations productivistes portées notamment par l’URSS. En partant de l’insuffisante prise en considération des écosystèmes dans les traditions socialiste et marxiste, il s’agit alors de les dépoussiérer et les adapter au tournant écologique des sociétés, en portant l’idée que l’oppression sociale et la destruction de la nature ont une même et unique cause : le capitalisme.
Si la socialisation des moyens de production et l’autogouvernance démocratique restent au cœur de ce projet, les écosocialismes proposent une variété de réponses allant d’un interventionnisme fort de l’État à des perspectives davantage autogestionnaires. Certains écosocialismes contemporains, dont la branche étatsunienne, ont même rompu avec une perspective anticapitaliste claire et la tradition révolutionnaire.
Autrices et auteurs clés : #André_Gorz, #Michael_Löwy, #John_Bellamu_Foster
6/ ÉCOLOGIES DÉCOLONIALES
Conceptualisée dans les années 1980, les #écologies_décoloniales pointent l’#impensé_décolonial de l’écologie dominante, à la fois libérale et occidentalo-centrée, qui empêcherait la constitution d’une lutte écologiste pleinement libératrice car internationaliste. Par son universalisme « naturaliste » et raciste, sa vision mortifère de la nature, son extractivisme et son colonialisme producteur de natures appauvries (dont la plantation coloniale est l’emblème), l’Occident est en grande partie responsable de la catastrophe en cours.
De ce point de vue, une écologie de « transition » qui supplanterait les énergies fossiles par des ressources minières au profit d’énergies renouvelables ne serait pas seulement insuffisante : elle ne ferait que trouver de nouvelles formes au colonialisme.
Autrices et auteurs clés : #Joan_Martinez_Alier, #Malcolm_Ferdinand
7/ #CAPITALISME_VERT
La crise écologique fournit chaque jour de nouvelles preuves de la logique mortifère qui se loge au cœur de la dynamique d’accumulation capitaliste. Pour autant, le capitalisme a aussi ses théoriciens, et ceux-ci ont eux aussi tenté d’intégrer les paramètres écologiques dans leur défense de l’ordre en place.
Dès lors, il s’agit bien souvent de corriger les « excès » ou les « impensés » du capitalisme en intégrant la dimension environnementale aux échanges marchands (taxes, compensation, technologies vertes…). Certains vont jusqu’à vouloir accélérer la dynamique du système capitaliste, y voyant un moyen de contrôler le Système-Terre dans un sens qui ne nuise pas aux intérêts de la classe possédante.
Autrices et auteurs clés : #Christiana_Figueres, #David_Keith
8/ ÉCOFASCISMES
Les #écofascismes, qui ont émergé à bas bruit depuis les années 1980, sont extrêmement fragmentés. En Europe, ils défendent un éco-différentialisme, soit l’idée d’une humanité divisée en différentes « races » ou civilisations non hiérarchisées mais qui doivent rester séparées, car adaptées à leur environnement immédiat : « chacun chez soi » devient « chacun dans son propre écosystème ».
Aux États-Unis, le néo-malthusianisme et la xénophobie se doublent d’une apologie des grands espaces vierges, de la wilderness, souillée par l’immigration. Cette obsession démographique se traduit souvent par un repli sur des « bases à défendre », dans des logiques « survivalistes ».
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