Les éditeurs (ou les producteurs des autres supports) restent néanmoins indispensables pour la sélection, l’établissement, la traduction, la relecture, la composition typographique, la présentation et l’accompagnement de l’auteur. Leur métier consiste à transformer les créations en documents édités.
Donc les éditeurs ne sont plus du tout « indispensables ».
Ce qui rend les éditeurs indispensables, c’est le processus industriel de fabrication du livre et l’investissement dans la distribution, deux activités capitalistiques inaccessibles à l’auteur. Il faut investir pour :
– fabriquer des exemplaires avant même de savoir combien on va en vendre,
– il faut expédier ces exemplaires dans le maximum de points de vente pour espérer toucher le public, sans non plus savoir à l’avance si ces exemplaires seront vendus.
De fait, le rôle de l’éditeur, essentiellement, c’est de mutualiser (à son profit, tout de même) le risque capitalistique de ces deux investissements : une partie arrive juste à l’équilibre, une partie perd carrément de l’argent, et une petite minorité réalise un succès suffisant pour faire tourner l’entreprise.
S’il n’y a plus de fabrication des exemplaires (ebooks) ni de circuit de distribution, l’éditeur ne se justifie plus que par des services qu’il pourrait apporter, et non plus par des capacités capitalistiques que ne peuvent avoir des auteurs individuels. Services listés ci-dessus.
Mais tout ces services peuvent être réalisés, à l’heure du Web, autrement qu’en passant par un éditeur. Et qui, surtout, ne permettent plus à l’éditeur de prélever une rémunération aussi importante dans le prix de vente du livre.
Ne pas perdre de vue que la filière du livre a réussi à faire étendre le prix unique du livre aux ebooks. À partir de là, la discussion est terminée. Le lecteur sait qu’il paie trop cher un produit qui coûte beaucoup moins cher qu’un livre physique, et l’auteur sait qu’il gagne toujours une misère alors que les frais intermédiaires ont chuté. Ceux qui sont ainsi perçus comme se sucrant, parce qu’installés entre l’auteur et le lecteur (et protégés par leur lobbying législatif), vont subir une grosse grosse claque.