• Éducation. #Samuel_Paty : le #rapport qui accuse la victime

    L’#enquête demandée par Jean-Michel Blanquer à l’inspection de l’Éducation nationale ne répond pas aux questions posées. Elle apporte un récit minutieux, mais biaisé, des faits. Le seul à avoir commis des #erreurs serait… Samuel Paty.

    « La #reconstitution du déroulement des #faits tend à montrer que, tant au niveau de l’établissement qu’aux niveaux départemental et académique, les dispositions ont été prises avec réactivité pour gérer le trouble initialement suscité par le cours sur la #liberté_d’expression de Samuel Paty. »

    La phrase figure en toutes lettres dans le rapport de l’#IGESR (Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche) sur les événements ayant abouti à l’#assassinat, le 16 novembre, du professeur d’histoire-géographie, rendu public le 3 décembre. Comme on ne peut pas soupçonner a priori les inspecteurs du ministère de l’Éducation nationale d’un défaut de maîtrise de la langue, il faut prendre soin d’en bien saisir le sens.

    Dédouaner l’institution

    Ce rapport affirme donc qu’il s’agissait, non de protéger un enseignant contre une cabale venue de l’extérieur et qui a abouti à son meurtre, mais de « gérer un #trouble ». Et qu’est-ce qui a « suscité » ce trouble, selon les auteurs ? Non pas les agissements d’un père d’élève qui a publié des vidéos dénonçant le comportement du professeur et appelant à se rassembler devant l’établissement, ni ce que cet appel a entraîné, mais bien… « le #cours sur la liberté d’expression de Samuel Paty. »

    Le texte a beau nier, par ailleurs, que le professeur ait été à aucun moment mis en cause, notamment par l’inspecteur « référent laïcité » qui l’a rencontré le 9 octobre : la formulation choisie trahit l’intention véritable de ce travail. Il s’agit non de faire la lumière sur les #responsabilités et les éventuelles #erreurs des uns et des autres dans cette affaire, mais avant tout de dédouaner l’institution de toute responsabilité éventuelle. Comme l’affirmait Jean-Michel Blanquer, le 21 octobre devant le Sénat : « La logique du “#pas_de_vague” n’est plus la logique de l’#Éducation_nationale. » Vraiment ?

    Fragiliser, plutôt que soutenir

    Le rapport reconstitue de manière assez complète et jour par jour le déroulé des faits, depuis le 5 octobre et ce fameux cours d’#EMC (#éducation_morale_et_civique), jusqu’au terrible soir du 16 octobre. Il en ressort que dès le départ, l’affaire a été prise au sérieux par la hiérarchie directe de l’enseignant (et par la plupart de ses collègues) comme par les autorités académiques, ainsi que par les services du ministère de l’Intérieur – #Renseignement_territoriaux et commissariat de Conflans-Sainte-Honorine. Ainsi lundi 12 octobre – donc dès le lendemain de la publication de la vidéo du père d’élève incriminant Samuel Paty – la conseillère sécurité du #rectorat de Versailles signale les faits au Renseignement territorial, qui alerte le #commissariat de #Conflans, lequel met en place rapidement des patrouilles de police devant le collège…

    Un point particulier sur lequel le rapport ne convainc pas, c’est quand il évoque les « #malentendus » auxquels a pu donner lieu l’action « d’accompagnement du professeur et de l’équipe pédagogique » par le #référent_laïcité. Dans une formulation alambiquée, il explique que ce n’est pas son action, mais son statut d’#IA-PR (Inspecteur d’académie-inspecteur pédagogique régional) qui « a pu le cas échéant donner lieu à des malentendus sur le sens et la portée de sa démarche ». En clair : Samuel Paty a cru qu’on venait évaluer et juger son action, et non l’aider à faire face aux attaques dont il était l’objet. Rappelons à ce sujet que l’hebdomadaire Le Point a publié le 20 novembre un courriel envoyé par cet inspecteur, où il indiquait que Samuel Paty ne maîtrisait pas « les règles de la #laïcité ». Le rapport lui-même ne cache d’ailleurs pas que l’intervention de cet inspecteur a eu surtout pour effet de conduire Samuel Paty à reconnaître « la #maladresse qu’il avait pu commettre », en invitant les élèves qui ne souhaitaient pas voir les caricatures à sortir de son cours. Le genre de formulation qui, en effet, est largement de nature à créer un « malentendu »… et à fragiliser, plutôt que soutenir, Samuel Paty.

    Un aveu d’#impuissance

    Résultat de tous ces biais, le rapport aboutit à des #préconisations bien faibles – voire carrément à côté de la plaque – et qui, clairement, ne paraissent pas à la hauteur de l’enjeu : rassurer les enseignants en garantissant que de tels faits ne pourraient se reproduire. Améliorer la #communication – qui en l’occurrence à plutôt bien fonctionné ! – entre services de l’Éducation nationale et services de #police, mettre en place une « #cellule_opérationnelle_de_veille_et_de_suivi » quand une #menace est identifiée, « renforcer la #sécurisation_matérielle des établissements » (rappel : Samuel Paty a été assassiné à l’extérieur…) ou encore mettre en place des « cellules de veille des #réseaux_sociaux au sein des services académiques »… Tout cela sonne plutôt comme un aveu d’impuissance, si ce n’est d’#indifférence. Et montre surtout que seule une véritable #enquête_judiciaire pourra faire la lumière sur ce qui s’est passé à #Conflans-Sainte-Honorine entre le 5 et le 16 octobre. En attendant cet hypothétique débouché, on ne pourra que reprendre et partager la conclusion pleine d’amertume de François Jarraud, fin connaisseur de l’Éducation nationale, sur son site du Café pédagogique : « Tout a été parfait. Tellement parfait que le 16 octobre Samuel Paty était seul face à son assassin. »

    https://www.humanite.fr/education-samuel-paty-le-rapport-qui-accuse-la-victime-697181

  • On n’est pas des « Français-Français » monsieur ! (Jean-Riad Kechaou, Politis)
    http://www.politis.fr/articles/2016/02/on-nest-pas-des-francais-francais-monsieur-34061

    Cette proposition de déchéance de la nationalité française qui ne concernera que les binationaux, peu importe la manière dont on le camouflera dans la Constitution, remet en cause tout simplement le discours que je tiens à mes élèves depuis dix ans. Ceux d’origine étrangère ne seront plus des Français à part entière étant donné qu’en cas d’appartenance à un second pays, ils seront punis davantage que les autres. C’est donc la fin de l’égalité entre tous les Français, et par conséquent un effritement du pacte républicain qui nous réunit et nous définit. On ne pouvait pas faire pire comme message adressé à notre jeunesse dont l’identité est en pleine construction. On donne aussi un argument de plus aux recruteurs de djihadistes qui insisteront auprès de nos jeunes pour leur dire que ce pays les méprise. Du coup, ce terme de « Français-Français » utilisé par mes élèves deviendra une réalité, il y aura les « Français-Français » et les « Français-étrangers », des Français de seconde zone, des traîtres potentiels et ça, c’est un véritable drame pour le professeur d’histoire que je suis.

    #éducation #collège #éducation_morale_et_civique #nationalité #identité_nationale #identités #communauté_nationale #vivre_ensemble #déchéance_de_nationalité

  • L’éducation morale et civique, ça sert aussi à faire la guerre
    http://blogs.mediapart.fr/blog/b-girard/161015/leducation-morale-et-civique-ca-sert-aussi-faire-la-guerre

    Des enfants qui meurent à la guerre, on en voit tous les jours, presqu’à nos portes. Des enfants qui jouent à la guerre, ça leur passe généralement en grandissant. Des enfants qui préparent les guerres de demain, c’est, dans les établissements scolaires, l’objet de l’éducation à la défense, partie intégrante des programmes officiels de l’Education nationale. Et lorsque, dans une école de Moselle, des enfants de 9 à 10 ans s’entrainent au maniement de fusils d’assaut, ce n’est pas la conséquence d’un excès de zèle des enseignants ou des encadrants militaires, mais rien d’autre que la simple application d’une étroite politique de collaboration sciemment mise en œuvre depuis plus de trente ans par l’Education et la Défense et appliquée sans faillir et sans guère de scrupules à tous les niveaux.

    […]

    « Diviser la classe en cinq groupes. Expliquer à chaque groupe qu’il constitue un ennemi impitoyable de la France et qu’il doit mener une attaque contre cette dernière en 2015. Question : comment allez-vous procéder ? [Après] un temps d’échange entre les élèves, chaque groupe vient devant la classe expliquer sa stratégie. »

    Dans le cadre de l’inévitable étude de cas, les élèves s’intéressent ensuite au nouveau véhicule blindé VBCI ; un petit film de Giat Industrie leur permet d’arriver à cette trace écrite dont on mesure toute la sagacité : « l’armée française effectue ses missions à l’étranger, il est important d’être bien accepté par les populations locales. Le fait que le VBCI soit pourvu de roues et non de chenilles y contribue » (sic).

    #éducation #école #EMC #lien_armée_nation #éducation_morale_et_civique #éducation_à_la_défense

  • En Moselle, des enfants manipulent des fusils d’assaut pendant des ateliers « découvertes » à l’école (FranceTV Infos)
    http://www.francetvinfo.fr/societe/des-eleves-manipulent-des-fusils-d-assaut-pendant-des-ateliers-decouver

    Des fusils d’assaut Famas et des pistolets automatiques dans les mains d’enfants de moins de 10 ans. C’est ce qui s’est produit au cours d’ateliers « découvertes dans le cadre du lien armée-nation » organisés par le personnel de la compagnie de réserve du 40e Régiment de transmission de Thionville (Moselle).

    #éducation #école #EMC #lien_armée_nation #éducation_morale_et_civique

  • Est-il moral d’enseigner la morale à l’école ? (L’Humanité)
    http://www.humanite.fr/est-il-moral-denseigner-la-morale-lecole-583460

    L’enseignement moral 
et civique à l’école est légitime par Pierre Kahn

    [L’enseignement] insiste sur la dimension sensible de la vie morale, en cherchant à développer les capacités d’empathie, de bienveillance et de souci des autres ; il insiste également sur le rapport instituant, et non seulement subi, aux règles ; également encore sur le principe d’égale considération des personnes. Il prend acte du fait et de la valeur de la pluralité des convictions, des croyances et des modes de vie. […] En ce sens, même les «  anti-Charlie  » doivent pouvoir s’exprimer à l’école, exactement pour les mêmes raisons que l’erreur y est permise.

    La morale ne s’enseigne pas, elle se vit par Catherine Chabrun

    C’est le rôle de l’enseignant de faire de la classe un milieu social où l’enfant s’exerce à agir et à penser en être humain et en citoyen. Pas si évident, car pour lui, l’enfant est encore trop souvent réduit à un rôle d’élève obéissant, à un «  vase à remplir  ».
    […]
    Certes, [l’école] n’est pas la seule responsable, mais étant fille et mère de la société elle en prend une bonne part, notamment avec :
    – la #reproduction des inégalités sociales qu’elle transforme en inégalités scolaires avec si peu de mixité (sociale ou scolaire) dans les classes et dans les établissements qu’une partie de la jeunesse en sortira démunie, frustrée et humiliée ;
    – la #transmission des savoirs basée uniquement sur les fonctions intellectuelles reconnues, méprisant ainsi les cultures et les vécus de chacun, qui provoque chez beaucoup d’enfants un sentiment de rejet et d’injustice souvent révélé à l’entrée au collège par le décrochage scolaire et des comportements violents ;
    – la #compétition omniprésente qui isole l’individu au détriment du vivre-ensemble et renforce l’individualisme d’autant plus néfaste aujourd’hui qu’il n’est plus contrebalancé par la solidarité qui existait autrefois, par exemple au sein de la classe ouvrière ;
    – l’#orientation professionnelle précoce qui exclut un grand nombre d’élèves des temps d’enseignement réservés à la compréhension du monde et de l’humanité.
    […]
    […] notre école n’est guère bienveillante et encourageante : comparaison, compétition, pression, #humiliation, #stigmatisation, sentiment d’#échec, fatalisme, orientation non choisie…

    La morale contre l’«  ennemi intérieur  » par Ruwen Ogien

    Une certaine forme de paranoïa continue cependant d’inspirer les projets moralistes qui s’y forment. Mais au lieu d’être dirigés contre des ennemis extérieurs, ils visent désormais un ennemi intérieur.
    […] un nom de code qui sert à désigner une population désavantagée socialement, stigmatisée par un flot incessant de propos alarmistes […].
    En fait, derrière le projet de restaurer des cours de morale à l’école, plusieurs idées différentes se bousculent. L’une des plus récurrentes consiste à supposer qu’un tel enseignement pourrait permettre de «  civiliser  » ces nouveaux «  barbares  ».
    C’est pourquoi ce projet repose finalement sur une conception du monde profondément conservatrice.

    Beaucoup de bruit pour rien ? par Bernadette Groison

    Cet enseignement remplace en fait l’instruction civique dans le primaire et se substitue à l’éducation civique, juridique et sociale dans le secondaire. Il ne s’agit donc pas d’une nouveauté, même si l’on souhaite lui faire revêtir une autre forme. Du CP à la terminale, il bénéficie d’horaires propres, à raison d’une heure par semaine en primaire et de deux heures par mois dans le secondaire. Enfin, pas partout puisque le financement n’a pas été prévu pour les séries technologiques ni professionnelles.
    […]
    Le temps politique, une fois encore, a été privilégié au détriment du temps éducatif nécessaire pour stabiliser ces programmes.

    #école #programmes #enseignements #éducation_morale_et_civique