Sur les littoraux, les épaves de bateaux entraînent une pollution difficile à enrayer
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(...) cette embarcation est aussi un exemple du casse-tête des communes littorales : au moins 5 400 épaves comme celle-ci sont abandonnées sur les côtes de France métropolitaine et d’outre-mer, d’après le Service hydrographique et océanographique de la marine. « Ces #épaves causent de la pollution visuelle et environnementale, explique Pierre Huonnic. De l’essence ou de l’huile du moteur peuvent fuir et se répandre dans la nature. »
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A Lannion, à 20 kilomètres de Plouguiel, Romi Recyclage est l’un des trente-cinq sites qui travaillent avec l’Association pour la #plaisance écoresponsable. Depuis sa création, en 2019, cet éco-organisme, agréé par le ministère de la transition écologique, permet aux plaisanciers de se débarrasser de leur bateau gratuitement, excepté les frais de transport vers le centre de déconstruction et de recyclage.
Ce service est financé par un prélèvement sur la vente de chaque bateau neuf. « La France est le seul pays au monde qui a mis en place une filière à responsabilité élargie des producteurs [REP] sur les bateaux de plaisance », explique Lucas Debievre, adjoint à la déléguée générale de l’Association pour la plaisance écoresponsable. Depuis cinq ans, plus de 11 000 ont été déconstruits. Parmi eux, 470 ont été démolis à Lannion dans le centre de traitement des déchets Romi.
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« Nous vendons le #composite à des unités de valorisation énergétique, le plus proche possible de Lannion, explique Frank Le Normand. Il sera brûlé et utilisé afin de produire de l’énergie, pour faire tourner des cimenteries par exemple. » En France, environ 60 % du composite est ainsi valorisé, selon l’Association pour la plaisance écoresponsable. Faute d’autres solutions, les 40 % restants partent à l’enfouissement. « Ce matériau est la principale problématique de la filière du recyclage des bateaux de plaisance, souligne Lucas Debievre. Pour l’année 2023, notre taux de revalorisation est d’environ 73 % sur tous les composants des bateaux, mais notre objectif est d’arriver à 100 %. »
Pour la biologiste marine Corina Ciocan (université de Brighton, Royaume-Uni), « il est urgent que l’industrie nautique utilise des matériaux plus verts ». Les études scientifiques sur l’impact de ce composite sur l’environnement sont rares, mais Corina Ciocan et son équipe s’y attellent depuis 2018. Leur découverte la plus récente a été dévoilée, début juillet, dans la revue scientifique Journal of Hazardous Materials.
Ces chercheurs ont décelé « pour la première fois » de « fortes concentrations » de #fibre_de_verre dans des mollusques. Près de 11 000 particules par kilo ont été trouvées dans des huîtres, et près de 2 700 par kilo dans des moules. Cette fibre de verre est issue de bateaux abandonnés dans le port de plaisance de Chichester, dans le sud de l’Angleterre, et de navires en réparation dans un chantier naval situé au même endroit. « Certains scientifiques comparent la fibre de verre à l’amiante, car ces deux matériaux ne se décomposent pas et peuvent s’incruster dans les organes, entraînant des lésions internes, voire des cancers », explique Corina Ciocan. Cette découverte pourrait ainsi permettre aux scientifiques de comprendre par quels processus la fibre de verre entre dans la chaîne alimentaire et affecte la #santé des animaux et des humains.