#Canada : Orphelinats catholiques : la grande noirceur de l’information Daniel Tremblay -Priscilla Plamondon Lalancette - Martin Movilla
Alors que des élus, des citoyens et des survivants d’orphelinats catholiques réclament une enquête publique sur les violences extrêmes et parfois mortelles infligées à des enfants, Québec continue de restreindre l’accès aux documents disponibles pour protéger l’État de poursuites civiles.
Les informations gouvernementales qui filtrent au compte-gouttes montrent que, depuis trois décennies, l’argent est la principale préoccupation dans le dossier des orphelins de Duplessis et des enfants victimes de sévices dans les établissements religieux.
“Le gouvernement doit arrêter de se protéger et aider les survivants”, estime Rod Vienneau qui préside le Comité Enfants Grande Noirceur. Celui qui représente environ 1500 survivants dénonce l’opacité du gouvernement. “Ce sont aujourd’hui des personnes âgées, mais il ne faut pas oublier que ce sont des enfants qui ont été torturés, ou même tués, et qui veulent connaître la vérité.”
Au cours des dernières semaines, l’équipe d’Enquête a essuyé des refus presque systématiques à ses demandes d’accès à l’information. Les archives demandées visaient notamment à documenter ce que Québec sait sur l’ampleur des cas d’abus et de morts suspectes d’enfants dans les orphelinats catholiques autrefois financés par l’État.
« La vérité reste cachée. C’est comme si le gouvernement attendait que les victimes soient toutes mortes. »
-- Une citation de Rod Vienneau, président du Comité Enfants Grande Noirceur
Caviarder l’histoire
La loi oblige le gouvernement à rendre les délibérations du Conseil des ministres publiques après 25 ans. En mars 1995, la question des orphelinats a été abordée par le conseil exécutif du premier ministre Jacques Parizeau. Pourtant, de grandes parties du document sont caviardées parce que “la divulgation risquerait vraisemblablement d’avoir un effet sur une procédure judiciaire”, affirme le gouvernement actuel.
Les seules bribes d’informations disponibles montrent qu’en pleine année référendaire, Québec a déjà en main des demandes d’enquête publique, d’indemnisation des victimes, d’excuses nationales et de correction des dossiers médicaux d’enfants faussement étiquetés comme “aliénés mentaux”.
Le conseil était divisé sur le sujet. Des ministres soulignaient que des excuses pourraient conduire à payer des compensations aux survivants. François Gendron, alors ministre des Ressources naturelles, mentionnait qu’il ne faut pas fermer les yeux, puisque des victimes “lui ont fait part de choses de toutes natures, allant de sévices sérieux à des délits sexuels”. Jacques Parizeau soulevait un enjeu moral et disait “avoir l’impression que ces gens souhaitent surtout une indemnité”. Impossible toutefois de connaître le fond de sa pensée, puisque la proposition formulée par le premier ministre a été censurée au moment de nous remettre le document.
Chose certaine, en 1998, le dossier des enfants abusés traînait toujours. Des documents provenant des archives privées de l’ex-premier ministre Lucien Bouchard et auxquels il nous a donné accès montrent que c’était une patate chaude et que le Conseil des ministres n’était pas “réceptif à l’idée d’indemniser” les orphelins.
Le 14 octobre 1998, le chef de cabinet adjoint du premier ministre, Pierre-Luc Desgagné, écrivait qu’un mémoire circulait depuis plusieurs mois sur les enfants de Duplessis et qu’il fallait régler la question des diagnostics erronés et “l’indemnisation possible”. Le conseiller politique enchaînait : “Même si je discute avec leur avocat depuis plusieurs mois [pour gagner du temps], nous en sommes rendus à un point où nous devons décider et rendre publique notre décision quant à l’indemnisation. Le pire des scénarios serait de commencer une campagne électorale sans aucune décision dans ce dossier. De petites manifestations seraient à prévoir et il s’agit d’un dossier sympathique pour la population”.
En mars 1999, Lucien Bouchard a finalement prononcé des excuses nationales aux orphelins et orphelines de Duplessis. Il a toutefois rejeté l’idée d’offrir une compensation financière aux victimes pour les sévices subis.
Préoccupé par l’effet boule de neige
C’est en 2001 que le gouvernement de Bernard Landry a mis sur pied la première mouture du Programme national de réconciliation avec les orphelins de Duplessis. Les enfants “dits illégitimes” et orphelins qui ont été internés ont pu recevoir une moyenne de 25 000 $ en aide financière. Dans le cadre de ce premier volet consacré aux orphelins traités comme des fous, 26 millions de dollars ont été versés à 1500 Québécois.
En 2004, Québec a analysé l’idée d’élargir le programme aux victimes de l’orphelinat d’Huberdeau, puisque des enfants placés dans cet établissement avaient aussi été abusés physiquement, psychologiquement et sexuellement. Or, le gouvernement craignait de créer un précédent pour des victimes dans tous les établissements religieux. Le document daté du 9 janvier indiquait qu’“il est certain que la mise en place d’un tel programme relancerait les revendications de divers groupes de pression réclamant du gouvernement des mesures similaires pour les ex-résidents d’autres institutions semblables”.
En 2006, le gouvernement de Jean Charest a finalement instauré le second volet du Programme national de réconciliation, mais cette fois pour les enfants maltraités dans les orphelinats. L’aide financière de 15 000 $ est toujours en vigueur. En septembre dernier, 67 millions de dollars avaient été versés à près de 4500 personnes. Mais plus de 2000 anciens pensionnaires ayant présenté une demande n’ont rien reçu.
Le gouvernement n’a jamais rendu publique la liste complète des établissements admissibles du programme. Il y en a plus d’une centaine à travers le Québec. Impossible de connaître le nombre de victimes reconnues par établissement, le ministère de l’Emploi et de la Solidarité affirme qu’il ne comptabilise pas ces données.
D’après Pierre Trudel, professeur et membre du Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal, les motivations du gouvernement pour rendre ce programme accessible au plus grand nombre de survivants ne sont pas claires. “Ça devrait être plus transparent. Normalement, un programme gouvernemental devrait prévoir de façon très transparente ce qui est permis, ce qui est visé et qui a droit à quoi”, explique-t-il.
Selon Rod Vienneau, il ne fait aucun doute que les montants octroyés sont dérisoires. “Ce n’est pas une réparation pour les gens qui ont perdu leur vie”, insiste-t-il. L’homme dit recevoir des dizaines d’appels de survivants en pleurs chaque semaine. Il croit qu’une commission d’enquête serait libératrice pour les victimes et que le gouvernement doit en faire davantage pour les aider à guérir.
Le secret professionnel
Obtenir des renseignements du gouvernement relève d’un chemin de croix. En plus de se protéger des poursuites, Québec invoque le secret professionnel pour éviter que des documents capitaux dans la compréhension de l’histoire des victimes des orphelinats ne soient rendus publics.
Pour recevoir l’aide financière du programme de réconciliation, qui ne tient pourtant compte ni des sévices subis ni des séquelles, les survivants ont dû signer une quittance qui les empêche de poursuivre leurs bourreaux et les responsables des orphelinats.
Il s’agit en effet d’une aide financière et non d’une compensation. Un ancien haut fonctionnaire indique que les avocats du gouvernement refusaient d’utiliser le terme “indemnisation” pour éviter de reconnaître la responsabilité civile de l’État.
Enquête a d’ailleurs voulu comprendre pourquoi Québec a instauré une quittance qui protège le gouvernement, mais aussi l’Église et les communautés religieuses de poursuites judiciaires. D’autant que l’Église catholique n’a offert aucune compensation financière aux victimes.
Le ministère de la Justice dit posséder quatre documents relatifs à cette quittance, mais nous en refuse l’accès. Le cabinet du ministre Simon Jolin-Barrette répond qu’il “est essentiel que le gouvernement puisse bénéficier du respect du secret professionnel au même titre, d’ailleurs, que toute personne qui recourt aux services d’un avocat”.
Selon le professeur Pierre Trudel, le gouvernement a tendance à multiplier les exceptions à la loi pour refuser l’accès à des documents. “Il est affligeant que l’on invoque le secret professionnel pour camoufler des situations qui se sont déroulées il y a longtemps. Lorsque l’enjeu est plus corsé, il arrive souvent qu’il invoque presque toutes les exceptions prévues dans la loi pour justifier [son] refus”, observe-t-il.
Dans ce cas-ci, Pierre Trudel estime que Québec se trouve coincé entre la diffusion d’information publique et la protection des intérêts de l’État.
La quête de justice
Depuis 2020, il n’y a plus de prescription pour intenter des poursuites civiles liées à des agressions sexuelles ou à des violences subies dans l’enfance. Les demandes de recours collectifs contre des congrégations religieuses et des diocèses se sont donc multipliées au Québec.
Dans un Québec sous l’emprise de la religion catholique, les enfants dits illégitimes étaient arrachés aux mères ou abandonnés dans les orphelinats.
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Deux actions collectives ont été autorisées contre des congrégations religieuses. Un recours civil vise les Soeurs de la Charité de Québec et le CIUSSS de la Capitale-Nationale pour des abus survenus à l’orphelinat de Mont-d’Youville. L’autre action collective est dirigée contre les Sœurs de la Charité pour de présumées agressions commises à l’orphelinat catholique de Montréal, à la crèche d’Youville et à l’école Notre-Dame-de-Liesse. Dans les deux cas, les anciens pensionnaires réclament des dommages pouvant atteindre 500 000 $.
Ces recours excluent les personnes qui ont reçu l’aide financière de 15 000 $ du Programme national de réconciliation avec les orphelins de Duplessis.
Une autre demande de recours collectif des enfants de Duplessis vise le gouvernement et huit congrégations religieuses. Refusée en Cour supérieure et en Cour d’appel, elle est maintenant entre les mains de la Cour suprême. Les demandeurs réclament jusqu’à 875 000 $ pour les survivants et espèrent faire annuler la quittance qui empêche des victimes d’obtenir justice. “Il faudrait que le dossier se règle une fois pour toutes”, soutient Rod Vienneau qui agit comme coordonnateur auprès des anciens pensionnaires provenant de partout au Québec.
Des documents introuvables
Radio-Canada a identifié plusieurs documents décisionnels qui étaient cités dans les archives de différents ministères et les a réclamés en vertu de la Loi sur l’accès à l’information. Mais les réponses obtenues indiquent souvent qu’ils sont désormais inexistants, détruits ou perdus. C’est le cas du mémoire sur les orphelins qui circulait au gouvernement en 1998.
Une grande noirceur flotte donc toujours sur les horreurs commises dans les orphelinats catholiques.
Il est notamment impossible de savoir combien d’orphelins sont morts à l’orphelinat de Chicoutimi ni ce qui advenait des dépouilles. Le gouvernement assure n’avoir aucun document en sa possession, même s’il s’agissait d’un établissement subventionné par des fonds publics.
Radio-Canada a découvert qu’en 1993, des morts suspectes d’enfants avaient été signalées à la Sûreté du Québec par des orphelins de Duplessis. Cinq enquêtes criminelles ont été menées sans qu’aucune accusation formelle ne soit portée. Aucun appel à témoins n’a été lancé par les policiers ou par les pouvoirs publics en lien avec des meurtres allégués. Il ne s’agit pas des cas de blessures mortelles dévoilés par Enquête à l’orphelinat de Mont d’Youville de Québec et à l’orphelinat de Chicoutimi. En 2007, un citoyen dont le nom a été caviardé a aussi signalé au ministère de la Solidarité sociale qu’il avait été témoin d’un meurtre dans un orphelinat.
En 1964, la journaliste et criminologue Alice Poznanska Parizeau avait révélé que des documents ultra-secrets du gouvernement portaient sur des morts mystérieuses d’enfants maltraités.
De nouveaux témoignages
Depuis la diffusion du reportage « Sacrée impunité », Enquête a reçu de nombreux nouveaux témoignages de survivants, d’employés et de familles d’anciens pensionnaires qui ont séjourné dans d’autres établissements aux quatre coins de la province.
Robert raconte avoir été ébouillanté dans les années 1960 à la crèche de Saint-François d’Assise de Pointe-aux-Trembles. “Deux mois avant mon quatrième anniversaire de naissance, j’ai été soi-disant mis accidentellement dans un bain d’eau bouillante. C’est une histoire que je n’ai jamais crue et que je ne croirai jamais. Je vis avec des séquelles permanentes comme des brûlures, tremblements et boiteries depuis ce jour”, écrit-il.
Daniel se souvient d’avoir fêté son 10e anniversaire à l’orphelinat de l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe, après le décès de son père. “Ce fut la plus triste et horrible année de ma vie. Nous devions appeler les religieuses "mères"”. Mais l’une d’elles était un monstre, selon lui. “Toutes les excuses étaient bonnes pour me frapper à coups de poing. Mon matricule était le GG-3 [grand garçon no 3]. Ce genre de détails ne s’oublie pas.”
Quelques témoignages, dont celui de Lise, portent sur l’Institut Monseigneur Courchesne de Rimouski. “Il y a de ces mauvais souvenirs qu’on essaie d’enfouir au plus profond de notre mémoire, mais qui refusent de mourir et qui remontent à la surface”, explique la dame. “Combien de ravages ces supposées bonnes et chrétiennes personnes ont pu causer ? Combien de vies détruites ? Combien d’enfants morts en dedans ? Combien de suicides ?”, se questionne-t-elle. “Nous avons tous nos blessures. Parfois elles cicatrisent mais, pour d’autres, elles refusent de fermer”, déplore cette survivante.
Lise raconte qu’elle a vécu à l’orphelinat Ville-Joie du Rosaire à Sainte-Marthe-du-Cap-de-la-Madeleine de l’âge de 5 à 8 ans. Les révélations sur les orphelinats catholiques “ont réveillé en moi des souvenirs amers et de nombreux questionnements”, écrit-elle. Lise recherche d’anciens pensionnaires pour l’aider à remettre en place les morceaux du casse-tête qui a hanté le reste de sa vie et influé sur lui.
Richard se souvient de la phrase “Es-tu ici pour toujours ?” que les enfants prononçaient à l’orphelinat Saint-Joseph de Montréal pour savoir qui était abandonné. Il rapporte que des religieuses “violentes physiquement et "psychoaffectivement" contrôlantes” créaient un milieu de terreur quotidien. “Je suis en larmes en écrivant”, soutient l’homme.
Une travailleuse sociale confie qu’elle a accompagné pendant 5 ans une ancienne pensionnaire victime de maltraitance qui était profondément marquée parce qu’elle aurait vu des religieuses enterrer un enfant.
Le fils d’une victime de l’orphelinat d’Huberdeau raconte par ailleurs que son père est resté traumatisé d’avoir vu “un jeune qui, après une douche très chaude et une très froide, s’était jeté par la fenêtre du troisième étage de peur des coups qu’il recevrait”.
Source : ▻https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1958890/orphelinats-quebec-acces-information-abus
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]]>Des actes «assimilés à de la torture» dénoncés à l’hôpital Guillaume-Régnier à Rennes
►https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/des-actes-assimiles-a-de-la-torture-denonces-a-l-hopital-guillaume-regnie
Un patient a été placé à l’isolement 380 jours d’affilée, un autre a subi 510 jours consécutifs de contention. Plusieurs dizaines d’autres cas existent au centre hospitalier Guillaume-Régnier à Rennes, d’après le rapport dressé par l’établissement en 2018.
Des bénévoles de la commission des citoyens pour les droits de l’homme ont manifesté devant l’établissement, ce vendredi 13 août. La porte-parole, Coralie Gamet, dénonce le recours excessif à l’isolement et la contention. « Le centre hospitalier Guillaume-Régnier est l’un des trois pires #établissements_psychiatriques en France ». Deux points inquiètent l’association : la quantité de patients concernés par ces pratiques et la durée de ces traitements.
]]>Qu’est-ce qu’intervenir ? Une prise de parole de Stéphane Zygart, philosophe, lors des Rencontres internationales autour des pratiques brutes de la musique – Sonic Protest 6 & 7 mars 2020 - Les Voûtes, Paris, publié dans les Cahiers pour la folie n°11
« Chasser la norme en faisant attention à l’autre, elle revient tout de suite par la fenêtre ! »
« Alors voilà, voilà ce qui c’est passé. Je suis philosophe de formation, je travaille autour des normes, de la question du normal/de l’anormal, de la normativité, en particulier autour de quelques trucs qui ont trait au handicap : les rapports entre institutions et pratiques quotidiennes – je vais essayer d’en parler un peu aujourd’hui –, la question des rapports entre travail et handicap qui longtemps m’a servi de fil conducteur, et des questions du type : étrangeté, singularité ou monstruosité. C’est comme ça donc qu’on s’est rencontrés avec le collectif Encore heureux..., autour de ces questions-là, institutionnelles, professionnelles, jusqu’à aujourd’hui. Les questions que je me pose donc en fait ici, je peux les décliner en trois grands problèmes que je vais vous donner dès le départ. Et dans l’arrière-cuisine, par rapport à tout ça, il y a deux auteurs : Foucault qui est connu maintenant et Canguilhem qui l’est un peu moins, dont les idées que je vais vous présenter viennent également, même si je ne vais pas le signaler sur le moment.
Les trois problèmes se nouent autour de la notion d’ intervention : qu’est-ce que c’est intervenir aux côtés ou avec les personnes handicapées, qu’est-ce que c’est intervenir sur elles ?
Le premier problème – c’est le plus massif – c’est : comment est-ce qu’on peut intervenir dans un cadre institutionnel ? Il y a trois grandes pistes que je vais détailler plus tard mais que je peux d’abord présenter rapidement pour clarifier les choses. La première piste évidemment, c’est : quand on est avec des personnes handicapées en institution, il s’agit de les soigner, et la question est : est- ce que le soin médical en institution doit être plus ou moins médicalisé ? La deuxième grande option, c’est : on ne peut pas tout à fait les soigner, donc on va les faire bosser, on va les faire travailler. Là, la question ce n’est pas : est-ce que c’est plus ou moins médical, mais est-ce qu’il faut les faire travailler de manière plus ou moins productive ? Faire travailler une personne handicapée, est-ce que c’est lui faire faire du théâtre ou de la musique, ou est-ce que c’est lui faire faire du jardinage ou du pliage d’enveloppes, est-ce qu’il y a une différence là-dedans ? La troisième option enfin, c’est : soigner en faisant travailler C’est la dimension, non pas médicale, non pas professionnelle des interventions institutionnelles, mais ergothérapeutique ; et l’articulation à faire alors est celle entre soin et travail. C’est là que se pose pleinement la question de la différence entre faire faire des enveloppes et faire faire du théâtre, avec le problème de la rémunération. Mais dans tous les cas, vous le voyez, les problèmes des rapports institutions/pratiques de soin passent toujours par des questions de combinaison : soin plus ou moins médicalisé, travail plus ou moins productif, place du travail dans le soin.
Le deuxième groupe de problèmes est lié à la question de savoir si on peut réellement accompagner et se livrer à une co-construction avec les personnes handicapées – qu’il s’agisse d’handicapés physiques ou d’handicapés psychiques ou mentaux, d’ailleurs. La question, brutalement, ce serait celle-là : est-ce qu’il y a un rapport et éventuellement une différence entre faire quelque chose à quelqu’un et faire quelque chose avec quelqu’un ? Et est-ce qu’on peut séparer ces deux dimensions- là ou est-ce qu’elles sont tout le temps liées ? Est-ce que quand on agit sur quelqu’un, est-ce que quand on administre un traitement ou une prise en charge, on est encore avec la personne, ou est-ce que quand on est avec la personne, il y a une dimension de neutralité ou de passivité qui peut s’instaurer ? C’est-à-dire, pour le dire autrement, est-ce qu’on peut vraiment saisir l’anormal, est-ce qu’on peut vraiment saisir les gens dits différents dans leur singularité, comme si on les contemplait, ou est-ce qu’on est obligé de les transformer en étant avec eux ? Voilà, c’est le deuxième groupe de questions, plus abstrait.
Le troisième et dernier ensemble de questions, c’est le rapport entre égalité, identité et intervention. C’est le problème le plus général, ce n’est peut-être pas le plus abstrait par rapport au précédent parce qu’il s’agit là de penser l’expérience vécue de la coexistence entre des valides et des personnes handicapées. Est-ce qu’il est possible au niveau du vécu, au niveau du quotidien, d’effacer les notions de différence , les notions d’ identité , est-ce qu’il est possible à un moment de parvenir à une égalité – j’allais dire réelle , mais en tout cas une égalité quelconque – entre les personnes handicapées et les personnes valides, sans relations asymétriques ? La question alors vaut vraiment le coup d’être posée ici dans ces lieux : comment présenter ou comment faire se représenter le handicap ? Dans une représentation de théâtre, de musique, de cinéma, il y a à la fois collectif parce qu’il y a collectif de travail, il y a collectif d’élaboration du spectacle, etc., il y a activité, mais aussi spectacle , et qui dit spectacle, dit différenciation ; alors comment est-ce qu’on articule le fait que le spectacle redouble la différence entre les handicapés et les valides, et qu’en même temps le fait d’élaborer un spectacle fabrique un collectif où il y a identité de praticiens et identité de personnes qui se livrent à une pratique artistique ? Vous voyez le truc ?
Je vais parcourir rapidement les trois questions... et mes vertèbres dorsales... J’espère que ça va lancer des discussions.
Premièrement donc, comment on fait dans les institutions entre la possibilité de soigner, de travailler, etc. Historiquement dans les textes de lois – je vais partir d’abord d’un historique pour vous montrer que le problème se pose vraiment, que ce n’est pas un truc qui sort du ciel. Le handicap dans les textes de lois et dans les institutions n’est pas une question qui est en priorité médicale, il n’y a pas tellement de médecine dans le domaine du handicap ; depuis longtemps et avant tout, le handicap, c’est une question de travail, c’est le rapport au travail qui pose problème. Jevous donne quatre repères juridiques, et il y en a un qui mériterait peut-être discussion – celui de 2005 à cause des bizarreries de sa mise en application, si vous voulez y revenir dans la discussion n’hésitez pas.
Le premier repère juridique, c’est en 1957, la loi sur le reclassement des travailleurs handicapés ; c’est la première loi générale en France à utiliser le terme de handicap et à considérer ensemble tous les types de handicap indépendamment de leur origine – de naissance ou acquis. Cette loi ne porte donc pas sur le soin des personnes handicapées mais sur le reclassement professionnel des travailleurs handicapés. C’est elle qui officialise les établissements comme les AP (Ateliers Protégés) et les CAT (Centres d’aide par le Travail), qui existaient déjà avant mais en très petit nombre et sans statut clair. La deuxième grande loi – vous la connaissez tous – c’est la loi de 75, ses innovations sont également liées au travail, puisque c’est la loi de 75 qui met en place l’Allocation Adulte Handicapé (AAH) qui dépend des capacités de travail. Cette loi de 75 met aussi en place l’accessibilité des lieux publics en zone urbaine – je le précise parce que cette prudence initiale sur l’accessibilité montre à quel point le rapport entre égalité des droits et moyens matériels de cette égalité est tendu. Ce sont les deux principales évolutions de cette loi. Vous avez ensuite un espèce de truc bizarre qui est la loi de 2005, qui a pour caractéristique de faire passer le professionnel au second plan, mais qui a aussi pour caractéristique – en dehors du handicap psychique – de ne pas avoir été mise en œuvre, en particulier sur l’accessibilité (encore) et sur l’évaluation médico-légale des causes sociales des handicaps. On pourra revenir sur ce qui a rendu cette loi possible dans sa formulation et ce qui en même temps l’a rendue inopérante – c’est-à-dire qu’elle n’est pas appliquée. Les dernières lois, j’en dirais un mot, ça se passe en ce moment en 2020 : il y un retour du problème entre l’AAH et la mise en place du Revenu Universel d’Activité (RUA), c’est-à-dire qu’on se met à parler au sujet des personnes handicapées – de tout type et de tout degrés – d’ employabilité , ce qui est tout autre chose que de parler de difficultés d’emploi. Tout le monde est employable si vous voulez, par contre une personne handicapée l’est théoriquement moins que d’autres ; c’est cette différence-là qui est en jeu actuellement et qui décide pour beaucoup des dispositifs. Donc il y a ces quatre lois-là.
Concrètement ça donne quoi, je vous donne un exemple : les établissements pour personnes handicapées adultes portent la marque de cette importance du travail. Vous avez deux grands types d’établissements : les établissements purement médicaux pour les handicaps les plus graves, ce sont les maisons d’accueil médicalisé, et puis les établissements dédiés au travail que sont les Entreprises adaptées qui correspondent aux anciens Ateliers protégés – où il n’y a aucune aide de l’État et une obligation de rentabilité pure – et les ESAT (Établissements et Service d’Aide par le Travail) qui sont les anciens CAT (Centres d’aide par le Travail). Or, pour rentrer en ESAT, il faut une réduction énorme des capacités de travail puisqu’il faut avoir moins de 30% des capacités de travail normales – donc 70% de capacités de travail en moins sur le papier. Les revenus liés à l’ESAT sont entre 50 et 110% du SMIC, et les 110% du SMIC sont rarement atteints, à cause du cumul de l’AAH. Ce qui est important là, c’est que les ESAT ont officiellement un but médical : l’entrée dans les ESAT se fait sur critère médical et le but d’un ESAT, c’est le soin. C’est tellement un enjeu qu’une circulaire est réapparue en 2008 pour le rappeler.
Les textes de lois dont je vous ai parlé ont un impact sur vos pratiques, parce que sinon vous pourriez me dire : « oui ? ce sont des textes de lois donc quel rapport cela a-t-il exactement avec la réalité ? ». Cela a un rapport avec la réalité pour au moins trois raisons. Première raison : le handicap est défini comme incurable, il se soigne par d’autres moyens que la médecine – on ne peut pas guérir d’un handicap – c’est pourquoi depuis le début, le problème du traitement des personnes handicapées, c’est leur mise en activité, et en particulier leur travail. C’est exactement ce qui est en train de se questionner dans ce lieu et dans d’autres. Deuxième raison pour laquelle le travail et l’activité sont importants : parce que le travail a une utilité sociale, le travail justifie les frais de soin pour les personnes handicapées, il permet de s’occuper d’eux – il permet de payer leur traitement. C’est l’idée depuis la Première Guerre mondiale et ça n’avait pas été le cas depuis la fin du Moyen- Âge, c’est-à-dire qu’avant, les personnes handicapées étaient définies par l’incapacité d’activité ou de travail. Jusqu’en 1905, vous ne pouviez pas être aidé si vous aviez des ressources, vous n’étiez aidé que si vous étiez incapable de travailler et sans ressources. Ce qu’a changé la guerre 14-18, c’est qu’il est désormais possible de dire à une personne handicapée : « tu as des ressources, en même temps tu peux toucher l’AAH, et en même temps tu peux bosser. » La troisième raison pour laquelle le travail est très important, c’est par trois de ses effets, qui ne sont pas financiers. Il a une utilité thérapeutique, il développe des capacités psychiques, physiques et cognitives, il a des effets de reconnaissance sociale – travailler c’est être l’égal de l’autre dans son travail. Vous allez me dire que je parle des personnes handicapées, je ne parle pas des personnes qui ont des troubles mentaux. En fait, historiquement, c’est exactement pareil : la folie a longtemps été considérée comme incurable, c’est d’ailleurs pour cela que les fous n’étaient pas mis en hôpital mais en asile ; on considérait qu’il fallait juste les accueillir et les protéger, mais certainement pas les soigner puisqu’on y arrivait pas. La mise en place des asiles nécessitait d’avoir des finances, donc depuis le 18ème siècle, il y a eu des colonies agricoles, des moyens de faire payer les soins aux personnes folles, ou dites folles. Mise au travail des personnes donc, quand ce n’était pas physiquement impossible. Enfin, ça fait longtemps que dans les asiles, l’appartenance au collectif passe par le travail, ça date au moins de Pinel, et si vous remontez au 19ème siècle, il y avait une obligation de travail pour réapprendre aux gens un principe de réalité – travailler c’est se confronter à la réalité. Vous retrouvez également cette idée dans la psychothérapie institutionnelle puisque le travail a une grande importance par exemple chez Tosquelles. Alors vous allez me dire « qu’est-ce qu’on fait de tout ça ? »
Après avoir parlé des lois, après avoir essayé de vous dire que je pense que c’est réellement central, qu’est-ce qu’on peut proposer comme pistes de réflexion ou de recherche ? Il apparaît que le travail est considéré comme une panacée : l’activité et en particulier l’activité professionnelle, ça résout tous les problèmes – je vous le signale parce c’est toujours pareil en matière de handicap, c’est pareil pour les valides et pour les invalides – c’est-à-dire quand quelqu’un a un problème, on lui dit : « ben tu devrais travailler, ça te remettrait les pieds sur terre, et en plus t’aurais un peu d’argent... » C’est le même principe pour les personnes handicapées. Le travail est une panacée économique, sociale, institutionnelle, thérapeutique, et il nous est très difficile de concevoir que l’on puisse avoir une activité sans travailler. Est-ce que vous arrivez à concevoir, est-ce que j’arrive à concevoir que je fais quelque chose qui n’est pas un travail ? C’est tout le problème... Ce qui est difficile à concevoir en général est également difficile à concevoir pour les personnes invalides.
Le caractère universel du travail est d’autant plus problématique qu’entre le travail de prof, le travail de plieur d’enveloppes ou le travail d’acteur de théâtre, ce sont trois formes d’activité qui n’ont rien à voir les unes avec les autres. Est-ce que l’on peut réussir à démêler là-dedans quelque chose qui donne sa vraie valeur pour les personnes handicapées à l’activité professionnelle, c’est quoi le nœud du truc, qu’est-ce qui est vraiment important dans le travail des personnes handicapées ? L’économie, le social, le thérapeutique, le psychologique, le tout ce que vous voulez, c’est quoi le cœur du noyau ?
L’autre question qu’on peut se poser à partir de là, c’est que le travail correspond à une demande sociale, il y a une forme de contrainte dans les demandes de mise au travail. C’est très concret. Comment échapper à la question du travail quand on est handicapé ? D’accord, les valides n’échappent pas non plus à la pression du travail mais ils ne sont pas tenus de répondre de manière décisive, et pour de longues années, à la question : « est-ce que tu veux aller travailler en ESAT, ou pas ? » Une personne handicapée est obligée de répondre à la question professionnelle et d’y répondre sur le long terme, ce qui n’est pas le cas pour les personnes valides. Les personnes handicapées se retrouvent à certains moments à des embranchements où elles sont obligées de faire des choix : aller bosser en CAT ou pas, demander l’AAH ou pas, accepter un boulot pourri ou pas, parce que l’accès au marché de l’emploi est plus difficile, ce qui n’est pas du tout pareil pour les valides et qu’il faut absolument prendre en compte parce que cela a un caractère extrêmement contraignant, y compris au niveau des vécus.
Je vous disais – et ce sera mon dernier mot sur le travail, enfin directement sur lui – tout cela est étroitement lié aux institutions et aux lois. En 2020, les lois françaises – je ne vais pas rentrer dans le détail, on pourra en discuter après si voulez – consistent à mettre en avant l’ employabilité des personnes handicapées. Je vais essayer d’être très clair sur ce point et très rapide : tout le monde est employable ou quasiment. Il n’y a que les handicapés les plus graves qui ne sont pas employables. L’employabilité, c’est une simple possibilité d’exercer un emploi et on trouve dans les textes historiques – pour donner des exemples qui ne soient pas polémiques – des établissements de travail pour les femmes qui viennent d’accoucher ou pour les vieillards, au 17ème ou au 18ème siècle... Donc vous pouvez faire travailler à peu près n’importe qui ! En mettant en avant cette notion d’ employabilité , il s’agit de faire sauter les dispositifs d’aide à l’emploi, et il s’agit actuellement de dire que les personnes handicapées n’ont pas besoin de prestations supplémentaires parce qu’elles peuvent travailler comme tout le monde, donc elles peuvent avoir le même revenu que tout le monde, et si elles veulent en avoir un peu plus, elles n’ont qu’à travailler comme tout le monde ! C’est en ce moment que cela se joue avec pas mal de péripéties politiques effectivement, mais c’est une tendance que l’on retrouve en Angleterre, en Italie. Pour pouvoir y arriver et pour pouvoir affirmer que la plupart des personnes handicapées peuvent travailler comme tout le monde quand elles le veulent, le dispositif joue sur une médicalisation du handicap, c’est-à-dire qu’on va être amené à vous confronter à des avis médicaux standardisés par des médecins d’État – encore une fois pour aller très vite – sur tout le territoire français. Le but étant de discriminer les handicapés les plus graves des autres. D’autres procédés sont aussi essayés, comme la mise sous pression financière des familles pour qu’ils poussent au travail leurs proches invalides. Il y a dans tout ça quelque chose de très important qui se joue en ce moment, surtout pour les handicapés psychiques qui sont en première ligne. Dans le rapport de la Cour des comptes – je pense que c’est le moment d’en parler maintenant – ils attaquent en effet, en première ligne, le handicap psychique. Pourquoi ? Parce que le handicap psychique, ça coûte cher et parce que ce n’est pas médicalisable au sens classique du terme – vous ne pouvez pas démontrer l’étendue d’un trouble schizophrénique par un scanner. Du coup, l’argument du Conseil d’État c’est simple : si ce n’est pas médical, c’est que ce n’est pas un gros handicap, et du coup ça ne mérite pas d’avoir une prestation supplémentaire – vous voyez le système ? C’est l’universalité scientifique de la médecine qui est évoquée au nom d’une exigence de vérité et d’égalité pour réduire le nombre d’handicapés et appauvrir l’évaluation comme les traitements des handicaps – par exemple, vous savez très bien que les MDPH (Maisons Départementales des Personnes Handicapées) varient leurs jugements selon les régions, à cause des bassins d’emploi, etc. Le Conseil d’État dit que ça porte atteinte à l’égalité républicaine, qu’il faut que les critères soient les mêmes dans toutes les régions, et que le meilleur critère c’est la médecine, donc qu’il faut se limiter au corps des individus ; et quelques pages plus tard, il disent en plus qu’on s’aperçoit avec le modèle social du handicap que le handicap psychique explose les comptes et donc coûte très très cher, donc qu’il faut absolument re-médicaliser tout ça... Le rapport se termine comment ? Ça termine en disant qu’il y aura toujours un vote au CDAPH (Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées) pour les attributions d’invalidité, mais qu’il faut que l’État soit majoritaire au nombre de votants, je vous laisse deviner... Les textes se trouvent sur internet. Donc centralité des questions de travail et de finances pour le handicap, je vais m’arrêter là sur ce sujet.
Un point rapide sur l’articulation entre médecine et travail avant de passer au second problème dont je voulais parler. Je ne suis pas en train de dire du tout – je pense que cela donne cette impression-là mais ce n’est pas du tout le cas – qu’il ne faudrait pas faire travailler les personnes handicapées, je ne pense pas que la réflexion doive se placer sur ce plan-là. Si j’insiste autant là-dessus c’est pour une raison bien particulière : la question de la normalisation . Est-ce qu’on normalise plus par la médecine ou est-ce qu’on normalise plus par le travail ? En fait, ce sont deux normalisations complètement différentes : la médecine est potentiellement beaucoup plus normalisatrice que le travail puisque vous avez la neurologie, les neuroleptiques, les techniques de rééducation, la méthode ABA pour les personnes porteuses d’autisme, etc. Mais en même temps, les normalisations médicales permettent aux personnes handicapées, d’une, de garder leurs spécificités, c’est-à-dire de garder une singularité sociale, et de pointer la singularité du problème. Oui les techniques médicales sont lourdes mais c’est aussi parce que les problèmes sont lourds ou singuliers. Le travail, c’est beaucoup plus insidieux, le travail, c’est beaucoup moins normalisateur, c’est très ordinaire et ça fournit une identité sociale. Le souci, c’est que ça efface les problèmes et ça efface la spécificité des acteurs du soin. Il y a un risque en mettant l’accent sur l’activité, et en particulier l’activité professionnelle – et en disant qu’il n’y a donc plus besoin d’acteurs du soin – d’aboutir à une invisibilisation sociale du handicap qui à mon sens est l’objectif des politiques actuelles, sous couvert d’ inclusion . Je n’ai aucune solution. On peut passer par le travail comme opérateur social avec tous ses défauts. On peut aussi essayer de maintenir la singularité des personnes handicapées – ce qui les protège –, singulariser les personnes handicapées, ça leur donne une visibilité, le principal risque actuellement étant de rendre les personnes handicapées invisibles, c’est-à-dire que quoiqu’elles deviennent, personne ne le saura. Le problème des valides si vous voulez, c’est de se rendre invisible par rapport aux techniques de contrôle social ; le problème des personnes vulnérables et en particulier des personnes handicapées, c’est un peu l’inverse, il ne faut pas chercher l’invisibilité sociale, il faut au contraire essayer d’être vu le plus possible, ce qui garantit une protection. Je ne suis ni pro-médecine, ni pro-travail, j’essaie de voir.
Par exemple, en matière de handicap psychique, vous êtes obligé, tout le monde est obligé de jouer sur les deux tableaux – c’est-à-dire que la reconnaissance du « handicap psychique » a permis des choses assez bonnes : une dé-institutionnalisation avec les GEM, l’entrée dans les dispositifs de handicap, la folie est devenue « ordinaire », « c’est un handicap comme les autres », etc. Ça a aussi mis l’accent sur la neurologie, les neuroleptiques, le fonctionnalisme... donc vous voyez à chaque fois, il y a à prendre et à laisser. Voilà, c’était le plus long parce que c’est là où je peux être le plus concret et me baser sur des lois, etc.
Le deuxième groupe de problèmes dont je voulais parler tourne autour de la neutralisation : est-ce qu’on peut être neutre par rapport à une personne handicapée ? – au sens de l’accompagnement. Est- ce qu’on peut faire quelque chose uniquement avec les personnes handicapées ? Pour répondre à cette question, il faut absolument se décaler. Il s’agit d’articuler l’ordinaire et le singulier, l’activité de travail et l’activité quotidienne. Je pense à quelques lieux emblématiques qui ont réussi à articuler ou donner une idée de l’articulation entre faire avec et faire à quelqu’un. Il y a quelques GEM (Groupe d’Entraide Mutuelle), il y a par exemple ici – même si ce n’est pas un GEM, il me semble que c’est typiquement ce genre de lieu : faire à et faire avec , ça se fait ici, ou à la Fonderie à Encore heureux c’était pareil, à La Borde il me semble que c’est et que c’était pareil, ou chez Deligny vous trouvez le même genre de dispositifs et d’autres choses moins connues comme la colonie de Gheel en Belgique qui remonte au Moyen-Âge, c’est une colonie de soin chez l’habitant – il y a de plus en plus de travaux là-dessus – on rouvre des villes et des villages aux personnes atteintes de troubles mentaux ou psychiques pour les faire soigner chez l’habitant. C’est une solution qui était pratiquée depuis le Moyen-Âge et qui revient en grâce. Vous allez dire « alors super ces lieux-là, il n’y a plus qu’à suivre la recette, secouer et à mettre dans un bol !... » Mais il faut faire attention à plusieurs choses : la temporalité, la spatialité, et la pluralité qu’il y a dans ces institutions et leurs manières d’articuler les normes extérieures à l’institution et les normes intérieures. Je dis bien non pas simplement en terme de topologie l’ extérieur et l’ intérieur , mais les normes extérieures et les normes intérieures.
Du point de vue du temps , qu’est-ce que je veux dire ? Il s’agit de respecter les normes temporelles des individus. À Namur par exemple, un soignant m’a raconté qu’ils avaient mis deux ans pour faire planter un arbre à un autiste et que ça lui avait fait beaucoup de bien. Deux ans en termes médicaux et en terme de nomenclature médicale, c’est complètement insensé. Donc comment respecter les normes internes temporelles des individus ? Un des éléments de réponse, c’est qu’il faut privilégier l’ œuvre au travail – je ne sais pas si cette distinction célèbre et un peu bourrin vous dit quelque chose – l’œuvre c’est le résultat, c’est-à-dire : quelqu’un met trois ans ou cinq ans à faire un tableau, et à la fin, sa propre norme rentre en contact avec la société : il présente son œuvre, il y a un deal, il y a des échanges, il y a une présentation, une représentation. Alors, la temporalité vient d’abord de l’individu et du fait d’avoir fait quelque chose. La temporalité du travail ce n’est pas du tout ça, ce n’est pas la temporalité de l’œuvre, la temporalité du travail c’est d’abord celle de la productivité et c’est la temporalité de la cadence. Si par exemple vous dites à quelqu’un « dans trois jours je veux un dessin et sur un mois je veux que tu m’en fasses dix », ça c’est du travail. Si par contre vous donnez des crayons et des feutres et vous dites « quand tu veux me donner un truc tu me le donnes », le jugement sur l’œuvre ne porte pas du tout sur la cadence mais sur le résultat et vous avez même tout à fait le droit de dire que c’est pourri. Vous voyez ce n’est pas du tout le même rapport au temps.
En terme d’ espace , il y aurait deux choses. La première c’est qu’il faut être extrêmement attentifs à l’implantation géographique des institutions. Les institutions quand elles sont éloignées des centres, elles permettent la tranquillité des lieux – typiquement c’est Deligny dans les Cévennes –, mais il y a aussi un avantage à être dans les milieux urbains pour qu’il y ait une confrontation par proximité. Actuellement il faut faire très attention aux endroits où sont installés les nouveaux logements ou les nouvelles institutions, c’est-à-dire éviter à tout prix les zones artisanales et commerciales, les trucs de ce type, sous prétexte que c’est tranquille : en fait, c’est mort... et personne ne voit personne. Ça c’est le problème de l’implantation, il y a des études là-dessus, il y a des gens ou des organismes qui font de la géographie du handicap et qui dressent des cartes qu’on trouve sur le net.
L’autre aspect en terme de lieu, c’est l’agencement – typiquement c’est le cas ici, et c’est le cas à la Fonderie – l’agencement intérieur des lieux qui accueillent les personnes handicapées doit être en rapport avec les dynamiques qui font passer de l’intérieur à l’extérieur. L’exemple type de ça, c’est hier, quand les gens de la Pépinière parlaient du grand parc. Qu’est-ce que c’est un parc ? C’est une zone de détente mais c’est aussi une zone qui permet de s’approprier l’extérieur. Les institutions les plus efficaces et les plus dynamiques pour les personnes handicapées, ce sont celles qui permettent ça. Vous savez, Foucault a forgé une notion qui a beaucoup de succès qui s’appelle l’ hétérotopie . Qu’est-ce que c’est une hétérotopie ? C’est un lieu qui est en décrochage, qui possède des règles sans rapport avec le reste de l’espace social. C’est le cas ici par exemple. Ce n’est pas un lieu sans règles , c’est un lieu sans règles en rapport avec le reste de l’espace social . Je crois qu’il faut ajouter à cette définition de l’hétérotopie que ces lieux sont des lieux de passage et de transformation, c’est-à-dire qu’un lieu de soin ne doit ni être un parc où on parque les gens, ni une frontière. Dans un lieu de soin on y passe, ça veut dire qu’on y séjourne et qu’on s’y transforme.
La troisième question sur ce qu’est faire sur ou avec les gens, celle de la multiplicité , est très importante puisque le soin lui-même est normatif. Il est très difficile d’accueillir la multitude des rencontres et de gérer toutes leurs durées. Être avec des personnes handicapées – et pour les personnes handicapées, être avec des valides ! – cela demande des efforts réciproques, et donc cela provoque des conflits. Vous voulez chasser la norme en faisant attention à l’autre, elle revient tout de suite par la fenêtre puisque même si vous ne voulez pas être normatif, vous finissez au quotidien par vouloir quand même une part de décision, par vouloir avoir quelque chose à dire dans le mode de vie. Et des modes de vie qui se combinent au quotidien, ce sont forcément des modes de vie qui interviennent l’un sur l’autre. Chez Canguilhem, on trouve cette leçon où il dit que le soin, d’une part, ça n’a pas pour but de faire du bien aux autres, le soin ça a d’abord pour but de remettre les autres en activité. D’autre part, le problème du soin c’est comment faire pour saisir la singularité des personnes et leur permettre de déployer cette singularité-là – c’est hyper compliqué parce que cela ne peut pas être contemplatif. Vous ne pouvez le faire qu’en vivant avec les gens.
J’en arrive au troisième gros groupe de problèmes que j’avais annoncé au tout début et qui va me permettre de développer ça, au rapport entre coexistence et intervention : comment est-ce qu’on peut penser les rapports entre identité, égalité et différence entre les handicapés et les valides ? Je crois que ce n’est pas plus abstrait que ce que je viens de dire juste avant, c’est même plus proche de ce que l’on vit.
Alors le but du jeu, c’est qu’il y ait une indifférence qui s’installe entre les valides et les invalides – mais c’est très difficile pour deux raisons. La première, c’est que les rapports de soin et de prise en charge sont dissymétriques : il y en a un qui soigne et l’autre qui est soigné, il y en a un qui prend en charge et l’autre qui est la charge – au moins c’est clair... même si c’est brutal. La première difficulté donc c’est le caractère dissymétrique, la deuxième c’est que même quand il n’y a pas de soin et que vous ne prétendez pas soigner la personne handicapée, il y a ce qu’on appelle le stigmate ou le caractère liminaire des personnes handicapées. Alors ça, ça a rempli des bibliothèques entières de socio ! Qu’est-ce ça veut dire ? Ça veut dire que la personne handicapée ne doit pas choquer et le soignant non plus – c’est la théorie d’Erving Goffman dans Stigmate (à l’époque, dans les années 60, pour Goffman, les handicapés, les prostituées, les homosexuels sont exposés au même « stigmate »). Par exemple, quand quelqu’un arrive dans un restaurant et que vous devez l’accueillir et que vous êtes handicapé, par exemple comme moi, vous vous arrangez pour ne pas vous lever de votre chaise, pour ne pas le gêner. Par contre, à un moment vous allez être obligé de lui faire comprendre que vous avez un problème. C’est du tact, c’est de la négociation sociale, c’est du stigmate, c’est-à-dire que ça consiste à effacer faussement les éventuelles différences.
La deuxième idée à ce sujet de la différence permanente entre handicapés et valides, même quand il n’y a pas de soins, beaucoup plus complexe, c’est le caractère liminaire , c’est-à-dire qu’une personne handicapée est à la fois identique et différente, et on ne s’en sort pas – elle reste sur le seuil. Ce n’est pas un monstre, mais ce n’est pas non plus quelqu’un qui est identique à une personne valide.
Donc il est très difficile pour ces deux raisons-là de prétendre à être indifférent aux personnes handicapées. Est-ce que pour autant il faut dire qu’il n’y a pas de solutions ? Très franchement je vous réponds, je ne crois pas que ces deux notions de stigmate et de liminarité soient réellement valides – c’est le cas de le dire, il faut bien se détendre un peu... Pourquoi elles ne sont pas parfaitement valables ? Les rapports entre valides et invalides sont des rapports pratiques, et ça dépend de ce que l’on fait. Du coup, ils se transforment en fonction des pratiques. Je vais faire un petit détour historique avant d’achever mon propos. Ce qui le montre très clairement c’est l’exemple du freak show. Une des questions qui a été discutée hier, c’était : remplacer les personnes handicapées par des personnes valides ou inversement, est-ce que cela ne reste pas une dynamique de freak show, en particulier dans les dispositifs théâtraux ? Mais en fait, c’est sans doute un problème qui s’est considérablement déplacé et transformé depuis l’époque des freak shows. C’était les expositions de monstres : la femme à barbe, l’homme sans cou, le pied sans tête, etc. Vous aviez deux grandes techniques qui faisaient que les gens venaient et aimaient bien voir les freak show. La première technique c’était de dire : « Oui c’est vraiment un monstre mais regardez il est loin, c’est un monstre asiatique, c’est un monstre indien ! » ; la deuxième technique, c’était de dire : « oui oui c’est un monstre mais il a vraiment dépassé ses différences par des capacités extraordinaires pour finalement réussir à faire comme nous ! » – non pas le dispositif de l’Haïtienne à barbe mais le dispositif de Tom Pouce, qui est un nain et qui se marie, etc. Dans tous les cas, vous avez un mouvement qui vise à rassurer, vous avez un jeu entre l’extraordinaire et l’ordinaire. Ce jeu consistait dans les freak shows à effacer les monstres tout en les montrant – près, mais loin, différents mais pareils, à juxtaposer leur présence et leur absence, l’identité et la différence. C’est ça, le show . Ce type de jeu était déjà incertain, un jeu ça se joue toujours à deux ou sur deux plans, c’est-à-dire que les personnes handicapées jouent également – les valides jouent mais les personnes handicapées jouent aussi. Je développe.
Si vous avez vu Freaks de Tod Browning, c’est une des grandes idées du film – Browning, lui- même entrepreneur de freak show, raconte avec d’autres que la dimension d’arnaque était connue par les monstres et les handicapés. Il y avait tout un jeu qui consistait à arnaquer le plus possible les valides, tandis que le plaisir du dimanche des valides était aussi d’aller se faire arnaquer. C’est un jeu théâtral qui se joue à deux : vous avez des personnes qui font semblant d’arnaquer les autres, et d’autres qui font semblant de se faire arnaquer. Mais de temps en temps ça tourne mal et on arrête de faire semblant, et c’est le sujet de Freaks ...
Bon, qu’est-ce qui se passe aujourd’hui ? Pour ceux d’entre vous qui ont pu assister hier au concert des Turbulents avec Fantasio... quelque chose alors m’a frappé : c’est des moments difficiles à voir dans les spectacles. Il y a eu à un moment donné une identité entre les spectateurs et la scène, identité au sens où dans l’activité commune, les spectateurs sont devenus de vrais spectateurs de concert de rock et les musiciens sont devenus de vrais musiciens, et non plus des personnes handicapées vues par des personnes valides ou inversement. Il ne s’agissait plus de parcourir une distance ; dans l’activité commune, de l’identique a été créé, et de l’égal. Il faudrait expliquer ça plus longuement...
En tous cas, les jeux restent ouverts, au quotidien comme sur scène. Ce qui m’a frappé principalement hier et aujourd’hui, en autres : les personnes handicapées sont habituées à être visibles – être handicapé c’est être visible , il n’y a pas de handicap invisible, un handicap invisible finit toujours par apparaître parce qu’un handicap, par définition, dure et touche à ce qu’on fait, alors qu’il peut y avoir, c’est vrai, des maladies invisibles. Si vous avez un handicap, même dit invisible, au bout de quelque temps, ça va se voir. Qui dit handicap dit visibilité, et les personnes handicapées savent qu’elles sont visibles. Si elles sont moins visibles que d’autres, par exemple en étant placées dans certains bâtiments fermés, elles savent qu’elles sont surveillées. Et si les surveillances se relâchent, elles ont conscience des troubles qu’elles provoquent en arrivant – c’est la question du stigmate et de la liminarité.
La question que je me pose, c’est qu’est-ce qui se passe du coup pour une personne qui a l’habitude de toujours être exposée quand elle passe sur une scène ? Comment penser la surexposition des personnes handicapées ? Ce ne sont pas des personnes qui sont cachées habituellement, ce sont des personnes qui sont déjà soumises au spectacle, et donc il y a un redoublement du spectacle. Il y a énormément de possibilités de subversion qu’il m’a semblé voir sur scène et en particulier, une dynamique d’exagération. Qu’est-ce que c’est une personne handicapée qui exagère sur scène ? C’est quelqu’un qui est d’ordinaire sur une scène et qui se retrouve sur une scène où elle sait que les règles sont assouplies parce que ce sont des règles artistiques, et donc elle peut en faire plus que d’habitude.
Si je dis ça, c’est parce que pour penser ce rapport entre identité et égalité , on est toujours piégé si on met la personne en face dans une situation de passivité. On ne l’est pas à partir du moment où on part du principe que la personne, en fait, elle joue aussi, et c’est là que l’égalité peut réellement s’instaurer.
Voilà, je vous remercie. »
Les 6 premiers n° des Cahiers pour la folie sont publiés en ligne
des ▻https://www.epel-edition.com/lire.html
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]]> Emmanuel Macron, le roi de l’intérim Didier Rykner vendredi 2 avril 2021
▻https://www.latribunedelart.com/emmanuel-macron-le-roi-de-l-interim
L’idée de mettre en place une procédure transparente et collégiale pour la nomination des présidents des établissements publics est un vieux serpent de mer qui plonge plus souvent qu’il ne refait surface. Jamais peut-être ces nominations n’avaient été plus opaques, et plus différentes selon les circonstances, que ce n’est le cas en ce début d’année. Non seulement la transparence n’est pas au rendez-vous, mais la volonté même de nommer, pourtant une des principales prérogatives du président de la République, semble disparaître, comme si les intérêts politiques contraires paralysaient les décisions d’un chef d’État velléitaire. On comprend mal la situations actuelle, qui n’est d’ailleurs pas nouvelle depuis l’élection d’Emmanuel Macron.
Des nominations non préparées
Lorsqu’un président d’établissement public est nommé, la date de son renouvellement, ou de son départ de son poste est pourtant inscrite dans la loi du 1er septembre 2010 et dans les statuts de l’établissement. Pour la plupart de ces établissements, le premier mandat est de cinq ans, renouvelable deux fois par mandat de trois ans [1]. Nulle surprise donc, pour personne. Dans n’importe quel pays démocratique bien organisé, la nomination du successeur serait préparée en amont, afin que la nomination soit faite au minimum quelques jours avant la fin du mandat. En France non, et cela va même de mal en pis.
Emmanuel Macron ne prévoit rien, ne prépare rien, et doit donc faire face à des vacances de postes qui se multiplient, tout en se donnant des contraintes absurdes et en voulant imposer ses poulains. Tout cela est complètement paradoxal. On se rappelle de la direction de la Villa Médicis (ill. 2), qui était restée avec un directeur par intérim pendant dix-huit mois. Le plus haut niveau de l’État semble s’être transformé en agence Manpower, une agence qui n’aurait d’ailleurs même pas besoin de trouver des intérimaires puisque la plupart du temps ces intérims sont tenus par les sortants qui espèrent parfois pouvoir rempiler ou prolonger, ou par les administrateurs en place. Comment peut-on gérer ainsi de grands établissements culturels ?
Des nominations difficiles à suivre
Au Centre Pompidou, les choses sont à la fois proches et différentes. Proches car Serge Lasvignes, qui n’a pas davantage que les deux personnes cités plus haut la moindre compétence avérée pour s’occuper d’une institution culturelle, exerce son propre intérim depuis le 3 octobre ! Différentes car les jeux ne semblent pas encore faits, et qu’ici, une vacance de poste a été ouverte et un appel à candidature publié dans Télérama et d’autres journaux… Il faut dire que les candidats ne se bousculent pas forcément : qui a envie de prendre la présidence d’un établissement qui va fermer pendant de longues années, pour un projet dont les connaisseurs savent qu’il est d’ores et déjà sous-financé, et pour rouvrir un musée qui ne disposera pas d’un mètre carré supplémentaire de surface d’exposition ?
Quelle peut être la légitimité d’un président intérimaire ? Dans la pratique, il devrait gérer les affaires courantes. Tel que la loi l’a prévu, il n’en est rien. Celui-ci, qui n’est théoriquement plus là que pour quelques semaines ou quelques mois (à moins qu’il ne soit renouvelé), peut engager l’établissement à beaucoup plus long terme. Nous avons cité deux exemples, mais ceux-ci se multiplient. Avant de partir pour la direction générale des Patrimoines et de l’Architecture, Jean-François Hébert a exercé plusieurs mois d’intérim à Fontainebleau ! Cela ne concerne d’ailleurs pas seulement le ministère de la Culture : Bruno Maquart, président d’Universcience qui réunit le Palais de la Découverte et La Villette est resté intérimaire de lui-même entre juin et décembre 2020, avant d’être renommé à ce poste (ce qui d’ailleurs semble devoir entraîner de facto l’allongement des onze ans maximum s’il devait à nouveau être nommé une troisième fois). Il y a un an la direction générale de la fonction publique a été vacante pendant plusieurs mois. Au ministère des Affaires Étrangères, l’Institut Français est depuis 2020 présidé par intérim par Erol Ok, son directeur général délégué ! Tout cela témoigne d’un amateurisme et d’une impréparation coupable, dont le responsable doit être recherché au plus haut niveau de l’État.
Il s’agit d’ailleurs d’un phénomène relativement nouveau car si les nominations politiques ou de personnes pas à leur place (voir par exemple cet article du Monde en 2007) sont fréquentes depuis quelques années (il est bien loin le temps où les directeurs du Louvre s’appelaient Michel Laclotte ou Pierre Rosenberg, des personnalités incontestables), la multiplication des intérims longs ne l’était pas. Ce phénomène nouveau et dommageable a été rendu possible par l’article 10 de la « loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie » (cela ne s’invente pas) qui est venu ajouter la possibilité d’un intérim pour les présidents d’établissements public. Cet intérim peut dépasser la limite d’âge, n’est pas borné dans le temps, et ne cantonne pas les actions possibles de l’intérimaire à l’expédition des affaires courantes. Cela laisse donc la porte ouverte à toutes les dérives alors que ce type d’intérim devrait seulement avoir pour objectif d’attendre l’arrivée d’un successeur désigné.
Une situation chaotique
Quant au prolongement (jusqu’à deux ans) au-delà de la limite du mandat, il est rendu possible par la loi n° 2011-606 du 31 mai 2011 relative au maintien en fonctions au-delà de la limite d’âge de fonctionnaires nommés dans des emplois à la décision du Gouvernement. Ce prolongement est fait « à titre exceptionnel » et doit être fait « dans l’intérêt du service » ce qui ne veut évidemment rien dire. Si l’on rajoute à la possibilité d’un intérim étendu et à la prolongation de deux ans d’autres possibilités comme le décret qui a permis au président de la Philharmonie de Paris de rester en poste jusqu’à près de 70 ans, et dont le renouvellement du mandat est même envisagé, on comprendra que tout cela relève davantage d’une république bananière que d’une démocratie. Aux nominations faites entre deux portes par copinage, et au nouveau casse-tête de la parité qui implique que pour certains postes on ne recherche plus la personne idoine, mais la femme idoine, ce qui revient à faire une discrimination sur le sexe pour un emploi (une pratique théoriquement illégale dans notre pays), s’ajoutent donc de nouveaux avatars qui n’ont certes pas été inventés par Emmanuel Macron, mais dont il est un de ceux qui en fait l’usage le plus étendu, notamment dans le domaine de l’intérim.
Tout ceci a des conséquences nombreuses et désastreuses pour les musées : à la nomination de personnalités incompétentes mais bien en cour à la présidence des établissements publics (un classique désormais) se rajoute donc l’incertitude sur leur gouvernance par la multiplication des intérims et la prolongation indue de certaines personnes à ces postes, qui peut être bénéfique si la personne est compétente, mais qui prolonge les problèmes lorsqu’elle ne l’est pas. Sans compter que cela contribue à bloquer une génération qui pourrait aspirer à ces postes mais qui doit attendre que leurs prédécesseurs prennent une retraite bien méritée.
Une procédure claire, anticipée, une décision collégiale sur des projets et qui retiendrait le meilleur parmi des candidates compétents : voilà comment devraient se faire les nominations. Au lieu de cela, on a comme toujours le fait du prince. Et d’un prince indécis, qui plus est.
[1] Ce n’est pas partout pareil, néanmoins : ainsi, le président de la Philharmonie est nommé pour cinq ans, renouvelable une fois pour cinq ans.
#intérim #intérimaire #précarité #cdd #prince #emmanuel_macron #cour #parité #discrimination #transparence #établissements_publics #république_bananière #Patrimoine #Musée #France #Rome #Villa_Médicis #Versailles
]]>#Covid-19. Les #Stylos_rouges portent #plainte contre #Blanquer pour « #mise_en_danger_de_la_vie_d’autrui »
Le groupe d’enseignants, qui revendique 72 000 membres sur sa page Facebook, saisit la Cour de justice de la République pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui ».
Les Stylos Rouges, sorte de « Gilets jaunes du monde enseignant » qui revendiquent 72 400 membres sur leur page Facebook, annoncent qu’ils ont déposé plainte pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui » contre le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer devant la Cour de Justice de la République. Ceci "« afin qu’il réponde de ses #mensonges, de son refus de sécuriser les écoles et de son incapacité à protéger les personnels, élèves et leurs proches face au Covid-19 »."
►https://twitter.com/stylos_les/status/1375119032135917575Depuis des mois, syndicats et gouvernement s’opposent sur le nombre d’élèves contaminés dans les écoles. Lors de sa conférence de presse, tenue ce jeudi 25 mars, le ministre de la Santé, #Olivier_Véran a indiqué que 2 962 classes et 105 #établissements_scolaires étaient fermés . Selon Santé publique France, le taux d’incidence chez les 0-9 ans a quadruplé depuis le début de l’année pour atteindre 165 cas pour 100 000 habitants dans la semaine du 14 au 20 mars. En Ile-de-France, ce taux monte à 275 chez les 0-9 ans et 673 chez les 10-19 ans.
Vers un renforcement du protocole sanitaire
Pas question de fermer les écoles, maintient le gouvernement, qui annonce, par la voix d’Olivier Véran, un « protocole sanitaire renforcé ».
Lire aussi : Covid-19. Vacances avancées, demi-jauge… Quelles solutions pour contenir le virus à l’école ?
Face aux critiques, le ministère de l’Éducation nationale vient de mettre en ligne une campagne de communication qui décline les slogans suivants : "Aller à l’école, c’est continuer à apprendre" ; "aller à l’école, c’est rester en bonne santé".
Pas du goût du SNUipp, le premier syndicat du premier degré, qui relaie la campagne en taguant les slogans de posts rageurs tels que « conditions dégradées par manque de moyens et d’anticipation » ou « classes fermées par manque de remplaçants ». Le Snes réclame pour sa part l’organisation « urgente » d’une réunion sanitaire et « la neutralisation » du Grand oral du baccalauréat.
▻https://www.ouest-france.fr/politique/jean-michel-blanquer/covid-19-les-stylos-rouges-portent-plainte-contre-blanquer-pour-mise-en
#justice #coronavirus #pandémie #Jean-Michel_Blanquer #écoles
]]>Monastère, agora, forteresse ou nœud d’échanges. Quatre modèles pour définir les relations entre les #écoles et leurs environnements — Géoconfluences
▻http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/geographie-espaces-scolaires/geographie-de-l-ecole/quatre-modeles-relations-ecoles-environnements
En quoi la géographie des #établissements_scolaires, en particulier celle de leurs limites, reflète-t-elle les conceptions de l’#éducation et des modalités d’#apprentissage ? L’article présente quatre modèles : l’école fermée sur elle-même (le monastère), celle ouverte sur le monde extérieur (l’agora), le lieu d’apprentissage barricadé pour éviter les intrusions (la forteresse), et enfin l’établissement tenant de l’un de ces modèles mais bouleversé par l’irruption du #numérique (le nœud d’échanges).
Résumé : ▻https://www.banquedesterritoires.fr/architecture-scolaire-quand-les-collectivites-orientent-lhistoi
]]>►https://lespetitssoirs.fr/2020/11/16/lecole-les-profs-et-la-contre-insurrection-reflexions-sur-un-parcours
On peut dire que ces derniers temps, ça a débattu sec dans mon lycée de banlieue. D’abord, de l’assassinat de Samuel Paty, qui a servi de boulevard aux réactionnaires de tout poil et dont mes collègues se sont emparé·e·s, afin d’engager un débat sur la liberté d’expression avec nos élèves de confession musulmane. Tout était joué d’avance dans cette pièce au scénario écrit par l’État, où les profs tiennent le beau rôle (et iels adorent ça) de celleux qui vont définir la position acceptable, en apparence raisonnable : toute personne a le droit de critiquer la religion, de s’en moquer sans pour autant être inquiétée. Simple, basique, dirait Orelsan. Et pourtant, on s’interroge. Sur ces caricatures, que l’on a sacralisées, transformées en idoles républicaines, alors qu’elles sont notoirement racistes et visent à humilier la communauté musulmane. Sur l’art de la caricature lui-même, qui exagère toujours les traits des minorités, les lèvres des noir·e·s, les barbes des arabes, le nez des juifs. Aussi sur cette volonté féroce que les élèves prouvent leur foi en la République alors que cette même République a accepté de les reléguer économiquement dans des quartiers périphériques, bien à l’écart des centres-villes prospères. Une ségrégation qui ne dit pas son nom.
#établissements_disciplinaires #enseignant·es #national_républicanisme #discriminations
#surveiller_et_punir
#Handicap : le #contrat_social invalide #Datagueule_97
▻https://peertube.datagueule.tv/videos/watch/1c3ec9fc-d0f8-41bb-a70f-8ebb80e03c18
En 2018, en France : 2,8 millions d’handicapés reconnus + 2,3 millions non reconnus ; 400 millions de pénalités versées à l’#agefiph
19 % de #chômage
#aah : 900 €/ mois c/ 1026 €/mois pour le seuil de #pauvreté
MDPH : délai moyen de 16 moisx
80 % des #femmes en situation de handicap sont victimes de violences.
Entretien avec Mme Anne-Sarah Kerdudo, directrice de l’association Droits pluriels.
#invalidité #handicap_invisible #espaces_de_travail #espace_public #accessibilité #logement_accessible #loi_élan #ségrégation #inclusion #éducation_inclusive #établissements_médico-sociaux #discrimination #égalité des #droits
]]>DISPOSITIF 2S2C – DÉCLARATION DU CONSEIL NATIONAL DU SYNDEAC
Les équipes artistiques adhérentes du Syndeac ont été sollicitées par les services de l’Éducation nationale pour participer au dispositif 2S2C (Santé – Sport – Culture – Civisme). Conçu pour se dérouler jusqu’au 4 juillet, ce dispositif, tel qu’il est présenté, entend assurer l’accueil des élèves pendant le temps scolaire par d’autres intervenant·e·s que leurs professeur·e·s en proposant d’encadrer des activités dans les domaines de la santé, du sport, de la culture et du civisme.
Cette invitation a étonné nos adhérent·e·s dans la mesure où, malgré la réouverture des établissements scolaires, les services de l’Éducation nationale ont stoppé net tous les projets d’éducation artistique et culturelle en raison de l’impossibilité de pénétrer dans les établissements. Nous notons d’ailleurs que cet arrêt unilatéral n’a été à ce jour compensé par aucune indemnisation des équipes malgré les préconisations du ministère de la Culture de rémunérer les artistes.
Ce nouveau dispositif 2S2C invitant les artistes à intervenir en milieu scolaire arrive dans un très mauvais contexte : fragilisés par la crise sanitaire, les artistes s’interrogent sur l’utilité de se lancer dans une pratique informelle plutôt que d’adapter au protocole sanitaire les projets d’éducation artistique et culturelle initialement prévus, construits et déjà financés, dans une logique de continuité pédagogique pour les enfants... ▻https://www.syndeac.org/dispositif-2s2c-declaration-du-conseil-national-du-syndeac-10014
#intermittent #Syndeac #culture #art #artiste #éducation #école #2S2C #Éducation_nationale #établissements_scolaires #scolaire #crise #sanitaire#pédagogie #enfants #enseignement #enseignant
Archive : ▻https://archive.vn/byFEG
]]>Le projet de la #loi_de_programmation_pluriannuelle_de_la_recherche (#LPPR) est sorti... Beaucoup de choses vont être écrites à son propos... je vais essayer de mettre sur ce fil de discussion les différentes analyses publiées
#ESR #enseignement_supérieur #France #université #facs #réforme
Pour rappel : la métaliste sur la LPPR :
►https://seenthis.net/messages/820330#message820388
#Arrêté du 27 janvier 2020 relatif au #cahier_des_charges des #grades_universitaires de #licence et de #master
▻https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041623431&dateTexte=&categorieLie
#France #université #ESR #enseignement_supérieur #France
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Commentaire de Yann Bisiou, Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles :
Ce texte est, une nouvelle fois, bien mal nommé puisque sa finalité principale est de permettre aux établissements qui ne sont pas des universités, en particulier les #établissements_privés, de délivrer les grades de Licence et de master pour leurs « Bachelors » ou leurs diplômes « Grande École ». Et oui, la pseudo « excellence » à la française n’est pas reconnue dans le monde entier où seuls les diplômes d’universités publiques, Licence, Maîtrise ou maintenant Master, et Doctorat, sont légitimes. Avec le « #grade » qui se superpose au « #diplôme » le #lobby des Écoles sauve son fonds de commerce.
▻https://lesupenmaintenance.blogspot.com/2020/03/en-marche-vers-le-sup-deux-vitesses.html
#grandes_écoles
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J’ajoute à cette métaliste des réformes à venir (ou pas, espérons-le) qui intéressent l’#enseignement_supérieur :
►https://seenthis.net/messages/820330
Une nouvelle génération des #Campus_d'excellence avec les acteurs des territoires
Former aux métiers d’#excellence et de demain dans des secteurs porteurs : c’est l’objectif du dispositif « Campus des métiers et des qualifications d’excellence ». Les 23 premiers locataires des Campus des métiers ont été choisis, le 6 février 2020.
Parcours de formation, des espaces d’#innovation et de vie, avec des possibilités de #mobilité à l’international c’est ce que propose la nouvelle génération de ces Campus d’excellence. Cette initiative se construit avec les acteurs économiques d’un #territoire pour former les jeunes aux #métiers_de_demain.
Le Campus est un lieu de #formation et d’innovation au plus près des #entreprises. Il repose sur le tryptique :
– Soutenir le développement d’une #filière_porteuse_d’avenir ;
– Maintenir des #compétences dans un territoire ;
-Améliorer l’excellence de la #formation.
Chaque campus réunit, à l’échelle d’une région :
– des #établissements_scolaires (#lycées généraux, technologiques et professionnels) ;
– des établissements d’#enseignement_supérieur (#universités, écoles, etc.) ;
– des centres de formation d’apprentis (#CFA) ;
– des organismes de #formation_initiale ou continue (#Greta, etc.) ;
– des #laboratoires_de_recherche ;
– des #entreprises ;
– des associations.
Un financement du #Programme_Investissement_d'Avenir (#PIA) « #Campus_des_métiers » doté de 80 millions d’euros permet de financer la première vague de 20 à 30 projets. Les #subventions du PIA pourront atteindre au maximum 50% des dépenses éligibles du projet, le reste étant pris en charge par les partenaires. Les #partenaires_privés contribuent à hauteur de 30% ce qui garantit leur implication dans le projet.
L’appel à projets reste ouvert jusqu’au 31 juillet 2020 avec deux dernières vagues de sélection les 16 mars et 1er juin 2020.
Les quatre ministres qui portent le projet - Muriel Pénicaud, Jean-Michel Blanquer, Frédéric Vidal et Agnès Pannier-Runacher - étaient réunis pour présenter la première vague des lauréats.
▻https://www.gouvernement.fr/une-nouvelle-generation-des-campus-d-excellence-avec-les-acteurs-des-te
Comme une #baffe... en ce moment de lutte notamment contre la #LPPR : ►https://seenthis.net/messages/820330
#France #enseignement #ESR
En France, la #mixité existe officiellement depuis 1975 dans les #établissements_scolaires. Mais quelle est la place des #filles et des #garçons dans l’enseignement professionnel ? ▻https://sms.hypotheses.org/19363
Les méthodes radicales du nouveau directeur de cabinet de la ministre de la santé
▻https://www.mediapart.fr/journal/france/030118/les-methodes-radicales-du-nouveau-directeur-de-cabinet-de-la-ministre-de-l
Raymond Le Moign dirigera le cabinet d’Agnès Buzyn au moment de la réforme du financement de l’hôpital annoncée pour 2018. Auparavant à la tête du #CHU de #Toulouse, il fut le premier directeur à tailler dans les effectifs soignants, engageant des restructurations qui se sont traduites par une grande souffrance au travail.
#France #Agnès_Buzyn #ministère_de_la_santé #Raymond_Le_Moign
]]>#recherche #budget
« Une Grenouille vit un Bœuf qui lui sembla de belle #taille… », ou comment (ne pas) moderniser les #universités françaises
►https://theconversation.com/une-grenouille-vit-un-boeuf-qui-lui-sembla-de-belle-taille-ou-comme
Ainsi, à effectifs presque identiques, le Caltech bénéficie de #moyens_financiers dix fois supérieurs à ceux de l’EHESS. C’est l’une des différences essentielles entre les deux #établissements.
]]>« En contexte de guerre, le fondement de l’école n’a jamais été d’apprendre à se protéger de l’extérieur » (Slate.fr)
▻http://www.slate.fr/story/148959/exercice-terrorisme-ecoles
Plusieurs cas d’exercices de préparation aux attentats dans les écoles montrent que les enfants ne comprennent pas ou prennent peur. Le contraire de ce qui était recherché.
]]>Les enfants ne savent pas se servir d’un ordinateur et vous devriez vous en inquiéter. | Nicolas Le Gland
►https://nicolaslegland.wordpress.com/2013/08/15/les-enfants-ne-savent-pas-se-servir-dun-ordinateur
« Alors, qu’est-ce que vous enseignez, a-t-elle demandé pendant que je travaillais sur sa présentation ?
-- L’informatique, répondis-je.
-- Oh… Je suppose que de nos jours, vous devez trouver que les gamins en savent plus sur les ordinateurs que leurs professeurs… »
(...)
Il y a évidemment des variantes de la phrase, qui toutes, vantent les capacités techniques des enfants d’aujourd’hui. Ma préférée vient de parents. « Oh, Johnny n’aura aucun problème pour l’informatique au bac 6, il est toujours sur son ordinateur à la maison. » Les parents ont cette impression assez vague que les heures passées chaque soir sur Facebook et YouTube devraient se transformer, par une sorte d’osmose cybernétique, en compétence PHP, HTML, JavaScript et Haskell.
]]>Une rentrée scolaire sous surveillance, promet l’exécutif
▻https://www.mediapart.fr/journal/france/240816/une-rentree-scolaire-sous-surveillance-promet-lexecutif
Bernard Cazeneuve et #Najat_Vallaud-Belkacem lors de leur conférence de presse commune © Reuters À une semaine de la rentrée scolaire, la ministre de l’éducation nationale et le ministre de l’intérieur ont annoncé une batterie de mesures destinées à renforcer la sécurité dans les #établissements_scolaires et à leurs abords en raison de la forte menace terroriste.
#France #Bernard_Cazeneuve #écoles #éducation #sécurité #terrorisme
]]>Une rentrée scolaire sous haute surveillance, promet l’exécutif
▻https://www.mediapart.fr/journal/france/240816/une-rentree-scolaire-sous-haute-surveillance-promet-lexecutif
Bernard Cazeneuve et #Najat_Vallaud-Belkacem lors de leur conférence de presse commune © Reuters À une semaine de la rentrée scolaire, la ministre de l’éducation nationale et le ministre de l’intérieur ont annoncé une batterie de mesures destinées à renforcer la sécurité dans les #établissements_scolaires et à leurs abords en raison de la forte menace terroriste.
#France #Bernard_Cazeneuve #écoles #éducation #sécurité #terrorisme
]]>Najat Vallaud-Belkacem envisage un nouveau cadre pour les établissements scolaires « hors contrat » (LeMonde.fr)
▻http://www.lemonde.fr/education/article/2016/04/06/najat-vallaud-belkacem-envisage-un-nouveau-cadre-pour-les-etablissements-sco
Dans les écoles hors contrat, ces établissements en marge du système classique, sont scolarisés 0,4 % des élèves français, soit 56 300 élèves. Environ 800 écoles sont recensées, dont 50 de confession musulmane. Elles ne reçoivent aucune subvention de l’Etat et sont par conséquent payantes, mais possèdent une autonomie quant aux programmes scolaires et aux méthodes pédagogiques.
[…]
Parmi cette vingtaine d’établissements [inspectés], six à huit – pas tous musulmans – posent problème, a-t-il ajouté.
Ces établissements ont deux mois pour corriger leur pédagogie, avant une nouvelle inspection, qui pourra, si elle n’est pas satisfaite, saisir la justice en vue d’une fermeture.
Les établissements privés « sous contrat » avec l’Etat sont, eux, tenus de respecter les programmes et les horaires de l’éducation nationale. Ses enseignants sont rémunérés par l’Etat.
#éducation #établissements_privés #établissements_hors_contrat
]]>Avec Jean Oury. Vivre avec la folie / #Revue_Chimères n°84 - Le silence qui parle
▻http://lesilencequiparle.unblog.fr/2015/02/19/vivre-avec-la-folie-olivier-apprill-edito-de-la-revue-chime
« Refaire le #club_thérapeutique, tout le temps. » Cette petite phrase de #Jean_Oury, extraite d’un dialogue avec Danielle Sivadon en 2004 (1), aurait pu être prononcée au printemps dernier comme il y a cinquante ans. Elle exprime une constance mais aussi une exigence : donner du #pouvoir aux malades, créer de la responsabilité, du #mouvement, du #possible. C’est à ces tâches essentielles que le fondateur de la #clinique psychiatrique de La Borde se consacrait encore quelques jours avant sa mort, le 15 mai dernier, à l’âge de 90 ans.
Rendre hommage à celui que ses pairs considèrent comme l’un des meilleurs connaisseurs de la #psychose, c’est d’abord prendre la mesure de cette passion médicale (2) qui voit en chaque individu, plus ou moins fou, un sujet à part entière. C’est surtout honorer un engagement au jour le jour, une disponibilité, une présence confondue avec l’accueil permanent de l’autre.
Jean Oury n’a jamais cessé de l’affirmer : dans l’abord de la #folie, le plus petit détail, un simple geste ou un sourire peuvent avoir une valeur inestimable. Ce souci de l’#ambiance, ces paroles qui soignent, cet humour, cette bienveillance, ces moments féconds au cours desquels une existence parfois bifurque constituent l’arrière-fond sensible dont ce numéro de Chimères se veut l’écho, nourri d’expériences, de témoignages et de récits souvent placés sous le signe d’une « vraie rencontre ». Une sorte de #constellation affective où les voix de plusieurs générations de patients, de « psychistes », d’artistes, d’amis proches ou de compagnons de route se mêlent pour composer un portrait multiple, polyphonique, de l’homme qui a tracé « son chemin en marchant » et su s’adresser, avec une qualité de parole incomparable, à ce qu’il y a de plus #singulier en chacun.
En soutenant l’hypothèse que l’hôpital peut devenir un instrument thérapeutique et que la folie est aussi #création, Jean Oury abroge toutes les formes de ségrégation et tout réductionnisme de la maladie mentale. Autant de révolutions partagées au long de son parcours commun avec son ami #Félix_Guattari : la machine bicéphale Oury-Félix occupe une place privilégiée dans ce numéro de Chimères. Un agencement foisonnant, tour à tour créateur et conflictuel, qui constitue le caractère le plus visible de cette amitié – terme sans doute à entendre ici dans le sens d’une « condition pour l’exercice de la pensée » (3). Pensée en extension chez l’un, locale et intensive chez l’autre, dont la complémentarité aura permis d’instituer un milieu et un lieu « qui n’en a jamais fini de se construire » (4).
Ce #lieu de #soin, bien réel et pourtant toujours à venir, Jean Oury en a lui-même élaboré la formule logique, la topique, dans son concept princeps de « collectif ». Réussir à déchiffrer ce qui se passe dans la vie quotidienne, sur le terrain, au travail, entre les gens, afin qu’une organisation d’ensemble puisse tenir compte du #désir_inconscient, est au principe même d’une « #psychiatrie_concrète » (autre nom de la #psychothérapie_institutionnelle) pour laquelle le médecin directeur de #La_Borde a oeuvré sans relâche.
Tel est peut-être l’un des legs les plus manifestes de Jean Oury aux pensées qui n’ont pas renoncé à transformer l’état des choses. Un legs clinique, philosophique, politique, poétique, #éthique, dont la « valeur humaine » imprègne toutes les pages qui suivent. Accueillir, soigner, penser, vivre avec la folie : la contingence, une vie…
Olivier Apprill
Vivre avec la folie / 2015
Édito du n°84 de la revue Chimères : Avec Jean Oury
Numéro dirigé par Olivier Apprill et Jean-Claude Polack
Télécharger le sommaire : Chimeres 84 sommaire
▻http://lesilencequiparle.e.l.f.unblog.fr/files/2015/02/chimeres-84-sommaire.pdf
]]>Adresse aux intellectuels, journalistes, romanciers et à toutes celles et tous ceux qui croient connaître les jeunes des quartiers populaires
►http://blogs.mediapart.fr/edition/aggiornamento-histoire-geo/article/110215/adresse-aux-intellectuels-journalistes-romanciers-et-toutes-celles-e
Ceci est un texte collectif qui émane du collectif Aggiornamento. La mouture initiale est de Hayat el Kaaouachi. Il a été ensuite soumis à signatures de façon plus large.
Contact : hypotheses.aggio(at)gmail.com
Mesdames, Messieurs,
Ceci est une invitation. Une proposition des plus honnêtes.
Entre vous et nous, les désaccords peuvent être nombreux, radicalement ancrés dans des conceptions bien différentes de la France et de la #République. Ce qui vous inquiète et vous hérisse nous interroge parfois sans nous faire douter de la légitimité de notre #travail, de nos combats, de la société dans laquelle nous vivons. Nous n’avons pas votre rapport pathologique à la #jeunesse de France. Nous refusons d’en faire avec vous un portrait caricatural qui rassure vos postures sociales. Votre vue vacillante et triste de notre pays, nous la refusons, préférant œuvrer au quotidien à l’éducation de tous pour des lendemains qui chantent.
Entre vous et nous, les mots s’écharpent tant le fossé peut être profond. Mais nous défendons tous la parole libre et le débat. Nous sommes attachés, vous comme nous, à la confrontation des idées, aussi rude soit-elle. Les joutes verbales à l’écrit comme à l’oral avec la portée incandescente du numérique et des réseaux sociaux nourrissent les gnoses et les polémiques sans fin appréciées par la médiasphère. Pourtant, derrière les éclats de voix et les échanges de mots, les réalités nombreuses, plurielles et complexes ne sont pas toujours restituées fidèlement. Aux nombreux cas particuliers brandis ici ou là par des chroniqueurs, intervenants divers de la scène intellectuelle et médiatique, nous gardons, ne vous en déplaise, l’avantage du nombre, du #terrain et du #quotidien qui seuls, selon les méthodes des sciences sociales, peuvent avec précision et rigueur fonder la véracité des propos pour rendre compte d’une vérité sociale et #politique mouvante.
Nous vous proposons de partager cette #expérience. Par souci d’honnêteté intellectuelle.
Loin de nous l’idée de vous faire la leçon ou de vous convertir. Voyez plutôt cela comme une rare opportunité de palper cet objet fantasmé qui vous fait tant peur et que vous croyez connaître. Venez dans nos #établissements des #quartiers_populaires, venez dans nos classes sur les bancs de nos élèves. Voyez comme ils écoutent et parlent, voyez comme ils pensent. Il ne s’agira pas pour vous d’une visite au zoo, il ne s’agira pas pour eux de vous séduire. Nous vous proposons une #rencontre, un échange d’au moins une journée. Prenez le temps de vous asseoir face à eux et de leur dire directement ce que vous pensez d’eux. Comme ils vous déroutent, comme ils vous inquiètent, comme ils vous sont étrangers. Ayez le courage de leur faire face, de répondre à l’indignation, à la colère, au désintérêt de ces enfants et adolescents de la France des #marges. Vous pourrez leur demander directement pourquoi ils sont si peu reconnaissants envers la République. Vous les verrez vous rendre vos sourires gênés et vos piques verbales, votre profond mépris.
Mais vous serez dans la vraie vie. Celle du #chômage, des #discriminations, de la rue, du délabrement urbain, de la #débrouille, et de toutes ces réussites joyeuses que bien souvent vous négligez. Vous dépasserez ainsi les dénonciations stériles, les débats caricaturaux de l’entre-soi.
Relevé via @rezo
Vidéosurveillance pour contrer la violence dans les écoles | Gabrielle Duchaine | Éducation
▻http://www.lapresse.ca/actualites/education/201309/23/01-4692426-videosurveillance-pour-contrer-la-violence-dans-les-ecoles.php
Aux États-Unis, où 70% des établissements scolaires sont munis de caméras, l’Association nationale des psychologues scolaires américains estime « qu’il n’y a aucune preuve claire que leur utilisation est efficace pour prévenir la violence ». Selon leurs études, les caméras ne feraient que déplacer les comportements délinquants ailleurs. Pire, elles pourraient encourager la violence à grande échelle, comme dans le cas du tueur de Virginia Tech, qui avait envoyé des images de son crime aux stations de télévision.
]]>#ADN : le #séquençage bientôt pour tous
▻http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article1691
La #HighTech au service des #instruments médicaux
Les avancées en #médecine ont toujours, et à travers toutes les #époques , poussé les #chercheurs aux efforts pour réduire les #souffrances et anéantir les #maladies . Arrive donc, dès les années 70, ce qui est assez récent par rapport à #Hippocrate , le #décodage de l’ADN… En #2013 , il est déjà incontournable, dans certains #établissements hospitaliers pour la #précision de #diagnostiques ...