Oui, il a un problème de confusion. Mais il faut bien dire que beaucoup de ces types avancent masqués, et recyclent des thèmes de gauche pour brouiller les pistes, voire même, se réclament de penseurs de gauche tout en régurgitant de la pensée bien fasciste. Comme disait ma grand-mère : « ils bouffent le bon Dieu en entrant et chient le Diable en sortant », pour désigner les hypocrites de sa chère religion.
Parce que je l’ai vu il y a 15 jours et qu’on a beaucoup discuté, je continue à penser qu’Étienne se fourvoie sur certains points, mais avec sincérité. Ce qui n’est pas du tout le cas de ses petits copains.
C’est le souci des critiques antisystème ou antisociété. Les fachos utilisent exactement le même point de départ (la critique d’une société inégalitaire), mais selon un point de vue très différent (en général, ce n’est pas le principe des inégalités qui les emmerde, mais bien qu’elles ne soient pas en faveur de leurs intérêts bien particuliers) et surtout avec des solutions et des objectifs radicalement incompatibles avec la gauche.
Donc, on me dira qu’il suffit de creuser un peu pour voir le loup et partir en courant.
Sauf que, justement, en discutant, je me suis rendu compte qu’ils sont bien plus hypocrites que cela et sachant qu’une bonne part de leur programme est totalement invendable (en résumé : poussez-vous de là, que je m’y mette), ils pompent carrément dans les programmes NPA FdG et consorts, mais en les tordant dans la logique des causes et des effets.
Et ça, je peux vous le dire, c’est bien la merde à détecter dans le feu d’une conversation. Et encore plus à démonter.
C’est une stratégie que je trouve redoutable et qui marche comme une valse à trois temps :
-- en t’appropriant les thèmes de ton ennemi (en l’occurrence, pour eux, les gauchistes humanistes égalitaristes et tout le bordel), tu commences par vider leur corpus idéologique par contamination.
-- Tu brouilles les repères de la plupart des gens qui n’arrivent plus à s’y retrouver entre les antisystèmes de gauche et les antisystèmes de droite (d’autant qu’en fait, tout le monde se garde bien de te dire de quel système et de quelle manière on en parle). C’est d’autant plus efficace que le #confusionnisme politique est actuellement le truc le plus répandu, y compris dans la classe politique mainstream : Holllande = socialisme, par exemple...
-- Tu affaiblis tes ennemis en les divisant entre ceux qui voient le loup et les autres et tu remportes la timbale à l’arrivée.
C’est très exactement ce qui est en train de se passer.
La contremesure la plus utilisée est le cordon sanitaire. Dès qu’un mec de gauche est contaminé par les rouges bruns, hop, on le black-liste et on prévient les autres qu’ils ont intérêt à prendre leur distance s’ils ne veulent pas subir le même sort. C’est peut-être efficace, mais ça dépouille progressivement les rangs des gauchistes et on peut se retrouver avec de véritables Politburos qui émergent et décident eux-mêmes où placer le curseur.
Pour moi, le principal souci, c’est que les gens black-listés, on les abandonne à un seul son de cloche... et à priori, ça ne va pas arranger leur clarté d’esprit à la longue. Et puis, à ce rythme-là, un jour, on va se retrouver avec un radeau de 3 Stals sur un océan de fascisme et on l’aura dans l’os.
L’autre possibilité est de conserver le dialogue avec les confus et de s’attacher à démonter les sophismes des fachos.
Je ne suis pas certaine que ça marche, mais je me dis qu’il faut qu’ils conservent l’accès à d’autres argumentations et visions du monde pour ne pas se retrouver dans une immersion totale à la TF1. Si les fachos ont réussi à distordre leur vision du monde, serions-nous tellement plus cons qu’eux que nous ne pourrions inverser le processus ?
Je crois qu’au contraire nous devons savoir de quelle manière ils procèdent. D’abord, dans un sain exercice d’autodéfense intellectuelle. Et ensuite dans une vision de long terme où nous sommes capables de reprendre des points, des positionnements, des thèmes confisqués.
Depuis le début, je me tiens plutôt à l’écart des questions du Moyen-Orient, parce que je ne pense pas avoir les billes pour faire la part des choses.
Mais je me rends compte à l’usage que c’est l’une des portes d’entrée des confusionnistes. Ils opèrent par glissement : État => peuple => ethnie => religion => race => complot, ce qui fait qu’en partant de la politique de la classe dirigeante Israélienne, ils arrivent tranquillou à réécrire l’histoire des religions puis l’histoire tout court et en brassant bien. Et comme tout le monde joue plus ou moins à touiller dans tous les sens, ça passe comme un suppo dans le tunnel sous la Manche.
Le problème, c’est comment arriver à prouver que nous ne sommes pas nous-mêmes en train de distordre la réalité selon notre bon plaisir (peut-être en commençant par admettre que c’est déjà un concept relatif...) et être plus convaincants que les manipulateurs ?
Je n’ai pas de réponse.
Mais chaque fois qu’au cours de mes discussions j’ai reniflé une distorsion réactionnaire, j’ai décidé de contreargumenter et de ne surtout pas lâcher le morceau... ce qui m’a filé immédiatement une réputation d’emmerdeuse, mais tant pis.
Parce que le confusionnisme est partout, vraiment. Surtout à travers les inversions de causalité.
« Les femmes utilisent leur statut de victime pour dominer les hommes », « les accusations de viol, c’est pour faire du chantage aux hommes », « les Juifs ont choisi de se mettre à part des autres par orgueil et pour conserver leur cohésion interne », « les pauvres devraient être responsabilisés, quand même ! », « Je connais des chômeurs qui abusent de leur état », « On ne peut pas donner un revenu universel à tout le monde, mais seulement à ceux qui le méritent... », etc.
Pour finir — et même si c’est confus — juste dire qu’hier je me suis retrouvée comme une conne à soutenir une action de sans-dents... jusqu’à ce qu’un troll (mais un vrai troll, je vous jure, un qui crie et insulte tout le monde) me fasse remarquer que c’était une copie d’une autre action, mais que cette copie venait de la Manif pour tous et de ses potes.
Donc, il m’a fallu surmonter mon aversion des trolls pour comprendre le fait que je m’étais fait avoir comme une bleue.
Pour me rendre compte ensuite que le troll était un socialiste qui soutenait Hollande... tout en gerbant sur les immigrés.
Putain... un crotale n’y retrouverait pas ses petits !
Le seul truc que j’en garde, c’est qu’en ce moment, tout le monde a l’air salement en colère, que le fond de l’air sent la baston et que les fouteurs de merde et de troubles prospèrent comme des fous dans ce merdier.
Sur ceux, je vais lire des livres.
Voilà !