• « Au lieu d’une inflation technique coûteuse pour l’environnement, pourquoi ne pas simplement réglementer le poids des voitures ? »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/09/08/au-lieu-d-une-inflation-technique-couteuse-pour-l-environnement-pourquoi-ne-

    Au cœur de l’été, les nouvelles normes européennes de sécurité des automobiles ont commencé à entrer en vigueur dans une grande indifférence, comme toutes ces mesures techniques qui semblent aller de soi. Après tout, l’amélioration de la sécurité routière est une cause assez consensuelle – nul ne souhaite tuer, ou être tué, dans un accident de la route –, et le renforcement des véhicules par l’innovation est un moyen qui échappe à toute forme de débat ou de discussion. Derrière des mesures en apparence indolores se dissimule pourtant tout un impensé politique : celui d’un certain rapport à la technologie, investie de toutes sortes de pouvoirs et envisagée comme unique pourvoyeuse de solutions à chaque problème – y compris à ceux dont elle est responsable.

    Ces nouvelles normes automobiles sont un cas d’espèce. Depuis le 7 juillet, tout véhicule (neuf) à quatre roues commercialisé dans l’Union européenne doit être équipé d’une myriade de #systèmes_électroniques et de #capteurs permettant l’aide au maintien de la trajectoire, le freinage d’urgence autonome, l’adaptation « intelligente » de la vitesse, l’alerte en cas de distraction ou de somnolence du conducteur, la détection d’obstacles à l’arrière du véhicule, etc.
    Voitures et camions devront aussi avoir passé l’épreuve de nouveaux crash-tests plus exigeants, ce qui va mécaniquement conduire à leur alourdissement, relève l’UFC-Que choisir. Il est impossible d’anticiper l’impact que ces mesures auront sur l’accidentologie, mais il est certain qu’elles contribueront non seulement à accroître la quantité d’énergie nécessaire à faire rouler nos voitures, mais aussi à aggraver leur empreinte environnementale, avec à leur bord plus d’électronique et plus d’écrans, donc plus d’eau et d’énergie nécessaires à leur fabrication, plus de métaux, de terres rares, de plastiques, etc. L’ampleur des bénéfices est incertaine, les inconvénients sont assurés.

    Réductionnisme technique

    On touche ici au paradoxe le plus cocasse de la fabrique des politiques publiques européennes, dont chacune semble dotée de son gouvernail propre. Tandis qu’à un étage du Berlaymont on pédale fort pour aller vers le nord, on manœuvre âprement à l’étage du dessous pour mettre le cap au sud (d’où l’importance cardinale des porte-parole de la Commission, dont la tâche est ensuite d’échafauder des déclarations capables de nous convaincre que le nord et le sud se trouvent en réalité, plus ou moins, dans la même direction).

    L’Union européenne s’est ainsi dotée d’objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % à l’horizon 2030, mais contraint dans le même temps son industrie #automobile à alourdir l’empreinte environnementale et climatique de ses voitures. On rétorquera que le mouvement en cours, fortement poussé par l’UE, est à l’électrification du parc. C’est juste. Mais l’énergie issue des renouvelables ou des centrales nucléaires n’est pas inépuisable : d’importants efforts de sobriété seront nécessaires dans tous les secteurs si l’on veut se passer des fossiles. Dans tous les secteurs, donc, sauf l’automobile – notons au passage qu’ une petite Renault Zoe ou une Peugeot 208 électrique pèse 1,5 tonne, c’est-à-dire environ trois fois plus qu’une 2CV.

    Présenté ainsi, le problème semble revenir à un arbitrage entre la protection de l’environnement et la sécurité des personnes. Mais ce faux dilemme est en réalité le fruit d’un réductionnisme technique. Quand on a un marteau dans la tête, tout prend la forme d’un clou. En réalité, les immenses progrès accomplis en matière de sécurité routière au cours du demi-siècle écoulé (de 18 000 morts par an en France en 1973 à un peu plus de 3 000 aujourd’hui) ont pour leur plus grande part été rendus possibles par des mesures socio-économiques (port de la ceinture obligatoire, limitations de vitesse, lutte contre l’alcool au volant, etc.) plutôt que par des miracles de la technique. Gageons aussi que la gratuité des autoroutes réduirait de manière significative la mortalité routière.

    Les véhicules lourds tuent plus

    Bien sûr, les voitures les plus modernes et les plus lourdes sont aussi plus sûres que jamais. C’est juste, mais là encore tout dépend du point de vue. Les choses ne sont pas exactement les mêmes selon que vous êtes à l’intérieur, ou à l’extérieur, de ces monstres d’acier. Dans une minutieuse analyse des données de l’#accidentologie américaine, l’hebdomadaire The Economist – peu suspect de luddisme ou de menées écologistes – montre, dans son édition du 7 septembre, qu’à l’échelle de la population les véhicules les plus lourds en circulation coûtent environ dix fois plus de vies humaines qu’ils n’en sauvent.

    Osons une suggestion au régulateur : en lieu et place d’une inflation technique coûteuse pour l’environnement et marginalement utile pour la sécurité, pourquoi ne pas tout simplement réglementer le poids des automobiles ? Une telle mesure aurait pour elle de réconcilier les objectifs de sécurité routière de l’Europe avec ses ambitions environnementales. Et pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Quitte à les réguler, pourquoi autoriser la mise sur le marché d’automobiles de plus de 2 tonnes capables d’atteindre 100 km/h en moins de quatre secondes et de filer à plus de 200 km/h, lorsque la vitesse la plus élevée autorisée n’excède pas 130 km/h ?

    En définitive, nous consommons des ressources et développons des trésors de technologie pour rendre plus sûres des automobiles que nous rendons de plus en plus dangereuses par la #surconsommation de ressources et le développement d’autres trésors de technologie. On ne sait trop comment peut finir cette escalade. Tourner en rond en détruisant au passage le climat et l’environnement : n’y a-t-il pas mieux à faire de la science et de la technique ?

    • La question c’est aussi de savoir si on peut faire des voitures électriques plus petites que la Zoé et qui peuvent se vendre. Il y a bien la Dacia spring qui doit faire 1 tonne mais l’autonomie est de moins de 300 km (soit 100 de moins que la Zoé).
      Autant dire qu’on n’est pas prêt de voir des mesures d’amaigrissement des bagnoles parce qu’aucun-e politicien-ne ne se fera élire avec une telle proposition (qu’on se rappelle juste la levée de boucliers quand il y avait eu le projet des autoroutes à 110, et aussi la limite à 80 sur les routes départementales...).

      Gageons aussi que la gratuité des autoroutes réduirait de manière significative la mortalité routière.

      Oui mais par contre avec des voitures thermiques ça augmente la consommation de pétrole. Sans compter que les autoroutes sont une aberration écologique.

    • Si toutes les électriques pouvaient ne faire « que » 1500kg, ce serait un meilleur début (faute d’être bon). Pour rappel, en électrique, dès que tu es à 130, tu consommes double, donc tu roules à 110, si vraiment tu veux faire de la distance. Ajoutons que 70 euros le « plein » en charge rapide, pour 200 km de parcourus à 110-130, tu te dis que tu ferais mieux d’avoir une thermique. D’autant que, expérience qui vaut ce qu’elle vaut, la voiture toute neuve (une 308 essence 130 ch), elle nous a permis, cet été, à deux reprises, d’avoir une autonomie de 800 km sur autoroute, vitesse moyenne entre 110 et 130, réservoir 52 litres, 90 euros pour le remplir, PV 1300kg. Presque pareil que la précédente, qui était une diesel 130 ch (on lui faisait faire 900 km). C’est pour dire que sur les moteurs essence aussi, ils font de vrais progrès en termes de consommation.

      Pour l’usage quotidien, quelques dizaines de km par jour, l’électrique fonctionne très bien, c’est un vrai confort de conduite. Cette lubie de tous avoir une voiture pour faire le voyage annuel jusqu’à l’autre bout de la France, est délétère.

      Notez que sur les électriques, le moteur n’accélère plus au delà d’une certaine vitesse : 150 sur les 208, par exemple.

  • Les accidents mortels sur l’autoroute ont augmenté de 43 % en 2022, l’alcool et la drogue en cause
    https://www.huffingtonpost.fr/france/article/les-accidents-mortels-sur-l-autoroute-ont-augmente-de-43-en-2022-l-al

    Les accidents mortels sur les autoroutes de France ont augmenté de 43 % en 2022, avec 188 personnes tuées. Il s’agit principalement de conducteurs de moins de 35 ans, fortement alcoolisés ou sous l’emprise de stupéfiants, selon des données du secteur publiées ce mercredi 2 août.

    Question quasiment rhétorique : puisqu’on sait l’âge, est-ce qu’on sait aussi le genre de ces « conducteurs de moins de 35 ans » ?

  • « Incident aérien survenu le 20 mars 2019 sur la base aérienne 113 à Saint-Dizier (52). » Le rapport d’enquête de cet incident d’avion (ne vous angoissez pas, il n’y a eu que des blessés légers) est très intéressant, non seulement pour les passionnés d’#aviation, mais également pour les gens qui s’intéressent aux relations humaines dans le travail et aux processus humains. À l’origine de l’incident, aucun problème technique, mais une accumulation de problèmes humains.

    Paradoxalement, un des deux problèmes techniques survenus après l’incident a plutôt minimisé ses conséquences.

    Et le rapport est très détaillé, un bon exemple de retour d’expérience, qui intéressera tous les opérationnels, même en dehors de l’aviation. Et c’est joliment rédigé (« sa verbalisation a cessé » pour dire « mort de peur, il s’est enfin tu ».)

    https://www.defense.gouv.fr/portail/ministere/organisation-du-ministere-des-armees/organisation-du-ministere-des-armees/organismes-dependant-du-ministre/les-bead/bea-e/2019/rapports-2019/a-2019-03-i

    #Rafale #accidentologie

  • VIDEO. Les 80km/h ont-ils vraiment permis d’épargner 116 vies ?
    https://www.francetvinfo.fr/vrai-ou-fake/video-les-80km-h-ont-ils-vraiment-permis-d-epargner-116-vies_3165431.ht

    Des estimations basées sur des routes hors agglomération, dont 10% ne sont pourtant pas limitées à 80 km/h. En Bretagne par exemple, plus de 1 200 kilomètres de routes sont des 2X2 voies, la plupart du temps limitées à 110 km/h. Elles ont malgré tout été comptabilisées dans le bilan d’Edouard Philippe sur les vies sauvées par les 80 km/h. Mais l’observatoire national de la sécurité routière assure que le nombre d’accidents sur ces voies est constant depuis des années et ne change donc rien à son estimation.

  • Évaluation du 80 km/h : stop à l’infox / Communiqués / Actualités - Ministère de l’Intérieur
    http://www.interieur.gouv.fr/Actualites/Communiques/Evaluation-du-80-km-h-stop-a-l-infox

    Alors que le gouvernement s’apprête dans les prochains jours à publier le bilan provisoire de l’accidentalité routière de l’année 2018 assorti d’un bilan intermédiaire de la mesure de baisse de la limitation de #vitesse de 90 à 80 km/h sur les routes à double sens sans séparateur central, le « comité indépendant » d’évaluation des 80 km/h (CIE) mis en place par l’association 40 millions d’automobilistes publie dans un communiqué diffusé vendredi 25 janvier des supposées analyses, avant même la publication des chiffres officiels.

    Sur quoi se base l’affirmation du CIE selon laquelle « l’évolution de la mortalité reste inchangée malgré l’entrée en vigueur de la mesure » ? La rigueur scientifique commanderait que cela soit sur une étude statistique poussée, sur une comparaison de modèles mathématiques ? Il n’en n’est rien.

    L’analyse du comité prétendument indépendant repose en réalité sur un collage élémentaire de chiffres provisoires de l’accidentalité routière repris des baromètres mensuels de la Sécurité routière et concernant tous les réseaux routiers du territoire français, sans distinction entre le réseau à 80 et les autres. Tous ces chiffres ont été alignés sur une courbe de période temporelle courte, sans aucune comparaison avec des périodes longues, comme le commande l’accidentologie. Ils ne permettent en aucun cas d’analyser les effets du passage à 80.

    Ces données sont accessibles seulement par l’analyse minutieuse des accidents de la route compilés dans le fichier dit « BAAC ». Ce fichier est alimenté tous les jours par les forces de police et de gendarmerie de France. Il faut ensuite extraire les accidents survenus hors agglomération, et en dehors des autoroutes. Ce travail est encore complété par les compléments d’information fournis par les préfectures concernant les accidents qui n’ont pas encore été enregistrés dans la base. Ensuite seule une comparaison fine des chiffres provisoires de la mortalité routière avec les courbes d’accidentalité sur 5 ans permet d’obtenir un résultat.

    Le Comité indépendant de 40 millions d’automobilistes ne peut plus ignorer ce travail effectué par un organisme indépendant, l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) reconnu par l’Autorité de la statistique publique (ASP) : un courrier daté du 10 décembre 2018 a en effet été envoyé au président du CIE par le délégué interministériel à la sécurité routière pour lui expliquer toute la procédure concernant l’évaluation de l’impact du 80 km/h sur l’accidentalité et la date de disponibilité des données. Les demandes dudit comité sont au demeurant la preuve d’une totale absence de connaissance du recueil de la statistique d’accidentalité en France.

    Dans son communiqué, ce comité se base sur cette simple courbe pour, in fine, tenter de démontrer l’inutilité du contrôle radar automatisé, avec des raisonnements totalement dépourvus de fondement, et sans aucune statistique sur la disponibilité des radars et leur situation pour fonder cette sommaire analyse.

    La Délégation à la #sécurité_routière rappelle que la vitesse est la première cause de mortalité sur les routes dans notre pays et que la mise en place du contrôle automatisé en 2003 a permis de sauver plus de 32 000 vies.

    Enfin, l’#accidentologie n’est pas une opinion. Elle est une science. Les prétendus experts du comité indépendant en ignorent les rudiments, et en sont informés. Leur production peut donc être qualifiée d’infox.

  • Des accidents de la route pas si accidentels, par Matthieu Grossetête (Le Monde diplomatique, août 2016)
    https://www.monde-diplomatique.fr/2016/08/GROSSETETE/56078

    Nombre de fonctionnaires de terrain constatent empiriquement la surreprésentation des précaires parmi les personnes décédées. Mais leur hiérarchie administrative reste sourde à leurs alertes. Découragés face à ce mur d’indifférence, certains en arrivent à quitter leur poste, comme le montre, parmi d’autres, le cas de M. Romain T., ancien intervenant départemental de sécurité routière : « Je me suis rendu compte que le niveau social avait une grande importance dans l’#accidentologie, nous confie-t-il. Ce sont les gens les plus défavorisés socialement qui sont les plus touchés. À l’époque, on nous a muselés. J’ai demandé à la préfecture de préparer une note de synthèse sur l’accidentologie et le lien social, et le préfet a refusé : il voulait mettre une chape de plomb là-dessus. » Dans la mesure où il contredit le discours feutré de l’administration, ce « savoir inconfortable (7) » est ignoré, sinon contesté par les pouvoirs publics.

    #précarité #inégalité #déni #transports #territoires

    • En étudiant les comparutions pour homicide routier au tribunal de grande instance d’une importante ville de province, on constate une surreprésentation des cadres et professions intellectuelles supérieures, et une sous-représentation des ouvriers. Cette situation est en partie due au plus grand pouvoir protecteur des véhicules possédés par les personnes aisées, qui disposent d’airbags et de systèmes de freinage plus performants, d’habitacles renforcés, etc. Cela contribue à faire de leurs propriétaires des survivants potentiellement justiciables après un accident mortel.

      [...]

      Près de 80 % des accidents mortels ont lieu à la campagne. Or l’embourgeoisement des centres-villes relègue les classes populaires toujours plus loin des bassins d’emplois. En 2007, 28 % des ouvriers et 31 % des employés morts sur la route ont eu un accident en se rendant à leur travail, alors que ce trajet n’est en cause que dans 16 % du total des décès. Les catégories populaires sont plus nombreuses à emprunter quotidiennement les routes secondaires, plus dangereuses, tandis que les couches aisées circulent surtout en ville ou sur l’autoroute, l’infrastructure la plus sûre, avec 4 % des morts en 2012, mais également la seule qui exige des frais de péage.

  • Les smartphones à l’origine d’un boom des accidents domestiques ? - M le magazine du Monde
    http://alireailleurs.tumblr.com/post/104400345326

    Selon une étude américaine (.pdf), menée par l’économiste Craig Palsson, le nombre d’accidents domestiques d’enfants de moins de 5 ans a augmenté de 10 % dans les villes où la 3G a été déployée. D’autres raisons que l’usage des smartphones par les parents pourrait expliquer cette augmentation, prévient Paul Seabright qui se fait l’écho de cette étude à prendre avec des pincettes, mais suffisamment documentée pour quelle attire l’attention. 

    #déconnexion #accidentologie #attention #économie_de_l'attention

  • Les jours et l’ennui de Seb Musset : La révolution des bagnoles

    http://sebmusset.blogspot.com/2011/05/la-revolution-des-bagnoles.html

    La révolution des bagnoles
    Publié par seb musset on samedi 21 mai 2011
    Libellés : consommation, sociologie de bac à sable, ump
    La voiture à papa (et à maman aussi) est une sorte de point zemmourien de la société où les réactionnaires s’accordent avec les libéraux pour dénoncer, fort d’un argumentaire niveau académie Norauto première année, une intolérable atteinte aux droits de l’homme moderne d’exploser la tronche de son prochain : le vil briseur de notre hédonisme mécanique.

    #accidentologie #transports