• Olivier De Schutter : « Notre modèle agricole mondial est à bout de souffle »
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/29/olivier-de-schutter-notre-modele-agricole-est-a-bout-de-souffle_4408689_3244

    Le deuxième changement, c’est l’importance qu’a pris la question de la nutrition, un sujet largement occulté depuis trente ans. Enfin, troisième changement : la prise de conscience que notre modèle agricole, fondé sur des intrants intensifs (engrais et pesticides) et dépendant de l’industrialisation toujours plus poussée de l’agriculture, est à bout de souffle. Il faut donc changer de cap et aller vers l’#agroécologie. Le problème, c’est que les Etats rencontrent beaucoup d’obstacles pour passer du discours aux actes.

    Pouvez-vous être plus précis ?

    Je dénombre quatre verrous. Le premier est d’ordre technologique : la modernisation de l’#agriculture mondiale s’est fait uniquement selon un modèle productiviste. Le deuxième est socio-économique : de grands acteurs dominent le marché, aussi bien au niveau des producteurs d’intrants que des industries de transformation. La possibilité pour de petits acteurs ou même des acteurs de taille moyenne de créer des alternatives est donc très limitée.
    Le troisième obstacle est culturel : nos modes de vie pressés dépendent d’une alimentation transformée et facile à préparer. Enfin, l’obstacle politique : les gouvernements sont sensibles aux intérêts de leurs grandes entreprises #agro-alimentaires, qui se trouvent de fait disposer d’un droit de veto sur les transformations d’ensemble.

    #alimentation

    • Je croyais à la toute-puissance de l’Etat, je crois aujourd’hui à la toute-puissance de la démocratie. Je ne pense plus qu’il faille attendre passivement que les gouverments agissent d’eux-mêmes. Les blocages sont trop nombreux ; les pressions qui s’exercent sur eux, trop réelles ; et les acteurs faisant obstacle au changement, trop puissants.

      Je pense que la transformation des systèmes alimentaires s’opérera à partir d’initiatives locales. Partout où je vais dans le monde, je vois des citoyens qui en ont assez d’être considérés comme des consommateurs ou des électeurs et veulent être de véritables acteurs du changement en cherchant à inventer des façons plus responsables de produire et de consommer.

      Le message final que je remets aux gouvernements, c’est la nécessité de démocratiser les systèmes alimentaires. Cela signifie qu’ils doivent admettre qu’ils ne détiennent pas toutes les solutions et qu’il faut accorder une grande place aux citoyens dans la prise de décision. Je crois aujourd’hui davantage à une transition imposée par des initiatives venues d’en bas que par des réglementations imposées d’en haut.