• A propos de la famine actuelle en Afghanistan

    Une famine aux causes multiples mais en dernier ressort c’est l’aide alimentaire qui est volontairement diminuée par les pays donataires en raison du régime taliban et du sort réservé aux femmes - on peut douter que la situation des femmes en soit amélioré par de telles mesures. Le programme alimentaire mondial (PAM) a ainsi été contraint de couper totalement les vivres en 2023 à 10 millions de personnes, avec une baisse de 66% des aides en octobre 2023

    (décembre 2023)

    Un porte-parole du gouvernement taliban rejette toute responsabilité : quand la journaliste de la BBC l’interroge, ce principal porte-parole des talibans affirme que l’aide internationale s’est réduite à cause du Covid-19 et de la guerre en Ukraine, mais il nie tout besoin de réforme face à des donateurs qui refusent de donner de l’argent à un pays où les droits des femmes sont bafoués. « Les Afghans ont déjà fait de grands sacrifices dans le passé pour protéger nos valeurs », a-t-il déclaré à la BBC. La journaliste pense que ces paroles « n’apporteront pas de réconfort à beaucoup d’Afghans ». Près de 90 % des Afghans n’ont pas assez à manger, indique la radiotélévision publique britannique. Les deux tiers des habitants du pays ne savent pas de quoi sera fait leur prochain repas. Ou même s’il y en aura : un tiers des enfants en Afghanistan, soit 8 millions d’enfants, commenceront l’année 2024 sur un niveau de faim critique, (...)

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-revue-de-presse-internationale/la-revue-de-presse-internationale-emission-du-mardi-19-decembre-2023-229

    (sept 2023)

    https://fr.wfp.org/stories/we-eat-less-sometimes-not-all-cuts-food-relief-deepen-hunger-afghanistan

    (juil 2023) Famine en Afghanistan : les talibans seuls responsables ? par l’ONG United Against Inhumanity

    Cette situation cruelle est en partie causée par un gouvernement irresponsable et corrompu, par la marginalisation des femmes dans l’espace public et par l’incapacité du pays à gérer ses propres ressources, déjà amoindries. Il faut également souligner qu’avant même le retour des talibans au pouvoir en août 2021, le budget afghan était largement soutenu par des fonds étrangers (venus des pays de la coalition sous l’égide de l’OTAN) ‒ une aide désormais indisponible. On constate en outre une baisse de la coopération, qu’elle soit bilatérale ou par le biais des Nations unies et des ONG : à l’heure actuelle, moins de 15 % des appels de fonds lancés par l’ONU pour 2023 ont été approvisionnés.

    Cette ONG point aussi le rôle du gel de l’argent afghan placé dans des pays occidentaux qui ont envahi l’Afghanistan il y a 22 ans :

    Il existe cependant un troisième facteur dont on parle peu : le gel des réserves souveraines par les États-Unis et leurs alliés, facteur déterminant dans l’effondrement de l’économie et du secteur bancaire du pays. Plus de neuf milliards de dollars placés à l’étranger par la banque centrale afghane (Da Afghanistan Bank) sont bloqués par la Réserve fédérale américaine et dans des banques européennes. Or il ne s’agit pas de l’argent du gouvernement, mais bien de celui des citoyens afghans. Cet argent contribuait à la stabilité de la monnaie nationale et rendait possible le commerce avec d’autres pays, ce qui est de fait aujourd’hui impossible. Un autre des effets de ce gel des avoirs s’illustre par une diminution radicale du nombre de billets de banque en circulation. Lorsqu’ils sont trop détériorés, ils ne peuvent même plus être remplacés.
    (...)
    Ces dernières années, seules quelques voix se sont élevées pour dénoncer cette « guerre économique » et ce qui pourrait s’apparenter à une vengeance cruelle de l’Occident après la perte de la guerre d’Afghanistan. Sept milliards de dollars sont détenus par les États-Unis et le reste par des banques européennes. Ces pays, dont les armées possèdent les technologies les plus avancées au monde, ont vu leurs analystes, espions et soldats perdre la guerre contre des combattants en sandales équipés de simples Kalachnikovs.
    (...)
    Irait-on jusqu’à affirmer que l’extrême radicalisation de l’émirat taliban est également le fait de cet état d’injustice manifeste ? Lorsqu’un chat est acculé et craint pour sa vie, il feule, crache et l’on peine à retrouver le compagnon apprivoisé qu’il était. Que ce lien de cause à effet soit avéré ou non, il n’en reste pas moins que l’injustice est réelle et que la population afghane ‒ ces enfants, hommes et femmes, jeunes ou âgés que nous prétendons défendre depuis plus de vingt ans ‒ en paie le prix.

    https://www.alternatives-humanitaires.org/fr/2023/08/16/famine-en-afghanistan-les-talibans-seuls-responsables

    (mai 2022)

    La fabrique d’une famine

    Dans ce pays de 650.000 kilomètres carrés, seuls 12% des terres sont considérées comme cultivables (contre 60% en France) et sont très dépendantes de la pluviométrie et d’un complexe système d’irrigation que la réforme agraire avortée de 1978, alors menée par le nouveau régime communiste, déstructurera en partie. Puis, pendant l’occupation soviétique, la destruction d’installations agricoles participa de stratégies, parfois volontaires, destinées à vider de leurs populations des poches de résistance.

    En parallèle se mettent en place deux autres phénomènes qui viennent aggraver encore l’équation de la faim : les mouvements massifs de déplacés forcés fuyant les campagnes pour gagner les habitats miséreux de la périphérie des villes, et une augmentation constante des surfaces agricoles consacrées à la culture du pavot.

    Le développement rapide de l’éphédra ("oman" dans la langue locale), qui permet de produire des méthamphétamines de faible qualité, contribue à renforcer le statut de narcoétat de l’Afghanistan, dans une logique qui relève, de la part des producteurs, d’un processus adaptatif de survie. Les avances financières qui leur sont concédées par les trafiquants ("salaam") pour payer des intrants devenus nécessaires à la production de drogue les piègent dans un modèle économique classique de l’agriculture d’exportation.

    Deux chiffres rendent compte de ces phénomènes depuis l’entrée de la coalition en 2001 et la chute du premier régime taliban : en vingt ans, le pays n’aura pas connu une année durant laquelle le flux de personnes déracinées sera tombé en dessous de 150.000 par an, avec deux pics à plus d’un million en 2001 et 2014 ; dans le même temps, les surfaces consacrées à la culture du pavot ont triplé, stimulées par une meilleure rentabilité financière pour les agriculteurs, et par les besoins d’achat d’armement des talibans.

    La meilleure résistance du pavot au réchauffement climatique, comparé à d’autres productions de l’agriculture vivrière, est venue encore renforcer la progression des surfaces plantées. La situation ne serait pas aussi dramatique si tous ces mécanismes qui précèdent ne s’étaient ajoutés à une progression démographique qui confère à l’Afghanistan le record mondial en la matière, avec un taux annuel de 6%. Depuis 2001, la population du pays est ainsi passée de 18 à 38 millions d’habitants, avec un taux d’urbanisation aujourd’hui estimé à 30%.

    Les talibans sont ainsi aujourd’hui aux commandes d’un pays qui a profondément changé depuis leur première prise de pouvoir en 1996. L’ensemble de ces réalités convergent pour créer les conditions d’une fatale équation alimentaire auquel le nouveau régime de l’émirat islamique est confronté, sans ignorer pour autant la part de responsabilité de ses dirigeants dans une partie des mécanismes décrits. Pour y faire face, les caisses de l’État sont vides et le système de santé est exsangue.

    Entre cynisme et amnésie

    Dans un scandaleux exercice d’amnésie collective, les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, comme les autres pays les plus riches parmi ceux qui composent l’Assemblée générale des Nations unies, rechignent à contribuer en urgence à l’appel de fonds de 4,4 milliards de dollars lancé par le sous-secrétaire général des Nations unies aux affaires humanitaires, Martin Griffiths et relayé par le secrétaire général Antonio Guterres.

    Tous sont oublieux de l’histoire, oublieux des accords de Doha qui avaient volontairement tenu à l’écart des négociations aussi bien le gouvernement afghan d’Achraf Ghani que les alliés de la coalition internationale. Prenant ainsi acte de l’alternance politique annoncée, et faisant aujourd’hui semblant de s’offusquer de l’arrivée au pouvoir des talibans… Oublieux, chemin faisant, du « Grand jeu » dans lequel les uns et les autres ont continué d’inscrire la population civile, dans des enjeux qui la dépassent totalement.

    En décembre 2021, après d’âpres négociations, le Conseil de sécurité a finalement voté une résolution qui, pour un an, permet la mise en œuvre d’une aide humanitaire qui peut se déployer, sous conditions, sans que ne puisse lui être opposé le régime de sanctions qui frappe les nouvelles autorités afghanes. Si la Chine et la Russie ont pesé de tout leur poids pour aboutir à cette décision politique, les deux pays ne se sont pour autant pas engagés sur les aspects des financements de cette résolution 2615, finalement votée à l’unanimité du Conseil de sécurité.

    Ces atermoiements traduisent une nouvelle fois l’impérative nécessité de refonder le modèle de financement de l’aide humanitaire. Tel qu’elle est organisée aujourd’hui, cette aide est insuffisante en volume, et trop dépendante du jeu complexe des relations entre grandes puissances. Mais en attendant, il faut rapidement obtenir ces financements et les mettre à disposition des organisations en mesure de les déployer. En Afghanistan, le sort de 22 millions de personnes en dépend.

    https://www.lejdd.fr/International/famine-en-afghanistan-pourquoi-est-il-necessaire-de-reformer-laide-humanitaire

    #famine #agriculture #aide-alimentaire #Afghanistan #monnaie

  • Le réseau de l’Université du Québec offre un #guide de #communication_inclusive qui procure des pistes pour améliorer sa façon de communiquer en la rendant plus inclusive et respectueuse.

    Issu du travail de la communauté de pratique en équité, diversité et inclusion (EDI) de l’Université du Québec, le « Guide de communication inclusive : Pour des communications qui mobilisent, transforment et ont du style ! » est constitué de quatre parties décrivant plusieurs #stratégies de communication inclusive écrite, orale, visuelle et publique.

    La communication écrite inclusive

    Cette section décrit quatre stratégies associées à l’écriture inclusive :

    1. Abandonner l’utilisation du #masculin_générique (p.12).
    2. Privilégier les #termes_épicènes et les formulations englobantes (p.13).
    3. Utiliser stratégiquement les #doublets_complets pour augmenter la #visibilité des #femmes dans le discours (p.16).
    4. Faire un usage limité et raisonné des #doublets_abrégés (p.19).

    Chaque stratégie est accompagnée d’exemples de termes ou de formulations à privilégier pour préserver la #lisibilité des textes. Les stratégies mises de l’avant dans cette partie sont aussi résumées dans un #aide-mémoire.

    Cette section présente également des #bonnes_pratiques quant au choix des caractères, à l’utilisation et à l’organisation de l’espace, à l’usage de tableaux et graphiques et à la diffusion en format imprimé ou numérique des écrits.

    La #communication_orale inclusive

    La section portant sur la communication orale inclusive décrit des principes associés à l’utilisation d’un langage respectueux et inclusif, tant en contexte formel que dans les échanges quotidiens.

    La #communication_visuelle inclusive

    La troisième section du guide aborde les messages véhiculés par le biais des #images qui accompagnent les communications institutionnelles et offre des pistes pour valoriser la #diversité grâce à un choix judicieux d’images.

    « Une communication visuelle inclusive s’assure de ne pas renforcer les #stéréotypes et essaie de s’en détacher. Il est question d’adopter une posture de vigilance pour véhiculer des messages non sexistes, non racistes, non hétéronormatifs, non cisnormatifs et non capacitistes. »
    (Université du Québec, 2021, p.32)

    La communication publique inclusive

    Cette dernière partie du guide aborde :

    – Les façons de « contribuer au rayonnement équitable » (p.36) de chaque membre de la communauté universitaire ;
    – Les stratégies publicitaires et de médias sociaux ;
    – L’accessibilité des sites Web ;
    – L’organisation d’événements, tant au niveau des invitations et de la promotion que de la programmation.

    Le guide comporte également plusieurs annexes qui offrent des outils supplémentaires pour adapter ses pratiques communicationnelles. On y retrouve notamment une liste de termes neutres ou épicènes correspondant à des mots couramment utilisés en milieu universitaire ainsi qu’une liste de documents complémentaires (guides de communication inclusive d’universités et d’autres organismes publics, lexiques, formations en ligne, etc.).

    https://www.capres.ca/systemes-et-enjeux-de-lenseignement-superieur/guide-de-communication-inclusive-outil

    Pour télécharger le guide :
    https://www.uquebec.ca/reseau/fr/system/files/documents/edi/guide-communication-inclusive_uq-2021.pdf

    #écriture_inclusive #inclusivité

  • « J’adore mon travail. Et depuis 2019, je ne compte pas mes heures. Après le premier confinement, j’ai touché la prime Covid de 1000 euros attribuée par l’Etat. Et je suis maintenant en CDI. J’ai aussi signé un contrat d’intégration républicaine. Pourtant, le préfet dit que je n’ai pas fait la preuve de mon insertion dans la société française. Je ne comprends pas. J’ai un terrible sentiment d’injustice », confie Lydia qui réside à Montmélian (Savoie).
    En Savoie, une aide-soignante d’origine béninoise, veuve d’un français, menacée d’expulsion en pleine épidémie https://www.leparisien.fr/societe/en-savoie-une-aide-soignante-menacee-d-expulsion-en-pleine-epidemie-22-11

    • En Savoie, une aide-soignante menacée d’expulsion en pleine épidémie

      #Lydia_Veyrat, 37 ans, était mariée à un Savoyard et le couple vivait au Bénin. En 2019, Roger, le mari de Lydia, meurt. La Béninoise se rend en Savoie pour régler la succession de son défunt mari. Des démarches qui vont prendre du temps. Alors Lydia cherche du travail. Au Bénin, elle était infirmière. Mais son diplôme n’est pas reconnu en France. Elle trouve un emploi d’ #aide-soignante dans un #Ehpad de #Pontcharra (Isère), accumule les contrats.

      Pourtant, le préfet de Savoie vient de signifier à Lydia « une obligation de quitter le territoire français » ( #OQTF ). Une décision incompréhensible pour la jeune aide-soignante.

      https://www.leparisien.fr/societe/en-savoie-une-aide-soignante-menacee-d-expulsion-en-pleine-epidemie-22-11

      #renvois #expulsions #France #Savoie

    • Savoie : la justice confirme l’expulsion d’une aide-soignante en pleine crise sanitaire

      Le tribunal administratif de Grenoble rejette la requête déposée par Lydia Veyrat. Employée d’un Ehpad, cette aide-soignante béninoise résidant à Montmélian en Savoie conteste son obligation de quitter le territoire en pleine crise sanitaire.

      https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/savoie-la-justice-confirme-l-expulsion-d-une-aide-soignante-en-pleine-cri

    • Lydia Veyrat, aide-soignante béninoise menacée d’expulsion, va obtenir un titre de séjour

      Lydia Veyrat, employée dans un Ehpad d’Isère, va pouvoir obtenir un titre de séjour, ont annoncé vendredi les ministres Marlène Schiappa et Olivier Véran dans un communiqué commun.

      C’est un soulagement immense pour Lydia Veyrat. Cette aide-soignante béninoise, employée en CDI dans un Ehpad d’Isère, va pouvoir obtenir un titre de séjour lui permettant de rester en France, ont annoncé vendredi 27 novembre Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, chargée de la citoyenneté, et Olivier Véran, ministre de la Santé.

      « Je suis libérée ! Je vais pouvoir rester avec mes résidents [de l’Ehpad] et mes collègues, donner le meilleur de moi-même. Je vais continuer à me battre aux cotés de mes collègues dans cette crise sanitaire », a-t-elle confié à InfoMigrants, quelques heures après l’annonce, encore sous le coup de l’émotion.

      « Que je travaille en France, c’était le rêve de mon mari et il va pouvoir se réaliser. »

      Mariée à un Français avec qui elle a vécu pendant 20 ans au Bénin, Lydia Veyrat est arrivée en France en mai 2019 après la mort de son époux. Le couple avait prévu de venir s’installer dans l’Hexagone pour des raisons médicales, Monsieur Veyrat étant très malade. Cet ingénieur en électricité n’a malheureusement pas eu le temps d’arriver en France et est mort dans son pays.

      De son côté, Lydia Veyrat – qui avait déjà quitté son emploi d’infirmière au Bénin pour s’installer en France – a décidé de venir seule en Savoie afin de régler la succession de son mari. Elle a rapidement trouvé un emploi d’aide-soignante et avait signé un CDI dans un Ehpad en octobre dernier.

      Pourtant, son renouvellement de titre de séjour a été refusé et la soignante a reçu une Obligation de quitter le territoire français (OQTF), au motif, notamment, qu’elle ne serait pas assez intégrée à la société française.

      Le recours déposé par son avocat Me Didier Besson devant le tribunal administratif de Grenoble avait été rejeté lundi.
      Découragement

      « Mme Veyrat commençait vraiment à se décourager. Moi, je lui disais de tenir bon car je voyais l’ampleur de la couverture médiatique de l’affaire », a-t-il déclaré à InfoMigrants.

      Selon lui, « c’est vraiment le fait que Mme Veyrat soit soignante qui a débloqué les choses ». « J’ai d’autres cas de personnes [dans la même situation] qui sont aberrants » mais qui ne reçoivent pas de réponse favorable, souligne le conseil.

      « Les services de la préfecture de Savoie prendront l’attache de Madame Guinnou veuve Veyrat aujourd’hui pour formaliser cette décision », affirme le communiqué commun de Marlène Schiappa et d’Olivier Veran,

      Didier Besson, lui, dit s’attendre à ce que la préfecture « traîne la patte comme d’habitude ». « Il manque toujours un papier, après ils nous renvoient sur leur site. Il faut parfois que j’accompagne des personnes à la préfecture pour qu’ils acceptent d’enregistrer leur dossier », déplore-t-il. « Mais là, ils ne vont pas voir le choix, ils vont devoir plier. »

      https://www.infomigrants.net/fr/post/28801/lydia-veyrat-aide-soignante-beninoise-menacee-d-expulsion-va-obtenir-u

    • voir aussi :

      Finalement, Lydia Veyrat, infirmière béninoise venue en France pour y suivre son mari français et décédé depuis, travaillant en France comme aide-soignante auprès de patients COVID, ne sera pas expulsée ! La Préfecture de Savoie, devant la bronca sur les réseaux sociaux sans doute, lui remet une carte de séjour.

      https://seenthis.net/messages/888552

  • Piètres conditions de travail, rémunérations faibles... l’aide aux personnes âgées ne parvient plus à recruter, Francine Aizicovici
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/03/06/l-aide-aux-personnes-agees-en-souffrance_5432155_3234.html


    Une aide soignante et la résidente d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, à Paris, le 20 septembre 2017. Céline Gaille / HansLucas

    Embaucher un aide-soignant ou une auxiliaire de vie sociale est une gageure. Cette situation sociale tendue génère de la « souffrance au quotidien ».

    « Chez une personne âgée valide, le matin, je devais en une demi-heure l’aider à sa toilette, préparer son petit-déjeuner, mettre ses médicaments dans le pilulier, faire son lit et, si j’avais le temps, passer un coup de balai », raconte Annie (le prénom a été modifié), qui explique à quoi ressemblaient ses journées. Et si l’ex-auxiliaire de vie sociale pour une association des Vosges dépassait la demi-heure, elle n’était « pas payée plus, bien sûr. En revanche, la personne payait le dépassement à l’association » .

    L’aide aux personnes âgées et/ou dépendantes se concentre au moment du lever, des repas et du coucher de la personne. Il faut tout faire vite. Faute de personnel suffisant, les salariés s’épuisent. Annie a fini par quitter cet emploi où l’amplitude de sa journée s’étendait de 8 heures à 20 heures, coupée en quatre tranches de deux heures de travail. « Je faisais au moins 100 kilomètres par jour pour aller dans huit petits villages, se souvient-elle. C’était très fatigant. » Depuis le 1er janvier, elle travaille dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), au sein d’« une bonne équipe ».

    Le secteur des services aux personnes âgées manque cruellement de personnel, et offre de piètres conditions de travail et des rémunérations faibles. A la suite d’une #grève très suivie, le 30 janvier 2018, dans les #Ehpad, le gouvernement avait annoncé le déblocage progressif de 360 millions d’euros pour ces établissements, une enveloppe de 100 millions pour les services d’aide à domicile ainsi qu’une loi autonomie avant la fin de 2019. Mais ces mesures n’ont pas suffi à apaiser les tensions.

    « Pression budgétaire »

    La loi autonomie arrivera « bien trop tard », estime Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) : « Nous parlons de ces problèmes depuis au moins quinze ans. Nous attendons des mesures très urgentes et concrètes. » Le financement public de l’aide à l’autonomie des personnes âgées représentait, en 2016, 22,8 milliards d’euros. Il faudrait « 10 milliards d’euros supplémentaires », selon lui, pour faire face aux besoins. « La pénurie grandissante de personnel résulte d’une pression budgétaire due aux choix des conseils départementaux et aux lois de financement de la sécurité sociale qui, depuis trois décennies, visent à raréfier les ressources du secteur », accuse Evelyne Rescanieres, secrétaire générale de la fédération CFDT Santé-sociaux.

    Or, il faut préparer l’avenir car avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes en perte d’autonomie devrait passer de 1,255 million actuellement à 1,6 million en 2030 et 2,45 millions en 2060. Selon le site Emploipublic.fr, 300 000 emplois nouveaux seraient à pourvoir dans les onze ans qui viennent.

    Cela n’ira pas de soi. L’enquête de Pôle emploi sur les besoins en main-d’œuvre 2018 révèle, en effet, que les Ehpad s’attendaient à rencontrer des difficultés dans 47 % de leurs projets de recrutement. Cette proportion montait à 58 % pour les aides-soignants et à 83 % pour les médecins coordinateurs. Dans l’aide à domicile et l’aide ménagère, associations, entreprises, organismes publics et plates-formes numériques anticipaient 76,8 % de recrutements difficiles (contre 70 % en 2017 et 60,6 % en 2016) alors que pour l’ensemble des projets d’embauche, la moyenne était de 44,4 %.

    Peu de candidats recrutés

    Aides à domicile, aides ménagères et aides soignants figurent en outre dans le Top 10 des métiers les plus recherchés. Un sondage réalisé en 2018 par le principal réseau d’aide à domicile, l’UNA, auprès de 256 de ses structures, indique, selon l’agence AEF, que 47 % d’entre elles n’ont pu pourvoir leurs postes vacants.

    Pôle emploi incite pourtant les chômeurs à se tourner vers ces professions « en tension », qui ne demandent pas toutes des qualifications. Mais « l’aide à domicile est un métier difficile, compliqué, où un certain comportement est attendu de la part des intervenants », tels la disponibilité, le sens des responsabilités, etc., prévient Quentin Duvivier, responsable du développement des relations avec les entreprises à Pôle emploi. Or, « certains demandeurs d’emploi imaginent qu’il suffit de s’être occupé de sa grand-mère pour savoir s’occuper d’une autre personne âgée… »

    « Beaucoup de candidats sont reçus par nos associations mais peu sont recrutés, observe Hugues Vidor, directeur général d’Adessadomicile, qui réunit 350 structures employant 30 000 salariés. Nos postes à pourvoir sont en concurrence avec ceux de secteurs comme l’industrie où les salariés sont à temps plein et n’ont pas de déplacements à faire. » « C’est difficile de valoriser un travail fragmenté, mal rémunéré, où les conseils départementaux nous imposent des temps d’intervention de plus en plus courts , ajoute-t-il. Passer d’une heure à quinze minutes pour faire la même chose, cela veut dire aller directement aux gestes utiles sans accompagnement social de la personne. »

    « Du travail à la chaîne »

    Dans les Ehpad, « quand il n’y a qu’une infirmière pour 40 personnes, le minimum est fait, mais la qualité du #soin relationnel n’y est pas, regrette une ancienne infirmière. Ça fait perdre le sens de notre métier. On n’a plus le temps de faire de l’individualisation. Cela devient du travail à la chaîne ».
    Pour une grande partie des salariés, les rémunérations avoisinent le smic ou lui sont « inférieures à domicile, où les emplois sont à #temps_partiel », précise M. Champvert. Julien Jourdan, directeur général de la Fédération des services à la personne (Fédésap), qui représente des entreprises du secteur, estime que le système actuel des aides « ne permet pas de rémunérer [les salariés] à un juste niveau ».

    Selon les départements, les aides varient entre 17 et 25 euros de l’heure. Les niveaux les plus bas ne couvrent pas le coût de revient des services aux personnes âgées et les hausses des tarifs sont maigres. « Pour 2019, le ministère de l’économie a fixé cette augmentation à 1,42 % quand le smic a été réévalué de 1,5 %, déplore Olivier Péraldi, directeur général de la Fédération du service aux particuliers (FESP). Cela fait cinq ans que l’augmentation est inférieure à celle du smic. »
    « On ne peut pas dire, comme le fait le gouvernement et comme le désire une très grande partie des gens, que la priorité est le maintien à domicile des personnes âgées et ne pas mettre en face les financements qui vont avec », résume Aline Mougenot, secrétaire générale adjointe à la CFTC Santé-sociaux.

    « Souffrance au quotidien »

    En établissement, les conditions de travail sont parfois difficiles, y compris psychologiquement. « Dans mon Ehpad, qui accueille 200 résidents dépendants, dont 20 souffrent de la maladie d’Alzheimer, un poste d’#aide-soignante et un d’infirmière ont été supprimés en un an et demi, calcule Isabelle (prénom modifié), infirmière dans un établissement de l’Aude. Mais on n’a pas moins de résidents ! Nous gérons beaucoup de fins de vie, avec des soins palliatifs, sans avoir le temps nécessaire pour le relationnel. On va accorder peut-être cinq minutes à une personne qui sait qu’elle va mourir. C’est de la maltraitance ! » « Heureusement, la bonne cohésion de l’équipe nous sauve, ajoute-t-elle. Mais si les conditions ne changent pas, je partirai. Je n’ai pas envie d’être dégoûtée de mon métier. »

    Dans ce climat pas vraiment porteur, une délégation des dix syndicats du secteur et de représentants de l’AD-PA a tenté, jeudi 21 février, de se rendre à l’Elysée pour remettre à Emmanuel Macron 30 000 « cartes-pétitions » revendiquant en urgence l’augmentation des salaires et des effectifs. Face au refus de les recevoir, l’intersyndicale et l’AD-PA ont dénoncé un « mépris vis-à-vis des salariés » et promis de revenir.

    Cette situation sociale tendue, aggravée par la suppression des contrats aidés, génère de la « souffrance au quotidien » pour les personnes âgées et leur famille comme pour les salariés. Conséquence : une mauvaise image continue de coller aux services d’aide aux personnes âgées qui, par ricochet, voient leur pénurie de candidats à l’embauche s’aggraver. Et ce, alors que les premières générations de papy-boomers atteindront, en 2030, 85 ans, âge moyen d’entrée en Ehpad aujourd’hui.

    Le président du Haut conseil du financement de la protection sociale, Dominique Libault, doit remettre d’ici à la fin mars au premier ministre, Edouard Philippe, ses propositions sur l’amélioration de la prise en charge des personnes dépendantes, issues de la concertation conduite depuis le mois de septembre 2018. L’amélioration de leurs conditions d’accompagnement devrait en faire partie. En attendant, l’union Aide à domicile en milieu rural (ADMR, 2 700 associations locales d’aide à domicile employant 94 000 salariés), a lancé le 4 février sa première campagne de publicité radio-télé, sur le thème : « Les gestes qui vous aident sont les liens qui nous unissent. » Des liens, à l’évidence, de plus en plus fragiles.

    #femmes #travail #vieilles #vieux #horaires_en_coupures #care

  • Les #accidents_du_travail explosent dans l’aide aux soins et à la personne Un secteur aux marges du droit du travail
    http://terrainsdeluttes.ouvaton.org/?p=6067

    Comme le pointe le rapport de la caisse d’assurance maladie (CNAM), les accidents du travail augmentent à nouveau en France après quelques années de baisse. 621 111 personnes ont été […]

    #Abus_patronaux #Analyses #Nos_enquêtes #Santé_au_travail #aide-à-domicile ;_conditions_de_travail ;_personnes_âgées #inspection_du_travail

    • De manière globale, et en forçant un peu le trait, on peut dire que le droit du travail est calibré pour des situations de travail plutôt de type « industriel », c’est-à-dire que la réglementation suppose implicitement l’existence d’une unité de lieu, de temps, de collectivité de travail. Evidemment, dans le cas des services à la personne, c’est la dispersion – géographique, temporelle et organisationnelle – qui est la règle. De plus, le vocabulaire du droit du travail lui-même est marqué par cette logique industrielle. Par exemple, on parle de « port de charge » et de « manutentions manuelles ». Indéniablement, il y a port de charge et manutention lorsque l’on aide une personne âgée à passer de son fauteuil à son lit ou lorsqu’on l’aide à se relever après une chute. Mais, la « charge » en question n’est pas – ou pas seulement – un poids inerte, une « charge-objet », comme le serait une caisse de légumes ou un bloc de béton. C’est également une « charge-sujet », potentiellement sensible au toucher, qui peut opposer (parfois légitimement) une résistance à la manipulation. Il faut donc trouver une méthode d’application de la réglementation tenant compte de ces caractéristiques particulières. Car la réglementation reste pertinente et doit être appliquée. La Sécurité Sociale a publiée récemment, en octobre 2012, une recommandation (R. 471) sur la Prévention des Troubles Musculo-Squelettiques dans les activités d’aide et de soins en établissement (comme les maisons de retraite) qui, précisément, prend en compte le fait qu’on a affaire à une « charge vivante ». Les préconisations qui sont faites – et qui ont un caractère potentiellement contraignant – sont intéressantes et visent à améliorer concrètement les conditions de travail. Mais il y a loin de la recommandation à la mise en œuvre pratique, à son appropriation, sur le terrain par les structures employeuses des « services à la personne ».

  • Dans les maisons de retraite, manque de moyens et conditions de travail dégradées rendent la situation « explosive »
    « On marche sur la tête ! », alerte une #aide-soignante. Tandis que les #baby-boomers quittent le monde du travail et que la population vieillit, les réductions budgétaires dans les #maisons_de_retraite déstabilisent le travail des personnels. Les repas, les soins, l’hygiène, de même que les activités proposées aux #personnes_âgées subissent de plein fouet ces politiques d’austérité – quand il s’agit du public – ou de « préservation des marges » – lorsqu’il s’agit du privé. Pour quelles conséquences ? Une pression devenue insupportable pour les soignants, et des conditions d’accueil à la limite – voire au delà – de la #maltraitance pour les résidents. Témoignages sur une situation explosive.

    http://www.bastamag.net/Dans-les-maisons-de-retraite-manque-de-moyens-et-conditions-de-travail
    Fight for your right to party
    https://youtu.be/mZ6ZrJUNQG4

    • « Une nouvelle direction est arrivée en 2015. Elle a renvoyé les remplaçantes qui étaient en CDD. Puis les a reprises, mais uniquement sur des contrats au mois. Quand nous nous sommes mises en grève, cela faisait un an que nous subissions cela. Nous avions une collègue qui était en CDD depuis neuf ans, comme agente de service hospitalier. La direction l’a jetée, sachant qu’elle était sur le point de finir une validation des acquis de l’expérience pour acquérir le grade « d’aide-soignante », souligne Anne. C’est ce jour-là que les salariés se sont mis en grève. Il y avait alors six personnels de soins au lieu des neuf normalement nécessaires, « pour 83 résidents à lever, faire manger, laver… ». Soit une aide-soignante pour 14 personnes de plus de 85 ans.

    • « Nous n’avons pas accès à ces conventions. Nous ne savons pas ce que les tutelles, ARS et conseils départementaux, donnent à nos établissements, précisent Guillaume Gobet et Albert Papadacci, cuisiniers en maison de retraite privée et responsables syndicaux dans deux des plus importants groupes privés à but lucratif du secteur. Ce que nous savons, c’est que le bénéfice est le nerf de la guerre. Nos groupes maintiennent leurs marges opérationnelles en jouant sur les CDD. Les directions réduisent aussi de plus en plus les coûts sur l’entretien, le matériel – comme les gants – et la cuisine. On fait baisser les coûts en cantine, avec une dégradation des produits et des rations. Face à cette situation, nous n’avons pas de soutien des tutelles. Car moins elles donnent, mieux elles se portent. »

    • Dans un établissement de soins de suite de la banlieue ouest (ce n’est pas une maison de retraite mais c’est plein de personnes âgées), un copain visite sa maman. Partout à l’étage des affiches apposées par le personnel :

      Nous sommes ici pour vous soigner, pas pour nous faire aggresser.

      Ambiance…

  • « L’Europe doit abandonner l’euro »
    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2015/03/02/l-europe-doit-abandonner-l-euro_4585513_3232.html

    W.Streeck, tribune du Monde, 2/03/2015

    Peut-être les artistes bruxellois de la négociation réussiront-ils à immobiliser la Grèce dans un premier temps et à faire passer l’été à l’euro. Cela produira peut-être l’effet collatéral désiré : provoquer la scission de Syriza et ruiner sa réputation auprès des électeurs

    #euro #Syriza #Grèce #Europe

    • C’est de début mars, mais je voulais l’archiver. Voilà :

      Si tout se passe bien, nous assistons au commencement de la fin de l’union monétaire européenne. « Si l’euro échoue, l’Europe échoue », disait Angela Merkel. Aujourd’hui, c’est exactement l’inverse. L’euro est en train de détruire l’Europe. Si l’euro échoue, il se pourrait quand même que l’Europe finisse par ne pas échouer. Ce n’est pas certain : les blessures qu’a causées l’union monétaire sont trop profondes.

      Avec l’arrivée au pouvoir en Grèce du parti de gauche Syriza, en alliance avec un parti groupusculaire d’extrême droite, le projet monstrueux consistant à greffer une monnaie commune à des sociétés ayant des économies différentes semble devoir connaître la fin qu’il mérite.

      On en avait pourtant fait, des tentatives ! On avait commencé par installer à la place des gouvernements élus des technocrates issus des bureaucraties financières privées et publiques, mais les peuples ingrats les ont renvoyés chez eux. L’ère de la docilité européenne est ainsi révolue : les institutions démocratiques ont rejeté les implants bruxellois. Et cela va continuer : en Espagne, le parti frère de Syriza, Podemos, enverra aux pâquerettes le Partido Popular.

      Personne ne peut savoir ce qui va sortir des négociations que l’on vient d’entamer. Syriza a des avis divergents quant à savoir si la Grèce doit rester ou non dans l’euro. Beaucoup de choses sont possibles. De l’autre côté, l’Italie et l’Espagne jurent qu’elles soutiennent la politique commune de « réforme » et de « sauvetage » – mais il est clair qu’elles réclameront pour elles les concessions que négociera la Grèce. Cela va coûter très cher au Nord. Syriza en chien démineur, chargé de repérer jusqu’où l’Allemagne est prête à aller pour préserver la cohésion de l’union monétaire ?
      Restrictions humiliantes

      Peut-être les artistes bruxellois de la négociation réussiront-ils à immobiliser la Grèce dans un premier temps et à faire passer l’été à l’euro. Cela produira peut-être l’effet collatéral désiré : provoquer la scission de Syriza et ruiner sa réputation auprès des électeurs. En menant à bien l’assainissement fiscal de la Grèce, puis celui, dès lors inévitable, des autres pays débiteurs, on n’aura rien gagné.

      Même si l’économie grecque se stabilisait à son niveau actuel, les gigantesques disparités que les « réformes » ont fait naître entre l’Europe du Nord et du Sud persisteraient, et cela vaudrait aussi pour l’Italie et pour l’Espagne si elles se rendaient « compétitives » au sens où l’entendent les normes de la Banque centrale européenne (BCE) et de l’Union européenne (UE).

      On réclamerait alors des compensations par redistribution ou par « relance » de la croissance, sous forme de crédits ou d’aides structurelles relevant de la politique régionale, ou du moins le rétablissement des relations telles qu’elles étaient avant la crise et le sauvetage : un conflit de redistribution déplacé au niveau des relations entre Etats. Et cette revendication, c’est à l’Allemagne qu’on l’adresserait, en même temps qu’à quelques pays de plus petite taille, comme les Pays-Bas, l’Autriche et la Finlande – la France intervenant alors comme « médiateur ».

      Ainsi débuterait un conflit durable qui provoquerait l’éclatement de l’Europe. L’Allemagne, le Nord, ne pourraient échapper aux négociations prévisibles. On peut s’attendre à ce que les bailleurs considèrent que les paiements qui leur sont réclamés sont trop élevés tandis que les pays bénéficiaires jugeront que l’argent ne coule pas assez, et seulement au prix de restrictions humiliantes de leur souveraineté.

      Ce conflit structurel existera tant que l’union monétaire subsistera. Si celle-ci ne se brise pas sur le conflit en question parce que les gouvernements s’accrochent obstinément à leur « expérimentation frivole » ou si le secteur allemand de l’exportation croit devoir s’accrocher jusqu’à la victoire finale à son « idée européenne », alors cet idéalisme provoquera l’éclatement de l’Europe. Mettre un terme, dès que possible, à l’union monétaire sous sa forme actuelle est donc avant tout dans l’intérêt, sinon économique, du moins politique de l’Allemagne.

      Haïe

      Dans les pays de l’espace méditerranéen, y compris en France, l’Allemagne est aujourd’hui plus haïe qu’elle ne l’a jamais été depuis la seconde guerre mondiale. L’injection financière de la BCE en janvier n’a eu qu’un seul effet certain : le sentiment de triomphe qu’a provoqué dans le sud de l’Europe la défaite allemande au conseil de la banque. Le héros de l’Italie s’appelle Mario Draghi, parce qu’on considère qu’il a pris les Allemands par la ruse et les a humiliés.

      Le dévalement européen de l’Allemagne est en bonne partie un héritage à long terme de cet « Européen passionné » qu’était Helmut Kohl. Quand des accords menaçaient d’échouer en raison d’un désaccord sur la répartition des frais, Kohl se montrait toujours disposé à payer la facture. Ce qui peut avoir été dans l’intérêt de l’Allemagne pour des raisons historiques, le folklore politique l’a porté au compte de convictions personnelles de Kohl, mais cette attitude a suscité des espoirs qui sont allés au-delà de son mandat.

      Pour les successeurs de Kohl de tous bords, les intérêts de l’économie exportatrice allemande et de ses syndicats justifieraient à eux seuls qu’ils fassent tout en vue de répondre à ces attentes et, le cas échéant, qu’ils financent seuls la cohésion de l’union économique européenne. Or cela, ces héritiers n’en sont plus capables.

      L’approfondissement du processus d’intégration, souhaité par nombre de bons Européens, a eu pour conséquence sa politisation et la naissance d’une opinion publique qui a mis un terme au « consensus permissif » sur la politique européenne d’intégration.

      Contrairement à ce que l’on expliquait, la vie publique européenne ne s’est pas installée sous forme de politique intérieure, mais d’une politique extérieure dans laquelle dominent les conflits entre Etats et où l’objectif d’une union sans cesse plus étroite, auquel on ne prêtait jadis qu’une attention secondaire, est devenu de plus en plus contesté. Au sein de l’union monétaire, les indispensables subventions d’intégration ont atteint un tel niveau qu’elles dépassent largement les possibilités de l’Allemagne.

      On peut considérer que le gouvernement Merkel serait volontiers disposé à faire payer un prix très élevé à ses contribuables pour imposer son « idée européenne » d’un marché intérieur supranational sans dévaluation pour les machines et les automobiles allemandes, et l’on peut en dire autant, même si c’est pour des raisons en partie différentes, de l’opposition rassemblée au Bundestag. L’émergence en 2013 du parti anti-euro AfD dans la politique intérieure allemande ne l’a toutefois pas permis.

      Catastrophe géostratégique

      Comme le consensus permissif a lui aussi toujours été lié à un système où tout ce qui devait servir l’intégration n’était pas connu du public, on pourrait continuer à travailler pour dissimuler les concessions allemandes dans de quelconques galeries technocratiques creusées en profondeur, ce à quoi se prêterait en particulier très bien la BCE. Mais cela aussi est devenu impossible avec les élections en Grèce.

      Les tiraillements auxquels on peut s’attendre autour du « programme de croissance », des remises de dettes et de la mutualisation des risques, d’une part, des droits d’entrée dans les gouvernements, de l’autre, se dérouleront sous l’impitoyable lumière de l’opinion publique, sous les cris d’alarme ou de triomphe, selon la situation, de l’AfD en Allemagne et de presque tous les partis dans les pays débiteurs.

      L’union monétaire a réduit à néant la politique européenne allemande et les succès qu’elle avait obtenus au fil de longues décennies. Si nous ne faisons pas attention, elle peut aussi à présent avoir des conséquences catastrophiques sur le plan géostratégique. La Russie est prête à accorder à la Grèce les crédits qui lui seraient refusés par l’UE.

      La même idée pourrait s’appliquer en cas de faillite de l’Etat grec ou si ce pays était exclu de l’union monétaire européenne. Si l’on en arrivait là, on se retrouverait face à une asymétrie aussi spécifique qu’unique : de la même manière que l’UE, encouragée par les Etats-Unis, tente de mettre un pied en Ukraine, la Russie pourrait travailler à établir en Grèce une tête de pont vers l’Europe de l’Ouest.
      L’instant de vérité

      Chacune des deux parties se verrait alors contrainte de remplir un puits sans fond dans la zone d’influence de l’autre (les Grecs auraient ici motif de s’étonner que Bruxelles, Berlin et compagnie aient encore de l’argent pour une Ukraine largement oligarchique, mais pas pour une Grèce dirigée par un gouvernement de gauche). De la même manière que l’Ouest a voulu étendre son emprise en direction de Sébastopol, avec son port militaire russe vers les mers chaudes, la Russie pourrait vouloir pousser la sienne vers l’Egée, espace de manœuvre de la 6e Flotte des Etats-Unis. Ce serait un retour aux conflits géostratégiques de l’après-guerre, qui virent, en 1946, l’intervention des troupes britanniques dans la guerre civile grecque.

      L’instant de vérité est arrivé pour une politique d’intégration européenne qui a échappé à tout contrôle, dont le moteur est le capital financier. Pour que l’Europe ne se transforme pas en un marécage d’incriminations réciproques entre nations, avec des frontières ouvertes et en courant à tout moment le risque d’être submergée de l’extérieur, il faut démanteler ce monstre qu’est l’union monétaire.

      Le démantèlement doit se dérouler sur la base du contrat social, avant que l’atmosphère ne soit trop empoisonnée pour cela. Comment s’y prendre : voilà ce dont on doit débattre. Il faut permettre aux pays du Sud une sortie en douceur, peut-être au sein d’un euro du Sud qui n’exigera pas de leur part des « réformes » détruisant leurs sociétés.

      Quant à ceux qui, au début de l’union monétaire, leur ont fait l’article en leur promettant qu’ils pourraient jouir sans fin des crédits issus des subprimes, ils doivent le payer, tout comme ceux qui savaient de quoi il retournait et n’ont rien dit. Au lieu de l’étalon-or de fait que l’on utilise dans le rapport avec l’Europe du Nord, il faut mettre en place un régime monétaire qui permette la flexibilité tout en excluant l’arbitraire. Les économistes sont de plus en plus nombreux à le réclamer, et l’on compte parmi eux des poids lourds comme l’Américain Alan Meltzer. Nous devons faire ce qui est nécessaire – non pas pour sauver l’euro, mais pour sauver l’Europe (Traduit de l’allemand par Olivier Mannoni).

      Wolfgang Streeck (Sociologue de l’économie et professeur à l’université de Cologne

    • Merci !
      Suis en train de lire son Du temps acheté, la crise sans cesse ajournée du #capitalisme démocratique sur le passage de l’état- fiscal à l’#état_débiteur, qui comporte pas mal de notations intéressantes (malgré le démocratisme un peu creux de l’auteur : "opinion publique, « citoyen », et toute la camelote associée). Amusé de voir les gvts de « #grande_coalition » décrits comme les plus fonctionnels pour obvier à l’illégitimité de la représentation politique et assurer la confiance_des_marchés (l’état débiteur est tributaire du citoyen -isolé et conduit à l’#abstention faute de pouvoir peser par le vote - et l’émergence d’un « peuple des gens du marché », comme le définit l’auteur). L’union européenne fait directement penser à cela, comme le cas allemand, et demain le Grec (?) où déjà pas mal de Pasok a intégré Syriza avant des alliances post électorales à venir. La crise radicale du PS français a des chances de se régler de la même façon. Malgré le bipartisme imposé par une constitution présidentialiste.
      #aide-en-tant-que-punition dit #Wolfgang_Streeck, une punition administré par une politique de la #dette qui est #interétatique. Le constat ressassé de l’"impuissance de l’état" est mis en en cause par l’existence de ce nouveau pouvoir des états.

      Ai bien aimé les passages où il renvoie dos à dos les caricatures nationalistes (Grecs et métèques sont des feignants à rédimer, Merkel et Allemagne, les nouveaux « nazis » de l’Europe), un type de vision destinées ( de Sapir à Mélenchon) à louper le pouvoir interétatique

      A-t-on accordé assez d’attention aux propos de Varoufakis indiquant que la « crise grecque » prélude à une (contre) réforme de l’#état-providence français ? A une homogénéisation de fait de la « politique sociale » européenne qui réinitie l’axe franco-allemand ?

  • Travailler plus pour soigner plus ? Entretien avec une soignante de l’hôpital de la Mère Quantile.
    http://terrainsdeluttes.ouvaton.org/?p=3352

    Avec ses blouses blanches toujours pressées, ses lumières vives, ses chambres closes, son jargon incompréhensible au commun des mortels, l’hôpital évoque à celui qui en bénéficie un lieu d’efficacité scientifique, de confiance aveugle dans la force de la médecine et avouons-le d’une certaine inhumanité au service de notre santé. L’infirmière, …

    #Chronique_Hôpital #Nos_enquêtes #aide-soignante #care #hôpital #santé #soins #T2A

  • Aide-à-domicile : travail officiel, travail officieux
    http://terrainsdeluttes.ouvaton.org/?p=3341

    Comme beaucoup d’étudiantEs, cet été là, je dois trouver un petit boulot me permettant de compléter mes revenus pendant l’année scolaire. Une amie me parle alors d’une association recherchant des « femmes de ménage » pour les remplacements estivaux. Bercée par l’idéal qu’il n’y a pas de sous-métiers et la …

    #Abus_patronaux #Nos_enquêtes #aide-à-domicile ;_conditions_de_travail ;_personnes_âgées

  • Harper government using “humanitarian” aid to boost Canada’s global mining companies - World Socialist Web Site

    On en apprend de belles. Les miniers canadiens sont aussi très actifs dans le Caucase, en Arménie et dans les territoires occupés autour du Haut-Karabakh, et enfin en Asie centrale au Tadjikistan si je m souviens bien.

    Sinon, on commence à comprendre pourquoi en Afrique, on préfère de loin les Chinois aux occidentaux... Les Chinois ne sont pas tellement philanthropes (Ils sont clairement là pour faire des affaires, et leur attitude commerciale peut-être brutale, mais, entend-on en Afrique, au moins il n’y a pas l’hypocrisie de l’aide.

    http://www.wsws.org/en/articles/2013/02/11/cida-f11.html

    Harper government using “humanitarian” aid to boost Canada’s global mining companies
    By Louis Girard
    11 February 2013

    At the behest of Canada’s Conservative government, the Canadian International Development Agency (CIDA) is working with Canada’s mining companies to silence widespread opposition from people working at, or living near, many of their Latin American and African operations.

    The people affected by these projects accuse major Canadian mining corporations of depleting their rivers and contaminating their water; causing health problems (skin disease, cancer, respiratory problems); offering miserable working conditions; and paying miniscule royalty amounts to local governments despite huge profits. This opposition threatens investors’ returns as sometimes it compels Canadian miners to delay or cancel projects. Frequently, it is violently repressed by police or company-hired goons.

    #matières-premières #mines #canada #aide-au-développement

  • Les fruits et légumes à portée de main
    http://www.lanouvellerepublique.fr/Vienne/Loisirs/24H/n/Contenus/Articles/2013/02/06/Les-fruits-et-legumes-a-portee-de-main
    via Jo D. #incroyables-comestibles #aide-municipale

    L’automne dernier, le projet a été soumis au budget participatif de Poitiers Sud. « Dans un premier temps, nous avons été retoqué, relève Cédric Sanglier. Puis, en soulignant qu’il s’agissait bien d’un investissement, nous avons reçu l’aval technique. Nous sommes inscrits pour le vote définitif lors du conseil municipal de fin mars qui adoptera les budgets participatifs. »

    Une somme de 5.000 € a été budgétée. Elle permettra d’engager les semis et les premières plantations. « Un premier état des lieux a été effectué avec Michel Merlet, le directeur du service des espaces verts, dit Cédric Sanglier. Il est venu voir où nous pourrions faire les semis et les plantations. »

    Dans plusieurs villes et villages de France les municipalités prennent part au projet des incroyables comestibles. Il y a de l’espoir ! :)

  • L’#aide-alimentaire en hausse
    En France, 3,2 millions de personnes sont soutenues - LeMonde.fr
    http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2011/09/19/en-france-3-2-millions-de-personnes-sont-soutenues_1574277_3224.html

    Selon cette étude, la part des chômeurs a pratiquement doublé depuis 2006, passant de 10 % à 19 %. La proportion de personnes seules avec des enfants est passée de 25 % à 53 %.

    Outre les 3,2 millions de personnes qui ont recours à l’aide alimentaire de façon permanente ou passagère, on estime qu’en France, plus d’un adulte sur dix (12 %) vit dans un foyer en situation d’insécurité alimentaire pour raisons financières. Cette notion, encore peu étudiée, est trop souvent uniquement assimilée au recours à l’aide alimentaire. Or, elle regroupe une population plus large, qui estime ne pas avoir assez à manger souvent ou parfois, ou avoir assez à manger mais pas toujours les aliments souhaités, par manque d’argent.