#al_qard_al_hassan

  • Guerre au Liban : l’impact social de la destruction des banques du Hezbollah par les frappes israéliennes
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/11/24/guerre-au-liban-l-impact-social-de-la-destruction-des-banques-du-hezbollah-p


    Un article de Laure Stefan #Liban #Hezbollah #Al_Qard_Al_Hassan #finance #micro-crédit

    Le ciblage de l’organisme social du mouvement chiite a plongé dans l’incertitude des centaines de milliers de clients, débiteurs ou épargnants, en majorité issus de la communauté chiite. Le flou demeure sur ce qu’il est advenu des réserves de devises et d’or.
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    L’armée israélienne accuse Al-Qard Al-Hassan d’être impliquée « dans le financement des opérations terroristes du Hezbollah ». L’association est, depuis 2007, sous sanctions de Washington, qui l’accuse de blanchiment d’argent. Elle est enregistrée auprès des autorités libanaises, mais opère en dehors du circuit financier. Toutes les branches – une trentaine au total – sont fermées aujourd’hui.

    Explosion des crédits
    L’organisation de microfinance n’est « ni une banque ni un outil de financement du Hezbollah », dit Aurélie Daher, professeure de sciences politiques et autrice de l’ouvrage Le Hezbollah. Mobilisation et pouvoir (PUF, 2014). Derrière son ciblage, « le calcul israélien semble être de détruire le lien entre le Hezbollah et sa base, d’instiller le doute sur sa capacité à restituer les cautions et, plus largement, sur ce que le mouvement pourra entreprendre en matière de reconstruction », estime-t-elle. Après la guerre de 2006, le Hezbollah était rapidement intervenu dans la reconstruction, avec des fonds iraniens.

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    Au début des années 2000, Al-Qard Al-Hassan est la plus grande organisation de microcrédits au Liban. Le montant maximal d’un prêt, à taux zéro, selon les principes de la finance islamique, est de 5 000 dollars. La crise financière de 2019 lui fait prendre une tout autre taille : quelque 200 000 crédits sont octroyés cette année-là, selon l’ancien mensuel économique Le Commerce du Levant, contre environ 9 000 une dizaine d’années plus tôt. De nouvelles branches voient le jour.

    « Les banques ne sont pas fonctionnelles »
    « Avec la crise, et parce que les banques ont volé l’argent des gens, beaucoup d’habitants de Baalbek ont eu recours à Al-Qard Al-Hassan. L’argent obtenu, en hypothéquant de l’or, leur a permis de payer des factures, de manger, d’ouvrir un petit commerce… Des personnes ont déposé leur épargne pour qu’elle soit en sécurité, dit un notable de la ville du nord-est du Liban, critique du Hezbollah, qui a requis l’anonymat. Cela a rendu service à de nombreux foyers. Mais ce n’est pas de la charité ! Et le fait est que la banque centrale [libanaise] n’a aucune visibilité sur les volumes financiers brassés. »

    Un entrepreneur originaire de la région de Sour, dans le Sud, qui s’exprime également sous le couvert de l’anonymat, confirme l’attractivité de la structure : « Même pour installer des panneaux solaires, des habitants du Sud ont sollicité Al-Qard Al-Hassan, car les banques ne sont pas fonctionnelles. » Selon cet homme, qui soutient le Hezbollah dans son combat contre Israël, bien qu’il soit éloigné de ses vues politiques, l’institution a été bombardée afin de « casser le lien social. Le même but est poursuivi quand des secouristes sont tués : il s’agit de briser l’espoir des gens qu’ils puissent obtenir de l’aide ». Il ne croit pas, pourtant, au délitement. « Les chiites sont en train d’être matraqués par Israël. Cela va renforcer l’esprit de résistance », prophétise celui qui souhaite surtout que la guerre en cours « soit la dernière ».