#allélophagie

  • Florence Burgat : « L’institution de l’alimentation carnée reflète un désir très profond de l’humanité »
    https://reporterre.net/Florence-Burgat-L-institution-de-l-alimentation-carnee-reflete-un-desir-

    Pourquoi l’humanité met-elle à mort des animaux pour les manger ? Pourrait-elle s’en passer ? Comment et pourquoi ? La philosophe Florence Burgat réfléchit aux raisons de la violence faite aux animaux, guidée par le souci d’étendre leurs droits. Florence Burgat est philosophe, directrice de recherche à l’Inra, détachée aux Archives Husserl de Paris (ENS-CNRS). Ses recherches portent sur les approches phénoménologiques de la vie animale ; la condition animale dans les sociétés industrielles : le droit animalier (épistémologie juridique) ; l’anthropologie de l’humanité carnivore, à laquelle elle consacre son nouveau livre, L’humanité carnivore (Seuil).

    #entretien #Culture_et_idées #Animaux #élevage #marketing

    • Florence Burgat est philosophe, directeur de recherche à l’Inra, détachée aux Archives Husserl de Paris (ENS-CNRS).

      Directrice de recherche c’est pas français !?
      #vocabulaire

      Dans mon livre L’Humanité carnivore, je montre en quoi l’institution de l’alimentation carnée reflète un désir très profond de l’humanité, qui n’est bien sûr pas à entendre comme l’agrégat des individus, mais comme une entité qui prend conscience d’elle-même en se pensant contre l’animalité. La manducation [Ensemble des actions mécaniques qui constituent l’acte de manger, NDLR] des animaux ne répond plus depuis longtemps à une nécessité ; l’enjeu est métaphysique et identitaire dans cette violence très singulière qui ne consiste pas simplement à tuer, mais à manger, c’est-à-dire à absorber, digérer, excréter.

      L’horreur que nous inspire le cannibalisme confirme la spécificité de la violence propre à la manducation qui suit une mise à mort. Les anthropologues ont en effet mis au jour un « cannibalisme de gourmandise », où des hommes mangent d’autres hommes « parce c’est bon ». Il peut être curieux de penser que le cannibalisme nous répugne plus que la torture, qui constitue une situation où l’autre continue à être tenu pour un sujet qui doit répondre à une question. La manducation, qui implique un processus de décomposition, ravale celui qui est ainsi traité à un rang qui ne peut être comparé à aucun autre. Quoi de plus absolu que la manducation pour affirmer une forme d’anéantissement d’autrui ?

      #cannibalisme #viande #domination #manducation #allélophagie

    • Merci @marielle

      Faites-vous une distinction entre différents types d’élevages, de chasses ? N’y a-t-il pas notamment une différence à faire entre un élevage industriel et un élevage paysan ?

      
Les pratiques d’élevage incriminées dans le contexte de l’industrialisation — la séparation des animaux, la contention, les pratiques de mutilation — sont aussi anciennes que l’élevage. Par exemple chez les Romains, pour que les volailles grossissent sans bouger, on les mettait dans des poteries, puis dans des petites cages. Le processus est le même, seulement, il s’aggrave. L’élevage d’antan faisait en petit ce que l’élevage industriel fait en grand. La sélection génétique des animaux était réalisée par bricolage empirique, aujourd’hui elle utilise les outils de la génétique. Mais fondamentalement, l’élevage industriel n’a rien inventé. La différence tient dans des moyens scientifiques et techniques qui permettent à l’industrie de l’élevage d’enrôler dans son entreprise un nombre considérable d’animaux.

    • mouais, enfin c’est quand même un peu gênant de dire « on va remplacer l’alimentation carnée par de l’alimentation végétale industrielle mise en œuvre et diffuser par le marketing »

    • @Maïeul

      C’est d’autant plus « gênant »... que d’une part, ce n’est pas le propos de Florence Burgat.
      Et que, d’autre part, à l’heure qu’il est, de fait, l’on a massivement recours à une alimentation à la fois carnée et mise en oeuvre et diffusée par le marketing (mais pas que par le seul marketing : et c’est justement là où le bât blesse).

    • @Martin5 ce n’est pas le corps de son propos, mais ca y est quand même

      « La végétalisation de l’alimentation pourrait s’imposer pour des questions de survie d’une humanité extraordinairement nombreuse. Si ce renversement advient, je pense que la cuisine végane, les viandes végétales, la viande in vitro [fabriquée à partir de cellules musculaires d’animaux] pourraient tout à fait continuer à occuper la place de la viande. Grâce à ces similicarnés, nous pourrions passer à un autre régime tout en pensant que nous mangeons toujours des animaux. Le marketing pourra en l’occurrence jouer un rôle déterminant, comme il joue actuellement un rôle déterminant dans l’édification de nos représentations de la viande que nous mangeons, en ménageant sciemment une distance avec les animaux dont elle provient. C’est lui qui forge de bout en bout nos représentations de la viande, de l’animal. »

    • @Maieul

      J’en conviens, et il y a même cette phrase juste avant :

      C’est dans le dernier chapitre de mon livre que je tente de montrer comment l’humanité pourrait changer de régime. Ce changement ne serait pas motivé par un sursaut moral ou éthique, mais pourrait être la réponse aux problèmes environnementaux et aux injustices causés par l’élevage.

      qui suffit à elle seule à me laisser perplexe (opposer éthique et réponse aux injustices, par exemple ; parler de « sursaut » moral ou éthique ; ou justifier l’abandon du carnisme par la question environnementale, tout cela fait déjà beaucoup).

      Par ailleurs, je ne suis pas certain de comprendre son propos - il me semble qu’après avoir fait le lien entre violence et spécisme cinq lignes plus haut, envisager de « passer à un autre régime tout en pensant que nous continuons à manger des animaux » constitue une perspective des plus problématiques - un moyen de plus de tout changer pour que rien ne change. Je ne suis donc pas certain que ce paragraphe reflète vraiment la pensée et les souhaits de F. Burgat et non, par exemple, des perspectives possibles ou probables en l’état- je me demande si la transcription ou une expression malheureuse et un peu trop rapide n’en rendent le sens quelque peu confus.

      Merci d’avoir mis le doigt dessus.

    • Je ne croie pas que le poisson soit un végétal, pour moi c’est de la viande et ca m’a toujours semblé étrange qu’on parle de végétarisme pour des personnes qui mangent du poisson. On devrait dire aterapodophages par exemple ca serait plus précis.
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Tetrapoda

      –—

      Par rapport au poisson comme viande ou pas ca me fait pensé au cas du canard. Au moyen age il y a eu une époque ou le canard était classé dans les poissons ce qui permettait d’en manger durant le carême.

      Un poisson du carême : Le Canard

      D’entre de nombreuses espèces de Canard, le « Canard Macreuse » ("Anas nigra") est presque aussi grand que le canard ordinaire mais plus court et plus ramassé [39] , cet animal serait peut être décrit par Aristote comme étant le « Tadorne » ou « Foulque ».

      Dans le « Traité des dispenses de Carême » [40], (chapitre « Des amphibies ») on trouve les recommandations suivantes :
      « Les macreuses sur tout, et d’autres semblables oiseaux connus dans les ports de mer, tels que sont les pilets, les baliries, les vernages etc… dont on mange librement en Carême, sont de ce nombre, car à la honte de la religion et des états les plus religieux, on mange sans crainte la chair et le sang dans le temps où l’on n’use que par indulgence de lait et de beurre ». [41],

      La macreuse, cette sorte de « canard sauvage » serait donc opportunément une viande « maigre » pouvant ainsi être consommée pendant les périodes, fort nombreuses, de carême au moyen âge :
      « La macreuse pourtant avoit été défendue en maigre par un concile de Latran que tint au treizième siècle Innocent III. C’est Vincent le Bauvais qui le rapporte. » [42] .

      Le Canard sauvage, la macreuse et le « maigre »…

      Aristote cite « l’oie-renard »[43], et d’autre part, s’il décrit des modes de reproduction spontanés résultant de la putréfaction [44] , ils ne les attibue jamais au canard ni à ce type de « canard sauvage » qu’est la macreuse !

      Et l’Encyclopédie catholique observe [45] :

      « On sait que les macreuses ont été l’occasion d’une multitude de fables étranges. Comme on voyait ces oiseaux apparaître spontanément en grand nombre, on crut, les uns qu’ils provenaient du fruit d’un arbre inconnu ; d’autres des débris de bois pourri flottant sur la mer. Cette opinion, depuis longtemps émise par Aristote pour d’autres animaux était la plus répandue ».

      Cependant dans sa « vie et mœurs des animaux » Louis Viguier observe la façon pour le moins lègère d’observer la règle :
      « A la vérité, le Pape Innocent III, mieux avisé qu’Aristote, sur le chapitre de l’histoire naturelle des macreuses, avait fait justice de tous ces contes, en interdisant l’usage de ce gibier pendant le carême ; mais personne, ni dans les monastères, ni dans les châteaux, ni dans les tavernes, n’avait voulu prendre au sérieux l’interdiction du souverain Pontife » ! [46]

      Or il se trouve que, bien auparavant, dans les années 1598, Gerrit de Veer, cosmographe Hollandais et membre de l’équipage de l’exploration Barentz [47] rapporta, dit-on, des œufs de macreuse qu’il fit couver par une poule et qui donnèrent donc naissance à une suite de canards noirs. Les Macreuses auraient donc la même origine que les autres canards et devenaient, ipso facto, viande non maîgre, donc interdite en période de carème ?!

      Qu’importe ! On insinua aussitôt que les plumes des macreuses étaient d’une nature différente, que leur sang était froid et que leur graisse avait, comme celle des poissons la propriété de ne jamais se figer. La macreuse conserva son statut de chair maigre. De plus en méditerranée, des espèce de la famille de canards, appliquent cette dénomination à la Foulque macroule (le fulica necra) et c’est sur elle qu’ils transportèrent le tolèrance de l’Eglise. [48]

      En 1691, François Massialot [49] publie un ouvrage, sans toutefois le signer,"Le Cuisinier royal et bourgeois", dans lequel on trouve la recette de la macreuse au chocolat.

      Cet ouvrage fit l’objet de nombreuses éditions et fut suivi d’une autre publication : « Le nouveau cuisiner Royal et Bourgeois » en 1714.

      Cet ouvrage donne [50] la façon d’accommoder les macreuses, farcies au poisson, puis plongées dans un bouillon de bon beurre… Cependant l’auteur n’indique pas s’il s’agit là, d’un met pour les jours de maigre qui n’aurait pas probablement pas déplu aux moines de « Ripaille » !.

      https://sites.google.com/site/etymologielatingrec/home/c/canard

      Voici le fameux « arbre à canard » qui fait que le canard est pas loin d’être un fruit et qu’on peut en manger pour la journée sans viande ;)

    • C’est pas mal en effet. Ca me fait vraiment pensé à ces histoires d’#allélophagie dont on a déjà parlé.
      La #viande la plus part du temps ce n’est que les cadavres d’animaux qui sont considéré comme nos semblables dans une vision « scaliste » du vivant. C’est juste une histoire de placement du curseur sur ce dessin.
      http://medias.lepost.fr/ill/2009/12/23/h-20-1855682-1261600700.JPG

      Tout ce qui est au dessous du curseur n’est même pas de la viande, sans qu’on sache vraiment ce que c’est. Une sorte de « végétruc ».

  • #Minerai_de_viande : « Avant, on n’osait pas en faire de la bouffe pour chat » | Rue89
    http://www.rue89.com/2013/02/14/le-minerai-de-nos-lasagnes-cest-carrement-de-la-merde-239612

    La « viande » de nos plats préparés porte le nom de minerai, « des bouts de machin, de gras notamment, catégoriquement de la #merde. Il y a 40 ans, cette matière allait à l’équarrissage pour être brûlée », nous dit un expert.

    • j’avais lu il y a quelques temps des articles sur le « pink slime » que le gouvernement des USA avait acheté en masse pour nourrir les enfants à la cantine (ca avait fait scandale aux USA cet été).

      Pink slime is the common name for a controversial beef product. The name used in the meat industry is lean finely textured beef (LFTB)[3] and boneless lean beef trimmings (BLBT).[4] It is also known by the dysphemistic slang term soylent pink.[5][6][7][8] Pink Slime is a processed beef product that was originally used in pet food and cooking oil and later approved for public consumption.[9] In 2001, The United States approved the product for limited human consumption and it was used as a food additive to ground beef and beef-based processed meats as a filler at a ratio of usually no more than 25 percent of any product. The production process uses heat in centrifuges to separate the fat from the meat in beef trimmings.[10] The resulting product is exposed to ammonia gas or citric acid to kill bacteria.[10][11]

      wikipédia

      Les articles disaient tous que ce « pink slime » était interdit à la commercialisation en Europe mais que les USA voudraient bien nous en vendre. Mais en fait avec le « pink slime » on a au moins affaire à du boeuf (ou vieille vache c’est pareil pour l’industrie) alors que le minerai de chaire made in Europe peut être fait avec n’importe quoi, du cheval, de l’opossum, du lombric, de la blatte ... allez savoir.

      Le scandale de cet été c’était que les étatsuniens avaient découvert que les enfants à la cantine étaient nourris de Pink Slime. Mais ca fait combien d’années au fait, que les écoliers européens bouffent du minerai de chaire 4x par semaine ?

      Je regardait hier soir des épisodes des Simpsons (saison 16), à un moment Homer parle de la recette du KrustyBurger, avec un steak de cheval vendu comme étant du boeuf. Il faut que je récupère cette réplique, c’était mots pour mots ce qui se passe avec Comigel. Ca m’a fait pensé que cette arnaque cheval/boeuf est bien connu aux USA et est loin d’être rare dans l’agro-alimentaire.

    • http://seenthis.net/messages/114606#message115235
      C’est toujours la même histoire ! On appréciera à sa juste horreur le mot minerai, qui n’est pas extrait de la terre mais de déchets d’animaux morts.
      Et dans le gore, il y a aussi la colle à viande genre hXXrB3rz-xU si vous insistez chez youtube…

      Donc, voici à bon escient, la recette des lasagnes ou du ragout #vegans :)
      http://recettes.vegan.fr/index.php?recette=lasagnes_a_la_courgette_et_a_l_aubergine

      http://www.gourmet-vegetarien.com/ragout-recette-vegan

    • Je trouve le mot « minerai » très évocateur aussi. Je te recommande la lecture de cet article de la revue Terrain « la viande ou la bête » http://terrain.revues.org/2932
      Tu verra a quel point ce mot est « sarcophage » !

      C’est un sujet que je met souvent dans mes dessins, ci dessous un détail représentant « MaMeat©® » un genre de mine à chaire...

    • merci @mad_meg cet exposé est tout à fait intéressant. Cette distance va de pair avec le développement des villes et une population qui a décroché des réalités rurales et agricoles. Les citadins ne savent pas plus ce qu’est la nourriture. J’ai entendu chez des amis une invitée (enseignante en plus) s’esclaffer en voyant les betteraves que son hôte avait arraché de son jardin : ah c’est marrant, à Paris les betteraves sont molles ! Ouuuiiiii.... Pour en revenir à l’article, l’auteur dit qu’il y a quarante ans une partie de la bête partait à l’équarrissage mais il y a cent ans, tout était utilisé. J’ai lu un article récemment(peut-être de la FAO) sur une expérience menée dans un village kényan où les femmes avaient développé un artisanat à partir des déchets de l’élevage : peau, graisse et os. Elle fabriquaient notamment tout un tas d’objets en os. Cela dit, je suis plutôt favorable à limiter considérablement la
      consommation de viande.

    • Merci pour ton lien @mad_meg, je n’avais pas vu cette dimension.

      Finalement, une seule différence décisive sépare le végétarien du carnivore : c’est la définition du « semblable ». Tous deux en effet sont d’avis qu’il faut s’abstenir de manger le semblable. Mais pour l’un tout animal doté de sang et de souffle vital est un semblable, pour l’autre seuls les carnassiers le sont, avec cette conséquence qu’ils sont virtuellement anthropophages ; l’homme carnivore s’en abstient donc ; il ne consomme que du différent : des animaux strictement végétariens. C’est donc bien encore l’interdit de l’allélophagie qui est en jeu.

      #allélophagie