• Mine de lithium dans l’Allier : le rapport qui dévoile une bombe toxique
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    Il y a un an, le gouvernement a annoncé l’ouverture, dans l’Allier, de la plus grande mine de lithium d’Europe. D’après un rapport inédit dévoilé par Disclose et Investigate Europe, le secteur, fortement contaminé à l’arsenic et au plomb, présente « un risque significatif pour l’environnement et la santé humaine ». Une véritable bombe à retardement passée sous silence par les autorités. Lire l’article

  • « La #France nous a abandonnés, les bourreaux nous ont exécutés »

    En avril 1994, Gaudence Mukamurenzi et trois membres de sa famille sont assassinés par des génocidaires rwandais. Cette secrétaire de l’#ambassade de France à Kigali aurait pourtant pu être secourue par les militaires français. Deux de ses enfants rescapés témoignent pour la première fois.

    Au sortir des années 1970, Gaudence Mukamurenzi et Phocas Munyawera s’étaient installés dans une grande maison, à Nyakabanda, un quartier familial de l’ouest de Kigali, la capitale du Rwanda. Pour entrer dans le domicile, légèrement surélevé par rapport à la rue, il fallait ouvrir un portail, remonter un jardinet, au centre duquel trônait un avocatier, et passer par une petite terrasse. Une porte-fenêtre permettait d’accéder au salon. Dans son prolongement, la grande salle à manger précédait une cuisine. Au bout de celle-ci, un couloir desservait quatre chambres. Gaudence et Phocas occupaient la première, à droite. Les autres accueillaient leurs enfants : Josine, la plus grande, née en 1976, Nadine, arrivée deux ans plus tard, Patrick, né en 1983, et Aline, la petite dernière, née en 1989.

    À l’arrière de la maison, il y avait un grand jardin avec deux dépendances pour recevoir les invités. Dans un coin trônait une vieille Peugeot 504 hors d’état de marche. Sur la gauche, accolée à la maison, une autre grande chambre, indépendante, était occupée par Claude, le fils de Phocas issu d’une première union, et Mourani, le demi-frère cadet de Phocas. Dans les faits, Mourani, né en 1981, était l’oncle des enfants. Mais, de par sa proximité d’âge avec la fratrie, tout le monde le considérait plutôt comme un cousin. Juste à côté, une autre pièce permettait de stocker les provisions de la maison. Au bout du jardin, il y avait une butte en haut de laquelle se trouvait un potager et une petite bananeraie.

    Gaudence était secrétaire à l’ambassade de France, tandis que Phocas était comptable dans une entreprise de construction. Elle, grande et longiligne, le visage fin avec de grands yeux en amande, les cheveux mi-nuque, légèrement tirés vers l’arrière, aimait les longues robes colorées à motifs. Lui, au physique trapu, portait des chemisettes impeccables boutonnées presque jusqu’au cou. Une agrafe de stylo dépassait toujours de sa poche. Il avait le visage plutôt rond, les cheveux très courts, une petite moustache et des rouflaquettes bien taillées. Le père de famille aimait beaucoup recevoir. Il avait construit un petit bar dans le prolongement du mur d’enceinte en brique. Une ouverture donnait sur la rue, et une petite porte, à l’arrière, permettait d’y accéder directement depuis le jardinet. C’est dans ce maquis bien tenu que les amis du quartier se retrouvaient le soir pour boire quelques bières et écouter la radio.
    Des séquelles physiques et psychologiques

    « C’était le “bar du vieux” », se remémore Aline. La famille vivait confortablement. Des employés de maison s’occupaient des tâches quotidiennes. Si bien que, se souvient Patrick, « tous les moments que nous passions ensemble étaient doux et heureux, je ne me souviens pas avoir entendu maman se mettre en colère après nous ». Quand Gaudence rentrait d’une réception à l’ambassade, elle rapportait des gâteaux. « Elle me demandait d’aller lui chercher une bière, et on dégustait ça tous les deux sur la terrasse, c’était chouette », poursuit-il.

    Aline et Patrick habitent aujourd’hui à Charleroi, en Belgique. À 34 ans, la cadette de la famille attend son deuxième enfant. Patrick, tout juste 40 ans, est le père d’un garçon de 12 ans et d’une fille de 11 ans. Tous les deux ont longuement hésité avant d’accepter de raconter, pour la première fois, le destin de leur famille qui a tragiquement basculé au lendemain de l’attentat contre l’avion du président rwandais, Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994. Le génocide qui a suivi a fait au moins 800 000 morts en trois mois, parmi lesquels quatre membres de la famille Munyawera : Phocas, Gaudence, Josine et Mourani.

    Leur histoire ressemble à celles de nombreux rescapés. L’horreur qu’ils ont vécue a laissé des séquelles physiques et psychologiques profondes. Mais, ce que ne comprennent toujours pas Aline et Patrick, ce qui les obsède depuis bientôt trente ans, c’est la raison pour laquelle la France, pour qui travaillait leur mère, n’a pas daigné venir les secourir alors qu’elle était en capacité de le faire et alors que leur oncle, Pierre Nsanzimana, également employé par l’ambassade de France, au sein du service des états civils du consulat, a, lui, été évacué au Burundi par l’armée française, déployée à Kigali du 8 au 14 avril 1994 dans le cadre de l’opération Amaryllis.

    « Nous étions voisins. Tous les matins, notre mère nous emmenait à l’école, et, le soir, nous étions accueillis chez eux quand elle ne pouvait pas nous récupérer », raconte Patrick. Gaudence était la petite sœur de Thérèse, la femme de Pierre. « Elles étaient très proches », ajoute Aline. Après les « événements », Pierre et Thérèse les ont adoptés. L’oncle et la tante ont gardé pour eux ce qu’ils savaient des parents d’Aline et Patrick. Ils ont rarement évoqué les circonstances de leur sauvetage. « Par pudeur, nous avons posé peu de questions. Thérèse a été très marquée par le génocide », estiment Aline et Patrick. Eux-mêmes ont reconstruit leur vie en enfouissant les détails de ces journées dramatiques. Pourtant, tout est là.
    « Vous allez voir, bientôt vous allez voir ! »

    Mercredi 6 avril 1994. Depuis plusieurs semaines, Kigali est en ébullition. Les accords de paix d’Arusha, signés moins d’un an plus tôt par le Front patriotique rwandais (FPR, né en Ouganda à la suite de l’exil de centaines de milliers de Tutsis) et par les autorités rwandaises patinent. Depuis 1990, le FPR tente, armes à la main, de renverser le régime extrémiste hutu d’Habyarimana. La constitution d’un gouvernement de transition, incluant des membres du FPR, prévue dans les accords d’Arusha, est constamment repoussée. Dans le « bar du vieux », les familles tutsies du quartier se réunissent le soir pour écouter Radio Muhabura, la radio du FPR. Plus les jours passent, plus elles sont inquiètes. Une voisine hutue a pris l’habitude de passer devant la maison des Munyawera en criant : « Vous allez voir, bientôt vous allez voir ! », tout en brandissant une bible. Les Tutsis, considérés comme des alliés du FPR, ont en mémoire les pogroms de 1959 (année où nombre d’entre eux se sont exilés dans les pays voisins), de 1962 et de 1990 (après une offensive du FPR). Elles craignent le pire et commencent à entasser des pierres dans leur jardin pour se protéger en cas d’attaque.

    L’avion du président rwandais – qui transportait aussi le président burundais, Cyprien Ntaryamira, plusieurs officiels des deux pays, et trois membres d’équipage français – est abattu au-dessus de Kigali, lors de sa phase d’atterrissage, vers 20 h 30, dans la soirée du 6 avril. Par qui ? À ce jour, aucune enquête n’a pu le déterminer avec certitude
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    . Juvénal Habyarimana rentrait d’une rencontre à Dar es-Salaam, en Tanzanie, où il venait de s’engager, à nouveau, à mettre en place ce fameux gouvernement de transition.

    Dans la nuit, Josine et Nadine, les deux grandes sœurs, se ruent dans la chambre de Patrick. « N’as-tu pas entendu ? Le président est mort ! », lui lancent-t-elles, alors qu’il ouvre à peine les yeux. Depuis la fenêtre de sa chambre, tous les trois assistent à l’embrasement du quartier. « On s’est dit que ça allait passer », confie-t-il. Le lendemain matin, le 7 avril, le bar de Phocas est pillé. Dans la maison, c’est la panique. Le père de famille décide d’aller porter plainte à la gendarmerie la plus proche. Claude, son fils issu d’une précédente union, l’accompagne. Gaudence intime aux autres enfants d’enfiler « le plus de vêtements possible » et de se tenir prêts. Vers 11 heures, « on a entendu des coups contre le portail. Il a fini par céder et on a vu une foule déferler… Maman, Nadine, Aline, Mourani et moi avons fui par l’arrière », raconte Patrick. La famille monte la butte et se dissimule dans la bananeraie. La maison est saccagée.
    « Notre voisine s’est acharnée sur le corps de papa »

    Selon le récit de Claude, qu’il a confié plus tard à ses frères et sœurs (il n’a pas souhaité témoigner), il serait revenu avec son père au domicile, accompagnés de militaires censés constater les dégâts. Face à la situation, Phocas aurait décidé de réunir les passeports de la famille quand ils auraient été pris à partie par les Interahamwe, ces milices civiles armées qui sillonnaient la ville à la recherche de leurs victimes. Claude a réussi à se cacher mais pas son père, qui a été assassiné. Qui l’a tué ? « Claude nous a juste raconté, bien plus tard, que la voisine qui brandissait sa bible s’est acharnée sur son corps, hurlant que ça aurait dû être à elle de le tuer… » Ils ne reverront plus Claude, et, pendant plusieurs mois, ils le croiront mort.

    Après la bananeraie, se trouve le jardin d’un couple dont le mari est un footballeur assez connu, Ibrahim Marizuku. Il évoluait au Kiyovu Sports Association. Lui est absent mais sa femme décide de les cacher dans une annexe de la propriété qui leur sert de débarras. En fin d’après-midi, tous les cinq s’installent sommairement au fond de la pièce, derrière une grande penderie. Patrick se rappelle que c’est la femme de Marizuku qui leur a appris la mort de leur père. Commencent alors de longues journées d’attente, ponctuées par les repas que leur apporte la voisine. À chaque fois, il faut tirer le meuble, puis le repousser. La nuit, ils s’autorisent une sortie discrète pour leurs besoins et la toilette. Une petite radio leur permet de s’informer.

    À une centaine de mètres de là, Pierre Nsanzimana, son épouse Thérèse leurs trois enfants ont également dû quitter leur domicile. Pierre est décédé en 2022 mais son fils, Étienne, 18 ans à l’époque, qui vit aujourd’hui à Paris, a accepté de raconter cet épisode, tel qu’il s’en souvient.

    Dès le matin du 7 avril, leur résidence – une grande propriété, avec des dépendances dans lesquelles logeaient d’autres Tutsis – est prise d’assaut par les Interahamwe. Thérèse ordonne aux enfants de se munir de vêtements chauds. Elle s’occupe de récupérer les passeports, tout l’argent liquide disponible et les albums photos. Pierre, un érudit passionné de lecture, s’affaire à prendre un maximum de livres quand sa femme l’interrompt brusquement : « Que vas-tu faire de ces livres ? On n’a pas le temps, on prend l’essentiel ! Et, si nous survivons, tu pourras retrouver tes livres. » À la maison, il y avait aussi le frère de Thérèse, Claver Karuranga, ses trois fils, et deux autres cousines. Tous avaient dû fuir leur domicile.

    Hussein, un voisin musulman d’un certain âge, réserviste des Forces armées rwandaises (FAR) et dont la maison est accessible par un petit chemin, accueille chez lui Pierre, Étienne et ses sœurs, ainsi que les cousines. « Moi et mon père, nous étions dans la cuisine, je me souviens encore du tas de charbon. Mes sœurs et mes cousines étaient installées dans une autre pièce. Ma mère, son frère et ses enfants ont été cachés chez un autre voisin hutu, dont la maison touchait celle d’Hussein », poursuit Étienne.
    « Mais non, on n’est pas encore morts ! »

    La Radio-Télévision libre des Milles Collines (RTLM), véritable outil de propagande des extrémistes hutus financé par l’homme d’affaires Félicien Kabuga
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    , déverse son lot de haine et diffuse des listes de noms de Tutsis à retrouver en priorité. Pierre figure sur une de ces listes. « Il était activement recherché… La situation devenait compliquée et dangereuse pour Hussein. Nous avons voulu rejoindre le collège Saint-André, à Nyamirambo [un district en périphérie de Kigali, NDLR], où, nous disait-on, d’autres Tutsis avaient trouvé refuge. Hussein a dit qu’il ne laisserait personne sortir de chez lui et qu’il garantirait notre protection », témoigne Étienne. Ce refus leur a probablement sauvé la vie : le 13 avril, presque tous les réfugiés qui se trouvaient au collège Saint-André ont été massacrés
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    Un soir où Étienne et son père se débarbouillent dehors, ils entendent une sonnerie dans la maison. À l’époque, les Rwandais possédant un téléphone sont peu nombreux. « Après négociation, Hussein a autorisé mon père à téléphoner… Il a donc joint l’ambassade, on devait être le 10 avril », se remémore-t-il.

    Selon Étienne, Pierre finit par parler à « un colonel qu’il connaissait bien pour l’avoir aidé dans ses démarches d’adoption ». Son nom ? Il ne s’en souvient pas. Au téléphone, le militaire français se serait dit surpris qu’il soit encore vivant. « Mon père a alors dit : “Mais non, mais non, on n’est pas encore morts !” » Son interlocuteur lui aurait promis d’envoyer une escorte militaire pour les sortir de ce guêpier. « Comment ? », s’enquiert Pierre. L’officier lui aurait proposé de donner sa localisation à des gendarmes rwandais pour qu’ils viennent les récupérer. « Mon père a sursauté, se souvient Étienne, il leur a répondu de ne surtout pas dire aux gendarmes qui ils allaient chercher et que ce n’était pas la bonne solution. » Les militaires rwandais, qu’ils soient gendarmes ou des FAR, ont participé activement aux massacres. Finalement, Pierre et son interlocuteur conviennent d’un autre plan : l’une des filles d’Hussein devrait aller se poster à un endroit précis du quartier où la rejoindrait une escorte militaire française.

    Dans la nuit du 8 au 9 avril 1994, les premiers militaires français de l’opération Amaryllis, dont la mission est d’évacuer les ressortissants français, ont pris possession de l’aéroport de Kigali. En fin d’après-midi, la première rotation vers l’étranger emporte 44 Français et 12 Rwandais, tous membres de la famille du président Habyarimana, dont sa veuve, Agathe Kanziga. C’est un camion bâché escorté par deux jeeps et conduits par des soldats de cette opération qui se sont chargés d’aller récupérer Pierre Nsanzimana et sa famille, le lendemain de l’échange téléphonique, le 11 avril. Toujours selon le témoignage d’Étienne, « les militaires ont retrouvé la fille d’Hussein qui les a guidés vers l’arrière de la maison, par un chemin a priori discret ». Une fois l’accès entre la maison et le convoi sécurisé, toute la famille de Pierre se presse vers le camion. « En fait, tout autour, il y avait des Interahamwe qui enrageaient. Ils avaient les yeux exorbités, injectés de sang. Pour eux, nous étions des trophées, et ils ne comprenaient pas comment l’armée française pouvait les priver de ça, se rappelle Étienne, encore choqué presque trente ans après. Il faudra que mon père et ma mère négocient dur pour que les autres membres de la famille puissent aussi monter avec nous. Un soldat lui a dit que leur mission était de sauver uniquement mon père, sa femme et ses enfants… Finalement, ils ont cédé. »
    « Il a éclairé nos visages, un par un »

    Non loin de là, à quelques centaines de mètres (« cent-cinquante mètres tout au plus », juge Étienne), sont toujours cachés dans l’angoisse Gaudence, ses filles Nadine et Aline, son fils Patrick et leur oncle Mourani. Pierre ne sait pas s’ils sont encore chez eux mais, avant de monter dans le camion d’Amaryllis, il demande aux soldats français d’aller chercher la petite sœur de sa femme. C’est du moins ce qu’affirme Étienne : « Il a eu beau insister, ils lui ont dit : “Venez avec nous à l’École française [le point de regroupement des ressortissants français, NDLR], ensuite vous demanderez à notre responsable et on reviendra”. » À l’École française, Étienne assure que son père est resté posté devant le portail et a insisté pour qu’un convoi reparte chercher Gaudence. « Un commandant a fini par lui dire que le FPR n’était pas loin et qu’il fallait qu’ils se préparent au combat. Voilà ce qu’il lui a répondu. Après ça, j’ai vu ma mère s’éteindre. » Le 12 avril, Pierre, Thérèse, Liliane, Pascaline, Étienne s’envoleront finalement vers le Burundi.

    Pendant ce temps, Gaudence et ses enfants survivent tant bien que mal. Combien de temps restent-ils dissimulés dans le débarras de Marizuku ? Difficile à dire mais, un jour, « la voisine est venue nous avertir que les Interahamwe savaient où nous étions et qu’il fallait qu’on parte, poursuit Patrick. On a fui la nuit. Nous avons traversé un champ. Des Interahamwe passaient avec des torches, on se couchait, puis on repartait. On a finalement pu se réfugier dans un autre local, mais on a vite su qu’on nous avait repérés, alors nous sommes retournés chez Marizuku. » L’étau se resserre jusqu’à ce qu’un groupe d’hommes finisse par exiger de leur voisine de pouvoir fouiller l’annexe dans laquelle se terre la famille. « Elle avait dévissé l’ampoule pour qu’ils ne puissent pas allumer et nous voir. Elle leur a montré l’intérieur et leur a dit : “Vous voyez, il n’y a personne !” Mais l’armoire n’avait pas été repoussée correctement et un homme est revenu avec une torche et nous a “torché” tous, un par un. On était tétanisés, paniqués. » Aline : « Ça, la torche dans les visages, je m’en souviens très bien. » Mais l’homme repart, sans un mot.

    C’est ce même soir, estime Patrick, que la nouvelle de l’évacuation de Pierre Nsanzimana est diffusée par la RTLM. « Nous avons entendu son nom. Les animateurs ont expliqué que toute la famille avait été évacuée par la France. Alors, il y a eu une sorte de soulagement. Ma mère était persuadée que nous serions les prochains. » Cette information a-t-elle été diffusée avant ou après le départ d’Amaryllis, le 14 avril ? Patrick ne sait pas. Quoi qu’il en soit, les militaires français savaient exactement où logeait la famille de Gaudence, et, depuis le 11 avril, deux télégrammes arrivés de Paris avaient élargi les évacuations aux employés locaux. Le premier avait été adressé en fin d’après-midi à l’ambassade de France et précisait « qu’il convient d’offrir aux ressortissants rwandais faisant partie du personnel de l’ambassade (recrutés locaux), pouvant être joints, la possibilité de quitter Kigali ». Le second avait été adressé en soirée au commandement d’Amaryllis et autorisait à « accélérer l’évacuation des ressortissants étrangers et des personnels de l’ambassade ». Mais personne n’a tenté de retrouver Gaudence et ses enfants.
    « Maman nous a dit de prier »

    « Maintenant que les Interahamwe savaient où nous étions cachés, la voisine a cherché à nous changer d’endroit, poursuit Patrick. Elle et son mari avaient logé deux autres familles tutsies dans deux dépendances, qui avaient fini par partir. Elle nous a donc logés dans une de ces annexes, en disant : “S’ils reviennent vous chercher, je dirai que la famille est partie avec la clé.” Il y avait un salon avec deux chambres, on s’est mis dans la dernière, tout au fond, et on a fermé la porte. » Ils y passent la nuit et, le lendemain matin, reprend Patrick, « on a entendu une foule qui arrivait ».

    La voisine a eu beau essayer de détourner leur attention, en leur disant qu’il n’y avait personne, « on a entendu la première porte se faire fracasser », continue Patrick. « Puis, ils ont cassé la porte de la première chambre. Maman nous a dit de prier. » Aline reprend le récit, la voix tremblante : « Je me souviens bien de ça. Je crois aussi que maman nous a fait : “Chut ! Taisez-vous !” Puis ils ont frappé fort contre notre porte et hurlé : “Ouvrez la porte ! Ouvrez la porte ou on balance une grenade !” Et, là, maman a ouvert la porte… Ils l’ont attrapée par les cheveux et l’ont traînée vers l’extérieur… Elle portait un long pagne coloré… Je ne me souviens plus de la couleur. Ils lui ont donné un coup sur la tête. Le sang a coulé. » « Avec Mourani, on était encore cachés sous le lit, ajoute Patrick. Ils sont venus nous tirer de là et, dehors, j’ai vu le sang sur le visage de maman. »

    Patrick, 11 ans à l’époque, s’est alors jeté contre les agresseurs de sa mère. « Mais l’un d’eux m’a pris par les pieds et m’a jeté contre le mur. » « Il y a tous les copains du quartier qui nous frappaient et nous disaient : “On vous cherche depuis longtemps !” » Alors que les Interahamwe alignent la famille, mains sur la tête, et l’emmènent sur la route, un peu en contre-haut, Aline réussit à s’enfuir. « Je crois que le sang sur le visage de maman a déclenché un instinct de survie, j’ai pris mes jambes à mon cou, puis je ne me souviens plus de grand-chose, je n’ai que des flashs. » Patrick se souvient bien avoir vu sa sœur courir et entendre leurs bourreaux s’exclamer : « Laissez-là, vu son gabarit elle ne survivra pas, ou quelqu’un d’autre s’en chargera ! » Mourani, 13 ans, tente lui aussi de s’échapper, mais un milicien tire dans sa direction et lui crie : « Si tu essaies encore de fuir, je te mets une balle dans la tête. »

    Gaudence, Patrick, Josine, Nadine et Mourani sont exhibés dans le quartier. « Il y avait les deux fils de la voisine, celle qui nous menaçait avec sa bible et qui s’est acharnée sur papa… Les insultes fusaient. » Sur la route, ils assistent à l’exécution de « la plus jolie fille du quartier », ajoute Patrick : « Un Interahamwe lui a dit : “Viens avec moi, je t’épouse”, et elle lui a répondu : “Je préfère que tu me tues, même pas dans tes rêves je t’épouserai !” Elle était très courageuse. Il lui a dit de se mettre à genou, elle a refusé… » Puis ils sont conduits sur une grande route où, explique Patrick, « c’était plus simple de faire venir les camions-bennes pour évacuer les corps ». « Une fois arrivés, ils nous ont demandé de nous coucher ventre à terre, le long d’un fossé, et ils ont commencé à nous tirer dessus avec des petits fusils automatiques. » La date où c’est arrivé est restée gravée dans la mémoire de Patrick : « C’était le mardi 19 avril 1994. »
    La danse macabre du camion-benne

    À côté de Patrick, sa mère meurt sur le coup. « J’ai vu son sang couler sur la terre. Je me suis dit que, maman, c’est fini. » Mourani et Josine également. Nadine bouge encore. Alors, les Interahamwe s’acharnent sur elle. Elle reçoit sept balles. Une balle a traversé le torse de Patrick, elle est passée à quelques centimètres de son cœur. « J’étais vivant, souffle-t-il. À ce moment, pour moi, personne n’a survécu, alors j’ai fait le mort. » Puis démarre la danse macabre du camion-benne. « On nous a jetés dedans. Par miracle, je me suis retrouvé sur le dessus. Quand le camion a redémarré, j’ai pu me redresser. »

    Mais certains de ses jeunes bourreaux s’en rendent compte. Ils interpellent le chauffeur, qui arrête le camion et dépose Patrick au milieu de la route. « Ils sont partis chercher des Interahamwe plus âgés. Je me suis traîné jusqu’au bord de la route, je n’arrivais pas à me lever. Il allait pleuvoir, j’ai imaginé me laisser porter par les flots dans le fossé… Mais je les ai entendus revenir, ils criaient : “Il y en a un qui est encore vivant !” Je me suis couché et j’ai de nouveau fait le mort. Ils m’ont donné des coups de pied, ils m’ont craché dessus, et l’un d’entre eux a dit : “Il est mort, on ne va pas gaspiller une balle pour lui”. » Patrick réussit ensuite à atteindre un petit abri.

    Un habitant du quartier, un Hutu musulman nommé Chali, qui connaissait bien Gaudence, tombe sur lui. « Il était paniqué… Il m’a apporté un thé avec un beignet. J’ai cru qu’il allait m’achever. Il est parti chercher un militaire pour m’emmener à l’hôpital… À nouveau, je me suis dit : “C’est fini”. » Chali arrête un pick-up. Un militaire en sort et s’exclame : « Mais on avait dit pas les civils, pas les enfants ! » Patrick reprend : « Il m’a mis à l’arrière de son pick-up où il y avait un autre corps. C’était celui d’une maîtresse du quartier. On lui avait tiré plusieurs fois dessus. Il y avait du sang partout. Le militaire conduisait vite. Je me suis accroché. Il y avait des dos d’âne et, à chacun d’eux, la tête de la maîtresse se soulevait et retombait lourdement sur la tôle. Il m’a déposé au CHUK [Centre hospitalier universitaire de Kigali] où j’ai été pris en charge. Le spectacle était catastrophique : il y avait des blessés partout, des enfants, les gens mouraient… Ils ont découpé mon tee-shirt, m’ont donné du sérum et de l’oxygène... »

    Il s’interrompt. « Je me suis allongé et je me suis mis à pleurer. À ce moment, j’ai réalisé ce qui venait de se passer. Autour de moi c’était pire : il y avait des enfants plus jeunes que moi, la tête à moitié arrachée, les bras… C’était l’enfer total. » Il pense être resté dans un état de semi-conscience environ deux ou trois semaines.
    « J’étais la petite esclave de la maison »

    Les flashs d’Aline permettent de retracer brièvement son histoire. Une vie parallèle à celle de son frère. Durant cette discussion de plusieurs heures, dans l’appartement d’Aline, à Charleroi, chacun découvre des détails qu’il ignorait de l’autre. Elle s’adresse à Patrick : « Tu nous avais raconté brièvement cette histoire mais je ne savais pas tout... » Après sa fuite, la jeune mère de famille se rappelle « avoir frappé à plusieurs portes jusqu’à ce qu’on [lui] ouvre. » « Puis, c’est le trou noir. Je ne me souviens pas combien de temps je suis restée chez les gens qui m’ont cachée... » Plusieurs fois, leur récit bute sur des périodes plus opaques que d’autres. Ces zones d’ombre correspondent bien souvent à des moments plus calmes : tandis qu’ils se rappellent avec précision de la fuite, des agressions, des angoisses liées à la traque, dès qu’ils se retrouvent dans une situation plus « sécurisée », les repères temporels et les détails disparaissent. Durant ces moments d’apaisement, les corps et les esprits se relâchent.

    « Ensuite, je me vois sur une route avec beaucoup de monde, reprend Aline. Je suis avec une dame, on me porte sur les épaules, j’étais si petite… » Cette marche au milieu d’un flot de réfugiés dure longtemps, dit-elle, jusqu’à la frontière avec le Zaïre (l’actuelle République démocratique du Congo, RDC). « Je crois que je suis d’abord accueillie chez une femme qui avait encore deux enfants en bas âge. Elle m’a donc confiée à une autre famille. C’était une petite maison, assez sale. Je revois la porte s’ouvrir, il y avait surtout des hommes. Elle leur a dit qu’elle ne pouvait pas s’occuper de moi, et m’a laissée chez eux. »

    Elle est à Bukavu, à la frontière, au sud du lac Kivu. Elle dit être devenue « la petite esclave de la maison ». « Je dormais par terre, sur un bout de tissu. Je ressens encore les morsures de ces grosses fourmis rouges qui rentraient la nuit. Les enfants de la maison vivaient plutôt bien mais, moi, je mangeais peu. On m’envoyait chercher des cigarettes en pleine nuit. Le matin, on me réveillait pour aller chercher de l’eau… La femme, je la vois comme une sorcière. Quand son mari était là, elle s’adoucissait un peu. Je me rappelle une scène très précise dans laquelle je cherche la cuisine dans l’obscurité et je vole une boule de riz pour manger. » Son calvaire va durer plus de deux ans. Et, pour en connaître le dénouement, il faut laisser Aline dans cette famille congolaise et écouter de nouveau le récit de Patrick.
    En volant ses bracelets, il a senti son pouls

    « À l’hôpital [de Kigali], je vois des visages qui passent devant moi, c’est assez flou. J’étais dans un mauvais état, à cause de ma blessure. Et je mangeais peu. » Un jour, il croit voir sa grande sœur, Nadine. « Je me suis dit que j’avais eu une hallucination. Pour moi, elle était morte. » En fait, Nadine, malgré ses blessures, s’en est sortie. Aujourd’hui, la grande sœur habite également à Charleroi. Elle n’a pas souhaité se joindre à la réunion pour raconter son histoire mais, avec son autorisation, il est possible de la reconstituer brièvement, grâce aux témoignages de Patrick et de son cousin Étienne, à qui elle s’est parfois confiée. Ainsi, lorsque le camion-benne qui transportait toute la famille est arrivé à la fosse commune, l’un des hommes chargés d’enterrer les corps a senti le pouls de Nadine en lui volant ses bracelets en ivoire. Pour une raison mystérieuse, il n’a rien dit et l’a conduite dans le même hôpital que Patrick, où elle s’est remise de ses blessures.

    « Nadine est quelqu’un de très fort… Malgré les sept balles, elle était debout quelques semaines après son hospitalisation », ajoute Patrick. Lui et Aline décrivent leur grande sœur comme une personne « très sociable », et qui a une certaine « clairvoyance », qui lui permet de réagir rapidement dans des situations d’urgence. Aline me montre un photo-montage : à droite il y a Nadine, photographiée il y a quelques années, et à gauche, il y a Gaudence. « Sur cette photo, elles ont à peu près le même âge, une quarantaine d’années. Elles se ressemblent tellement », soupire Aline. À l’hôpital, « elle s’était fait des amis parmi les soignants et parmi les militaires, ajoute son frère. Si bien que, quand les soldats allaient piller les maisons, ils lui ramenaient de la nourriture. C’est à partir de ce moment que j’ai recommencé à m’alimenter, et à me rétablir. »

    Le jour, Nadine s’occupe de son frère, veille à ce que les infirmières le soignent correctement. Elle-même continue de recevoir des soins. La nuit, ils dorment côte à côte. Lorsqu’il y a des suspicions sur leur origine, Nadine explique que son père est un Hutu qui a été assassiné injustement. « Plus tard, elle nous a montré comment elle fronçait son visage pour grossir son nez », ajoute Aline. Le physique était un critère pour affirmer qu’untel ou untel était tutsi. Sous couvert d’études scientifiques, les colons belges étaient persuadés que les Tutsis étaient grands, longilignes et avaient, notamment, le nez plus fin que celui des Hutus. Cette idéologie raciste a été soutenue par les extrémistes hutus.

    L’accalmie à l’hôpital fut de courte durée. « Au bout de trois ou quatre semaines, je commençais à aller mieux, poursuit Patrick. Mais, dans notre quartier, le bruit a couru que nous étions vivants. La voisine, celle qui nous menaçait en brandissant la bible, a envoyé ses fils à l’hôpital pour vérifier l’information. » Jusqu’au jour où un militaire vient les prévenir. Il leur dit que leurs bourreaux viendront les chercher le lendemain, comme d’autres Tutsis avaient déjà été sortis de force de l’hôpital et exécutés à l’extérieur. Il fallait à nouveau fuir. Mais où ?
    Il fallait fuir, encore une fois

    « Nadine a pensé à Pierre-Célestin Rwigema, le parrain de Josine, notre sœur ainée. C’était un ami très proche de papa. Sa femme était infirmière dans notre hôpital… Lui était hutu, elle était tutsie, mais on la laissait tranquille puisqu’elle soignait les gens », explique Patrick. Nadine retrouve l’infirmière, et ensemble elles organisent leur départ. Le militaire qui les avait avertis accepte de les emmener chez ce parrain. Ils passent de nombreux barrages avant d’arriver à destination, enfin. « On a ressenti un soulagement. Sa femme étant infirmière, elle a continué à nous soigner. » Ce n’est pourtant pas la fin du calvaire.

    Leurs bourreaux sont arrivés à l’hôpital. Constatant leur départ, ils sont repartis à leur recherche. « Cette voisine ne voulait pas nous lâcher, ils sont venus jusque chez notre parrain. » Devant la maison de Pierre-Célestin, ils font sortir tout le monde, et interrogent le père de famille qui leur indique que tous, sans exception, sont ses enfants. « Mais les fils de notre voisine nous avaient reconnus, évidemment. L’un des hommes a saisi Nadine pour l’emmener à l’abri des regards. Il a sorti un pistolet. Elle a crié. Le domestique est arrivé et l’homme est parti. Ils ont tous rebroussé chemin en disant qu’ils allaient revenir avec un blindé pour détruire la maison. » Il fallait fuir, encore.

    Ils se répartissent dans les deux véhicules que possède Pierre-Célestin Rwigema. Au milieu de ses enfants, Nadine et Patrick passent presque inaperçus aux barrières dressées par les miliciens, qui procèdent à des contrôles d’identité et à un tri ethnique. Beaucoup de massacres ont eu lieu sur ces barrages, parfois sur un simple critère physique. Mais l’un d’eux finit par suspecter la présence de « cafards », le terme utilisé par les tueurs pour désigner les Tutsis – « il a dit : “Je pense qu’il y a des cafards dans ce véhicule” », raconte Patrick. Il fait descendre tout le monde sur la route. Après discussions, tout le monde repart, mais à pied. « On est retournés à la maison, Nadine est revenue aussi avec les autres, un peu plus tard… On était au point de départ, mais sans voiture. » Leur hôte a finalement sollicité un autre ami, un gradé de l’armée, afin qu’il les sorte de ce mauvais pas. S’il a fallu négocier lors d’un contrôle, le statut du chauffeur a permis de passer les barrières sans trop de difficulté, jusqu’à l’Hôtel des Mille Collines. Là, c’est à nouveau le soulagement.

    Dès le début des massacres, de nombreux Kigalois se sont réfugiés dans cet hôtel de luxe qui appartenait à la compagnie aérienne belge Sabena. Postés devant l’hôtel, des Casques bleus de la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda (Minuar) dissuadent les militaires et les miliciens d’y pénétrer. Plus de 1 200 personnes s’y sont réfugiées durant le génocide, dormant dans les 113 chambres, dans les couloirs ou au bord de la piscine, qui a servi de réservoir d’eau quand celle-ci ne coulait plus des robinets. L’histoire de cet hôtel a fait l’objet d’un film réalisé par Terry George, Hôtel Rwanda (2004). Cette œuvre a suscité la controverse : les faits auraient été enjolivés par le « héros » du film, le directeur de l’hôtel, Paul Rusesabagina. L’hôtel a bien sauvé des vies, mais il aurait aussi permis à son gérant de s’enrichir – c’est du moins l’avis de nombreux rescapés
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    Évacués vers un camp du FPR

    Malgré les difficultés quotidiennes et la pression des militaires rwandais, une parenthèse s’ouvre pour Nadine et Patrick. À l’extérieur, si les Interahamwe ont la consigne de laisser rentrer les Tutsis, ils ont ordre de tuer tous ceux qui en sortent. Est-ce à nouveau un piège qui se referme sur eux ? « Un jour, j’ai vu des militaires faire du repérage et noter des numéros de chambres. Alors, toutes les plaques ont été enlevées… Ils sont revenus avec des Interahamwe, ils ont commencé à fouiller les chambres, mais la Minuar est revenue avec plus d’hommes, ce qui les a fait partir. »

    Le 29 mai 1994, la Minuar organise un échange de réfugiés entre le gouvernement intérimaire et le FPR
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    . « Ils nous ont offert la possibilité de rejoindre un camp du FPR, à Kabuga [situé à quelques kilomètres à l’est de Kigali, NDLR]. On s’est donc inscrits sur la liste », poursuit Patrick. Lorsqu’un officiel rwandais se met à lire les noms, celui de « Munyawera » n’est jamais prononcé. « Nous voyions nos camarades d’infortune monter dans le camion. Nadine, une fois de plus, a eu le bon réflexe : elle est allée voir un Casque bleu pour lui dire qu’il y avait un problème. » L’officiel en question est l’équivalent d’un élu municipal du quartier de leur parrain, Pierre-Célestin Rwigema. Il avait décidé que la famille ne devait pas survivre. « Le Casque bleu a arraché la liste et repris la lecture… Cette fois, notre nom a été prononcé. Nous sommes montés dans le camion et avons pu rejoindre le camp du FPR. »

    Sur place, Patrick et Nadine se sentent enfin sortis d’affaire. Ils s’installent dans le camp, trouvent de la nourriture, cherchent un logement… « Trois semaines après, nous avons vu arriver notre grand frère Claude, une boisson au citron à la main ! » Lorsque leur père, Phocas, a été assassiné dans leur maison, Claude a réussi à se cacher. Quand il apparaît dans ce camp du FPR, la surprise est générale. Le frère aîné travaille alors au service d’un gradé du groupe armé. « On était sauvés. »

    Après la conquête du FPR, mi-juillet, et la constitution du gouvernement de transition « à base élargie », le 19 juillet 1994, Nadine et Patrick emménagent avec le parrain de Josine, Pierre-Célestin Rwigema, nommé ministre de l’Enseignement primaire et secondaire
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    . Quelques mois plus tard, la famille Nsanzimana, réfugiée au Burundi, retrouve enfin leur trace. « Étienne et Thérèse sont venus nous chercher, et nous sommes partis au Burundi », relate Patrick. En 1995, tous rentrent au Rwanda. Pierre réintègre l’ambassade de France, et la famille s’installe dans la maison d’un frère de Thérèse. Le couple a récupéré tous les enfants survivants des oncles et tantes. « Nous étions très nombreux, de tous les âges », se souvient Patrick.
    « J’ai compris que maman était morte »

    Reste Aline. Pendant plusieurs mois, la famille, l’espoir chevillé au corps que la petite dernière soit toujours vivante, va suivre plusieurs pistes, notamment dans les camps de déplacés en RDC, près de Goma. En vain. Fin 1996, alors que nombre de réfugiés sont rentrés au pays, « une femme est venue nous voir pour nous dire qu’elle était sûre qu’Aline était vivante et qu’elle savait où elle se trouvait », résume Patrick. La famille hésite un peu : dans cette période post-génocide, il y a beaucoup de rumeurs. « Certains affirmaient par exemple que maman était encore en vie... », précise Patrick. Les informations semblent cependant fiables et, pour Thérèse, il est inconcevable de ne pas aller vérifier. C’est ainsi que Claude, accompagné d’un ami et de la femme qui affirmait savoir où se trouvait Aline, sont partis à Bukavu.

    De son côté, Aline se remémore : « Je me souviens que le père de famille m’a demandé si je connaissais un certain Claude… J’ai tout de suite répondu que c’était mon frère. Ça n’a provoqué aucune réaction de ma part. À cette époque, je refoulais la moindre émotion, mon cerveau avait déconnecté pour se protéger. » Le soir, la famille congolaise met les petits plats dans les grands. « Un véritable festin ! Après tout ce temps à me maltraiter… Si ce n’est pas cynique ! » Le lendemain, « Claude est arrivé, il m’a mis sur ses épaules, et on est partis ».

    Au Rwanda, les retrouvailles sont euphoriques. « Tout le monde s’est jeté sur moi en pleurs, se rappelle Aline. Je pleurais également mais ni de joie, ni de tristesse. J’étais perdue, il y avait tant de monde ! Et je ne comprenais rien, je ne parlais plus kinyarwanda. » « Elle parlait swahili, reprend Patrick. On était tellement heureux de l’avoir retrouvée... » « Et puis j’ai entendu Nadine et Patrick appeler Thérèse “maman”. Là, ça été comme un déclic : j’ai compris que maman était morte. »

    Pierre et Thérèse adopteront Nadine, Patrick et Aline. Claude, l’aîné, qui avait alors une vingtaine d’années, reprendra le cours de sa vie de manière indépendante. La famille élargie s’organise, les plus jeunes reprennent leurs études, jusqu’à l’université, au Rwanda pour certains, comme Étienne, ou en France, près de Toulouse, comme Nadine. Plus tard, une grande partie de la famille s’installera dans le sud de la France. Ces jours sombres ne seront que rarement abordés. Aujourd’hui, tous souhaitent combler les trous béants de leur histoire. Ils veulent notamment savoir pourquoi la France ne les a pas secourus, en dépit de l’insistance de Pierre et de Thérèse. « Les bourreaux nous ont exécutés, mais c’est la France qui nous a abandonnés », conclut Patrick.

    https://afriquexxi.info/La-France-nous-a-abandonnes-les-bourreaux-nous-ont-executes
    #génocide #Rwanda #abandon #fuite #Minuar

  • Au #Darfour, la terreur à huis clos : « Ils veulent nous rayer de la carte »

    Depuis le 15 avril et le début de la #guerre au #Soudan, plus de 420 000 personnes se sont réfugiées dans l’est du #Tchad. Principalement issues des communautés non arabes du Darfour, elles témoignent d’attaques délibérées contre les civils, de multiples #crimes_de_guerre, et dénoncent un #nettoyage_ethnique.

    Un mélange de boue et de sang. Des corps emportés par le courant. Des cris de détresse et le sifflement des balles transperçant l’eau marronasse. C’est la dernière image qui hante Abdelmoneim Adam. Le soleil se levait à l’aube du 15 juin sur l’oued Kaja – la rivière saisonnière gonflée par les pluies qui traverse #El-Geneina, capitale du Darfour occidental – et des milliers de personnes tentaient de fuir la ville.

    Partout, des barrages de soldats leur coupaient la route. « Ils tiraient dans le tas, parfois à bout portant sur des enfants, des vieillards », se souvient Abdelmoneim, qui s’est jeté dans l’eau pour échapper à la mort. Des dizaines d’autres l’ont suivi. Une poignée d’entre eux seulement sont arrivés indemnes sur l’autre rive. Lui ne s’est plus jamais retourné.

    Ses sandales ont été emportées par les flots, l’obligeant à poursuivre sa route pieds nus, à la merci des épines. Attendant le crépuscule, il a coupé à travers champs, sous une pluie battante, évitant une dizaine de check-points tenus par les paramilitaires et slalomant entre les furgan, les campements militaires des miliciens arabes qui encerclaient El-Geneina. Il lui a fallu 13 heures pour parcourir la vingtaine de kilomètres qui le séparait du Tchad.

    Le Darfour s’est embrasé dans le sillage de la guerre amorcée le 15 avril à Khartoum entre l’armée régulière dirigée par le général Abdel Fattah al-Bourhane et les #Forces_paramilitaires_de_soutien_rapide (#FSR) du général Hemetti. Dans cette région à l’ouest du pays, meurtrie par les violences depuis 2003, le #conflit a pris une tournure ethnique, ravivant des cicatrices jamais refermées entre communautés.

    Dans la province du Darfour occidental qui borde le Tchad, l’armée régulière s’est retranchée dans ses quartiers généraux, délaissant le contrôle de la région aux FSR. Ces dernières ont assis leur domination en mobilisant derrière elles de nombreuses #milices issues des #tribus_arabes de la région.

    À El-Geneina, bastion historique des #Massalit, une communauté non arabe du Darfour à cheval entre le Soudan et le Tchad, environ 2 000 volontaires ont pris les armes pour défendre leur communauté. Ces groupes d’autodéfense, qui se battent aux côtés d’un ancien groupe rebelle sous les ordres du gouverneur Khamis Abakar, ont rapidement été dépassés en nombre et sont arrivés à court de munitions.

    Après avoir accusé à la télévision les FSR et leurs milices alliées de perpétrer un « génocide », le gouverneur massalit Khamis Abakar a été arrêté le 14 juin par des soldats du général Hemetti. Quelques heures plus tard, sa dépouille mutilée était exhibée sur les réseaux sociaux. Son assassinat a marqué un point de non-retour, le début d’une hémorragie.
    Démons à cheval

    En trois jours, les 15, 16 et 17 juin, El-Geneina a été le théâtre de massacres sanglants perpétrés à huis clos. La ville s’est vidée de plus de 70 % de ses habitant·es. Des colonnes de civils se pressaient à la frontière tchadienne, à pied, à dos d’âne, certains poussant des charrettes transportant des corps inertes. En 72 heures, plus de 850 blessés de guerre, la plupart par balles, ont déferlé sur le petit hôpital d’Adré. « Du jamais-vu », confie le médecin en chef du district. En six mois, plus de 420 000 personnes, principalement massalit, ont trouvé refuge au Tchad.

    Depuis le début du mois de septembre, les affrontements ont baissé en intensité mais quelques centaines de réfugié·es traversent encore chaque jour le poste-frontière, bringuebalé·es sur des charrettes tirées par des chevaux faméliques. Les familles, assises par grappes sur les carrioles, s’accrochent aux sangles qui retiennent les tas d’affaires qu’elles ont pu emporter : un peu de vaisselle, des sacs de jute remplis de quelques kilos d’oignons ou de patates, des bidons qui s’entrechoquent dans un écho régulier, des chaises en plastique qui s’amoncellent.

    Les regards disent les longues semaines à affronter des violences quotidiennes. « Les milices arabes faisaient paître leurs dromadaires sur nos terres. Nous n’avions plus rien à manger. Ils nous imposaient des taxes chaque semaine », témoigne Mariam Idriss, dont la ferme a été prise d’assaut. Son mari a été fauché par une balle. Dans l’immense campement qui entoure la bourgade tchadienne d’Adré, où que se tourne le regard, il y a peu d’hommes.

    « Les tribus arabes et les forces de Hemetti se déchaînent contre les Massalit et plus largement contre tous ceux qui ont la #peau_noire, ceux qu’ils appellent “#ambay”, les “esclaves” », dénonce Mohammed Idriss, un ancien bibliothécaire dont la librairie a été incendiée durant les attaques. Le vieil homme, collier de barbe blanche encadrant son visage, est allongé sur un lit en fer dans l’obscurité d’une salle de classe désaffectée. « On fait face à de vieux démons. Les événements d’El-Geneina sont la continuation d’une opération de nettoyage ethnique amorcée en 2003. Les #Janjawid veulent nous rayer de la carte », poursuit-il, le corps prostré mais la voix claquant comme un coup de tonnerre.

    Les « Janjawid », « les démons à cheval » en arabe. Ce nom, souvent prononcé avec effroi, désigne les milices essentiellement composées de combattants issus des tribus arabes nomades qui ont été instrumentalisées en 2003 par le régime d’Omar al-Bachir dans sa guerre contre des groupes rebelles du Darfour qui s’estimaient marginalisés par le pouvoir central. En 2013, ces milices sont devenues des unités officielles du régime, baptisées Forces de soutien rapide (FSR) et placées sous le commandement du général Mohammed Hamdan Dagalo, alias Hemetti.

    À la chute du dictateur Omar al-Bachir en avril 2019, Hemetti a connu une ascension fulgurante à la tête de l’État soudanais jusqu’à devenir vice-président du Conseil souverain. Partageant un temps le pouvoir avec le chef de l’armée régulière, le général Bourhane, il est désormais engagé dans une lutte à mort pour le pouvoir.
    Un baril de poudre prêt à exploser

    Assis sur des milliards de dollars amassés grâce à l’exploitation de multiples #mines d’#or, et grâce à la manne financière liée à l’envoi de troupes au Yémen pour y combattre comme mercenaires, Hemetti est parvenu en quelques années à faire des FSR une #milice_paramilitaire, bien équipée et entraînée, forte de plus de 100 000 combattants, capable de concurrencer l’armée régulière soudanaise. Ses troupes gardent la haute main sur le Darfour. Sa région natale, aux confins de la Libye, du Tchad et de la Centrafrique, est un carrefour stratégique pour les #ressources, l’or notamment, mais surtout, en temps de guerre, pour les #armes qui transitent par les frontières poreuses et pour le flux de combattants recrutés dans certaines tribus nomades du Sahel, jusqu’au Niger et au Mali.

    Depuis la chute d’Al-Bachir, les milices arabes du Darfour, galvanisées par l’ascension fulgurante de l’un des leurs à la tête du pouvoir, avaient poursuivi leurs raids meurtriers sur les villages et les camps de déplacé·es non arabes du Darfour, dans le but de pérenniser l’occupation de la terre. Avant même le début de la guerre, les communautés à l’ouest du Darfour étaient à couteaux tirés.

    La ville d’El-Geneina était segmentée entre quartiers arabes et non arabes. Les kalachnikovs se refourguaient pour quelques liasses de billets derrière les étalages du souk. La ville était peuplée d’un demi-million d’habitant·es à la suite des exodes successifs des dizaines de milliers de déplacé·es, principalement des Massalit. El-Geneina était devenue un baril de poudre prêt à exploser. L’étincelle est venue de loin, le 15 avril, à Khartoum, servant de prétexte au déchaînement de violence à plus de mille kilomètres à l’ouest.

    Mediapart a rencontré une trentaine de témoins ayant fui les violences à l’ouest du Darfour. Parmi eux, des médecins, des commerçants, des activistes, des agriculteurs, des avocats, des chefs traditionnels, des fonctionnaires, des travailleurs sociaux. Au moment d’évoquer « al-ahdath », « les événements » en arabe, les rescapés marquent un temps de silence. Souvent, les yeux s’embuent, les mains s’entortillent et les premiers mots sont bredouillés, presque chuchotés.

    « Madares, El-Ghaba, Thaoura, Jamarek, Imtidad, Zuhur, Tadamon » : Taha Abdallah énumère les quartiers d’El-Geneina anciennement peuplés de Massalit qui ont aujourd’hui été vidés de leurs habitant·es. Les maisons historiques, le musée, l’administration du registre civil, les archives, les camps de déplacé·es ont été détruits. « Il n’y a plus de trace, ils ont tout effacé. Tout a été nettoyé et les débris ramassés avec des pelleteuses », déplore le membre de l’association Juzur, une organisation qui enquêtait sur les crimes commis à l’ouest du Darfour.

    Sur son téléphone, l’un de ses camarades, Arbab Ali, regarde des selfies pris avec ses amis. Sur chaque photo, l’un d’entre eux manque à l’appel. « Ils ne sont jamais arrivés ici. » Sur l’écran, son doigt fait défiler des images de mortiers, de débris de missiles antiaériens tirés à l’horizontale vers des quartiers résidentiels. « J’ai retrouvé la dépouille d’un garçon de 20 ans, le corps presque coupé en deux », s’étouffe le jeune homme assis à l’ombre d’un rakuba, un préau de paille.

    Ce petit groupe de militants des droits humains dénonce une opération d’élimination systématique ciblant les élites intellectuelles et politiques de la communauté massalit, médecins, avocats, professeurs, ingénieurs ou activistes. À chaque check-point, les soldats des FSR ou des miliciens sortaient leur téléphone et faisaient défiler le nom et les photos des personnes recherchées. « S’ils trouvent ton nom sur la liste, c’est fini pour toi. »

    L’avocat Jamal Abdallah Khamis, également membre de l’association Juzur, tient quant à lui une autre liste. Sur des feuilles volantes, il a soigneusement recopié les milliers de noms des personnes blessées, mortes ou disparues au cours des événements à El-Geneina. Parmi ces noms, se trouve notamment celui de son mentor, l’avocat Khamis Arbab, qui avait constitué un dossier documentant les attaques répétées des milices arabes sur un camp de déplacé·es bordant la ville. Il a été enlevé à son domicile, torturé, puis son corps a été jeté. Les yeux lui avaient été arrachés.

    « Tous ceux qui tentaient de faire s’élever les consciences, qui prêchaient pour un changement démocratique et une coexistence pacifique entre tribus, étaient dans le viseur », résume Jamal Abdallah Khamis. Les femmes n’ont pas échappé à la règle. Zahra Adam était engagée depuis une quinzaine d’années dans une association de lutte contre les violences faites aux femmes. Son nom apparaissait sur les listes des miliciens. Elle était recherchée pour son travail de documentation des viols commis dans la région. Rien qu’entre le 24 avril et le 20 mai, elle a recensé 60 cas de viols à El-Geneina. « Ensuite, on a dû arrêter de compter. L’avocat chargé du dossier a été éliminé. Au total, il y a des centaines de victimes, ici, dans le camp. Mais la plupart se terrent dans le silence », relate-t-elle.

    De nombreuses militantes ont été ciblées. Rabab*, une étudiante de 23 ans engagée dans un comité de quartier, avait été invitée sur le plateau d’une radio locale quelques jours avant le début de la guerre. Sur les ondes, elle avait alerté sur le risque imminent de confrontations entre communautés. Début juin, elle a été enlevée dans le dortoir de l’université par des soldats enturbannés, puis embarquée de force, les yeux bandés, vers un compound où une soixantaine de filles étaient retenues captives. « Ils disaient : “Vous ne reverrez jamais vos familles.” Ils vendaient des filles à d’autres miliciens, parfois se les échangeaient contre un tuk-tuk », témoigne-t-elle d’une voix éteinte, drapée d’un niqab noir, de larges cernes soulignant ses yeux.

    Depuis 2003, au Darfour, le corps des femmes est devenu un des champs de bataille. « Le viol est un outil du nettoyage ethnique. Ils violent pour humilier, pour marquer dans la chair leur domination. Ils sont fiers de violer une communauté qu’ils considèrent comme inférieure », poursuit Zahra, ajoutant que même des fillettes ont été violées au canon de kalachnikov.

    Selon plusieurs témoins rencontrés par Mediapart, dans les jours qui ont suivi les massacres de la mi-juin, plusieurs chefs de milices arabes, en coordination avec les Forces de soutien rapide, ont entrepris de dissimuler les traces du carnage. Les équipes du Croissant-Rouge soudanais ont été chargées par un « comité sanitaire » de ramasser les corps qui jonchaient les avenues.

    « L’odeur était pestilentielle. Les cadavres pourrissaient au soleil, parfois déchiquetés par les chiens », souffle Mohammed*, le regard vide. « Chaque jour, on remplissait la benne d’un camion à ras bord. Elle pouvait contenir plus d’une cinquantaine de corps et les camions faisaient plusieurs allers-retours », détaille Ahmed*, un autre témoin forcé de jouer les fossoyeurs pendant dix jours, « de 8 à 14 heures ». Les équipes avaient interdiction de prendre des photos et de décompter le nombre de morts. Il leur était impossible de savoir où les camions se rendaient.
    Une enquête de la Cour pénale internationale

    Échappant aux regards des soldats, l’étudiant de 28 ans s’est glissé entre la cabine et la benne de l’un des camions. Le chauffeur a pris la direction d’un site appelé Turab El-Ahmar, à l’ouest de la ville. « Les trous étaient déjà creusés. À plusieurs reprises, un camion arrivait, levait la benne et déversait les corps », se souvient-il. Puis une pelleteuse venait reboucher la fosse.

    Quartier par quartier, maison par maison, ils ont ratissé la ville d’El-Geneina. « En tout, il y a eu au moins 4 000 corps enterrés », estime Mohammed. Début septembre, le Commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme a annoncé avoir reçu des informations crédibles sur l’existence de treize fosses communes.

    Les paramilitaires nient toute responsabilité dans ce qu’ils dépeignent comme un conflit ethnique entre communautés de l’ouest du Darfour. Malgré les demandes de Mediapart, la zone reste inaccessible pour les journalistes.

    « Entre le discours des FSR et celui des victimes, la justice tranchera », conteste Arbab Ali avec une once d’optimisme. Le 13 juillet, la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé l’ouverture d’une nouvelle enquête pour « crimes de guerre » au Darfour. Elle vient s’ajouter aux investigations démarrées en 2005 à la suite de la guerre qui, sous le régime d’Omar al-Bachir, avait déjà fait plus de 300 000 morts dans la région.

    Pourtant, il règne chez les rescapé·es du Darfour un sentiment de déjà-vu. À ceci près que la guerre actuelle ne soulève pas la même indignation internationale qu’en 2003. Beaucoup de réfugié·es n’attendent plus rien de la justice internationale. Vingt ans après les premières enquêtes de la CPI, aucune condamnation n’a encore été prononcée.

    Alors, dans les travées du camp, le choc du déplacement forcé laisse place à une volonté de revanche. Certains leaders massalit ont pris langue avec l’armée régulière. Une contre-offensive se prépare. Le camp bruisse de rumeurs sur des mouvements de troupes et des livraisons d’armes au Darfour. Côté tchadien, les humanitaires et les autorités s’attendent à ce que la situation dégénère à nouveau.

    Au Soudan, le conflit ne se résume plus seulement en un affrontement entre deux armées. Aujourd’hui, chaque clan et chaque tribu joue sa survie au milieu de la désintégration de l’État. Les voix dissidentes, opposées à une guerre absurde, sont criminalisées par les belligérants et souvent emprisonnées. La guerre est partie pour durer. Et les civils, prisonniers d’un engrenage meurtrier, en payent le prix.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/131123/au-darfour-la-terreur-huis-clos-ils-veulent-nous-rayer-de-la-carte
    #réfugiés_soudanais #génocide

  • Santiago, Italia

    Le documentaire rend compte à travers des documents d’époque et des témoignages, de l’activité de l’ambassade Italienne à Santiago lors des mois qui ont suivi le coup d’état de Pinochet le 11 septembre 1973 mettant fin au régime démocratique de Salvador Allende2. L’ambassade a donné refuge à des centaines d’opposants au régime du général Pinochet, leur permettant ensuite de rejoindre l’Italie3.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Santiago,_Italia
    #film #documentaire #film_documentaire

    #Chili #Santiago #Unidad_Popular #Allende #histoire #mémoire #socialisme_humaniste_et_démocratique #marxisme #cuivre #nationalisme #prix_bloqués #médias #démocratie #coup_d'Etat #dictature #témoignage #terreur #climat_de_peur #peur #enfermement #MIR #torture #stade #Villa_Grimaldi #disparitions #ambassade_d'Italie #ambassades #réfugiés #réfugiés_chiliens #solidarité

  • Decolonize your eyes, Padova.. Pratiche visuali di decolonizzazione della città

    Introduzione
    Il saggio a tre voci è composto da testi e due video.[1]
    Mackda Ghebremariam Tesfau’ (L’Europa è indifendibile) apre con un una riflessione sulle tracce coloniali che permangono all’interno degli spazi urbani. Lungi dall’essere neutre vestigia del passato, questi segni sono tracce di una storia contesa, che si situa contemporaneamente al cuore e ai margini invisibili della rappresentazione di sé dell’occidente. La dislocazione continua del fatto coloniale nella memoria storica informa il discorso che è oggi possibile sul tema delle migrazioni, del loro governo e dei rapporti tra Nord e Sud Globale. La stessa Europa di cui Césaire dichiarava “l’indifendibilità” è ora una “fortezza” che presidia i suoi confini dal movimento di ritorno postcoloniale.
    Annalisa Frisina (Pratiche visuali di decolonizzazione della città) prosegue con il racconto del percorso didattico e di ricerca Decolonizzare la città. Dialoghi visuali a Padova, realizzato nell’autunno del 2020. Questa esperienza mostra come sia possibile performare la decolonizzazzione negli spazi pubblici e attivare contro-politiche della memoria a livello urbano. Le pratiche visuali di decolonizzazione sono utili non solo per fare vacillare statue e nomi di vie, ma soprattutto per mettere in discussione le visioni del mondo e le gerarchie sociali che hanno reso possibile celebrare/dimenticare la violenza razzista e sessista del colonialismo. Le vie coloniali di Padova sono state riappropriate dai corpi, dalle voci e dagli sguardi di sei cittadine/i italiane/i afrodiscendenti, facendo uscire dall’insignificanza le tracce coloniali urbane e risignificandole in modo creativo.
    Infine, Salvatore Frisina (L’esperienza del A.S.D. Quadrato Meticcio) conclude il saggio soffermandosi sui due eventi urbani Decolonize your eyes (giugno e ottobre 2020), promossi dall’associazione Quadrato Meticcio, che ha saputo coinvolgere in un movimento decoloniale attori sociali molto eterogenei. Da quasi dieci anni questa associazione di sport popolare, radicata nel rione Palestro di Padova, favorisce la formazione di reti sociali auto-gestite e contribuisce alla lotta contro discriminazioni multiple (di classe, “razza” e genere). La sfida aperta dai movimenti antirazzisti decoloniali è infatti quella di mettere insieme processi simbolici e materiali.

    L’Europa è indifendibile
    L’Europa è indifendibile, scrive Césaire nel celebre passo iniziale del suo Discorso sul colonialismo (1950). Questa indifendibilità non è riferita tanto al fatto che l’Europa abbia commesso atti atroci quanto al fatto che questi siano stati scoperti. La “scopertura” è “svelamento”. Ciò che viene svelata è la natura stessa dell’impresa “Europa” e lo svelamento porta all’impossibilità di nascondere alla “coscienza” e alla “ragione” tali fatti: si tratta di un’indifendibilità “morale” e “spirituale”. A portare avanti questo svelamento, sottraendosi alla narrazione civilizzatrice che legittima – ovvero che difende – l’impresa coloniale sono, secondo Césaire, le masse popolari europee e i colonizzati che “dalle cave della schiavitù si ergono giudici”. Era il 1950.
    A più di sessant’anni di distanza, oggi l’Europa è tornata ad essere ben difesa, i suoi confini materiali e simbolici più che mai presidiati. Come in passato, tuttavia, uno svelamento della sua autentica natura potrebbe minarne le fondamenta. È quindi importante capire quale sia la narrazione che oggi sostiene la fortezza Europa.
    La scuola decoloniale ha mostrato come la colonialità sia un attributo del potere, la scuola postcoloniale come leggerne i segni all’interno della cultura materiale. Questa stessa cultura è stata interrogata, al fine di portarne alla luce gli impliciti. È successo ripetutamente alla statua di Montanelli, prima oggetto dell’azione di Non Una di Meno Milano, poi del movimento Black Lives Matter Italia. È successo alla fermata metro di Roma Amba Aradam. È successo anche alle vie coloniali di Padova. La reazione a queste azioni – reazione comune a diversi contesti internazionali – è particolarmente esplicativa della necessità, del Nord globale, di continuare a difendersi.
    Il fronte che si è aperto in contrapposizione alla cosiddetta cancel culture[2] si è battuto per la tutela del “passato” e della “Storia”, così facendo ribadendo un potere non affatto scontato, che è quello di decidere cosa sia “passato” e quale debba essere la Storia raccontata – oltre che il come debba essere raccontata. Le masse che si sono radunate sotto le statue abbattute, deturpate e sfidate, l’hanno fatto per liberare “passato” e “Storia” dal dominio bianco, maschile e coloniale che ha eretto questi monumenti a sua immagine e somiglianza. La posta in gioco è, ancora, uno svelamento, la presa di coscienza del fatto che queste non sono innocue reliquie di un passato disattivato, ma piuttosto la testimonianza silente di una Storia che lega indissolubilmente passato a presente, Nord globale e Sud globale, colonialismo e migrazioni. Riattivare questo collegamento serve a far crollare l’impalcatura ideologica sulla quale oggi si fonda la pretesa di sicurezza invocata e agita dall’Europa.
    Igiaba Scego e Rino Bianchi, in Roma Negata (2014), sono stati tra i primi a dedicare attenzione a queste rumorose reliquie in Italia. L’urgenza che li ha spinti a lavorare sui resti coloniali nella loro città è l’oblio nel quale il colonialismo italiano è stato relegato. Come numerosi autrici e autori postcoloniali hanno dimostrato, tuttavia, questo oblio è tutt’altro che improduttivo. La funzione che svolge è infatti letteralmente salvifica, ovvero ha lo scopo di salvare la narrazione nazionale dalle possibili incrinature prodotte dallo svelamento alla “barra della coscienza” (Césaire 1950) delle responsabilità coloniali e dei modi in cui si è stati partecipi e protagonisti della costruzione di un mondo profondamente diseguale. Al contempo, la presenza di questi monumenti permette, a livello inconscio, di continuare a godere del senso di superiorità imperiale di cui sono intrisi, di continuare cioè a pensarsi come parte dell’Europa e del Nord Globale, con ciò che questo comporta. Che cosa significa dunque puntarvi il dito? Che cosa succede quando la memoria viene riattivata in funzione del presente?
    La colonialità ha delle caratteristiche intrinseche, ovvero dei meccanismi che ne presiedono il funzionamento. Una di queste caratteristiche è la produzione costante di confini. Questa necessità è evidente sin dai suoi albori ed è rintracciabile anche in pagine storiche che non sono abitualmente lette attraverso una lente coloniale. Un esempio è la riflessione marxiana dei Dibattiti sulla legge contro i furti di legna[3], in cui il pensatore indaga il fenomeno delle enclosure, le recinzioni che tra ‘700 e ‘800 comparvero in tutta Europa al fine di rendere privati i fondi demaniali, usati consuetudinariamente dalla classe contadina come supporto alla sussistenza del proprio nucleo attraverso la caccia e la raccolta. Distinzione, definizione e confinamento sono processi materiali e simbolici centrali della colonialità. Per contro, connettere, comporre e sconfinare sono atti di resistenza al potere coloniale.
    Da tempo Gurminder K. Bhambra (2017) ha posto l’accento sull’importanza di questo lavoro di ricucitura storica e sociologica. Secondo l’autrice la stessa distinzione tra cittadino e migrante è frutto di una concettualizzazione statuale che fonda le sue categorie nel momento storico degli imperi. In questo senso per Bhambra tale distinzione poggia su di una lettura inadeguata della storia condivisa. Tale lettura ha l’effetto di materializzare l’uno – il cittadino – come un soggetto avente diritti, come un soggetto “al giusto posto”, e l’altro – il migrante – come un soggetto “fuori posto”, qualcuno che non appartiene allo stato nazione.
    Questo cortocircuito storico è reso evidente nella mappa coloniale che abbiamo deciso di “sfidare” nel video partecipativo. La raffigurazione dell’Impero Italiano presente in piazza delle Erbe a Padova raffigura Eritrea, Etiopia, Somalia, Libia, Albania e Italia in bianco, affinché risaltino sullo sfondo scuro della cartina. Su questo spazio bianco è possibile tracciare la rotta che oggi le persone migranti intraprendono per raggiungere la Libia da numerosi paesi subsahariani, tra cui la Somalia, l’Eritrea e l’Etiopia, la stessa Libia che è stata definita un grande carcere a cielo aperto. Dal 2008 infatti Italia e Libia sono legate da accordi bilaterali. Secondo questi accordi l’Italia si è impegnata a risarcire la Libia per l’occupazione coloniale, e in cambio la Libia ha assunto il ruolo di “guardiano” dei confini italiani, ruolo che agisce attraverso il contenimento delle persone migranti che raggiungono il paese per tentare la traversata mediterranea verso l’Europa. Risulta evidente come all’interno di questi accordi vi è una riattivazione del passato – il risarcimento coloniale – che risulta paradossalmente neocoloniale piuttosto che de o anti-coloniale.
    L’Italia è indifendibile, eppure si difende. Si difende anche grazie all’ombra in cui mantiene parti della sua storia, e si difende moltiplicando i confini coloniali tra cittadini e stranieri, tra passato e presente. Questo passato non è però tale, al contrario plasma il presente traducendo vecchie disuguaglianze sotto nuove vesti. Oggi la dimensione coloniale si è spostata sui corpi migranti, che si trovano ad essere marchiati da una differenza che produce esclusione nel quotidiano.
    I confini coloniali – quelli materiali come quelli simbolici – si ergono dunque a difesa dell’Italia e dell’Europa. Come nel 1950 però, questa difendibilità è possibile solo a patto che le masse popolari e subalterne accettino e condividano la narrazione coloniale, che è stata ieri quella della “missione civilizzatrice” ed è oggi quella della “sicurezza”. Al fine di decolonizzare il presente è dunque necessario uscire da queste narrazioni e riconnettere il passato alla contemporaneità al fine di svelare la natura coloniale del potere oggi. Così facendo la difesa dell’Europa potrà essere nuovamente scalfibile.
    Il video partecipativo realizzato a Padova va esattamente in questa direzione: cerca di ricucire storie e relazioni interrotte e nel farlo pone al centro il fatto coloniale nella sua continuità e contemporaneità.

    Pratiche visuali di decolonizzazione della città
    Il video con Mackda Ghebremariam Tesfau è nato all’interno del laboratorio di Visual Research Methods dell’Università di Padova. Da diversi anni, questo laboratorio è diventato un’occasione preziosa per fare didattica e ricerca in modo riflessivo e collaborativo, affrontando il tema del razzismo nella società italiana attraverso l’analisi critica della visualità legata alla modernità europea e attraverso la sperimentazione di pratiche contro-visuali (Mirzoeff 2011). Come docente, ho provato a fare i conti con “l’innocenza bianca” (Wekker 2016) e spingere le mie studentesse e i miei studenti oltre la memoria auto-assolutoria del colonialismo italiano coi suoi miti (“italiani brava gente”, “eravamo lì come migranti straccioni” ecc.). Per non restare intrappolate/i nella colonialità del potere, le/li/ci ho invitate/i a prendere consapevolezza di quale sia il nostro sguardo su noi stessi nel racconto che facciamo degli “altri” e delle “altre”, mettendo in evidenza il peso delle divisioni e delle gerarchie sociali. Come mi hanno detto alcune mie studentesse, si tratta di un lavoro faticoso e dal punto di vista emotivo a volte difficilmente sostenibile. Eppure, penso sia importante (far) riconoscere il proprio “disagio” in quanto europei/e “bianchi/e” e farci qualcosa collettivamente, perché il sentimento di colpa individuale è sterile, mentre la responsabilità è capacità di agire, rispondere insieme e prendere posizione di fronte ai conflitti sociali e alle disuguaglianze del presente.
    Nel 2020 la scommessa è stata quella di fare insieme a italiani/e afrodiscendenti un percorso di video partecipativo (Decolonizzare la città. Dialoghi visuali a Padova[4]) e di utilizzare il “walk about” (Frisina 2013) per fare passeggiate urbane con studentesse e studenti lasciandosi interpellare dalle tracce coloniali disseminate nella città di Padova, in particolare nel rione Palestro dove abito. La congiuntura temporale è stata cruciale.
    Da una parte, ci siamo ritrovate nell’onda del movimento Black Lives Matter dopo l’omicidio di George Floyd a Minneapolis. Come discusso altrove (Frisina & Ghebremariam Tesfau’ 2020, pp. 399-401), l’antirazzismo è (anche) una contro-politica della memoria e, specialmente nell’ultimo anno, a livello globale, diversi movimenti hanno messo in discussione il passato a partire da monumenti e da vie che simbolizzano l’eredità dello schiavismo e del colonialismo. Inevitabilmente, in un’Europa post-coloniale in cui i cittadini hanno le origini più diverse da generazioni e in cui l’attivismo degli afrodiscendenti diventa sempre più rilevante, si sono diffuse pratiche di risignificazione culturale attraverso le quali è impossibile continuare a vedere statue, monumenti, musei, vie intrise di storia coloniale in modo acritico; e dunque è sempre più difficile continuare a vedersi in modo innocente.
    D’altra parte, il protrarsi della crisi sanitaria legata al covid-19, con le difficoltà crescenti a fare didattica in presenza all’interno delle aule universitarie, ha costituito sia una notevole spinta per uscire in strada e sperimentare forme di apprendimento più incarnate e multisensoriali, sia un forte limite alla socialità che solitamente accompagna la ricerca qualitativa, portandoci ad accelerare i tempi del laboratorio visuale in modo da non restare bloccati da nuovi e incalzanti dpcm. Nel giro di soli due mesi (ottobre-novembre 2020), dunque, abbiamo realizzato il video con l’obiettivo di far uscire dall’insignificanza alcune tracce coloniali urbane, risignificandole in modo creativo.
    Il video è stato costruito attraverso pratiche visuali di decolonizzazione che hanno avuto come denominatore comune l’attivazione di contro-politiche della memoria, a partire da sguardi personali e familiari, intimamente politici. Le sei voci narranti mettono in discussione le gerarchie sociali che hanno reso possibile celebrare/dimenticare la violenza razzista e sessista del colonialismo e offrono visioni alternative della società, perché capaci di aspirare e rivendicare maggiore giustizia sociale, la libertà culturale di scegliersi le proprie appartenenze e anche il potere trasformativo della bellezza artistica.
    Nel video, oltre a Mackda Ghebremariam Tesfau’, ci sono Wissal Houbabi, Cadigia Hassan, Ilaria Zorzan, Emmanuel M’bayo Mertens e Viviana Zorzato, che si riappropriano delle tracce coloniali con la presenza dei loro corpi in città e la profondità dei loro sguardi.
    Wissal, artista “figlia della diaspora e del mare di mezzo”, “reincarnazione del passato rimosso”, si muove accompagnata dalla canzone di Amir Issa Non respiro (2020). Lascia la sua poesia disseminata tra Via Catania, via Cirenaica, via Enna e Via Libia.

    «Cerchiamo uno spiraglio per poter respirare, soffocati ben prima che ci tappassero la bocca e ci igienizzassero le mani, cerchiamo una soluzione per poter sopravvivere […]
    Non siamo sulla stessa barca e ci vuole classe a non farvelo pesare. E la mia classe sociale non ha più forza di provare rabbia o rancore.
    Il passato è qui, insidioso tra le nostre menti e il futuro è forse passato.
    Il passato è qui anche se lo dimentichi, anche se lo ignori, anche se fai di tutto per negare lo squallore di quel che è stato, lo Stato e che preserva lo status di frontiere e ius sanguinis.
    Se il mio popolo un giorno volesse la libertà, anche il destino dovrebbe piegarsi».

    Cadigia, invece, condivide le fotografie della sua famiglia italo-somala e con una sua amica si reca in Via Somalia. Incontra una ragazza che abita lì e non ha mai capito la ragione del nome di quella via. Cadigia le offre un suo ricordo d’infanzia: passando da via Somalia con suo padre, da bambina, gli aveva chiesto perché si chiamasse così, senza ricevere risposta. E si era convinta che la Somalia dovesse essere importante. Crescendo, però, si era resa conto che la Somalia occupava solo un piccolo posto nella storia italiana. Per questo Cadigia è tornata in via Somalia: vuole lasciare traccia di sé, della sua storia familiare, degli intrecci storici e rendere visibili le importanti connessioni che esistono tra i due paesi. Via Somalia va fatta conoscere.
    Anche Ilaria si interroga sul passato coloniale attraverso l’archivio fotografico della sua famiglia italo-eritrea. Gli italiani in Eritrea si facevano spazio, costruendo strade, teleferiche, ferrovie, palazzi… E suo nonno lavorava come macchinista e trasportatore, mentre la nonna eritrea, prima di sposare il nonno, era stata la sua domestica. Ispirata dal lavoro dell’artista eritreo-canadese Dawit L. Petros, Ilaria fa scomparire il suo volto dietro fotografie in bianco e nero. In Via Asmara, però, lo scopre e si mostra, per vedersi finalmente allo specchio.
    Emmanuel è un attivista dell’associazione Arising Africans. Nel video lo vediamo condurre un tour nel centro storico di Padova, in Piazza Antenore, ex piazza 9 Maggio. Emmanuel cita la delibera con la quale il comune di Padova dedicò la piazza al giorno della “proclamazione dell’impero” da parte di Mussolini (1936). Secondo Emmanuel, il fascismo non è mai scomparso del tutto: ad esempio, l’idea dell’italianità “per sangue” è un retaggio razzista ancora presente nella legge sulla cittadinanza italiana. Ricorda che l’Italia è sempre stata multiculturale e che il mitico fondatore di Padova, Antenore, era un profugo, scappato da Troia in fiamme. Padova, così come l’Italia, è inestricabilmente legata alla storia delle migrazioni. Per questo Emmanuel decide di lasciare sull’edicola medioevale, che si dice contenga le spoglie di Antenore, una targa dedicata alle migrazioni, che ha i colori della bandiera italiana.
    Chiude il video Viviana, pittrice di origine eritrea. La sua casa, ricca di quadri ispirati all’iconografia etiope, si affaccia su Via Amba Aradam. Viviana racconta del “Ritratto di ne*ra”, che ha ridipinto numerose volte, per anni. Farlo ha significato prendersi cura di se stessa, donna italiana afrodiscendente. Riflettendo sulle vie coloniali che attraversa quotidianamente, sostiene che è importante conoscere la storia ma anche ricordare la bellezza. Amba Alagi o Amba Aradam non possono essere ridotte alla violenza coloniale, sono anche nomi di montagne e Viviana vuole uno sguardo libero, capace di bellezza. Come Giorgio Marincola, Viviana continuerà a “sentire la patria come una cultura” e non avrà bandiere dove piegare la testa. Secondo Viviana, viviamo in un periodo storico in cui è ormai necessario “decolonizzarsi”.

    Anche nel nostro percorso didattico e di ricerca la parola “decolonizzare” è stata interpretata in modi differenti. Secondo Bhambra, Gebrial e Nişancıoğlu (2018) per “decolonizzare” ci deve essere innanzitutto il riconoscimento che il colonialismo, l’imperialismo e il razzismo sono processi storici fondamentali per comprendere il mondo contemporaneo. Tuttavia, non c’è solo la volontà di costruire la conoscenza in modi alternativi e provincializzare l’Europa, ma anche l’impegno a intrecciare in modo nuovo movimenti anti-coloniali e anti-razzisti a livello globale, aprendo spazi inediti di dialogo e dando vita ad alleanze intersezionali.

    L’esperienza del A.S.D. Quadrato Meticcio
    Il video-partecipativo è solo uno degli strumenti messi in atto a Padova per intervenire sulla memoria coloniale. Con l’evento pubblico urbano chiamato Decolonize your Eyes (20 giugno 2020), seguito da un secondo evento omonimo (18 Ottobre 2020), attivisti/e afferenti a diversi gruppi e associazioni che lavorano nel sociale si incontrano a favore di uno scopo che, come poche volte precedentemente, consente loro di agire all’unisono. Il primo evento mette in scena il gesto simbolico di cambiare, senza danneggiare, i nomi di matrice coloniale di alcune vie del rione Palestro, popolare e meticcio. Il secondo agisce soprattutto all’interno di piazza Caduti della Resistenza (ex Toselli) per mezzo di eventi performativi, artistici e laboratoriali con l’intento di coinvolgere un pubblico ampio e riportare alla memoria le violenze coloniali italiane. Ai due eventi contribuiscono realtà come l’asd Quadrato Meticcio, la palestra popolare Chinatown, Non una di meno-Padova, il movimento ambientalista Fridays for future, il c.s.o. Pedro e l’Associazione Nazionale Partigiani Italiani (anpi).
    Si è trattato di un rapporto di collaborazione mutualistico. L’anpi «indispensabile sin dalle prime battute nell’organizzazione» – come racconta Camilla[5] del Quadrato Meticcio – ha contribuito anche ai dibattiti in piazza offrendo densi spunti storici sulla Resistenza. Fridays for future, impegnata nella lotta per l’ambiente, è intervenuta su via Lago Ascianghi, luogo in cui, durante la guerra d’Etiopia, l’utilizzo massiccio di armi chimiche da parte dell’esercito italiano ha causato danni irreversibili anche dal punto di vista della devastazione del territorio. Ha sottolineato poi come l’odierna attività imprenditoriale dell’eni riproduca lo stesso approccio prevaricatore colonialista. Non una di meno-Padova, concentrandosi sulle tematiche del trans-femminismo e della lotta di genere, ha proposto un dibattito intitolando l’attuale via Amba Aradam a Fatima, la bambina comprata da Montanelli secondo la pratica coloniale del madamato. Durante il secondo evento ha realizzato invece un laboratorio di cartografia con gli abitanti del quartiere di ogni età, proponendogli di tracciare su una mappa le rotte dal luogo d’origine a Padova: un gesto di sensibilizzazione sul rapporto tra memoria e territorio. Il c.s.o. Pedro ha invece offerto la strumentazione mobile e di amplificazione sonora che ha permesso a ogni intervento di diffondersi in tutto il quartiere.
    Rispetto alla presenza attiva nel quartiere, Il Quadrato Meticcio, il quale ha messo a disposizione gli spazi della propria sede come centrale operativa di entrambi gli eventi, merita un approfondimento specifico.
    Mattia, il fondatore dell’associazione, mi racconta che nel 2008 il “campetto” – così chiamato dagli abitanti del quartiere – situato proprio dietro la “piazzetta” (Piazza Caduti della Resistenza), sarebbe dovuto diventare un parcheggio, ma “l’intervento congiunto della comunità del quartiere lo ha preservato”. Quando gli chiedo come si inserisca l’esperienza dell’associazione in questo ricordo, risponde: “Ho navigato a vista dopo quell’occasione. Mi sono accorto che c’era l’esigenza di valorizzare il campo e che il gioco del calcio era un contesto di incontro importante per i ragazzi. La forma attuale si è consolidata nel tempo”. Adesso, la presenza costante di una vivace comunità “meticcia” – di età che varia dagli otto ai sedici anni – è una testimonianza visiva e frammentaria della cultura familiare che i ragazzi si portano dietro. Come si evince dalla testimonianza di Mattia: «Loro non smettono mai di giocare. Sono in strada tutto il giorno e passano la maggior parte del tempo con il pallone ai piedi. Il conflitto tra di loro riflette i conflitti che vivono in casa. Ognuno di loro appartiene a famiglie economicamente in difficoltà, che condividono scarsi accessi a opportunità finanziarie e sociali in generale. Una situazione che inevitabilmente si ripercuote sull’emotività dei ragazzi, giorno dopo giorno».

    L’esperienza dell’associazione si inserisce all’interno di una rete culturale profondamente complessa ed eterogenea. L’intento dell’associazione, come racconta Camilla, è quello di offrire una visione inclusiva e una maggiore consapevolezza dei processi coloniali e post-coloniali a cui tutti, direttamente o indirettamente, sono legati; un approccio simile a quello della palestra popolare Chinatown, che offre corsi di lotta frequentati spesso dagli stessi ragazzi che giocano nel Quadrato Meticcio. L’obiettivo della palestra è quello di educare al rispetto reciproco attraverso la simulazione controllata di situazioni conflittuali legate all’uso di stereotipi etno-razziali e di classe, gestendo creativamente le ambivalenze dell’intimità culturale (Herzfeld, 2003). Uber[6], fra i più attivi promotori di Decolonize your eyes e affiliato alla palestra, racconta che: «Fin tanto che sono ragazzini, può essere solo un gioco, e tra di loro possono darsi man forte ogni volta che si scontrano con il razzismo brutale che questa città offre senza sconti. Ma ho paura che presto per loro sarà uno shock scoprire quanto può far male il razzismo a livello politico, lavorativo, legale… su tutti i fronti. E ho paura soprattutto che non troveranno altro modo di gestire l’impatto se non abbandonandosi agli stereotipi che gli orbitano già attorno».

    La mobilitazione concertata del 2008 a favore della preservazione del “campetto”, ha molto in comune con il contesto dal quale è emerso Decolonize your eyes. È “quasi un miracolo” di partecipazione estesa, mi racconta Uber, considerando che storicamente le “realtà militanti” di Padova hanno sempre faticato ad allearsi e collaborare. Similmente, con una vena solenne ma scherzosa, Camilla definisce entrambi gli eventi “necessari”. Lei si è occupata di gestire anche la “chiamata” generale: “abbiamo fatto un appello aperto a tutti sui nostri social network e le risposte sono state immediate e numerose”. Uber mi fa presente che “già da alcune assemblee precedenti si poteva notare l’intenzione di mettere da parte le conflittualità”. Quando gli chiedo perché, risponde “perché non ne potevamo più [di andare l’uno contro l’altro]”. Camilla sottolinea come l’impegno da parte dell’anpi di colmare le distanze generazionali, nei concetti e nelle pratiche, sia stato particolarmente forte e significativo.

    Avere uno scopo comune sembra dunque essere una prima risorsa per incontrarsi. Ma è nel modo in cui le conflittualità vengono gestite quotidianamente che può emergere una spinta rivoluzionaria unitaria. In effetti, «[…] l’equilibrio di un gruppo non nasce per forza da uno stato di inerzia, ma spesso da una serie di conflitti interni controllati» (Mauss, 2002, p. 194).
    Nel frattempo il Quadrato Meticcio ha rinnovato il suo impegno nei confronti del quartiere dando vita a una nuova iniziativa, chiamata All you can care, basata sullo scambio mutualistico di beni di prima necessità. Contemporaneamente, i progetti per un nuovo Decolonize your eyes vanno avanti e, da ciò che racconta Camilla, qualcosa sembra muoversi:
    «Pochi giorni fa una signora ci ha fermati per chiederci di cambiare anche il nome della sua via – anch’essa di rimando coloniale. Stiamo avendo anche altre risposte positive, altre realtà vogliono partecipare ai prossimi eventi».
    L’esperienza di Decolonize your eyes è insomma una tappa di un lungo progetto di decolonizzazione dell’immaginario e dell’utilizzo dello spazio pubblico che coinvolge molte realtà locali le quali, finalmente, sembrano riconoscersi in una lotta comune.

    Note
    [1] Annalisa Frisina ha ideato la struttura del saggio e ha scritto il paragrafo “Pratiche visuali di decolonizzazione della città”; Mackda Ghebremariam Tesfau’ ha scritto il paragrafo “L’Europa è indifendibile” e Salvatore Frisina il paragrafo “L’esperienza del A.S.D. Quadrato Meticcio”.
    [2] Cancel culture è un termine, spesso utilizzato con un’accezione negativa, che è stato usato per indicare movimenti emersi negli ultimi anni che hanno fatto uso del digitale, come quello il #metoo femminista, e che è stato usato anche per indicare le azioni contro le vestigia coloniali e razziste che si sono date dal Sud Africa agli Stati Uniti all’Europa.
    [3] Archivio Marx-Engels
    [4] Ho ideato con Elisabetta Campagni il percorso di video partecipativo nella primavera del 2020, rispondendo alla call “Cinema Vivo” di ZaLab; il nostro progetto è rientrato tra i primi cinque votati e supportati dal crowfunding.
    [5] Da un’intervista realizzata dall’autore in data 10/12/2020 a Camilla Previati e Mattia Boscaro, il fondatore dell’associazione.
    [6] Da un’intervista realizzata con Uber Mancin dall’autore in data 9/12/2020.
    [7] Le parti introduttive e finali del video sono state realizzate con la gentile concessione dei materiali audiovisivi da parte di Uber Mancin (archivio privato).

    Bibliografia
    Bhambra, G., Nişancıoğlu, K. & Gebrial, D., Decolonising the University, Pluto Press, London, 2018.
    Bhambra, G. K., The current crisis of Europe: Refugees, colonialism, and the limits of cosmopolitanism, in: «European Law Journal», 23(5): 395-405. 2017.
    Césaire, A. (1950), Discorso sul colonialismo, Mellino, M. (a cura di), Ombre corte, Verona, 2010.
    Frisina, A., Ricerca visuale e trasformazioni socio-culturali, utet Università, Torino, 2013.
    Frisina, A. e Ghebremariam Tesfau’, M., Decolonizzare la città. L’antirazzismo come contro-politica della memoria. E poi?, «Studi Culturali», Anno XVII, n. 3, Dicembre, pp. 399-412. 2020.
    Herzfeld, M., & Nicolcencov, E., Intimità culturale: antropologia e nazionalismo, L’ancora del Mediterraneo, 2003.
    Mauss, M., Saggio sul dono: forma e motivo dello scambio nelle società arcaiche, G. Einaudi, Torino, 2002.
    Mirzoeff, N., The Right to Look: A Counterhistory of Visuality, Duke University Press, Durham e London, 2011.
    Scego, I., & Bianchi, R., Roma negata. Percorsi postcoloniali nella città, Ediesse, Roma, 2014.
    Wekker, G., White Innocence: Paradoxes of Colonialism and Race, Duke University Press, Durham and London, 2016.

    https://www.roots-routes.org/decolonize-your-eyes-padova-pratiche-visuali-di-decolonizzazione-della
    #décolonisation #décolonial #colonialisme #traces_coloniales #Italie #Italie_coloniale #colonialisme_italien #statues #Padova #Padoue

    ping @cede (même si c’est en italien...)

  • Des Africains témoignent de leurs difficultés à passer les frontières pour sortir d’Ukraine

    Depuis le début de l’opération militaire russe en Ukraine, des centaines de milliers de personnes résidant en Ukraine ont tenté de quitter le pays ces derniers jours et les témoignages d’Africains se multiplient concernant les difficultés de passer la frontière polonaise.

    « Il y a eu des informations regrettables (selon lesquelles) la police ukrainienne et le personnel de sécurité refusent de laisser les Nigérians monter dans les bus et les trains » pour la Pologne, a déclaré le porte-parole de la présidence nigériane Garba Shehu. « Il est primordial que chacun soit traité avec dignité et sans faveur », a-t-il insisté.

    M. Shehu a déclaré que selon d’autres informations, des fonctionnaires polonais ont refusé l’entrée en Pologne à des citoyens nigérians en provenance d’Ukraine. Depuis le début de l’offensive russe, la situation est compliquée à la frontière terrestre à cause de l’afflux de personnes fuyant les combats.

    Pour beaucoup d’Africains, le passage vers la Pologne a été bloqué du côté ukrainien et certains ont pu franchir la frontière en descendant un peu plus au sud, par la #Slovaquie. C’est le cas de Patrice, menuisier camerounais qui a quitté Kharkiv.

    "C’est très difficile. Très difficile au niveau de la frontière de la #Pologne. On refusait beaucoup les Noirs, on ne les acceptait pas du tout et on faisait juste passer des Blancs. Nous sommes ensuite arrivé au niveau de la frontière en Slovaquie, c’était parfait."

    De son côté, l’ambassadrice de Pologne au Nigeria, Joanna Tarnawska, a rejeté les accusations de racisme. « Tout le monde reçoit un traitement égal. Je peux vous assurer que, selon les informations dont je dispose, certains ressortissants nigérians ont déjà franchi la frontière avec la Pologne », a-t-elle réagi auprès des médias locaux.

    Selon elle, les documents d’identité invalides sont acceptés pour franchir la frontière et les restrictions liées au Covid-19 ont été levées. Les Nigérians disposent d’un délai de 15 jours pour ensuite quitter le pays, a-t-elle ajouté.

    Comme des centaines de milliers de personnes, de nombreux Africains - pour la plupart étudiants - tentent de fuir l’Ukraine pour rejoindre les pays voisins, notamment la Pologne. C’est notamment le cas de Mike, qui vit à Kharkiv.

    "Ça bombarde de partout, les transports en commun ne fonctionnent plus, les métros ont été transformé en abri anti-bombes."

    https://www.rfi.fr/fr/europe/20220228-guerre-ukraine-africains-temoignent-difficult%C3%A9s-passer-fronti%C3%A

    #racisme #réfugiés #guerre #Ukraine #Africains #étudiants #frontières #fermeture_des_frontières #catégorisation #tri #réfugiés_ukrainiens

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    Les formes de #racisme qui montrent leur visage en lien avec la #guerre en #Ukraine... en 2 fils de discussion sur seenthis :
    https://seenthis.net/messages/951232

    • Les étudiants tunisiens s’organisent pour quitter l’Ukraine en guerre

      Environ 800 étudiants tunisiens sont encore bloqués en Ukraine. Les premières évacuations ont eu lieu vendredi 25 février dans la soirée, mais beaucoup restent encore à évacuer vers les pays voisins.

      Les étudiants tunisiens sont encore présents un peu partout en Ukraine. Une partie est à Odessa, au sud du pays. C’est le cas de Myriam. Ce samedi matin, elle a pu prendre un bus en direction la Roumanie.

      « Nous sommes environs 25 dans le bus, raconte Myriam. Il y a des Algériens et des Marocains aussi. On a même des animaux avec nous, deux chiens et un chat. On ne pouvait pas les abandonner. Il a fallu se battre pour qu’ils nous laissent monter. Ils voulaient nous envoyer en Moldavie. On avait peur de rester bloqués là-bas, il n’y a pas d’avions. Ça fait quatre jours que nous ne dormons pas. Nous étions une vingtaine à être cachés dans un sous-sol. Nous avions très peu d’informations. »

      Myriam et les autres Tunisiens d’Odessa ont pu organiser leur évacuation avec l’aide d’Amine Smiti. Il travaille pour une agence privée qui se charge d’aider les étudiants tunisiens à s’installer à l’étranger. Mais depuis le début de la guerre en Ukraine, il est membre de la cellule de crise mise en place par le ministère des Affaires étrangères tunisien.

      Amine Smiti explique comment il organise le départ des étudiants et les difficultés auxquelles il fait face : « En coordination avec les services de sécurité en Ukraine, j’ai pu avoir deux chemins sûrs pour évacuer à travers la Moldavie et la Roumanie. C’est difficile de trouver des bus, car les militaires les ont réquisitionnés pour rassembler les civils qui se sont engagés. Avec mon frère, et par nos propres moyens, on a réussi à trouver des bus, des taxis et des voitures privées. Les ambassadeurs et le ministère des Affaires étrangères se chargent d’assurer aux Tunisiens de ne pas passer plus de quatre ou cinq heures aux frontières. Personnes n’y est resté bloqué. Sans leur intervention aucun tunisien n’aurait pu quitter l’Ukraine. »
      Situation compliquée pour les Tunisiens de Dnipro

      Vendredi, trente Tunisiens ont pu rejoindre la Moldavie. Aujourd’hui, Amine Smiti dit pouvoir en faire évacuer encore une centaine. Les étudiants d’Odessa devraient tous être évacués d’ici à la fin du week-end. Mais la situation est plus compliquée pour les 227 Tunisiens bloqués à Dnipro. La ville étant située à plus de 900 km des frontières voisines, il est difficile d’assurer un chemin sécurisé pour leur évacuation.

      https://www.rfi.fr/fr/afrique/20220226-les-%C3%A9tudiants-tunisiens-s-organisent-pour-quitter-l-ukraine-en-gue

    • Exode à la frontière Ukraine-Pologne : « Ils nous refoulent juste parce qu’on est Noirs ! »

      De nombreux Africains fuyant la guerre en Ukraine ont affirmé sur les réseaux sociaux avoir été recalés à la frontière polonaise en raison de leur couleur de peau. À la gare de Lviv, dans l’ouest de l’Ukraine, France 24 a rencontré plusieurs #étudiants africains ayant été refoulés sans raison au poste-frontière de Medyka. Des discriminations démenties par Kiev et Varsovie.

      Des civils sont-ils empêchés de fuir la guerre en Ukraine en raison de leur #couleur_de_peau ? Des Africains affirment en tout cas avoir été refoulés à la frontière avec la Pologne tandis que d’autres personnes, blanches, étaient autorisées à passer. Des discriminations qui pourraient venir ternir le grand élan de solidarité affiché par les pays de l’Union européenne, tandis que des centaines de milliers de réfugiés continuent à affluer vers les frontières polonaise, hongroise, slovaque et roumaine de l’Ukraine.

      Le blocage de la frontière polonaise pour les Africains n’est pas total car certains groupes ont pu passer, ce qui suggère plutôt un filtrage arbitraire des gardes-frontières locaux.

      Mais lors d’un reportage dimanche 27 février à la gare de Lviv, grande ville de l’ouest de l’Ukraine située à environ 80 kilomètres de la frontière polonaise, France 24 a rencontré plusieurs étudiants africains qui affirment avoir été empêchés de pénétrer en Pologne par les gardes-frontières ukrainiens.

      « On nous a bloqués à la frontière, on nous a dit que les Noirs ne rentrent pas. Pourtant, on voyait les Blancs rentrer... », se remémore ainsi Moustapha Bagui Sylla, un Guinéen qui étudiait la médecine en Ukraine. Le jeune homme a fui sa résidence universitaire de Kharkiv dès les premiers bombardements pour se lancer dans une folle course vers l’ouest.

      Comme des dizaines de milliers de civils ukrainiens, il a enduré des heures de marche à pied et d’attente dans le froid sur la route de Medyka en Pologne. Mais son périple s’est heurté à l’intransigeance des gardes-frontières ukrainiens, qui lui ont intimé l’ordre de rebrousser chemin.

      Un étudiant nigérian en train de faire la queue pour acheter des billets de train a décrit une scène similaire au même endroit. Son groupe, qui comprenait des femmes, est resté bloqué devant les grilles du poste-frontière tandis que les gardes ukrainiens faisaient passer des Blancs.

      « Ils ne laissent pas passer les Africains. Les Noirs qui n’ont pas de passeports européens ne passent pas... Ils nous refoulent juste parce qu’on est noirs ! », s’exclame Michael. « On est tous humains, on est nés comme ça, ils ne devraient pas nous discriminer sur la couleur de notre peau. »

      Selon Moustapha Bagui Sylla, les gardes ukrainiens ont justifié leur refoulement par des instructions de leurs homologues polonais, qui leur auraient dit « qu’il n’y avait plus de place pour les migrants » en Pologne.

      Varsovie a fermement démenti toute discrimination. « Je ne sais pas ce qui se passe du côté ukrainien, mais nous admettons tout le monde quelle que soit la nationalité. Cela fait deux jours que je démens de fausses allégations comme ça », a affirmé à France 24 Anna Michalska, porte-parole des gardes-frontières polonais. Un deuxième communiqué polonais a confirmé qu’aucun visa n’était requis, que les cartes d’identité ou passeports, même périmés, étaient acceptés.

      Un responsable des gardes-frontières ukrainiens a également démenti ces informations en insistant qu’il n’y avait aucune nationalité favorisée plus qu’une autre pour passer la frontière. La principale restriction de sortie du territoire vise actuellement les hommes de nationalité ukrainienne âgés de 18 à 60 ans, qui sont mobilisés pour défendre le pays face à l’invasion russe.

      « Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, ces personnes ont peut-être été refoulées parce qu’elles essayaient de griller la priorité dans la file d’attente », a ajouté Andriy Demchenko, porte-parole des gardes-frontières ukrainiens.

      La situation humanitaire du côté ukrainien du poste-frontière de Medyka est extrêmement précaire pour tous les déplacés, comme l’a illustré un de nos récents reportages. Selon un document interne de la Commission européenne cité par Le Figaro, il faut désormais entre vingt et soixante-dix heures pour franchir les postes-frontières de la Pologne.

      Pour les principaux concernés, ces refoulements arbitraires ressemblent à une double peine. Être renvoyé au statut de migrant économique est une véritable douche froide pour ces jeunes Africains venus faire des études avancées, avec des papiers en règle et de brillantes perspectives d’emploi. Dimanche, la plupart des Africains coincés à la gare de Lviv cherchaient désormais à fuir par la Roumanie, la Hongrie, ou la Slovaquie.

      https://www.france24.com/fr/europe/20220228-exode-%C3%A0-la-fronti%C3%A8re-ukraine-pologne-ils-nous-refoulent
      #refoulement #Blancs #Noirs #filtrage

    • Nigerian Students Fleeing Ukraine Stranded at Poland Border

      Nigerian students in Ukraine are being subjected to a tormenting reality following the Russian invasion of Ukraine on Thursday.

      In a series of tweets, the students have detailed their painful experiences, ranging from trekking long distances to escape the situation at hand, to experiencing racism in the face of danger.

      Many Nigerians walked between 14 and 25 kilometres to seek refuge in Poland. But despite trekking for hours, Poland refused them entry.

      Kachi_Nate, a Twitter user, said his friend in Ukraine could not enter Poland because she’s black.

      “She just told me they’re not letting any Black into Poland without a visa. These are students who are legally in Ukraine. They didn’t even check their documents; just turned them back,” he said.

      “We spoke on a call. She said they turned all blacks without a visa back. As long as you don’t have a visa to Poland, you can’t enter. Also, they didn’t check any other document to confirm their status as international students. She’s walking 3-4 hours back to Lviv.”

      On Thursday, Ukraine’s interior ministry said men between the ages of 18 and 60 are banned from leaving the country. Nigerians are protesting this order by heading to Poland.

      Reacting, a Nigerian said, “Nigerians living in Ukraine shouldn’t be mandated to fight or partake in a war they do not understand. There’s a reason they left in the first place. Why are they being turned back from entering Poland?”

      Some angry parents blamed the inability of Nigerian students to enter Poland on the federal government.

      “Parents are claiming the Nigerian Embassy in Poland should have informed the government there so they could approve the arrival of Nigerians. They’re taking Ukrainians in and, I think, Indians too, because the Indian Embassy in Poland said so,” a Twitter user said.

      Others say they are still subjected to racism. Nzekiev, a Twitter user, said when the train to Poland got to where he was, he and two other Africans entered first. But a few minutes later, the police came in and dragged them down from their cabin, as only Ukrainians were allowed.




      “I don’t blame them, though. I blame African leaders,” he said. “In the train stations here in Kyiv, children first, women second, white men third, and the remaining space is occupied by Africans. This means that we have waited many hours for trains here and couldn’t enter because of this. Majority of Africans are still waiting to get to Lviv.”

      On Thursday, the Russian military launched an offensive against Ukraine with land support from Belarus.

      This came minutes after Russian President Vladimir Putin declared war on Ukraine, claiming Russia was invited by the Donbas People’s Republic.

      Following this development, the House of Representatives of the Federal Republic of Nigeria promised to help Nigerian students in Ukraine.

      In a tweet on Thursday, they offered “to shoulder the immediate evacuation of Nigerian students from Ukraine”.

      The House of Representatives said the committee on the Nigerian Ministry of Foreign Affairs would jet out to Ukraine on Friday.

      However, over 24 hours after the federal government said they would help, students are still stuck in the web of the Russian-Ukraine war.

      It is estimated that over 4,000 Nigerian students are in Ukraine, making them the second most populated group of international students in the country.

      https://fij.ng/article/nigerian-students-fleeing-ukraine-stranded-at-poland-border

    • Ukraine : 436 Marocains ont réussi à fuir le pays via les postes frontières

      Un total de 436 Marocains ont réussi à fuir l’Ukraine via les postes frontaliers vers lesquels l’ambassade du Maroc à Kiev avait précédemment annoncé qu’ils devaient se rendre.

      Selon les données exclusives obtenues par Hespress Fr, 251 Marocains ont réussi à fuir l’Ukraine vers la Roumanie, dont 97 sont arrivés hier, samedi, et 154 ce dimanche 27 février.

      Par ailleurs, 130 Marocains ont traversé via la Pologne, dont 60 sont arrivés ce dimanche et 70 samedi, tandis que 46 Marocains ont quitté le pays vers la Slovaquie, dont 29 sont arrivés ce dimanche et 17 samedi. De même, 9 Marocains ont pu quitter l’Ukraine vers la Hongrie, dont 9 sont arrivés ce dimanche et un seul arrivé samedi.

      Il convient de rappeler que des milliers de Marocains sont toujours sur les routes essayant d’atteindre les pays voisins de l’Ukraine, et se mettre à l’abri des bombardements intensifs. Le nombre d’étudiants marocains en Ukraine est estimé, à lui seul, à près de 9.000.

      https://fr.hespress.com/250799-ukraine-436-marocains-ont-reussi-a-fuir-le-pays-via-les-postes-f

    • Guerre en Ukraine : la détresse d’étudiants africains livrés à eux-mêmes

      En Ukraine, des étudiants africains vivent la guerre au rythme des Ukrainiens. Ils sont nombreux à être sans nouvelle de leurs ambassades. Isolés, sans plan d’évacuation ni numéro d’urgence à contacter, ils vivent très mal la situation et appellent leurs gouvernements à organiser leur rapatriement. Témoignages dans les villes de Kharkiv et de Loutsk.

      « Nous ne recevons aucune information, aucune directive. Tout ce que j’ai comme réconfort, c’est mon papa et ma maman qui m’appellent. »

      À 23 ans, Lilian se sent bien seul dans son appartement de la grande ville industrielle de Kharkiv. La ville n’est pas tombée aux mains des troupes russes, mais des combats intenses se poursuivent dans la zone, selon le Pentagone. Comme de nombreux étudiants africains, Lilian n’a reçu aucun signe de la part des autorités camerounaises depuis le début de l’invasion russe.

      « Je me sens isolé parce que je n’ai aucune nouvelle de mon ambassade. J’ai même envie de dire de nos ambassades, car je ne suis pas le seul Africain dans ce cas. Pourtant, je sais que l’ambassade kenyane a par exemple pris des nouvelles de ses ressortissants, leur disant que s’ils se rendent à la frontière avec la Pologne, à Lviv, ils seront pris en charge là-bas. Nous, nous n’avons rien. »

      Depuis deux jours, le quotidien de l’étudiant camerounais en master de management s’est transformé en cauchemar. Dans la nuit de mercredi à jeudi, à 4 heures du matin, le tremblement des vitres de son immeuble et les bombardements le tirent de son sommeil.

      « Avant ça, tout était calme. On ne savait pas que l’on pouvait se réveiller comme ça, du jour au lendemain, avec la boule au ventre », explique Lilian, la voix monocorde.

      Pour tromper l’angoisse de l’isolement, le jeune homme a proposé à l’un de ses amis camerounais de quitter sa chambre étudiante pour venir vivre avec lui.

      « Il est venu avec moi car c’est mieux qu’être seul », explique-t-il.

      Depuis deux jours, les deux amis ont dû s’adapter au danger imminent. Faute de pouvoir fermer l’oeil la nuit, ils profitent des moments d’accalmie, dans la journée, pour pouvoir se reposer un peu. À la moindre sirène, les jeunes hommes « courent » dans le sous-sol du bâtiment. C’est là qu’ils ont décidé de passer toutes leurs nuits.

      « Les gares et les banques sont fermées, les métros sont à l’arrêt, les bus aussi. Les bombardements se déroulent à une extrémité de la ville. Cela fait deux jours que des gens dorment dans les métros », décrit Lilian.

      À 23 ans, l’étudiant camerounais est réaliste. « Mes parents ont peur pour moi, j’ai peur aussi. On ne sait pas de quoi sera fait le lendemain. Après m’être fait réveiller par des bombardements, je m’attends à peu près à tout », argue-t-il.

      Ce qu’attend le ressortissant camerounais, c’est un plan d’évacuation de la part de son pays.

      « Je ne demande pas de l’aide gratuite. Je peux me payer un billet d’avion pour me rendre au Cameroun. Mais sans communication ni plan d’ évacuation, je suis livré à moi-même ici. »

      Amadou, un étudiant sénégalais de 32 ans, a lui reçu un mail de la part de son ambassade située en Pologne.

      « Au début, je me sentais isolé. Mais jeudi soir, dans la nuit, nous avons reçu un mail venant de l’ambassade du Sénégal en Pologne. Elle a demandé à ceux souhaitant rentrer au Sénégal, de franchir la frontière polonaise. C’est la seule alternative actuellement ».

      Sur un groupe de conversation WhatsApp, des étudiants africains de toutes les nationalités s’échangent conseils et expériences par centaines de messages. Tous souhaitent sortir du pays mais dans la plupart des villes ukrainiennes, louer une voiture ou trouver un taxi est devenu un véritable « parcours du combattant ».

      L’étudiant en master de tourisme le confirme lui-même. Il cherche aussi à quitter Loutsk. La ville n’est pas très loin de la frontière polonaise, mais il attend un ami pour entreprendre son périple. Ce dernier habitait à Kiev et a eu du mal à trouver un transport. Les prix ont explosé.

      « Trouver un transport, c’est le plus grand souci actuellement. Les prix qui ne dépassaient pas les 25 dollars atteignent maintenant les 1.000 dollars pour voyager de Kiev à Varsovie », explique l’étudiant sénégalais.

      Son ami est finalement parvenu à quitter la capitale pour Lviv, mais ce dernier ne trouve pas le moyen de se rendre à Loutsk. Il n’a plus donné de nouvelles à Amadou depuis un jour. Son portable est éteint.

      « Loutsk est un peu plus sûre que les autres villes. Il n’y a pas d’affrontements ici donc les gens viennent. Comme à Lviv, Rivne… »

      Malgré un calme apparent, les sirènes retentissent plusieurs fois par jour dans la ville.

      « C’est difficile de dormir. Les sirènes n’arrêtent pas de retentir. Quand je les entends, je me précipite, je cours pour trouver un abri. C’est la psychose. Les supermarchés, les banques, les pharmacies sont prises d’assaut. Il y a des pénuries pour tout », explique Amadou.

      Natif de Bakel, à l’est du Sénégal près de la frontière avec la Mauritanie et le Mali, Amadou n’a qu’une idée en tête, partir.

      « Tout ce que je désire, c’est rentrer chez moi. Ou au moins franchir la frontière polonaise et me rendre dans l’espace Schengen pour être un peu plus protégé », dit-il.

      "Il y a de la peur, de l’angoisse, de la fatigue. Parfois, l’information n’est pas claire, on ne comprend pas ce que l’on doit faire, la langue ukrainienne n’est pas facile à comprendre pour tout le monde. Il faut vraiment vivre en Ukraine pour comprendre ce qu’il se passe ici. Je n’ai pas vraiment les mots", confesse Amadou.

      Il lance aussi un appel aux autorités sénégalaises. Il a peut-être été contacté par son ambassade en Pologne, mais il n’est pas rassuré par le passage de la frontière polonaise. L’inconnu l’effraie. D’autant que des rumeurs circulent sur les réseaux sociaux et dans les différents groupes de conversations observés.

      « Le problème en Pologne, c’est que beaucoup de monde cherche déjà à traverser la frontière. Nous ne savons donc pas quand nous serons autorisés à la franchir une fois sur place, et quel sort nous sera réservé. Je n’ai pas été là-bas mais j’ai entendu qu’ils nous traitent différemment et qu’ils séparent les Ukrainiens des étrangers. Ça nous fait peur, on ne sait pas quel sort nous attend en Pologne. Je veux que les autorités nous récupèrent une fois la frontière passée, qu’ils organisent notre rapatriement ou qu’ils nous trouvent un abri là-bas », déclare Amadou.

      Sa peur est partagée par de nombreux expatriés africains résidant en Ukraine. Tous lancent un appel à leurs gouvernements pour organiser leur rapatriement.

      https://information.tv5monde.com/info/guerre-en-ukraine-la-detresse-d-etudiants-africains-livres-eux

    • Guerre en Ukraine : des milliers d’étudiants arabes coincés sur place cherchent désespérément à fuir

      Plus de 10 000 étudiants arabes se sont retrouvés pris au piège du conflit en Ukraine. Leur rapatriement est un casse-tête pour leurs gouvernements et une difficile traversée pour les concernés livrés à eux-mêmes

      Trois jours après le début de l’invasion russe en Ukraine, le nombre de réfugiés ou déplacés grandit rapidement. Les ressortissants étrangers sont aussi menacés par l’avancée de l’envahisseur. C’est le cas de plus de 10 000 étudiants arabes, pris au piège sur place. Les Marocains forment le principal contingent d’étudiants en Ukraine, prisée pour les études de médecine et d’ingénierie. Au moins 8 000 étudiants y résident habituellement.
      Des « scènes traumatisantes »

      Parmi ces étudiants, Rania Oukarfi, 23 ans. Elle a pris la route vers la Moldavie, peu après le début de l’invasion. Jointe par téléphone, elle raconte avoir vu des « scènes traumatisantes ». Selon elle, « l’ambassade n’aide pas, on essaie d’appeler, aucune réponse ».

      Nassima Aqtid, 20 ans, étudiante en pharmacie, est bloquée à Kharkiv où les combats font rage. « J’ai pensé quitter la ville mais c’est impossible, la frontière la plus proche est celle de la Russie », explique-t-elle. « J’ai quitté le Liban à cause de l’effondrement » économique, raconte sur place Samir, 25 ans. Pour lui, la situation est plus critique. Pour gagner la Pologne, il doit traverser toute l’Ukraine.

      Livrés à eux-mêmes

      Des jeunes Syriens et Irakiens sont dans la même situation. Ali Mohammad, un étudiant en ingénierie de 25 ans, appelle constamment son ambassade sans succès depuis Chernivtsi (à l’ouest), proche de la frontière roumaine. « On est partis d’Irak pour changer de mode de vie, la guerre, les galères. On est venus en Ukraine, et c’est la même chose », déclare-t-il par téléphone. Selon un responsable gouvernemental, l’Irak compte 5 500 ressortissants en Ukraine dont 450 étudiants.

      Faute de directives de leurs pays, les ressortissants égyptiens ne savent que faire, comme le confie Saad Abou Saada, 25 ans, étudiant en pharmacie à Kharkiv. « L’ambassade n’a encore rien fait. Je ne sais pas où aller. » Il loge dans sa résidence universitaire qui hébergeait d’autres étrangers « partis sans (lui) ». La moitié des ressortissants du pays sont des étudiants en majorité inscrits à Kharkiv.

      Les États s’organisent

      Depuis le début de la guerre, l’Irak, la Tunisie, l’Égypte et la Libye tentent de préparer la sortie de leurs ressortissants vers des pays limitrophes. Le Maroc les a invités à se rendre à des points d’accès frontaliers avec la Roumanie, la Hongrie, et la Slovaquie. La Tunisie, qui ne dispose pas d’ambassade en Ukraine, va envoyer en Pologne et en Roumanie des avions pour rapatrier ses ressortissants qui souhaitent partir parmi les 1 700 vivant en Ukraine. Tunis a pris contact avec l’ONU et la Croix-Rouge internationale pour l’aider à les évacuer par voie terrestre, ce qui reste très risqué.

      La Libye a prévu des points de ralliement en Ukraine et des évacuations vers la Slovaquie pour une diaspora estimée à près de 3 000 personnes. L’Algérie, liée à la Russie par des accords militaires, s’est distinguée en n’appelant pas à ses ressortissants à quitter le pays. Mais elle les a exhortés à « une extrême prudence ».

      https://www.sudouest.fr/international/guerre-en-ukraine-des-milliers-d-etudiants-arabes-coinces-sur-place-cherche

    • Guerre en Ukraine : le difficile exode des étudiants africains

      Après de multiples accusations de comportements racistes aux frontières, l’Union africaine s’est élevée contre tout « traitement différent inacceptable ».

      Jusqu’au déclenchement de l’invasion russe en Ukraine, Theresia Kabimyama était étudiante en ingénierie à Odessa, ville portuaire située au bord de la mer Noire. Mais du jour au lendemain, la guerre a poussé cette jeune Congolaise à fuir le pays où elle avait élu domicile. Un voyage éprouvant en bus – faute de pouvoir trouver une place à bord d’un train – l’a menée jusqu’à Lviv, la grande ville de l’ouest, à 800 kilomètres de là, puis à la frontière avec la Pologne, où elle a finalement pu entrer dimanche 27 février.« C’était un cauchemar, franchement, les policiers n’ont pas du tout été sympas avec les étrangers, surtout les Noirs ; ça nous insultait de tous les noms, ça braquait les armes sur nous, ça nous bousculait », rapporte-t-elle au téléphone.Alors que de nombreux Africains, pour la plupart étudiants, tentent comme des centaines de milliers d’Ukrainiens de rejoindre vaille que vaille les pays voisins, les accusations de comportements racistes aux frontières se sont multipliées ces derniers jours. Des vidéos partagées sur les réseaux sociaux sous le hashtag #AfricansinUkraine montrent des scènes de fortes tensions et des Africains empêchés de monter à bord de trains quittant le pays.

      Hervé Offou, un étudiant ivoirien en médecine à Dnipro, une ville de l’est de l’Ukraine, vient d’en faire l’amère expérience. A Lviv où il venait d’arriver, alors qu’il voulait prendre le train avec d’autres étrangers, un policier s’est énervé : « Enlevez les singes d’ici », s’est écrié l’agent, selon le récit de l’étudiant qui assure avoir failli en venir aux mains. Il a finalement décidé de marcher près de 40 km, lundi matin, pour rejoindre la frontière avec la Pologne, en compagnie de plusieurs compatriotes.« Choquant et raciste »« Là aussi les étrangers sont mis à l’écart. Personne ne s’approche de nous, c’est difficile », relate Davy, un ami ivoirien d’Hervé. Kader Niekiema, un étudiant burkinabé de 28 ans à l’université de Lviv, a vécu la même situation, cette fois à la frontière avec la Hongrie. « Il y avait deux files, une pour les Européens, l’autre pour les Africains, c’était la panique, les gardes-frontières ukrainiens nous ont insultés et repoussés, ça a failli dégénérer », raconte le jeune homme par téléphone.Face à la multiplication de ce type de témoignages, l’Union africaine (UA) a publié lundi un communiqué en forme de mise en garde. Appliquer un « traitement différent inacceptable » aux Africains serait « choquant et raciste » et « violerait le droit international », ont souligné le chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, président en exercice de l’institution, et le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat.« Il est primordial que chacun soit traité avec dignité et sans favoritisme », avait déjà réclamé la veille Garba Shehu, un porte-parole de la présidence nigériane, rapportant qu’« un groupe d’étudiants nigérians qui se sont vus refuser à de multiples reprises l’entrée en Pologne ont fini par comprendre qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de traverser de nouveau l’Ukraine pour essayer de sortir du pays via la Hongrie ». Avec quelque 4 000 ressortissants en Ukraine, les Nigérians constituent l’un des plus importants contingents d’étudiants africains dans le pays. Selon les dernières statistiques disponibles de l’Unesco, près de 13 000 étudiants originaires d’Afrique – y compris du Maghreb – étaient recensés en Ukraine en 2019.En Afrique du Sud également, les autorités ont haussé le ton. Le ministère des affaires étrangères affirme avoir reçu des témoignages et des vidéos montrant des Sud-Africains et plus généralement des Africains placés dans des files séparées des Ukrainiens et des Européens aux postes-frontières. « Ils ont été poussés, bousculés et parfois mis en joue pendant que les soldats ukrainiens leur disaient que la priorité était donnée aux femmes et aux enfants ukrainiens et européens », explique le porte-parole du ministère, Clayson Monyela.« Chaos » suscité par l’éclatement de la guerrePrésent sur place, l’ambassadeur sud-africain en Ukraine, Andre Groenewald, a contacté le ministère ukrainien des affaires étrangères pour s’insurger. « Si c’est ainsi que doivent être traités les Africains, nous nous en souviendrons après le conflit », dénonce M. Monyela qui ajoute que « la situation s’est légèrement améliorée »depuis les protestations sud-africaines.

      Ces accusations de racisme ont été rejetées notamment par l’ambassadrice de Pologne au Nigeria, Joanna Tarnawska. « Tout le monde reçoit un traitement égal », a-t-elle déclaré à des médias locaux, affirmant que les documents d’identité invalides sont acceptés pour franchir la frontière et que les restrictions liées au Covid-19 ont été levées.Des dispositions confirmées par l’ambassadeur du Sénégal pour la Pologne, l’Ukraine et la République tchèque, Papa Diop. Celui-ci rapporte que le ministère polonais des affaires étrangères a convié, le 15 février, un groupe d’ambassadeurs africains, en prévision du déclenchement des hostilités. « Lors de cette réunion de crise, les autorités polonaises nous ont informés qu’en cas de conflit, elles n’exigeraient pas de visa européen et de passe sanitaire aux ressortissants non européens », détaille-t-il.

      A l’en croire, les frictions des derniers jours sont le résultat d’une « mésentente entre les gardes-frontières polonais et ukrainiens » et du « chaos » suscité par l’éclatement de la guerre. « C’est dur pour tout le monde dans ce contexte. Notre groupe d’ambassadeurs africains a d’ailleurs écrit au ministère polonais des affaires étrangères pour demander si des instructions discriminatoires avaient été données. On nous a répondu que non et on nous a confirmé les dispositions prises lors de la réunion du 15 février », insiste-t-il.« Les femmes et les enfants d’abord »Du côté polonais, Le Monde a effectivement pu constater que des dizaines d’étudiants africains avaient réussi à traverser la frontière, malgré des complications pour ceux ne disposant pas d’un permis de résidence en Ukraine. Certains réfugiés ukrainiens se plaignent d’ailleurs que « les hommes étrangers comme les étudiants africains » veuillent à tout prix passer « alors que ce doit être les femmes et les enfants d’abord ».
      Alors que l’Ukraine a sonné la mobilisation générale, réquisitionnant tous les hommes de 18 à 60 ans, les Ukrainiens qui fuient vers les pays limitrophes sont essentiellement des femmes et des mineurs. « Mais les autorités ukrainiennes bloquent aussi les femmes africaines », déplore l’Ivoirien Gildas Bahi, chargé d’organiser le regroupement des étudiants de son pays en vue de leur évacuation.Cependant, tous les témoignages ne racontent pas la même histoire. Merouane, étudiant algérien en ingénierie informatique à Dnipro, s’est engagé avec trois autres Algériens et une Ukrainienne dans un périple de 900 kilomètres dès les premières heures de l’invasion russe. « Je n’ai observé aucune discrimination liée au passeport et c’est rare aux frontières », rapporte-t-il. Après vingt-quatre heures de route et plusieurs heures d’attente à la frontière, le groupe a été accueilli par une structure polonaise qui leur a offert « une chambre, de la nourriture et même un sac de vêtements de rechange pour ceux qui n’avaient rien pris », raconte-t-il, soulagé.

      https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/03/01/guerre-en-ukraine-le-difficile-exode-des-etudiants-africains_6115635_3212.ht

    • Nigeria condemns treatment of Africans trying to flee Ukraine

      Government says citizens are being denied entry into Poland amid growing reports of discrimination

      The Nigerian government has condemned the treatment of thousands of its students and citizens fleeing the war in Ukraine, amid growing concerns that African students are facing discrimination by security officials and being denied entry into Poland.

      A deluge of reports and footage posted on social media in the past week has shown acts of discrimination and violence against African, Asian and Caribbean citizens – many of them studying in Ukraine – while fleeing Ukrainian cities and at some of the country’s border posts.

      They are among hundreds of thousands of people trying to escape the country as civilian casualties and destruction mount.

      More than half a million people have fled Ukraine since the Russian invasion began last week, according to the UN’s refugee agency, UNHCR.

      The Nigerian president, Muhammadu Buhari, said on Monday: “All who flee a conflict situation have the same right to safe passage under UN convention and the colour of their passport or their skin should make no difference,” citing reports that Ukrainian police had obstructed Nigerians.

      “From video evidence, first-hand reports, and from those in contact with ... Nigerian consular officials, there have been unfortunate reports of Ukrainian police and security personnel refusing to allow Nigerians to board buses and trains heading towards Ukraine-Poland border,” he said.

      “One group of Nigerian students having been repeatedly refused entry into Poland have concluded they have no choice but to travel again across Ukraine and attempt to exit the country via the border with Hungary.”

      Nigeria’s special adviser to the president on diaspora affairs, Abike Dabiri-Erewa, said: “Africans are being denied entry through the Ukrainian borders. The minister of foreign affairs, Geoffrey Onyeama, has taken this up with the Ukrainian ambassador. Our people who want to leave must be allowed to.”

      Amid chaotic and emotional scenes at Ukraine’s borders with Poland, as well as Romania and Belarus, where a number of African governments have advised citizens to head to, the treatment of African and Asian people has caused outrage.

      Many African students have condemned the difficulties they have faced trying to escape the conflict.

      Samuel George, a 22-year-old Nigerian software engineering student, drove from Kyiv, along with four of his friends, fellow students from Nigeria and South Africa, to the Polish border. Queues of cars full of people trying to leave spanned 31 miles (50km) to the border. Yet when some men who were in the queue noticed they were Africans, he said, they stopped their vehicle.

      “They immediately saw that the Ukrainians could pass but when they realised we weren’t Ukrainians they stopped it. They told us we couldn’t move forward and wouldn’t let us join the queue,” George said.

      When they tried to defy them, he said the men attacked and vandalised their windscreen. “They demanded $500 – we begged and negotiated to pay $100. We had to leave the car and trek. We were walking for almost five hours to the border with Poland. One of us was sick. The temperature was freezing, it was so tough.”

      At the border, Ukrainian officials “showed racist acts”, attempting to force them to the back of the queue, George said. “So many of us are still stuck there facing challenges. Some of them went to the borders but they were sent back and are still trying to leave.”

      Emily*, a 24-year-old medical student from Kenya, said she spent hours waiting for Ukrainian border guards to let her enter Poland because they were prioritising Ukrainian nationals.

      “We had to wait five hours but we were lucky: we met some people there who had spent days waiting in the foreign national queue,” she said.

      After eventually entering Poland, she boarded a free bus, organised by an NGO, to a hotel near Warsaw that was offering free board to Ukrainian refugees. However, the hotel refused to take her and her Kenyan friends in after examining their documents.

      “The staff said, ‘Sorry, we can’t admit you because this was meant only for Ukrainians,’” she said. The hotel also refused to give Emily a room after she offered to pay for one.

      Instead, Emily’s family in Kenya got in touch with a Polish acquaintance, who was able to find accommodation for Emily and other students with friends in Warsaw.

      In footage posted on social media, men identified by students as Ukrainians were seen abusing and assaulting them near borders, preventing them from leaving.

      In response to calls for information and advice for students worried about leaving Ukraine, several support groups have been set up on WhatsApp, Telegram and Facebook by people advocating for more assistance and by students who have been trying to leave.

      Government officials from Ukraine and Poland have said all refugees are welcome, adding that border officials were working through hundreds of thousands of cases.

      Yet even after passing into Poland, many have reported continuing challenges. Both George and Emily were given entry into Poland for just 15 days.

      In the weeks leading up to the war it was clear that increased support was needed but the government did not act, George said, condemning what he described as a lack of quick and concise assistance from Nigerian authorities.

      Days after Ukraine closed its airspace to civilian flights, Nigerian lawmakers and ministers attempted to organise evacuation flights before changing plans.

      One student said they tried to contact the consulate but failed to reach an official.

      “I don’t see how in a situation like this, where the citizens are in a country where there is war, that a country won’t do everything to rescue their citizens, but that is where we are,” they said.

      “The whole situation is tragic, the war is so tragic. So many men were staying behind to fight with the army. I was seeing so many greeting their wives and families farewell. It felt like the world was coming to an end.”

      https://www.theguardian.com/world/2022/feb/28/nigeria-condemns-treatment-africans-trying-to-flee-ukraine-government-p

    • La acogida a desplazados ucranios contrasta con denuncias de discriminación a otros migrantes

      Las cifras récord de acogida de desplazados de los países fronterizos con Ucrania coinciden con las denuncias de ciudadanos de África, Medio Oriente y Asia sobre discriminación a la hora de abandonar el país. La Unión Africana lo califica de «racista», mientras que periodistas internacionales han sido señalados en redes por hacer distinciones entre los refugiados de Ucrania y los de otras guerras anteriores.

      Este martes 1 de marzo, el máximo responsable para los refugiados de las Naciones Unidas, Filippo Grandi, reportaba la salida de 677.000 personas desde Ucrania hacia los países vecinos.

      Mientras que Karolina Lindholm Billing, la responsable de Acnur para Ucrania, cifró en un millón el número de desplazados internos. De la frontera del Donbass, epicentro de la guerra, se estiman 116.000 desplazados ucranianos al lado ruso.

      Son cifras récord, producidas en menos de una semana de conflicto. Lo que supone un reto humanitario mayúsculo, tanto para los países fronterizos, como para las potencias europeas a las que muchos ucranianos quieren llegar.

      Los primeros gestos de los países colindantes con Ucrania han respondido a los llamados históricos de las agencias internacionales para refugiados. Además de suspender sus cuarentenas anticovid, los países fronterizos (Polonia, Hungría, Rumanía, Moldavia y Eslovaquia) han abierto sus puertas para todos aquellos que acrediten su procedencia de Ucrania.

      E incluso más: Polonia ha elaborado programas de alojamiento para los recién llegados en viviendas particulares, mientras que Eslovaquia ofrece transporte gratuito y la posibilidad de trabajar en el país. Este martes también se supo que la Unión Europea está debatiendo garantizar a los refugiados ucranianos el estatuto de protección temporal, permitiéndoles vivir y trabajar hasta 3 años en algunos de los 27 Estados miembros.

      Acciones aplaudidas por el propio Filippo Grandi en un comunicado en el portal de ACNUR: «Polacos, húngaros, moldavos, rumanos, eslovacos y ciudadanos comunes de otros países europeos han llevado a cabo actos extraordinarios de humanidad y bondad. Este es el instinto humanitario que tanto se necesita en tiempos de crisis».

      Sin embargo, paralelamente al recibimiento, también crecen las denuncias de que la acogida y el refugio está contando con privilegios. Entre los primeros denunciantes, la investigadora sobre migración y asilo en Grecia, Lena Karamanidou, que había avisado después del inicio del conflicto.

      “No hay forma de evitar las preguntas sobre el racismo profundamente arraigado en las políticas migratorias europeas cuando vemos cuán diferentes son las reacciones de los gobiernos nacionales y las élites de la UE ante las personas que intentan llegar a Europa”.

      But there is no way to avoid questions around the deeply embedded racism of European migration policies, when we see how different the reactions of national governments and EU elites are to the people trying to reach Europe. This can’t just be brushed under the carpet.
      — Lena K. (@lk2015r) February 25, 2022

      La Unión Africana califica de «racista» el trato diferencial a africanos

      En los últimos días, periodistas han estado denunciado las dificultades de escapar de Ucrania para ciudadanos africanos, de Medio Oriente y asiáticos.

      Otros reporteros argumentaron que se tratan de las dos colas habituales administrativas: la de ciudadanos ucranianos y la de extranjeros. Sin embargo, las denuncias hacen énfasis que la de los locales avanza a una mayor velocidad que la de los foráneos.

      Ucrania tiene 470.000 ciudadanos extranjeros, que la Organización Internacional para las Migraciones (OIM) está tratando de atender. A diferencia de los ucranianos, muchos no europeos necesitan visas para ingresar a los países vecinos.

      En Internet, se ha viralizado el hashtag #AfricansinUkraine, donde estudiantes racializados mostraban la imposibilidad de abordar trenes para salir del país. Así lo recogieron los corresponsales de France 24 en la ciudad fronteriza de Leópolis.

      “Nos pararon en la frontera y nos dijeron que los negros no estaban permitidos. Pero pudimos ver gente blanca pasando”, dijo Moustapha Bagui Sylla, un estudiante de Guinea. Añadió que había huido de su residencia universitaria en Járkov, la segunda ciudad más grande de Ucrania, tan pronto como comenzó el bombardeo.

      “No dejan entrar a los africanos. Los negros sin pasaporte europeo no pueden cruzar la frontera (...). ¡Nos están haciendo retroceder solo porque somos negros!”. dijo otro estudiante nigeriano, quien solo dio su primer nombre, Michael. “Todos somos humanos”, agregó. “No deberían discriminarnos por el color de nuestra piel”, afirmó.

      Estas denuncias han provocado el enfado de la Unión Africana. El lunes, en un comunicado, el actual presidente, Macky Sall, y el presidente de la Comisión de la Unión Africana, Moussa Faki Mahamat, se hicieron eco y realizaron un llamado internacional.

      «Los informes de que los africanos reciben un trato diferente inaceptable serían escandalosamente racistas y violarían el derecho internacional. En este sentido, los presidentes instan a todos los países a respetar el derecho internacional y mostrar la misma empatía y apoyo a todas las personas que huyen de la guerra, independientemente de su identidad racial».

      Sobre esta discriminación también habló para la agencia estadounidense Associated Press, Jeff Crisp, exjefe de política, desarrollo y evaluación de ACNUR: “Los países que habían sido realmente negativos en el tema de los refugiados y que han hecho que sea muy difícil para la UE desarrollar una política de refugiados coherente durante la última década, de repente presentan una respuesta mucho más positiva”, cuestión que achaca a las similitudes culturales y raciales: "no es completamente antinatural que las personas se sientan más cómodas con personas que vienen de cerca, que hablan un idioma (similar) o tienen una cultura (similar)”.

      Los Gobiernos «ultra» europeos han cambiado el tono

      Países de Europa del Este y Centroeuropa han sido de los más duros a la hora de hablar y legislar sobre migración en los últimos años. De hecho, el primer ministro búlgaro, Kiril Petkov, hizo referencia al cambio de criterio de los últimos días: «estos no son los refugiados a los que estamos acostumbrados, estas personas son europeas (...) son inteligentes, educadas».

      Associated Press también recogía el cambio de tono del ultraderechista primer ministro húngaro, Viktor Orban, quien pasó en diciembre de decir «no vamos a dejar entrar a nadie», a asegurar esta semana que «dejaremos entrar a todos», en referencia a los ucranianos.

      Otro ejemplo clarificador fue el de 2021, cuando miles de migrantes se acercaron a la frontera entre Belarús y Polonia, con el objetivo de acceder a países de la Unión Europea, y en plena crisis entre el organismo y el Gobierno de Alexander Lukashenko. Polonia cerró completamente sus fronteras y como consecuencia, 15 personas murieron por el frío.

      Sin embargo, el lunes, el embajador de Polonia en la ONU, Krzysztof Szczerski, dijo que no estaban discriminando a nadie en esa crisis y que 125 nacionalidades habían sido admitidas en el país.

      Algunos periodistas distinguen entre refugiados ucranianos y de otras partes

      Pero además de las acciones, también se están señalando como racistas discursos de algunos medios de comunicación internacionales, en los que se han encontrado distinciones entre guerras de primera y de segunda, según el color de piel o la cercanía cultural.

      [Thread] The most racist Ukraine coverage on TV News.

      1. The BBC - “It’s very emotional for me because I see European people with blue eyes and blonde hair being killed” - Ukraine’s Deputy Chief Prosecutor, David Sakvarelidze pic.twitter.com/m0LB0m00Wg
      — Alan MacLeod (@AlanRMacLeod) February 27, 2022

      El corresponsal del medio CBS News, Charlie D’Agata, dijo que «esto no es Irak o Afganistán, esto es en una ciudad relativamente civilizada y europea».

      En el medio catarí Al-Jazeera, otro periodista afirmó que no son refugiados tratando de escapar de Medio Oriente o el Norte de África «son como cualquier familia europea que vive a tu lado».

      También en Francia, en el medio privado BFM TV, un tertuliano dijo que lo que está sucediendo es como si estuviéramos «en Irak o Afganistán», mientras que una reportera de la cadena británica ITV dijo que «esto no es una nación del tercer mundo, esto es Europa».

      https://www.france24.com/es/europa/20220301-refugiados-ucrania-guerra-racismo-europa?ref=wa

    • Ucraina, africani invisibili in tempo guerra

      A Kiev è stato impedito agli studenti africani di prendere i treni diretti alla frontiera con la Polonia. E quelli che vi sono giunti sono stati respinti dalle guardie polacche. L’Unione africana ha protestato contro questo «trattamento differenziato». Ma anche l’Europa, che accoglie gli ucraini, non usa lo stesso criterio con chi fugge dalle guerre africane

      Mentre tutta l’Europa, Italia compresa, si mobilita per soccorrere e accogliere quanti dall’Ucraina fuggono per salvarsi dai bombardamenti russi, nel silenzio quasi generale dell’opinione pubblica e dei governi occidentali, sta consumandosi la tragedia nella tragedia dei respingimenti di migliaia di africani, giovani studenti soprattutto, residenti in Ucraina. Costoro cercano di fuggire di fronte all’assedio russo, ma si ritrovano intrappolati in quanto respinti, in particolare alla frontiera polacca.

      Secondo diverse testimonianze, a Kiev le forze di sicurezza ucraine avrebbero impedito a degli studenti africani di salire sui treni e sui bus diretti alla frontiera polacca: ciò per dare priorità agli ucraini. E altri africani, giunti alla stessa frontiera, sarebbero stati respinti dalle guardie di confine per le stesse ragioni.

      Le immagini, a migliaia, veicolate dai social, di cittadini africani bloccati alla frontiera tra Ucraina e Polonia e che subiscono trattamenti differenziati se non abusi (il personale di frontiera che dice: «Non ci occupiamo degli africani»), non potevano non suscitare l’indignazione e la condanna dell’intero continente africano.

      A gran voce, l’Unione africana (Ua) è scesa in campo per denunciare il razzismo antiafricano, a suo parere evidente nelle operazioni di rimpatrio dei propri concittadini, in maggioranza studenti. Alcuni di loro hanno dichiarato: «Siamo stati cacciati indietro, siamo stati colpiti dai poliziotti armati di bastone quando abbiamo tentato di fare pressione e spingere in avanti».

      L’Ua si è detta «particolarmente preoccupata» da quanto sta accadendo. Il presidente senegalese Macky Sall, presidente in esercizio dell’Ua, e il presidente della Commissione, Moussa Faki Mahamat, ricordano che «ogni persona ha il diritto di attraversare le frontiere internazionali durante un conflitto (…) qualunque sia la sua nazionalità o la sua identità razziale». Applicare un «trattamento differente» per gli africani sarebbe «inaccettabile, scioccante e razzista» e «violerebbe il diritto internazionale».

      Denuncia

      L’evacuazione dei cittadini africani si rivela più complessa di quanto non possa apparire, anche perché soltanto una decina di paesi hanno una rappresentanza diplomatica, ambasciata o consolato, in Ucraina.

      Nel cercare, comunque, di portare soccorso ai propri cittadini, le reazioni dei paesi africani sono state a dir poco “vivaci”. Un solo esempio, la Nigeria. Da subito ha esortato le autorità di frontiera con l’Ucraina e dei paesi vicini a trattare «con dignità» i suoi concittadini.

      «Informazioni spiacevoli» indicano che «la polizia ucraina e il personale di sicurezza rifiutano di permettere ai nigeriani di salire sui bus e i treni verso la Polonia», ha dichiarato il portavoce della presidenza nigeriana, Garba Shehu. «Un video molto diffuso sui social mostra una madre nigeriana con il suo bimbo in treno fisicamente forzata a cedere il proprio posto», ha proseguito, aggiungendo che secondo altre informazioni, funzionari polacchi hanno rifiutato l’entrata in Polonia a dei nigeriani provenienti dall’Ucraina.

      Ha ricordato infine che «tutti coloro che fuggono da un conflitto hanno lo stesso diritto a passare in tutta sicurezza in virtù della Convenzione dell’Onu, e il colore del loro passaporto o della loro pelle non dovrebbe fare alcuna differenza». Una denuncia per maltrattamenti e abusi è venuta anche dall’ambasciatore sudafricano e altri che si sono recati personalmente alla frontiera per aiutare gruppi di propri concittadini a entrare in Polonia o a rimpatriare.

      Queste accuse di “razzismo” sono naturalmente respinte dalle autorità polacche così come dalle guardie di frontiera che assicurano di garantire a tutti il passaggio. Le difficoltà sarebbero legate all’enorme afflusso di profughi che crea lunghe file di attesa il cui controllo, anche sanitario, legato alla pandemia di coronavirus, richiede tempi lunghi, anche giorni.

      L’ambasciatrice polacca ad Abuja (Nigeria) ha dichiarato da parte sua che «tutti ricevono lo stesso trattamento», confermando che dei cittadini nigeriani avevano già raggiunto la Polonia. Che a loro volta però hanno riaffermato che «i funzionari alla frontiera davano la priorità alle donne e ai bambini ucraini».

      Secondo cifre ufficiali ucraine, più di 76mila sarebbero gli studenti stranieri presenti in Ucraina, di cui il 20% africani. Le università ucraine, in particolare le facoltà di medicina e ingegneria, sono particolarmente ricercate dagli studenti originari del mondo arabo. I marocchini con gli egiziani formano il gruppo arabo più numeroso.

      Migliaia sono anche i giovani subsahariani partiti per l’Ucraina, attirati dalla qualità degli studi e dalle tasse scolastiche relativamente basse. Importanti i gruppi di studenti e studentesse di paesi come la Nigeria, il Ghana, il Kenya, il Sudafrica, l’Etiopia o la Somalia.

      Amnesty International, quella belga in particolare, è scesa in campo per richiamare i paesi europei al loro dovere di «accogliere chiunque, indipendentemente da ogni criterio, razziale o altro. Ogni paese deve accogliere tutti i rifugiati e garantire una accoglienza degna».

      Razzismo «endemico» in Europa?

      Anche i militanti antirazzisti in Europa si sono fatti sentire per denunciare che in Europa, in tempo di crisi, il razzismo endemico risolleva la testa. Lo si era già visto con il trattamento riservato ai rifugiati siriani alle porte della Polonia, alcuni anni fa. Non andrebbe mai dimenticato che in Europa ci sono comunque cittadini provenienti dal mondo intero, eredità di un passato coloniale. Non mancano in Europa gli afrodiscendenti che in questi giorni si stanno chiedendo: «Se mai un giorno dovessimo fuggire, i bianchi avrebbero un trattamento speciale?».

      Siamo tutti felici della rapidità con cui i paesi europei si sono impegnati ad accogliere gli ucraini in fuga. I paesi occidentali mostrano solidarietà con i rifugiati ucraini perché la nostra cultura sarebbe tanto simile alla loro. Il che però non toglie lo stupore di quanti, africani in primis, hanno dovuto ricorrere addirittura allo sciopero della fame per ottenere i documenti dopo essere fuggiti da situazioni di guerra.

      Doveroso riconoscere che in parallelo alle testimonianze sulle difficoltà a lasciare l’Ucraina, si sta organizzando sui social una forma di solidarietà con decine di persone che propongono il proprio aiuto concreto per il passaggio della frontiera o per offrire un alloggio.

      https://www.nigrizia.it/notizia/ucraina-africani-invisibili-in-tempo-guerra

    • Les résidents étrangers non européens, grands oubliés de l’exode hors d’Ukraine

      Les 280 000 personnes entrées en Pologne depuis la guerre en Ukraine le 24 février sont majoritairement ukrainiennes. Les autres, qu’elles viennent d’Afrique ou d’Asie, se plaignent de ne pas être logées exactement à la même enseigne.

      Pouja, George, Vikram et six de leurs amis attendent sur le bord de la route à Medyka, en Pologne. Ce groupe de ressortissants indiens dans la vingtaine ont franchi la frontière polonaise depuis l’Ukraine au matin par le passage frontalier le plus emprunté pour quitter l’Ukraine.

      Mais, à la nuit tombante, ces neuf amis n’avaient toujours pas réussi à quitter le rond-point où ils grelottaient à une dizaine de kilomètres de la ville de Przemyśl. « Cela fait plus de six heures qu’on attend ici. Il n’y a jamais de places dans les bus. Ils laissent d’abord passer les femmes et les enfants ukrainiens et les rares bus se remplissent mais sans nous », se lamente Pouja, qui est pourtant une femme mais qui ne veut pas se séparer de ses compagnons d’aventure, tous de jeunes hommes.

      Une couverture sur les épaules, Gurwinder tente de justifier : « C’est un problème de management : les Polonais font ce qu’ils peuvent, mais ils n’ont que deux ou trois bus. Or, il y a vraiment beaucoup de gens qui fuient l’Ukraine : c’est sûr qu’ils devraient augmenter la cadence. »

      Gurwinder a bien vu un bus supplémentaire affrété par l’ambassade d’Inde à Medyka, mais renseignement pris, « il ne concerne que les gens qui utilisent le centre d’accueil réservé aux ressortissants indiens. Tout ça pour remplir les statistiques de l’ambassade… », déplore cet homme de 27 ans.

      Il souhaite se rendre à Varsovie par ses propres moyens, où un temple sikh lui offrira l’hospitalité à lui et ses amis, le temps que la situation se calme en Ukraine, espère-t-il. « D’abord, comme tout le monde, nous avons dû faire 40 kilomètres à pied de l’ouest de Lviv à Medyka. Ensuite, les Ukrainiens nous ont fait patienter des heures dehors avant de passer à l’immigration. À chaque fois, ils disaient : d’abord les femmes et les enfants. Pendant ce temps, il n’y avait ni ambulance, ni nourriture, ni eau… En deux ans et demi en Ukraine, je n’avais jamais été aussi mal traité », témoigne Gurwinder, déçu.

      « J’ai vu des Nigérians se faire battre par les militaires ukrainiens car ils avaient escaladé un mur. Quant à moi, je me suis fait traiter de Poutine. Est-ce parce que je ne suis pas resté défendre l’Ukraine ? », s’interroge Gurwinder, qui était chauffeur pour Bolt – application de taxi – en Ukraine, à Kiev, et qui a dû laisser sa voiture à Lviv (ouest de l’Ukraine) sur le bord de la route alors qu’un embouteillage monstre obstruait celle-ci, qui menait au passage frontalier de Medyka – Shehyni.

      Lundi 28 février, ils étaient des dizaines d’étudiant·es ou de jeunes travailleurs et travailleuses issues de divers pays d’Afrique, du sous-continent indien, du Moyen-Orient ou encore d’Afrique du Nord à attendre désespérément par des températures négatives un bus qui n’était toujours pas venu la nuit tombée.

      À vrai dire, à Medyka, on ne trouvait plus beaucoup d’Ukrainiennes et d’Ukrainiens, alors encore majoritaires il y a deux jours à franchir la frontière à pied à la même heure. De quoi alimenter des soupçons de discrimination voire de racisme, relayés par les réseaux sociaux.

      « Ce que l’on a entendu de la part de ressortissants palestiniens, c’est que les autorités ukrainiennes ne les ont pas bien traités à la frontière. Alors que côté polonais, les procédures ont lieu rapidement et sans encombre, témoigne un Palestinien venu en voiture chercher plusieurs de ses compatriotes. Il existe une ligne de soutien pour les Palestiniens coincés en Ukraine sur la base de laquelle une liste de personnes s’apprêtant à franchir la frontière a été établie. »

      Toutes les personnes étrangères non européennes fuyant l’Ukraine n’ont pas pu bénéficier de services consulaires de la sorte, ne pouvant pas non plus compter sur l’aide de la famille ou d’ami·es, dont les Ukrainiennes et les Ukrainiens sont nombreux à bénéficier en Pologne ou ailleurs en Europe. C’est le cas de Christabel Elenya, une Nigériane de 19 ans, qui n’avait jamais mis les pieds en Pologne auparavant et ne sait pas s’il y aura une place dans un avion pour la rapatrier, si tel était son choix.

      Arrivée fin janvier à Kiev pour y suivre des cours d’aéronautique en anglais, elle a dû quitter la ville deux mois plus tard, au début de la guerre, pour se réfugier à Lviv. Puis en Pologne. Elle confirme que l’attente était plus longue au passage frontalier côté ukrainien pour les personnes étrangères non européennes. « J’ai fini par me prétendre enceinte car je n’en pouvais plus d’attendre », sourit la jeune fille assise sur son lit de fortune installé dans la salle de sport d’une école de Przemyśl.
      Pas de billets gratuits

      « Ce n’était facile pour personne au poste frontière. Les tensions ont monté, j’ai vu des hommes étrangers qui étaient à deux doigts de se battre. Cela dit, je comprends que les Ukrainiens soient débordés… », avance l’étudiante, qui assure avoir trouvé toute l’aide dont elle pouvait rêver en Pologne, y compris un logement chez un particulier, qu’elle a refusé de peur de déranger. « Je n’aurais jamais cru que des gens pouvaient être aussi gentils », finit-elle par conclure à l’adresse des Polonais.

      De son côté, Ivonna, une Ukrainienne de 42 ans passée par le poste-frontière de Medyka, et elle aussi hébergée sous un panier de basket dans l’école de Przemyśl, s’est dite choquée par le « comportement de certains étrangers, qui étaient agressifs et se comportaient de manière inadéquate ».

      En gare de Przemyśl, un contrôleur polonais interrogé sur la mesure mise en place par les chemins de fer polonais pour garantir des tickets gratuits afin de se déplacer dans le pays précise qu’ils sont réservés aux détenteurs et détentrices de passeports ukrainiens : « La logique est la suivante : la guerre est en Ukraine, pas dans leur pays. Ils doivent donc payer s’ils veulent un ticket », explique-t-il.

      En réalité, il est rare que ces tickets soient vérifiés à bord, et les bénévoles déployé·es en gare annoncent souvent des trains gratuits pour tout le monde. Il n’empêche, personne ne semble encore savoir ce qu’il en sera des ressortissant·es non européen·nes sur le sol polonais, une fois les quinze jours de séjour tolérés expirés. Les Ukrainiennes et les Ukrainiens ont droit pour le moment à 90 jours de séjour, et l’UE réfléchit à leur octroyer un statut de protection spéciale valable jusqu’à trois ans.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/010322/les-residents-etrangers-non-europeens-grands-oublies-de-l-exode-hors-d-ukr

    • « On nous disait “Pas les Noirs” » : le tri racial dans la fuite de l’Ukraine

      Ivoiriens, Indiens, Camerounais, Marocains... De nombreux ressortissants étrangers qui résidaient en Ukraine tentent également de rejoindre la Pologne, loin des combats. Une traversée périlleuse, rythmée par des comportements racistes de certains soldats ukrainiens.

      Lundi 28 février, sous de légers flocons de neige, Stephan cherche un bus pour se rendre dans la ville la plus proche. Il traîne ses valises d’un pas chancelant, suivi de près par ses quatre amis camerounais. Ensemble, ils viennent tout juste de traverser la frontière polonaise depuis l’Ukraine, près de Medyka, après deux jours d’un interminable voyage depuis Kiev. « C’est l’expérience la plus horrible que j’ai vécue dans ma vie », soupire-t-il.

      De ce périple pourtant, Stephan ne retient ni la peur des bombardements, ni la vie qu’il a laissée derrière lui. Il retient uniquement les coups de crosses de Kalachnikov, les insultes et les menaces lancées par les soldats ukrainiens et les garde-frontières tout au long de sa fuite. Des violences racistes que rapportent également de nombreux ressortissants et étudiants africains, pakistanais, indiens ou encore népalais, qui seraient constamment relégués de façon inhumaine derrière les exilés ukrainiens pour quitter le pays au plus vite.

      « Tu es obligé de payer pour que ça s’arrête »

      Depuis le début de l’invasion russe, des vidéos circulent sur les réseaux sociaux. On y voit des soldats ukrainiens repousser à l’arrière des files les personnes de couleur, pourtant résidentes légales en Ukraine, pour faire passer en priorité les personnes blanches. Les témoignages affluent également : ceux d’Africains débarqués d’un bus en route pour la frontière, d’armes braquées sur un groupe d’Indiens ou encore d’insultes racistes répétées.

      « Ils faisaient passer les femmes et les enfants d’abord, ce qui est normal », raconte Stephan, qui travaillait en tant qu’ingénieur des ponts et chaussées en Ukraine. Parti de Kiev à 6h du matin le samedi, l’homme espérait attraper un premier train avec ses amis, avant de vite déchanter sur les quais de la gare. « Sur le côté, il y avait plein de femmes africaines avec leurs enfants que personne ne faisait passer devant, contrairement aux Ukrainiennes. D’un coup, les policiers nous ont repoussés. Il y en a un qui m’a frappé avec un fusil », ajoute le Camerounais en montrant le bas de son dos. Il ne le savait pas encore, mais ce type de scène ne sera qu’une infime partie du traitement que lui réserveront certains soldats ukrainiens jusqu’à son arrivée en Pologne.

      Bloqués par des kilomètres de bouchons d’exilés fuyant la guerre depuis l’invasion de la Russie le 24 février, le groupe de Camerounais est contraint de marcher sur plus de 12 kilomètres, comme tout le monde. Rapidement, un premier check point. « Là, la situation s’est empirée pour les étrangers. On a dû former un corridor, bloqué par les armes des soldats, comme du bétail. “Je vais tirer”, ils disaient, en mettant des coups de crosses ! », explique Stephan. Juste à côté d’eux, les femmes et les enfants ukrainiens défilaient sans difficulté. « On a passé presque deux jours au premier check point, debout, sans manger, sans eau, sans douche et dans le froid. »

      Poussé à bout, le groupe de Camerounais a finalement compris comment s’en tirer : en payant les soldats les plus agressifs. « Ils ne te demandent pas de l’argent frontalement, mais ils te mettent dans des conditions telles que tu es obligé de payer pour que ça s’arrête. » Le groupe déboursera finalement 1.000 hryvnia (environ 30 euros) une première fois, puis 100 dollars au deuxième check point. « À un moment, je me suis demandé si j’étais un être humain », se questionne d’une voix basse le Camerounais.
      « Ils donnaient de la nourriture aux Ukrainiens, pas à nous »

      Il n’y a pas besoin de chercher bien loin pour trouver des témoignages similaires. À quelques mètres de Stephan, un groupe de cinq Népalais raconte leur voyage en enfer. « C’est simple, il y a d’un côté la file des Ukrainiens, de l’autre celle des étrangers. D’un côté on les laisse tranquilles, de l’autre on les traite comme des animaux », s’exclame Padma, une jeune Népalaise qui étudiait la médecine en Ukraine. Comme elle, des dizaines de milliers d’étudiants étrangers résidaient dans le pays d’Europe de l’Est, venant principalement du Maroc, d’Égypte, d’Inde ou encore de plusieurs pays d’Afrique subsaharienne. Beaucoup d’entre eux font désormais partie des 280.000 exilés qui ont déjà rejoint la Pologne depuis le début du conflit.

      La Népalaise n’arrive pas à se calmer. Ses amies ont loupé quatre fois le train, « parce qu’ils ne mettaient que les Ukrainiens dedans », affirme-t-elle, tout en rassemblant ses affaires près de tentes blanches installées à Medyka, l’un des postes de frontière les plus empruntés par les réfugiés. Au total, ils attendront 24 heures pour enfin grimper dans un wagon.

      « On était comme des singes », ajoute la jeune femme, en expliquant s’être retrouvée bloquée à quelques kilomètres de la Pologne, après son voyage en train. « Il donnait de la nourriture aux Ukrainiens, pas à nous. » Un de ses amis l’interrompt en criant : « On leur a même proposé de l’argent ! Mais ils disaient qu’il n’y avait plus rien. » Après 36 heures sans manger, le groupe a finalement été accueilli par la police polonaise, avec de l’eau et à manger. « Eux ils nous ont bien traités », ajoute Padma. « Rien que leur façon de nous parler n’avait rien à voir », renchérit Milan, un autre Népalais. Mais même côté polonais pourtant, certains commencent à dénoncer un accueil bien plus froid à leur égard, comparé à celui réservé à leurs homologues ukrainiens.

      Le tri des réfugiés en fonction de leur origine commence à faire du bruit sur les réseaux sociaux, où les hashtag #AfricansInUkraine ou encore #IndiansInUkraine ont fait leur apparition à côté des vidéos montrant ces discriminations. Une sorte de cri d’alarme en ligne visant à alerter sur le sort des milliers de ressortissants de pays d’Afrique et autres qui sont encore bloqués aux frontières ukrainiennes, empêchés de quitter le pays. Pourtant, filmer ce type de vidéo ne serait pas sans danger.

      « Si tu sors ton téléphone pour filmer, ils [les soldats ukrainiens] deviennent comme des fous, ils te menacent pour que tu ne montres pas ce qui se passe. On voulait filmer, montrer quand on nous disait : “pas les Noirs” », explique Blaise*, un étudiant ivoirien qui a laissé derrière lui six ans de vie en Ukraine. L’homme peine à marcher. « Regardez notre démarche ! On vient de passer des jours debout, en ligne, sans pouvoir s’allonger. Tandis que les Ukrainiens étaient mieux traités », glisse quelques mètres plus loin Rohit, un ressortissant indien qui se réchauffe près d’un feu improvisé.

      Double peine

      Sous une bâche installée par des Polonais venus prêter main-forte à tous les exilés, Yren, une Congolaise, temporise. « Pour les femmes étrangères, c’était déjà un peu mieux que pour les hommes. » De l’autre côté de la frontière, des milliers d’Ukrainiens sont également bloqués dans le froid pendant des heures, et les douaniers veillent toujours à empêcher les hommes de 18 à 60 ans de sortir du pays. Tout le monde ici a vu des familles ukrainiennes obligées de se séparer, ou même rebrousser chemin, avec femmes et enfants, pour ne pas se diviser.

      La jeune femme emmitouflée dans une couverture boit une gorgée de soupe chaude, et ajoute : « On nous laissait un peu plus tranquilles les femmes, et moi on ne m’a pas frappée. Mais il y avait quand même des animaux domestiques qui passaient devant nous. »

      Pour les personnes racisées, fuir l’Ukraine de la sorte est comme une double peine. « À Kiev, j’étais terrifié. La situation était horrible, avec les tirs, les couvre-feux... Tous les comptes des étrangers ont été bloqués, ma carte ne marchait plus. Tout s’est écroulé », explique Joseph* originaire d’Afrique subsaharienne. Un traumatisme qui n’arrivera finalement pas seul. « Sur la route, la police m’a tapé avec une crosse de fusil pour essayer de garder la ligne. Ils ont terrorisé les gens, tout le monde tombe malade de l’autre côté. Honnêtement, j’ai cru que je n’y arriverais jamais. »

      Les discriminations envers ces exilés posent aussi question pour l’avenir. Quel accueil les pays européens réserveront-ils aux réfugiés non ukrainiens –et même ukrainiens– qui ont fui ce conflit meurtrier ? Une question d’autant plus importante au vu du nombre de déplacés potentiels, qui pourrait atteindre les 7 millions, selon l’ONU. Avec cet exode massif et les crises humanitaires qu’elles induisent, il y a un risque que la distinction entre les exilés se poursuive en Europe, prolongeant l’expérience traumatisante des réfugiés.

      De son côté, Stephan et ses amis camerounais ne savent pas encore de quoi seront faits les jours qui se profilent. « Pour l’instant, on doit trouver un bus pour partir loin de la frontière », explique-t-il en regardant devant et derrière lui, en espérant apercevoir l’un des véhicules en partance pour Przemyśl. « Je veux juste m’allonger, et me reposer. Je n’en peux plus. » Se reposer avant de reprendre la route, dans un voyage qui est encore loin d’être terminé.

      *Les prénoms ont été changés.

      http://www.slate.fr/story/224214/reportage-guerre-ukraine-russie-profilage-racial-noirs-frontiere-racisme-solda

    • Guerre en Ukraine : à la frontière polonaise, « les gardes ukrainiens nous ont tapé avec des bâtons », racontent des étudiants étrangers

      De nombreux étudiants africains ou asiatiques qui vivaient en Ukraine tentent de passer en Pologne depuis le début de l’offensive russe. Certains se plaignent d’un traitement raciste de la part des garde-frontières ukrainiens.

      Couverture sur le dos, Gurwinder peine encore à réaliser qu’il est enfin arrivé en Pologne. « J’ai essayé de passer à plusieurs reprises », raconte cet étudiant indien, chauffeur de VTC à Kiev (Ukraine). Il a marché 30 kilomètres pour rejoindre la frontière, où il a dû attendre trois jours au poste-frontière ukrainien pour traverser. « À chaque fois, les gardes ukrainiens m’ont dit : ’Non, ce sont d’abord les femmes et les enfants qui passeront. Vous, les Indiens, vous ne passerez pas’, raconte Gurwinder. Nous avons essayé pendant trois jours, sans dormir, sans manger car si vous dormez, vous perdez votre place. »

      Comme lui, plus de 500 000 personnes ont rejoint la Pologne depuis le lancement de l’offensive russe en Ukraine, le 24 février. L’exode est notamment très difficile pour les 78 000 étudiants étrangers qui vivaient comme lui en Ukraine, dont beaucoup sont originaires d’Afrique et d’Asie. Plusieurs d’entre eux ont en effet dénoncé des discriminations du côté ukrainien de la frontière.
      Frappés et laissés dans le froid

      Si les étrangers interrogés n’ont pas tous eu de problèmes à traverser la frontière en raison de leur nationalité, plusieurs récits ont émergé de la part d’étudiants bloqués du côté ukrainien de la frontière. L’Union africaine a même dénoncé un traitement « inacceptable » et « raciste » pour les Africains. Certaines ambassades, comme celle de Côte-d’Ivoire, d’Afrique du Sud ou du Nigéria, ont envoyé des représentants sur place.

      « Quand on est arrivés, ils ont fait passer avant nous les Ukrainiens avec des documents de résidence. Quand on a essayé de se plaindre, les gardes ukrainiens nous ont tapé avec des bâtons. J’ai été frappé plusieurs fois », témoigne pour sa part Clinton, un Ougandais de 24 ans. Il est arrivé dès le 24 février au poste frontière mais n’a pu rejoindre la Pologne que le 3 mars. « Ils nous ont laissé dormir dehors. On a dû faire un feu et ils l’ont éteint », raconte-t-il, encore sous le choc, dans la gare de Przemysl. Il estime que ce traitement infligé aux étrangers est raciste.

      « Parce que vous êtes noir, même si vous essayez de communiquer en utilisant un traducteur en ligne, ils vous regardent et s’en vont. Ce sont les dépositaires de l’autorité, est-ce qu’ils ne sont pas supposés nous aider ? C’était très dur. Je suis vraiment très content d’être arrivé en Pologne car, honnêtement, je ne pensais pas y arriver. C’était très inquiétant. »
      Clinton, étudiant Ougandais de 24 ans

      à franceinfo

      De son côté, l’Ukraine a démenti toute différence de traitement, assurant que le premier arrivé était le premier servi. Le service des garde-frontières ukrainiens a nié « toute difficulté », assurant que « personne n’a été empêché de quitter l’Ukraine ». De son côté, Varsovie a rappelé que toute personne fuyant l’Ukraine est accueillie quelle que soit sa nationalité, passeport valide ou non...

      https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-en-ukraine-a-la-frontiere-polonaise-les-gardes-ukrainiens-nous-o
      #Pologne

    • People of colour fleeing Ukraine attacked by Polish nationalists

      Non-white refugees face violence and racist abuse in Przemyśl, as police warn of fake reports of ‘migrants committing crimes’

      Police in Poland have warned that fake reports of violent crimes being committed by people fleeing Ukraine are circulating on social media after Polish nationalists attacked and abused groups of African, south Asian and Middle Eastern people who had crossed the border last night.

      Attackers dressed in black sought out groups of non-white refugees, mainly students who had just arrived in Poland at Przemyśl train station from cities in Ukraine after the Russian invasion. According to the police, three Indians were beaten up by a group of five men, leaving one of them hospitalised.

      “Around 7pm, these men started to shout and yell against groups of African and Middle Eastern refugees who were outside the train station,” two Polish journalists from the press agency OKO, who first reported the incident, told the Guardian. “They yelled at them: ‘Go back to the train station! Go back to your country.’”

      Police intervened and riot officers were deployed after groups of men arrived chanting “Przemyśl always Polish”.

      “I was with my friends, buying something to eat outside,” said Sara, 22, from Egypt, a student in Ukraine. “These men came and started to harass a group of men from Nigeria. They wouldn’t let an African boy go inside a place to eat some food. Then they came towards us and yelled: ‘Go back to your country.’”

      Following the incident, police in Poland warned that groups linked to the far right are already spreading false information about alleged crimes committed by people from Africa and the Middle East fleeing war in Ukraine.

      Przemyśl police said on Twitter: “In the media, there is false information that serious crimes have occurred in Przemyśl and the border: burglaries, assaults and rape. It’s not true. The police did not record an increased number of crimes in connection with the situation at the border. #StopFakeNews.”

      According to the news website Notes From Poland, one Facebook group, named Przemyśl Always Polish (Przemyśl Zawsze Polski), has been spreading false claims that “economic migrants from the Middle East” were committing crimes, “including a knife attack on a young woman and numerous thefts from shops”.

      The attacks on people fleeing the war come amid efforts by some African governments to evacuate their citizens who have passed into countries bordering Ukraine after reports of racist abuse and discrimination.

      On Wednesday, Nigeria’s foreign ministry said it planned to start airlifting more than 1,000 Nigerians stranded in countries neighbouring Ukraine.

      Many of the foreign nationals fleeing the Russian attacks are students. About 16,000 African students were studying in the country before the invasion, Ukraine’s ambassador to South Africa said this week.

      Reports and footage on social media in the past week have shown acts of discrimination and violence against African, south Asian and Caribbean citizens while fleeing Ukrainian cities and at some of the country’s border posts.

      In an interview with the Guardian, a 24-year-old medical student from Kenya, who did not want to be named, said she spent hours waiting for Ukrainian border guards to let her enter Poland because they were prioritising Ukrainian nationals.

      After eventually crossing the border, she boarded a free bus, organised by an NGO, to a hotel near Warsaw that was offering free board to Ukrainian refugees. But the hotel refused to take her and her Kenyan friends in, even after she offered to pay for a room.

      However, other foreign nationals interviewed by the Guardian said that they had been treated well by the Polish authorities, with many of the reports of racial abuse occurring on the Ukrainian side of the border.

      The Nigerian president, Muhammadu Buhari, said on Monday: “All who flee a conflict situation have the same right to safe passage under the UN convention and the colour of their passport or their skin should make no difference,” citing reports that Ukrainian police had obstructed Nigerians.

      “From video evidence, first-hand reports, and from those in contact with … Nigerian consular officials, there have been unfortunate reports of Ukrainian police and security personnel refusing to allow Nigerians to board buses and trains heading towards Ukraine-Poland border,” he said.

      On Tuesday, Ukraine’s foreign minister, Dmytro Kuleba, acknowledging the allegations, said: “Ukraine’s government spares no effort to solve the problem.”

      “Africans seeking evacuation are our friends and need to have equal opportunities to return to their home countries safely,” he said in a statement on Twitter.

      Ghana, South Africa and Ivory Coast are also among a growing number of African countries seeking to evacuate their citizens in response to reports of discrimination and violence that have sparked widespread outrage.

      In Nigeria, Gabriel Aduda, permanent secretary for the ministry of foreign affairs, said three jets chartered from local carriers would leave the country on Wednesday, with the capacity to bring back nearly 1,300 people from Poland, Romania and Hungary.

      Rights groups have welcomed the efforts by Poland to help, but some drew comparisons with the treatment of other refugees from Syria, Afghanistan and Kurdish Iraqis in the country, where the populist rightwing government has often played on anti-refugee sentiment.

      Last year, after the Belarusian president, Alexander Lukashenko, organised the movement of refugees with the promise of a safe passage to Europe, thousands of people from the Middle East were caught by Polish border guards in the forests near the border and illegally and violently pushed back to Belarus.

      https://www.theguardian.com/global-development/2022/mar/02/people-of-colour-fleeing-ukraine-attacked-by-polish-nationalists

    • Europe welcomes Ukrainian refugees — others, less so

      They file into neighboring countries by the hundreds of thousands — refugees from Ukraine clutching children in one arm, belongings in the other. And they’re being heartily welcomed, by leaders of countries like Poland, Hungary, Bulgaria, Moldova and Romania.

      But while the hospitality has been applauded, it has also highlighted stark differences in treatment given to migrants and refugees from the Middle East and Africa, particularly Syrians who came in 2015. Some of the language from these leaders has been disturbing to them, and hurtful.

      “These are not the refugees we are used to… these people are Europeans,” Bulgarian Prime Minister Kiril Petkov told journalists earlier this week, of the Ukrainians. “These people are intelligent, they are educated people.... This is not the refugee wave we have been used to, people we were not sure about their identity, people with unclear pasts, who could have been even terrorists…”

      “In other words,” he added, “there is not a single European country now which is afraid of the current wave of refugees.”
      Syrian journalist Okba Mohammad says that statement “mixes racism and Islamophobia.”

      Mohammad fled his hometown of Daraa in 2018. He now lives in Spain, and with other Syrian refugees founded the first bilingual magazine in Arabic and Spanish. He described a sense of déjà vu as he followed events in Ukraine. He also had sheltered underground to protect himself from Russian bombs. He also struggled to board an overcrowded bus to flee his town. He also was separated from his family at the border.

      “A refugee is a refugee, whether European, African or Asian,” Mohammad said.

      The change in tone of some of Europe’s most extreme anti-migration leaders has been striking — from “We aren’t going to let anyone in” to “We’re letting everyone in.”

      Those comments were made only three months apart by Hungarian Prime Minister Viktor Orban. In the first, in December, he was addressing migrants and refugees from the Middle East and Africa. In the second, this week, he was addressing people from Ukraine.

      Some journalists, too, are being criticized for descriptions of Ukrainian refugees. “These are prosperous, middle-class people,” an Al Jazeera English television presenter said. “These are not obviously refugees trying to get away from areas in the Middle East... in North Africa. They look like any European family that you would live next door to.”

      The channel issued an apology saying the comments were insensitive and irresponsible.

      CBS news apologized after one of its correspondents said the conflict in Kyiv wasn’t “like Iraq or Afghanistan that has seen conflict raging for decades. This is a relatively civilized, relatively European” city.

      As more and more people scrambled to flee Ukraine, several reports emerged of non-white residents, including Nigerians, Indians and Lebanese, getting stuck at borders. Unlike Ukrainians, many non-Europeans need visas to get into neighboring countries. Embassies around the world were scrambling to assist their citizens in getting through.

      Videos shared on social media under the hashtag #AfricansinUkraine allegedly showed African students being kept from boarding trains out of Ukraine, to make space for Ukrainians.

      The African Union in Nairobi said Monday that everyone has the right to cross international borders to flee conflict. The continental body said “reports that Africans are singled out for unacceptable dissimilar treatment would be shockingly racist and in breach of international law.”

      It urged all countries to “show the same empathy and support to all people fleeing war notwithstanding their racial identity.”

      Polish U.N. Ambassador Krzysztof Szczerski said at the General Assembly on Monday that assertions of race- or religion-based discrimination at Poland’s border are “a complete lie and a terrible insult to us.”

      “The nationals of all countries who suffered from Russian aggression or whose life is at risk can seek shelter in my country,” he said.

      Szczerski said people of some 125 nationalities had been admitted to Poland on Monday morning from Ukraine, including Ukrainian, Uzbek, Nigerian, Indian, Moroccan, Pakistani, Afghan, Belarussian, Algerian and more. Overall, he said, 300,000 people have arrived during the crisis.

      When over a million people crossed into Europe in 2015, support for refugees fleeing wars in Syria, Iraq and Afghanistan was relatively high at first. There were also moments of hostility — such as when a Hungarian camerawoman was filmed kicking and possibly tripping migrants along the country’s border with Serbia.

      Still, back then, Germany’s chancellor, Angela Merkel, famously said “Wir schaffen das” (“We can do it”), and the Swedish prime minister urged citizens to “open your hearts” to refugees.

      Volunteers gathered on Greek beaches to rescue exhausted families crossing on boats from Turkey. In Germany, they were greeted with applause at train and bus stations.

      But the warm welcome soon ended after EU nations disagreed over how to share responsibility, with the main pushback coming from Central and Eastern European countries like Hungary and Poland. One by one, governments across Europe toughened migration and asylum policies, earning the nickname “Fortress Europe.”

      Just last week, the U.N. High Commissioner for Refugees denounced the increasing “violence and serious human rights violations” across European borders, specifically pointing the finger at Greece.

      Last year hundreds of people, mainly from Iraq and Syria but also from Africa, were left stranded in a no man’s land between Poland and Belarus as the EU accused Belarusian President Alexander Lukashenko of luring thousands of foreigners to its borders in retaliation for sanctions. At the time, Poland blocked access to aid groups and journalists. More than 15 people died in the cold.

      Meanwhile, in the Mediterranean, the European Union has been criticized for paying Libya to intercept migrants trying to reach its shores, helping to return them to abusive and often deadly detention centers.

      “There is no way to avoid questions around the deeply embedded racism of European migration policies when we see how different the reactions of national governments and EU elites are to the people trying to reach Europe,” Lena Karamanidou, an independent migration and asylum researcher in Greece, wrote on Twitter.

      Jeff Crisp, a former head of policy, development and evaluation at UNHCR, agreed that race and religion influenced treatment of refugees.

      “Countries that had been really negative on the refugee issue and have made it very difficult for the EU to develop coherent refugee policy over the last decade, suddenly come forward with a much more positive response,” Crisp noted.

      Much of Orban’s opposition to migration is based on his belief that to “preserve cultural homogeneity and ethnic homogeneity,” Hungary should not accept refugees from different cultures and different religions.

      Members of Poland’s conservative nationalist ruling party have echoed Orban’s thinking, saying they want to protect Poland’s identity as a Christian nation and guarantee its security.

      These arguments have not been applied to their Ukrainian neighbors, with whom they share historical and cultural ties. Parts of Ukraine today were once also parts of Poland and Hungary. Over 1 million Ukrainians live and work in Poland and hundreds of thousands more are scattered across Europe. Some 150,000 ethnic Hungarians also live in Western Ukraine, many of whom have Hungarian passports.

      “It is not completely unnatural for people to feel more comfortable with people who come from nearby, who speak the (similar) language or have a (similar) culture,” Crisp said.

      In Poland, Ruchir Kataria, an Indian volunteer, told The AP on Sunday that his compatriots got stuck on the Ukrainian side of the border crossing into Medyka, Poland. In Ukraine, they were initially told to go to Romania, hundreds of kilometers away, he said, after they had already made long journeys on foot to the border, not eating for three days. Finally, on Monday they got through.

      https://apnews.com/article/russia-ukraine-war-refugees-diversity-230b0cc790820b9bf8883f918fc8e313

    • I’m currently in a train back from Warsaw which is full of refugees heading to Berlin.

      At #Frankfurt-am-Oder, German border police disembarked many BIPOCs.

      I can’t say if all were taken out of the train but only people of colour & their partners & children got off.

      Just talked to 2 Indian students from Punjab fleeing Kyiv, they were still in the train, getting off at Berlin central station. They said they had no issue crossing the Hrebenne-Hava Ruska border checkpoint but that they knew of people for whom it was hell at other checkpoints.

      https://twitter.com/EmmanuelleChaze/status/1499727609432879105
      #Allemagne #profilage #profilage_racial #profilage_ethnique

    • Statement on the war in Ukraine and the treatment of Africans trying to flee the country

      Like countless people all over the world, the members of the Africa Multiple Cluster of Excellence based at the University of Bayreuth (Germany) and African Cluster Centres at the University of Lagos (Nigeria), Joseph Ki-Zerbo University (Ouagadougou, Burkina Faso), Moi University (Eldoret, Kenya) and Rhodes University (Makhanda, South Africa), are greatly shocked about the Russian war on Ukraine and the Russian government’s disregard for the rights of everyone in the Ukraine to live in peace and security. We declare our concern for all those affected by the virulent and reprehensible attacks by Russian forces on Ukrainian territory.

      At the same time, we are deeply troubled by the flagrant racism towards Africans—predominantly students—anxious to flee danger to their lives during this turbulent period, which has been widely observed and reported in the news and social media from train stations in Ukrainian towns as well as from the Ukrainian-Polish border. The blatant racial profiling exercised through officials’ refusals to allow Black people cross the border, forcing them to remain in areas of conflict, is abhorrent and not to be condoned.

      We also note with dismay how several white-positioned government officials and media representatives have expressed their shock at the necessity of Ukrainian citizens to flee as refugees while simultaneously articulating racist comparisons to previous waves of Iraqi, Syrian, Afghani, and African refugees to Europe in the past years. The current display of racism vis-à-vis Africans trying to flee Ukraine sadly reconfirms the pattern of dehumanization of refugees of color that has become all too familiar in many refugee crises in Europe of the recent past.

      Just as we stand in solidarity with all Ukrainians and Russians who never wanted this war, we declare our solidarity and concern for all Black people and people of color who became embroiled in this conflict. We join the African Union in urging “all countries to respect international law and show the same empathy and support to all people fleeing war notwithstanding their racial identity” (official AU statement issued on February 28, 2022). We further demand of the European Union as well of the respective national governments to call out the racist practices and to play their part in putting an end to the suffering caused, through creating the conditions necessary to preserve the dignity of Africans fleeing the country and to protect all human lives during this time of war.

      Eldoret (Kenya), Lagos (Nigeria), Makhanda (South Africa), Ougadougou (Burkina Faso), and Bayreuth (Germany), March 4, 2022

      The Directors of the African Cluster Centres
      The Members of the Management Board, Africa Multiple Cluster of Excellence

      Prof. Dr. Yacouba Banhoro, Joseph Ki-Zerbo University, Ouagadougou

      Prof. Dr. Andrea Behrends, Vice Dean of Early Career & Equal Opportunity, University of Bayreuth

      Prof. Dr. Olumuyiwa Falaiye, University of Lagos

      Prof. Dr. Ute Fendler, Vice Dean of Internationalisation & Public Engagement, University of Bayreuth

      Dr. Franz Kogelmann, Managing Director, University of Bayreuth

      Prof. Dr. Enocent Msindo, Rhodes University, Makhanda

      Prof. Dr. Sabelo Ndlovu-Gatsheni, Vice Dean of Research, University of Bayreuth

      Prof. Dr. Cyrus Samimi, Vice Dean of Digital Solutions, University of Bayreuth

      Prof. Dr. Rüdiger Seesemann, Dean, University of Bayreuth

      Prof. Dr. Peter Simatei, Moi University, Eldoret

      Dr. Christine Vogt-William, Director of the Gender & Diversity Office

      https://www.africamultiple.uni-bayreuth.de/en/news/2022/2022-03-04_Statement-on-the-war/index.html

    • More African students decry racism at Ukrainian borders

      As at least half a million refugees flee Ukraine, more reports of mistreatment by Ukrainian border guards surface.

      Barlaney Mufaro Gurure, a space engineering student from Zimbabwe, had finally reached the front of a nine-hour queue at Ukraine’s western border crossing of Krakovets after an exhausting four-day trip.

      It was her turn to cross. But the border guard pushed her and four other African students she was travelling with aside, giving priority to Ukrainians. It took hours, and relentless demands, before they were also allowed to go through border control.

      “We felt treated like animals,” the 19-year-old said in a phone interview from a Warsaw hotel. Gurure, a freshman at the National Aviation University, fled Kyiv hours after Russian President Vladimir Putin ordered troops into Ukraine on February 24.

      “When we left [Kyiv] we were just trying to survive,” she said. “We never thought that they would have treated us like that […] I thought we were all equal, that we were trying to stand together,” Gurure added.

      Her story is not isolated as scores of Africans have reported episodes of abuse and discrimination while trying to cross into Ukraine’s neighbours.

      Since the war started, more than 870,000 refugees have fled from Ukraine to neighbouring countries, the United Nations said. Half of those are currently in Poland. Queues along the border are now tens of kilometres long with some African students describing to Al Jazeera how they have been waiting for days to cross amid freezing temperatures and with no food, blankets or shelters.

      For others, issues started before reaching border crossings. Claire Moor, another Black student, was pushed down as she tried to board a train at Lviv’s train station. The guard insisted that only women could take the train. The officer looked away, Moor said, as she pointed out that she was, indeed, a woman. “I was shocked because I did not know the extent of the racism,” she added.

      Jan Moss, a volunteer with the Polish aid organisation, Grupa Zagranica, who has been providing assistance at the Polish-Ukrainian border, said while refugees have been welcomed at many crossings out of Ukraine without any form of discrimination, the reception near Medyka has been more problematic as refugees were being organised based on “racial profiling”.

      Ukrainians and Polish nationals are allowed to pass through the much quicker vehicles’ lane, while foreigners have to go through the pedestrian one, a three-stage process that can last from 14 to 50 hours, Moss said.

      Al Jazeera contacted Ukraine’s Border Guard Service via email over the allegations of segregation at the borders but had not received a response before the publication of this report.

      In the last 20 years, Ukraine has emerged as a choice destination for African students, especially in medicine-related fields as it is cheaper compared with universities in the United States and elsewhere in Europe.

      Videos and tweets under the hashtag #AfricansinUkraine have flooded social media, triggering numerous crowdfunding initiatives on Telegram and Instagram to support students at the borders and put pressure on respective governments.

      The African Union reacted to the outcry on Monday: “Reports that Africans are singled out for unacceptable dissimilar treatment would be shockingly racist and in breach of international law,” it said in a statement. A spokesperson from South Africa’s foreign ministry said on Sunday that a group of its nationals and other Africans were being “treated badly” at the Polish-Ukrainian border.

      The Nigerian government also expressed concerns over reports of discriminatory behaviour, including a video widely shared on social media showing a Nigerian woman with her young baby being forcibly made to give up her seat to another person. It also said that a group of Nigerians had been refused entry into Poland – an allegation dismissed by Poland’s ambassador to Nigeria.

      But some foreigners said they received a warm welcome in neighbouring countries, such as Moldova and Romania, including a relatively smooth transit.

      https://www.aljazeera.com/news/2022/3/2/more-racism-at-ukrainian-borders

    • Guerre en Ukraine : « Il faut transporter tous les réfugiés gratuitement » dans les trains français, réclame la CGT-Cheminots

      Suite à l’annonce du patron de la #SNCF sur le transport gratuit des réfugiés ukrainiens dans les trains français, syndicats et associations demandent, la généralisation de la gratuité pour tous les réfugiés.

      Les réfugiés ukrainiens pourront « circuler gratuitement en TGV et en Intercités » en France. L’annonce du PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, sur Twitter lundi 28 février, a provoqué de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. Certains internautes dénoncent notamment une hypocrisie et une discrimination à l’égard des autres réfugiés. Mardi 1er mars, la #CGT-Cheminots, premier syndicat de la compagnie ferroviaire, a écrit une lettre ouverte à sa direction pour demander la généralisation de la gratuité à tous les réfugiés en France.

      « Comment des agents de la SNCF pourraient-ils sanctionner certains réfugiés et pas d’autres ? » demande le syndicat. « Comme se développe cette petite ambiance ’il y a des bons et des mauvais réfugiés’, on ne voudrait pas être soumis à ce style de calcul là », martèle Laurent Brun, le secrétaire général de la CGT-Cheminots. « Il y a des réfugiés et il faut tous les transporter gratuitement. Pas de problème, c’est le rôle d’un service public. »
      Changer l’accueil des réfugiés en France

      Les associations qui s’occupent de réfugiés syriens, irakiens ou encore kurdes depuis des années, dénoncent aussi le traitement qui leur est fait à bord des trains. « Dans une logique d’entrave d’État envers ces personnes, les dispositifs policiers de surveillance ont été augmentés à la fois dans les gares,donc à la gare du Nord, à Grande-Synthe et Calais et aussi dans les trains », affirme Nikolaï Posner, le responsable communication d’Utopia 56. « Et souvent les personnes se font arrêter et sortir à la gare suivante. »

      Avec l’arrivée de réfugiés ukrainiens, l’association espère un réel changement sur l’accueil des réfugiés en France. « Aujourd’hui, on se retrouve dans une situation où ça touche à un pays d’Europe et on approche les questions d’une autre manière. » commente Nicolaï Posner. « On souhaite qu’on le fasse pour tous et arrêter ces politiques de discrimination. » Contactée par franceinfo, la SNCF se refuse à tout commentaire.

      https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-en-ukraine-il-faut-transporter-tous-les-refugies-gratuitement-da

    • Ukraine : Trente trois ONG dénoncent le #racisme_anti-noir

      Trente trois ONG ont dénoncé vendredi 4 Mars 2022 le racisme anti noir constaté en Ukraine à l’occasion de la guerre russo -ukrainienne, dans un communiqué collectif parvenu au site madaniya. Exprimant leur “grave préoccupation face aux actes de traitement dégradants et inhumains que les ressortissants africains vivant ou résidant en Ukraine subissent suite à la guerre déclenchée depuis le 24 février 2022”, le collectif invite les autorités ukrainiennes à “mettre un terme au racisme manifesté à l’égard des africains résidant ou séjournant” dans ce pays. Intitulé “Stop au racisme dans la guerre”, le communiqué relève “que plusieurs citoyens d’origine africaine sont confrontés à la persécution, à la xénophobie, au racisme, à la discrimination raciale de la part des autorités ukrainiennes. “Selon les informations parvenues à nos organisations ainsi que des témoignages recueillis auprès de victimes, la police ukrainienne empêcherait l’évacuation des ressortissants d’origine africaine. À cela s’ajoutent les actes xénophobes orchestrés par les autorités polonaises qui procèdent de manière sélective à l’autorisation d’entrée des personnes fuyant la guerre sur des critères liés à leur couleur de peau. C’est ainsi que plusieurs citoyens africains sont retenus à la frontière Ukraine-polonaise, poursuit le communiqué. “À cet effet, nos organisations rappellent l’Article 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui stipule : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». Nous tenons également à souligner l’Article 14.1 de la DUDH « devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays, ajoute le document. Le collectif lance un appel “au Président en exercice de l’Union Africaine M. Macky Sall (Sénégal) ainsi que le Président de la Commission de l’Union Africaine M. Moussa Mahamat Faki (Tchad) les invitant à veiller au respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire. “Devant les risques d’aggravation de cette guerre et ses conséquences dévastatrices pour les populations civiles et plus largement en Afrique”, le collectif dénonce ces pratiques hideuses, xénophobes et discriminatoires relevant d’un autre âge et condamne fermement ces atteintes contraires aux droits humains et aux principes du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire”. Devant cette montée fulgurante de la haine raciale dans le monde il est urgent que tous les pays respectent et mettent en application la Convention des nations contre le racisme ainsi que le programme et plan d’action de la Conférence Mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie qui y est associée. (Durban en Afrique du Sud, du 31 août au 8 septembre 2001). Le collectif invite en outre impérativement à l’Union Africaine, l’Union Européenne et aux Nations Unies de se saisir immédiatement de cette situation afin de garantir et assurer une protection adéquate à ces personnes en détresse, conclut le document. NDLR La guerre en Ukraine a révélé le tréfonds de la pensée d’une fraction de l’élite occidentale, particulièrement en France, La « Patrie des Droits de l’Homme ». Jean Louis Bourlanges, président de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale française, a ainsi vanté l’immigration de qualité qui résulterait de l’afflux d’Ukrainiens en France par comparaison avec les Afghans, les Irakiens ou les Syriens. M. Bourlanges, pourtant député Modem, une formation qui se revendique de la « Démocratie Chrétienne » a assuré que les Ukrainiens constitueraient en France une « immigration de grande qualité, dont on pourra tirer profit », faisant valoir qu’elle était composée « d’intellectuels ». Ce qui reviendrait à déduire de ces propos qu’il existe de par le monde des réfugiés moins utiles… Parce que culturellement trop différents ? Pas chrétiens ou pas Européens ? qui conduit les commentateurs à distinguer « accueil de réfugiés » en parlant des Ukrainiens, mais « crise des migrants », quand il s’agit du sort des « basanés » …Irakiens, des Syriens ou des Afghans ! Beaucoup de commentateurs et éditorialistes de renom se sont paresseusement laissés aller à ces raccourcis conscient ou inconscient depuis le déclenchement du conflit le 24 Février 2022

      https://libnanews.com/ukraine-trente-trois-ong-denoncent-le-racisme-anti-noir
      #racisme_anti-Noirs

    • Niet iedere vluchteling uit Oekraïne krijgt dezelfde behandeling

      Oekraïners met de juiste papieren worden snel ingeschreven in het bevolkingsregister en kunnen ook snel aan het werk. Ook vluchtelingen uit Oekraïne die oorspronkelijk uit een ander land komen, maar wel een Oekraïense verblijfsvergunning hebben, kunnen hier bescherming krijgen. Maar niet iedere vluchteling uit Oekraïne krijgt dezelfde behandeling.

      Als de papieren niet kloppen en er vragen zijn over de identiteit en over het verblijfsrecht in Oekraïne, dan moeten ze asiel vragen of het land verlaten.

      De meeste vluchtelingen die uit Oekraïne komen (op dit moment ruim 12.000) zijn vrouwen en kinderen. Oekraïense mannen moeten in het land blijven. Niet-Oekraïense mannen mogen het land wel verlaten, hoewel dat niet eenvoudig is. Bij pogingen om weg te gaan uit Oekraïne krijgen ze te maken met discriminatie. Een onbekend aantal van deze vluchtelingen heeft Nederland weten te bereiken.
      Afrikaanse mannen

      In de gemeentelijke opvanglocaties verblijven dus ook mensen die niet geboren zijn in Oekraïne. Zij woonden daar bijvoorbeeld omdat ze er asiel hadden gekregen of er studeerden. Om hoeveel mensen dat gaat, kunnen de ministeries van binnenlandse zaken en justitie nog niet zeggen. Volgens het COA gaat het in de locaties die zij beheren om kleine aantallen. Ook Vluchtelingenwerk, actief in de gemeentelijke opvanglocaties, ziet dat het om weinig mensen gaat.

      Hun aanwezigheid leidt soms tot verbazing bij de gemeentelijke opvangplekken. Inwoners van Harskamp waren vrijdag verrast toen er tijdens een voetbaltoernooi dat voor de Oekraïense vluchtelingen was georganiseerd Afrikaanse mannen het veld op kwamen lopen. Ook bij het inzamelen van spullen is er niet aan mannen gedacht. Er is voldoende kleding voor vrouwen en kinderen, maar er is ook ondergoed voor mannen nodig.
      Drie groepen

      Het ministerie van justitie heeft Oekraïense vluchtelingen in drie groepen ingedeeld: Oekraïners met alle benodigde documenten, Oekraïners met beperkte of geen documenten en mensen die uit Oekraïne zijn gevlucht omdat ze daar verblijven, maar uit een ander land komen.

      Een vreemdeling uit Oekraïne moet zich melden bij een gemeente om ingeschreven te kunnen worden in de Basis Registratie Personen (BRP). Voor een Oekraïner met alle bewijsdocumenten kan dat in principe snel.

      Oekraïners die niet alle vereiste documenten hebben, moeten meer moeite doen. Voor hen zal er nader onderzoek komen. Pas na de vaststelling van hun identiteit, binnen één dag, worden ook zij ingeschreven in de BRP. Zij mogen van het ministerie van justitie gewoon in de gemeentelijke opvanglocaties blijven als hun identiteit geloofwaardig is.
      Land verlaten

      Als de identiteit en nationaliteit niet kan worden vastgesteld, heeft de vreemdeling de mogelijkheid om een asielaanvraag in te dienen. Hij of zij komt niet in aanmerking voor de richtlijn tijdelijke bescherming voor Oekraïners. De asielprocedure moet dan in een asielzoekerscentrum worden afgewacht. Als de vreemdeling terug wil naar zijn land van herkomst dan kan de Dienst Terugkeer en Vertrek of de Internationale Organisatie voor Migratie (IOM) daarbij helpen, maar daar heeft in dit geval nog niemand zich gemeld.

      https://nos.nl/collectie/13892/artikel/2422218-niet-iedere-vluchteling-uit-oekraine-krijgt-dezelfde-behandeling

    • Accueil sélectif aux frontières européennes : du racisme des politiques migratoires

      Communiqué sur la situation en Ukraine

      « Les ministres (de l’Intérieur) de l’Union européenne (UE) se sont accordés aujourd’hui unanimement sur la mise en place d’un mécanisme de protection temporaire pour répondre à l’afflux de personnes déplacées en provenance d’Ukraine » [1]. C’est dans ces termes que la France, qui préside actuellement le Conseil de l’UE, s’est félicitée par la voix de son ministre de l’Intérieur de l’accord historique de la mise en œuvre, pour la toute première fois, de la directive européenne sur la protection temporaire de 2001, lors de la réunion du Conseil « Justice et affaires intérieures » du 3 mars. « Cette décision reflète le plein engagement de l’Union européenne à afficher sa solidarité à l’égard de l’Ukraine et à assumer son devoir à l’égard des populations victimes de cette guerre injustifiable », a-t-il ajouté.

      Ce mécanisme de protection, demandé à plusieurs reprises par la société civile pour d’autres groupes de personnes exilées – les Syrien⋅ne⋅s en 2011 ou les Afghan⋅e⋅s à l’été 2021 – n’avait jamais été jusque-là appliqué [2]. Par ailleurs, depuis le début de l’invasion militaire russe de l’Ukraine, les pays limitrophes – tels que la Pologne, la Hongrie, la Bulgarie – qui ont, au cours des dernières années, pratiqué une politique de rejet et d’hostilité à l’égard des personnes en exil tentant de traverser leurs frontières, se sont rapidement organisés pour accueillir les Ukrainien⋅ne⋅s fuyant la guerre. Ailleurs en Europe, des États qui, il y a peu, criminalisaient la solidarité manifestée par une partie de la population avec les exilé⋅e⋅s l’encouragent au contraire à l’égard des déplacé⋅e⋅s ukrainien⋅ne⋅s.

      L’Europe aurait-elle décidé d’en finir avec la guerre aux migrant⋅e⋅s qu’elle mène depuis plus de 30 ans ? Rien n’est moins sûr. Bien que ces initiatives récentes ne puissent être que saluées – la population ukrainienne en fuite doit absolument être accueillie – elles sont révélatrices de l’hypocrisie de la politique européenne et des politiques nationales qui pratiquent une hospitalité à deux vitesses en continuant à opérer un tri entre les « bons » réfugié⋅e⋅s et les « mauvais » migrant⋅e⋅s afin de tenir à l’écart et nier les droits des populations du Sud global.

      En effet, alors que le gouvernement polonais soutient que « les réfugiés fuyant l’Ukraine en guerre entrent en Pologne quelle que soit leur nationalité » [3], nombreux sont les témoignages des personnes originaires d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient résidant en Ukraine qui font état des pratiques discriminatoires et racistes qu’elles ont eu à subir de la part des garde-frontières ukrainiens et polonais. Des centaines d’entre elles ont été bloquées dans les gares ferroviaires ou aux frontières, y compris des femmes avec leurs bébés, lors du passage à la frontière. Des vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux montrant des personnes attendant, dans un froid intense, d’être autorisées à quitter le territoire ukrainien, tandis que d’autres ont dû rebrousser chemin ou s’organiser pour franchir collectivement les barrages [4].

      Au mépris de ces témoignages concordants, le porte-parole des garde-frontières ukrainiens a déclaré : « Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, ces personnes ont peut-être été refoulées parce qu’elles essayaient de griller la priorité dans la file d’attente » [5]. Le ministre de l’Intérieur français est allé jusqu’à affirmer que « les Polonais eux-mêmes ont dit que tout le monde était accueilli en Pologne et dans le reste de l’Union européenne », rapportant que « l’ambassadeur de la Pologne a[vait] évoqué le fait que c’était notamment une utilisation russe pour déprécier le travail » fait par les autorités de ce pays [6].

      Tant les pratiques de tri aux frontières de l’UE que le mécanisme de protection temporaire mis en place à l’heure de l’exode de la population vivant en Ukraine sont discriminatoires, puisqu’ils engendrent un choix à opérer parmi les personnes à protéger [7]. Ces pratiques visant à limiter l’arrivée des citoyen⋅ne⋅s du Sud global s’inscrivent dans la continuité de la politique raciste de l’UE et de ses États membres au cours des dernières décennies.

      En effet, il y a à peine quelques mois les autorités polonaises érigeaient ainsi des barbelés et des murs à la frontière biélorusse comme seule réponse à l’arrivée des femmes, des hommes et des enfants en provenance des pays tels le Yémen, l’Afghanistan, la Syrie, l’Irak, ou la République démocratique du Congo (RDC) parmi d’autres, au prétexte qu’il s’agissait de « migrant·e·s » instrumentalisé⋅e⋅s par le chef d’État biélorusse.

      Un peu plus tôt, après la prise de pouvoir par les Talibans à Kaboul, les pays européens aujourd’hui « accueillants » s’organisaient pour fermer leurs frontières aux milliers de personnes cherchant à fuir l’Afghanistan, alléguant comme l’a fait la France, que « l’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle [et que] « nous devons anticiper et nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants » [8].

      Ce que cachent mal les discours et pratiques à géométrie variable que nous observons aujourd’hui porte un nom : le racisme, c’est-à-dire la croyance en une hiérarchie des êtres humains et la production d’un rapport de domination pour tenter de rendre opérante cette hiérarchisation. L’idéologie raciste se masque le plus souvent derrière des atours présentables, dans des arguties telles que : « La place de ces gens-là est chez eux, à aider leur pays à sortir de la misère », « ils doivent être accueillis dans les pays limitrophes au Sud, dont la culture dominante est proche de la leur… », ou encore « dans la migration, ils se mettent en danger et se font la proie des passeurs ». Mais elle apparaît pour ce qu’elle est en période de crise, quand refont surface les discours alarmistes qui, chez les responsables politiques et dans certains médias, attisent la peur de l’invasion.

      Pour commenter la décision de l’UE de déclencher le mécanisme de protection temporaire, la Commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, parle d’un « changement de paradigme », et on entend volontiers dire dans les médias que les Européens auraient retrouvé « le sens de l’accueil » [9]. C’est oublier que, comme on le voit aujourd’hui, la légitimité des souffrances se mesure à l’aune des origines et de la couleur de la peau.

      Des exilé⋅e⋅s se mobilisent depuis des mois pour défendre leur droit à la protection et à quitter un pays où leur vie est en danger et n’ont toujours pas vu cet accueil se matérialiser. A l’image de celles et ceux sur la route des Balkans [10], ou bloqué⋅e⋅s dans le sud de la Tunisie [11], ou encore en Libye qui ne sont pas dupes : « Ils affirment que les Ukrainiens sont différents, qu’ils sont des programmeurs informatiques et qu’ils ont une histoire bien connue, contrairement aux Africains dont le passé est marqué par la pauvreté. Les Ukrainiens sont désormais accueillis dans des pays qui ont fermé leurs portes aux réfugiés du Moyen-Orient et d’Afrique » [12]. Si nous exprimons toute notre solidarité avec les exilé⋅e⋅s ukrainien⋅e⋅s, nous joignons nos voix à celles de toutes les personnes qui sont bloquées et maintenues sciemment à distance des frontières européennes.

      Aujourd’hui l’UE fait pour les exilé⋅e⋅s Ukrainien⋅ne⋅s ce qu’elle a longtemps prétendu impossible : permettre la mobilité des personnes en quête de refuge et la reconnaissance de leurs droits plutôt que de chercher à les bloquer à tout prix. Cette brèche ouverte avec la mobilisation exceptionnelle dont font preuve aujourd’hui les Etats membres démontre que, contrairement à ce qu’elle a toujours dit, l’UE a la capacité d’accueillir un très grand nombre d’exilé⋅e⋅s. Le réseau Migreurop réclame que cet élan de solidarité et d’accueil soit étendu à toutes les personnes quelles que soient l’origine, la nationalité, la couleur de la peau, la classe, etc.

      Seule la liberté de circuler de toutes et tous pourrait enfin mettre un terme à l’apartheid global imposé à travers les frontières.

      http://migreurop.org/article3095.html?lang_article=fr

    • Témoignage : fuir Kiev sans la #nationalité ukrainienne

      Le politologue palestinien Yousef Munayyer s’étonnait il y a peu, dans les pages de The Nation, des « doubles standards » qui saturent le discours occidental « mainstream » depuis l’invasion de l’Ukraine. Ce qui jusqu’à la veille était impensable — ou, pire, tenu pour condamnable — se voit célébré par l’intégralité du personnel médiatique, politique et culturel. C’est que certains humains sont perçus et pensés « comme moins humains que d’autres ». Les vingt-sept États membres de l’Union européenne ont rapidement activé une procédure de régularisation visant à protéger les personnes fuyant la guerre : créée en 2001, cette protection temporaire n’avait jamais été mise en application. Mais une partie de la population résidant en Ukraine en est actuellement exclue : en clair, ceux et celles qui n’ont pas la nationalité ukrainienne. Rien, pourtant, ne saurait justifier la distinction de civils échappant ensemble au même conflit armé : ni les papiers, ni — lorsque la chose est formulée sans détour — la couleur de peau ou la confession. Nous avons recueilli le témoignage d’Alaya, jeune femme originaire d’Afrique subsaharienne qui vient de fuir Kiev.

      Le jour se lève sur Kiev en ce matin du 28 février 2022, lorsque John1 apprend que sa jeune sœur Alaya et trois de ses amis essaient de fuir la ville. À lui qui vit en France, elle affirmait encore la veille au téléphone que tout allait bien, que les craintes qu’il avait étaient sans doute dues à ce qu’il avait vu à la télévision, qui grossit les choses au point d’effrayer tout le monde.

      24 heures plus tard, il apprend qu’elle a pris la route.

      Douze ans auparavant — c’était en 2010 —, il avait perdu toute trace d’elle, comme du reste de sa famille, lorsque leur village avait été attaqué. Tous deux, alors enfants d’une dizaine d’années, avaient dû se débrouiller pour survivre. Mais voici, en ce mois de février 2022, qu’il retrouve sa trace grâce aux réseaux sociaux. À Kiev. Quelques semaines avant le début de la guerre.

      Sa peur à lui — peut-être à elle aussi : que va-t-il leur arriver sur le chemin ? Parviendra-t-elle à quitter la ville, le pays, saine et sauve ? Mais qui sait ce qui vous traverse l’esprit quand il faut fuir, avec cette montée d’adrénaline qui rend opérationnelle, qui sait quel sac prendre, quoi mettre dedans, comment s’habiller ? Ça fait bientôt dix ans que Alaya vit en Ukraine. Elle attendait le renouvellement de son visa étudiant, qu’elle obtenait sans faute depuis toutes ces années car il lui était impossible de retourner dans son pays d’origine. Elle vit à Kiev, la guerre éclate, elle est sans titre de séjour et elle est noire ; les choses pourraient être plus simples.

      Son frère apprend vite qu’elle n’est pas partie seule — soulagement. Mais les échanges écrits sont très succincts : ils ne communiquent que peu d’éléments. Entre la couverture réseau qu’elle dit aléatoire, la batterie du téléphone qu’il faut préserver le plus longtemps possible, l’état d’esprit dans lequel il imagine qu’elle se trouve, il sait qu’il doit se contenter de quelques mots. Il n’obtient qu’au compte-goutte, comme un puzzle infernal dont les toutes petites pièces filent entre les doigts, quelques informations. Celles qui circulent sur les réseaux sociaux sont pour le moins inquiétantes ; le traitement réservé aux personnes noires qui tentent de fuir l’Ukraine fait le tour de la toile. Presque au même moment, les étudiants marocains présents en Ukraine signalent avoir subi ce type de violence raciste : ils dénoncent un traitement qui les relègue au second plan, loin derrière les ressortissants ukrainiens qui cherchent à fuir la guerre.

      La mise en place d’un énorme réseau solidaire est aussitôt annoncée un peu partout en Europe. En Belgique, le secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, Sammy Mahdi, annonce que les réfugiés ukrainiens bénéficieront automatiquement d’un titre de séjour de six mois, renouvelable une fois et pour une durée allant jusqu’à deux ans, avec autorisation de travailler. Ils ne se verront pas basculés dans le dispositif de gestion de l’asile général, « car trop saturé ». Le chef du gouvernement régional flamand, Jan Jambon, leader du parti d’extrême droite N‑VA (bien connu pour ses positions sur la question migratoire), affirme qu’il faut les accueillir et qu’une aide financière sera versée aux localités pour chaque Ukrainien secouru. Suivant l’exemple de l’entreprise ferroviaire publique allemande Deutsche Bahn, les réseaux de transport européens se mobilisent à leur tour pour faciliter les déplacements des réfugiés ukrainiens — mais seulement « sur présentation d’un passeport ou d’une carte d’identité ukrainienne ». C’est en effet ce qu’affichent sur leur site certaines compagnies2. Secourir les réfugiés d’Ukraine, oui, mais pas n’importe lesquels. L’évidence qu’en Ukraine ne vivent pas seulement des Ukrainiens semble devoir être rappelée aux gouvernements — à moins, plus sûrement, qu’ils feignent de l’ignorer. Pas le temps de se demander ce que ça représente pour toutes les autres personnes contraintes à l’exil, continuellement traquées et rejetées, ni ce que peuvent ressentir toutes les populations aux territoires bombardés, colonisés, à l’instar des Palestiniens. Alaya doit réussir à quitter le pays saine et sauve.

      Le soir du 28 février, il est environ 20 heures lorsqu’ils sont arrêtés à l’un des multiples checkpoints installés dans la capitale et ses alentours. On leur interdit de poursuivre leur chemin, puis on les somme de faire demi-tour. « On ne comprenait pas pourquoi, on ne savait pas où aller. Rentrer à la maison n’était pas envisageable. D’ailleurs, aucun lieu n’était sûr. On a cherché un hôtel, mais tout était plein partout, avec de longues files d’attente. » Ils décident de dormir dans leur voiture, stationnée dans une rue résidentielle. Une Ukrainienne d’un certain âge, habitant la maison devant laquelle ils sont garés, vient toquer à leur fenêtre. Elle les invite chez elle, leur offre à manger, des lits où passer la nuit. Ils lui en sont profondément reconnaissants. Ils reprennent la route le lendemain à l’aube. Peu de temps après, ils ont un accident et la voiture est à l’arrêt. Deux policiers interviennent, leur viennent en aide. « On a eu de la chance, ils nous ont emmenés dans un abri et nous ont aidés à prendre un bus. » Pourtant, rien n’était moins sûr : Alaya est bien placée pour le savoir. Quand son frère les alertait sur les risques d’agressions racistes sur le chemin, aucun d’eux ne se montrait surpris. « C’est tous les jours qu’on vit avec ça. » Les regards insistants sur sa peau dans la rue, les remarques désobligeantes, c’est son lot quotidien. Elle raconte que pendant ses études en pharmacie, les étudiants ukrainiens et étrangers étaient toujours placés dans des salles séparées. « On suivait le même enseignement, dans la même université, mais on nous mettait toujours dans des salles à part, jamais avec les autres étudiants ukrainiens. »

      Les quatre amis montent dans un bus à destination de Lviv pour se rapprocher des frontières polonaises, slovaques et hongroises, à l’ouest du pays. Des queues interminables sont signalées à la frontière de tous les pays limitrophes : impossible alors pour John de savoir quelle route ils vont pouvoir emprunter. Il contacte différentes personnes en lien avec des groupes de citoyens qui s’organisent dans certains de ces pays pour venir en aide aux réfugiés ukrainiens. Il apprend ainsi que dans une ville frontalière de Pologne, les citoyens se sont mobilisés pour aider les gens à monter dans des bus vers des destinations sûres, qu’il y a beaucoup de monde pour donner un coup de main. Mais ce contact prévient : « Ils disent qu’ils vérifient bien les identités de chacun, parce que, ils ajoutent, "Il ne faudrait pas laisser passer des Russes". » On ne saura pas si cette remarque est représentative de ce qu’il se passe réellement, mais sa simple évocation est glaçante. Passer les garde-frontières, ukrainiens d’abord, puis polonais, espérer ne pas être retenu et être traité dignement, tout ça ne suffira donc pas : il faudra aussi subir les filtrages opérés par les populations. Quel danger représente un ressortissant russe cherchant lui aussi à fuir ?

      De Lviv, ils prennent un train.

      « On était assez choqués car malgré tout ce qui se passait, la guerre, il fallait acheter les billets sinon on ne pouvait pas monter à bord. » Ils parviennent à gagner la frontière avec la Hongrie. « Il y avait une queue interminable. Ça n’avançait pas du tout. Au bout de plusieurs heures on est parvenus à se faufiler vers l’avant, au moins pour comprendre ce qu’il se passait. » Ils voient alors une jeune femme d’origine indienne, en larmes. Elle crie qu’elle attend depuis deux jours, que les garde-frontières ukrainiens ne la laissent pas passer. Elle n’est pas seule : tout un groupe de personnes non-blanches est derrière elle. Alaya raconte : « Ils faisaient passer les personnes blanches et bloquaient toutes les personnes de couleur. Ils ont clairement dit qu’il y avait des gens plus importants que nous. Mais on s’est défendus, on a tous crié. Ils ont fini par nous laisser passer. » Le tampon de sortie d’Ukraine figure dorénavant sur leurs passeports : il date du 2 mars 2022.

      Ayant trouvé refuge dans une petite ville de l’autre côté de la frontière, le groupe d’amis s’accorde un jour entier pour réfléchir. Que faire ? Accroché à son téléphone, plusieurs centaines de kilomètres plus loin, John s’inquiète et trouve qu’ils s’attardent trop. Il comprendra plus tard leur dilemme. Si deux personnes du groupe possédaient encore un titre de séjour en cours de validité en Ukraine, les deux autres n’en avaient pas. C’est ensemble qu’ils se sentent plus forts, et surtout mieux protégés — la situation administrative des uns pouvant aider les autres. Ils ne savent pas où se mettre à l’abri, si ce n’est l’offre que John leur a fait d’aller se réfugier chez lui. Mais le plus jeune de la bande, tout juste âgé de 16 ans, a de la famille en Italie. Il voudrait retrouver ses proches. Impensable pour le groupe de le laisser voyager seul en ces circonstances. Si bien qu’ils en viennent à imaginer l’accompagner tous ensemble, avant de se mettre ensuite à l’abri chez John, en France, le temps de comprendre ce qui leur arrive et de réfléchir aux choix possibles pour chacun d’entre eux. Attendre que le conflit se calme et rentrer en Ukraine ? Cette option ne semble même pas avoir été envisagée. Quant à la protection temporaire activée le 4 mars 2022 par le Conseil de l’Union européenne — qui offre une protection immédiate et collective, avec une série d’avantages dont beaucoup de personnes exilées rêveraient3 — il est fort à parier qu’elle servira essentiellement aux ressortissants ukrainiens4. Demander l’asile dans un pays de l’Union européenne ? Quelles chances réelles d’obtenir le statut de réfugié ? Ça dépendra de l’histoire de chacun, pour qui tentera cette procédure.

      Après des heures qui lui paraissent interminables, John a enfin des nouvelles : ils ont décidé de continuer encore un peu le chemin tous ensemble, au moins jusqu’au pays suivant. Ils décideront à la prochaine étape s’il est nécessaire de se séparer en deux groupes, avec chacun un porteur de titre de séjour valable, pour protéger celui qui n’en a pas. Un groupe vers la France, l’autre vers l’Italie. Ensemble, ils parviennent à traverser la frontière vers l’Autriche sans encombre. Là, comme précédemment, ce sont les mêmes files d’attente interminables, le stress aigu, l’épuisement, l’impossibilité d’obtenir les fameux tickets de train « Helpukraine5 ». Mais il faut bien avancer ; et, tant bien que mal, ils y parviennent. Arrivés à Vienne, une personne leur vient en aide. Ils soufflent quelques heures, mangent, essaient de dormir un peu. La première bonne nouvelle tombe enfin : la tante du plus jeune s’est rendue jusqu’en Autriche pour venir le chercher. Il va pouvoir retrouver sa famille en Italie. Son combat administratif est loin d’être terminé, mais pour l’instant, le voilà à l’abri. Et, pour les autres, c’est une frontière de moins à franchir. Voilà qu’ils obtiennent enfin le fameux ticket de train « Helpukraine », qu’ils imaginent leur permettre de voyager et traverser les frontières plus facilement. Ils espèrent en tous les cas avancer plus sereinement dorénavant.

      Ils embarquent dans un train. Prochaine étape, l’Allemagne. À peine la frontière est-elle passée que la douane monte à bord. Toutes les personnes en possession de ce ticket doivent descendre du train, petit groupe par petit groupe. Vient leur tour. Alaya dit aux policiers qu’ils ne s’arrêtent pas en Allemagne, qu’ils vont rejoindre son frère en France. « Enregistrement obligatoire pour toutes les personnes qui viennent d’Ukraine. Prise d’empreintes aussi », lui rétorque-t-on. Il est minuit passé de quelques minutes. La foule de personnes, incluant des familles avec des enfants en bas âge, est transportée par bus jusqu’à une station de police. « On pensait que ça allait être rapide, ils nous disaient que c’était juste une formalité. Mais on arrive dans cet endroit, il y a plein de policiers, énormément de personnes qui attendent. Les gens semblent épuisés. On ne nous dit rien. On nous fait juste passer des grilles et on nous amène à l’arrière du bâtiment, dans la cour. L’espace est fermé par des barrières, on ne peut pas partir. » Ils attendront des heures que chacun soit entendu par la police, que leurs empreintes soient prises. Fuir une guerre en cours n’y change rien : c’est l’enregistrement bureaucratique qui prime, qui retient au milieu de la nuit des centaines de personnes dans le froid et les empêche de rejoindre les lieux d’abri qu’elles avaient pu choisir, pour certaines chez des proches.

      Il est 7 heures du matin quand Alaya et ses amis signalent à John qu’ils y sont toujours. « On est glacés. Ils s’en fichent, on a beau fuir une guerre, même dans ces circonstances, voilà comment on nous traite. » Une bonne partie des personnes ont déjà été libérées. Elle raconte que parmi celles qui sont encore retenues, un homme entre en crise. Ça fait dix heures qu’il est là. Il hurle qu’il veut être libéré. Le groupe d’amis essaie de garder son sang-froid, de ne pas faire de bruit, patiente et espère. Le risque est pourtant réel d’être embarqué vers un centre de rétention. Sur les photos qu’elle fait parvenir à son frère, il ne peut que remarquer qu’il ne reste que des personnes de couleur. Les familles « blanches » que l’on voyait présentes quelques heures plus tôt n’y sont plus. L’angoisse le gagne. Il retient sa respiration. Alaya lui racontera ensuite qu’ils avaient d’abord fait passer les femmes avec enfants.

      Il est près de 8 heures lorsqu’ils sont relâchés à leur tour, avec en main un papier d’enregistrement et une obligation de se présenter au service d’immigration le plus proche, sous quatre jours. Pour qui demandera l’asile, Dublin a frappé6 : ce n’est pas au pays de destination choisi mais au premier où les empreintes ont été enregistrées qu’incombe le traitement de la demande de protection. Mais, pour l’heure, ça importe peu aux membres du groupe : ils poursuivent leur chemin.

      Alaya et John se sont retrouvés.

      Après douze ans sans aucunes nouvelles l’un de l’autre, ne sachant même pas s’il restait un espoir de retrouver d’autres survivants de l’attaque de leur village, les voilà réunis. L’intensité de l’émotion qu’ils ressentent et qui se dégage d’eux est immense — mais une nouvelle lutte commence. Alaya vient de se présenter à la préfecture pour solliciter la protection temporaire activée pour les personnes fuyant l’Ukraine. Fin de non-recevoir. « Elle n’est pas ukrainienne, qu’elle aille demander l’asile », lui a‑t-on dit.

      https://www.revue-ballast.fr/temoignage-fuir-kiev-sans-la-nationalite-ukrainienne

    • La #solidarité à géométrie variable n’en est pas vraiment une

      Une solidarité réglée sur la ségrégation entre ‘#bons’ et ‘#mauvais’ réfugiés ne se discrédite-t-elle pas par elle-même ? Une scission discriminante de l’humanité en ceux dignes d’être sauvés et accueillis et ceux et celles exclus du domaine de l’hospitalité, ne témoigne-t-elle d’une contamination des sociétés européennes par des motifs racistes ?
      Depuis quelques semaines, nous découvrons que l’accueil tant redouté des réfugiés est bien possible en Europe. Accueillir, accueillir dans de conditions qui respectent la dignité des personnes, accueillir en ouvrant grand les portes à ceux et celles qui viennent serait alors faisable, même si les arrivants dépassent les quatre millions. Jusqu’à il y a un mois, une telle perspective était perçue comme annonciatrice de catastrophe majeure voire comme une menace existentielle pour l’Europe : on nous assenait de tous les côtés qu’un accueil digne de ce nom constituerait un appel d’air exposant nos sociétés européennes à un risque d’implosion. Tout geste d’accueil était suspect et pourrait être puni comme un délit voire un crime. Les solidaires étaient stigmatisés comme les idiots utiles au service de trafiquants, les sauveteurs comme faisant partie de bandes de passeurs, voire comme des espions coupables d’intelligence avec l’ennemi.

      Avec la guerre en Ukraine, changement complet de cap, les réfugiés- à vrai dire certains d’entre eux- sont reconnus comme tels, leurs droits sont respectés, leurs souffrances et leurs traumatismes pris en compte. Même en Grèce, le retournement complet de pratiques et de discours fut impressionnant. En deux semaines, ce pays dont le gouvernement déclarait qu’il ne pouvait plus recevoir un seul réfugié de plus, a su accueillir 15.000 Ukrainiens en leur accordant des documents temporaires, ainsi qu’un numéro de Sécurité Sociale, un numéro fiscal et le droit de travailler.

      Or nous savons que cette réception digne ne concerne point tous les réfugiés, mais quelques-uns, choisis en fonction des affinités ethniques et religieuses, peu importe si celles-ci sont réelles ou imaginaires. Elle ne concerne même pas tous les réfugiés fuyant la guerre en Ukraine mais uniquement les ressortissants ukrainiens. En fait, non seulement la protection temporaire accordée par les pays européens aux Ukrainiens est refusée à la grande majorité d’étrangers résidant en Ukraine, mais plusieurs d’entre eux sont placés en détention pour entrée irrégulière au territoire polonais. Ce n’est qu’en fonction de leurs nationalités et de leur couleur de peau que les réfugiés d’Ukraine seront accueillis ou rejetés. Quant aux Kurdes, Irakiens, Syriens et Afghans qui se présentent non pas à la frontière polonaise avec l’Ukraine, mais à celle avec la Biélorussie, ils sont traqué et violemment refoulés, après avoir été tabassés et dépouillés de leurs biens ; certains d’entre eux peuvent même être laissés pieds nus par températures négatives à errer sur un sol glacial – au moins 20 personnes sont morts ainsi d’hypothermie à la frontière avec la Biélorussie. Quant à ceux et celles qui oseraient offrir l’hospitalité à ces hommes, femmes et enfants affamés et frigorifiés, ils risquent huit ans d’ans de prison ferme. Les mêmes scènes d’une guerre qui ne dit pas son nom, celle contre les migrants, se passent à la frontière gréco-turque d’Evros où il y a une quinzaine de jours un petit garçon syrien de 4 ans est mort noyé sous les yeux impassibles d’un commando grec, victime d’un refoulement trop violent. L’incident, loin d’être un cas isolé, fait partie d’une nouvelle stratégie adoptée pars les garde-frontières de la région d’Evros qui consiste à refouler ceux qui arrivent en les abandonnant sur des îlots du fleuve Evros sans vivres ni eaux avec l’injonction de retourner en Turquie. En janvier dernier, cette tactique avait déjà coûté la vie à un syrien souffrant d’une grave insuffisance rénale.

      C’est cette face hideuse du visage de l’Europe que celle-ci tourne vers tout un chacun dont l’image s’écarte de la figure-type du ‘bon’ réfugié –chrétien, blanc aux yeux bleus. D’un côté, on accueille à bras ouvert les « nôtres », ceux qui ne menaceraient pas le vénéré mode de vie européen, et de l’autre on violente, on torture, on refoule avec des véritables opérations militaires qui exposent délibérément ceux qui se présentent à nos portes à des risques mortels.

      Cependant il ne suffit pas de dénoncer cette solidarité à géométrie variable, il faudrait essayer d’aller au-delà du registre d’une condamnation morale. En effet, si la solidarité dépend de la tête du client, est-ce vraiment de la solidarité ? Ou bien plutôt une défense atavique de nôtres contre les autres, une réaction identitaire qui présuppose une bipartition de l’humanité entre ceux à notre image, et les autres, ces aliens qui, à nos yeux étriqués, portent les stigmates d’une altérité qui les exclurait du domaine d’exercice de l’hospitalité ? Ainsi, ce qui est présenté comme un retour du sens de l’accueil en Europe, pourrait s’avérer le symptôme d’un racisme meurtrier qui ne dit pas son nom.

      Cette année, nous avons ‘célébré’ les cinq ans d’accords de coopération entre UE et la Libye : selon Amnesty International , plus de 82 000 réfugié·e·s et migrant·e·s ont été renvoyés à l’enfer libyen depuis que les accords ont été conclus. La plupart « se sont retrouvés dans des centres de détention sordides, où sévit la torture, tandis que beaucoup d’autres ont été victimes de disparitions forcées ». Cette politique européenne qui ne se contente pas de refouler en renvoyant aux centres de tortures et aux marchés aux esclaves libyens mais criminalise systématiquement le secours en mer, a bien porté ses fruits : elle a transformé la mer Méditerranée en une fosse commune qui a englouti pas moins de 23.500 personnes morts ou disparus de 2014 jusqu’à aujourd’hui. En Grèce, un écart significatif entre le chiffre officiel des personnes secourues en mer et celui de nouveaux arrivants enregistrés dans les îles révèle au moins 25.000 cas de refoulement en mer Egée pendant la seule année 2021. Ces refoulements sont non seulement systématiques mais de plus en plus violents ; les commandos qui s’en chargent, recourent à des méthodes d’une brutalité paroxystique qui mettent délibérément en danger la vie ceux qui en sont les victimes. Cette escalade des violences contre les arrivants comporte des actes criminels comme ceux des garde-côtes qui en septembre dernier n’ont pas hésité à jeter en pleine mer trois hommes qui ne savaient pas nager et dont deux sont morts noyés, ou ceux de garde-frontières d’Evros qui avaient dépouillés des exilés de leur vêtement en les laissant pieds nus par températures négatives –19 personnes en sont morts ainsi début février. Ces crimes ne constituent point des bavures ou des dérapages isolés, mais font partie intégrante d’une politique concertée de dissuasion réglée sur le principe « rendons les la vie infernale ». En les exposant délibérément à des dangers mortels, les garde-frontières qui assurent la protection de l’Europe, s’attendent à ce que les candidats à l’exil finirons par comprendre non seulement qu’ils sont indésirables sur le sol européen mais que leurs propre vies n’y comptent pour rien.

      La situation dramatique des réfugiés ukrainiens pourrait-elle sensibiliser les sociétés européennes au drame de tous les réfugiés indépendamment de leur origine ? Si nous tenons compte ce qui continue à se passer à nos frontières loin de projecteurs médiatiques, nous aurons du mal à y croire. Force est de constater que l’accueil des Ukrainiens va de pair avec notre indifférence, en tout cas avec notre inaction blasée, face à ces crimes commis contre les ‘mauvais’ réfugiés aux confins de l’Europe et/ ou à ses frontières externalisés.

      La question est ‘sommes-nous disposés de vivre au sein d’une société régie par la croyance « en une hiérarchie des êtres humains et par la production d’un rapport de domination pour tenter de rendre opérante cette hiérarchisation » (communiqué de Migreurop du 22 mars 2022) ? Car, la solidarité à deux vitesses revient à une bipartition de l’humanité entre ceux dont la vie serait digne d’être sauvés, et les autres, ceux dont les vies en seraient indignes. Ce qui fait inévitablement penser à la doctrine abjecte de Lebensunwertes Leben, de vies indignes d’être vécues, notion clé de la politique eugéniste et raciale nazie. Certes nous n’en sommes là, mais en sommes-nous vraiment loin ? D’un côté, vous avez des vies dignes d’être sauvées, secourues, accueillies, et de l’autre, les vies de ceux qui, n’appartenant pas à la ‘grande famille européenne’, seraient non seulement indignes d’être sauvés mais qui pourraient dans l’indifférence générale être conduits à la noyade ou à la mort par hypothermie. La pente est plus que glissante.

      Que cela soit clair : tous ceux et celles qui fuient la guerre en Ukraine doivent être accueillis dans les meilleures conditions possibles non seulement à court mais aussi à moyen voire long terme. Ce qui reste insoutenable, est cette politique de deux poids et deux mesures, qui présuppose une bipartition pernicieuse de l’humanité. Qu’une partie d’êtres humains soit traitée comme si elle n’appartenait plus à l’humanité, comme si elle pourrait en être retranchée et exclue, cela ne saurait ne pas affecter nous autres européens des stigmates d’inhumanité.

      La guerre en Ukraine serait-elle d’autant plus la ‘nôtre’ qu’elle est une guerre européenne ? Tout compréhensible que puisse être ce point de vue, on pourrait y objecter que la guerre en Syrie ne nous concernait pas moins, et que la résistance de Kurdes à l’avancée fulgurante de Daech n’a pas été moins décisive pour l’avenir de l’Europe que l’issue de la guerre actuelle en Ukraine. Si, comme le dit Michel Agier, penser l’Europe devrait être une méthode pour penser notre commune humanité, nous ne saurions nous affirmer en tant qu’européens qu’en pensant et agissant en tant que citoyens du monde. Contre les politiques du tri sélectif, de l’exclusion et de criminalisations des arrivants, il nous faudra construire un monde Un, un monde commun où il y aura une place pour toutes et tous.

      Paris, 31 mars 2022

      https://blogs.mediapart.fr/vicky-skoumbi/blog/010422/la-solidarite-geometrie-variable-n-en-est-pas-vraiment-une

    • Entre les réfugiés d’Ukraine et ceux d’ailleurs : une « #différence_de_traitement insupportable »

      Les annonces gouvernementales se succèdent pour organiser l’arrivée des personnes fuyant l’Ukraine. Après des années de refus politique d’accueillir les exilés d’Afrique ou du Moyen-Orient, les associations dénoncent une discrimination.

      « Elle arrive… » Un chuchotement circule dans l’assistance. Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la Citoyenneté auprès du ministre de l’Intérieur, s’avance pour saluer une rangée de responsables d’associations. Nous sommes le 23 mars. Tous s’activent ici, dans ce hall du parc des expositions Porte de Versailles à Paris, pour accueillir les personnes réfugiées d’Ukraine. « Vous avez toujours en majorité des femmes et des enfants ? » s’enquiert la ministre. Depuis l’ouverture du centre, mi-mars, 1900 Ukrainiens, principalement des femmes et des enfants (les hommes ukrainiens de moins de 60 ans ne sont pas autorisés à quitter le pays) ont été hébergés sur place pour une ou deux nuits. Ils y ont trouvé un dispositif inédit, rassemblant en un même lieu préfecture, Office français de l’immigration et de l’intégration, assurance-maladie… Du jamais-vu en France.

      Une dizaine de box ouverts sur une salle bruyante s’alignent. Des familles ukrainiennes y exposent, dans une intimité toute relative, leur situation aux agents de l’État. Première étape à l’entrée : le contrôle des documents d’identité par la préfecture de Paris. Si tout est en règle, c’est-à-dire si les personnes sont en capacité de prouver qu’elles fuient l’Ukraine, elles se voient délivrer dans la foulée une autorisation provisoire de séjour. Celle-ci est d’une durée de six mois, renouvelable trois ans.

      Du jamais-vu en France
      Depuis l’ouverture du centre de Porte de Versailles (Paris), mi-mars, 1900 Ukrainiens, principalement des femmes et des enfants, ont trouvé un dispositif inédit, rassemblant en un même lieu préfecture, Office français de l’immigration et de l’intégration, assurance-maladie… Du jamais-vu en France.

      « Nous délivrons près de 300 autorisations provisoires de séjour par jour », explique un représentant de la préfecture. Ces autorisation sont l’application concrète, en France, de la directive européenne sur la protection temporaire créée en 2001 et activée le 3 mars 2022 pour la première fois. Elles donnent, entre autres, le droit de travailler et d’obtenir une couverture maladie immédiatement, là où les demandeurs d’asile sont depuis 2019 soumis à une attente de trois mois pour bénéficier de la Sécurité sociale.
      « Cette protection, tous les demandeurs d’asile devraient y avoir droit »

      « Il y a un deux poids deux mesures. N’ayons pas peur des mots : c’est du racisme. »

      Aucun autre exilé sur le territoire français n’a droit au dispositif de protection temporaire. Pas même les Afghans ayant fui la prise de Kaboul par les talibans, l’été dernier. « L’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle. Nous devons anticiper et nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants », déclarait en août 2021 à leur propos Emmanuel Macron. Six ans plus tôt, au regard de la crise syrienne, une cinquantaine d’organisations demandaient déjà au président Hollande et à l’Europe d’œuvrer en faveur de la protection temporaire. En vain.

      « Cette protection, tous les demandeurs d’asile devraient y avoir droit. Il y a un deux poids deux mesures. N’ayons pas peur des mots : c’est du racisme. La différence de traitement est insupportable », dénonce Yann Manzi, cofondateur de l’association Utopia56. Il y voit une incarnation du double discours « humanité et fermeté », martelé par le gouvernement Macron depuis son arrivée au pouvoir. « Pour toutes les populations maghrébines, ou d’Afrique subsaharienne, on a la fermeté ; tandis que pour les Ukrainiens, on a l’humanité ».

      4 millions de réfugiés
      Les associations craignent de trouver bientôt des familles ukrainiennes sans solution, comme les autres. Actuellement, 26 000 réfugiés ukrainiens sont arrivés en France. Une partie est en transit, mais il est difficile de prévoir le nombre d’arrivées futures : plus de 4 millions de personnes ont quitté l’Ukraine, au 30 mars.

      L’exemple des transports est parlant. L’État a noué un partenariat inédit avec la SNCF pour permettre aux familles ukrainiennes de se déplacer gratuitement vers les régions où on leur propose un hébergement, ou vers les pays qu’elles souhaitent rejoindre. Au sein du hall Porte de Versailles, « on travaille sur une solution de guichet SNCF », explique Nordine Djebarat, directeur régional Île-de-France à Coallia, une association spécialisée dans l’hébergement et l’accompagnement social.
      100 000 places d’hébergement… et des gens toujours à la rue

      « Les pouvoirs publics sont capables de se mobiliser pour accueillir un grand nombre de réfugiés ukrainiens. On voit que quand la volonté politique est là, on y arrive »

      Pour les autres nationalités, les gares et les trains restent ce qu’ils ont toujours été. À savoir, des lieux de traque et de contrôle. En plein cœur de la vallée de la Roya, un escadron de gendarmerie mobile contrôle en permanence la zone autour de la commune de Sospel et sa gare TER. « Ici, le train ne s’arrête que quelques minutes, mais cela suffit aux militaires pour contrôler l’ensemble des voitures, où il n’est pas rare de se retrouver en présence d’individus entrés irrégulièrement en France », écrit par exemple le média de la gendarmerie nationale Gend.Info. Dans un communiqué du 14 mars, la CGT Cheminots explique que la direction de la SNCF leur « demande de vérifier la provenance des réfugiés dans le train (...) et “d’agir avec bienveillance” s’ils sont Ukrainiens ». De quoi soulever « un malaise profond chez une partie des cheminots, conscients d’une différence de traitement entre les réfugiés ».

      Depuis 2015, l’accès au logement pour les personnes exilées est l’une des principales batailles que mènent les associations. Il y a eu les occupations place de la République ou devant la mairie de Paris, les réquisitions de bâtiment vacants, les demandes répétées de prise en charge systématique des personnes à la rue après les évacuations de campements... Le numéro d’urgence 115 saturé, les structures d’hébergement pleines : les associations se sont habituées à recevoir ces réponses de la part des services de l’État.

      Des dizaines de réfugiés Afghans dorment dans le campement du Cheval noir, à Pantin (Seine-Saint-Denis). Avec la fin de la trêve hivernale, « il y a plein de territoires où des remises à la rue se préparent », craint Yann Manzi d’Utopia56. Avec la possibilité de la reformation de campements de milliers de personnes en périphérie de Paris.

      Alors, le 23 mars, quand le Premier ministre Jean Castex annonce l’ouverture prochaine de 100 000 places d’hébergement pour les personnes fuyant la guerre en Ukraine [1], les associations qui viennent en aide aux exilés à la rue ont évidemment salué le geste… tout en soulevant quelques contradictions. « Nous avons distribué plus de 800 repas hier soir dans les rues de Paris, les conditions de vie des personnes exilées sont très dures, témoigne Philippe Caro de l’association Solidarité Migrants Wilson. On s’aperçoit que les pouvoirs publics sont capables de se mobiliser pour accueillir un grand nombre de réfugiés ukrainiens, alors que depuis des années ils nous disent que ce n’est pas possible pour les autres. On voit que quand la volonté politique est là, on y arrive », s’agace-t-il.
      Parfois dès 9 h du matin, ils disent aux familles “revenez demain”

      À Calais, l’auberge de jeunesse, comptant 130 places, a été mobilisée pour héberger des Ukrainiens. Les exilés d’autres nationalités continuent de survivre dans des campements informels ("jungles”), au rythme des expulsions tous les deux jours par les forces de l’ordre. « Ils nous disent : “C’est terrible ce qu’il se passe en Ukraine”. Puis, quand on leur explique cet accueil, ils s’étonnent : “ah oui ? Pourquoi ils ne sont pas dans la jungle comme nous ?” », rapporte Marguerite Combes, coordinatrice d’Utopia56 sur place. « On est contents pour les Ukrainiens, mais si on peut le faire pour eux, pourquoi pas pour tout le monde ? C’est assez rageant, cela fait 30 ans que c’est l’impasse… », soupire Alexandra Limousin, responsable de l’Auberge des migrants, association historique du Calaisis.

      Malgré cette mobilisation inédite de l’État, des défaillances commencent à être mises en lumière. Dans un échange de courriers, des bénévoles traducteurs alertent la Croix rouge sur un manque d’assistance médicale, de nourriture et d’eau lors du premier accueil, gare de l’Est à Paris. La rapidité de l’ouverture des droits est aussi « très variable » en fonction des endroits, explique Gérard Sadik, responsable asile de la Cimade. Même au hub Porte de Versailles, « c’est premier arrivé, premier servi. Parfois dès 9 h du matin, ils disent aux familles “revenez demain” », précise-t-il.

      Enfin, les associations craignent de trouver bientôt des familles ukrainiennes sans solution, comme les autres. Actuellement, 26 000 réfugiés ukrainiens sont arrivés en France. Une partie est en transit, mais il est difficile de prévoir le nombre d’arrivées dans les prochaines semaines (plus de 4 millions de personnes ont quitté l’Ukraine, au 30 mars). Dans un gymnase réquisitionné à Rennes, « la semaine dernière, six personnes d’Ukraine sont arrivées, et c’est nous qui leur avons payé l’hôtel, car le gymnase était plein… », raconte Yann Manzi.
      Des hébergement évacués, des gens mis à la rue

      « On insiste beaucoup sur la générosité des gens, mais soyons extrêmement vigilant sur l’hébergement citoyen, qui doit inclure de l’accompagnement social dans la durée »

      Dans la dernière instruction envoyée aux préfets sur le schéma d’hébergement et de logement des réfugiés d’Ukraine, que Basta ! s’est procurée, les ministères insistent sur le fait de ne pas mettre en concurrence les publics. « Il est essentiel de ne pas dégrader ou saturer les dispositifs de droit commun », y écrivent-ils. Mais sur le terrain, des formes de priorisation s’opèrent. À Rennes, 144 personnes, dont une quarantaine d’enfants, occupaient depuis mi-janvier un gymnase réquisitionné par les associations qui les suivent depuis un an. Le 30 mars, les forces de l’ordre ont évacué les lieux. « Il reste une famille de dix personnes sans solution, ainsi qu’une petite vingtaine d’hommes seuls », indique Ludovine Colas, coordinatrice d’Utopia 56 à Rennes.

      Des guichets uniques au centre d’accueil de Porte de Versailles permettent aux familles réfugiées ukrainiennes d’accomplir toutes leurs démarches. « Cette protection, tous les demandeurs d’asile devraient y avoir droit », dénonce Yann Manzi, cofondateur de l’association Utopia56.

      Dans le même temps, « on sait qu’il y a des dispositifs qui ont été ouverts à Rennes pour les Ukrainiens, des places libres », souligne Yann Manzi. Ces derniers peuvent accéder à un hébergement juste après s’être présentés en préfecture. Pour les autres exilés, « il faut passer par le guichet unique de Coallia pour avoir ensuite un rendez-vous en préfecture, puis la préfecture renvoie vers Coallia, qui orientera vers un hébergement », décrit Ludivine Colas. De quoi allonger les délais sur plusieurs mois… « La majorité des occupants du gymnase étaient ainsi des primo-arrivants, pris dans ces fameux délais de rendez-vous », explique-t-elle.

      La clôture de la trêve hivernale, fin mars, risque de multiplier ces situations selon les associations. « Il y a plein de territoires où des remises à la rue se préparent. Là où il y aura des soutiens ou une médiatisation, on peut espérer les faire reculer. Mais dans les territoires moins visibles, tout va se faire dans une grande discrétion » craint Yann Manzi d’Utopia56. Face à la priorisation donnée à l’hébergement de familles ukrainiennes, Agathe Nadimi de l’association les Midis du MIE, qui vient en aide aux mineurs isolés, craint la reformation de campements de milliers de personnes en périphérie de Paris.

      La priorisation se ressent aussi dans la mobilisation citoyenne. Porte de Versailles, l’Armée du Salut coordonne les distributions alimentaires. Le centre peut accueillir jusqu’à 400 personnes par jour. « On a les capacités d’y répondre, grâce à tous les dons reçus, notamment beaucoup d’entreprises. Enfin… à destination des Ukrainiens. Parce que pour les autres publics, les Syriens, les Afghans, on a plus de mal. Des fois, on a envie de dire : il y a tous les autres, aussi », soupire Emmanuel Ollivier, directeur de la fondation de l’Armée du Salut. Marlène Schiappa soulignait lors de sa visite : « Tous les jours, on a des gens qui veulent aider, faire des dons, laisser un appartement à disposition… C’est pour cela qu’on a créé une plateforme de parrainage ».

      Pour l’heure, peu d’informations ont été données sur les 100 000 places d’hébergement annoncées par Jean Castex, si ce n’est qu’une grande partie d’entre elles sont organisées par des entreprises privées ou des citoyens. Cela pose question à de nombreuses associations. « On insiste beaucoup sur la générosité des gens, mais soyons extrêmement vigilant sur l’hébergement citoyen, qui doit inclure de l’accompagnement social dans la durée », soutient Bruno Morel, le directeur général d’Emmaüs Solidarité. Gérard Sadik, de la Cimade, rappelle aussi une évidence : « L’État a un devoir d’hébergement, avec une obligation des moyens renforcés : c’est-à-dire, une obligation d’aller vers le logement de toutes les personnes. Il ne peut pas se reposer sur les initiatives privées… »

      Tous les acteurs associatifs saluent la réaction rapide et massive de l’État pour accueillir les déplacés ukrainiens, ils souhaiteraient désormais que cette crise soit l’électrochoc permettant d’instaurer un accueil digne et durable à tous les exilés. « On a jamais vu des conditions d’accueil aussi favorables. Cela doit être considéré comme une opportunité pour les généraliser à toute personne qui a fui la guerre ou une situation humanitaire insupportable », défend Bruno Morel, d’Emmaüs Solidarité.

      https://basta.media/Refugies-ukrainiens-porte-de-Versailles-difference-de-traitement-Afghans-Sy

    • Ukraine and Double Standards on Refugees

      Critics are right to point out that some Western nations are treating Ukrainian refugees better than those fleeing similar horrific situations elsewhere. But the right way to address the problem is to increase openness to other refugees, not exclude Ukrainians.

      Russia’s brutal invasion of Ukraine has created a massive refugee crisis, with over 5 million Ukrainians fleeing the country. Many Western countries have admirably accepted Ukrainian refugees in response. But critics argue that this relative openness by the US and Europe involves a pernicious double standard under which white European refugees from Ukraine are welcomed, but non-white ones from Syria, Africa and elsewhere, are mostly shut out, even though many are fleeing comparably grave dangers from war and oppression. Pope Francis, among others, has said that the differential treatment of refugees is driven by “racism.”

      The critics have a legitimate point. But the right way to address the problem is not to close our doors to Ukrainians, but to be more open to other migrants and refugees fleeing horrific conditions.

      Non-white refugees from Africa and the Middle East really do often face violence and oppression comparable to that which threatens Ukrainian refugees, and many Western nations have been less willing to let them enter. In the case of the US, the difference is less glaring than in Europe, because the Biden administration has so far taken only modest steps to open US doors to Ukrainians. Some of those steps, such as granting Ukrainians already in the US “Temporary Protected Status” have parallels in similar policies adopted towards some predominantly non-white groups of refugees, such as Venezuelans (regardless of their actual skin color, Venezuelans and other Hispanics are usually not considered “white” in the US). The contrast is greater in Canada and various European nations that have been relatively more open to Ukrainians than the United States has been so far.

      Although racial and ethnic bias surely plays a role, it probably isn’t the only factor at work. It is also significant that the US and its European allies have an important strategic stake in the Russia-Ukraine War that is either smaller or entirely absent in the cases of Syria and various African conflicts. Openness to Ukrainians is not only a moral gesture, but also a way of opposing Vladimir Putin’s brutal war of aggression, which threatens Western security interests.

      It’s also worth noting that the US and its European allies have done little or nothing to open their doors to Russian refugees fleeing Putin’s intensifying repression, despite the strong moral and strategic case for doing so. Most Russian refugees are white, just like most Ukrainian ones. Western nations’ unwillingness (so far, at least) to take them is likely driven by shortsighted unwillingness to distinguish them from the very regime they are fleeing.

      That said, racial and ethnic bias clearly is a factor. Some European officials openly admit it. For example, Bulgarian Prime Minister Kiril Petkov said in February that his country is welcoming Ukrainians in part because “[t]hese are not the refugees we are used to.… These people are Europeans…These people are intelligent.”

      But, as I explained in one of my earliest pieces making the case for admitting Russian and Ukrainian refugees, the right way to combat such disparities is “leveling up” the treatment of non-white refugees, not barring Ukrainians.

      There are some cases where it is perfectly legitimate to end discrimination by “leveling down” the treatment of the previously favored group. For example, if the government gives subsidies to white-owned businesses that aren’t available to others, there is nothing wrong with just abolishing the subsidy program entirely.

      But barring refugees fleeing war or repression is a grave wrong even if it is done in a “race-neutral” manner. It still unjustly consigns people to oppression or even death merely because they happen to be born to the wrong parents or in the wrong place. That itself is an injustice similar to racial discrimination. In the same way, if police brutality is directed against African-Americans more often than whites, the problem could not be justly “solved” by having the police abuse whites more often. Rather, the only defensible approach in that situation is to curb brutality directed at blacks.

      In my view, there should be a strong presumption against barring any peaceful migrants, especially those fleeing war, authoritarian regimes, or other severe oppression. But I recognize this ideal is unlikely to be fully achieved anytime soon, if ever. In the meantime, we should seek whatever incremental improvements are feasible, which may include measures focused on specific refugee crises, even as others remain (relatively) neglected.

      And while I have long argued it is essential to make the general moral case for migration rights, there is nothing wrong with also noting considerations that may only apply to a specific situation. For example, there are specific strategic advantages to opening our doors to Russians fleeing Putin, because doing so strengthens the West’s position against one of the world’s most dangerous illiberal authoritarian regimes.

      In my view, Russians fleeing Putin’s regime (like others fleeing repression) should be accepted even in the absence of those strategic advantages. But these points still add to the case for openness, and they may be more decisive for observers who are less generally pro-migration rights than I am.

      The issue of racial and ethnic double standards on migration rights often comes up when I speak about admitting Ukrainians and Russians during the present war. Reporters and interviewers routinely ask about it. I always emphasize that my support for migration rights is not and never has been bounded by race or ethnicity.

      For members of the media and anyone else who may be interested, here is a convenient, though not exhaustive, list of my writings advocating migration rights for predominantly non-white groups (as “white” is usually defined in US political discourse). Unless otherwise noted, these are all posts at the Volokh Conspiracy blog:

      1. “The Moral and Strategic Case for Admitting Syrian Refugees,” Nov. 23, 2015.

      2. “Obama’s Cruel Policy Reversal on Cuban Refugees,” Jan. 14, 2017. While many Cuban migrants are light-skinned, they are not usually considered white in the US.

      3. “Supreme Court Ruling on Travel Ban Ignores Religious Discrimination,” USA Today, June 26, 2018. This piece and the next one are just a small sampling of my extensive writings opposing Donald Trump’s anti-Muslim travel bans.

      4. “Trump’s Expanded Travel Ban Compounds the Wrongs of Previous Versions,” Feb. 2, 2020.

      5. “Let Hongkongers Immigrate to the West - And other Victims of Chinese Government Oppression, too,” May 29, 2020. This is just one of several pieces I have written on Asian refugees.

      6."Immigration Restrictions and Racial Discrimination Share Similar Roots," The Hill, Nov. 24, 2020.

      7. “The Case for Accepting Afghan Refugees,” Aug. 20, 2021.

      8. Free to Move: Foot Voting, Migration, and Political Freedom, (Oxford University Press, rev. ed. 2021). In Chapters 5 and 6 of this book, I include an extensive critique of justifications for racial, ethnic, and cultural discrimination in migration policy. In the case of the US and many other Western nations, such restrictions most often target non-whites.

      9. “The Case Against Covid-19 Pandemic Migration Restrictions,” Cato Institute, Feb. 1, 2022. In the US, these restrictions have most heavily impacted non-white migrants from Latin America. That’s especially true of the Title 42 “public health” expulsions, against which I also authored an amicus brief when their legality was challenged in court.

      This list could easily be expanded. But it’s enough to give a representative sampling of my work on this issue.

      Committed conspiracy theorists (though not Volokh Conspirators!) might still say I only wrote the above because I anticipated there would someday be a refugee crisis involving whites. My previous writings about non-white refugees would store up credibility that I could then make use of. But that just goes to show there’s no satisfying hard-core conspiracy theorists!

      https://reason.com/volokh/2022/04/24/ukraine-and-double-standards-on-refugees

    • Migranti : verso un contributo per i profughi ospitati dai privati

      Lo ha dichiarato il presidente del Fvg #Massimiliano_Fedriga: «Stiamo lavorando a una misura che sarà valida per tre mesi, per venire incontro alle famiglie che ospitano. Importante distinguere tra rotta balcanica e profughi Ucraini»

      Voici le passage sur la distinction à faire entre les réfugiés « de la route des Balkans » et ceux d’Urkaine :

      «Oggi il numero di profughi dall’Ucraina è gestibile a livello nazionale - ha spiegato Fedriga - ma ci preoccupa la sommatoria con l’immigrazione proveniente dalla rotta balcanica e dal Mediterraneo. Oltretutto bisogna avere consapevolezza che i due percorsi devono essere ben distinti, soprattutto per quanto riguarda i minori stranieri non accompagnati. Dall’Ucraina arrivano minori dai 6 ai 14 anni circa, dalla rotta balcanica e dal Mediterraneo arrivano sedicenti 17enni che in realtà sono maggiorenni. Non possiamo pensare di mischiare i due percorsi, dobbiamo tutelare al massimo le persone che scappano dalla guerra».

      https://www.triesteprima.it/politica/migranti-fedriga-contributo-ospiti.html
      #Italie #Fedriga

      –---

      To a certain degree, double standards are already emerging regarding the treatment of refugees travelling Balkan and Mediterranean routes, and those arriving from Ukraine. While every person crossing the border is mandated to quarantine for 6 days, people fleeing Ukraine can do so in specialized centers (there are 4 of them in #Trieste at the moment). All other nationalities (predominantly people from Pakistan and Afghanistan) are sent to #Campo_Sacro, which presents considerably worse living conditions. Since there are 40 to 50 people present there, it can be concluded that the Italian police still chases and leads them back when they decide to resume their journeys. Of particular concern is the case of two Pakistani people who fled Ukraine, where they had obtained their residency permits, but were conducted to Campo Sacro regardless.

      (p.11)

      source : https://www.borderviolence.eu/balkan-regional-report-march-2022

    • En #Pologne, les exilés non ukrainiens se sentent abandonnés

      Irakiens, Syriens ou Yéménites, ils ont traversé la frontière entre le Bélarus et la Pologne fin 2021, en y frôlant parfois la mort. Placés en rétention, relâchés, certains se retrouvent aujourd’hui livrés à eux-mêmes, à l’heure où des millions de réfugiés ukrainiens sont accueillis en Pologne.

      Kouba a aperçu la veille une silhouette marchant le long de la route, un sac sur le dos, et en a déduit que c’était lui. « Une amie m’a demandé d’aller le récupérer. Comme il ne parle quasiment pas anglais, je lui ai quand même montré son numéro pour vérifier que c’était la bonne personne », chuchote-t-il, l’air amusé, assis sur la pelouse près de la gare de Varsovie vendredi 6 mai. Près de lui, Waleed, cheveux coiffés en arrière et barbe fournie, ne dit pas un mot. Mais il acquiesce lorsqu’il parvient à déchiffrer ce que dit son accompagnateur.

      « Il a été refoulé deux fois à la frontière en octobre dernier, puis il a passé six mois à Stary Raduszec », poursuit Kouba en remuant la tête de gauche à droite pour marquer son agacement. Il fait référence au centre de rétention qui a vu le jour dans la province de Krosno, à l’ouest de la Pologne. « C’est au milieu de nulle part, au milieu des champs. Il n’y a même pas d’adresse. » Waleed ignore pourquoi il a pu en sortir du jour au lendemain. « C’est comme une prison, explique-t-il en arabe, dans le train qui l’emmène droit vers Łódź, à une centaine de kilomètres de la capitale. On n’avait pas le droit d’utiliser nos smartphones, ni d’avoir de la visite. »

      Un ami à lui a tout de même pu prendre une vidéo tournée à l’intérieur du centre fin 2021. « We are not animals ! » (« Nous ne sommes pas des animaux ! »), crie un homme parmi un groupe d’exilés derrière un grillage, en s’adressant aux gardes. Au cours des derniers mois, plusieurs personnes se sont lancées dans une grève de la faim pour protester contre leur rétention, injustifiée – la plupart d’entre elles ont demandé l’asile (ou émis le souhait de le faire) par l’intermédiaire de bénévoles ou d’avocats rencontrés avant qu’ils ne soient interpellés par les gardes-frontières puis enfermés, comme nous le relations ici ou là.

      Originaire du Kurdistan irakien, Waleed confie, dans le train, ses rêves d’Europe : « Mon frère, avec qui j’ai traversé, est aujourd’hui en Allemagne. Et j’ai un autre frère en Belgique. » Il aimerait les rejoindre mais ignore comment faire. Il craint aussi les contrôles de police dans les gares allemandes. Son frère, lui aussi placé en centre de rétention, n’a pu en sortir que parce qu’il souffrait d’une forme grave de diabète. C’est avec lui que Waleed a d’abord tenté de gagner la Bulgarie, depuis la Turquie, à dix reprises. « À chaque fois, on nous a refoulés. La police était très dure avec nous. Une fois, ils nous ont retiré nos téléphones et vêtements, les ont brûlés sous nos yeux et nous ont dit “go” en nous montrant la forêt. »

      En arrivant en gare de Łódź, en début de soirée, le jeune homme retrouve Sebastian, l’un des maillons de cette chaîne de solidarité qui refuse d’abandonner les personnes exilées de toutes nationalités, à l’heure où la Pologne accueille près de trois millions de réfugié·es venant d’Ukraine. Tous deux ne se connaissent pas mais Waleed le suit volontiers lorsqu’il se dirige vers sa voiture puis fait démarrer le moteur. Du heavy metal sort, sans crier gare, de la radio, et plusieurs exemplaires du journal anarchiste traînent sur le siège arrière. La voiture rejoint un petit village, surnommé « Palestine », où Sebastian va héberger, pour la toute première fois, un exilé chez lui.

      « Je vais te montrer ta chambre », lance-t-il à Waleed en grimpant les marches de la maison. Sur le tee-shirt de l’activiste anarchiste, un nounours barre au feutre rouge une croix gammée nazie. Une fois dans le salon, Sebastian tente de mettre la musique sur la télévision pour noyer le silence qui s’installe, faute de langue commune. « Je suis assez nul pour briser la glace », affirme-t-il en enchaînant les cigarettes dans le jardin.

      Magda, la femme de Sebastian, arbore un sourire gêné. « Elle est bien embêtée car elle est très bavarde, d’habitude », plaisante-t-il. Pour lui souhaiter la bienvenue, le couple a organisé une fête, en présence d’Ewa, le premier contact de Waleed, qui est restée en lien avec lui durant son enfermement. C’est aussi elle qui a demandé à Kouba de le récupérer à sa sortie du centre de rétention.

      Installée à table, elle convoque ses souvenirs. « J’ai passé trois ou quatre mois à la frontière bélarusse. Des fois, on restait 46 heures sans dormir, au point d’avoir des hallucinations. On a aidé beaucoup de personnes, bien qu’on ne se souvienne pas de tous les visages et prénoms. » Aujourd’hui, poursuit-elle, les exilé·es continuent de tenter le passage de cette frontière, devenue une nouvelle route migratoire en Europe. « Il y a encore du monde qui traverse, au moins cinquante personnes par semaine. Vendredi dernier, on a trouvé une famille qui avait passé sept jours dans la forêt », rapporte Kouba.

      "Quand je vois les gardes-frontières polonais avec des enfants ukrainiens dans les bras aujourd’hui, ça me rend fou."

      Sebastian, activiste anarchiste

      Et Ewa d’ajouter : « Le centre de Bruzgi, au Bélarus, comptait sept cents personnes. Il a été fermé et les plus vulnérables ont été relâchés pour dire que la Pologne les refoulait. C’est un sale “jeu” entre les deux pays. Certaines personnes sont restées coincées à la frontière durant des mois. » « Quand je vois les gardes-frontières polonais avec des enfants ukrainiens dans les bras aujourd’hui, ça me rend fou », peste Sebastian en se tenant la tête entre les mains. Il a, lui aussi, ratissé la forêt située dans la zone en état d’urgence pour sauver des vies.

      Deux jours plus tard, dans la cour du centre social et culturel ADA à Varsovie, Kouba se souvient de ce qui a marqué un tournant pour lui : au moins trois décès avaient été signalés à la frontière entre la Pologne et le Bélarus en octobre dernier. « La même semaine, les autorités locales ont annoncé lors d’une conférence de presse avoir trouvé des images de zoophilie et de pédophilie sur le téléphone des exilés. Cette propagande a été insupportable pour moi. » Kouba multiplie, durant trois mois, les allers-retours à la frontière et garde contact avec certains exilés placés en centre de rétention, par un réseau d’entraide.

      Depuis le début de la guerre en Ukraine, ce professeur d’université a choisi de s’impliquer auprès des exilés non ukrainiens, considérant qu’il y avait « suffisamment d’aide » pour eux à travers le pays. Et parce que, selon plusieurs sources, les ONG autrefois présentes à la frontière bélarusse sont depuis impliquées à la frontière ukrainienne.

      « Ces différences de traitement me dépassent. On s’est aussi organisés, avec des volontaires, pour créer à l’intérieur de la gare de Varsovie un point d’accueil pour les réfugiés non ukrainiens fuyant la guerre. » Un groupe basé à la frontière avec l’Ukraine est chargé de les recenser et de signaler leur départ en train. À leur arrivée dans la capitale, les équipes les orientent pour la suite de leur parcours ou leur cherchent un hébergement.

      Proposer une aide à tous les exilés, sans distinction

      Dimanche 8 mai, Chris retrouve Sulaïman et Mohsen dans un café de la capitale situé près du théâtre. Les deux jeunes hommes, originaires du Yémen, laissent entrevoir deux personnalités radicalement opposées : l’un, coupe afro assumée, est extraverti et enchaîne les blagues avec un serveur peu réceptif ; l’autre est réservé, le regard presque méfiant.

      Ils viennent, eux aussi, d’être relâchés du centre de rétention de Wędrzyn, un village situé près de la frontière allemande. « Le centre a été créé dans une zone militaire, où il y avait des entraînements tous les jours. On entendait les tirs, les explosions, comme si on était au milieu d’une guerre », relate Sulaïman, qui évoque un « camp de concentration »
      On se battait pour du pain. Des gens sont devenus fous et se sont mis à parler tout seuls.
      Mohsen, un exilé yéménite

      Là-bas, Mohsen, à la carrure déjà frêle, perd quatre kilos. « On se battait pour du pain. Des gens sont devenus fous et se sont mis à parler tout seuls. » Durant deux mois, le trentenaire ne peut donner aucune nouvelle à sa famille restée au Yémen. « Quand j’ai enfin récupéré un vieux téléphone, j’ai dit à ma mère que j’étais dans un hôtel 5 étoiles, car je ne voulais pas l’inquiéter. »

      Aujourd’hui, ses proches, qui ont découvert la vérité, ne parviennent toujours pas à y croire. Après avoir travaillé en Arabie saoudite pour fuir la crise que connaît son pays en 2013, Mohsen se confronte à de nouvelles difficultés. Son pays d’accueil restreint le droit au travail pour les étrangers et augmente, chaque année, le tarif des permis de résidence.Il lance une demande de visa étudiant en Espagne à plusieurs reprises, sans succès. « En 2021, j’ai pu obtenir un visa étudiant au Bélarus. Tout à coup, on a entendu dire que la frontière avec la Pologne était ouverte. Pour moi, c’était la seule chance de gagner l’Europe », explique-t-il, faisant référence aux droits humains et à une vie meilleure.

      « Bla bla bla… », lâche aujourd’hui Mohsen d’un ton amer. Il prend contact avec Sulaïman, originaire du même village que lui au Yémen, qui a de son côté tenté de rejoindre l’Europe via la Turquie. « J’ai été refoulé à chaque fois par la Grèce. Quand tu cherches un endroit sûr, tu trouves. On connaît le sens du mot “guerre” et on pensait qu’en passant par le Bélarus, on pourrait demander l’asile en Europe.
      Un soldat a fini par me frapper à la poitrine. Ils ont cassé le port permettant la charge de nos téléphones et nous ont dit de repartir.
      Sulaïman, un exilé yéménite

      Les deux comparses font appel à un passeur bélarusse qui les achemine à la frontière le 16 août, au début de la crise, contre 200 dollars. « C’était le 15 août », rectifie Mohsen, pour qui chaque détail a son importance. Ils n’imaginaient pas combien ce serait « difficile ». Ils sont refoulés une première fois par les gardes-frontières polonais, qui braquent leurs armes sur eux.

      « Ils nous ont demandé ce qu’on voulait et on a répondu “l’asile”. » Côté bélarusse, les soldats leur ordonnent de retourner en Pologne. « Une nuit, ils nous ont laissés plusieurs heures sous la pluie, sous des températures négatives, en nous observant. Un soldat a fini par me frapper à la poitrine. Ils ont cassé le port permettant la charge de nos téléphones et nous ont dit de repartir. »

      Le « ping-pong » dure sept jours. Affamé, déshydraté et souvent malade pour avoir bu l’eau des marécages, le groupe – des Afghans et Kurdes les ont rejoints dans leur mésaventure – désespère et ne pense qu’à survivre. Ils finissent par croiser une ONG dans la forêt, qui promet de les aider. Alexandra, une bénévole, les accompagne au poste des gardes-frontières, pensant bien faire.

      « Ils l’ont virée du poste en la poussant violemment. On s’est dit que s’ils faisaient ça à une ONG, qu’est-ce qu’ils feraient avec nous ? », poursuit Mohsen en jouant nerveusement avec le couteau posé sur la table à manger de la cuisine, dans le petit appartement qu’ils occupent au centre-ville de Varsovie. Leur téléphone confisqué, ils sont de nouveau refoulés, au milieu de la nuit. C’est finalement une équipe de télévision, qui tourne côté Bélarus, qui les sort de cet « enfer ».

      Près de deux mille exilés seraient toujours placés en centre de rétention depuis la crise à la frontière bélarusse. « Quelle différence entre les Ukrainiens et nous ? Est-ce une question de couleur ? », interroge Mohsen, faisant référence à la guerre et à la famine que connaît son pays. « On se sent désolés pour la guerre en Ukraine, mais on trouve dingue que les réfugiés aient juste à se présenter à la frontière polonaise pour être protégés après ce qu’on a vécu. »

      Et Sulaïman d’ajouter : « Il ne devrait pas y avoir de différence entre les gens. Et s’ils ne veulent vraiment pas de nous, pourquoi nous enfermer ? » Près de deux mille personnes seraient toujours placées en centre de rétention depuis la crise à la frontière bélarusse. Mohsen et Sulaïman ont passé huit mois et vingt jours en centre de rétention, sans même en connaître la raison. « Comme si on était des criminels », résument-ils. Ils sont suivis par le collectif d’aide aux migrants Grupa Granica, et un avocat tente aujourd’hui de les aider dans leurs démarches administratives.

      Chris, qui se dit sans « étiquette » et dont les parents sont eux aussi réfugiés, estimait qu’il n’en avait « pas assez fait » durant la crise à la frontière bélarusse. « Les Polonais se sont réveillés avec l’arrivée massive de réfugiés ukrainiens et font tout pour les soutenir. C’est super. J’ai estimé de mon côté que Mohsen et Sulaïman en avaient plus besoin, puisque personne ne les aide », susurre celui qui leur prête cet appartement, où ils vivent depuis leur sortie du centre de rétention. Mohsen, le regard plongé dans le vide, se dit « brisé ».

      Pensent-ils rester en Pologne ? « Ça fait huit mois qu’on est là et les ONG ont rempli les documents pour la demande d’asile, mais on n’a rien eu, pas même un entretien », rétorque Sulaïman.Recontacté, Moussa*, qui nous racontait en décembre dernier avoir dû enterrer ses frères dans la forêt à la frontière, vit toujours en Podlachie, au nord-est de la Pologne, mais a dû quitter le centre d’accueil où il était hébergé pour faire de la place aux Ukrainien·nes.

      « Des personnes de bonne volonté se sont regroupées pour me trouver un logement en ville car ce n’était plus vivable pour moi là-bas. Mais je n’ai toujours pas de procédure d’asile ici en Pologne », confie-t-il, admettant être « perdu ».

      « Je suis incapable de réfléchir à ce que je veux faire pour le moment », complète Mohsen. Chris assure que si la zone en état d’urgence est toujours interdite d’accès, c’est pour que le monde « ne puisse pas voir ce qui s’y passe ». « Il doit aussi y avoir des corps là-dedans. C’est un crime contre l’État de droit et contre l’humanité, pour lequel les responsables devront payer », dénonce-t-il en avouant avoir « honte » de son pays. En cherchant le regard de ses deux interlocuteurs, il conclut : « Vous devriez essayer d’oublier tout cela. Nous, on se chargera de ne rien oublier. »

      https://www.mediapart.fr/journal/international/160522/en-pologne-les-exiles-non-ukrainiens-se-sentent-abandonnes

    • Réfugiés d’Ukraine : tapis rouge pour les uns, barbelés pour les autres

      Février 2022 : face à l’afflux d’exilé·es en provenance d’Ukraine aux frontières européennes, la présidente de la Commission européenne déclare que l’Union est « pleinement préparée » à accueillir ces réfugiés qui sont « les bienvenus [1] ». En France, la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur précise qu’il n’est prévu ni répartition entre les États membres de l’UE (« ce sont des personnes libres, elles vont là où elles veulent [2] ») ni quotas (« dès lors que des besoins seront exprimés, la France y répondra ») : sera octroyé un statut provisoire de protection immédiate, sans besoin de demander l’asile, avec un accompagnement social pour tout le monde ; les personnes seront logées, pourront travailler et leurs enfants iront à l’école. Et pour « ceux […] partis sans passeport, il y aura évidemment de la souplesse, ce sont après tout des gens qui fuient la guerre, on ne va pas les bloquer avec des formalités administratives. L’humanité c’est de ne pas ajouter des formalités aux formalités ».

      L’incrédulité face à cette inhabituelle hospitalité cède au malaise. Comment en serait-il autrement, quand on apprend, par la voix du directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration que « la France se prépare » et dispose d’un « parc d’hébergement de demandeurs d’asile qui peut être agrandi [3] », tandis que sont laissé·es à la rue, depuis des années, des milliers d’exilé·es que la police pourchasse, rafle et déplace sans cesse ?

      Pour la plupart d’entre eux, il eût suffi, comme on vient de le faire, d’activer la directive UE relative à la « protection temporaire », instituée dès 2001 mais qui n’a jamais, depuis lors, été mise en œuvre. Afghan·es, Érythréen·nes, Irakien·nes, Soudanais·es, Syrien·nes notamment, auraient ainsi pu, au fil du temps et des crises, bénéficier des conditions de protection et d’accueil offertes aujourd’hui aux Ukrainien·nes. Qu’il n’en ait rien été ne peut qu’interroger : la protection temporaire, pourtant de portée universelle dans toutes les situations d’« afflux massif », serait-elle en pratique réservée aux personnes exilées plutôt blanches et de culture chrétienne ?

      Comment expliquer, sinon, qu’au mois d’août 2021, tout en condamnant la prise de pouvoir par les talibans à Kaboul, le président Macron ait pu déclarer : « L’Europe ne peut pas à elle seule assumer les conséquences de la situation actuelle. Nous devons anticiper et nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants [4] » ? Comment comprendre que cette même Europe, soudain prête « à recevoir cinq millions de personnes » selon le chef de la diplomatie de l’UE, ait approuvé l’édification par la Pologne, la Lituanie ou la Lettonie de murailles à leurs frontières pour parer à une « invasion » d’exilé·es venu·es d’Asie ou d’Afrique, favorisée par la Biélorussie à l’automne 2021 ?

      La discrimination raciale a d’ailleurs contaminé, dès ses premiers jours, l’exode ukrainien lui-même. Un tri des exilé·es s’est opéré à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne, sur la base de la nationalité ou de la couleur de peau, au point que la Haut-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU s’est dite « alarmée par les informations crédibles et vérifiées faisant état de discrimination, de violence et de xénophobie à l’encontre de ressortissants de pays tiers qui tentent de fuir le conflit en Ukraine [5] ». Ces pratiques ne peuvent être traitées comme de simples bavures ; elles traduisent la conception qu’a l’UE de l’accueil : tapis rouge pour les un·es, barbelés pour les autres.

      Le tri ne s’arrête pas aux frontières : la proposition de la Commission européenne aux États membres d’activer la directive « protection temporaire » prévoyait d’inclure « les personnes qui ont fait de l’Ukraine leur lieu de vie [6] ». Une catégorie que n’a pas retenue le Conseil européen : en plus des Ukrainien·nes, seules seront éligibles les personnes bénéficiant d’une protection en Ukraine. En France, une instruction précise que, pour y prétendre, les autres devront justifier d’une résidence régulière sous couvert d’un titre de séjour permanent en Ukraine (quid des personnes en demande d’asile ?) et de « l’impossibilité de rentrer dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables ».

      Difficile de ne pas voir, derrière ces pratiques et ces annonces, l’idéologie raciste qui imprègne la politique migratoire menée en Europe et en France, hier portée par l’extrême-droite, aujourd’hui propagée par de nombreux responsables politiques et professionnels des médias. En témoigne, par exemple, les propos d’un sénateur-maire conservateur de la ville de Mikulov en République tchèque, pays qui, soudain, secourt dans l’enthousiasme près de 200 000 Ukrainien·nes alors qu’il avait catégoriquement refusé la prise en charge du moindre réfugié en 2015. C’est qu’alors, explique-t-il, « les gens qui arrivaient en Europe avaient une religion différente et une culture qui n’était pas compatible avec la nôtre [7] ». Une analyse que partagent manifestement les États membres de l’UE sans s’autoriser à le reconnaître…

      Notes

      [1] France Info, « Guerre en Ukraine : comment l’accueil des réfugiés se prépare en Europe », 24 février 2022.

      [2] Marlène Schiappa, interviewée par France Info, 8 mars 2022. Idem pour les citations suivantes.

      [3] France Info, « Réfugiés ukrainiens : “Les capacités d’accueil seront trouvées”, assure le directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration », 28 février 2022.

      [4] Emmanuel Macron, au cours d’une allocution télévisée le 16 août 2021.

      [5] ONU info, « Guerre en Ukraine : des dizaines de millions de personnes en “danger de mort”, prévient Michelle Bachelet », 3 mars 2022.

      [6] Commission UE, « Ukraine : la Commission propose une protection temporaire pour les personnes fuyant la guerre en Ukraine, et des lignes directrices concernant les vérifications aux frontières », 3 mars 2022.

      [7] Le Monde, « Submergée par les réfugiés ukrainiens, la République tchèque ne veut pas entendre parler de “quotas” européens », 21 mars 2022.

      https://www.gisti.org/spip.php?article6793

    • #Moldavie : racisme à l’accueil pour les #Roms d’Ukraine qui fuient la guerre

      Tous les réfugiés d’Ukraine ne sont pas accueillis de la même façon. En Moldavie, les membres de la communauté rom doivent faire face au racisme et à la ségrégation. Le rapport accablant de Human Rights Watch.

      Les autorités moldaves hébergent les réfugiés roms d’Ukraine séparément des autres personnes fuyant la guerre, ce qui constitue un « traitement inégal et discriminatoire », alerte l’organisation Human Rights Watch (HRW), qui a enquêté sur la situation en Moldavie. Le gouvernement aurait même permis et, dans certains cas, demandé aux équipes de bénévoles de refuser les réfugiés roms dans les centres d’accueil étatiques.

      « Les autorités moldaves offrent un soutien très important aux personnes fuyant l’Ukraine, mais cela n’excuse pas la ségrégation des réfugiés roms », dénonce Anastasija Kruope, chercheuse à l’ONG de défense des droits humains. « Peu importe les problèmes économiques et sociaux auxquels la Moldavie fait face, le gouvernement a la responsabilité d’assurer que les réfugiés ne sont pas discriminés sur des bases ethniques. »

      Depuis l’invasion russe le 24 février, 471 000 personnes ont fui l’Ukraine vers la Moldavie, et 87 000 sont restées dans ce pays de 2,6 millions d’habitants, qui est aussi l’un des plus pauvres d’Europe. Depuis la mi-mars, la quasi-totalité des réfugiés roms pris en charge par les autorités moldaves ont été placés dans un bâtiment jusque-là abandonné de la Faculté des Relations internationales (FRISPA) et dans le Manej Sports Arena. Mais des militants de défense des droits des Roms soulignent que les conditions d’accueil au Manej et au centre de Frispa sont « inadéquates » et « pauvres », en tout cas inférieures à celles des autres centres d’accueil.

      Certains administrateurs de ces centres refuseraient les réfugiés roms. Selon des bénévoles qui ont travaillé dans l’accueil des réfugiés, un fonctionnaire gouvernemental a dit aux bénévoles qu’ils devaient confirmer l’ethnie des réfugiés avant de les placer dans des centres pour éviter les problèmes, tout en admettant qu’il s’agissait d’une forme de profilage racial. De fait, les Roms sont catégorisés avant tout comme Roms et non Ukrainiens, quand bien même ils possèdent le passeport ukrainien.

      Des membres du staff du centre MoldExpo, le plus grand centre d’accueil du pays, à Chișinău, rapportent également que les autorités de la ville auraient une politique « non écrite » de refuser presque tous les Roms dans ce centre. Le 2 avril, l’HWR été témoin d’un tel refus opposé à des réfugiés roms arrivant d’Ukraine sous prétexte qu’il n’y avait plus de place dans le centre d’accueil, alors que ce n’était pas le cas.

      Les Roms font toujours face à un profond racisme et des discriminations constantes à la fois en Ukraine, en Moldavie et en Roumanie. On estime à 400 000 le nombre de Roms qui vivaient en Ukraine avant l’invasion russe, le plus souvent dans des conditions de pauvreté élevée, avec peu ou pas d’accès à l’emploi, à l’éducation et au système de santé. Ils sont également souvent victimes de discours de haine et parfois d’attaques violentes dont la justice locale ne se saisit pas sérieusement.

      Certaines réactions des Moldaves accueillant des réfugiés ukrainiens et d’Ukrainiens fuyant la guerre dans leur pays montrent l’étendu du racisme et des préjugés auxquels les Roms font face. « Pas de Roms », indiquent certaines familles pourtant prêtes à héberger des réfugiés ukrainiens à titre privé. « Quand on appelle des centres d’accueil et qu’on leur demande d’héberger un groupe de réfugiés, on nous dit ’Pas de soucis, amenez-les, mais assurez-vous qu’ils ne sont pas roms’, ou ’assurez-vous qu’ils sont ukrainiens’ ou ’blancs’ », rapporte un bénévole qui aide les réfugiés à trouver des lieux d’hébergement. « Un jour, on nous a demandé s’ils étaient des ’purs ukrainiens’. »

      Selon des activistes de défense des droits des Roms, certains réfugiés roms sont retournés en Ukraine, car ils ne trouvaient pas d’hébergement dans les centres d’accueil ou dans des familles en Moldavie. Ils rapportent aussi que des réfugiés ukrainiens non roms ont refusé de rester dans des centres d’accueil avec des réfugiés roms et que des Ukrainiens non roms ont refusé de monter à bord de bus à destination de villes d’Europe avec des réfugiés roms.

      « Les autorités moldaves doivent mettre fin à cette politique officielle ou non officielle de ségrégation des Roms et prendre toutes les mesures nécessaires pour contrer les attitudes discriminatoires contre eux », appelle HRW.

      https://www.courrierdesbalkans.fr/Moldavie-racisme-a-l-accueil-pour-les-Roms-d-Ukraine-qui-fuient-l

    • « Ce que l’Etat a fait pour les Ukrainiens, il peut le faire pour les autres exilés »

      Une #manifestation est organisée par différentes ONG ce samedi à Paris pour dénoncer les conditions d’accueil différenciées entre les réfugiés ukrainiens et ceux venant d’autres pays.

      Deux poids, deux mesures. D’un côté, il y a les réfugiés ukrainiens, arrivés par dizaines de milliers sur le sol français – 100 000 selon les derniers décomptes – depuis le début de l’invasion russe de leur pays et dignement accueillis dans des centres d’hébergement ouverts spécialement pour eux. De l’autre côté, des exilés venant d’autres pays, qui n’ont guère accès à ces foyers.

      C’est contre cette « #politique_migratoire_différentialiste » que des ONG, comme Utopia 56, Médecins du monde, Pantin Solidaire, Paris d’Exil ou Solidarité migrants Wilson, appellent à manifester, ce samedi, à 14 h 30, depuis le centre d’accueil de la Porte de Versailles, à Paris, jusqu’à la préfecture d’Ile-de-France, chargée d’orchestrer les opérations dites de mises à l’abri. Pour que les centaines de migrants sans-abri en Ile-de-France puissent accéder aux centres d’hébergement dédiés aux Ukrainiens, et qui sont désormais « à moitié vides », selon Pierre Mathurin, coordinateur au sein d’Utopia 56. Il explique à Libération les raisons de la mobilisation.

      Pourquoi avez-vous décidé de descendre dans la rue ce samedi après-midi ?

      Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, le 24 février, on se réjouit toutes et tous de l’accueil des réfugiés ukrainiens en France. Mais on demande que cette organisation soit mise en place pour tous les réfugiés sans-abri, et non pas seulement ceux qui viennent d’Ukraine. C’est le message que nous voulons porter ce samedi dans la rue. On veut que l’accès au logement, à la santé, au travail, aux transports publics, à la demande d’asile immédiat et à l’information, qui ont tous été facilités pour les exilés ukrainiens, soient aussi ouverts aux autres réfugiés, quelle que soit leur nationalité. Et ce, d’autant plus qu’aujourd’hui, de moins en moins d’exilés ukrainiens arrivent en France. Les centres d’accueil exclusivement dédiés aux réfugiés ukrainiens se vident.

      Par exemple, dans le #centre_de_premier_accueil de la #Porte_de_Versailles, entre 300 et 500 places sont laissées vacantes chaque nuit. D’autres foyers ferment même leurs portes. Comme les gymnases de Bercy et de la gare de l’Est. C’est pourquoi il est impératif qu’on parle maintenant du problème. On a vraiment très peur que, dans les prochaines semaines, d’autres centres d’hébergement ferment et que, parallèlement, l’Etat fasse comme si ce #dispositif_exceptionnel d’accueil n’avait jamais existé. Pourtant, si, 100 000 places d’accueil ont été ouvertes en l’espace de quelques jours pour les réfugiés ukrainiens. C’est énorme. Ce que l’Etat a fait pour les Ukrainiens, il peut le faire pour les exilés d’autres nationalités. C’est ce qu’on lui demande depuis des années.

      Qu’est-ce que vous répond le gouvernement ?

      Il refuse catégoriquement d’accueillir des réfugiés d’autres nationalités dans ces centres d’hébergement. Nous, les associations venant en aide aux migrants, faisons des tribunes, des lettres ouvertes… mais nous n’avons aucun retour du gouvernement. Depuis des années, l’Etat nous rétorque qu’il n’a pas suffisamment de moyens pour trouver ne serait-ce que quelques centaines de places d’hébergement, et ce sur une temporalité beaucoup plus large. Mais au vu de la réponse du gouvernement face à l’exil migratoire des Ukrainiens, l’ouverture de 100 000 places en quelques jours donc, cela nous prouve que l’État peut le faire. Tout est question de volonté politique.

      A quoi tient, selon vous, cette différence de traitement entre les réfugiés ukrainiens et ceux d’autres nationalités ?

      On a beaucoup de mal à savoir si c’est une question de racisme culturel, de localisation, de proximité des Ukrainiens du territoire français. Mais on a bien du mal à ne pas poser la question du racisme. Elle est même prédominante. C’est parce que les réfugiés ukrainiens ont la peau blanche qu’ils sont mieux accueillis.

      La comparaison la plus frappante peut être faite avec les réfugiés afghans. Seulement quelques mois avant, en septembre 2021, lors de la prise de Kaboul par les talibans et l’exil des Afghans, le gouvernement français parlait de « gestion des flux migratoires » et de « contrôle des frontières ». Seulement quelques centaines de migrants afghans avaient alors bénéficié d’un corridor humanitaire pour être pris en charge en France. Depuis, ce n’est guère mieux. Les réfugiés afghans arrivant sur le sol français sont dans la rue pendant des mois, attendant d’être pris en charge. La politique différentialiste de l’Etat, son refus d’accueillir des réfugiés d’autres nationalités dans les centres d’hébergement dédiés aux Ukrainiens en disent long…

      Concrètement, en quoi consiste cette #différence_de_traitement entre un réfugié afghan et un exilé ukrainien ?

      Quand un exilé ukrainien débarque en France, il va être « récupéré » à la gare par des associations opératrices de l’Etat, puis emmené en bus vers le centre de premier accueil de la Porte de Versailles, dans le XVe arrondissement de Paris. Sur place, en une heure, il va pouvoir, s’il le souhaite, entamer sa démarche de demande d’asile et obtenir un rendez-vous avec France terre d’asile et la préfecture pour trouver un hébergement adéquat. S’il souhaite rester en France, il va avoir accès directement à Pôle emploi. Au centre de la Porte de Versailles, il aura aussi accès à une crèche à disposition pour les enfants et à des distributions alimentaires en continu. Une prise en charge globale donc. A aucun moment, les réfugiés ukrainiens ne dorment dans la rue ou ne sont pas accompagnés dans leurs démarches. C’est ce dispositif-là qui doit être octroyé à tous les réfugiés.

      Car les exilés d’autres nationalités, quand ils arrivent en France, n’ont aucune structure vers qui se tourner. Ils ne bénéficient pas de la gratuité des transports, dorment souvent dans la rue, n’ont pas accès aux informations, doivent appeler des numéros surchargés pour entamer leur demande d’asile… Au mieux, ils croisent, au petit bonheur la chance, des associations qui peuvent les aider et leur donner un kit de survie ou une soupe. Bref, ils subissent une accumulation d’entraves.

      https://www.liberation.fr/societe/ce-que-letat-a-fait-pour-les-ukrainiens-il-peut-le-faire-pour-les-autres-
      #France #deux_poids_deux_mesures

    • À #Paris, les actions se multiplient pour obtenir un hébergement aux exilés

      Dimanche 17 juillet, des membres de #La_Chapelle_debout et des habitants de l’Ambassade des immigrés ont occupé le centre d’accueil pour les réfugiés ukrainiens, quasi vide, pour dénoncer les inégalités de traitement entre les exilés. Mardi, ils avaient rendez-vous à la préfecture.
      Ils ont déjà occupé les locaux vides d’une société d’assurance situés #rue_Saulnier, dans le IXe arrondissement de Paris, en avril dernier. Cette fois, le collectif La Chapelle debout, qui vient en aide aux exilé·es de la capitale depuis 2015, a choisi d’investir le centre d’accueil dédié aux réfugié·es ukrainien·nes #Porte_de_Versailles, dans le XVe arrondissement, dimanche 17 avril.

      Les bénévoles étaient accompagnés des habitant·es de l’#Ambassade_des_immigrés (du nom de ce nouveau lieu de mobilisation né après l’#occupation du bâtiment de la rue Saulnier) et d’exilés à la rue, lorsqu’ils sont entrés dans le centre d’accueil, où la fréquentation a fortement baissé au cours des dernières semaines selon plusieurs sources.

      « Notre action avait un double objectif, explique Yacine*, membre de La Chapelle debout. D’abord, dénoncer les #différences_de_traitement entre les exilés et le racisme qui en découle, sachant que le centre dédié aux Ukrainiens est presque vide et que pendant ce temps, d’autres exilés vivent dehors depuis des mois, voire des années ; et obtenir d’autre part des solutions d’hébergement pour les personnes confrontées à la rue. »

      La semaine précédente, déjà, plusieurs collectifs et associations d’aide aux migrant·es comme Utopia 56, Solidarité migrants Wilson ou Médecins du monde manifestaient depuis le centre d’accueil des Ukrainien·nes jusqu’à la préfecture de région, avec le même credo : « Hébergement pour tous·tes, quelle que soit leur nationalité ».

      Ce mardi 19 juillet, une délégation composée de deux exilés, un Éthiopien et un Soudanais, ainsi que de trois membres de La Chapelle debout, a été reçue par Cécile Guilhem, sous-préfète et cheffe de cabinet du préfet de la région Île-de-France, ainsi que par deux responsables de la Direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (Drihl).

      Dimanche, le directeur adjoint du cabinet du préfet s’était lui-même rendu sur place, au centre pour réfugié·es ukrainien·nes, pour tenter de dénouer la situation. « Des exilés ont pu échanger avec lui et lui signifier qu’ils ne remettaient pas en doute le droit des Ukrainiens à un hébergement, mais qu’ils attendaient simplement d’avoir les mêmes droits, poursuit Yacine. Eux sont accueillis en France par la rue et le harcèlement des policiers, qui donnent des coups de pied dans leurs tentes tôt le matin ou les déchirent. »

      Le sous-préfet dit « avoir bien pris en compte » leur situation

      Les participant·es à l’action – des réfugié·es, des demandeurs et demandeuses d’asile, des dubliné·es (à qui la France demande de retourner dans le premier pays européen par lequel ils et elles sont arrivé·es pour l’examen de leur demande d’asile) ou des sans-papiers – ont accepté de quitter les lieux après discussion avec le directeur adjoint de cabinet du préfet de région, aux alentours de 22 heures dimanche, alors que les forces de l’ordre étaient postées à l’entrée du centre.

      400 personnes étaient présentes, dont des femmes, parfois enceintes, et des enfants, de nationalité soudanaise, somalienne, érythréenne, tchadienne, malienne ou afghane, et une cinquantaine de Français venus en soutien.

      Dans une vidéo, le sous-préfet, Christophe Aumonier, s’adresse à eux et dit « avoir bien pris en compte » leur situation. « Il n’y a pas de solution miracle. Ce sur quoi je peux m’engager, c’est qu’on essaiera de traiter chacun des cas. Mais il faut parfois être patient car nous avons des difficultés pour mettre tout le monde à l’abri. Mais nous nous y sommes engagés », assure-t-il.

      Selon nos informations, la délégation qui s’est présentée au rendez-vous en préfecture ce jour prévoyait d’insister sur un point : obtenir des solutions « durables » pour les personnes ayant participé à l’action, y compris les habitant·es de l’Ambassade des immigrés, qui occupent depuis quatre mois le bâtiment situé rue Saulnier.

      « Le rendez-vous a donné lieu à des échanges tendus mais respectueux, même si deux logiques s’opposent, la démocratie sociale contre une logique gestionnaire, comptable et technocratique, expliquent des membres de La Chapelle debout présents à celui-ci. Ils nous ont proposé de travailler sur une liste qu’on doit leur envoyer et qu’ils se sont engagés à étudier attentivement. On doit se revoir pour en discuter. » La délégation, qui dit ne pas avoir obtenu de garanties, se dit prête à organiser d’autres actions ailleurs si besoin.

      Contactée, la préfecture de la région Île-de-France n’a pas répondu à nos questions à l’heure où nous publions cet article.

      Cela concerne plus de 300 personnes, précise Yacine, pour qui l’action est une « réussite ». « On a occupé la salle de vie et les dortoirs, qui étaient majoritairement inoccupés. Il y avait quelques Ukrainiens, qui ont été évacués par des membres de l’association Coallia, qui gère le centre. »

      À leur arrivée au centre, les exilé·es ont découvert comment tout était mis en œuvre pour permettre aux Ukrainien·nes de faire leurs démarches sur place, dans des délais restreints – comme l’a documenté Mediapart, l’organisation de leur accueil s’est faite au détriment des autres et de manière décousue –, à l’heure où les arrivées de réfugié·es ukrainien·nes se font de moins en moins nombreuses depuis le mois de mars.

      Services de la préfecture, de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, de l’assurance-maladie et de Pôle emploi… « On a vu qu’il y avait également un service permettant aux Ukrainiens qui ne veulent pas rester en France de remplir une demande pour aller dans un autre pays européen. Pour les autres exilés, c’est incompréhensible, en particulier les dublinés, à qui on ne laisse pas le choix du pays où il peuvent demander l’asile. Les gens sont vraiment affectés par ces différences de traitement. »

      https://www.mediapart.fr/journal/france/190722/paris-les-actions-se-multiplient-pour-obtenir-un-hebergement-aux-exiles

      #résistance #France

    • How the EU Failed Ukraine’s International Students

      Tracing the fate of a cohort of non-white students who fled Russia’s invasion to be confronted with Europe’s hostile environment

      The EU’s decision to offer unprecedented rights and freedoms to refugees fleeing Russia’s invasion of Ukraine less than a month after the war began was widely celebrated. What was not said at the time was that the policy was drawn up to intentionally exclude a considerable number of non-European refugees fleeing the war.

      This double standard was not an accident. The first draft of the legislation implementing the Temporary Protection Directive (TPD), a measure designed to provide protection for at least one year, contained a clause stating that all foreigners residing in Ukraine on a long-term basis – regardless of their country of origin – would be granted the same rights as Ukrainians. When the text came out of the EU council meeting this clause was gone.

      This decision has had very direct consequences on the lives of many of the nearly half a million third-country nationals who were living in Ukraine before the war. The data we collected reveals that only 54,443 of these people were offered temporary protection in the EU. While some 5 million Ukrainians got refuge and rights, many non-Ukrainians were given time limits on how long they could stay, while others were refused any form of protection, rendering them undocumented.

      The tens of thousands of African and South Asian students enrolled in Ukrainian universities on student visas fell outside the scope of the TPD. We spoke to more than 30 students who spent months applying to European universities, only to be told they do not meet visa conditions and language requirements. Some, already traumatised during the invasion, found themselves homeless, while others are facing imminent deportation. While native Ukrainians were met with open arms, many of their non-white classmates met with discrimination and xenophobia.
      METHODS

      In tandem with diaspora groups, activists and lawyers, we spent the past eight months following students who fled Ukraine. Through phone calls, voice-notes and text messages, people shared updates of their attempts to settle in EU countries as they struggled to navigate visa bureaucracies and access accommodation. Students shared email exchanges with European universities and rejection letters from the same institutions that accepted several of their Ukrainian peers.

      We obtained internal documents written by German diplomats on 4 March ahead of the implementation of the TPD revealing that Poland, Austria and Slovakia were among the countries that objected to including third-country nationals in the directive.

      Our partner publications reached out to their individual governments and university authorities to find out what protection measures had been implemented for third-country nationals. This revealed that a myriad of often contradictory rules were being applied. A non-bureaucratic solution was found for Ukrainians, while pragmatic reception and recognition for non-Ukrainians was denied.

      We analysed and collected available data from the European Commission, the International Organisation for Migration (IOM) and national governments, revealing that – despite 325,000 third-country nationals fleeing Ukraine to neighbouring countries since the onset of the war, only 54,443 of them were offered temporary protection in Europe. Of those, we found that nearly a quarter were granted TPD in Portugal, the only country to give the same rights to non-Ukrainians, including international students who were in Ukraine on short-term (one year) visas.
      STORYLINES

      According to NIDO, the Nigerians in diaspora organisation, many international students who fled Ukraine have found themselves homeless, while others are facing imminent removal. Many have been stripped of the rights they previously had in Europe and can no longer access higher education. “We receive dozens of calls from desperate students every day asking for help with accommodation and food, as well as from depressed parents who spent all their money on their children’s tuition in Ukraine. It is so bad that some have told us they were considering suicide”, says Chibuzor Onwugbonu, a volunteer at NIDO.

      In Germany, rights granted to third-country nationals fleeing the conflict vary between federal states. While some cities granted six-month non renewable visas to international students who could prove they were enrolled in Ukrainian universities, others failed to put in place adequate permits. In one instance, a student moved between six different cities and spent months struggling to find accommodation before she ended up sleeping for weeks in Berlin Central train station.

      In the Netherlands, immigration authorities announced that from 19 July onwards they would stop processing applications from non-Ukrainians with safe countries to return to and that those who had obtained the status would not be allowed to apply for renewal. The Dutch government has described the act of these individuals applying to stay in the country after fleeing Ukraine as an “abuse” of the system.

      In France, only 200 international students have been accepted into university. The requirements for entry include demands for a bank account with at least €3,750 and proof that accommodation has been secured (or €7,500 for those who are yet to find housing). These are the regular requirements for international students in France, but they have been waived for Ukrainian students fleeing the war. At least 10 non-Ukrainian students received “obligations to leave the French territory”, a letter threatening them with deportation.

      Dutch MEP Thijs Reuten told us that omitting international students from the protection directive was not an oversight, but a decision aimed at excluding non-Europeans, suggesting an element of racism: “It seems almost certain to me that the countries of origin of the international students played a role”. Cornelia Ernst, German MEP, said the restriction was “solely a political decision”, which was “strongly criticised at the time”, adding: “In practice, this led to first- and second-class protection seekers fleeing Ukraine – an unacceptable discrimination.”

      We also reported on the difficulties facing third-country nationals attempting to join their families in the UK. Deborah, a 19-year old Nigerian medical student who was studying in Kharkiv, has spent months trying to join her parents and siblings in the North of England. Despite fleeing war, and her family being settled in the UK, the British government’s scheme for people fleeing the Russian invasion does not accept applicants who are not Ukrainian or related to a Ukrainian national. UK government data shows that even those who are related to Ukrainians – indicating that they should be eligible – have a far higher refusal rate under the scheme than Ukrainian nationals, at 14 per cent compared with 0.4 per cent.

      https://www.lighthousereports.nl/investigation/how-the-eu-failed-ukraines-international-students

    • Collins, réfugié d’Ukraine en #Allemagne : « Je suis passé d’un étudiant à un gars qui cherche un endroit où dormir »

      Fuyant la guerre en Ukraine, l’étudiant nigérian Collins Okoro a dû faire preuve d’abnégation en arrivant en Allemagne au début du conflit. Entre les méandres administratifs et la recherche désespérée d’un logement, il raconte les hauts et les bas de ses premiers mois dans le pays.

      "C’est remarquable à quel point le vide et le silence peuvent exprimer tant de choses. Après tout ce silence et cette spirale de vide sans fin, je choisis de parler. Car je pense qu’il y a de la lumière au bout du tunnel.

      Avant d’arriver ici, j’aurais prétendu avec assurance que lorsque vous venez d’Ukraine, vous avez le temps de vous installer, de prendre du recul et de trouver votre place. Aujourd’hui, je ne dirais plus la même chose. Je n’avais manifestement pas compris ce que pouvait être la vie en Allemagne.
      Pas d’arrivée triomphale

      Après mon arrivée à Berlin, avec très peu d’argent et juste quelques vêtements, j’ai tenté de vivre au jour le jour, en gardant toute ma tête, sans dépenser d’argent, en essayant de vivre dans le présent. J’avais de l’espoir, ce qui était très important pour moi.

      Lorsque j’ai débarqué à la gare centrale de Berlin, j’ai vu des affiches avec le drapeau ukrainien. Comme je ne savais pas lire l’allemand, je n’ai pas compris qu’il s’agissait d’indications pour pouvoir obtenir de l’aide.

      J’ai suivi un groupe d’Ukrainiens, un peu comme un espion, jusqu’à ce qu’ils me conduisent vers d’autres personnes. C’était le vrai début de mon séjour en Allemagne. J’ai rencontré une femme étonnante, assise devant une bannière représentant des BIPOC (BIPOC est un acronyme anglophone et vient de People of Color, qui fait notamment référence aux noirs). Par rapport aux autres stands, celui-ci n’avait pas été installé par les autorités, mais par des habitants, qui faisaient de leur mieux pour apporter leur aide.

      Je n’ai jamais été du genre à engager la conversation lorsque je rencontre quelqu’un pour la première fois. Mais cette-fois, j’y suis parvenu, et je serai toujours reconnaissant d’avoir eu cette conversation. La dame que j’ai rencontrée, Lily Ackerman, est une Américaine d’une quarantaine d’années. C’est une personne que je n’oublierai jamais. Après notre conversation, j’ai décidé de l’aider au stand. L’aide pour les noirs était plutôt limitée.

      Au cours de mon voyage pour quitter l’Ukraine, j’ai réalisé que nous n’avions jamais fait partie du récit de l’Union européenne. Nous n’étions que des notes de bas de page, que seuls certains lecteurs se souciaient de consulter. Ce constat de la ségrégation m’a motivé à agir.
      Des formations hors de portée

      C’est drôle comme votre statut peut changer en quelques jours. Un peu comme un arbre puissant que l’on transforme en une simple chaise de jardin pour enfants. Je suis passé du statut de mannequin, acteur et étudiant en droit avec des perspectives d’avenir à celui d’un simple gars qui cherche un endroit où pouvoir se reposer. 

      Je n’avais pas de travail, pas d’école, pas de maison, pas d’amis, pas de famille, pas de perspective. On ne peut pas être plus seul que ça.

      Sans logement stable à Berlin, je suis passé d’un hôte bienveillant à un autre, toutes les deux ou trois semaines. J’ai cherché des écoles mais elles exigeaient un compte bloqué de 10 000 euros et un niveau d’allemand B2 pour pouvoir s’inscrire. 

      Il m’était impossible de réunir cette somme. De plus, je n’avais jamais été en Allemagne et n’avais aucune connaissance de la langue allemande. Alors j’ai essayé de trouver une issue en me tournant vers d’autres pays.

      Je me souviens avoir postulé pour une école de théâtre aux États-Unis. J’ai réussi mon entretien, mais les frais de scolarité dépassaient largement mes capacités financières. J’ai tenté en vain de trouver un emploi pour gagner un peu d’argent, de quoi me débrouiller. 

      Finalement, à force de faire des recherches et de glaner des conseils, je suis tombé sur une organisation qui s’est intéressée à mon cas. Il s’agit de BIPOC Ukraine and Friends.

      Lily m’a informée de leur première réunion dans un café. J’ai obtenu plein d’informations sur la façon de naviguer dans le système allemand et de s’en sortir.
      Obstacles bureaucratiques

      Comprendre le fonctionnement d’un gouvernement est une chose. Comprendre comment les fonctionnaires travaillent en est une autre. J’ai appris à mes dépens. Parfois, c’est juste de la bureaucratie. D’autres fois, ce sont des comportements individuels.

      A Berlin, j’ai voulu m’enregistrer dans un centre en tant que réfugié d’Ukraine. 

      À mon arrivée, tout s’est bien passé, jusqu’à ce que j’entre dans le bureau d’une personne qui m’a dit que mes documents étaient soi-disant « incomplets ». Il m’a « conseillé » de demander l’asile ou de retourner en Ukraine, pour obtenir mes documents. Ce n’est que lorsque je suis revenu un autre jour avec des lettres d’un avocat que j’ai été autorisé à m’inscrire.

      J’ai appris que je devais me battre pour passer les étapes. Je me suis engagé en participant à des manifestations et des rassemblements, des lettres ouvertes et des points d’information. J’ai pris la parole lors de réunions, devant des auditoires et j’ai essayé d’éclairer les gens sur la façon dont les minorités ont été traitées.

      Après tout ce temps, ma situation reste floue. Mon deuxième et, je l’espère, dernier rendez-vous avec les services d’immigration approche. J’ai l’impression que nous devons toujours encore faire nos preuves pour obtenir des améliorations dans nos vies. Dans l’ensemble, je considère cependant toute cette phase de ma vie comme une nouvelle expérience. Je ne connais personne qui souhaite s’enfouir vers un endroit inconnu, sans rien emporter, sans rien prévoir. Et c’est ce que j’ai fait.

      J’ai beaucoup appris et j’ai beaucoup gagné. Je me suis fait des amis et j’ai appris ce que sont la joie, l’amour et la paix. J’ai un petit boulot maintenant et un endroit où me poser. J’en suis reconnaissant. Il m’a fallu vivre une guerre pour comprendre et apprécier ce qu’est la paix. Il m’a fallu beaucoup de tristesse et de colère pour comprendre et apprécier ce qu’est la joie. Enfin, il m’a fallu ressentir beaucoup de haine et de peur pour comprendre et apprécier ce qu’est l’amour. Comme je l’ai dit au début, je peux voir la lumière au bout du tunnel".
      https://www.youtube.com/watch?v=DF6dmSgrXyw&embeds_euri=https%3A%2F%2Fwww.infomigrants.net%2F&featu


      J’ai beaucoup appris et j’ai beaucoup gagné. Je me suis fait des amis et j’ai appris ce que sont la joie, l’amour et la paix. J’ai un petit boulot maintenant et un endroit où me poser. J’en suis reconnaissant. Il m’a fallu vivre une guerre pour comprendre et apprécier ce qu’est la paix. Il m’a fallu beaucoup de tristesse et de colère pour comprendre et apprécier ce qu’est la joie. Enfin, il m’a fallu ressentir beaucoup de haine et de peur pour comprendre et apprécier ce qu’est l’amour. Comme je l’ai dit au début, je peux voir la lumière au bout du tunnel".

      https://www.infomigrants.net/fr/post/46084/collins-refugie-dukraine-en-allemagne--je-suis-passe-dun-etudiant-a-un

  • Tories break ranks on immigration to demand safe routes to UK for asylum seekers

    Exclusive: Allowing asylum claims to be made outside the UK is ‘only viable alternative’ to deaths in Channel, says backbencher

    Senior Tories have demanded a radical overhaul of the asylum system to allow migrants to claim refuge at UK embassies anywhere in the world – rather than having to travel to the UK – in a bid to cut the numbers attempting dangerous Channel crossings.

    Ex-cabinet members #David_Davis and #Andrew_Mitchell are among those calling for the change, which marks a stark challenge to the punitive approach taken by Boris Johnson and Priti Patel, who are demanding tighter controls on French beaches and are threatening to “push back” small boats at sea.

    Mr Davis, the former shadow home secretary and Brexit secretary, and Mr Mitchell, the former international development secretary, also poured scorn on the home secretary’s plan to take on powers through her Nationality and Borders Bill to send migrants arriving in the UK to camps in third countries overseas for processing – something that has already been ruled out by Albania after it was named as a potential destination.

    Writing for The Independent, Pauline Latham, a Conservative member of the Commons International Development Committee, said that allowing migrants to claim asylum at embassies abroad was “the only viable alternative to the tragedy of deaths in the Channel and the chaos of our current approach”.

    Twenty-seven migrants, including three children and a pregnant woman, drowned off the coast of France in November when their boat sank, marking the single biggest loss of life of the crisis so far.

    The Home Office is opposing an opposition amendment to the borders bill, due for debate in the House of Commons this week, which would allow migrants to seek “humanitarian visas” in France, allowing them to be transported safely across the Channel to claim asylum.

    But Ms Latham’s proposal goes a step further, removing the need for asylum seekers to pay thousands of pounds to criminal gangs to smuggle them into Europe and then risk their lives in order to reach Britain to make their claim.

    The Mid Derbyshire MP said: “This feels to me like a genuine win-win. The customer base of the people smugglers would vanish, ending deaths in the Channel and ensuring that people seeking safety here can travel in a humane fashion.

    “The UK would be better able to control who arrives here, and anyone arriving without a visa or pre-approved asylum claim would face non-negotiable deportation.”

    Current government policy has “got it the wrong way round” and should be reshaped as a “global resettlement programme” similar to those set up in Syria and being established for Afghanistan, said Ms Latham.

    With the vast majority of those arriving in the UK by small boat having a legitimate claim for asylum, the question Ms Patel must answer is why the UK’s current policy requires them to put themselves in the hands of lawless gangs and then risk their lives in order to be able to submit their paperwork, she said.

    “Desperate people will continue to seek safety in the UK for as long as there is conflict and persecution elsewhere,” said Ms Latham. “But nobody puts their child in an overcrowded, flimsy dinghy on a cold November morning if they think a better alternative is available. So, when we talk about deterrence we have to talk about alternatives.”

    And Mr Davis said: “Instead of a policy which is built solely on keeping people out, the government should consider creating a legitimate route in for genuine refugees. Migrants fleeing repression in Iran or famine in war-torn Yemen are not able to apply at British embassies. The only options available to them are either illegal, or dangerous, or both.”

    The bill being debated in the Commons on Tuesday and Wednesday aims to deter small-boat crossings by restricting the rights of those who enter the UK by “irregular” routes, allowing “offshore” processing of claims in third countries, and speeding up the removal of failed asylum seekers.

    It would also give border and immigration staff powers to redirect boats out of UK territorial waters in a way that MPs and unions have warned could increase the risk of capsize and deaths.

    Mr Davis said that offshoring would represent a “moral, economic and practical failure”, inflicting a terrible ordeal on those fleeing terror and persecution.

    And Mr Mitchell said: “So far, Norway, Rwanda and Albania have all distanced themselves from suggestions that they would host a UK offshore processing centre. The bill seeks a power for a policy which the government is yet to define.

    “Even in Australia, 75 per cent of those sent to remote islands for processing eventually had their claims upheld. Indeed, most of the people crossing the Channel are also having their asylum claims upheld. Offshore processing looks like a policy which delays the inevitable. But at far greater cost to the taxpayer.”

    The Labour MP behind the humanitarian visa amendment, Neil Coyle, said Ms Patel’s proposals “will cause more dangerous routes and more risk to people seeking to reach the UK”. He told The Independent it was “garbage” for her to claim they would reduce the so-called “pull factors” attracting those fleeing war, civil conflict or persecution to Britain.

    “A humanitarian visa offers the government the chance to prove it means what it says, when it says it doesn’t want people to be subjected to gangs and criminality,” said Mr Coyle. “The amendment would save lives, help us meet our international obligations, and prevent money going to smugglers.”

    Stephen Farry of the Alliance Party, backing the amendment alongside MPs from the SNP, Liberal Democrats, Green Party and Labour, said: “Claiming asylum in the UK is a fundamental right, but asylum seekers are in a Catch-22, whereby asylum can only be claimed on UK soil yet the UK provides no safe and legal routes to enter the country for those purposes.

    “The home secretary doesn’t care about asylum seekers, but if she were serious about tackling people smuggling, this visa is a workable solution.”

    But a Home Office spokesperson said: “The government has noted the amendments relating to asylum visas for persons in France and they will be debated in parliament in due course.

    “However, there is the risk of creating a wider pull factor, putting vulnerable people in danger by encouraging them to make dangerous journeys across the Mediterranean and overland to France in order to make claims to enter the UK, motivating people to again entrust themselves to heinous smugglers.”

    The chief executive of the Joint Council for the Welfare of Immigrants, Minnie Rahman, dismissed this argument.

    “Like people who travel to the UK for work or study, people seeking protection in the UK deserve safe ways of getting here,” she said. “If the government were serious about preventing dangerous crossings and upholding our commitment to refugee protection, they would back this amendment. Instead it seems they’re happy to continue driving refugees into smugglers’ boats.”

    And Bridget Chapman, of the Kent Refugee Action Network, said: “The simple fact is that those who have made this journey tell us that they never wanted to leave their homes in the first place. It wasn’t the ‘pull factors’ that made it happen, it was violent ‘push factors’, such as war, conflict and persecution.

    “Once displaced, most people stay close to their country of origin and only a relatively small number come to the UK. There is no evidence whatsoever that making their journey to the UK marginally more safe would be a ‘pull factor’, and we cannot allow that to be used as a reason not to give them better and safer options.”

    Bella Sankey, director of Detention Action, said: “This humanitarian visa amendment would help to prevent deaths in the Channel and undermine the dangerous boat journeys offered by people smugglers.

    “If the government is concerned about a so-called ‘pull factor’, they should show clear evidence of it and then expand this amendment to include refugees further upstream.”

    https://www.independent.co.uk/news/uk/politics/migrants-channel-borders-latham-patel-b1969795.html

    #ambassades #Angleterre #UK #asile #migrations #réfugiés #
    #offshore_asylum_processing #ambassade

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    ajouté à la métaliste sur l’#externalisation de la #procédure_d'asile dans des #pays_tiers :
    https://seenthis.net/messages/900122

    • Dismay at UK’s offshore detention plans for asylum seekers

      Detainees and workers from Australia’s offshore detention camps say Britain is ignoring the failings and financial costs of that system.

      As people who were detained indefinitely in Australia’s offshore camps on Nauru and Manus Island, Papua New Guinea, and as professionals who were employed there, we are deeply concerned that the UK government will attempt this week to grant itself the same power to send people seeking asylum to offshore detention centres.

      We have watched with dismay as the UK government has drafted legislation that allows for the indefinite detention offshore of women, men and children, refused a probing amendment to exclude survivors of trafficking and torture from being sent to offshore detention centres, and ignored the failings and financial costs of the Australian experiment, which saw the Australian government spend £8.6bn to detain 3,127 people in appalling conditions, while failing to end dangerous boat journeys.

      Two of us lost a combined 13 years of our lives trapped in offshore camps, with no indication of when we would be free. Others in the same situation lost their lives. The authorities insisted we would never reach Australia. Now, like more than two-thirds of the people detained offshore, we are recognised refugees, living in the US and Australia. We cannot imagine why any country would replicate such a cruel, costly and ultimately futile system.

      Finally, consider why a government that has no intention of detaining children offshore would give itself the power to do so. Or why any law that claims to protect people entitled to asylum would instead hide them away in offshore detention camps.

      Authors: Thanush Selvarasa and Elahe Zivardar Former offshore detainees, Dr Nick Martin and Carly Hawkins Former medical officer and former teacher, Nauru detention centre

      https://www.theguardian.com/uk-news/2021/dec/05/dismay-at-uk-offshore-detention-plans-for-asylum-seekers?CMP=Share_iOSA

  • Decolonizzare la città. Dialoghi Visuali a Padova -
    Decolonizing the city. Visual Dialogues in Padova

    Il video partecipativo, realizzato con studenti e studentesse del laboratorio Visual Research Methods (prof.ssa Annalisa Frisina) del corso LM Culture, Formazione e Società Globale, esplora l’eredità coloniale inscritta nelle vie e piazza di Padova. I sei protagonisti/e del video, artist* e attivit* afrodiscendenti, dialogano con questi luoghi, mettendo in atto contronarrazioni intime e familiari che sfidano la storia ufficiale, lasciando tracce del loro passaggio.

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    The participatory video made by the students of Visual Research Methods laboratory (prof. Annalisa Frisina), Master’s degree in Cultures, Education and Global Society, explores the colonial legacy of Padova’s roads and squares. Six afro-descendent artists and activists interact with these places, giving life to intimate counter-narratives that challenge the official history, leaving their personal traces.

    https://www.youtube.com/watch?v=B6CtMsORajE

    Quelques images tirées du film :


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    Où on apprend que les enfants « métissés » étaient appelés « #figli_di_due_bandiere » (fils de deux drapeaux)

    #villes #décolonial #décoloniser_la_ville #Italie #Padoue #Padova #héritage_colonial #colonialisme #toponymie #toponymie_politique #géographie_urbaine #historicisation #histoire #traces #mariage_mixte #Corne_de_l'Afrique #colonialisme_italien #Antenore #fascisme #histoire_coloniale #impérialisme #piazza_Antenore #citoyenneté #néo-colonialisme #pouvoir #Amba_Aradam #blessure
    #TRUST #Master_TRUST
    #film #film_documentaire

    ping @cede @karine4 @isskein

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    Ajouté à la métaliste sur le #colonialisme_italien :
    https://seenthis.net/messages/871953

  • Après 20 ans sans salaire, des employées de diplomates à Genève se rebiffent Sébastien Faure/boi

    Elles sont une demi-douzaine pour un mouvement sans précédent dans la Genève internationale : des domestiques philippines se rebiffent contre les membres de la mission pakistanaise à l’ONU. Elles affirment qu’elles sont employées par les diplomates sans être payées, depuis vingt ans pour trois d’entre elles.
    Rosario est arrivée en 2002 à Genève, laissant trois enfants aux Philippines. Issue d’une famille très modeste, elle croit avoir trouvé une aubaine, confie-t-elle dimanche dans Mise au Point : un contrat à 1500 francs plus la nourriture, le logement, l’assurance et l’AVS au pays.

    Mais à son arrivée à Genève, raconte-t-elle, on lui explique l’arrangement : en fait, elle ne touchera rien du tout mais recevra seulement une carte de légitimation qui lui donnera un statut en Suisse. Pour ce qui est des revenus, ce sera à elle de trouver des petits boulots au noir dans des familles genevoises, après son travail pour les diplomates pakistanais.

    Pour Rosario, le système a duré jusqu’au début de cette année, soit près de 20 ans, et au service de six diplomates successifs.

    Une « exploitation crasse de la force de travail » dénoncée
    Mise au Point a contacté le dernier secrétaire de la mission chez qui travaillait Rosario, un homme qui prononce régulièrement des discours devant les autres diplomates au Palais de l’ONU. Il affirme qu’il payait bien Rosario mais ne pas avoir de relevés bancaires car il la payait en cash.

    Ces femmes sont allées se plaindre au syndicat SIT et certaines ont déposé des plaintes pénales contre les diplomates qui les ont employées.

    Mirella Falco, du SIT, explique que le régime des cartes de légitimation est spécifique au monde de la diplomatie : « Cette carte est reliée à l’employeur et si l’employeur met fin au contrat, il n’y a plus de permis de séjour et l’employé n’a plus aucune raison d’être en Suisse. » Elle voit dans le système qui aurait été mis en place au sein de la mission pakistanaise « de l’exploitation crasse de la force de travail et une atteinte à la dignité humaine ».

    La mission pakistanaise se défend
    Interpellée, la mission pakistanaise qui fait la demande de ces cartes de légitimation a répondu à la RTS que « les témoignages mentionnant du travail non payé à une échelle systémique sont à la fois malveillants et faux. Le bien-être de nos employés est parmi nos premières priorités ».

    C’est la Mission suisse auprès de l’ONU qui distribue ces cartes de légitimation et surveille le respect des contrats des employés. Elle dit les recevoir en personne une fois par année. Le chef de la mission, Jürg Lauber, confirme une plainte liée à la mission du Pakistan : « Il y a quelques personnes qui n’ont pas respecté les règles. On est en train de rectifier ça. On a pris contact avec la mission, il faut s’assurer que les droits des employés domestiques soient respectés. »

    La Mission suisse dit ne pas être informée de pratiques similaires dans d’autres missions étrangères à Genève. Mais Angela, qui aussi porté plainte pour travail non payé chez des diplomates pakistanais (interrogé, le dernier en poste nie ces accusations), estime que beaucoup de membres de la communauté philippine sont ainsi exploités.

    Elle dit avoir elle-même travaillé un an sans salaire pour la mission d’un autre pays qu’elle ne souhaite pas nommer. Ce qui a décidé Angela à se plaindre, c’est l’agressivité des diplomates pakistanais et le fait de se retrouver acculée avec le Covid. Tous ses employeurs au noir ont cessé de l’appeler depuis le début de la pandémie et elle a été obligée de s’endetter pour continuer à travailler gratuitement.

    La vidéo : https://www.rts.ch/play/tv/mise-au-point/video/sebastien-faure-auteur-de-lenquete--femmes-de-menage-sans-salaire-?urn=urn:rts:v

    Source : https://www.rts.ch/info/regions/geneve/12255999-apres-20-ans-sans-salaire-des-employees-de-diplomates-a-geneve-se-rebif

    #esclavage #esclavage_moderne #exploitation #Femmes #diplomatie #ambassades #Genève #Suisse #travail #racisme  #exploitation #femmes #capitalisme #Pakistan

  • Décryptage du rapport Duclert : une analyse superficielle qui exonère à tort l’État français
    https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/la-france-et-le-genocide-des-tutsis/article/decryptage-du-rapport-duclert-une-analyse-superficielle-qui-exonere-a-tort-l

    Survie a lu et analysé le rapport de la #commission_Duclert sur les archives relatives au rôle de la #France au #Rwanda entre 1990 et 1994. En attendant la publication annoncée de milliers de documents, il n’apporte pas vraiment d’éléments nouveaux... mais occulte ou édulcore les questions les plus compromettantes. La commission se permet ainsi de conclure "responsable mais pas coupable", au sujet d’une complicité qu’elle a par ailleurs évité d’aborder en ne travaillant que sur les #archives. A ce titre, elle fait pire que la mission d’information parlementaire de 1998, qui avait déjà contribué, dans un exercice similaire, à masquer la complicité de l’ #État_français.

    La manière dont l’État français s’est engagé auprès du régime génocidaire étant connue et documentée depuis longtemps, ce rapport ne contient rien de véritablement nouveau. En travaillant à partir d’un matériau parcellaire (les archives versées uniquement), la commission ne pouvait pas mener l’enquête approfondie qui aurait permis d’éclairer certaines zones d’ombre. Pour cela, il aurait fallu qu’elle croise les documents avec d’autres sources (témoignages en particulier) et qu’elle les confronte avec les travaux existant sur la question pour tirer les conclusions qui s’imposent.

    Des points cruciaux ne sont abordés que de manière superficielle, comme la formation du Gouvernement Intérimaire Rwandais sous la houlette de l’ #ambassade de France, ou l’abandon à leurs tueurs de 2 000 #Tutsis à #Bisesero, sans que la hiérarchie militaire ne donne l’ordre de les secourir [1]. De plus, les aspects les plus controversés de la présence française au Rwanda sont occultés, comme le rôle éventuel joué par des militaires ou des mercenaires français dans l’attentat du 6 avril 1994 et dans la défense de #Kigali entre avril et juillet 1994, les raisons de la présence officieuse de soldats français pendant le génocide, les livraisons d’armes pendant le #génocide, l’ordre donné de réarmer les auteurs du génocide une fois ceux-ci passés au #Zaïre, ou encore le soutien apporté par les autorités françaises au projet de reconquête du Rwanda par le régime génocidaire.

    Par ailleurs, en désignant des boucs émissaires, l’état-major particulier du chef de l’État et l’ambassadeur de France à Kigali notamment, la commission attribue l’essentiel des responsabilités de la faillite de la politique française au Rwanda au président #François_Mitterrand, aujourd’hui décédé, à ses conseillers militaires, à l’ambassadeur #Georges_Martres, sans qu’un lien soit fait avec la politique ordinaire de la France en #Afrique.

    Car si ces acteurs, prisonniers de représentations idéologiques erronées – ethnicisme, lutte d’influence avec les « Anglo-Saxons » - se sont montrés incapables de prendre en compte le génocide en préparation puis en cours, beaucoup d’éléments montrent que ces représentations n’étaient pas le propre de Mitterrand et d’un petit cercle de conseillers. Elles étaient largement partagées au sein du Quai d’Orsay et de l’état-major des armées. Cette analyse des réalités africaines en termes ethnicistes et de rivalité géopolitique avec les Anglo-Saxons remonte à la #colonisation et imprégnait en 1994 toutes les structures de l’État ayant à faire avec l’Afrique. La commission s’exonère ainsi d’évoquer la #Françafrique et de questionner le fonctionnement global des institutions.

    Pour finir, c’est une « responsabilité accablante » qui est évoquée, mais en rejetant toute idée de complicité. La commission donne pour cela une définition très étroite de la #complicité_de_génocide, selon laquelle le complice doit partager l’intention. La commission exclut donc que les autorités françaises aient pu se rendre complices des auteurs du génocide. Cette définition est erronée. Se rend en effet complice celui qui aide le criminel, en connaissance de cause, avec un effet sur le crime commis, sans pour autant partager son intention. A l’évidence la commission est sortie de son rôle d’analyse historique pour endosser un rôle politique au service du pouvoir.

    [1] Ils seront secourus à l’initiative de militaires français. Sur cet épisode, voir cet article : https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/dossier-judiciaire-bisesero-mobilisation-des-parties-civiles-pour-eviter-un

    • Commission Duclert sur le rôle de la France au Rwanda : l’Elysée privilégie « l’aveuglement » pour masquer la complicité française

      https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/la-france-et-le-genocide-des-tutsis/article/commission-duclert-sur-le-role-de-la-france-au-rwanda-l-elysee-privilegie-l

      La « commission Duclert » vient de remettre à #Emmanuel_Macron le fruit de 2 ans de travail sur le rôle de la France au Rwanda, avant et pendant le génocide des Tutsis : un rapport de 1200 pages, dont l’ #Élysée a savamment fait la promotion auprès des journalistes en annonçant qu’il concluait à une « responsabilité accablante », basée sur une « faillite de l’analyse » et un « aveuglement » des décideurs français. Selon les éléments communiqués par l’exécutif français, la commission Duclert rejette l’accusation de « complicité de génocide », au prétexte que l’intention génocidaire n’était pas partagée par Paris.

      Pour l’association #Survie, qui dénonce depuis 1994 le soutien de la France aux génocidaires rwandais, ces premiers éléments rappellent les conclusions édulcorées de la mission d’information parlementaire de 1998, ou encore les propos du Président #Sarkozy en 2010 qui faisaient état de "graves erreurs d’appréciation" au sujet du Rwanda.

      Comme l’explique #Patrice_Garesio, co-président de Survie, « Si l’Élysée matraque de tels éléments avant même que chercheurs et associations aient pu lire le rapport, c’est mauvais signe : c’est une tentative de saborder tout débat. Parler de "faillite de l’analyse" et d’"aveuglement" est un recul, car on savait avant même la création de la commission que des analyses très lucides et pertinentes ont été transmises jusqu’à la tête de l’État et qu’elles ont été sciemment écartées par les décideurs de l’époque. La complicité est documentée, l’enjeu serait plutôt de compléter le tableau, hélas très cohérent sur la base de ce qui est déjà public. »

      Aujourd’hui, il n’y a plus de doute, seulement des dénégations. Le soutien français aux génocidaires n’avait rien d’aveugle ; il s’est même poursuivi après le génocide, alors que les faits étaient connus. Comme l’association Survie l’a déjà montré dans ses publications [1] : il y a bien eu #complicité, dans le sens d’un appui effectif qui a facilité le crime,et en connaissance de cause. Rappelons que #Maurice_Papon a été condamné pour complicité de crime contre l’humanité malgré l’absence "d’intention génocidaire".

      L’association Survie, à travers un travail collectif de ses militants, va analyser en profondeur le rapport et en publiera prochainement un compte rendu ; ainsi, le débat pourra s’établir sur des bases concrètes, plutôt que sur des effets d’annonce du Palais.

      Contact presse : Mehdi Derradji - chargé de la communication et des relations externes (+33 6 52 21 15 61) mehdi.derradji@survie.org

      [1] Voir notamment : Raphaël Doridant et François Graner, L’État français et le génocide des Tutsis au Rwanda, coll. Dossiers noirs, Agone-Survie, Marseille, 2020. https://agone.org/livres/letatfrancaisetlegenocidedestutsisaurwanda/9782748903942

    • Rwanda : les créanciers du génocide
      https://cadtm.org/Rwanda-les-creanciers-du-genocide

      Les principaux fournisseurs d’armes au Rwanda entre 1990 et 1994 sont la France, la Belgique, l’Afrique du Sud, l’Égypte et la République populaire de Chine. Cette dernière a fourni 500 000 machettes. L’Égypte - dont le vice-ministre des Affaires étrangères, chargé des relations avec l’Afrique, n’était autre que Boutros Boutros-Ghali - a offert au Rwanda un crédit sans intérêt pour lui permettre d’acheter des armes d’infanterie pour un montant de six millions de dollars en 1991. Une fois le génocide déclenché, alors que l’ONU avait décrété, le 11 mai 1994, un embargo sur les armes, la France et la firme britannique Mil-Tec ont fourni des armes à l’armée criminelle via l’aéroport de Goma au Zaïre (Toussaint, 1996). Une fois Kigali, capitale du Rwanda, prise par le FPR, plusieurs hauts responsables du génocide ont été reçus à l’Élysée. Les autorités rwandaises en exil ont installé à Goma avec l’aide de l’armée française le siège de la Banque Nationale du Rwanda. Celle-ci a effectué des paiements pour rembourser l’achat d’armes et en acheter de nouvelles jusque fin août 1994. Les banques privées Belgolaise, Générale de Banque, BNP, Dresdner Bank... ont accepté les ordres de paiement des génocidaires et ont remboursé les créanciers du génocide.

    • The Silence: 25 Years Since the Rwandan Genocide
      https://www.magnumphotos.com/newsroom/conflict/gilles-peress-silence-25-years-since-rwandan-genocide
      Author Philip Gourevitch’s memories and Gilles Peress’ images: the importance of documenting atrocity


      Gilles Peress Near the border of Rwanda. Goma. Zaire. 1994. © Gilles Peress | Magnum Photos

      “The immensity of this crime is beyond our imagination and is only surpassed by the unbelievable indifference of the West”
      – Gilles Peress

  • #Rwanda : un document prouve l’ordre de la France de laisser s’enfuir les génocidaires

    Juillet 1994. Les principaux membres du gouvernement responsable du #génocide des #Tutsis sont dans une zone contrôlée par l’#armée_française. Leur arrestation est possible et même réclamée. Un document inédit, émanant du cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, #Alain_Juppé, prouve aujourd’hui que la #France a préféré les laisser partir. Il est signé de l’actuel patron de la DGSE.

    L’#ordre_politique de laisser s’enfuir à l’été #1994 les principaux membres du gouvernement responsable du génocide des Tutsis au Rwanda, alors que leur arrestation était possible et même demandée, a été directement pris par le #gouvernement_français, selon un document inédit émanant du ministère des affaires étrangères.

    Le massacre des Tutsis du Rwanda, dernier génocide du XXe siècle, a fait près d’un million de morts en cent jours, entre avril et juillet 1994.

    Le document, dont Mediapart a pu prendre connaissance, apparaît vingt-cinq ans après les faits comme la pièce manquante de l’un des épisodes les plus sombres de la #responsabilité française dans la tragédie rwandaise.

    Il a été obtenu par le chercheur François Graner, auteur de plusieurs livres sur le Rwanda et membre de l’association Survie, qui a récemment pu accéder à des #archives inexplorées de la présidence Mitterrand grâce à une décision du Conseil d’État. La plus haute juridiction administrative a mis fin, en juin dernier, à des années d’entraves orchestrées par les gardiens de la mémoire de l’ancien chef de l’État et de la politique de la France durant le génocide des Tutsis.

    Le document en question est un télégramme « confidentiel diplomatie » émis le 15 juillet 1994 par le cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, Alain Juppé, aujourd’hui membre du Conseil constitutionnel, et adressé à l’ambassadeur #Yannick_Gérard, alors représentant du Quai d’Orsay auprès des militaires français envoyés au Rwanda dans le cadre de l’#opération_Turquoise.

    L’ambassadeur Gérard avait réclamé le jour même des « instructions claires » du gouvernement (pour lui et pour l’armée française) afin de procéder sur place à l’#arrestation des autorités qui, écrivait-il dans un télégramme, « portent une lourde responsabilité dans le génocide ». Le fait est que les principaux membres du gouvernement génocidaire, au premier rang desquels son président, #Théodore_Sindikubwabo, se trouvaient alors dans une zone intégralement contrôlée par l’armée française, à proximité du Zaïre (aujourd’hui République démocratique du Congo), pays frontalier du Rwanda.

    « Nous n’avons pas d’autre choix, quelles que soient les difficultés, que de les arrêter ou de les mettre immédiatement en résidence surveillée en attendant que les instances judiciaires internationales compétentes se prononcent sur leur cas », soulignait le haut fonctionnaire, conscient d’avoir des génocidaires identifiés à portée de main.

    La réponse du gouvernement français fut pourtant à l’exact opposé de la requête de l’ambassadeur Gérard. Dans le télégramme du 15 juillet, rédigé à 18 h 22 et adressé à « Yannick Gérard seul », le cabinet du ministre Juppé donne ainsi pour instruction de transmettre aux autorités génocidaires « notre souhait qu’elles quittent » la #zone_contrôlée par les forces armées françaises.

    Le message à transmettre semble si délicat que le cabinet Juppé demande à son ambassadeur de ne pas s’entremettre personnellement avec les génocidaires. « Vous pouvez en revanche utiliser tous les canaux indirects et notamment vos contacts africains, en ne vous exposant pas directement », peut-on lire dans le télégramme, qui a d’ailleurs pour titre : « Le département vous autorise à passer notre message de manière indirecte ».

    « Vous soulignerez que la communauté internationale et en particulier les Nations unies devraient très prochainement déterminer la conduite à suivre à l’égard de ces soi-disantes autorités », précise encore le télégramme, qui, insistant de la sorte sur une décision à venir de la communauté internationale, offre un #sauf-conduit au gouvernement génocidaire pour quitter sans la moindre anicroche le territoire sous contrôle français. Et passer au #Zaïre.

    Le document porte la signature « #EMIE ». Il s’agit de #Bernard_Émié, l’actuel directeur de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), l’un des principaux #services_secrets français, qui était à l’époque conseiller d’Alain Juppé au ministère des affaires étrangères, avant de rejoindre l’Élysée sous la présidence de Jacques Chirac.

    Sollicité par Mediapart, Alain Juppé a fait savoir qu’il ne souhaitait pas répondre à nos questions. Également sollicité, Bernard Émié n’a, pour sa part, pas donné suite.

    Un quart de siècle après la tragédie rwandaise, il n’y a aujourd’hui pas de doute sur le fait que la France savait qui étaient les organisateurs et commanditaires du génocide, et où ils se trouvaient. C’est donc en toute connaissance de cause que le gouvernement et l’Élysée les ont laissés filer.

    D’innombrables documents et témoignages, obtenus depuis des années par des historiens, des journalistes ou des juges, ont déjà largement permis de documenter que la France avait connaissance d’un génocide en préparation avant que celui-ci n’ait lieu et qu’elle a maintenu un soutien indéfectible aux autorités en cause quand le pire a commencé.

    Cela est si vrai que le gouvernement génocidaire, constitué au lendemain d’un attentat ayant tué le président #Habyarimana, jugé trop modéré par la frange la plus radicale du pouvoir hutu, a été formé, le 8 avril 1994, dans les locaux mêmes de l’#ambassade de France à Kigali, sous le nom de « #gouvernement_intérimaire_du_Rwanda » (#GIR).

    C’est un certain Théodore #Sindikubwabo, ancien président de l’Assemblée nationale, qui sera choisi pour diriger le pays avant que celui-ci ne s’enfonce dans les ténèbres. Pédiatre de formation, Sindikubwabo est considéré comme l’un des commanditaires du génocide, soupçonné d’avoir personnellement incité aux #massacres – notamment à l’occasion d’un discours retransmis le 19 avril sur Radio Rwanda – et d’avoir démis de leurs fonctions les préfets et autorités qui ne tuaient pas assez.

    Sindikubwabo fait partie des responsables politiques du génocide qui ont pu rallier le Zaïre en juillet 1994 avec l’aval du gouvernement français. Il est mort en 1998 dans des circonstances mal connues et sans jamais avoir été inquiété pour ses crimes.

    L’ordre de Juppé, l’ombre de Védrine

    Il existe dans les archives disponibles la trace d’un contact, en mai 1994, entre Sindikubwabo et le général #Christian_Quesnot, le chef d’état-major particulier du président de la République. Dans une note du 6 mai écrite à l’attention de #François_Mitterrand, après son échange avec le nouveau chef de l’État génocidaire – les massacres ont débuté un mois plus tôt –, le militaire indique que le dignitaire rwandais le « remercie » pour tout ce qu’il a « fait pour le Rwanda ».

    Dans ses commentaires personnels à la fin du document, le général Quesnot préconise alors d’appuyer, même au prix d’une « #stratégie_indirecte », le pouvoir rwandais face aux forces armées tutsies. Le général Quesnot dit, en effet, craindre l’établissement d’un « #Tutsiland » (sic), le tout « avec l’aide anglo-saxonne et la complicité objective de nos faux intellectuels remarquables relais d’un lobby tutsi auquel est également sensible une partie de notre appareil d’État ». Le document est annoté de la main du secrétaire général de la présidence de la République, #Hubert_Védrine, d’un mot : « Signalé ».

    Pourtant, sur le terrain, la diplomatie et les services de renseignements français ne cessent d’accumuler des éléments sur la responsabilité du gouvernement intérimaire dans le génocide.

    Un télégramme « confidentiel diplomatie » daté du 10 juillet 1994 de l’ambassadeur Gérard, également découvert par le chercheur François Graner grâce à la décision du Conseil d’État de juin dernier, évoque même « un témoignage digne de foi qui confirme la responsabilité collective et personnelle des autorités de #Gisenyi [le gouvernement génocidaire – ndlr] dans les massacres ». Le diplomate ajoute que, selon d’autres témoignages « directs et concordants », le président Sindikubwabo a personnellement appelé à plusieurs reprises à « l’élimination totale des Tutsis » et que l’une de ses ministres a, en particulier, réclamé le massacre « des femmes et des enfants ».

    Cinq jours plus tard, c’est donc en parfaite connaissance de cause que l’ambassadeur Gérard demande des « instructions claires » au gouvernement pour pouvoir mettre aux arrêts ou, au moins, en résidence surveillée les génocidaires.

    En vain.

    À Paris, la question de l’arrestation des membres du gouvernement génocidaire a pourtant été source de confusion au sommet de l’État, comme le prouvent plusieurs autres documents.

    Dans les archives de l’Élysée figure notamment la copie d’une dépêche émise depuis Paris, le 15 juillet en fin de matinée, par l’agence de presse Reuters sous un titre éloquent : « Paris prêt à arrêter les membres du gouvernement ». « Les membres du gouvernement intérimaire rwandais […] seront mis aux arrêts s’ils tombent aux mains de soldats de français dans la #zone_humanitaire_protégée par l’opération Turquoise », indiquait l’agence de presse internationale, qui disait tenir ses informations d’une « source autorisée à Paris ».

    Seulement voilà : une annotation manuscrite, inscrite par Hubert Védrine dans la marge de la dépêche imprimée par les services de l’Élysée, montre qu’il n’en était, en réalité, rien. « Lecture du Président : ce n’est pas ce qui a été dit chez le Premier ministre », peut-on lire sous la plume du secrétaire général de l’Élysée.

    Le document du cabinet Juppé sur l’ordre de laisser filer les génocidaires, daté lui aussi du 15 juillet, vient aujourd’hui conforter le soupçon d’un ministre des affaires étrangères, Alain #Juppé, en accord avec la politique élyséenne, bien qu’appartenant à un gouvernement de cohabitation dirigé par #Édouard_Balladur. Ce dernier fera d’ailleurs savoir à ce sujet, en 1998, qu’il « n’était pas question » aux yeux de Mitterrand « de châtier les auteurs hutus du génocide ». « Et il n’était pas question aux miens, ajoutait-il, de permettre à ceux-ci d’aller se mettre à l’abri au Zaïre ».

    C’est pourtant exactement ce qui s’est passé, et ce, sur ordre de son propre ministre Alain Juppé. Sur le terrain, l’#exfiltration est pilotée par le lieutenant-colonel #Jacques_Hogard, qui commande le groupement Sud-Turquoise au Rwanda, formé de troupes de la #Légion_étrangère.

    Dans un supplément spécial consacré aux opérations au Rwanda, la revue militaire Képi blanc a résumé des années plus tard la situation dans un style d’une raideur militaire qui ne fait guère dans la contorsion : « L’#EMT [#état-major_tactique] provoque et organise l’#évacuation du gouvernement de transition rwandais vers le Zaïre. »

    Le lieutenant-colonel #Hogard confirmera lui-même à plusieurs occasions les faits, notamment au journaliste David Servenay et à l’universitaire Gabriel Périès, auteurs du livre Une guerre noire (La Découverte). Dans cet ouvrage, le militaire raconte être allé voir en ces termes son homologue zaïrois pour lui parler des génocidaires qu’il s’apprêtait à laisser partir : « Vous ne fermez pas les #frontières, vous les laissez poreuses, je ne veux pas que vous empêchiez ces gens-là de partir, le Zaïre est grand, ils n’ont que ça pour partir. »

    Dès le 16 juillet, c’est-à-dire au lendemain du télégramme envoyé par le cabinet Juppé, le lieutenant-colonel Hogard rencontre le chef de l’État du Rwanda pour lui faire savoir que lui et ses hommes doivent – et peuvent – partir dans les vingt-quatre heures. Et c’est ainsi que la France escorte du Rwanda à la frontière zaïroise parmi les principaux responsables politiques du génocide.

    Un militaire de l’opération Turquoise, Guillaume Ancel, a raconté des années plus tard dans un livre (Rwanda, la fin du silence, éditions Belles Lettres) avoir vu le lieutenant-colonel Hogard quelque temps après cette scène. « Certes, il est convaincu que ce n’est pas notre rôle de rendre justice, mais escorter poliment des décideurs qui ont de terribles responsabilités dans les massacres et “du sang jusqu’au cou” le tourmente. Il aurait pu les arrêter, il aurait même pu les neutraliser, mais ses ordres ne lui laissaient pas le choix », a-t-il témoigné.

    Un document déclassifié de l’état-major de l’armée française confirme que les membres du gouvernement génocidaire « ont franchi la frontière rwando-zaïroise » le 17 juillet en fin de journée, « l’option clairement avouée étant de replier également le reste des #FAR [#forces_armées_du_gouvernement – ndlr] avec leur armement au Zaïre, afin de poursuivre la #résistance depuis ce pays ».

    En un mot : que les génocidaires soient à l’abri pour que le sang, lui, continue de couler.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/140221/rwanda-un-document-prouve-l-ordre-de-la-france-de-laisser-s-enfuir-les-gen
    #génocide #Quesnot #Balladur #Edouard_Balladur

    signalé par @arno : je mets ici le texte complet

    • Une guerre noire. Enquête sur les origines du génocide rwandais (1959-1994)

      Au printemps 1994, au Rwanda, près d’un million de personnes ont été exterminées en quelques semaines. À un rythme trois fois plus élevé que le génocide des juifs d’Europe. Comment un tel crime de masse a-t-il été rendu possible ? Quelle est la responsabilité des grandes puissances occidentales et de la France, surtout, si proche des génocidaires ? Après quatre ans d’enquête, dans les archives du monde entier, sur le terrain, auprès des militaires français, rwandais et belges, à interroger diplomates et politiques, Gabriel Périès et David Servenay tentent de répondre à ces questions. À l’aide de témoignages inédits et de documents confidentiels, ils lèvent le voile sur l’une des origines secrètes du génocide rwandais : la doctrine française de la « guerre révolutionnaire ». Des opérations clandestines menées dans le « pré carré » au moment de la décolonisation, en passant par le trouble jeu du général De Gaulle, ils établissent la généalogie de ce qui fut pendant des décennies un véritable savoir-faire de l’armée française. Formalisé pendant la guerre d’Indochine et appliqué en Algérie, il a largement inspiré les dispositifs répressifs mis en place dans un grand nombre d’États africains… dont le Rwanda des années 1960. Et ce n’est pas le fruit du hasard si l’un des meilleurs élèves africains de la « guerre révolutionnaire » perpétra, plus de trois décennies plus tard, le dernier génocide du XXe siècle : hiérarchies politico-militaires parallèles, gardes présidentielles transformées en escadrons de la mort, action psychologique, quadrillage administratif et militaire des populations formèrent un système efficace susceptible de mobiliser toute une société au service du projet exterminateur de ses dirigeants. Cette histoire inconnue éclaire d’un jour nouveau la responsabilité de l’État français dans le génocide rwandais.

      https://www.editionsladecouverte.fr/une_guerre_noire-9782707149145

      #livre #Gabriel_PÉRIÈS #David_SERVENAY

    • Rwanda, la fin du silence. #Témoignage d’un officier français

      Au lourd secret qui entoure le véritable rôle de la France et de son armée lors du génocide des Tutsi au Rwanda, #Guillaume_Ancel oppose la vérité de ses carnets de terrain, témoignage des missions auxquelles il a participé durant l’opération Turquoise. La fin du silence est aussi le récit du combat mené par cet ancien officier pour faire savoir ce qui s’est réellement passé durant cet été 1994 et « rendre hommage, dignement, aux centaines de milliers de victimes rwandaises que nous n’avons pas su empêcher. »
      Officier de la Force d’action rapide, détaché au sein d’une unité de la Légion étrangère, le capitaine Ancel mène avec ses hommes des opérations d’extraction de personnes menacées. Sous couvert d’une opération humanitaire destinée à mettre fin aux massacres, cet officier comprend vite que la France soutient le gouvernement génocidaire rwandais dont elle a formé l’armée. Il décrit les errements de l’armée française, ballotée au gré de décisions politiques dont les motivations sont toujours tenues secrètes, les archives officielles restant inaccessibles. Ce témoignage dévoile également certains épisodes méconnus de cette opération « #humanitaire » durant laquelle l’armée française a tué. Parfois pour défendre, parfois pour des raisons moins avouables.

      https://www.lesbelleslettres.com/livre/3565-rwanda-la-fin-du-silence
      #opération_humanitaire

  • L’oublieuse mémoire coloniale italienne

    Commencée avant le fascisme, galvanisée par Mussolini, la colonisation par l’Italie de la Libye, de la Somalie et de l’Ethiopie fut marquée par de nombreuses atrocités,loin du mythe d’une occupation douce. Longtemps refoulés, ces souvenirs commencent à ressurgir

    Tout commence dans le centre de Rome, sur l’Esquilin, la plus haute des sept collines antiques. Plus précisément dans la cage d’escalier d’un immeuble sans ascenseur, situé à deux pas de la piazza Vittorio. Dans ce quartier à deux pas de la gare Termini, les prix de l’immobilier sont beaucoup plus modestes que dans le reste du centre, si bien que l’Esquilin est devenu, depuis une vingtaine d’années, un lieu de concentration de l’immigration africaine et asiatique, ce qui n’est pas sans provoquer des tensions le squat, occupé depuis 2003 par les militants néofascistes de CasaPound, est juste à côté.

    C’est donc là, en rentrant chez elle, épuisée, dans la touffeur d’une après-midi de fin d’été 2010, qu’Ilaria Profeti se retrouve nez à nez avec un jeune homme arrivé d’Ethiopie par la route des migrants. Dans un italien presque sans accent, celui-ci lui assure, documents à l’appui, qu’il est le petit-fils de son père, Attilio, un homme de 95 ans qui est resté, sa longue vie durant, plus que discret sur ses jeunes années de « chemise noire » fasciste, en Abyssinie.

    Levons toute ambiguïté : la scène qui vient d’être décrite est tout à fait vraisemblable, mais elle est issue d’une oeuvre de fiction. Il s’agit en réalité des premières pages d’un roman, le superbe Tous, sauf moi (Sangue giusto), de Francesca Melandri (Gallimard, 2019), qui dépeint avec une infinie subtilité les angles morts de la mémoire coloniale italienne. Le fil conducteur de la narration est le parcours sinueux d’un vieil homme dont le destin finalement assez ordinaire a valeur d’archétype.

    Issu d’un milieu plutôt modeste, Attilio Profeti a su construire à sa famille une position plutôt enviable, en traversant le mieux possible les différents mouvements du XXe siècle. Fasciste durant sa jeunesse, comme l’immense majorité des Italiens de son âge, il est parti pour l’Ethiopie, au nom de la grandeur impériale. Après la chute de Mussolini et la fin de la guerre, il parviendra aisément à se faire une place au soleil dans l’Italie du miracle économique, jouant de son physique avantageux et de ses amitiés haut placées, et enfouissant au plus profond de sa mémoire le moindre souvenir de ses années africaines, les viols, les massacres, les attaques chimiques. C’est ce passé, refoulé avec une certaine désinvolture, qui revient hanter ses enfants, trois quarts de siècle plus tard, sous les traits d’un jeune homme d’une vingtaine d’années, arrivé à Rome après une interminable traversée.

    Comme l’héroïne de Tous, sauf moi, Francesca Melandri vit sur l’Esquilin, au dernier étage d’un immeuble à la population mélangée. Et à l’image d’Ilaria, c’est sur le tard qu’elle a découvert ce pan escamoté de l’histoire italienne. « Quand j’étais à l’école, on ne parlait pas du tout de ce sujet-là, confie-t-elle depuis sa terrasse dominant les toits de la ville. Aujourd’hui ça a changé, il y a eu une prise de conscience, et de nombreux travaux universitaires. Pourtant cette histoire n’est jamais rappelée par les médias. Lorsqu’on parle du dernier attentat à la bombe à Mogadiscio, qui se souvient des liens entre Italie et Somalie ? Quand des bateaux remplis de migrants érythréens sont secourus ou coulent avant d’être sauvés, qui rappelle que l’Erythrée, nous l’appelions "l’aînée des colonies" ? »

    Le plus étrange est qu’à Rome, les traces du passé colonial sont légion, sans que personne n’ait jamais pensé à les effacer. Des stèles près desquelles personne ne s’arrête, des bâtiments anonymes, des noms de rue... rien de tout cela n’est explicité, mais tout est à portée de main.

    Comprendre les raisons de cette occultation impose de revenir sur les conditions dans lesquelles l’ « Empire » italien s’est formé. Création récente et n’ayant achevé son unité qu’en 1870, alors que la plus grande partie du monde était déjà partagée en zones d’influence, le royaume d’Italie s’est lancé avec du retard dans la « course » coloniale. De plus, il ne disposait pas, comme l’Allemagne qui s’engage dans le mouvement à la même époque, d’une puissance industrielle et militaire susceptible d’appuyer ses prétentions.

    Visées impérialistes

    Malgré ces obstacles, l’entreprise coloniale est considérée par de nombreux responsables politiques comme une nécessité absolue, à même d’assurer une fois pour toutes à l’Italie un statut de grande puissance, tout en achevant le processus d’unification du pays nombre des principaux avocats de la colonisation viennent de la partie méridionale du pays. Les visées impérialistes se dirigent vers deux espaces différents, où la carte n’est pas encore tout à fait figée : la Méditerranée, qui faisait figure de champ naturel d’épanouissement de l’italianité, et la Corne de l’Afrique, plus lointaine et plus exotique.

    En Afrique du Nord, elle se heurta vite à l’influence française, déjà solidement établie en Algérie. Ses prétentions sur la Tunisie, fondées sur la proximité de la Sicile et la présence sur place d’une importante communauté italienne, n’empêcheront pas l’établissement d’un protectorat français, en 1881. Placé devant le fait accompli, le jeune royaume d’Italie considérera l’initiative française comme un véritable acte de guerre, et la décennie suivante sera marquée par une profonde hostilité entre Paris et Rome, qui poussera le royaume d’Italie à s’allier avec les grands empires centraux d’Allemagne et d’Autriche-Hongrie plutôt qu’avec sa « soeur latine .

    Sur les bords de la mer Rouge, en revanche, la concurrence est plus faible. La première tête de pont remonte à 1869, avec l’acquisition de la baie d’Assab (dans l’actuelle Erythrée) par un armateur privé, pour le compte de la couronne d’Italie. Cette présence s’accentue au cours des années 1880, à mesure du recul de l’influence égyptienne dans la zone. En 1889, est fondée la colonie d’Erythrée, tandis que se structure au même moment la Somalie italienne. Mais l’objectif ultime des Italiens est la conquête du my thique royaume d’Abyssinie, qui s’avère plus difficile que prévu.

    En 1887, à Dogali, plusieurs centaines de soldats italiens meurent dans une embuscade menée par un chef abyssin, le ras Alula Engida. Cette défaite marque les esprits, mais ce n’est rien à côté de la déconfiture des forces italiennes lors de la bataille d’Adoua, le 1er mars 1896, qui porte un coup d’arrêt durable aux tentatives italiennes de conquête.

    Seul pays africain indépendant (avec le Liberia), l’Ethiopie peut désormais se targuer de devoir sa liberté à une victoire militaire. Le négus Menelik II y gagne un prestige considérable. Côté italien, en revanche, cette défaite est un électrochoc. Ressentie comme une honte nationale, la déroute des troupes italiennes entraîne la chute du gouvernement Crispi et freine durablement l’im périalisme italien.

    Adoua est un tournant. L’historien et ancien sénateur de gauche Miguel Gotor est l’auteur d’une remarquable synthèse sur le XXe siècle italien, L’Italia nel Novecento. Dalla sconfitta di Adua alla vittoria di Amazon (« L’Italie du XIXe siècle. De la défaite d’Adoua à la victoire d’Amazon » Einaudi, 2019, non traduit). Pour lui, c’est là-bas, sur les hauteurs de la région du Tigré, par cette humiliation retentissante, que le XXe siècle italien a commencé.

    L’aventure coloniale italienne s’est ouverte de façon peu concluante, mais l’aspiration à l’empire n’a pas disparu. La décomposition de l’Empire ottoman offrira à Rome une occasion en or, en lui permettant, en 1911-1912, de s’implanter solidement en Cyrénaïque et en Tripolitaine. « Souvent la conquête de ce qui allait devenir la Libye est évacuée un peu vite, mais c’est un moment très important. Pour l’armée italienne, c’est une répétition, un peu comme a pu l’être la guerre d’Espagne, juste avant la seconde guerre mondiale », souligne Miguel Gotor. Ainsi, le 1er novembre 1911, un aviateur italien lâche quatre grenades sur des soldats ottomans, réalisant ainsi le premier bombardement aérien de l’histoire mondiale.

    « La conquête des côtes d’Afrique du Nord est importante, certes, mais la Libye est juste en face de la Sicile, au fond c’est du "colonialisme frontalier". La colonie au sens le plus "pur", celle qui symboliserait le mieux l’idée d’empire, ça reste l’Abyssinie », souligne Miguel Gotor. Aussi les milieux nationalistes italiens, frustrés de ne pas avoir obtenu l’ensemble de leurs revendications territoriales au sortir de la première guerre mondiale, continueront à nourrir le rêve de venger l’humiliation d’Adoua.

    Le fascisme naissant ne se privera pas d’y faire référence, et d’entretenir le souvenir : les responsables locaux du parti se feront appeler « ras », comme les chefs éthiopiens. A partir de la fin des années 1920, une fois le pouvoir de Mussolini solidement établi, les prétentions coloniales deviendront un leitmotiv des discours officiels.

    Aussi la guerre de conquête déclenchée contre l’Ethiopie en 1935 est-elle massi vement soutenue. L’effort est considérable : plus de 500 000 hommes sont mobilisés. Face à un tel adversaire, le négus Haïlé Sélassié ne peut résister frontalement. Le 5 mai 1936, les soldats italiens entrent dans la capitale, Addis-Abeba, et hissent le drapeau tricolore. Quatre jours plus tard, à la nuit tombée, depuis le balcon du Palazzo Venezia, en plein coeur de Rome, Mussolini proclame « la réapparition de l’Empire sur les collines fatales de Rome » devant une foule de plusieurs centaines de milliers de personnes.

    « C’est bien simple, à ce moment-là, en Italie, il est à peu près impossible d’être anti fasciste », résume Miguel Gotor. Dans la foulée de ce succès, le roi Victor-Emmanuel III est proclamé empereur d’Ethiopie ; Benito Mussolini peut désormais se targuer d’avoir bâti un empire. La faillite d’Adoua avait été causée par un régime parle mentaire inefficace et désorganisé ? La victoire de 1936 est due, elle, aux vertus d’une Italie rajeunie et revigorée par le fascisme. La machine de propagande tourne à plein régime, l’assentiment populaire est à son sommet. « Ce moment-là est une sorte d’apogée, et à partir de là, la situation du pays se dégrade, analyse Miguel Gotor. Ar rivent les lois raciales, l’entrée en guerre... tout est réuni pour nourrir une certaine nostalgie de l’épopée éthiopienne. »

    Mécanisme de refoulement

    Le rêve impérial sera bref : il ne survivra pas à la défaite militaire et à la chute du fascisme. L’Ethiopie est perdue en 1941, la Libye quelques mois plus tard... Le traité de Paris, conclu en 1947, met officiellement un terme à une colonisation qui, dans les faits, avait déjà cessé d’exister depuis plusieurs années. Tandis que l’Ethiopie indépendante récupère l’Erythrée, la Libye est placée sous la tutelle de la France et du Royaume-Uni. Rome gardera seulement une vague tutelle sur la Somalie, de 1949 à 1960.

    Le projet d’empire colonial en Méditerranée et en Afrique, qui fut un des ciments de l’assentiment des Italiens à Mussolini, devient associé pour la plupart des Italiens au régime fasciste. L’un et l’autre feront l’objet du même mécanisme de refoulement dans l’Italie de l’après-guerre. Les dirigeants de l’Italie républicaine font rapidement le choix de tourner la page, et ce choix est l’objet d’un profond consensus qui couvre tout le spectre politique (le premier décret d’amnistie des condamnations de l’après-guerre remonte à 1946, et il porte le nom du dirigeant historique du Parti communiste italien Palmiro Togliatti). Les scènes de liesse de la Piazza Venezia ne seront plus évoquées, et avec elles les faces les plus sombres de l’aventure coloniale. Même la gauche transalpine, qui prendra fait et cause pour les mouvements anticoloniaux africains (notamment le FLN algérien) n’insistera jamais sur le versant italien de cette histoire.

    « Cela n’est pas étonnant, la mémoire est un phénomène sélectif, et on choisit toujours, consciemment ou non, ce qu’on va dire à ses enfants ou ses petits-enfants », remarque le jeune historien Olindo De Napoli (université de Naples-Frédéric-II), spécialiste de la période coloniale. « Durant l’immédiat après-guerre, ce sont les témoins qui parlent, ce sont eux qui publient », remarque l’his torien. Ainsi de la collection d’ouvrages L’Italia in Africa éditée sous l’égide du ministère des affaires étrangères, emblématique de la période. « Ces volumes sont passionnants, mais il y a certains oublis, qui vont vite poser des problèmes. »

    Parmi ces « oublis », la question la plus centrale, qui fera le plus couler d’encre, est celle des massacres de civils et de l’usage de gaz de combat, malgré leur interdiction par les conventions de Genève, lors de la guerre d’Ethiopie. Dans les années 1960, les études pionnières d’Angelo Del Boca et Giorgio Rochat mettront en lumière, documents officiels à la clé, ce pan occulté de la guerre de 1935-1936. Ils se heurteront à l’hostilité générale des milieux conservateurs.

    Un homme prendra la tête du mouvement de contestation des travaux de Del Bocaet Rochat : c’est Indro Montanelli (1909-2001), considéré dans les années 1960 comme le journaliste le plus important de sa géné ration. Plume du Corriere della Sera (qu’il quittera pour fonder Il Giornale en 1974), écrivain d’essais historiques à l’immense succès, Montanelli était une figure tutélaire pour toute la droite libérale.

    Comme tant d’autres, il avait été un fasciste convaincu, qui s’était porté volontaire pour l’Ethiopie, et il n’a pris ses distances avec Mussolini qu’en 1943, alors que la défaite était apparue comme certaine. Ra contant « sa » guerre à la tête d’une troupe de soldats indigènes, Montanelli la décrit comme « de longues et belles vacances », et qualifie à plusieurs reprises d’ « anti-Italiens » ceux qui font état de massacres de civils et d’usage de gaz de combat. La polémique durera des années, et le journaliste sera bien obligé d’admettre, à la fin de sa vie, que les atrocités décrites par Rochat et Del Bocaavaient bien eu lieu, et avaient même été expressément ordonnées par le Duce.

    A sa manière, Montanelli incarne parfaitement la rhétorique du « bon Italien » (« Italia brava gente »), qui sera, pour toute une génération, une façon de disculper l’homme de la rue de toute forme de culpabilité collective face au fascisme. Selon ce schéma, contrairement à son allié allemand, le soldat italien ne perd pas son humanité en endossant l’uniforme, et il est incapable d’actes de barbarie. Ce discours atténuant la dureté du régime s’étend jusqu’à la personne de Mussolini, dépeint sous les traits d’un chef un peu rude mais bienveillant, dont le principal tort aura été de s’allier avec les nazis.

    Ce discours trouve dans l’aventure coloniale un terrain particulièrement favorable. « Au fond, on a laissé s’installer l’idée d’une sorte de colonisation débonnaire, analyse Olindo De Napoli, et ce genre de représentation laisse des traces. Pourtant la colonisation italienne a été extrêmement brutale, avant même le fascisme. En Ethiopie, l’armée italienne a utilisé des soldats libyens chargés des basses oeuvres, on a dressé des Africains contre d’autres Africains. Et il ne faut pas oublier non plus que les premières lois raciales, préfigurant celles qui seront appliquées en 1938 en Italie, ont été écrites pour l’Ethiopie... Il ne s’agit pas de faire en sorte que des enfants de 16 ans se sentent coupables de ce qu’ont fait leurs arrière-grands-pères, il est seulement question de vérité historique. »

    Désinvolture déconcertante

    Malgré les acquis de la recherche, pour le grand public, la colonisation italienne reste souvent vue comme une occupation « douce », par un peuple de jeunes travailleurs prolétaires, moins racistes que les Anglais, qui se mélangeaient volontiers avec les populations locales, jusqu’à fonder des familles. L’archétype du colon italien tombant amoureux de la belle Abyssine, entretenu par les mémoires familiales, a lui aussi mal vieilli. Là encore, le parcours d’Indro Montanelli est plus qu’éclairant. Car aujourd’hui, si sa défense de l’armée italienne apparaît comme parfaitement discréditée, ce n’est plus, le concernant, cet aspect de sa vie qui fait scandale.

    En effet, on peut facilement trouver, sur Internet, plusieurs extraits d’entretiens télévisés remontant aux années 1970 et 1980, dans lesquelles le journaliste raconte avec une désinvolture déconcertante comment, en Ethiopie, il a « acheté régulièrement » à son père, pour 350 lires, une jeune fille de 12 ans pour en faire sa femme à plusieurs reprises, il la qualifie même de « petit animal docile », devant un auditoire silencieux et appliqué.

    Célébré comme une gloire nationale de son vivant, Indro Montanelli a eu l’honneur, à sa mort et malgré ces déclarations sulfureuses, de se voir dédié à Milan un jardin public, au milieu duquel trône une statue de lui. Au printemps 2019, cette statue a été recouverte d’un vernis de couleur rose par un collectif féministe, pour rappeler cet épisode, et en juin 2020, la statue a de nouveau été recouverte de peinture rouge, en lointain écho au mouvement Black Lives Matter (« les vies noires comptent ») venu des Etats-Unis.

    Indro Montanelli mérite-t-il une statue dans l’Italie de 2021 ? La question a agité les journaux italiens plusieurs jours, au début de l’été, avant que la polémique ne s’éteigne d’elle-même. Pour fondée qu’elle soit, la question semble presque dérisoire eu égard au nombre de témoignages du passé colonial, rarement explicités, qui subsistent un peu partout dans le pays.

    Cette situation n’est nulle part plus visible qu’à Rome, que Mussolini rêvait en capitale d’un empire africain. L’écrivaine italienne Igiaba Scego, née en 1974 de parents réfugiés somaliens, y a dédié un passionnant ouvrage, illustré par les photographies de Rino Bianchi (Roma negata, Ediesse, réédition 2020, non traduit).

    Passant par la stèle laissée à l’abandon de la piazza dei Cinquecento, face à la gare Termini, dont la plupart des Romains ignorent qu’elle a été baptisée ainsi en mémoire des 500 victimes italiennes de l’embuscade de Dogali, ou l’ancien cinéma Impero, aujourd’hui désaffecté, afin d’y évoquer l’architecture Art déco qui valut à la capitale érythréenne, Asmara, d’être classée au patrimoine de l’Unesco, la romancière fait une station prolongée devant le siège romain de la FAO (l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), construit pour abriter le siège du puissant ministère de l’Afrique italienne.

    Devant ce bâtiment tout entier dédié à l’entreprise coloniale, Benito Mussolini avait fait ériger en 1937 un obélisque haut de 24 mètres et vieux d’environ seize siècles, ramassé sur site d’Axoum, en Ethiopie. Il s’agissait, rappelle Igiaba Scego, de faire de ce lieu « le centre de la liturgie impériale .

    La république née sur les ruines du fascisme s’était engagée à restituer cette prise de guerre à la suite des traités de 1947, mais après d’innombrables vicissitudes, le monument est resté en place jusqu’en 2003, où le gouvernement Berlusconi choisit de le démonter en trois morceaux avant de le renvoyer à Axoum, à ses frais.

    En 2009, la mairie de Rome a fait installer sur la même place, à deux pas de cet espace vide, une stèle commémorative afin « de ne pas oublier le passé . Mais curieusement, celle-ci a été dédiée... à la mémoire des attentats du 11-Septembre. Comme s’il fallait enfouir le plus profondément possible ce souvenir du rêve impérial et de la défaite, la ville a choisi de faire de ce lieu le symbole d’une autre tragédie. « Pourquoi remuer ces his toires horribles ? Pensons plutôt aux tragédies des autres. Le 11-Septembre était parfait », note, sarcastique, Igiaba Scego.

    A une quinzaine de kilomètres de là, dans le décor grandiose et écrasant du Musée de la civilisation romaine, en plein centre de ce quartier de l’EUR où la mémoire du fascisme est omniprésente, l’ethno-anthropologue Gaia Delpino est confrontée à un autre chantier sensible, où s’entrechoquent les mémoires. Depuis 2017, elle travaille à fusionner en un même lieu les collections du vieux musée ethnologique de Rome (Musée Pigorini) et du sulfureux Musée colonial inauguré en 1923, dont les collections dormaient dans des caisses depuis un demi-siècle.

    D’une fascinante complexité

    Lorsqu’on lui parle de l’odyssée de l’obélisque d’Axoum, elle nous arrête tout de suite : « C’est bien simple : ce qui a été réalisé là-bas, c’est exactement l’inverse de ce qu’on veut faire. » Restituer ces collections dans leur contexte historique tout en articulant un message pour l’Italie d’aujourd’hui, permettre à toutes les narrations et à toutes les représentations de s’exprimer dans leur diversité... L’entreprise est d’une fascinante complexité.

    « Les collections du MuséePigorini ont vieilli bien sûr, comme tous ces musées ethnographiques du XIXe siècle qui véhiculaient l’idée d’une supériorité de la civilisation occidentale. Le Musée colonial, lui, pose d’autres problèmes, plus singuliers. Il n’a jamais été pensé comme autre chose qu’un moyen de propagande, montrant à la fois les ressources coloniales et tout ce qu’on pourrait en tirer. Les objets qui constituent les collections n’ont pas vu leur origine enregistrée, et on a mis l’accent sur la quantité plus que sur la qualité des pièces », expliqueGaia Delpino.

    Sur des centaines de mètres de rayonnages, on croise pêle-mêle des maquettes de navires, des chaussures, des outils et des objets liturgiques... L’accumulation donne le vertige. « Et ce n’est pas fini, nous recevons tous les jours des appels de personnes qui veulent offrir des objets ayant appartenu à leur père ou à leur grand-père, qu’ils veulent nous confier comme une réparation ou pour faire un peu de place », admet l’anthropologue dans un sourire.

    Alors que le travail des historiens peine à se diffuser dans le grand public, où les représentations caricaturales du système colonial, parfois instrumentalisées par la politique, n’ont pas disparu, le futur musée, dont la date d’ouverture reste incertaine pour cause de pandémie, risque d’être investi d’un rôle crucial, d’autant qu’il s’adressera en premier lieu à un public scolaire. « Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que parallèlement à ce difficile travail de mémoire, la population change. Aujourd’hui, dans nos écoles, il y a aussi des descendants de victimes de la colonisation, italienne ou autre. Nous devons aussi penser à eux », précise Gaia Delpino.

    Retournons maintenant au centre de Rome. En 2022, à mi-chemin du Colisée et de la basilique Saint-Jean-de-Latran, une nouvelle station de métro doit ouvrir, dans le cadre du prolongement de la ligne C. Depuis le début du projet, il était prévu que celle-ci soit baptisée « Amba Aradam », du nom de la large artère qui en accueillera l’entrée, appelée ainsi en souvenir de la plus éclatante des victoires italiennes en Ethiopie.

    Ce nom était-il opportun, alors que les historiens ont établi que cette victoire écrasante de l’armée fasciste avait été obtenue au prix de 10 000 à 20 000 morts, dont de nombreux civils, et que les troupes italiennes avaient obtenu la victoire en faisant usage d’ypérite (gaz moutarde), interdit par les conventions de Genève ? Le 1er août 2020, la mairie a finalement fait savoir que la station serait dédiée à la mémoire de Giorgio Marincola.

    Pour le journaliste Massimiliano Coccia, qui a lancé cette proposition avec le soutien de collectifs se réclamant du mouvement Black Lives Matter, « revenir sur notre passé, ce n’est pas détruire ou incendier, mais enrichir historiquement notre cité . Et on peut choisir de célébrer la mémoire d’un résistant italo-somalien tué par les nazis plutôt que celle d’une des pages les plus sombres de l’histoire coloniale italienne.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/05/libye-somalie-ethiopie-l-oublieuse-memoire-coloniale-italienne_6068846_3232.

    #Italie #colonialisme #colonisation #Mussolini #fascisme #Libye #Somalie #Ethiopie #atrocités #occupation_douce #mémoire #mémoire_coloniale #occultation #impérialisme #Corne_de_l'Afrique #baie_d'Assab #royaume_d'Abyssinie #Alula_Engida #bataille_d'Adoua #Menelik_II #Crispi #Adoua #Tigré #Cyrénaïque #Tripolitaine #colonialisme_frontalier #Abyssinie #Haïlé_Sélassié #propagande #traité_de_Paris #refoulement #mémoire #massacres #gaz #Indro_Montanelli #gaz_de_combat #bon_Italien #Italia_brava_gente #barbarie #humanité #lois_raciales #vérité_historique #culpabilité #viol #culture_du_viol #passé_colonial #Igiaba_Scego #monuments #toponymie #toponymie_politique #Axoum #stèle #Musée_Pigorini #musée #Musée_colonial #Amba_Aradam #ypérite #gaz_moutarde #armes_chimiques #Giorgio_Marincola #Black_Lives_Matter

    L’article parle notamment du #livre de #Francesca_Melandri, « #sangue_giusto » (traduit en français par « Tous, sauf moi »
    https://seenthis.net/messages/883118

    ajouté à la métaliste sur le #colonialisme_italien :
    https://seenthis.net/messages/871953

    ping @cede

  • En Ethiopie, la France partagée entre business et défense des droits humains

    Pillages, possibles crimes de #guerre, destructions de sites historiques : les témoignages en provenance du #Tigré, province en guerre depuis le 4 novembre, sont très inquiétants. La France reste pourtant discrète, et espère préserver ses chances sur un marché prometteur.

    L’ambassadeur a un échange « constructif » avec le ministre de l’éducation, l’ambassadeur a un échange « productif » avec le conseiller spécial du premier ministre sur les questions économiques, l’ambassadeur est « très honoré » de recevoir le ministre de l’énergie pour évoquer la participation française à plusieurs grands projets… Sur les réseaux sociaux de l’ambassade de France à Addis-Abeba, c’est #business_as_usual.

    Pour qui suit au quotidien le calvaire des habitants du Tigré – région où l’armée éthiopienne et ses alliés sont en guerre depuis le 4 novembre –, les photos de ces rencontres policées dans la capitale, où l’on discute #qaffaires, lovés dans de confortables canapés, semblent prises dans un monde parallèle.

    Loin, très loin, d’un Tigré littéralement à feu et à sang, où plus de deux millions de personnes ont dû fuir leur habitation, où l’on manque d’eau, d’électricité, de nourriture et de médicaments, où il est probable que la famine soit utilisée comme arme de guerre par les belligérants et où les humanitaires peinent toujours à accéder alors que 2,3 millions de personnes auraient besoin d’aide, selon les évaluations des ONG.

    Les affrontements y opposent le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) à l’armée fédérale éthiopienne, soutenue par des milices nationalistes amhara et des troupes érythréennes.

    « Nous recevons des rapports concordants à propos de violences ciblant certains groupes ethniques, d’assassinats, de pillages massifs, de viols, de retours forcés de réfugiés et de possibles crimes de guerre », a indiqué le 15 janvier le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Josep Borrell, qui a annoncé par la même occasion la suspension de 88 millions d’euros d’aide destinée au gouvernement éthiopien.

    Dès le 13 novembre, la haute-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme Michelle Bachelet évoquait elle aussi de possibles crimes de guerre et appelait à la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour le vérifier. À la veille de sa prise de fonction, le nouveau secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est lui aussi inquiété publiquement de la situation.

    Une voix manque cependant à ce concert d’alertes : celle de la France. Le Quai d’Orsay n’a produit qu’un seul communiqué concernant le Tigré, le 23 novembre 2020. Il tient en quatre phrases convenues sur la dégradation de la situation humanitaire et la condamnation des « violences à caractère ethnique ». Exploit diplomatique, le mot « guerre » n’y apparaît pas ; celui de « crimes de guerre » encore moins. Il ne comporte ni interpellation des belligérants – qui ne sont d’ailleurs même pas cités –, ni appel à une enquête indépendante sur d’éventuelles violations des droits humains. Les mêmes éléments de langage étaient repris trois jours plus tard à l’occasion de la visite en France du ministre des affaires étrangères éthiopien Demeke Mekonnen.

    « Gênant, au minimum »

    Cette étrange pudeur française commence à interroger, voire à agacer certains alliés européens ainsi que nombre de chercheurs spécialisés sur l’Éthiopie – qui s’emploient, depuis deux mois et demi, à récolter les bribes d’informations qui parviennent du Tigré malgré la coupure des communications par les autorités.

    « J’ai des échanges réguliers avec l’#ambassade_de_France à Addis-Abeba depuis novembre. Je les ai questionnés sur leur position vis-à-vis du gouvernement éthiopien, et je les ai sentis très embarrassés », raconte le chercheur indépendant René Lefort, pour qui la #complaisance française vis-à-vis du gouvernement d’Abiy Ahmed Ali est incompréhensible : « Je crois qu’ils ne comprennent pas ce qu’est ce pays et ce qui s’y passe. »

    Au-delà des questions morales posées par le fait d’apporter un soutien tacite à un gouvernement qui a couvert ou laissé faire des violations des droits humains au Tigré, le soutien à #Abiy_Ahmed est une erreur d’analyse politique selon René Lefort : « Les Français parient tout sur lui, alors que son autorité personnelle est faible et que sa ligne politique n’est soutenue que par une minorité d’Éthiopiens. »

    La réserve française est en tout cas interprétée par l’armée fédérale éthiopienne et ses alliés comme un soutien de Paris. Le sociologue Mehdi Labzae était au Tigré, dans la région d’Humera, jusqu’à la mi-décembre : « Dans les zones conquises par les nationalistes amhara, se présenter comme Français facilite les relations avec les combattants, qui considèrent le gouvernement français comme un allié. Les déclarations françaises, ou leur absence, laissent penser que la réciproque est vraie », relève le chercheur, post-doctorant à la Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH). « Avec un ambassadeur à Addis qui fait comme si de rien n’était… Je trouve cela gênant, au minimum. »

    Selon une source diplomatique étrangère, la France ne se contente pas de rester discrète sur la situation au Tigré ; elle freine également les velléités des membres de l’Union européenne qui voudraient dénoncer plus ouvertement l’attitude des autorités éthiopiennes et de leurs alliés érythréens. Une attitude « parfois frustrante », déplore cette source.

    Interrogée par Mediapart sur cette « frustration » de certains alliés européens, l’ambassade de France à Addis-Abeba nous a renvoyé vers le Quai d’Orsay, qui n’a pas répondu sur ce point (voir boîte noire).

    Refus de répondre sur la création d’une commission d’enquête

    À ses partenaires européens, mais aussi aux chercheurs et humanitaires avec qui ils échangent, les services diplomatiques français expliquent que les accusations d’exactions visant l’armée éthiopienne et ses alliés ne « sont pas confirmées ». Il en va de même concernant la présence de troupes érythréennes sur place – cette présence a pourtant été confirmée à la fois par les autorités de transition du Tigré et par un général de l’armée éthiopienne.

    Une position difficilement tenable. D’abord parce que le gouvernement éthiopien empêche, en bloquant les communications avec le Tigré et en limitant l’accès des humanitaires, la récolte de telles preuves. Ensuite parce que, malgré ce blocus, les faisceaux d’indices s’accumulent : « Nous avons des informations qui nous viennent des ONG, d’équipes des Nations unies qui parlent off the record, de citoyens européens qui se trouvent toujours au Tigré ; nous avons aussi des listes de victimes, et de plus en plus de photos et vidéos », autant d’informations auxquelles l’ambassade de France a eu accès, explique un diplomate en poste à Addis-Abeba.

    La position française est difficilement tenable, enfin, parce que si elle tenait tant aux faits, la France ne se contenterait pas de refuser de condamner les crimes tant qu’ils ne sont pas « confirmés » : elle plaiderait pour la création d’une commission d’enquête indépendante qui permettrait, enfin, de les établir et de pointer les responsabilités respectives du TPLF, de l’armée éthiopienne et de ses alliés.

    Paris est dans une position idéale pour le faire, puisque la France vient d’être élue pour siéger au Conseil des droits de l’homme des Nations unies durant trois ans. Elle pourrait donc, aux côtés d’autres États membres, demander une session extraordinaire du Conseil sur l’Éthiopie (l’accord d’un tiers des 47 États qui composent le Conseil est nécessaire) qui déciderait de la création d’une commission d’enquête sur le Tigré.

    Or, interrogé par Mediapart sur son soutien à la création d’une telle commission, le Quai d’Orsay n’a pas souhaité répondre (voir boîte noire). Il assure avoir « appelé à plusieurs reprises les autorités éthiopiennes à faire la lumière sur les allégations de crimes et autres violations des droits de l’homme », sans toutefois préciser par quel canal.

    Hypothétique médiation

    Lors d’entrevues en privé, des diplomates de l’ambassade et du Quai d’Orsay assurent que cette absence de #dénonciation publique est volontaire et stratégique. Elle viserait à ne pas froisser le gouvernement éthiopien publiquement afin de « maintenir un canal de communication » pour mieux le convaincre en privé et, éventuellement, jouer un rôle de médiateur pour trouver une issue au conflit.

    « Des diplomates français m’ont dit, en résumé : “On reste discrets parce que si un jour il y a une #médiation à faire, le gouvernement pourrait se tourner vers nous” », indique René Lefort. Une analyse « totalement erronée », selon le chercheur : « Non seulement [le premier ministre] Abiy Ahmed Ali ne veut absolument pas d’une médiation, mais surtout, même s’il en acceptait le principe, je ne vois pas pourquoi il irait chercher la France plutôt que les États-Unis, l’Union européenne ou encore l’ONU. » Accessoirement, même si le gouvernement éthiopien souhaitait que la France soit médiatrice, il n’est pas dit que son principal adversaire, le TPLF, accepte le principe d’une médiation par un État qui a passé les derniers mois à multiplier les signes d’amitié envers Addis-Abeba et pourrait donc difficilement prétendre à la neutralité.

    Un (quasi-) #silence public pour mieux faire avancer les dossiers en privé : l’hypothèse est également avancée par l’ancien ambassadeur français en Éthiopie Stéphane Gompertz. « Il est possible que nous privilégions l’action en coulisses, qui peut être parfois plus efficace que de grandes déclarations. C’est d’ailleurs généralement l’option privilégiée par la #diplomatie française. » À l’appui de cette idée, l’ancien ambassadeur – qui fut aussi directeur Afrique au Quai d’Orsay – évoque des tractations discrètes mais couronnées de succès menées en 2005 afin de faire libérer des figures d’opposition.

    Si telle est la stratégie française actuellement, ses résultats sont pour l’instant peu concrets. Le quasi-silence français semble en réalité avoir d’autres explications : ne pas gâcher l’#amitié entre Emmanuel Macron et le premier ministre éthiopien Abiy Ahmed Ali et, surtout, ne pas compromettre les #intérêts_commerciaux français dans un pays vu comme économiquement prometteur et politiquement stratégique.

    Lune de miel

    Lors de sa nomination en 2018, le premier ministre éthiopien Abiy Ahmed Ali fait figure d’homme de paix et de chantre de la démocratie. Ses efforts de réconciliation avec l’Érythrée voisine lui valent le prix Nobel de la paix ; ses réformes sur la liberté de la presse ou la libération de prisonniers politiques lui attirent l’estime de nombreux chefs d’État étrangers.

    Est-ce une affaire de style ? Le fait qu’ils soient tous les deux jeunes, étiquetés comme libéraux, revendiquant une certaine manière de casser les codes ? Emmanuel Macron et Abiy Ahmed semblent en tout cas particulièrement s’apprécier. L’anecdote veut que lors d’une visite de #Macron à Addis-Abeba en 2019, Abiy Ahmed ait tenu à conduire lui-même la voiture amenant le président français à un dîner officiel.

    Lorsque le premier ministre éthiopien a pris ses fonctions, « les Allemands, les Français, l’UE, tout le monde a mis le paquet sur les aides, tout le monde s’est aligné sur lui. Sauf que, le temps passant, le malaise a grandi et la lune de miel a tourné au vinaigre, analyse une source dans les milieux économiques à Addis-Abeba. Les autres États ont rapidement déchanté. Pas les Français, pour qui la lune de miel a continué. »

    De fait, la transformation du Prix Nobel en chef de guerre ne semble pas avoir altéré sa belle entente avec le président français. Deux semaines après le début des hostilités au Tigré, et alors qu’Abiy Ahmed s’apprêtait à lancer un assaut « sans pitié » sur la ville de Mekele et ses 400 000 habitants, #Emmanuel_Macron qualifiait le premier ministre éthiopien de « role model ». Quelques semaines plus tard, toujours engagé dans ce conflit, Abiy Ahmed Ali trouvait le temps de souhaiter un prompt rétablissement à son « bon ami » Macron, atteint du Covid.

    Pour cette source, le facteur économique et commercial est essentiel : « Les Français sont restés très positifs parce qu’ils se positionnent clairement sur le secteur économique en Éthiopie : ils n’ont pas d’intérêt politique fort, ça n’est pas leur zone d’influence. Mais les #intérêts_économiques, eux, sont importants et sont grandissants. C’est potentiellement un #marché énorme. »

    Marché jugé prometteur

    Pour le conquérir, Paris a employé les grands moyens. En mars 2019, Emmanuel Macron s’est rendu en Éthiopie avec le ministère des affaires étrangères #Jean-Yves_le_Drian et sept patrons français pour y signer une flopée d’#accords visant à « promouvoir l’#attractivité de l’Éthiopie auprès des #investisseurs_français ».

    Les entreprises françaises intéressées par ce marché en voie de #libéralisation ne sont pas des moindres : #Orange (qui compte bien profiter de la privatisation de la compagnie nationale #Ethio_Telecom), le groupe #Castel (qui à travers sa filiale #BGI détient déjà 55 % des parts du marché de la #bière), #Bollore_Logistics ou encore #Canal+, qui compte développer une offre de #télévision locale.

    Les #intérêts_commerciaux français sont nombreux et variés. La #modernisation du #réseau_électrique éthiopien ? #Alstom (36 millions d’euros en 2011). La fabrication des #turbines de l’immense #barrage_hydroélectrique de la Renaissance ? Alstom encore (250 millions d’euros en 2013), qui désormais lorgne sur des projets ferroviaires. Le #bus « à haut niveau de service » qui desservira la capitale éthiopienne ? Les Français de #Razel-Bec (la filiale travaux publics du groupe #Fayat), qui ont remporté le marché en 2020.

    Peu après sa prise de poste, en octobre, l’ambassadeur français #Rémi_Maréchaux se félicitait : « Le nombre d’#entreprises_françaises en Éthiopie a doublé en cinq ans. Nous sommes prêts à travailler ensemble pour davantage d’investissements français. »

    #Contrats_militaires

    Dernier domaine stratégique pour les Français : la #coopération_militaire et les ventes d’#armes. Le dossier était en haut de la pile lors de la visite d’Emmanuel Macron en 2019. La ministre #Florence_Parly, qui était également du voyage, a signé un #accord_de_défense avec son homologue éthiopienne ainsi qu’une lettre d’intention « pour la mise en place d’une composante navale éthiopienne avec l’accompagnement de la France ».

    Une aubaine pour les fabricants d’armes et d’#équipements_militaires français, qui n’ont pas tardé, selon la presse spécialisée, à se manifester pour décrocher des contrats. Parmi eux, #Airbus, qui aimerait vendre des #hélicoptères de combat à l’Éthiopie. Le groupe a pu compter pour défendre ses intérêts sur l’attaché de défense de l’ambassade française à Addis-Abeba (jusque septembre 2020) #Stéphane_Richou, lui-même ancien commandant d’un régiment d’hélicoptères de combat.

    L’#armée de l’air éthiopienne a validé l’offre d’Airbus pour l’acquisition de 18 #hélicoptères_militaires et deux avions-cargos en octobre 2020, mais cherchait toujours des financements. Le déclenchement de la guerre au Tigré – où ces hélicoptères pourraient être utilisés – a-t-il conduit Airbus ainsi que le ministère des armées à reporter, voire annuler cette vente ?

    Ni Airbus ni le ministère n’ont souhaité nous répondre à ce sujet.

    Les affaires se poursuivent en tout cas entre la filiale civile d’Airbus et le gouvernement éthiopien : le 9 novembre, #Ethiopian_Airlines réceptionnait deux Airbus A350-900 pour sa flotte. Le 20 novembre encore, l’ambassadeur français à Addis-Abeba se félicitait d’une rencontre avec le PDG de la compagnie aérienne éthiopienne et ajoutait « Airbus » en hashtag.

    https://twitter.com/RemiMarechaux/status/1329829800031252481

    Quant à la coopération militaire France-Éthiopie, elle semble se poursuivre normalement si l’on en juge cette offre d’emploi de professeur de français à destination de militaires et policiers éthiopiens émise en décembre par la Direction de la coopération de sécurité et de défense du Quai d’Orsay (un contrat d’un an à pourvoir au 1er octobre 2021).

    Interrogé le 19 janvier sur le projet de création d’une #marine_éthiopienne, sur d’éventuelles livraisons d’armes récentes à l’Éthiopie et, plus généralement, sur la coopération militaire avec l’Éthiopie et le fait de savoir si l’évolution de la situation au Tigré était susceptible de la remettre en question, le ministère des armées a fait savoir 48 heures plus tard qu’il ne pourrait pas répondre « étant donné [les] délais ». Mediapart a proposé au ministère de lui accorder un délai supplémentaire pour fournir ses réponses. Le ministère n’a plus donné suite.

    Trop tard ?

    Le ministère des affaires étrangères, lui, n’a répondu à aucune des cinq questions précises que lui avait soumises Mediapart sur la présence de troupes érythréennes, les possibles crimes de guerres commis au Tigré et la coopération militaire avec l’Éthiopie notamment (voir boîte noire).

    Sa réponse condamne toutefois en des termes plus précis que par le passé les exactions commises au Tigré. La France est « profondément préoccupée » par la situation humanitaire sur place, « ainsi que par les allégations de violations des droits de l’homme », indique le Quai d’Orsay, avant d’appeler à la cessation des hostilités et au respect du droit international humanitaire par « toutes les parties au conflit ». Mais est-ce suffisant, et surtout n’est-ce pas trop tard ?

    Les dernières informations en provenance du Tigré évoquent des massacres qui auraient fait plusieurs centaines de morts. Plusieurs vidéos portent sur de possibles tueries dans la ville et l’église d’Aksoum, de la fin novembre à début décembre. Selon l’organisation belge Europe External Programme with Africa (EEPA) ainsi qu’un témoin interrogé par Le Monde, les troupes érythréennes y auraient tué plus de 750 personnes. Dans une interview mise en ligne le 17 janvier, une femme qui se dit témoin direct de ces tueries explique en amharique que « la ville entière, du dépôt de bus au parc, était recouverte de corps ».

    Les attaques et destructions concernent également des sites historiques inestimables ou jugés sacrés. La mosquée de Negash (site d’établissement des premiers musulmans éthiopiens, du temps du prophète Mahomet), datant du VIIe siècle, a été partiellement détruite et pillée. Le plus vieux monastère d’Éthiopie, le monastère orthodoxe de Debre Damo (VIe siècle), a également été attaqué.

    Enfin, Mediapart a pu consulter un témoignage de première main concernant un massacre commis dans l’église Maryam Dengelat – creusée dans la roche entre le VIe et le XIVe siècle par les premiers chrétiens d’Éthiopie –, qui estime que 80 personnes ont été tuées par l’armée érythréenne, parmi lesquelles des prêtres, des personnes âgées et des enfants. Ce témoignage fournit une liste comportant les noms de 35 victimes.

    « Si ces informations étaient confirmées, cela commencerait à ressembler à une stratégie d’anéantissement, non seulement du TPLF, mais du Tigré en tant qu’identité historique et territoriale », commente le chercheur Éloi Ficquet, de l’EHESS.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/210121/en-ethiopie-la-france-partagee-entre-business-et-defense-des-droits-humain
    #Ethiopie #France #armement #commerce_d'armes #vente_d'armes

  • El Supremo reconoce el derecho a pedir asilo en las embajadas en contra del criterio del Gobierno

    Esta posibilidad aparece recogida en la Ley de Asilo, pero ningún gobierno ha aprobado su desarrollo reglamentario por lo que España, salvo escasas excepciones, impide de forma sistemática acceder al procedimiento de asilo a través de esta vía

    El Tribunal Supremo ha reconocido el derecho de potenciales solicitantes de asilo a pedir en embajadas españolas su traslado legal a España para formalizar una petición de protección internacional. Aunque esta posibilidad aparece recogida en la Ley de Asilo de 2009, ningún gobierno ha aprobado su desarrollo reglamentario por lo que, salvo escasas excepciones, habitualmente se impide de forma sistemática acceder al procedimiento de asilo a través de esta vía. Los magistrados también han confirmado la obligación de los embajadores a contestar a dichas peticiones.

    En la sentencia, el Alto Tribunal echa por tierra los argumentos en los que se han apoyado gobiernos de distintos colores para negarse a aplicar el artículo 38 de la normativa de asilo, que permite a los embajadores del país «promover el traslado» de los solicitantes de asilo a España para que estos puedan formalizar su solicitud en territorio español. Para la Sala de lo contencioso administrativo número 5, el enunciado de la legislación española contiene «elementos suficientes» para realizar traslados de solicitantes de asilo por esta vía cuando el demandante «corra peligro» en su país de origen, sin que su aplicación quede supeditada al desarrollo reglamentario al que se aferra el gobierno.

    El fallo sostiene que la normativa «se limita a regular la atención de aquellas solicitudes que se presentan fuera del territorio nacional y en un tercer país», por la que el embajador tiene competencia de valorar «el peligro para la integridad física del solicitante que motive su derivación a España». Para ello, apunta la Sala, debe aplicar «las mismas exigencias» que determinan el reconocimiento de la protección internacional en España.

    Es decir, el Supremo concluye que la normativa ya desarrolla el mecanismo por el que un demandante puede registrar en las embajadas españolas una suerte de petición de asilo, sobre la que los representantes españoles deben valorar si su integridad corre peligro y, en ese caso, promover su traslado a España para tramitar la demanda de manera oficial.

    La sentencia se refiere al caso de una familia kurdo-iraquí que llegó a Grecia en 2016 huyendo del conflicto bélico en Irak, donde solicitó asilo sin respuesta, según Stop Mare Mortum, organización que ha apoyado jurídicamente a los demandantes. Un año después, pidieron ser trasladados a España en el marco del programa europeo de reubicación, pero solo fue aceptada la solicitud de la madre y las hijas. El padre, quien tuvo que permanecer en Grecia, solicitó protección posteriormente junto al resto de su familia en la Embajada española en el país europeo, pero no recibieron respuesta.

    Ante el silencio de la embajada española, explican desde la organización, la familia presentó una demanda ante la Audiencia Nacional que le dio la razón en marzo del 2019. No obstante, la abogacía del Estado interpuso un recurso de casación en el Tribunal Supremo para evitar el traslado del padre de familia en España, alegando la imposibilidad de aplicación del artículo 34 de la Ley de Asilo, debido a su falta de desarrollo reglamentario, entre otras razones expuestas.
    La falta de reglamento no impide su aplicación

    Para el Supremo, la falta de desarrollo reglamentario no impide la aplicación del contenido de la normativa «a las solicitudes de protección internacional formuladas a su amparo». Además, el Tribunal aclara que la valoración del peligro para la integridad física del solicitante se debe realizar en base a la situación que le empuja a salir del país de origen.

    Según Stop Mare Nostrum, es «habitual» la falta de respuesta de las embajadas españolas cuando un potencial solicitante de asilo intenta acceder al procedimiento de protección internacional a través de esta vía. De las 38 peticiones de traslado registradas por la ONG en los consulados de Atenas y Tánger, los representantes españoles «no han respondido a ninguna». En este sentido, la Abogacía del Estado justificó en su recurso que la Ley de Asilo no «les impone la obligación de resolver estas peticiones». Este extremo también ha sido rechazado por el Alto Tribunal, que sí ve en la ausencia de contestación una actuación «susceptible de impugnación».

    Según detalla la sentencia, a la que ha accedido elDiario.es, el abogado del Estado defendía que, ante la falta de desarrollo reglamentario, «no existe como tal un procedimiento administrativo para poder aplicar ese artículo» lo que, consideraba «imprescindible para determinar los órganos competentes y las condiciones en las que un embajador puede promover el traslado a España a los efectos de solicitar asilo así como para determinar las consecuencias prácticas de tal medida».
    Diferente argumento para defender ante Estrasburgo las devoluciones en caliente

    Los argumentos de la Abogacía del Estado evidencian la falta de aplicación por parte del Gobierno de la posibilidad de solicitar el traslado a España desde las embajadas españolas, lo que se contradice con los razonamientos que España presentó ante el Tribunal Europeo de Derechos Humanos para defender la legalidad de las devoluciones en caliente en las vallas de Ceuta y Melilla.

    Según sostenían entonces desde la Abogacía del Estado, España contaba con vías legales de entrada al territorio, entre las que nombraba el artículo 38 de la Ley de Asilo. El mismo que no se podría aplicar debido a la falta de desarrollo reglamentario, según dice el abogado del Estado en el recurso que pretendía evitar el traslado del hombre iraquí para encontrarse con su familia.

    «La sentencia demuestra la incoherencia de los argumentos de la Abogacía del Estado, que los utiliza según su conveniencia en una materia tan sensible como los derechos humanos», dice Stop Mare Mortum. «El pasado mes de febrero, ante el Tribunal Europeo de Derechos Humanos, defendía la existencia de este mecanismo para pedir asilo en las embajadas y así demostrar que las personas que saltaron la valla, podían haber solicitado asilo en España vía artículo 38», recuerda la organización. «En los procedimientos judiciales que han terminado en la actual Sentencia del Tribunal Supremo la argumentación de la abogacía del estado era la contraria: que las solicitudes a Embajada no se podían tramitar por falta de reglamento de desarrollo de la ley de asilo».

    El razonamiento desarrollado por la Abogacía del Estado para justificar las devoluciones en caliente de migrantes en Ceuta y Melilla fue clave en la consiguiente sentencia del Tribunal Europeo de Derechos Humanos, que avaló las expulsiones inmediatas de quienes sortean de forma irregular las alambradas de las ciudades autónomas porque, según el concluyó, «se pusieron ellos mismos en una situación de ilegalidad al intentar entrar deliberadamente en España por la valla de Melilla».

    Según el Defensor del Pueblo, la Ley de Asilo de 2009, a diferencia de la normativa anterior, no permite la presentación oficial de solicitudes de asilo en las representaciones diplomáticas, por lo que deja en manos del embajador la posibilidad de promover el traslado a España del solicitante si considera que corre peligro físico. Un informe de la institución de 2016 señaló que «la alta conflictividad existente en la actualidad en muchos países, junto a la limitación de no permitir la presentación de la demanda en las representaciones de España en el exterior, contribuyen a dificultar el acceso al procedimiento». Estos obstáculos, advertía, «pueden menoscabar los compromisos internacionales asumidos por España y la finalidad de dicho instrumento».

    https://www.eldiario.es/desalambre/supremo-reconoce-derecho-solicitantes-asilo-pedir-asilo-embajadas-espanolas
    #asile #réfugiés #ambassade #ambassades #Espagne #justice #voies_légales

  • #Maria_Uva
    Je découvre Maria Uva en lisant le #livre « #Sangue_giusto » de #Francesca_Melandri (en italien) :

    https://bur.rizzolilibri.it/libri/sangue-giusto-2

    sur le livre voir aussi ce fil de discussion :
    https://seenthis.net/messages/904517
    –—

    Era nota col nomignolo di «l’#animatrice_di_Said». Maria era nata in Francia a Villeneuve, presso Lourdes, nella famiglia De Luca, d’origine piemontese. Suo marito, Pasquale Uva, era nato invece in Egitto da genitori pugliesi.

    Avendo intrapreso corsi da soprano, Maria Uva accompagnava le navi dei coloni italiani che passavano nel Canale di Suez per la guerra d’Etiopia del 1935-36 con inni patriottici.

    Ben presto la sua divenne una vera e propria organizzazione con la collaborazione del marito e del resto della comunità italiana in Egitto. La Uva e i «suoi» fornirono ai soldati italiani ogni genere di conforto sia economico che morale.

    Per questo la donna ebbe molto spesso problemi con la comunità inglese presente sul suolo e fu costretta a trasferirsi in Italia nel 1937.

    Finita la guerra, Maria Uva si trovò in una profonda crisi finanziaria che però ebbe termine grazie all’aiuto di un diplomatico francese che aiutò il marito a trovare un nuovo lavoro.

    Umberto II dall’esilio conferì a Maria Uva l’onorificenza di «Dama della Corona d’Italia».

    Maria Uva è morta all’età di 97 anni.

    https://it.m.wikipedia.org/wiki/Maria_Uva

    #musique #chansons #musique_et_politique #fascisme #colonialisme #histoire #patriotisme #guerre_d'Ethiopie #Italie #musique_et_fascisme #Canal_de_Suez #Port_Said #colonialisme_italien

    ping @sinehebdo @olivier_aubert

    • En fait, Maria Uva était une chanteuse qui chantait des chants patriotiques (et fascistes) au passage des soldats italiens à travers le canal de Suez... et qui rejoignaient l’Erythrée et l’Ethiopie...
      Mais j’ai pas trouvé des enregistrements d’elle... peut-être le lien est un peu faible ;-)

    • Et en voici une autre :
      #Africanina

      Tre conti son già stati regolati
      Con #Adua, #Macallè ed #Amba_Alagi
      Tra poco chiuderemo la partita
      Vincendo la gloriosa impresa ardita.

      Pupetta mora, africanina,
      Tu della libertà sarai regina
      Col legionario liberatore
      Imparerai ad amare il tricolore

      Due ottobre ricordatelo a memoria
      Nell’Africa Orientale avrà una storia
      Romana civiltà questa è missione
      Ed ha fiorito cento e una canzone

      Pupetta mora, africanina
      Saprai baciare alla garibaldina
      Col bel saluto alla romana
      Sarai così una giovane Italiana

      Avanti Italia nuova che sia gloria
      All’armi tu e volontà vittoria
      Vittoria contro i barbari abissini
      E contro i sanzionisti ginevrini

      Pupetta mora, africanina
      Piccolo fiore di orientalina
      Labbra carnose dolce pupilla
      Tutti i tuoi figli si chiameran #Balilla

      Labbra carnose dolce pupilla
      Tutti i tuoi figli si chiameran Balilla

      https://www.youtube.com/watch?v=jKM9TquhLlo

      #chansons_coloniales

    • Et encore une...
      #Fischia_il_sasso (#Inno_dei_balilla)

      Fischia il sasso, il nome squilla
      del ragazzo di Portoria,
      e l’intrepido #Balilla
      sta gigante nella storia.

      Era bronzo quel mortaio
      che nel fango sprofondò
      ma il ragazzo fu d’acciaio
      e la madre liberò.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso,
      agli amici tutto il cuor.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso
      agli amici tutto il cuor.

      Sono baldi aquilotti
      come sardi tamburini
      come siculi picciotti
      o gli eroi garibaldini.

      Vibra l’alma lì nel petto
      sitibonda di virtù,
      dell’Italia il gagliardetto
      e nei fremiti sei tu.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso,
      agli amici tutto il cuor.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso
      agli amici tutto il cuor.

      Siamo nembi di sementi,
      siamo fiamme di coraggio:
      per noi canta la sorgente,
      per noi brilla e ride maggio.

      Ma se un giorno la battaglia
      Alpi e mare incendierà,
      noi saremo la mitraglia
      della santa Libertà.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso,
      agli amici tutto il cuor.

      Fiero l’occhio, svelto il passo
      chiaro il grido del valore.
      Ai nemici in fronte il sasso
      agli amici tutto il cuor.

      https://www.youtube.com/watch?v=cfo0sXxIcHE

      Igiaba Scego, dans le livre Roma negata , en parle ainsi :

      «Ci ho messo del tempo a capire che quella canzonetta (che confesso mi piaceva pure da piccoletta per la sua cadenza marziale un po’ zmpappà zumpappà) non era una ninna nanna, ma uno dei peggiori prodotti del fascismo più becero.»

      (p.102)

    • #Tripoli bel suol d’amore

      https://www.youtube.com/watch?v=yslUUVO2Rnc

      https://www.youtube.com/watch?v=BjoS5tfaDkU

      Sai dove s’annida più florido il suol?
      Sai dove sorride più magico il sol?
      Sul mar che ci lega con l’Africa d’or,
      la stella d’Italia ci addita un tesor.
      Ci addita un tesor!

      Tripoli, bel suol d’amore,
      ti giunga dolce questa mia canzon!
      Sventoli il tricolore
      sulle tue torri al rombo del cannon!
      Naviga, o corazzata:
      benigno è il vento e dolce la stagion.
      Tripoli, terra incantata,
      sarai italiana al rombo del cannon!

      A te, marinaro, sia l’onda sentier.
      Sia guida Fortuna per te, bersaglier.
      Và e spera, soldato, vittoria è colà,
      hai teco l’Italia che gridati:”Và!”

      Tripoli, bel suol d’amore,
      ti giunga dolce questa mia canzon!
      Sventoli il tricolore
      sulle tue torri al rombo del cannon!
      Naviga, o corazzata:
      benigno è il vento e dolce la stagion.
      Tripoli, terra incantata,
      sarai italiana al rombo del cannon!

      Al vento africano che Tripoli assal
      già squillan le trombe,
      la marcia real.
      A Tripoli i turchi non regnano più:
      già il nostro vessillo issato è lassù…

      Tripoli, bel suol d’amore,
      ti giunga dolce questa mia canzon!
      Sventoli il tricolore
      sulle tue torri al rombo del cannon!
      Naviga, o corazzata:
      benigno è il vento e dolce la stagion.
      Tripoli, terra incantata,
      sarai italiana al rombo del cannon!

  • Roma, la fermata della metro C #Amba_Aradam cambia nome: approvata l’intitolazione al partigiano #Marincola. Il vox tra i cittadini

    E’ stata approvata questo pomeriggio la mozione che impegna l’amministrazione capitolina ad intitolare la futura fermata della Metro C Amba Aradam al partigiano italo-somalo #Giorgio_Marincola. Mentre nell’Aula Giulio Cesare l’assemblea capitolina votava la mozione, appoggiata dalla sindaca Virginia Raggi, per cambiare quel nome simbolo del colonialismo italiano e di una delle peggiori stragi compiute dal regime fascista in Africa, i residenti che abitano nel quartiere vicino l’omonima via Amba Aradam, nell’area di San Giovanni, si dividono sull’iniziativa.


    C’è chi difende l’iniziativa del Campidoglio. Chi vuole conservare il vecchio nome scelto per la stazione metro C di Roma, ‘Amba Aradam‘, affinché “anche gli errori e le atrocità non vengano dimenticate”. Ma anche chi rivendica che “la storia non si debba cambiare”, quasi ‘nostalgico’ del periodo coloniale di matrice fascista.

    Lì, dove è in costruzione una nuova fermata della metropolitana (che dovrebbe essere ultimata entro il 2024, ndr) erano state le azioni dimostrative degli attivisti di #Black_Lives_Matter, seguite da appelli della società civile, a porre il problema di quella controversa toponomastica. Chiedendo di sostituire quel nome e di rendere invece omaggio al partigiano Marincola. Figlio di un soldato italiano e di una donna somala, da giovanissimo scelse di combattere per la Resistenza, contro l’occupazione nazifascista, ucciso dalle SS in Val di Fiemme il 4 maggio 1945.

    “Una scelta giusta, omaggiare un partigiano di colore può essere un atto di grande valore simbolico”, c’è chi spiega. Altri concordano: “Perché no?”. Una proposta che ha anche permesso di conoscere una storia spesso dimenticata: “Non lo conoscevo, ho letto sui giornali. Ma ora sono convinto che sia giusto dedicargli questo riconoscimento”, spiega una ragazza.

    Altri invece sono contrari: “Deve restare il nome ‘Amba Aradam’, si è sempre chiamata così anche la via”. Eppure, tra i sostenitori del vecchio nome (ma non solo), quasi nessuno conosce la storia della strage fascista che si consumò nel massiccio montuoso a nord di Addis Abeba, lungo il Tigre, quando, nel 1936, le truppe del maresciallo Badoglio e l’aviazione italiana massacrarono 20mila etiopi, compresi civili, donne e bambini, usando gas vietati già allora dalle convenzioni internazionali, come l’iprite. Altre centinaia persero la vita tre anni più tardi, all’interno di una profonda grotta dell’area, con le truppe fasciste che fecero uso di gas e lanciafiamme contro la resistenza etiope, per poi murare vivi gli ultimi sopravvissuti.

    Una storia che quasi nessuno conosce, anche chi difende il nome ‘Amba Aradam’. Certo, chi concorda con la nuova intitolazione è convinto che, al di là dei simboli, siano necessarie altre azioni concrete sul tema immigrazione, compreso il diritto alla cittadinanza per chi nasce, cresce e studia in Italia: “Ius soli e Ius culturae? Sono favorevole”, spiegano diversi residenti. Ma non solo: “Serve anche ripartire dalle scuole e dalla formazione per debellare il razzismo”.

    https://www.ilfattoquotidiano.it/2020/08/04/roma-la-fermata-della-metro-c-di-via-amba-aradam-sara-intitolata-al-partigiano-marincola-il-vox-tra-i-residenti-sulliniziativa-del-campidoglio/5889280
    #toponymie #toponymie_politique #Italie #colonialisme #Rome #partisans #métro #station_de_métro #colonialisme_italien #passé_colonial #mémoire #guerre_d'Ethiopie #Ethiopie #massacre #Badoglio

    –-

    ajouté à la métaliste sur le colonialisme italien:
    https://seenthis.net/messages/871953

    ping @isskein @albertocampiphoto

    • Prossima fermata: Giorgio Marincola

      Sulla scia di Black Lives Matter, un piccolo movimento d’opinione ha proposto di rinominare una stazione della metro C in costruzione. Sarà intitolata al partigiano nero che morì combattendo i nazisti in val di Fiemme.

      La zona intorno a via dell’Amba Aradam a Roma, alle spalle della basilica di San Giovanni in Laterano, è da tempo sottosopra per la presenza di un grande cantiere. Sono i lavori della linea C della metropolitana: uno dei tanti miti romani che si spera possa un giorno, chissà, diventare realtà. Se tutto andrà bene, nel 2024 la città avrà una fermata della nuova metro chiamata per l’appunto «Amba Aradam».

      Anzi, non più. Martedì 4 agosto l’Assemblea capitolina ha approvato – con l’appoggio della sindaca Virginia Raggi – una mozione che vincola l’Amministrazione cittadina a cambiare quel nome. Niente Amba Aradam: la stazione si chiamerà «Giorgio Marincola». Alla grande maggioranza degli italiani nessuno di questi due nomi – di luogo il primo, di persona il secondo – dice alcunché. Il primo è da tempo dimenticato dai più; il secondo nemmeno l’hanno mai sentito. Eppure la decisione di sostituire l’uno con l’altro, maturata nelle settimane recenti sulla scia del movimento Black Lives Matter e delle sue ripercussioni in Italia, è una svolta importante, di rilevante significato politico. Certifica l’opposta curva che la reputazione, l’eco dei due nomi percorre nella coscienza dei contemporanei.

      L’Amba Aradam, gruppo montuoso della regione del Tigrè, fu teatro a metà febbraio 1936 di una battaglia nel corso dell’aggressione fascista all’Etiopia. All’epoca venne celebrata in Italia come una grande vittoria, tacendo che era stata ottenuta con l’uso massiccio e indiscriminato di gas asfissianti proibiti dalla Convenzione di Ginevra. Ventimila morti tra combattenti e civili inermi abissini: una strage, un crimine di guerra per il quale nessuno è mai stato processato. Il Negus, costretto all’esilio, denunciò l’accaduto dalla tribuna della Società delle Nazioni, attirando sull’Italia l’obbrobrio delle democrazie. Oggi gli italiani in massima parte non sanno o non vogliono sapere. Restano i nomi di strade e piazze in varie località del Paese e un’espressione, «ambaradàn», di cui s’è scordata l’origine e che sta a significare una gran confusione.

      All’epoca della battaglia Giorgio Marincola aveva 12 anni e mezzo e frequentava la scuola media a Roma. La sua esistenza, sia prima che dopo, non ebbe nulla dell’apparente banalità che sembrano indicare queste scarne notizie. E merita di essere raccontata, perché troppo pochi ancora la conoscono.

      Giorgio era nato in Somalia nel settembre del ’33. Suo padre Giuseppe era un maresciallo maggiore della Regia Fanteria; sua madre, Askhiro Hassan, era somala; la sua pelle era color caffellatte. Prendere una concubina del posto, per gli italiani che a vario titolo si trovavano nella colonia somala era, all’epoca, comportamento diffuso. Per niente diffusa, viceversa, la scelta di riconoscere i figli nati da quelle unioni: ma Giuseppe Marincola volle comportarsi così, e li portò con sé in Italia. Giorgio, negli anni dell’infanzia, fu affidato a una coppia di zii che vivevano in Calabria e non avevano figli. La sorellina Isabella, di due anni più giovane, crebbe invece presso il padre e la moglie italiana che Giuseppe aveva nel frattempo sposato. Questa precoce separazione segnò le vite dei bambini: il maschio fu avvolto dall’affetto degli zii come fosse figlio loro; Isabella fu respinta dalla cattiveria e dai maltrattamenti di una matrigna che non l’amava. (La sua storia è narrata nel bel libro di Wu Ming 2 e Antar Mohamed Timira, pubblicato da Einaudi nel 2012, dal quale sono tratte la maggior parte delle informazioni qui riferite).

      Adolescente, Giorgio Marincola fu riunito alla sua famiglia a Roma. Negli anni del liceo, iscritto all’Umberto I, ebbe come insegnante di Storia e Filosofia Pilo Albertelli, al quale quello stesso istituto scolastico è oggi dedicato. Il professor Albertelli, partigiano, eroe della Resistenza, medaglia d’oro al valor militare, fu arrestato il primo marzo del ’44 mentre faceva lezione, torturato, infine trucidato tra i martiri dell’eccidio delle Fosse Ardeatine. A quel punto Giorgio, che nel frattempo aveva terminato le superiori e si era iscritto a Medicina, ne aveva già seguito l’esempio unendosi ai gruppi partigiani legati a Giustizia e Libertà attivi a Roma e nel Lazio.

      Nel giugno del ’44 i tedeschi lasciarono Roma e i compagni d’avventura di Giorgio, deposte le armi, si apprestarono a tornare all’università. Lui volle invece continuare a combattere: raggiunse la Puglia, dove ricevette una sommaria formazione da parte delle forze speciali alleate, e qualche settimana dopo fu paracadutato sul Biellese. Si unì alle formazioni partigiane di GL in Piemonte, finché non fu catturato. I fascisti repubblichini usavano costringere i prigionieri a lanciare appelli dalla loro emittente Radio Baita, affinché convincessero i compagni a deporre le armi. Messo davanti al microfono, Marincola pronunciò invece parole che andrebbero riportate su ogni manuale scolastico di storia: «Sento la patria come una cultura e un sentimento di libertà, non come un colore qualsiasi sulla carta geografica… La patria non è identificabile con dittature simili a quella fascista. Patria significa libertà e giustizia per i popoli del mondo. Per questo combatto gli oppressori…».

      Così il giovane eroe fu consegnato ai tedeschi, che lo deportarono nel campo di transito di Gries, alle porte di Bolzano. Lì lo raggiunse la Liberazione, all’indomani del 25 aprile 1945. La guerra in Italia era finita ma ancora una volta Giorgio si mise a disposizione dei comandi militari di Giustizia e Libertà. Insieme ad altri cinque o sei ragazzi, fu incaricato di presidiare un bivio in località Stramentizzo in Val di Fiemme, poco a nord di Trento, sulla strada della ritirata delle colonne tedesche le quali, in base agli accordi di resa, avevano avuto concesso libero transito verso il loro Paese. Per evitare incidenti, la piccola unità partigiana aveva ricevuto ordine di non portare le armi: si trattava insomma soltanto di dirigere il traffico.

      Alle prime ore di una bella mattina di maggio, il giorno 5, una colonna di SS si presentò all’incrocio, preceduta da bandiere bianche. I soldati scesero dai camion e fecero fuoco. Poi procedettero verso il paese di Stramentizzo, seminando morte tra le case: fu l’ultima strage nazista in territorio italiano. L’episodio è stato variamente raccontato: sta di fatto che così finì la giovane vita di Giorgio Marincola, a 22 anni non ancora compiuti. Quando i comandi di GL ricevettero le prime confuse notizie dell’accaduto, furono informati che tra i morti c’era un ufficiale di collegamento americano: nessuno immaginava che un uomo dalla pelle nera potesse essere italiano.

      Da molti decenni Stramentizzo non esiste più: alla metà degli anni Cinquanta finì sul fondo del lago artificiale creato dalla diga costruita sul corso del torrente Avisio. A Marincola fu conferita la medaglia d’oro al valor militare alla memoria; nel ’46 l’Università di Roma gli attribuì la laurea in Medicina honoris causa. Poi il suo nome finì nel dimenticatoio: una via a Biella, nelle cui vicinanze aveva combattuto; un’aula della scuola italiana a Mogadiscio, in Somalia, in seguito demolita. Nient’altro. Finché, piano piano, con una lotta sorda e ostinata per salvarne la memoria, si è tornati a parlare di lui: un libro, Razza partigiana, di Carlo Costa e Lorenzo Teodonio; l’aula di Scienze del liceo Albertelli di Roma, dove oggi ai ragazzi viene raccontata la sua storia. E, nel prossimo futuro, una stazione delle metropolitana, affinché i romani ricordino.

      https://www.azione.ch/attualita/dettaglio/articolo/prossima-fermata-giorgio-marincola.html

    • Metro C, nuova stazione Amba Aradam-Ipponio sarà intitolata a partigiano Giorgio Marincola

      Approvata in Campidoglio una mozione per intitolare la futura fermata della metro C Amba Aradam/Ipponio al partigiano antifascista Giorgio Marincola. Figlio di un sottufficiale italiano e di una donna somala, vissuto a Roma nel quartiere di Casalbertone, scelse di contribuire alla liberazione d’Italia nel periodo della Resistenza. Morì in Val di Fiemme nel maggio 1945.

      L’iniziativa per l’intitolazione era stata lanciata, nelle scorse settimane, con una petizione su change.org che ha raccolto numerose adesioni.

      https://www.comune.roma.it/web/it/notizia/metro-c-nuova-stazione-amba-aradam-ipponio-sara-intitolata-a-partigiano-

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      Le texte de la motion:
      Mozione n.68 del 4agosto 2020
      https://www.carteinregola.it/wp-content/uploads/2016/09/moz68-20-intitolazione-stazione-metro-marincola.pdf

    • La pétition sur change.org:
      Fanpage - "Perché intitolare al partigiano meticcio Marincola la stazione della metro C Amba Aradam

      «Giorgio Marincola, figlio di una madre somala e di un soldato italiano, è stato un partigiano che ha combattuto da Roma al Nord Italia fino agli ultimi giorni della Liberazione. Sarebbe meglio intitolare la nuova stazione della metro C a lui, piuttosto che con il nome Amba Aradam, che ricorda uno degli episodi più atroci dell’occupazione italiana in Etiopia. La proposta, rilanciata anche da Roberto Saviano, ora è diventata una petizione online rivolta alla sindaca Virginia Raggi.»

      https://www.change.org/p/virginia-raggi-intitoliamo-la-stazione-della-metro-c-di-via-dell-amba-aradam-a-giorgio-marincola/u/27093501

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      Perché intitolare al partigiano meticcio Giorgio Marincola la stazione della metro C di Amba Aradam

      Giorgio Marincola, figlio di una madre somala e di un soldato italiano, è stato un partigiano che ha combattuto da Roma al Nord Italia fino agli ultimi giorni della Liberazione. Sarebbe meglio intitolare la nuova stazione della metro C a lui, piuttosto che con il nome Amba Aradam, che ricorda uno degli episodi più atroci dell’occupazione italiana in Etiopia. La proposta, rilanciata anche da Roberto Saviano, ora è diventata una petizione online rivolta alla sindaca Virginia Raggi.

      Nella notte tra giovedì e venerdì un’azione da parte di un gruppo di attivisti antirazzisti ha portate anche nella capitale la mobilitazione che, partita dagli Stati Uniti e allargatasi all’Europa e non solo, mette in discussione i simboli del passato coloniale e schiavista, siano essi statue, targhe, intitolazioni di vie e piazze. A Milano a finire (di nuovo) nel mirino è stata la statua dedicata al giornalista Indro Montanelli. A Roma, con l’hashtag Black Lives Matter, a essere presa di mira è stata la statua del generale #Antonio_Baldissera, protagonista degli orrori dell’avventura coloniale fascista, il cui busto al Pincio è stato coperto di vernice. Contemporaneamente largo dell’Amba Aradam e via dell’Amba Aradam venivano reintitolati a #George_Floyd e a #Bilal_Ben_Messaud. «#Nessuna_stazione_abbia_il_nome_dell'oppressione», con questo cartello gli attivisti hanno posto il problema del nome della stazione della Metro C di prossima apertura, che richiama uno degli episodi più sanguinosi e brutali della repressione della resistenza etiope all’occupazione italiana.

      Una questione, quella del nome della nuova stazione, che ha visto un’apertura da parte dell’assessore ai Trasporti di Roma Capitale Pietro Calabrese. “Ci stavamo già pensando, anche perché, al di là di tutto, la stazione non è su viale dell’Amba Aradam”, ha dichiarato al Fatto Quotidiano. Intanto in rete ha cominciato a circolare una proposta: perché non intitolarla al partigiano Giorgio Marincola? Figlio di un soldato italiano e di una donna somala, il padre Giuseppe Marincola era stato caporale maggiore e, decise di riconoscere i due figli avuti dall’unione con Askhiro Hassan.

      Una proposta che è stata rilanciata da Roberto Saviano e che è diventata ora una petizione su Change.org indirizzata alla sindaca Virginia Raggi, lanciata dal giornalista Massimiliano Coccia: «La fermata della Metro C di Roma che sorge a ridosso di Porta Metronia in via dell’Amba Aradam sia intitolata a Giorgio Marincola, partigiano nero, nato in Somalia e ucciso dai nazisti in Val di Fiemme. Giorgio liberò Roma e scelse di liberare l’Italia. Una storia spesso dimenticata dalla storiografia attuale ma che racconta una pagina generosa della nostra Resistenza». Sarebbe questa una scelta simbolica certo, ma di grande impatto, per affrontare la questione del colonialismo italiano e cominciare a fare i conti con il mito degli «italiani brava gente» che, appunto altro non è che un mito. Giorgio Marincola non è stato solo una partigiano, ma la vicenda della sua famiglia già dagli anni ’20 del secolo pone la questione dell’esistenza di una black Italy misconosciuta e negata.
      La storia di Giorgio e Isabella Marincola è la storia di un’Italia meticcia

      Giorgio Marincola arriva in Italia poco dopo la sua nascita e si iscrisse nel 1941 alla facoltà di Medicina cominciando ad avvicinarsi al Partito d’Azione con cui poi decise di partecipare alla Resistenza, prima a Roma poi nel Nord Italia. Catturato dalle SS fu tradotto dopo percosse e torture in carcere a Torino e poi a Bolzano. Qui fu liberato dagli Alleati ma invece di portarsi in Svizzera con un convoglio della Croce Rossa, decise di proseguire la Resistenza in Val di Fiemme e qui sarà ucciso il 4 maggio 1945 a un posto di blocco dai soldati tedeschi ormai in rotta. Alla sua storia è stato dedicato un libro «Razza Partigiana», che è anche un sito internet, scritto da Carlo Costa e Lorenzo Teodonio ed edito da Iacobelli. Anche la storia della sorella di Giorgio, Isabella Marincola, è entrata in un libro scritto dal figlio Antar Mohamed e dallo scrittore Wu Ming 2, è intitolato «Timira. Romanzo Meticcio» (Einaudi) e indaga attraverso il caleidoscopio biografico di Isabella e di Antar la storia coloniale italiana e il suo presente di rimozione, una storia che attraversa tutto il Novecento e l’inizio del nuovo secolo attraverso la vicenda a tratti incredibile di una «italiana nera».

      https://roma.fanpage.it/perche-intitolare-al-partigiano-meticcio-giorgio-marincola-la-stazione-

    • Il blitz: via Amba Aradam intitolata a George Floyd e Bilal Ben Messaud

      Raid antirazzista nella notte in via dell’Amba Aradam in zona San Giovanni a Roma. Cartelli della toponomastica modificati con fogli con su scritto il nome di George Floyd e Bilal Ben Messaud ed esposto uno striscione con su scritto «Nessuna stazione abbia il nome dell’oppressione» firmato Black Lives Matter. Sul posto la polizia. Inoltre, sempre durante la notte, il busto di Antonio Baldissera, generale a capo delle truppe italiane in Eritrea, è stata imbrattata con vernice rossa. I raid antirazzisti sono stati messi a segno dal gruppo Restiamo umani. «Smantelleremo i simboli del colonialismo nella Capitale», annunciano su Facebook dando «il sostegno ai manifestanti che a partire da Minneapolis hanno riempito le piazze di decine di città del mondo» e rifiutando «ogni contestualizzazione storica». I componenti del gruppo Restiamo umani dunque prendono come bersaglio «le strade che richiamano stragi vergognose compiute dai soldati italiani in Etiopia, come via dell’Amba Aradam» o i «monumenti che conferiscono invece gloria eterna a uomini colpevoli delle peggiori atrocità verso il genere umano: tra gli “illustri” della storia italiana al Pincio c’è un busto di Antonio Baldissera, generale a capo delle truppe italiane in Eritrea e successivamente governatore della colonia italiana di Eritrea alla fine del XIX secolo, quasi che il passato coloniale italiano fosse un lustro invece che un crimine che come tale va ricordato».

      https://video.corriere.it/blitz-via-amba-aradam-intitolata-george-floyd-bilal-ben-messaud/bd76d308-b20b-11ea-b99d-35d9ea91923c

    • Fantasmi coloniali

      Nella notte di giovedì 18 giugno, la Rete Restiamo Umani di Roma ha compiuto un’azione di #guerriglia_odonomastica in alcuni luoghi della città che celebrano gli orrori del colonialismo italiano in Africa. In particolare sono stati colpiti la via e il largo «dell’Amba Aradam», insieme alla futura stazione «Amba Aradam/Ipponio» sulla linea C della metropolitana.

      Le targhe stradali sono state modificate per diventare «via George Floyd e Bilal Ben Messaud», mentre lungo le barriere che delimitano il cantiere della nuova fermata sotterranea sono comparsi grandi manifesti con scritto: «Nessuna stazione abbia il nome dell’oppressione».

      Il gesto degli attivisti romani intende denunciare la rimozione, il silenzio e la censura sui crimini del colonialismo, poiché questi contribuiscono a rafforzare e legittimare il razzismo di oggi. Amba Aradam è infatti il nome di un’altura dell’Etiopia dove l’esercito italiano, guidato da Pietro Badoglio, sconfisse i soldati di Hailé Selassié, sparando anche 1.367 proietti caricati ad arsine, un gas infiammabile e altamente tossico, in aperta violazione del Protocollo di Ginevra del 1925, contro l’impiego in guerra di armi chimiche.

      Nei giorni successivi, l’aviazione italiana bombardò le truppe nemiche in fuga. Nella sua relazione al Ministero delle Colonie, Badoglio scrisse che: «in complesso 196 aerei sono stati impiegati per il lancio di 60 tonnellate di yprite (sic) sui passaggi obbligati e sugli itinerari percorsi dalle colonne».

      La strada si chiama così dal 21 aprile 1936, quando venne inaugurata da Mussolini in persona. Il suo nome precedente era «Via della Ferratella», forse per via di una grata, nel punto in cui il canale della Marana passava sotto Porta Metronia. Per non cancellare quell’odonimo, venne ribattezzata «via della Ferratella in Laterano» una strada subito adiacente.

      Negli ultimi anni, molte azioni di guerriglia odonomastica si sono ripetute nelle città italiane, dimostrando che i simboli del passato parlano al presente anche quando li si vorrebbe anestetizzare e seppellire nell’indifferenza. L’intervento di giovedì scorso ha avuto grande risonanza non perché sia il primo di questo genere, ma in quanto si collega esplicitamente alle proteste per l’assassinio di George Floyd, al movimento Black Lives Matter e al proliferare di attacchi contro statue e targhe odiose in tutto il mondo.

      Tanta attenzione ha prodotto, come primo risultato, la proposta di intitolare la nuova stazione della metro Ipponio/Amba Aradam al partigiano italo-somalo Giorgio Marincola, con tanto di petizione on-line alla sindaca Raggi. Quest’idea ci rende ovviamente felici, perché da oltre dieci anni ci sforziamo di far conoscere la storia di Giorgio e di sua sorella Isabella, con libri, spettacoli, ricerche, interventi nelle scuole e progetti a più mani.

      Ci sembra anche molto significativo che un luogo sotterraneo porti il nome di Giorgio Marincola, dal momento che la sua resistenza fu ancor più clandestina di quella dei suoi compagni, visto il colore molto riconoscibile della sua pelle, specie quando agiva in città, nelle file del Partito d’Azione. E d’altra parte, la miglior memoria della Resistenza è quella che si esprime dal basso, underground, senza bisogno di grandi monumenti, riflettori e alzabandiera: una memoria tuttora scomoda, conflittuale, che fatica a vedere la luce del sole.

      Ben venga quindi la stazione “Giorgio Marincola” della Metro C, ma ci permettiamo di suggerire che quell’intitolazione sia vincolata a un’altra proposta. Non vorremmo infatti che il nome di Giorgio facesse dimenticare quell’altro nome, Amba Aradam. Non vorremmo che intitolare la stazione a un “bravo nero italiano” finisse per mettere tra parentesi la vera questione, quella da cui nasce la protesta della Rete Restiamo Umani, ovvero la presenza di fantasmi coloniali nelle nostre città: una presenza incontestata, edulcorata e in certi casi addirittura omaggiata. Non vorremmo che uscendo dalla stazione Giorgio Marincola si continuasse a percorrere, come se niente fosse, via dell’Amba Aradam. Sarebbe davvero un controsenso.

      Roberto Saviano, appoggiando l’idea della “stazione Giorgio Marincola” ha scritto: «la politica sia coraggiosa, almeno una volta». Ma che coraggio ci vuole per intitolare una fermata della metro a un italiano morto per combattere il nazifascismo? Davvero siamo arrivati a questo punto? Siamo d’accordo con Saviano, c’è bisogno di gesti coraggiosi, non di gesti spacciati per coraggiosi che ci esimano dall’avere coraggio.

      Sappiamo che cambiare ufficialmente il nome a via dell’Amba Aradam sarebbe molto difficile, anche se l’esempio di Berlino dimostra che quando davvero si vuole, certe difficoltà si superano: nella capitale tedesca, tre strade intitolate a protagonisti del colonialismo in Africa sono state dedicate a combattenti della resistenza anti-coloniale contro i tedeschi.

      Ci piacerebbe allora che la stazione “Giorgio Marincola” venisse inaugurata insieme a un intervento “esplicativo” su via dell’Amba Aradam, come si è fatto a Bolzano con il bassorilievo della Casa Littoria e con il Monumento alla Vittoria. Si potrebbero affiggere alle targhe stradali altri cartelli, che illustrino cosa successe in quel luogo e in quale contesto di aggressione; si potrebbe aggiungere una piccola chiosa, sul cartello stesso, sotto il nome della via: «luogo di crimini del colonialismo italiano», o qualunque altro contributo che risvegli i fantasmi, che li renda ben visibili, che non ci lasci tranquilli e pacificati, convinti che l’ambaradan sia solo un ammasso di idee confuse.

      https://comune-info.net/che-il-colonialismo-non-riposi-in-pace
      #guerilla_toponymique #Via_della_Ferratella #fascisme #via_della_Ferratella_in_Laterano #Indro_Montanelli #Partito_d’Azione #Francesco_Azzi #Azzi #Magliocco

    • Siamo molto content* che l’amministrazione capitolina abbia scelto di dedicare a Giorgio Marincola la stazione inizialmente nominata «Amba Aradam», e siamo content* che il processo che ha portato a questa scelta sia iniziato grazie alla nostra azione del 18 giugno scorso. Crediamo però che questo sia solo un primo passo. La via e il largo di fronte alla stazione, dedicati all’ignobile eccidio compiuto dal nostro esercito colonizzatore in Etiopia devono al più presto seguire la stessa strada e cambiare nome. Il percorso per decolonizzare la toponomastica razzista e colonialista ancora presente nella nostra città ha avuto solo un inizio e deve necessariamente continuare. Lo dobbiamo a chi è morto per le atrocità compiute dall’esercito tricolore, lo dobbiamo a chi è discriminato per razzismo oggi, lo dobbiamo a chi muore in mare per l’ignavia del nostro governo. Ricordiamo che il governo Conte e la sua maggioranza hanno vergognosamente confermato gli accordi con le milizie libiche responsabili di atroci violazioni a diritti umani della popolazione migrante africana. In forme diverse e più mediate, ma la violenza coloniale e razzista del nostro paese continua tutt’oggi e non smetteremo di lottare perché abbia fine.

      https://www.facebook.com/ReteRestiamoUmani

    • Why a Somali-born fighter is being honoured in Rome

      Rome’s city council voted earlier this month to name a future metro station in the Italian capital in honour of Giorgio Marincola, an Italian-Somali who was a member of the Italian resistance.

      He was killed at the age of 21 by withdrawing Nazi troops who opened fire at a checkpoint on 4 May 1945, two days after Germany had officially surrendered in Italy at the end of World War Two.

      The station, which is currently under construction, was going to be called Amba Aradam-Ipponio - a reference to an Italian campaign in Ethiopia in 1936 when fascist forces brutally unleashed chemical weapons and committed war crimes at the infamous Battle of Amba Aradam.

      The name change came after a campaign was launched in June, in the wake of Black Lives Matter protests around the world following the killing of African American George Floyd by US police.

      Started by journalist Massimiliano Coccia, he was supported by Black Lives Matter activists, other journalists and Italian-Somali writer Igiabo Scego and Marincola’s nephew, the author Antar Marincola.
      The ’black partisan’

      Activists first placed a banner at the metro site stating that no station should be named after “oppression” and pushed for Marincola’s short, but remarkable life to be remembered.

      He is known as the “partigiano neroor” or “black partisan” and was an active member of the resistance.

      In 1953 he was posthumously awarded Italy’s highest military honour, the Medaglia d’Oro al Valor Militare, in recognition of his efforts and the ultimate sacrifice he made.

      Marincola was born in 1923 in Mahaday, a town on the Shebelle River, north of Mogadishu, in what was then known as Italian Somaliland.

      His mother, Ashkiro Hassan, was Somali and his father an Italian military officer called Giuseppe Marincola.

      At the time few Italian colonists acknowledged children born of their unions with Somali women.

      But Giuseppe Marincola bucked the trend and later brought his son and daughter, Isabella, to Italy to be raised by his family.

      Isabella went on to become an actress, notably appearing in Riso Amaro (Bitter Rice), released in 1949.

      Giorgio Marincola too was gifted, excelling at school in Rome and went on to enrol as a medical student.

      During his studies he came to be inspired by anti-fascist ideology. He decided to enlist in the resistance in 1943 - at a time his country of birth was still under Italian rule.

      He proved a brave fighter, was parachuted into enemy territory and was wounded. At one time he was captured by the SS, who wanted him to speak against the partisans on their radio station. On air he reportedly defied them, saying: “Homeland means freedom and justice for the peoples of the world. This is why I fight the oppressors.”

      The broadcast was interrupted - and sounds of a beating could be heard.

      ’Collective amnesia’

      But anti-racism activists want far more than just the renaming of a metro stop after Marincola - they want to shine the spotlight on Italy’s colonial history.

      They want the authorities in Rome to go further and begin a process of decolonising the city.

      This happened unilaterally in Milan when, amid the Black Lives Matter protests, the statue of controversial journalist Indro Montanelli, who defended colonialism and admitted to marrying a 12-year-old Eritrean girl during his army service in the 1930s, was defaced.

      Yet to bring about true change there needs to be an awareness about the past.

      The trouble at the moment is what seems to be a collective amnesia in Italy over its colonial history.

      In the years I have spent reporting from the country I am always struck at how little most Italians seem to know about their colonial history, whether I’m in Rome, Palermo or Venice.

      The extent of Italy’s involvement in Eritrea, Somalia, Libya and Albania to Benito Mussolini’s fascist occupation of Ethiopia in the 1930s is not acknowledged.
      Somali bolognese

      Last month, Somalia celebrated its 60th anniversary of independence.

      Reshaped by 30 years of conflict, memories of colonial times have all been lost - except in the kitchen where a staple of Somali cuisine is “suugo suqaar”- a sauce eaten with “baasto” or pasta.

      But for this Somali bolognese, we use cubed beef, goat or lamb with our version of the classic Italian soffritto - sautéed carrots, onion and peppers - to which we add heady spices.

      I love to cook these dishes and last summer while I was in Palermo did so for Italian friends, serving it with shigni, a spicy hot sauce, and bananas.

      It was a strange pairing for Italians, though my friends tucked in with gusto - with only the odd raised eyebrow.

      And Somalis have also left their own imprint in Italy - not just through the Marincola siblings - but in the literature, film and sports.

      Cristina Ali Farah is a well-known novelist, Amin Nour is an actor and director, Zahra Bani represented Italy as a javelin thrower and Omar Degan is a respected architect.

      And today Somalis constitute both some of Italy’s oldest and newest migrants.

      In spring 2015 I spent a warm afternoon meandering throughout the backstreets near Rome’s Termini station meeting Somalis who had been in Italy for decades and Somalis who had arrived on dinghies from Libya.

      Those new to Italy called the older community “mezze-lira” - meaning “half lira” to denote their dual Somali-Italian identities.

      In turn they are called “Titanics” by established Somalis, a reference to the hard times most migrants have faced in making the perilous journey across the Mediterranean to reach Europe, and the lives they will face in Italy with the political rise of anti-migration parties.

      The naming of a station after Marincola is an important move for all of them - and a timely reminder for all Italians of the long ties between Italy and Somalia.

      https://www.bbc.com/news/world-africa-53837708

    • «La Casati era una delle varie imprese satelliti di una società, molto più grande, che da decenni dominava lo sviluppo urbanistico di Roma in serena continuità con il fascismo. Era già stata protagonista dello sviluppo della Città Eterna quando essa era diventata capitale dell’Italia unita, e aveva costruito interi quartieri in quella che un tempo era campagna. A molto delle nuove strade tracciate a inizio secolo e poi durante il Ventennio erano stati dati nomi coloniali - Viale Libia, via Eritrea, Via Dire Daua - che finita la guerra nessuno, nonostante la fine congiunta di fascismo e possedimenti d’oltremare, pensò di sostituire. Nemmeno quelli, come viale Amba Aradam, intitolati a carneficine».

      (pp.240-241)

      «In seguito certi soldati, quando furono tornati in Italia, presero a usare il nome di quel luogo come sinonimo dell’indescrivibile orrore. Come però succede da sampre i reduci di ogni guerra, non li capì nessuno. Chi non c’era stato non poteva immaginare il tappeto di carne che significavano quelle due parole: Amba Aradam. Anche perché il Duce le dichiarò il nome di una vittoria, qualcosa a cui intitolare piazze e strade. Gli italiani, come massaie che lavano imbarazzanti macchie dalle lenzuola prima di stenderle, ne eliminarono ogni retrogusto di orrore e le unirono in una sola dal suono buffo.
      ’Non fare questo ambaradam’ presero a dire le madri ai loro piccoli capricciosi’»

      (pp.354-355)

      in : #livre « #Sangue_giusto » de #Francesca_Melandri


      http://bur.rizzolilibri.it/libri/sangue-giusto-

  • #Roma_negata. Percorsi postcoloniali nella città
    Un viaggio attraverso la città per recuperare dall’oblio un passato coloniale disconosciuto.

    Libia, Somalia, Eritrea, Etiopia: quali sono le tracce dell’avventura coloniale italiana a Roma? Roma negata è un viaggio attraverso la città per recuperare dall’oblio un passato coloniale disconosciuto e dare voce a chi proviene da quell’Africa che l’Italia ha prima invaso e poi dimenticato. Igiaba Scego racconta i luoghi simbolo di quel passato coloniale; Rino Bianchi li fotografa, assieme agli eredi di quella storia. Il risultato è una costruzione narrativa e visiva di un’Italia decolonizzata, multiculturale, inclusiva, dove ogni cittadino possa essere finalmente se stesso. Negli anni trenta del secolo scorso Asmara, Mogadiscio, Macallè, Tripoli, Adua erano nomi familiari agli italiani. La propaganda per l’impero voluta da Benito Mussolini era stata battente e ossessiva. Dai giochi dell’oca ai quaderni scolastici, per non parlare delle parate, tutto profumava di colonie. Di quella storia ora si sa poco o niente, anche se in Italia è forte la presenza di chi proviene da quelle terre d’Africa colonizzate: ci sono eritrei, libici, somali, etiopi. Il libro riprende la materia dell’oblio coloniale e la tematizza attraverso alcuni luoghi di Roma che portano le tracce di quel passato dimenticato. I monumenti infatti, più di altre cose, ci parlano di questa storia, dove le ombre sono più delle luci. Prende vita così un’analisi emozionale dei luoghi voluti a celebrazione del colonialismo italiano, attraverso un testo narrativo e delle fotografie. In ogni foto insieme al monumento viene ritratta anche una persona appartenente a quell’Africa che fu colonia dell’Italia. Scego e Bianchi costruiscono così un percorso di riappropriazione della storia da parte di chi è stato subalterno. «Volevamo partire dal Corno D’Africa, dall’umiliazione di quel colonialismo crudele e straccione, perché di fatto era in quel passato che si annidava la xenofobia del presente (…) Da Roma negata emerge quel Corno d’Africa che oggi sta morendo nel Mediterraneo, disconosciuto da tutti e soprattutto da chi un tempo l’aveva sfruttato».

    https://www.ediesseonline.it/prodotto/roma-negata

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    Citations :

    «Ma non tutte le memorie, lo stavo scoprendo con il tempo, avevano lo stesso trattamento.
    C’erano memorie di serie B e serie C. Memorie che nessuno voleva ricordare, perché troppo scomode, troppo vere.»

    (pp.16-17)

    «Ahi, il colonialismo italiano ferita mai risanata, ferita mai ricucita, memoria obliata»

    (p.18)

    «Ora la stele sta ad Axum, insieme alle sue sorelle etiopi. Ma a Piazza di Porta Capena cos’è rimasto di quel passaggio?
    Solo vuoto, solo silenzio, assenza, oblio, smemoratezza in salsa italica».

    (p.18)

    «E anche dimenticare la storia che lega Africa e Italia è un’infamia. Perché dimenticandola si dimentica di essere stati infami, razzisti, colonialisti. Italiani brava gente, ti dicono i più autoassolvendosi, e si continua beatamente a rifare gli stessi errori. Ieri i colonizzati, oggi i migranti, vittime di un sistema che si autogenera e autoassolve. Ecco perché sono ossessionata dai luoghi. E’ da lì che dobbiamo ricominciare un percorso diverso, un’Italia diversa.»

    (p.25)

    Sur le Cinema Impero :

    «Il colonialismo italiano era davanti ai loro occhi tutti i giorni con i suoi massacri, i suoi stupri, la sopraffazione dei corpi e delle menti. Era lì con la sua storia di lacrime e di sangue sparso. Era lì a testimoniare quel legame tra Africa e Italia. Un legame violento, cattivo, sporco e non certo piacevole. Anche nel nome quel cinema era violento. L’impero era quello che Benito Mussolini sognava per aver prestigio davanti alle altre potenze europee e soprattutto davanti a quell’Adolf Hitler che lo preoccupava tanto. L’imprero era quello del Mare Nostrum dove le faccette nere sarebbero state costrette a partorire balilla per la nazione tricolore. L’impero era quello che era riapparso ’sui colli fatali di Roma’. Un impero che Benito Mussolini nel discorso del 9 maggio 1936 aveva dichiarato
    ’Impero fascista, perché porta i segni indistruttibili della volontà e della potenza del Littorio romano, perché questa è la meta verso la quale durante quattordici anni furono sollecitate le energie prorompenti e disciplinate delle giovani, gagliarde generazioni italiane’.
    Era la violenza delle squadracce, ma anche gli sventramenti indiscriminati del tessuto urbano delle città africane.
    L’Africa colonizzata dagli italiani si rempì così di archi di trionfo, busti pavoneggianti, palazzi improbabili. In Somalia per esempio De Vecchis, uno dei quadrumviri della marcia su Roma, aveva voluto costruire una cattedrale che fosse l’esatta copia di quella di Cefalù con le sue due torri altissime. Una volta costruita alcuni somali notarono l’altezza sproporzionata delle torri rispetto ai palazzi nei dintorni e cominciarono a definire la costruzione ’la doppia erezione’. E poi come dimenticare il faro di Capo Guardafui trasformato in un fascio littorio? Asmara (ma in generale l’Eritrea) fu quella che però subì più trasformazioni di tutti. Infatti fu chiamata da più parti la piccola Roma. Tra il 1935 e il 1941 gli architetti italiani si sbizzarrirono in questa città creando uno stile assai stravagante che mischiava modernismo, futurismo e un teutonico stile littorio.»

    (pp.32-33)

    Poésie de Ulisse Barbieri (anarchico poeta direttore del giornale « Combattiamo »), Dopo il disastro :

    «No, non è patriottismo, no, per DIO!
    Al massacro mandar nuovi soldati,
    Né tener lì... quei che si son mandati
    Perché dei vostri error paghino il Fio!
    Ma non capire... o branco di cretini...
    Che i patriotti... sono gli Abissini?»

    (p.56)

    «Il Risorgimento, se vogliamo dare anche questa lettura, fu la lotta di liberazione degli italiani dal dominio straniero, dal dominio coloniale. Una liberazione portata avanti da un’élite che si era legata ad uno strano potere monarchico, quello dei Savoia, ma pur sempre una liberazione. Ecco perché il colonialismo italiano è tra quelli europei uno dei più assurdi. Gli italiani, che avevano sperimentato sulla propria pelle il giogo straniero, ora volevano sottoporre lo stesso trattamento brutale a popolazioni che mai si erano sognate di mettersi contro l’Italia. Ma l’Italia voleva il suo posto al sole. Questa espressione sarà usata nel secolo successivo da Benito Mussolini per la guerra d’Etiopia, ma disegna bene le mire espansionistiche italiane anche durante questi primi passi come nazione neocoloniale. L’Italia, questa giovincella, viveva di fatto un complesso di inferiorità verso l’altra Europa, quella ricca, che conquistava e dominava. Si sentiva da meno di Gran Bretagna e Francia. Si sentiva sola e piccolina. Per questo l’Africa si stava affacciando nei pensieri di questa Italietta provinciale e ancora non del tutto formata. L’Italia voleva contare. Voleva un potere negoziale all’interno del continente europeo. E pensò bene (anzi male, malissimo!) di ottenerlo a spese dell’Africa.»

    (pp.56-57)

    «Venne infatti collocato davanti al monumento ai caduti un leone in bronzo proveniente direttamente da Addis Abeba. Non era un leone qualsiasi, bensì il celeberrimo #Leone_di_Giuda, simbolo che suggellava il patto dell’Etiopia con Dio. Sigillo, quindi, della tribù di Giuda, dal quale discendevano molti profeti e Cristo stesso.»

    (p.61)

    #Piazza_dei_cinquecento

    «E chi lo immaginava che proprio questa piazza babilonia fosse legata alal storia del colonialismo italiano? Infatti i cinquecento citati nel nome della piazza sono i cinquecento caduti di Dogali. Non so bene quando l’ho scoperto. Forse l’ho sempre saputo. E forse anche per questo, per un caso fortuito della vita, è diventata la piazza dei somali, degli eritrei, degli etiopi e anche di tutti gli altri migranti. Una piazza postcoloniale suo malgrado, quasi per caso. Perché è qui che la storia degli italiani in Africa orientale è stata cancellata. Nessuno (tranne pochi) sa chi sono stati i cinquecento o che cosa è successo a Dogali».

    (p.68)

    «Quello che successe in quei vent’anni scerellati non era solo il frutto di Benito Mussolini e dei suoi sgherri, ma di una partecipazione allargata del popolo italiano.
    Ed è forse questo il punto su cui non si è mai lavorato in Italia. In Germania per esempio non solo ci fu il processo di Norimberga contro i criminali di guerra nazisti, ma anche un lavoro incessante e certosino sulla memoria. Nel nostro paese si preferì invece voltare pagina senza capire, interiorizzare, percorrere la memoria delle atrocità vissute e/o perpetrate. In Italia la memoria è divisa o dimenticata. Mai studiata, mai analizzata, mai rivissuta, mai ripensata. Soprattutto la storia in Italia non è mai stata decolonizzata. Il colonialismo fu inghiottito da questo oblio e quelli che furono dei punti di riferimento simbolici del fascismo furono lasciati andare alla deriva come fossero delle zattere fantasma in un fiume di non detto.»

    (p.87)

    –—
    Obelisco di Axum, sur la Piazza Capena :

    «#Piazza_di_Porta_Capena fu teatro di alcune manifestazioni, e alcune riguardarono proprio le proteste per la restituzione dell’obelisco all’Etiopia. Ma in generale si può dire che il monumento era di fatto dimenticato. Stava lì, i romani lo sapevano, ma non ci facevano più tanto caso.
    Era lì, sola, immobile, eretta, dimenticata...
    Era lì lontana da casa...
    Era lì spogliata di ogni significato.
    Era giusto uno spartitraffico. Più imponente e raffinato di altri... certo, ma non tanto dissimile dai tanti alberi spennacchiati che svolgevano la stessa funzione in giro per la città.
    Nessuno per anni si occupò della stele. Qualcuno di tanto in tanto vagheggiava una ipotetica restituzione. Ma tutto era lento, tutto sembrava quasi impossibile.»

    (p.90)
    –-> 2005 :

    «Poi i soldi si trovarono e la stele ritornò a casa tra canti e balli popolari»

    (p.95)
    Et une fois restitué...

    «Ma il vuoto, mi chiedo, non si poteva colmare?
    Improvvisamente Piazza di Porta Capena divenne invisibile. Lo era già prima con la stele. Ma almeno con lei presente capitava che qualche romano la guardasse distrattamente e si interrogasse altrettanto distrattamente. Ma senza la stele il luogo è rimasto un non detto. Tutta la storia, tutto il dolore, tutte le nefandezze sparite con un colpo di spugna.»

    (p.96)

    «Quello che mi colpisce di questa polemica, di chi era contrario a una nuova stele e chi era a favore di un monumento nel sito del fu obelisco di Axum, è la totale assenza del dibattito del colonialismo italiano.
    Nessuno, da Fuksas a La Rocca, nominò mai i crimini di guerra che l’Italia fascista aveva compiuto contro l’Africa. Nessuno sottolineò il fatto che quella stele era un bottino di guerra. Nessuno percepì quel vuoto nella piazza come un vuoto di memoria. Anche un urbanista serio e sensibile come Italo Insolera disse non a caso che di obelischi era piena la città.
    Ora un monumento è stato messo. Ne ho parlato all’inizio del nostro viaggio. Un monumento per ricordare le vittime dell’11 settembre. Due colonne anonime di cui i romani ignorano il significato.»

    (pp.97-98)

    «La memoria non è negare quello che è stato, ma rielaborare quella vita passata, contestualizzarla e soprattutto non dimenticarla.»

    (p.101)

    «E poi la democrazia non si insegna, non si esporta, non si crea dal nulla. La democrazia è un moto spontaneo dell’anima. Ognuno ha il suo modo, i suoi tempi, le sue sfumature.»

    (p.103)

    Sur l’inscription sur le #Ponte_Principe_Amedeo_di_Savoia :

    «Comandante superiore delle forze armate dell’Africa Orientale Italiana durante unidici mesi di asperrima lotta isolato alla Madre Patria circondato dal nemico soverchiante per mezzo per forze confermava la già sperimentata capacità di condottiero sagace ed eroico. Aviatore arditissimo instancabile animatore delle proprie truppe le guidava ovunque per terra sul mare nel cielo in vittoriose offensive in tenaci difese impegnando rilevanti forze avversarie. Assediato nel ristretto ridotto dell’#Amba_Alagi alla testa di una schiera di prodi resisteva oltre il limite delle umane possibilità in un titanico sforzo che si imponeva all’ammirazione dello stesso nemico. Fedele continuatore delle tradizioni guerriere della stirpe sabauda puro simbolo delle romane virtù dell’Italia Imperiale Fascista. Africa Orientale Italiana 10 Giugno 1940, XVIII 18 maggio 1941. Motivazione della Medaglia d’Oro al valor militare conferita per la difesa dell’Impero.»

    «Ad Asmara gli abitanti del villaggio di Beit Mekae, che occupavano la collina più alta della città, furono cacciati via per creare il campo cintato, ovvero il primo nucleo della città coloniale, una zona interdetta agli eritrei. Una zona solo per bianchi. Quanti conoscono l’apartheid italiano? Quanti se ne vergognano?»

    (p.107)

    «Girando per Roma questo si percepisce molto bene purtroppo. I luoghi del colonialismo in città vengono lasciati nel vouto (Axum), nell’incuria (Dogali), nell’incomprensione (quartiere africano). Si cancella quello che è troppo scomodo. E’ scomodo per l’Italia ammettere di essere stata razzista. E’ scomodo ammettere che il razzismo di oggi ha forti radici in quello di ieri. E’ scomodo ammettere che si è ultimi anche nel prendersi le proprie responsabilità.»

    (p.107)

    «Etiopia e Eritrea avevano imbracciato le armi per una contesa sorta sul confine di Badme. Il confine era stato tracciato in modo incerto nel 1902 tra l’Italia (allora paese colonizzatore dell’Eritrea) e il regno d’Etiopia. E dopo più di un secolo Etiopia ed Eritrea si combattevano per quel mal nato confine coloniale»

    (p.112)

    «L’Europa è colpevole tutta per lo sfacelo di morte e dolore che sta riversando in uno dei mari più belli del mondo.»

    (p.124)

    «Per la maggior parte degli italiani, e dei media, erano semplicemente disperati, i soliti miserabili morti di fame (quasi un’icona, come il bambino del Biafra macilento e schelettrico), in fuga da guerra, dittatura e carestia. Una sorta di stereotipo universale, quello del disperato senza passato, senza presente e con un futuro impossibile da rivendicare.»

    (p.124)

    «Occupare uno spazio è un grido di esistenza.»

    (p.125)

    «La crisi è quando non sai che strada percorrere e soprattutto che strada hai percorso.»

    (p.125)

    «E come si fa a smettere di essere complici?
    In Somalia tutti i nomadi sanno che il miglior antidoto all’ignoranza, a quella jahilia che ci vuole muti e sordi, è il racconto. Io, che per metà vengo da questa antica stirpe di nomadi e cantastorie, so quanto valore può avere una parola messa al posto giusto. La storia va raccontata. Mille e mile volte. Va raccontata dal punto di vista di chi ha subito, di chi è stato calpestato, di chi ha sofferto la fame e la sete. La visione dei vinti, dei sopravvissuti, di chi ha combattuto per la sua libertà. Solo raccontando, solo mettendo in fila fatti, sensazioni, emozioni possiamo davvero farcela. Solo così le narrazioni tossiche che ci avvelenano la vita ci possono abbandonare. Il concetto di narrazione tossica viene dal collettivo Wu Ming:
    ’Per diventare ’narrazione tossica’, una storia deve essere raccontata sempre dallo stesso punto di vista, nello stesso modo e con le stesse parole, omettendo sempre gli stessi dettagli, rimuovendo gli stessi elementi di contesto e complessità.
    E’ sempre narrazione tossica la storia che gli oppressori raccontano agli oppressi per giustificare l’oppressione, che gli sfruttatori raccontano agli sfruttati per giustificare lo sfruttamento, che i ricchi raccontano ai poveri per giustificare la ricchezza.’»

    (p.128)

    –-> sur la #narration_toxique (#narrazione_tossica) :
    https://www.wumingfoundation.com/giap/2013/07/storie-notav-un-anno-e-mezzo-nella-vita-di-marco-bruno

    «La madre patria era nulla senza le sue colonie, per questo amava mostrarle succubi. Si era inventata il fardello dell’uomo bianco, la civilizzazione, la missione di Dio, solo per poter sfruttare il prossimo senza sensi di colpa.»

    (p.130)

    –-

    Sur la gestion des #funérailles et de l’#enterrement des victimes du #naufrage du #3_octobre_2013 :
    https://seenthis.net/messages/971940

    #mémoire #livre #colonialisme_italien #colonisation #Italie #Rome #traces #paysage #géographie_urbaine #post-colonialisme #toponymie #monuments #mémoire #Igiaba_Scego #passé_colonial #photographie #oubli_colonial #histoire #Asmara #Erythrée #architecture #urbanisme #stele_di_dogali #Dogali #Tedali #Adua #massacre #ras_Alula #Saati #maggiore_Boretti #Ras_Alula #Tommaso_De_Cristoforis #Vito_Longo #Luigi_Gattoni #Luigi_Tofanelli #basci-buzuk #Ulisse_Barbieri #Taitù #regina_Taitù #Pietro_Badoglio #Rodolfo_Graziani #italiani_brava_gente #oubli #ponte_Amedeo_d'Aosta #Principe_Amedeo #mémoire #démocratie #troupes_coloniales #dubat #meharisti #Badme #frontières #frontières_coloniales #zaptiè #retour_de_mémoire #Affile #Ercole_Viri

    –—

    ajouté à la métaliste sur la #colonialisme_italien :
    https://seenthis.net/messages/871953

    ping @cede @albertocampiphoto @olivier_aubert

    • Citation tirée du livre «#La_frontiera» de #Alessandro_Leogrande:

      «Si è acceso qualcoa dentro di me quando ho scoperto che alcuni dei campi di concentramento eretti negli ultimi anni da Isaias Afewerki per reprimere gli oppositori sorgono negli stessi luoghi dove erano disposti i vecchi campi di concentramento del colonialismo italiano.
      In particolare nelle isole di #Dahlak, cinquanta chilometri al largo di Massaua, dove le galere italiane sono state prima riutilizzate dagli occupanti etiopici e in seguito dallo stesso regime militare del Fronte.
      Il penitenziario di #Nocra, una delle isole dell’arcipelago, fu attivo dal 1887 (proprio l’anno dell’eccidio di Dogali) al 1941, come ricorda Angelo Del Boca in Italiani, brava gente? Vi furono rinchiusi prigionieri comuni, ascari da punire, detenuti politici, oppositori e, dopo l’inizio della campagna d’Etiopia nel 1935, ufficiali e funzionari dell’impero di Hailé Selassié, perfino preti e monaci. (...) L’idea di fare di Nocra e delle isole limitrofe una gabbia infernale si è tramandata nel tempo, da regime a regime»

      (p.85-86)

      –---

      Sul Campo di concentramento di Nocra

      Il campo di Nocra o carcere di Nocra fu il più grande campo di prigionia italiano nella Colonia eritrea e dal 1936 il più grande dell’Africa Orientale Italiana. Venne aperto nel 1887 e chiuso nel 1941 dagli inglesi. Era situato nell’isola di Nocra, parte dell’Arcipelago di Dahlak, a 55 chilometri al largo di Massaua. Dal 1890 al 1941 fece parte del Commissariato della Dancalia. Arrivò a detenere tra un minimo di 500 prigionieri e un massimo di 1.800[1].


      https://it.wikipedia.org/wiki/Campo_di_concentramento_di_Nocra

      #camp_de_concentration #Tancredi_Saletta #Oreste_Baratieri

    • #Igiaba_Scego: “Scopriamo i simboli della storia coloniale a Roma per riempire un vuoto di memoria”

      Igiaba Scego, scrittrice italo somala autrice di libri come ‘Roma negata’ e ‘La linea del colore’, racconta e spiega i simboli del colonialismo presenti nella capitale. Spesso sconosciuti, ignorati, o lasciati nel degrado, narrano una storia che l’Italia ha rimosso: quella delle guerre coloniali che ebbero luogo anche prima del fascismo, e che oggi rappresentano il ‘vuoto di memoria’ del nostro paese. Un dibattito che si è accesso a Roma dopo la decisione di intitolare la stazione della metro C al partigiano italo-somalo #Giorgio_Marincola e non chiamarla più #Amba_Aradam.

      A Roma da qualche settimana si parla dei simboli e dei nomi del rimosso coloniale italiano, grazie alla proposta di intitolare la stazione della metro C su via dell’Amba Aradam a Giorgio Marincola, partigiano italo-somalo morto durante la Resistenza. Una proposta diventata realtà con il voto del consiglio comunale che ha deciso che Roma non appellerà una stazione della metropolitana ‘Amba Aradam’, l’altipiano montuoso dove l’esercito italiano massacrò 20.000 uomini e donne con bombardamenti a tappeto e l’utilizzo di armi chimiche. Di questo e altro abbiamo parlato con la scrittrice Igiaba Scego.

      Quali sono i simboli coloniali a Roma che andrebbero spiegati e sui quali bisognerebbe accendere l’attenzione?

      Non sono molti ma sono collocati in punti simbolici. A Roma, tra piazza della Repubblica e la stazione Termini c’è la Stele di Dogali, a riprova che il colonialismo non è stato solo fascista ma anche ottocentesco. L’obelisco è egiziano ma ha un basamento ottocentesco dedicato alla battaglia avvenuta nel 1887 a Dogali, in Eritrea, dove una colonna italiana venne intercettata e massacrata. Da lì anche il nome di piazza dei 500 davanti la stazione Termini. Di questa battaglia ne ho parlato in due libri, ‘Roma negata’ e ‘La linea del colore’. E nella piazza dove c’è la Stele, s’incontra il colonialismo con le migrazioni di oggi. Questo monumento, che nessuno conosce, è tra l’altro lasciato nel degrado. C’è poi il ponte Duca d’Aosta nei pressi del Vaticano, o il Cinema Impero a Tor Pignattara, che oggi si chiama Spazio Impero. Oltre al fatto di inserire il termine ‘impero’ nel nome, la struttura è quasi uguale a un cinema che è stato realizzato ad Asmara in Eritrea. Ma la cosa che colpisce di più sono i vuoti. Negli anni ’30, venne portata da Mussolini come bottino di guerra dall’Etiopia la Stele di Axum. Questa fu posizionata a piazza di Porta Capena, dove inizia anche il libro ‘Roma negata’. Dopo la guerra, non è stata restituita subito. Nel 1960, Abebe Bikila (campione olimpionico etiope) ha vinto i Giochi di Roma correndo a piedi nudi. Ho sempre pensato che il motivo della sua vittoria non fu solo la sua capacità fisica e la sua caparbietà, ma anche il dover essere costretto a passare per ben due volte davanti la Stele sottratta al suo popolo. Sono convinta che gli abbia dato lo sprint per vincere. La Stele fu poi restituita all’Etiopia negli anni Duemila, tra mille polemiche. Il problema è che ora in quella piazza non c’è nulla, solo due colonnine che rappresentano le Torri Gemelli e di cui nessuno sa nulla. Sarebbe stato giusto ergere sì un monumento per ricordare l’11 settembre, ma soprattutto uno per ricordare le vittime del colonialismo italiano e chi ha resistito ai colonizzatori. Un monumento riparatore per avvicinare i popoli vista la storia scomoda. Quella piazza rappresenta il vuoto di memoria, è come se qualcuno avesse fotografato il rimosso coloniale".

      Quali potrebbero essere i passi da compiere per far emergere il rimosso coloniale?

      Inserirlo nei programmi scolastici e nei libri di testo. Negli ultimi anni è emersa una certa sensibilità e tanti libri sono entrati a scuola grazie agli insegnanti. Sarebbe bello però avere anche nei programmi non solo la storia del colonialismo, ma anche il punto di vista del sud globale. Mi piacerebbe che la storia italiana fosse studiata globalmente, e far emergere le connessioni dell’Italia con l’Europa, l’Africa, l’America Latina e l’Asia. Non penso solo al colonialismo, ma anche alla storia delle migrazioni italiane. Alle superiori andrebbe studiata soprattutto la storia del ‘900. L’altro giorno è scoppiata quella bomba terribile a Beirut: quanti studenti e studentesse sanno della guerra civile in Libano? Sempre nella direzione di far emergere il rimosso coloniale, sarà istituito un museo che si chiamerà ‘Museo italo – africano Ilaria Alpi’. Ma la cosa che servirebbe tantissimo è un film o una serie tv. Presto sarà tratto un film da ‘The Shadow King’, libro di Maaza Mengiste, una scrittrice etiope – americana, che parla delle donne etiopi che resistono all’invasione fascista degli anni ’30. Un libro bellissimo e importante, come è importante che la storia del colonialismo italiano sia raccontata da un prodotto culturale potenzialmente globale. Ma perché un film sul colonialismo italiano lo deve fare Hollywood e non Cinecittà? Perché c’è ancora questa cappa? Non penso a un film nostalgico, ma a una storia che racconti la verità, la violenza. Serve sia lo studio alto sia il livello popolare. Altrimenti il rischio è che diventi solo un argomento per studiosi. È bello che escano libri all’estero, ma dobbiamo fare un lavoro anche qui.

      Quali sono le figure, magari anche femminili, che dovrebbero essere valorizzate e raccontate?

      Metterei in scena la collettività. Un’idea è fare un murales. Nel Medioevo le cattedrali erano piene di affreschi, e attraverso le immagini è stata insegnata la storia della chiesa. Userei la stessa tecnica, mostrando le immagini della resistenza anche delle donne etiope e somali. Servirebbe poi creare qualcosa che racconti anche le violenze subite nel quotidiano, perché non ci sono solo le bombe e i gas, ma anche i rapporti di potere. Mio padre ha vissuto il colonialismo e mi raccontava che prima dell’apartheid in Sudafrica c’era l’apartheid nelle città colonizzate, dove c’erano posti che non potevano essere frequentati dagli autoctoni. Racconterei queste storie sui muri delle nostre città e nelle periferie. È importante ricordare ciò che è stato fatto anche lì.

      https://www.fanpage.it/roma/igiaba-scego-scopriamo-i-simboli-della-storia-coloniale-a-roma-per-riempire-
      #histoire_coloniale #mémoire #symboles

      –---

      –-> sur la nouvelle toponymie de la station de métro:
      https://seenthis.net/messages/871345

    • Citations tirées du livre « #La_frontiera » de #Alessandro_Leogrande :

      «Dopo aver letto Roma negata, il libro di Igiaba Scego sui monumenti, le targhe, le lapidi e i palazzi della capitale che ricordano il colonialismo, sono andato a vedere l’#oblisco_di_Dogali. (...) Il libro è un viaggio nelle pieghe di Roma alla ricerca delle tracce del passato coloniale.
      (...)
      Il paradosso è che la rimozione del passato coloniale riguarda esattamente quelle aree che a un certo punto hanno cominciato a rovesciare i propri figli verso l’Occidente. Sono le nostre ex colonie uno dei principali ventri aperti dell’Africa contemporanea. I luoghi di partenza di molti viaggi della speranza sono stati un tempo cantati ed esaltati come suolo italiano, sulle cui zolle far sorgere l’alba di un nuovo impero»

      (pp.80-81)

      «In realtà il mausoleo [l’obelisco di Dogali], realizzato già nel giugno 1887 dall’architetto #Francesco_Azzurri, fu inizialmente collocato nella vicina piazza dei Cinquecento, l’enorme capolinea degli autobus che sorge davanti alla stazione Termini e si chiama così in onore dei caduti di #Dogali. Ma poi, nei primi anni del regime fascista, fu spostato qualche centinaio di metri in direzione nord-ovest, verso piazza della Repubblica. Ed è lì che è rimasto»

      (pp.82-82)

      https://www.feltrinellieditore.it/opera/opera/la-frontiera

  • Les réseaux sociaux russes, lanceurs d’alerte de la catastrophe de #Norilsk

    Le 3 juin, le président russe Vladimir Poutine a déclaré l’#état_d’urgence au niveau fédéral, après la fuite le 29 mai d’au moins 20 000 tonnes de #diesel dans une rivière du Grand Nord. La catastrophe a été provoquée par l’effondrement d’un réservoir de la #centrale_thermique de Norilsk, en #Sibérie orientale.

    À Vladimir Potanine, dirigeant de l’entreprise en cause Norilsk Nickel (premier producteur de nickel au monde), le chef du Kremlin a adressé les reproches suivants : « Pourquoi les agences gouvernementales n’ont-elles été mises au courant que deux jours après les faits ? Allons-nous apprendre les situations d’urgence sur les réseaux sociaux ? »

    Ce sont en effet des vidéos postées par des citoyens sur les #réseaux_sociaux qui ont alerté les autorités sur le drame. Depuis des années en Russie, ils constituent un canal de communication important pour les experts et les écologistes qui cherchent à alerter sur les #catastrophes_industrielles et les conséquences du #changement_climatique. Cela offre à la #société_civile une mine d’informations et un espace où s’expriment les critiques sur le manque d’action et d’anticipation de l’État et des entreprises face à ces situations d’urgence.

    Cette nouvelle catastrophe a suscité grâce aux réseaux une attention médiatique nouvelle, pour ces régions isolées où des drames écologiques se jouent régulièrement.
    https://www.youtube.com/watch?v=0kakLGwXGzM&feature=emb_logo

    Un temps précieux perdu

    Précisons que la catastrophe du 29 mai est particulièrement préoccupante. Plus encore que le pétrole, le diesel est extrêmement toxique et les sauveteurs de #Mourmansk, spécialisés dans la #dépollution, ne sont arrivés sur place que 40 heures après la catastrophe du fait du délai entre la survenue de l’#effondrement et l’alerte. Un retard qui n’a permis de récupérer qu’une infime quantité de diesel.

    La majeure partie du carburant a coulé au fond de la rivière #Ambarnaïa et déjà atteint le #lac_Piassino. Le #carburant est en train de se dissoudre dans l’#eau ce qui rend sa collecte difficile et il n’est pas non plus envisageable de le brûler, ce qui libérerait des substances toxiques en quantité trop importante.

    L’#Arctique ne compte par ailleurs ni route ni réservoir pour collecter les #déchets. En construire près des zones polluées est impossible, la #toundra étant marécageuse et impraticable. Les sites de déversement ne sont donc atteignables que par hélicoptère et l’été dans l’Arctique étant très court, le temps presse.

    Rappelons que le #Grand_Nord fait continuellement la triste expérience de la #pollution par le #pétrole, lors de son exploitation et de son acheminement.

    Succession de catastrophes

    La région de Norilsk n’en est en effet pas à son premier #désastre_écologique. Dans cette zone industrielle, les #rivières revêtent déjà toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, non seulement à cause des #hydrocarbures mais également d’autres #activités_industrielles (rejets de #métaux_lourds et de #dioxyde_de_souffre de la #mine de #nickel et du centre industriel métallurgique).

    Convoquée à l’occasion de la fuite massive, la mémoire d’Internet met en lumière les catastrophes passées. En 2016, la rivière #Daldykan à Norilsk avait elle aussi pris un aspect rouge. Les autorités locales et fédérales et les médias locaux avaient alors gardé le silence pendant plusieurs jours. Après avoir nié l’accident, #Norilsk_Nickel avait fini par l’admettre une semaine plus tard tout en assurant que le phénomène ne présentait aucun danger pour l’#environnement. Sous la pression de la société civile locale, images à l’appui, les autorités avaient été poussées à ouvrir une enquête.

    Et il y a seulement trois mois, le 4 mars, dans la même région, près de 100 tonnes de diesel se répandaient dans les glaces de la rivière #Angara après la rupture d’un #pipeline.

    Ces catastrophes lointaines, qui surviennent dans des régions peu peuplées, n’attirent généralement pas l’attention médiatique. Celle de Norilsk, par son ampleur et sa portée internationale, suscite une prise de conscience nouvelle.

    État incapable et entreprises négligentes

    La catastrophe réveille les débats sur les réseaux sociaux russes autour de la gestion du risque environnemental et l’absence totale de responsabilisation des entreprises polluantes en Russie. Les principes de pollueur-payeur, de prévention et de précaution, si difficiles à faire appliquer en France, n’y existent tout simplement pas.

    Les monstres de l’industrie (pétrole, gaz naturel et divers métaux) échappent au contrôle de l’État. Pour preuve, les services d’inspection fédéraux n’ont même pas été admis sur place par les vigiles de Norilsk Nickel, comme l’a déploré Svetlana Radionova, la responsable du Service fédéral de contrôle des ressources naturelles et de la protection de l’environnement, le 30 mai dernier sur son compte Facebook.

    Cette fuite constitue pourtant la plus grande catastrophe environnementale qu’a connue l’Arctique. Dans cette région, la #décomposition_biologique des produits issus du pétrole est extrêmement lente et pourrait prendre au moins 10 ans. Un drame qui aura des répercussions sur les milieux arctiques, déjà très vulnérables : comme l’expliquait en 2018 la géographe Yvette Vaguet,« Les #lichens peuvent nécessiter jusqu’à 30 ans pour repousser et un saule nain peut ici être vieux d’un siècle ».

    Fonte du #permafrost et catastrophes industrielles

    Depuis des années, des chercheurs spécialistes de l’Arctique tentent d’alerter via les réseaux sociaux, faute d’une prise de conscience dans la classe politique. On ne compte plus les dommages causés par le changement climatique aux écosystèmes : les feux de forêt se multiplient, la couverture neigeuse diminue fortement et l’épaisseur de la glace dans la #mer_de_Kara rétrécit de plus en plus rapidement – elle a commencé cette année à fondre un mois plus tôt que d’habitude.

    Les régions de Russie à permafrost, cette combinaison de glace et de terre qui représente environ 60 % de la masse terrestre du pays, ne peuvent plus supporter la même charge que dans les années 1980. Or la plupart des structures construites à l’époque soviétique pour l’exploitation des ressources n’ont jamais été remplacées, alors même que le problème est connu de longue date.

    Dans la région de Norilsk, la fonte du permafrost entraîne donc l’affaissement des installations, comme l’avait déjà alerté un rapport du ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement, publié en 2018. La catastrophe du 29 mai en est la conséquence directe, provoquée par l’effondrement d’un des piliers du réservoir que la compagnie n’avait jamais remplacé depuis 1985.

    La #faune et la #flore du Grand Nord menacées

    Parmi les avertissements adressés par les chercheurs sur les réseaux sociaux, une préoccupation revient régulièrement, celle des effets du changement climatique et des activités humaines sur la faune et la flore du Grand Nord.

    La région de #Taimyr, dont Norilsk est la capitale, a déjà déploré la disparition d’un emblématique renne sauvage : en l’espace de 15 ans, 40 % des animaux du plus grand troupeau sauvage de rennes au monde ont disparu.

    En cette période de crue printanière, le diesel répandu par la catastrophe va imprégner tous les pâturages de #cerfs de la plaine inondable. Or la #chasse – au #cerf notamment – constitue avec la #pêche le principal moyen de subsistance des peuples indigènes de Taimyr. Sur les sites et les pages Internet où échangent ces populations, l’inquiétude est palpable. Gennady Shchukin, chef de la communauté #Dolgan, militant et adjoint du conseil de district #Dolgano-Nenets, a d’ailleurs publié sur les réseaux sociaux une lettre adressée au président Poutine et à différents hauts fonctionnaires pour réclamer une enquête publique et transparente et faire part de sa préoccupation.

    « Les cerfs ne survivront pas lorsqu’ils traverseront la rivière. Le diesel se déposera sur le corps de l’animal. Il ne survivra pas à l’hiver. L’animal ne pourra pas se débarrasser de ce film, et il ne pourra pas se réchauffer. Nous ne pourrons pas non plus vendre cette viande car elle aura une odeur de diesel. Les cerfs mourront et se décomposeront dans cette mer de diesel, dans la toundra. Le même sort attend les oiseaux et les poissons de l’Arctique. »

    Une autre voix, celle d’Alexander Kolotov, président de l’ONG écologiste Plotina.Net, résume ainsi la situation.

    « Je pense qu’un déversement de diesel de cette ampleur montre que nous ne disposons pas actuellement de technologies suffisamment sophistiquées pour faire face à des catastrophes d’une telle ampleur. Et cela soulève la question suivante : dans quelle mesure devrions-nous continuer à envahir et vouloir dompter l’Arctique, si nous ne pouvons faire face à la catastrophe ? »

    Sur l’Internet russe, des informations circulent, des alertes sont lancées, des critiques sont adressées. On y découvre effectivement les situations d’urgence… mais aussi l’histoire des catastrophes industrielles d’une région, leurs effets à long terme et l’incurie de l’État en la matière.

    https://theconversation.com/les-reseaux-sociaux-russes-lanceurs-dalerte-de-la-catastrophe-de-no
    #peuples_autochtones

  • ‘All hands on deck:’ Middle East embassies inundated with citizens stranded in US- Al Monitor
    Middle East embassies are overwhelmed with calls from citizens trying to return home as COVID-19 spreads in the United States.
    #Covid-19#USA#Ambassade#MoyenOrient#rapatriement#santé#migrant#migration

    https://www.al-monitor.com/pulse/originals/2020/04/middle-east-embassies-citizens-stranded-coronavirus.html