• Émergence de l’acratie dans la crise de 68 en Espagne

    Miquel Amorós

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    La période historique qui a émergé dans les années soixante a pris fin depuis longtemps, cependant la société hédoniste, narcissique et postmoderne qui s’est enracinée par la suite ne saurait s’expliquer sans elle. Et, après plus de cinquante ans, on s’étonne encore de l’impact et des effets dissolvants de certains événements circonscrits aux universités. C’est parce que le mouvement étudiant des années soixante a eu la vertu de démasquer et d’accentuer les contradictions insurmontables qui minaient le régime de Franco. La dictature franquiste avait créé autour d’elle un vide d’une telle ampleur que seule la peur parvenait à le préserver. La disparition de cette crainte au sein de la société civile et la tentative de combler ce vide par des comportements plus libres et des institutions alternatives n’étaient qu’une question de temps. La protestation spontanée qui commençait à faire descendre les gens dans la rue, sans autre désir que celui de mettre fin à la dictature, allait oser modeler des esquisses d’auto-organisation comblant l’absence de médiation. Les premières commissions ouvrières furent alors créées dans les usines entre 1957 et 1963, en marge du syndicat vertical la CNS ; puis en 1964 le vaste mouvement assembléiste contre le SEU (syndicat officiel des étudiants) se déclencha. On assista à une libération des mœurs : le joug de la morale catholique fut fortement ébranlé par des comportements plus ouverts notamment à l’égard de la tenue vestimentaire, de la pop anglo-saxonne, de la liberté sexuelle, de l’usage des drogues et d’un sain athéisme.

    L’expansion capitaliste européenne de l’après-guerre, insuffisamment prise en compte, eut des conséquences sur la Péninsule en contribuant à l’industrialisation du pays et à un accroissement très sensible de ses villes. (...)

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