• #Pénuries : des grains de sable dans la machine

    Depuis le 17 janvier, on trouve dans toutes les bonnes librairies le dernier #livre de notre contributeur #Renaud_Duterme. #Mondialisation, réseaux d’#approvisionnement, goulots d’étranglement… Voici, en quelques paragraphes, un aperçu du contenu de « Pénuries. Quand tout vient à manquer » (éd. Payot).

    Pénurie. Un mot que l’on croyait appartenir au passé. Mais que plusieurs événements (pandémie de Covid-19, blocage du canal de Suez, guerre en Ukraine) ont fait revenir sur le devant de l’actualité. Énergie, matières premières, denrées alimentaires, médicaments, matériaux de construction, pièces automobiles, puces électroniques, main d’œuvre, aucun secteur ne semble épargné par cette tendance préoccupante.

    Un approvisionnement sous tension

    La quasi-totalité des biens que nous achetons et utilisons nous parviennent via des #chaînes_d’approvisionnement aussi longues que complexes. Elles sont composées de multiples maillons, allant de l’extraction de matières premières (minerais, produits agricoles, énergie) et leur transformation, jusqu’à l’acheminement vers les rayons des supermarchés, en passant par la fabrication, l’entreposage et, bien sûr, le transport. Le tout fonctionnant en #flux_tendu (la logique de stock ayant laissé la place à un acheminement quotidien), principalement grâce au développement de la #conteneurisation et du #transport routier. Le maître mot de cette #logistique est la #fluidité. Le moindre grain de sable peut gripper toute la machine, a fortiori s’il n’est pas résorbé rapidement.

    Car mondialisation capitaliste oblige, les différentes étapes de ces chaînes d’approvisionnement ont été de plus en plus éloignées les unes des autres, augmentant les risques de #perturbations par #effet_domino. Conflits, catastrophes naturelles, aléas climatiques, grèves, attentats, cyber-attaques, épidémies, autant d’événements pouvant « gripper » un maillon de la chaîne (voire plusieurs) et par là provoquer des goulots d’étranglement remettant en question le fonctionnement même de l’#économie. Ces #goulots semblent se multiplier depuis quelques années et il est fort probable que cela ne soit qu’un début, tant de nombreuses ruptures se dessinent, causées par des limites géophysiques (épuisement des ressources), des dérèglements climatiques (sécheresses et inondations), la chute des rendements agricoles, des tensions socio-économiques (mouvements sociaux, grèves, manque de main d’œuvre, vieillissement de la population, montée des replis identitaires) ou encore géopolitiques (guerres et conflits divers).

    Rien que ces derniers mois, on peut évoquer l’assèchement du canal de Panama engendrant une réduction du nombre de navires pouvant l’emprunter quotidiennement ; les attaques des Houthis en mer Rouge contre des navires commerciaux, ce qui a contraint de nombreux armateurs à faire contourner l’Afrique à leurs navires ; ou encore les grèves et les blocages émanant du monde agricole qui, s’ils accentuaient, pourraient priver certains territoires d’approvisionnement divers. Rappelons que les cent premières villes de France ont seulement trois jours d’autonomie alimentaire, avec 98% de leur nourriture importée[1].

    Jusqu’ici, les tensions ont été en partie surmontées et n’ont pas débouché sur des ruptures majeures, matérialisées par des pénuries durables. Mais leur multiplication est un phénomène inquiétant et l’analyse objective des risques laisse supposer une aggravation et surtout une interconnexion entre des phénomènes a priori distincts les uns des autres. C’est d’autant plus vrai qu’un couac peut engendrer des perturbations bien plus longues que le problème en tant que tel, les retards s’accumulant à chaque étape, le redémarrage de la machine pouvant mettre plusieurs mois, voire années, pour retrouver la fluidité qui fait sa raison d’être.

    Ironie du sort, ces tensions impactent de nombreux éléments sans lesquels la logistique elle-même serait impossible. Les palettes, conserves, conteneurs, véhicules, emballages et cartons sont aussi fabriqués de façon industrielle et nécessitent des composants ou des matières souvent issus de pays lointains et dont le transport et les procédés de fabrication impliquent de grandes quantités d’énergie et de ressources (métaux, bois, eau, etc.).

    Idem pour la main d’œuvre nécessaire au bon fonctionnement des infrastructures qui nous entourent. La colère des agriculteurs est là pour nous rappeler que ces dernières dépendent in fine de travailleurs agricoles, de chauffeurs (deux professions qui ont bien du mal à trouver une relève auprès des jeunes générations), mais aussi d’employés de supermarché, d’exploitants forestiers, d’ouvriers du bâtiment, de magasiniers d’entrepôts logistiques, etc.

    Le ver était dans le fruit

    Ces #vulnérabilités sont loin d’être une fatalité et découlent d’une vision de la mondialisation au sein de laquelle les forces du marché jouissent d’une liberté quasi-totale, ce qui a engendré une multinationalisation des entreprises, la création de zones de libre-échange de plus en plus grandes et la mainmise de la finance sur les grands processus productifs. Des principes se sont peu à peu imposés tels que la spécialisation des territoires dans une ou quelques productions (particulièrement visible en ce qui concerne l’agriculture) ; la standardisation à outrance permettant des économies d’échelles ; la liberté des mouvements de capitaux, engendrant des phénomènes spéculatifs à l’origine de la volatilité des prix de nombreuses matières premières ; la mise en concurrence de l’ensemble des territoires et des travailleurs ; et bien sûr l’interdépendance mutuelle.

    Ces principes entrainent des conséquences dramatiques chez un nombre croissant de personnes, entraînant une perte de légitimité du système en place, ce qui risque également d’alimenter des tensions sociales et géopolitiques déjà existantes, perturbant un peu plus ces chaînes logistiques. À titre d’exemple, les politiques de fermeture des frontières prônées par de plus en plus de gouvernements national-populistes priveraient les pays qui les appliquent de milliers de travailleurs, conduisant à des pénuries de main d’œuvre dans de nombreux secteurs.

    Démondialiser les risques

    En outre, avoir un regard global sur nos systèmes d’approvisionnement permet de (re)mettre certaines réalités au cœur des analyses. Il en est ainsi de cycles de production concernant les différents objets qui nous entourent. De l’origine des composants nécessaires à leur fabrication. Des impacts écologiques et sociaux présents à toutes les étapes de ces cycles. Des limites du recyclage. De la fable que constitue le découplage[2], cette idée selon laquelle il serait possible de croître économiquement tout en baissant les impacts environnementaux. Des limites physiques et sociales auxquelles va se heurter la poursuite de notre consommation.

    Pour ce faire, il importe de populariser de nombreux concepts tels que l’#empreinte_matière (qui tente de calculer l’ensemble des ressources nécessaires à la fabrication d’un bien), l’#énergie_grise et l’#eau_virtuelle (respectivement l’énergie et l’eau entrant dans les cycles d’extraction et de fabrication d’un produit), le #métabolisme (qui envisage toute activité humaine à travers le prisme d’un organisme nécessitant des ressources et rejetant des déchets), la #dette_écologique (qui inclut le pillage des autres pays dans notre développement économique) ou encore l’#extractivisme (qui conçoit l’exploitation de la nature d’une façon comptable).

    Et par là aller vers plus d’#autonomie_territoriale, en particulier dans les domaines les plus élémentaires tels que l’#agriculture, l’#énergie ou la #santé (rappelons qu’environ 80% des principes actifs indispensables à la plupart des médicaments sont produits en Chine et en Inde)[3].

    Dans le cas contraire, l’#anthropocène, avec ses promesses d’abondance, porte en lui les futures pénuries. Le monde ne vaut-il pas mieux qu’un horizon à la Mad Max ?

    https://blogs.mediapart.fr/geographies-en-mouvement/blog/300124/penuries-des-grains-de-sable-dans-la-machine

    #pénurie #mondialisation #globalisation

    • Pénuries. Quand tout vient à manquer

      Comment s’adapter aux ruptures qui nous attendent dans un monde en contraction

      Saviez-vous que la plupart des villes ne survivraient que deux à trois jours sans apport extérieur de nourriture ? Qu’un smartphone nécessite des métaux rares issus des quatre coins du monde ? Et que 80% des principes actifs nécessaires à la fabrication de nos médicaments sont produits en Chine et en Inde ? La quasi-totalité des biens que nous achetons parviennent jusqu’à nous via des chaînes d’approvisionnement aussi complexes que lointaines, de l’extraction et la transformation de matières premières (minerais, produits agricoles, énergie) à l’acheminement de produits finis vers nos supermarchés. Ce qui, mondialisation capitaliste oblige, augmente les risques de vulnérabilité de ces chaînes par effet domino.
      Nous expérimentons déjà ces pénuries que nous vivons mal, habitués à une société de flux ininterrompu. Or elles vont s’aggraver du fait de l’épuisement des ressources, des dérèglements climatiques, des tensions socio-économiques et géopolitiques. Demain, nous allons manquer de riz, de cuivre, de pétrole... Il est donc urgent de nous y préparer et d’envisager un autre système économique afin de rendre nos villes et nos vies plus autonomes et résilientes.

      https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/p%C3%A9nuries-9782228934930

  • La nature existe-t-elle ? - Agone
    https://agone.org/aujourlejour/la-nature-existe-t-elle

    C’est à l’occasion de « ma première étude sur le terrain », chez les Achuar d’Amazonie, raconte Descola, que « j’ai commencé à comprendre que ces notions de nature et de société n’avaient aucun sens ». En prélude à un dialogue avec Baptiste Morizot, le journal Le Monde présente Philippe Descola comme cet « anthropologue qui a converti toute une génération de chercheurs à penser “par-delà nature et culture” ».

    Il est difficile de savoir si cette conversion s’est opérée, chez les anthropologues, pour la totalité d’une génération. Mais il est certain que les chercheurs ne sont pas les seuls, aujourd’hui, à vouloir se passer de cette opposition de la nature et de la culture : l’idée a commencé de gagner le grand public.

    Intro du livre :

    Pour ne pas en finir avec la nature - Agone
    https://agone.org/livres/pour-ne-pas-en-finir-avec-la-nature

    Méditant sur le destin de la nature dans le contexte contemporain de son artificialisation toujours plus avancée, Philippe Descola annonce « son décès prévisible, en tant que concept » et la « clôture probable d’un long chapitre de notre propre histoire ». Mais comment définir les « dégâts anthropiques » occasionnés par l’action de l’homme sans faire référence au moins implicitement à ce que cette action modifie et à ce qui est atteint par ces dégâts ? Soit à ce qui, dans le monde, a de loin précédé notre existence, l’a produite et continue de la déterminer : la nature.

    Il est tout à fait certain qu’une époque est en train de se clore, caractérisée par une certaine manière de concevoir notre rapport à la nature. Il n’en reste pas moins que nous avons beaucoup de raisons, et des raisons assez solides, de douter que ce à quoi renvoie le mot « n’existe pas », ou encore que la notion de nature n’ait « aucun sens » et ne soit qu’un « fétiche » qui a « fait son temps ». Comme on peut douter qu’il faille « désormais penser sans elle » et qu’user du concept de nature soit, comme le suggérait Pessoa, le symptôme d’« une maladie de nos idées ». Il est ainsi plus urgent de le clarifier de manière critique que de penser par-delà nature et culture.

    Si l’on en croit l’anthropologue Philippe Descola, la pensée moderne de la nature fait partie du problème et non de la solution. En philosophe, Patrick Dupouey interroge cette proposition pour montrer que, bien au contraire, un concept de nature solide reste un outil indispensable pour comprendre les crises que nous traversons, sans sombrer dans les apories du relativisme. L’analyse de ces processus permet de faire émerger des solutions pour une transformation progressiste et coopérative du monde, pour sortir des crises qui caractérisent notre époque.

    #nature #culture #philosophie #anthropologie #Philippe_Descola #débat #Patrick_Dupouey

  • La biodynamie : occultisme et dérive sectaire, Cyril Gambari* – Science, Travail & Environnement
    https://revue-progressistes.org/2023/02/21/la-biodynamie-occultisme-et-derive-sectaire-a-la-campagne-entre

    Très concrètement, l’agriculture biodynamique offre les mêmes résultats que l’agriculture biologique[7]. Les bonnes pratiques paysannes – rotation des cultures, lâcher d’auxiliaires, enherbement, plantation de haies, etc. – qui sont utilisées à la fois en agriculture biologique et en agriculture biodynamique expliquent le peu de différences observé entre les deux.

    La biodynamie c’est du bio plus de la pseudo-science. Les prétentions de Demeter ne s’appuient sur rien de solide, rien de concret. C’est ce qu’on pourrait appeler du marketing.

    La très large majorité des études scientifiques comparant l’agriculture conventionnelle, l’agriculture biologique et l’agriculture biodynamique montrent des résultats similaires quant aux rendements, à la faune et à la microbiologie des sols, à l’incidence des maladies… et à la qualité nutritionnelle entre les produits des deux dernières. La biodynamie c’est du bio plus de la pseudo-science.

    Les prétentions de Demeter ne s’appuient sur rien de solide, rien de concret. C’est ce qu’on pourrait appeler du marketing.

    • Peu de monde connaît l’existence de ces préparations, elles sont pourtant la base de la biodynamie. Il existe huit préparations, numérotées P500 à P507. Si ceux qui s’intéressent un peu à la biodynamie connaissent la bouse de corne (de la bouse introduite dans une corne de vache), ce n’est pas le cas de la vessie de cerf fourrée d’achillée millefeuille, du crâne d’animal domestique fourré d’écorces de chêne ou encore des mésentères et autres intestins de bovins fourrés de fleurs diverses, car ils sont très peu médiatisés.

      Ces préparations à épandre dans les champs ou destinées à arroser le tas de compost ont toutes une signification dans l’anthroposophie de Steiner. Ainsi pour la préparation P502 les biodynamistes prennent le cerf pour sa tendance à accumuler les forces astrales, via ses cornes, dans sa vessie. Selon Rudolf Steiner, le cerf est l’animal qui capte le plus ce qui provient de l’environnement de la Terre. Toujours selon Steiner, l’achillée, étant connue pour sa capacité à soigner les problèmes de reins ou de vessie qui proviennent d’un déséquilibre astral, va transmettre les forces de Vénus et réguler le processus potassium par l’intermédiaire du soufre. Ceux qui vont promouvoir la biodynamie aujourd’hui font toujours appel aux mêmes arguments : toutes les préparations ont ce genre de signification ; on ne peut vraiment les comprendre sans avoir lu Steiner et les avoir passées sous le prisme de l’anthroposophie.

      Ca ressemble a certaines pratiques vues dans Midsommar de Ari Aster.

      the filmmaker researched the work of Austrian philosopher Rudolf Steiner, who founded anthroposophy, a philosophy that encourages spiritual development (to put it mildly).

      https://www.vanityfair.com/hollywood/2019/07/midsommar-folklore-sweden

      Il y aussi des references aux croyances nazi-compatibles de Steiner et la langue des Harga
      https://i.imgur.com/awPy8jI.jpeg
      https://veritesteiner.wordpress.com/2015/06/15/les-nazis-et-les-anthroposophes-amis-ou-ennemis

  • Antigone en Palestine
    https://laviedesidees.fr/Stephanie-Latte-Abdallah-Des-morts-en-guerre

    La rétention des dépouilles de #guerre, et donc l’empêchement des rituels funéraires, joue un rôle important et peu étudié dans le #conflit_israélo-palestinien. À propos de : Stéphanie Latte Abdallah, Des morts en guerre. Rétention des corps et figures du martyr en Palestine, Karthala

    #International #Israël #anthropologie #terrorisme #mort
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240126_palestine-2.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240126_palestine-2.pdf

  • Geneviève Pruvost, Entretien avec Veronika Bennholdt-Thomsen, 2023
    https://sniadecki.wordpress.com/2024/01/25/pruvost-vbt

    Alors que l’écoféminisme connaît un regain en France depuis les années 2010-2020, il est resté centré sur un corpus principalement anglophone et n’est pas immédiatement rattaché aux études intersectionnelles et décoloniales. Or il existe un versant allemand du féminisme matérialiste des années 1970-1990 qui a pour singularité d’avoir placé le travail paysan, le travail domestique et l’appropriation du monde vivant au cœur des exploitations patriarcales.

    #interview #Veronika_Bennholdt-Thomsen #sociologie #anthropologie #féminisme #subsistance #perspective_de_subsistance #Geneviève_Pruvost

  • Documenter l’anthropocène ?
    https://metropolitiques.eu/Documenter-l-anthropocene.html

    Comment photographier les destructions écologiques en cours tout en maintenant un point de vue critique sur « l’anthropocène » ? Le dernier ouvrage de Danièle Méaux étudie les conditions de possibilité d’un regard critique et réflexif, pour le photographe comme pour ses publics. Ce nouvel ouvrage de Danièle Méaux, professeure en esthétique à l’université de Saint-Étienne, s’inscrit dans le sillage de Géo-photographies et Enquêtes, parus également chez Filigranes en 2015 et 2019. Poursuivant un tour d’horizon #Commentaires

    / #arts, #photographie, #anthropocène, #écologie, #paysage, #environnement, #représentation

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_gaudin9.pdf

  • Interview de Myriam Congoste, autrice du Vol et la Morale - La Grappe
    https://lagrappe.info/?Interview-de-Myriam-Congoste-autrice-du-Vol-et-la-Morale-153

    Myriam Congoste, anthropologue, raconte dans son livre sa relation avec Youchka, voleur et receleur à Bacalan, jamais arrêté, toujours invisible. Nous lui avons posé quelques questions.

    Myriam Congoste a été infirmière en hôpital psychiatrique, puis anthropologue. Elle vit à Bordeaux. En 2012, elle fait paraître sa thèse aux éditions Anarchasis : Le Vol et la morale. L’ordinaire d’un voleur, préfacé par Éric Chauvier. Elle relate sa relation avec Youchka, un voleur, cambrioleur, receleur de voitures, qui ne s’est encore jamais fait prendre ni condamner. Ils partagent le même quartier qu’elle connaît bien pour en être originaire, Bacalan. Myriam Congoste l’accompagne dans son quotidien, même lorsque le pitbull de Youchka qui le protège la terrifie, même lorsqu’il s’agit de faire passer de l’or issu d’un casse jusqu’en Thaïlande pour le faire fondre et le transformer en chaîne à grains de café, en médaille, en bagues, etc. En évitant les habituels écueils et stéréotypes concernant la délinquance et la pègre, en apportant une dimension historique rarement transmise sur Bordeaux et ses quartiers périphériques, et en donnant la parole à une marge qui d’habitude n’existe que lorsqu’elle est défaite et repentie, Myriam Congoste nous a donné envie de lui poser quelques questions afin qu’elle nous présente son travail.

    #interview #Myriam_Congoste #anthropologie #vol #marge #Bordeaux

  • La matière du rituel
    https://laviedesidees.fr/Lemonnier-La-ritualite-des-choses

    Dans le sillage de Marcel Mauss, Pierre Lemonnier aborde les rites des initiations masculines des Baruya de Nouvelle-Guinée non pas en fonction du signifiant qu’on peut leur accoler, mais de l’action sur la matière qu’ils rendent possible. À propos de : Pierre Lemonnier, La ritualité des choses. Objets, gestes et paroles des initiations masculines baruya (Papouasie-Nouvelle-Guinée), Éditions Mimésis

    #Philosophie #anthropologie

  • L’Inexploré - Pierre Legendre
    https://www.youtube.com/watch?v=8zkdFbCeRLU

    Pierre Legendre, à l’écart du brouhaha médiatique et des idéologies à la mode, a tracé patiemment, sur plus de soixante ans, le chemin de l’anthropologie dogmatique. Il est revenu, en la maison qui l’a accueilli dans ses premières années d’étude des manuscrits médiévaux, l’École des chartes, pour livrer « à la jeunesse désireuse des lois » le suc de son labeur.

    Dans le droit fil de « De la Société comme texte » (2001) et en résonance avec ses conférences données au Japon en 2004 « Ce que l’Occident ne voit pas de l’Occident », dans un style dépouillé, Pierre Legendre découvre ce qui fait tenir debout, enlacés, l’humain et la société. Quel meilleur guide que Piero della Francesca pour ouvrir nos yeux à l’invisible ?

    https://arsdogmatica.com

    #chrétienté #anthropologie_dogmatique #langue #institution #civilisation #montage #scène #individu #personne #fiction #Piero_della_Francesca #principe_de_réalité #religion #ritualité #pacte_dogmatique #faille_institutionnelle #modernité #droit_naturel #droit_romain #occident #papauté #activisme_juridique #contrat #protestantisme #universalisme_politique #impératif_libéral #révolution_protestante #révolutions #Europe #narration_totémique #chorégraphie #logiques_contraires #tiers-terme

  • Le climat, la gauche et l’histoire | #Jean-Baptiste_Fressoz
    https://legrandcontinent.eu/fr/2023/11/03/le-climat-la-gauche-et-lhistoire

    Plusieurs auteurs, cités par Paul Magnette ont cru discerner dans l’histoire de l’énergie le capitalisme dans ses basses œuvres : la machine à vapeur aurait simplement servi à échapper à la contrainte de localisation et à exploiter une main d’oeuvre urbaine et abondante (Andreas Malm) ; le pétrole aurait eu pour effet, voire fonction, de contourner les mineurs et leurs syndicats grâce à sa fluidité (Timothy Mitchell). Ces récits séduisants ne résistent pas à l’analyse : le charbon sert surtout à produire de la chaleur. En Angleterre son extraction commence quand le prix du bois de feu augmente, tirée par la croissance urbaine — la machine à vapeur est davantage un symbole que la cause de l’Anthropocène. Quant au pétrole, il ne contourne pas les mineurs, tout simplement parce qu’il ne remplace pas le charbon ; il sert avant tout à faire avancer des voitures qui pour leur fabrication consomment énormément de charbon ; en outre, la baisse du nombre des mineurs n’est pas causée par le pétrole mais par le progrès technologique dans les mines. L’attrait de l’histoire « politique » de l’énergie qui est aussi son défaut, est qu’elle tend à présenter le changement climatique comme l’effet secondaire d’une entreprise de domination capitaliste. Cette historiographie, apparemment radicale mais rassurante pour la gauche anti-capitaliste, sous-estime l’énormité du défi climatique : sortir du carbone sera autrement plus difficile que sortir du capitalisme, une condition tout aussi nécessaire qu’insuffisante.

    [...]

    Le réchauffement est un phénomène historique, mais comme il fait la somme de l’ensemble de l’agir humain sur la planète il échappe largement à l’histoire. S’il est assez facile pour un historien d’expliquer le réchauffement, identifier ce qui pourrait l’arrêter dépasse l’imagination historique.

    Face au titan climatique, les sciences sociales proposent souvent des « solutions » sans avoir jaugé la profondeur du problème. Les verrous techniques sont écartés, laissés à l’expertise du groupe III du GIEC. On fait comme si la décarbonation était un simple problème d’investissements, un problème d’ingénierie sociale, un problème de volonté politique. [...]

    Dans les années 1990-2000, beaucoup d’énergie a été dépensée pour débattre des avantages respectifs de la taxe carbone ou des droits à polluer, alors qu’il aurait fallu expliquer qu’on ne saurait décarboner l’acier, le ciment, l’aviation etc. et donc convenir des moyens démocratiques et équitables d’en réduire drastiquement la consommation. Il en découlerait une redéfinition du débat climatique centré sur la répartition juste et efficace des biens matériels à l’échelle mondiale : la grande question de la gauche depuis son origine et le trait d’union qui relie le socialisme à l’éco-socialisme.

    • Contrairement à l’expression de « crise environnementale » qui sous-entendait une épreuve brève dont l’issue serait imminente, l’Anthropocène désigne un point de non-retour. Ce que nous vivons n’est pas une simple crise mais une bifurcation à l’échelle de l’histoire géologique de la Terre. Le développement économique des derniers siècles modifiera l’environnement de ceux à avenir. Nous ne nous sortirons pas de l’Anthropocène et nous ne connaîtrons plus les climats de l’Holocène. Ce qui a été moins compris — et la faute en revient à une vision aberrante de l’histoire matérielle — est que cette irréversibilité s’appliquait presque autant à l’anthropos qu’à la planète. L’Anthropocène désigne une double irréversibilité, une double accumulation, un cumul de cumuls : non seulement les flux de matière s’empilent dans les différents compartiments du système-terre, mais les flux matériels anthropogéniques suivent eux-aussi une logique additive.

      Toute discussion sérieuse sur les questions environnementales devrait partir du constat historique quelque peu inquiétant que les innovations technologiques n’ont, jusqu’à présent, jamais fait disparaître un flux de consommation matérielle. Au cours du XXe siècle, dans le monde, l’éventail des matières premières s’est élargi et chacune a été consommée en quantité croissante [3]. Les processus de substitution technologiques ont donc pour l’instant toujours été compensés par l’élargissement des marchés, par les effets rebonds et par les réorientations d’usage.

      [3] Sur les soixante-dix matières premières principales, Christopher L. Magee et Tessaleno C. Devezas ne recensent que six qui ont décru depuis 1960 : l’amiante, le mercure, le beryllium, le tellurium, le thallium et la laine de mouton, auxquels on pourrait ajouter l’huile de baleine.

  • Mon mensonge préféré
    https://www.climatefoundation.org


    Parole de capitaliste !
    Voici la traduction de la devise de la fondation d’Elon Musk nommée Climate Foundation.

    Nous avons trouvé que pour des bricoles nous pouvons attirer l’attention du grand public et des investisseurs naïfs en proposant des solutions bidons pour le problème que constitue notre classe. Nous allons tous gagner des thunes à max et arrêter la prolifération de l’espèce des pauvres afin de sauver le monde.

    Investissez avec nous ou périssez avec les autres sous-hommes !

    We Have Found That..
    the anthropocene is NOT inevitable or unsolvable.
    We have found that we have solutions.
    We have found that with the right help,
    we can stop the mass extinctions,
    We can lower the carbon,
    We can reverse climate change,
    ​​
    we can save the Earth.

    La bonne parole s’interprète en fonction de son auteur et de l’oeuvre de celui-ci. La devise de la Climate Foundation est un exemple quasi idéal de novlang où toute signification est inversée et modelée suivant les besoins des maîtres du monde.

    Je ne connais pas le montant de l’investissement de Musk dans cette fondation, mais il est évident que c’est encore un de ces projets dont la mégalomanie bat tout sauf le projet de combattre les nazis sur la lune. Le personnage, l’approche et la bonne parole sentent l’esprit d’Ayn Rand et son fascisme libéral appelé objectivisme .

    Ça ne vole pas haut mais nous avons déjà prouvé qu’il est possible possible d’entraîner des millions dans l’aventure éliminatoire de la conquête de l’Est avec des idées farfelus à la con.

    Les chef de mes grand parents ont essayé de sauver la race aryenne. Elon Musk et ses copains objectivistes essaient de sauver leur classe de super-bourgeois et quelques spécimens surdoués et serviables du reste de l’humanité.

    Pour eux nous, les êtres humains ordinaires de la terre, nous sommes les slaves et les juifs à sacrifier afin de créer les champs élisées post-apocalytiques pour l"élite objective.

    Acceptons le défi. La guerre est déclarée. Elle sera sans merci.

    –-----
    Untermensch
    https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Untermensch

    Ayn Rand Institute
    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Ayn_Rand_Institute

    #permaculture_marine, #upwelling
    https://seenthis.net/messages/1027360

    #objectivisme #néolibéralisme #charité #climat #écologie #vie_marine #captalisme #startup #Anthropocène #Capitalocène

  • Algenfarmen gegen den Klimawandel : „Wir können die Erde retten“ – Wirklich ?
    https://www.freitag.de/autoren/svenja-beller-bnd/marine-permakultur-algenfarmen-sollen-erde-vor-klimawandel-retten


    Sauver le monde en se remplissant les poches d’argent - l’exploitation agricole des mers est le pays de cocagne des investisseurs verts. Les conséquences imprévisibles ... on verra bien.

    16.11.2023 von Svenja Beller
    ...
    Kurz bevor wir uns verabschieden erzählt Tubal dann aber fast beiläufig, dass die Climate Foundation in der Region auch mehrere Artificial-Upwelling-Projekte plant. Sie wolle sie nah an der Küste entlang von Riffen installieren, erzählt er. Auf erneutes Nachhaken räumen das dann auch Donohue und von Herzen ein. Artificial Upwelling lässt sich zu „Künstlicher Auftrieb“ übersetzen, von Herzen findet aber schon die Bezeichnung falsch: „Es ist nichts Künstliches daran, einen natürlichen Prozess auf regionaler Ebene wiederherzustellen.“ Das würden sie tun, indem sie mit hunderte Meter langen Rohren Wasser an die Oberfläche pumpen. Nur könnten sie damit mehr Schaden anrichten als helfen.

    Es sei falsch, die Komplexität natürlicher Auftriebsereignisse mit künstlichen gleichzusetzen, mahnt die Heinrich-Böll-Stiftung in einer Analyse. Tut man das, können die Folgen verheerend sein. „Der Ozean ist stark geschichtet und das ist gut so, weil er in der Tiefe unheimlich viel CO₂ speichert“, erklärt mir Andreas Oschlies, Leiter der Forschungseinheit Biogeochemische Modellierung des GEOMAR Helmholtz-Zentrums für Ozeanforschung Kiel, auch er hat im Videocall einen Meereshintergrund, nur ohne Algen. „Dieses CO₂ wollen wir eigentlich gar nicht nach oben bringen. Wenn wir in die Klimamodelle Artificial Upwelling reinbringen, zeigt sich aber, dass zusammen mit den Nährstoffen ganz viel CO₂ hochgepumpt wird.“

    Dieses gelangt dann an der Oberfläche zurück in die Atmosphäre und könnte den Gewinn an neu gespeichertem CO₂ zunichte machen. „Und alle Nährstoffe, die diese Algen aufnehmen, fehlen woanders“, fährt Oschlies fort. „Also hat man dann irgendwo einen Algenfarmer, der verdient prächtig Geld, aber nebenan oder vielleicht einen halben Kontinent weiter weg, fangen die Fischer plötzlich weniger, weil da wegen weniger Nährstoffen weniger Algen wachsen und dadurch weniger Fische da sind.“

    Bei allen Vorteilen könnte die Climate Foundation mit dem umstrittenen Artificial Upwelling mehr Schaden anrichten, als sie hilft.

    Die Liste der Probleme ist noch länger: Das Tiefenwasser kühle zwar sogar die Atmosphäre, verdränge gleichzeitig aber auch das warme Oberflächenwasser nach unten, das dort lebenden Pflanzen und Tieren schaden könne. Der Eingriff kann die Blüte unerwünschter giftiger Algen begünstigen, zu Sauerstoffarmut im Wasser führen und Meeresströmungen verändern, was wiederum Wettermuster beeinflussen kann. Und ein positiver Effekt kann den Algenwäldern auch zum Verhängnis werden: Weil sich Meerestiere in ihnen wohlfühlen, vermehren sie sich in ihrer Umgebung, das haben mehrere Studien bestätigt. Einige dieser Tiere bilden Kalziumkarbonatschalen, ein Prozess, bei dem CO₂ freigesetzt wird. „Das kann zehn bis dreißig Prozent der CO₂-Aufnahme der Algen wieder zunichte machen“, sagt Oschlies. Als Mitglied einer internationalen Expertengruppe, die die Vereinten Nationen berät, kam er zu dem Schluss: „Diese Methode hat [...] nur ein sehr begrenztes Potential zur Kohlenstoffbindung und das Risiko erheblicher Nebenwirkungen.“

    https://www.climatefoundation.org

    Permaculture marine
    https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Permaculture_marine

    #Philippines #climat #écologie #vie_marine #permaculture_marine #captalisme #startup #Anthropocène #Capitalocène

  • Pour une métaphysique décoloniale
    https://laviedesidees.fr/Pour-une-metaphysique-decoloniale

    Au XIXe siècle, des paysans indiens affirment que des dieux luttent contre l’Empire colonial britannique ; un vietnamien qu’il ne peut extraire le charbon du sous-sol puisqu’un dragon vit sous la terre. Quelle métaphysique peut expliquer ce qui est dit ici ? À propos de : Mohamed Amer Meziane, Au bord des mondes. Vers une #anthropologie métaphysique, Vues de l’Esprit

    #Philosophie #religion #décolonisation
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/202310_meziane.docx

  • Ésotérisme, anthroposophie : les étranges « associations » dont la Ville de Montpellier fait la promo - Le Poing
    https://lepoing.net/esoterisme-anthroposophie-les-etranges-associations-dont-la-ville-de-montpe

    Lors de l’Antigone des associations du 10 septembre dernier, des stands qui promeuvent la naturopathie, la pratique du médium ou de « rituels de dégagement énergétique par le plomb » étaient présents. Et sur l’annuaire des associations du site de la Ville, figure une mouvance épinglée par la Miviludes pour potentielles dérives sectaires

    Médium, naturopathie, purification de l’aura… Cela aurait pu être un bout du programme du salon du bien-être de l’association MEET, qui a eu lieu en mai dernier à #Montpellier, mais non, il s’agit bien de stands de la journée des associations du 10 septembre, rendez-vous annuel montpelliérain qui se tient dans le quartier Antigone.

    #naturothérapie #anthroposophie

  • LE PROBLÈME DE L’ÉVOLUTIONNISME - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=TEDkEaIxPBg

    #ANTHROPOLOGIE #ÉVOLUTION #SHS
    #ANTHROPOLOGIE #ÉVOLUTION #SHS

    Pensez-vous que notre société est la plus évoluée de toute ? Notre médecine, nos technologies, etc ? Si non, quelle société pourrait donc bien être la plus évoluée ?
    Réponse dans cette vidéo, qui risque de démonter toutes vos croyances, alors surtout n’oubliez pas de la partager autour de vous !

    INTRO : 00:00
    L’ÉVOLUTIONNISME : 01:42
    L’ETHNOCENTRISME : 06:30
    LE PROGRÈS : 08:44
    CONCLUSION : 15:25

  • L’homme n’est pas un animal économique : épisode • 4/5 du podcast Avoir raison avec... Karl Polanyi
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avoir-raison-avec/l-homme-n-est-pas-un-animal-economique-2727684


    ©Getty - Ann Ronan Pictures/Print Collector

    Série « Avoir raison avec... Karl Polanyi »
    Épisode 4/5 : L’homme n’est pas un animal économique
    Jeudi 24 août 2023
    De Babylone à la Grèce antique, Karl Polanyi se penche sur les formes de commerce d’échange avant l’arrivé du marché autorégulateur
    Pour mieux dénoncer la toute-puissance du marché dans les sociétés modernes, Polanyi explore l’économie des sociétés archaïques. Du code d’Hammurabi à Aristote, il montre que si les échanges commerciaux structuraient les sociétés, ils étaient régis par des lois toutes autres que celles du marché.
    Avec

    Alain Caillé Économiste, sociologue
    Alain Guéry Historien, directeur de recherche au CNRS

    "Aucune société ne saurait naturellement vivre, même pour peu de temps, sans posséder une économie d’une sorte ou d’une autre ; mais avant notre époque, aucune économie n’a existé qui fût, même en principe sous la dépendance des marchés."

    https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/17362-24.08.2023-ITEMA_23465947-2023C35448S0236-21.mp3

    Pour défendre cette position bien tranchée, retracer un siècle d’histoire économique ne suffisait visiblement pas à Karl Polanyi. Après avoir publié la Grande Transformation, il est plus que jamais déterminé à démontrer qu’une société entièrement gouvernée par les lois du marché n’a rien de naturel ni d’universel. Il n’hésite donc pas à remonter plus loin encore dans le temps. Des marchands de Babylone, au fonctionnement de l’économie en Grèce antique en passant par le Dahomey, il se fait anthropologue et montre qu’il existe d’autres façons d’organiser l’économie, sans passer par un marché tout puissant. "Nous avons, dit-il, de bonnes raisons pour insister sur ce point avec toute l’énergie dont nous sommes capables."

    #l'économie_de_subsistance #l'économie_de_marché #le_don #l'échange #la_redistribution #anthropologie #histoire

  • L’anthropocène a trouvé son point de référence géologique
    https://www.actu-environnement.com/ae/news/anthropocene-point-reference-geologique-42364.php4

    Encore à l’état de proposition, l’anthropocène, première époque géologique influencée par l’activité humaine, est à deux doigts d’être validée par la communauté scientifique. Le lac Crawford au Canada en serait son point de référence.

    Parmi les marqueurs de l’anthropocène présents au fond du lac Crawford, les chercheurs y ont retrouvé des cendres de combustion du pétrole et du charbon, des métaux lourds comme le cuivre et le plomb ou encore des microplastiques. Un marqueur en particulier a retenu leur attention : la présence de plutonium. Rarement relevé dans la nature, ou à l’état de simples traces, cet élément chimique montre des concentrations sans précédent dans des strates datées d’après 1950. Le 1er novembre 1952, les États-Unis effectuent la première explosion-test d’une bombe à hydrogène, avec l’opération « Ivy Mike » dans l’attol d’Eniwetok dans le Pacifique. Cet essai a produit des isotopes radioactifs du plutonium et des métaux lourds encore inconnus (l’einsteinium et le fermium).

    En somme, « une pareille présence de plutonium nous donne un marqueur indéniable du moment où l’humanité est devenue une telle force géologique qu’elle pouvait laisser une empreinte incomparable à l’échelle des temps passés », souligne Andrew Cundy, chercheur en radioactivité environnementale à l’université de Southampton et membre de l’AWG. Cet essai atomique, comme le reste des prémisses de l’ère nucléaire, coïncide avec ce que les chercheurs surnomment la « grande accélération », une multiplication rapide des activités humaines à fort impact environnemental – notamment dans la consommation d’énergie et de carburants – initiées après la Seconde guerre mondiale. Ce phénomène incarne, selon eux, le moment où l’holocène, époque géologique entamée après la dernière glaciation il y a 11 700 ans (et donc dite « interglaciaire »), cède sa place à l’anthropocène. Et, si le lac Crawford fait consensus, elle ferait du « crawfordien », le premier âge de la 39ème époque géologique de l’histoire de la Terre.

  • L’#Anthropocène a désormais son site emblématique mais reste loin d’être officialisée - rts.ch - Monde
    https://www.rts.ch/info/monde/14168429-lanthropocene-a-desormais-son-site-emblematique-mais-reste-loin-detre-o

    De l’avis général, une approbation sera très difficile. Des géologues de renom estiment que les critères techniques ne sont pas remplis pour qualifier l’Anthropocène de nouvelle « époque », même s’ils reconnaissent qu’une rupture s’est produite au XXe siècle.

    Si la barre du vote à la majorité des deux tiers de l’ICS et auparavant d’un sous-comité était franchie, les partisans de l’Anthropocène devraient encore convaincre les gardiens de l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS), réputés intransigeants sur les modifications de la Charte chronostratigraphique internationale.

    #climat #lac_crawford

  • Cartographie de l’écologie d’extrême-droite et réactionnaire
    FLED – Twitter
    https://twitter.com/Eco_Decoloniale/status/1667221356922978322

    En collaboration avec @daphne_dsch journaliste chez @Politis_fr, nous avons réalisé une cartographie de certains partis politiques, mouvements, organisations et personnalités qui abordent l’écologie avec une perspective d’extrême droite ou réactionnaire.

    via @cdb_77

    • Ce qui nous amène à une autre inversion ici, quand on se demande ce que des féministes radicales font dans une liste dénonçant l’écologie réactionnaire : il s’agit de prétendre que les féministes radicales, qui refusent que le fait d’être nées femelles les contraignent aux stéréotypes genrés imposés aux femelles humaines, sont en fait les véritables essentialistes. (Alors que les gens qui prétendent qu’il faut changer de sexe pour se conformer à l’idée stéréotypée qu’on se fait des genres, ne seraient pas du tout essentialistes.)

      Et évidemment, on va ainsi tirer des traits pour relier les radfems et des militantes lesbiennes (rebaptisées TERF, des fois qu’il existe un mouvement organisé de féministes qui se qualifient elles-mêmes de TERF, avec un logo associé), à la Manif pour tous qui, elle, soutient justement les rôles stéréotypés/religieux des mâles et des femelles dans la société.

      On pourrait aussi dans ce tableau s’attaquer aux personnes qui luttent contre la négrophobie (qui refusent que leur identité soit réduite à la couleur de leur peau) et les accuser de racisme parce qu’elles prétendent qu’elles subissent la négrophobie justement à cause de la couleur de leur peau (quel affreux essentialisme), et surtout parce qu’elles n’acceptent pas l’idée que se blanchir la peau serait un acte progressiste de lutte contre la négrophobie. Dans cette logique, je ne serais pas loin de penser que la généralisation du terme « TERF », balancé comme une évidence, est du même tonneau que le terme « racisme anti-blanc ».

    • @arno c’est complexe et on peut s’y perdre un peu (notamment en perdant la possibilité de se questionner sur le transgenrisme et ses attaques contre les féministes au risque d’être catalogué·e transphobe) , parce qu’il y a aussi (d’après mes plus jeunes sources familiales) des radfems qui rallient les fachos par transphobie commune et publient dans les torchons comme V.A …
      #sidération #on_fait_quoi_alors

    • De même, les traits du genre grosbloc vers grosbloc comme Deep Green Resistance <-> Décroissance, font croire qu’il y a alors un lien entre les sous-trucs qui sont à l’intérieur de ses blocs. Or dans « Décroissance » ya… que des trucs de fachos + Pierre Rahbi, et dans l’autre… PMO et Floraisons et Nicolas Casaux n’ont jamais eu de lien avec Krisis, Pierre Rahbi etc, bien au contraire… donc ces liens n’ont aucun sens.

      Càd qu’au lieu de critiquer tels groupes pour les idées précises qu’ils ont (ça pourrait, pourquoi pas), ils font juste des liens avec d’autres groupes pourris qui n’ont aucun rapport.

      Comme si Floraisons critiquaient des trucs qu’illes considèrent essentialistes et anti-féministes pour les mêmes raisons que Thais d’Escufon et la Manif pour tous (comme le dit arno c’est au contraire pour des manières de voir le monde totalement inverse !)

    • Des radfems historiques comme Dworkin et Mackinon ont noué des alliances avec la droite chrétienne américaine, pour lutter contre la pornographie. Elles ont aussi, avec d’autres, participé à des paniques morales colossales, qui ont foutu des milliers de gens innocents en prison.

      Pas facile a entendre, mais comme toutes les grandes institutions, le féminisme a du sang sur les mains.

      Ca me semble important de ne pas escamoter ces liens avec la droite ou l’extrême droite, hier comme aujourd’hui. Je me répète un peu, mais c’est ici même que j’ai contracté une vision presqu’angelique de ces mouvements, porté généralement par des hommes d’ailleurs, comme le traducteur de Dworkin, qui publie ici, martin je ne sais plus comment.

      Par contre c’est vrai qu’en mode carte c’est un peu ultralight pour un écheveau pareil. Et peut-être que les alliances d’aujourd’hui ne sont pas exactement directes. C’est pas très précis là.

    • Ne pas escamoter des glissements et les personnes qui se livrent au confusionnisme, je veux bien (m’enfin je pense qu’il est déjà assez difficile d’échapper aux polémiques autour de Moutot et Stern par exemple). Par contre ces cartes qui systématiquement font dans la culpabilité par association pour résumer radfem à « TERF » et extrême-droite, non, et plus généralement cette façon de placer les féministes radicales comme cibles privilégiées de gens qui se prétendent progressistes, franchement beurk. Surtout si au final pour une partie de la jeunesse désormais, on passe joyeusement de « This machine kills fascists » à « This machine kills TERFs ». (Même topo, mais plus discret parce que sans doute moins facile à faire gober, le lobbying intense contre les femmes et associations « abolitionnistes », requalifiées « putophobes ».)

      On joue au même genre de simplifications à base de culpabilité par association, et d’inversions assez systématiques, pour provoquer la méfiance pavlovienne à l’encontre des mouvements anti-racistes qui n’entrent pas dans les bonnes cases, les mouvements dénonçant l’islamophobie sont d’excellentes cibles pour en prendre plein la gueule, les antifas, les écolos radicaux, etc. et évidemment les pro-Palestinien·nes subissent ce genre de méthodes de manière continue et massive : antisioniste devient antisémite de manière automatique, et partisan de l’apartheid israélien serait le véritable progressisme.

    • @tintin, stp, parler d’institution pour le féminisme, avec du sang sur les mains, qui plus est, et surtout pour Dworkin, c’est je l’espère, une bad blague hein.
      Et je me suis déjà moquée ici de tes assertions contre les radfems https://seenthis.net/messages/1005668#message1005790
      Quitte à se répéter, voila ma réponse

      Curieux comment les féministes radicales sont devenues en quelques années l’ennemi public N°1
      Je pense que le changement climatique elles n’y sont pas pour rien, mais ce n’est que mon point de vue, je peux me tromper.

    • On remarque que certains groupuscules sont très isolés des autres.
      Que l’autoritarisme et la méritocratie est une caractéristique commune.

      C’est chaud de se rendre compte qu’on peut partager des idées avec certains, sans pour autant embrasser le reste.
      – baisse de la démographie
      – liberté et aide publique aux systèmes agricoles indépendants

    • Le seul sang que les féministes ont sur les mains, c’est celui de leurs menstruations et de leurs IVGs.

      Le sang des personnes trans c’est les proxénètes, les pornographes et les putiers qui le verse, pas les féministes.

      Pour ce qui est du rappochement de Stern avec l’ED (Moutot n’est pas une radfem, mais une liberale à mon avis) c’est les consequences des années de harcelement mais aussi liée à l’histoire de Stern, qui etait femen au depart, un mouvement assez proche de l’ED ukrainnienne. Mais en face le mouvement transactiviste est un mouvement masculiniste violent qui appel à la mort des féministes (terf au bucher, une balle une terf qui étaient légion samedi pour les prides) afin de legaliser le proxenetisme et la mise sous hormone cancerigènes à vie de personnes qui souffrent de troubles mentaux liés aux discriminations misogynes et/ou homophobes qu’illes ont subit.

      Comment être écolo et recommander des transitions hormonales ? J’ai des copines queer, ecolo, ati-vax qui se soigneraient le cancer avec de la camomille et qui se font des soirée testo avec leur pote trans.
      Comment être contre les violences sexuelles et promouvoir le proxenetisme ? L’auto-entreprenariat de son humiliation sexuel sur onlyfan n’est pas differente du systhème traditionnel de la maison close, sauf pour des macronnards convaincus.
      Comment être féministe et prétendre que les femmes s’auto-identifient à leur genre ? Le genre n’est pas une question d’auto-identifdication, les femmes ne s’auto-identifient pas à ce qui est le mécanisme de leur oppression. On ne s’auto-identifie pas plus à son genre qu’on le fait à ses races, ses classes, ses handicapes, son age...

      Le transactivisme n’est pas un mouvement de gauche, au mieux c’est du libéralisme identitaire qui s’auto-identifie de gauche mais à mon avis c’est un mouvement réactionnaire qui détruit méticuleusement tous les aquis des féministes de ces dernières décennies (et pas seulement les aquis féministes, mais ceux de tous les groupes vulnérables, mineurs, homos, personnes racisées, classes sociales défavorisées (le passing est un privilège bourgeois))....

      #inversion_patriarcale #fauxminisme #allié

    • Réaction de Nicolas Casaux :
      https://www.partage-le.com/2023/06/09/politis-la-gauche-technologiste-et-la-chasse-aux-heretiques-par-nicolas-

      Autre imbécilité, Deschamps écrit elle-même que, contrairement à la collapsologie, DGR n’a pas de lien avec « les communautés survivalistes » d’extrême droite, mais relie néanmoins DGR et lesdites « communautés survivalistes » dans sa glorieuse cartographie de « l’écologie d’extrême droite ou réactionnaire ».

      On pourrait continuer longtemps à lister les mensonges et autres absurdités nous concernant dans le torchon de Deschamps/Politis. En fin de compte, ce qui est terriblement dommage, c’est qu’analyser la récupération de l’écologie par des idéologies autoritaires, par l’extrême droite, par diverses sortes de réactionnaires, est effectivement un travail important. Mais avec ce lamentable dossier, Politis n’y contribue pas du tout. Au contraire, il propage un confusionnisme pathétique. On note d’ailleurs que le survivaliste Piero San Giorgio est oublié de la cartographie de l’écologie d’extrême droite de Politis, alors que son concept de B.A.D. (Base d’autonomie durable) a été inventé par Serge Ayoub, un militant d’extrême droite proche des individus qui ont tué Clément Méric. Enfin bref, un travail calamiteux.

    • Combien est détestable la fasciste et sempiternelle phrase « les extrêmes se rejoignent ». Il faudrait faire une cartographie de celleux qui la prononcent à longueur de temps.

      À cet égard, l’extrême gauche et l’extrême droite, la gauche et la droite en géné­ral, se rejoignent lar­ge­ment. Poli­tis rejoint Éric Zem­mour et Marine Le Pen. Tous sou­haitent conser­ver l’es­sen­tiel de la civi­li­sa­tion techno-industrielle.

      Et donc pour cette fois, c’est Cazaux qi-ui te la mouline à sa sauce, argument zéro, grosse fatigue revient.
      #dichotomistes_du_milieu #proverbistes_de_mes_deux

      Et sur le lien donné, pour des personnes qui critiquent la tech et te mettent près de 50 scripts wordpress consorts et google, avec impossibilité de ne pas te faire sniffer tes infos car il y a un blocage sur TOR.

      https://www.partage-le.com/.well-known/captcha/?r=%2F2023%2F06%2F09%2Fpolitis-la-gauche-technologiste-et-la-chasse-aux-

      Our system thinks you might be a robot!
      We’re really sorry about this, but it’s getting harder and harder to tell the difference between humans and bots these days.

      …partage-le.com
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  • Nécro(techno)logie : Claude Lorius n’a rien vu en Antarctique
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?article1831

    Toujours en librairie : Le Règne machinal (la crise sanitaire et au-delà). Voir ici

    Le glaciologue Claude Lorius est mort le 21 mars. Nous ne sommes pas du genre à gifler les cadavres, comme le firent les surréalistes à la mort d’Anatole France en 1924. Quoique la main vous démange à la lecture de la presse éplorée. Le Figaro salue le « pionnier de la climatologie moderne », Le Daubé le « lanceur d’alerte précoce », Libération le « géant des glaces », Le Monde le « héros légendaire ». Qu’a donc fait Claude Lorius (à part mourir) pour mériter de telles louanges ? Il a établi, en 1987, le lien entre la teneur en gaz à effet de serre dans l’atmosphère et l’évolution climatique. D’un point de vue scientifique, s’entend. Ses études ont vérifié les observations des montagnards : « ils ont détraqué les saisons ». Ce (...)

    #Nécrotechnologies
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/lorius_n_a_rien_vu.pdf

    • Lorius prétend nous livrer la cause du désastre en reprenant le terme d’Anthropocène, forgé au début des années 80 par le biologiste Eugène Stoermer. Celui-ci le popularise en 2002 dans un article de Nature corédigé avec Paul Crutzen, prix Nobel de Chimie 1995. Pardon de rabâcher, mais les nécrologies servent aussi à ça. Stoermer et Crutzen ne font pas remonter les causes du bouleversement géo-climatique à l’apparition de l’anthropos – à « l’ère des humains », comme le prétend Lorius - voici trois millions d’années, ni même à l’émergence du capitalisme. Ils situent le début de cette ère en 1784, année du perfectionnement de la machine à vapeur11 . C’est-à-dire le début de l’usage des énergies fossiles : la révolution thermo-industrielle. Leur terme englobant d’Anthropocène est abusif et commode pour dissimuler la vraie rupture, celle du Technocène. La société industrielle, motorisée par les progrès technoscientifiques, a détruit les équilibres climatiques et écologiques. Point.

      […]

      Remonter à la racine des maux signifie regarder en arrière. Les causes, par définition, sont dans le passé. Lorius le savait bien, qui lisait dans ses carottes de glaces polaires les différentes étapes des dégâts industriels sur notre biotope. Mais ses conclusions, 30 ans plus tard, étaient celles d’un aveugle : « Comment encourager la croissance qui est nécessaire, en respectant l’environnement ?14 »
      La croissance de quoi ? Des températures ? Du niveau des mers ? De la sécheresse ? Bref, Lorius n’avait rien vu dans l’Antarctique. C’était bien la peine d’aller si loin et de brûler tant de kérosène.
      Il est trop tard pour les glaciers. Et pour nous, simples anthropoïdes ?

      #anthropocène #capitalocène #technocène #climat #réchauffement_climatique #écologie #technocratie #Grenoble #science #recherche #Claude_Lorius #glaciers

    • Finalement, les héros légendaires sont des scientifiques comme les autres.

      Oui, et la connaissance de la nature ne garantit pas d’avoir des idées politiques particulièrement intéressantes.

      Qu’a donc fait Claude Lorius (à part mourir) pour mériter de telles louanges ? Il a établi, en 1987, le lien entre la teneur en gaz à effet de serre dans l’atmosphère et l’évolution climatique. D’un point de vue scientifique, s’entend. Ses études ont vérifié les observations des montagnards : « ils ont détraqué les saisons ». Ce que chacun constatait en levant le nez,

      D’un point de vue scientifique… Quel autre point de vue y aurait-il ? Le montagnard qui lève son nez a-t-il accès à des centaines de milliers d’années d’évolution du climat ? Renifle-t-il des concentrations de co2 ? Sa peau sent-elle des augmentations moyennes de température sur le globe ? Ses oreilles détectent-elles des changements d’orbite de la Terre ?

  • Kumpania, Lise Foisneau – Vivre et résister en pays gadjo – Éditions Wildproject
    https://wildproject.org/livres/kumpania

    Les Roms de Provence sont un collectif fugitif. Circulant en France depuis 1870, ils ne sont pas libres de choisir les lieux où ils vivent. En les classant comme « gens du voyage », l’administration les oblige à habiter sur des « aires d’accueil » souvent situées aux abords de zones industrielles polluées. Malgré leur assignation à ces espaces contrôlés, à chaque halte, les Roms font naître un monde politique singulier, celui de la kumpania.

    À travers une ethnographie en caravane sur les routes de France, l’anthropologue Lise Foisneau décrit au plus près la vie de ces compagnies. Elle raconte leur attachement aux lieux, les traumas invisibles de la guerre, la transmission de la mémoire, le règlement des conflits, l’attention aux enfants, la chine, les séparations et les retrouvailles. Mais aussi la traque policière et administrative, l’ouverture des « places », et la quête d’endroits où s’arrêter.

    En dépit des persécutions du 20e siècle et de la privatisation croissante de l’espace public, les Roms de Provence ne cessent depuis 150 ans de reconfigurer leurs mondes. Kumpania en décrit la chair et la vivacité.

    #Roms #anthropologie #ethnologie #Lise_Foisneau #livre

    • La thèse Chakabartyienne d’une toute nouvelle conscience environnementale planétaire tient-elle mieux la route que celle de la nouveauté de la société du risque ? Non. Le grand récit d’un passage progressif de l’obscurité aux lumières vertes se révèle incorrect au regard des acquis récents en histoire des sciences et des savoirs ainsi qu’en histoire environnementale. Un désormais important corpus d’études a démontré que nous ne vivons pas ce moment unique et récent où les humains se demanderaient pour première fois ce qu’ils font à la planète. De nombreux travaux sont en effet venus ébrécher la thèse d’un clivage passé entre histoire humaine et histoire naturelle que Chakrabarty attribue à la modernité, et dont il prophétise la remise en cause présente.

      [...]

      En somme, les 3e et 4e traits du « planétaire », à savoir les réflexivités environnementales sensibles au temps long de la Terre et à la planétologie comparative, posés comme nouveaux par Chakrabarty, se révèlent des grammaires réflexives bien plus anciennes, par lesquelles les élites impériales ont pensé les conditions et le devenir de leur hégémonie (en inventant notamment des justifications « vertes » à l’impérialisme). Il ne s’agit pas ici de prétendre que les connaissances et environnementales planétaires du début de l’ère moderne ou du XIXe siècle doivent être considérées comme d’héroïques avant-courriers oubliés des actuelles Sciences du Système Terre, du GIEC et de l’Anthropocène ! Il s’agit plutôt d’historiciser la catégorie du « planétaire » et non pas seulement celle du « global ».

      La critique de Bonneuil est bien vue, mais je commence aussi à me dire que ce débat sur la date de départ de notre réflexivité environnementale est un peu inutile. Je pense qu’on peut soutenir à la fois que celle-ci a toujours existé et qu’on en vit une inédite - et pourquoi pas appeler ça planetary turn.

      Le rappel de Bonneuil, Fressoz et co. est utile – il y a toujours eu des gens qui se sont souciés de leur environnement à plus ou moins grande échelle, qui ont alerté et lutté contre les pollutions industrielles en tout genre, qui en ont souffert, qui ont lié questions politiques et environnementales, commerciales et biogéochimiques (?), y compris parmi les élites européennes. Bref, il est utile de rappeler que nous n’avons jamais été modernes (hu hu !). Ce rappel permet de ne pas se couper fondamentalement du passé, de montrer qu’un autre chemin était possible, que les responsables du massacre n’ont pas agi dans une ignorance complète des conséquences.

      Mais, outre les catastrophes qui se multiplient partout, les sciences du système Terre n’offrent-elles pas justement quelque chose de fondamentalement différent dans notre expérience de la planétarité ? Dans le cas du réchauffement en particulier, on parle de gaz invisibles, qui se mélangent rapidement globalement, qui n’ont aucun effet (direct) sur la santé, et dont les effets se produisent sur des décennies, siècles, millénaires. Les sciences viennent rendre visibles, avec une très grande précision, un truc qui sans elles resteraient inconnus, elles nous rendent plus sensibles aux effets de nos activités, redéfinissent les risques comme étant globaux et se jouant sur de grandes échelles de temps. Le futur de l’humanité est discuté à partir de modélisations climatiques, des traités internationaux sont signés sous l’influence de la science.

      (Parmi ces sciences, celle de Claude Lorius (https://seenthis.net/messages/996066) a joué un grand rôle. Les graphes montrant en parallèle les concentrations de co2/méthane et la température sur des centaines de milliers d’années sont devenus iconiques, ils définissent la « base » à partir de laquelle on a gravement dévié et ils nous font connaître le climat de la Terre sur 1 million d’années. La somme de connaissances issues de sa science avec laquelle on se trouve maintenant est phénoménale, alors qu’au début de sa carrière elle était vue comme un truc d’amateurs et que lui voulait surtout aller jouer les aventuriers en Antarctique.)

  • Voir la nature comme un·e naturaliste : une contre-histoire de la modernité
    https://www.terrestres.org/2022/11/30/voir-la-nature-comme-un-naturaliste-une-contre-histoire-de-la-modernite

    Vanessa Manceron : Quand j’ai commencé mon enquête sur les pratiques naturalistes amateurs en Angleterre, Par-delà nature et culture, était déjà paru. Je lisais dans le même temps les philosophes et les anthropologues qui tiraient les conséquences de l’ontologie naturaliste pour en faire la critique, considérant que cette vision du monde conduit à considérer la nature comme un simple entourage dont les modernes, du fait de leur exceptionnalité et de leur position supérieure dans l’échelle du vivant, se sont extraits par la culture. De sorte, ils ont pu exercer librement leur volonté de puissance et d’assujettissement, qu’il s’agisse d’en faire un stock de ressources dans lequel puiser sans restriction ou qu’il s’agisse de la protéger et, ce faisant, de lui assigner une position subalterne.

    Tandis que j’observais le rapport à la nature qu’expérimentent les observateurs de la faune et de la flore que je suivais sur le terrain un certain nombre de dissonances ont surgi. J’ai en effet découvert des hommes et des femmes qui se relient intensément et pour la vie à certaines catégories d’êtres vivants, qui pour les connaître s’immergent dans leur monde et tentent d’approcher ce que cela veut dire d’être une plante ou un oiseau. Ce sont des gens que les manières d’exister des vivants émerveillent, parce qu’elles sont autres, intrigantes et éminemment variables. Ils aiment et étudient les plantes et les animaux pour ce qu’ils sont et font en situation, sans finalisme, sans désir de transformation ou d’appropriation, ni même d’interaction, car ils cherchent des alignements avec des êtres autonomes et libres, considérant qu’ils font partie du même tissu symbiotique.

    Les naturalistes amateurs échappent donc à la critique du dualisme mortifère parce que celui-ci n’est pas étanche. Mais surtout, et c’est sans doute ce qu’il y a de plus intéressant, ils ne rompent pas pour autant avec l’ontologie naturaliste telle que la définit Descola, ni ne témoignent par leurs pratiques d’un quelconque désir d’animisme. Ils incarnent selon moi une potentialité relationnelle de l’ontologie naturaliste mal connue et impensée, qu’il m’importait de décrire. On a à faire avec un régime de connaissance héritée des débuts de la modernité qui produit des schèmes relationnels symétriques et d’une grande intensité, bien étrangers aux jugements réducteurs sur l’incapacité des modernes à se relier et à considérer avec respect et équité les autres vivants. C’est pour cela que je trouve très important de toujours situer nos connaissances et ne jamais céder à la tentation de cesser de rendre compte des variations et de la singularité des situations.

    [...] L’Angleterre offre des décalages très intéressants à penser. Selon l’historienne des sciences Lorraine Daston, les représentations d’après nature naissent au XVIIe siècle. L’histoire naturelle précède ce qu’elle appelle l’objectivité mécanique, quand il s’est agi de mettre le monde à distance sans inférence humaine, pour dévoiler les lois universelles de fonctionnement de la nature. Les naturalistes amateurs, héritiers d’une tradition de recherche des débuts de la modernité, ne considèrent pas que les émotions esthétiques, les affects et l’engagement personnel de l’observateur soient un obstacle à l’objectivation et à une bonne observation. C’est même tout l’inverse. Les savoirs sont justes et précis parce qu’ils ne sont pas exempts de doutes, d’interprétations, voire même dans certains cas d’une certaine dose d’anthropomorphisme. Et c’est sans doute ce que Romain appelle les rémanences de l’analogisme. De la même manière que les illustrations d’après nature n’excluent pas l’artiste de la représentation, les savoirs naturalistes n’excluent pas les observateurs du monde qu’ils étudient. Il s’agit d’une science avec des chercheurs dedans. Cette épistémologie qui assouplit et trouble la coupure entre sujet connaissant et chose à connaître, me semble particulièrement marquée en Angleterre. Et sans doute faut-il y voir l’influence historique de la tradition empirique qui fait de l’expérience sensible l’origine de toute connaissance. Le monde ne se connaît qu’en en faisant l’expérience sensible. C’est là un motif extrêmement fort qui explique sans doute aussi le succès outre-Manche de l’histoire naturelle mais aussi des pratiques amateurs.

    [...] Les naturalistes amateurs ne sont pas dans un mode projectif pour accroître leurs états intérieurs. En se reliant à la nature comme ils le font, ils ne construisent pas un paysage admiré à distance, ils plongent dans les détails, ils s’immergent, ils ont le sentiment qu’ils sont membres d’une espèce parmi les autres et que les êtres qu’ils admirent sont une part d’eux-mêmes. Il ne s’agit donc pas d’un système d’identification à la nature, mais d’un système qui crée la possibilité d’expérimenter une nouvelle version de la réalité, en étant avec et parmi. Ils ne voient pas non plus le sauvage comme un espace des confins où s’ensauvager. Le sauvage est ce qui est libre et autonome, mais qui peut évoluer dans les espaces habités et transformés par les hommes. Ils ne sont pas des romantiques s’extasiant devant un monde sans homme, ils se préoccupent des intrications entre les existants, dans des milieux où les êtres cohabitent avec les humains. Les naturalistes amateurs ont des prises très concrètes sur le monde et une volonté de comprendre comment les vivants habitent le territoire. La nature pour eux est un monde qui a ses propres logiques merveilleuses à observer, et qui transforme la perception qu’ils ont de leur environnement proche, non pas comme un entour et un espace, mais comme un milieu et un lieu auquel s’attacher et dans lequel s’immerger.

    [...] Romain Bertrand : Là où je me retrouve dans la démarche de Vanessa, comme dans celle d’autres anthropologues qui réinvestissent une ethnologie de l’Europe, c’est qu’elle essaye de cerner des régimes de pratiques qui montrent qu’on fait de la politique autrement – à bas bruit, comme tu dis –, laquelle permet des tas de liaisons nouvelles entre les êtres, entre les causes. Ces situations ne sont pas réductibles à des catégorisations idéologiques faciles et rapides. Dès qu’on descend dans l’ordre du quotidien et de la pratique, on est dans la multiplicité, et c’est cette multiplicité qui permet ces prises. Ce que l’histoire peut ajouter, c’est l’écriture d’une histoire de l’Europe qui ne soit plus celle d’une identité enracinée dans une provenance. J’aime bien dire que ça a toujours été un peu flou. Ce que Vanessa documente dans le contemporain, on peut aussi le documenter dans le passé, y déceler une altérité interne à nous-mêmes. C’est très important aujourd’hui, parce que tous les discours conservateurs, ceux qui refusent de penser la sortie du modèle capitaliste, la crise écosystémique, le font toujours au nom d’un même argument : si on faisait les choses autrement, ça ne serait plus nous. Or ce « nous », seule raison refuge qui s’oppose aux changements que la catastrophe impose, est porté par un discours complètement faux. Nous avons aussi été autres : nous avons été analogistes, empiristes, mystiques, etc. La petite contribution des sciences humaines, c’est de le montrer en sapant l’illusion d’une identité au nom de laquelle on refuserait de changer. Il faut qu’on change, oui, et ça n’est pas grave : l’histoire montre que nous n’avons jamais cessé de changer, et l’ethnographie que nous avons des milliers d’alternatives à notre disposition.

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