• Quels sont les bienfaits du bilinguisme ?

    Quels sont les avantages du bilinguisme chez l’#enfant et l’3adolescent ? #Développement_cérébral, réussite scolaire, perception du monde : nos invités, spécialistes et parents, partagent leurs expériences.

    Quelles sont les #vertus du bilinguisme, notamment chez les enfants et les adolescents, quand on sait que la moitié des enfants du monde parle une langue différente de celle parlée à la maison ? Dans notre pays, un enfant sur quatre parle chez lui une autre langue que le français… Alors à quoi ressemble le développement cérébral et intellectuel des bilingues ? De quelle façon le bilinguisme ou le plurilinguisme contribue-t-il à la #réussite_scolaire ? Les bilingues pensent-t-ils et voient-ils le monde autrement ? Nous verrons également si certaines langues sont plus valorisées que d’autres.

    Langues invisibles : un bilinguisme à deux vitesses

    Dans une France où le plurilinguisme est une réalité pour des millions d’enfants, toutes les langues ne bénéficient pas de la même #reconnaissance. Si l’#arabe est la deuxième langue la plus parlée du pays avec près de 4 millions de locuteurs, elle est pourtant « sept fois moins transmise que l’#anglais », souligne Anna Stevanato, fondatrice de l’association Dulala, qui milite pour la valorisation de toutes les #langues_familiales, en accompagnant parents et professionnels de l’éducation.

    Cette #inégalité de #transmission, souvent liée à des freins culturels et institutionnels, se manifeste dans la manière dont certaines langues sont perçues. Michel Launay, linguiste et auteur de La République et les langues (Raisons d’agir, 2023), dénonce ainsi un « #bilinguisme_du_riche », valorisé lorsqu’il s’agit d’anglais ou d’#espagnol, face à un « #bilinguisme_du_pauvre », souvent stigmatisé : « Si un enfant parle anglais à la maison, on s’extasie ; mais s’il parle wolof, on s’inquiète de sa réussite scolaire », déplore-t-il.

    Dans ce contexte, les parcours familiaux diffèrent : certains parents, attachés à leur #culture_d’origine, transmettent leur langue comme un trésor identitaire ; d’autres préfèrent inscrire leurs enfants à des cours privés de langues pour anticiper leur réussite. Par ailleurs, environ 80 000 enfants allophones, nouvellement arrivés, sont scolarisés dans des dispositifs spécifiques (UPE2A) dès le primaire, mais très peu en maternelle, où l’on attend souvent des enfants qu’ils fassent seuls le pont entre la langue du foyer et celle de l’école.

    Briser les #mythes : les bienfaits du bilinguisme enfin reconnus

    Malgré les preuves scientifiques actuelles en faveur du bilinguisme, de nombreuses familles issues de l’immigration continuent de douter de ses bienfaits. « À l’hôpital Robert-Debré, en échangeant avec des familles venues du monde entier, j’ai été frappée d’entendre que certaines ne voulaient pas que leurs enfants parlent leur #langue_maternelle », rapporte Nawal Abboub, chercheuse spécialisée en développement du cerveau et de l’apprentissage à l’Université Paris-Cité. Un renoncement souvent motivé par la peur d’entraver le développement cognitif de l’enfant, une inquiétude profondément enracinée dans l’histoire.

    « Dès les années 1920, on trouvait dans les écrits l’idée que parler deux langues provoquait une #confusion mentale, voire un #retard intellectuel », explique-t-elle. Ces #représentations ont été renforcées par des études américaines peu rigoureuses qui comparaient des enfants anglophones à des enfants issus de l’immigration encore en phase d’#apprentissage. « Pendant longtemps, y compris dans les milieux médicaux et éducatifs, on a véhiculé la croyance que le plurilinguisme nuisait au développement de l’enfant », rappelle Michel Launay. Il cite l’ouvrage d’AndréeTabouret-Keller, Le bilinguisme en procès, cent ans d’errance, qui retrace cette période où la diversité linguistique était perçue comme pathogène.

    Or, les avancées scientifiques depuis les années 1960 sont catégoriques : non seulement le bilinguisme n’a aucun effet négatif, mais il favorise au contraire les capacités intellectuelles. « Il n’y a aucun retard cognitif chez les enfants bilingues, bien au contraire », insiste Nawal Abboub. Des recherches menées sur des enfants franco-anglais au Canada ont montré qu’ils « surpassaient les monolingues dans les mesures verbales et non verbales de l’intelligence ». Il est donc urgent de « rassurer les familles » et de former les professionnels de l’éducation et de la santé pour en finir avec ces mythes.
    le cerveau des tout-petits, une machine à langues

    Les recherches en neurosciences confirment aujourd’hui ce que beaucoup pressentaient : le cerveau des jeunes enfants est une véritable #éponge_linguistique. « Les neurones au début de la vie ont encore cette flexibilité, cette malléabilité », explique Nawal Abboub, soulignant leur capacité « incroyable » à apprendre plusieurs langues en simultané, bien avant que les automatismes d’une langue maternelle ne s’ancrent durablement.

    Contrairement aux idées reçues, les bébés bilingues ne confondent pas les langues. « Ils font la différence très tôt dans le développement, dès les premiers mois de vie », assure-t-elle, rappelant qu’un mot peut être tiré d’une langue ou d’une autre, selon sa pertinence. Ce mécanisme, loin d’être un frein, leur confère même un avantage : « Ils compensent plus facilement, ce qui leur donne des atouts linguistiques, mais aussi cognitifs. »

    Les données de la neuro-imagerie renforcent ces observations : chez les bilingues précoces, les deux langues activent les mêmes zones du cerveau, tandis que les bilingues tardifs sollicitent des circuits supplémentaires liés à l’effort attentionnel. « Leur cerveau fait plus d’effort pour traiter l’information », explique la neuroscientifique. Une fatigue que ressentent bien des adultes apprenant une langue étrangère sur le tard. Mais le #bilinguisme_précoce va bien au-delà du langage : « À seulement sept mois, des enfants exposés à deux langues montrent déjà une meilleure #flexibilité_mentale », affirme-t-elle, évoquant leur capacité à s’adapter à des changements de règles dans des jeux simples. Une preuve, s’il en fallait, que le bilinguisme n’est pas un obstacle au développement, mais bien une richesse à cultiver dès la naissance.

    Invités :

    – Nawal Abboub, spécialiste du développement du cerveau et de l’apprentissage, docteure en sciences cognitives de l’université Paris-Cité. Elle participe activement à la lutte contre les inégalités sociales en co-construisant des programmes dans le champ de la petite enfance. Elle est l’autrice de La puissance des bébés (Fayard, 2022 ; rééd. Poche, 2023).

    – Claire Etchegoyhen, directrice du pôle héros Bayard Jeunesse.

    – Michel Launey, linguiste. Il a travaillé sur deux langues amérindiennes (nahuatl et palikur) et sur la scolarisation en français des élèves allophones, en particulier en Guyane. Il est l’auteur de La République et les langues (Raisons d’agir, 2023) et membre des linguistes atterrées.

    – Ninon Ninghui Liu-Merlin, interprète, et son fils Victor Wolfenstein, enfant multilingue.

    – Anna Stevanato, linguiste spécialisée dans le bilinguisme. Elle est la fondatrice et directrice de l’association « Dulala » (D’une langue à l’autre), qui vise à faire du multilinguisme un levier pour favoriser l’égalité des chances et lutter contre les discriminations.

    https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/grand-bien-vous-fasse/grand-bien-vous-fasse-du-mercredi-14-mai-2025-5992942

    #langues #bilinguisme #multilinguisme #stigmatisation
    #podcast #audio

  • [Scoop] Vous ne devinerez jamais quelle est la deuxième langue la plus parlée en France !
    https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/langage-vous-ne-devinerez-jamais-deuxieme-langue-plus-parlee-france

    La diversité linguistique de la France révèle une surprenante réalité : l’arabe dialectal se hisse au rang de deuxième langue la plus parlée dans l’Hexagone. Comment [malgré l’école] cette langue a-t-elle acquis une telle importance ? Quels sont les enjeux sociaux et culturels liés à cette présence linguistique ? Plongeons dans les subtilités de ce phénomène intéressant qui façonne le paysage linguistique français.

    .... les estimations suggèrent qu’entre trois et quatre millions de personnes en France maîtrisent couramment l’#arabe_dialectal.

    [...]

    La présence significative de l’arabe dialectal en France soulève des questions cruciales en matière d’éducation et d’intégration. L’enseignement de l’arabe dans les écoles françaises fait l’objet de débats passionnés, souvent empreints de malentendus et de controverses.
    D’un côté, certains voient dans cet enseignement une opportunité de valoriser le multilinguisme et de favoriser l’intégration des communautés arabophones. De l’autre, des voix s’élèvent, craignant une remise en question de l’identité nationale française.

    #arabe #bilinguisme

    • Ce journal semble aussi louche que bien d’autres (l’arabe pratiqué en France ? quelle surprise !).
      J’ai relayé cet article en raison de l’inusable étonnement causé par la très faible disponibilité de cours d’arabe dans l’éducation nationale, une surprise persistante malgré l’évidence d’une explication, un racisme qui entend l’arabe comme menaçant.
      Effectivement, vu la fragmentation plurilingue, la question de l’enseignement est pas vite répondue
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Arabe#Langue_arabe_littérale
      Et il y est (fort peu) répondu par un enseignement de l’arabe littéral supposé ouvert sur des formes dialectales
      https://www.education.gouv.fr/bo/15/Hebdo31/MENE1518361A.htm#:~:text=La%20langue%20enseignée%20est%20l,ou%20tel%2.

      Une restriction en partie compensée hors de l’école par des moyens rien moins que traditionnels ?

      L’Arabe globalisé
      https://cle.ens-lyon.fr/arabe/langue/langue-arabe/l-arabe-globalise

      En parallèle, les particularités morpho-syntaxiques, syntagmatiques et lexicales de la langue arabe médiée par internet semblent aussi découler d’une très forte volonté des locuteurs arabophones de débattre et de partager avec les autres citoyens du monde les grands enjeux culturels, économiques, sociaux, politiques.

      Une langue arabe ancrée dans la pluralité se construit et se pratique à très large échelle (mélange spontané des registres, des langues, des systèmes graphiques) qui, en réalité, reflète une tendance à une certaine homogénéisation culturelle transnationale.

      Pourrions-nous définir ce registre, que j’appellerai « arabe globalisé », comme une forme d’extension de la pluriglossie historique de la langue arabe ?

    • « Enseigner l’arabe pourrait être un vecteur d’intégration », Mohamed Salah Ben Ammar médecin, ancien ministre de la santé publique tunisien, Publié le 07 janvier 2025
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/01/07/enseigner-l-arabe-pourrait-etre-un-vecteur-d-integration_6485338_3224.html

      Médecin et ancien ministre de la santé tunisien, Mohamed Salah Ben Ammar déplore, dans une tribune au « Monde », la marginalisation de la langue arabe en France et plaide pour que son enseignement soit renforcé à l’école.

      L’enseignement de l’arabe en France dépasse le simple cadre linguistique. Elle soulève des enjeux essentiels d’intégration sociale, culturelle et économique. La marginalisation de cette langue, visible notamment par son absence dans l’espace public, nourrit un sentiment d’exclusion chez de nombreux jeunes issus de l’immigration.
      Langue maternelle d’une partie importante de la population immigrée, notamment maghrébine, l’arabe reste marginalisé sur le plan institutionnel. Ce rejet, d’abord implicite, s’est accentué avec la montée des idéologies xénophobes. Bien que l’extrémisme religieux soit souvent invoqué pour justifier cette marginalisation, les relations historiques entre la France et le Maghreb, ainsi que la présence d’une importante communauté d’origine maghrébine depuis plus d’un siècle, montrent que ce phénomène est bien plus ancien.
      Dans l’imaginaire collectif français, l’arabe est souvent associé à des stéréotypes négatifs et à un mépris pour les cultures des anciens colonisés. Parler arabe en public a longtemps été mal vu, voire interdit. Cette langue est également confondue avec l’islam, alimentant des préjugés injustifiés. Pourtant, l’arabe dépasse largement le cadre religieux. Le mouvement intellectuel de la Nahda, au XIXᵉ siècle, conduit notamment par des Libanais maronites, a modernisé cette langue et enrichi son vocabulaire pour l’adapter aux concepts contemporains.

      En France, l’enseignement de l’arabe suscite des débats marqués par des préjugés. Souvent réduite à quelques mots argotiques ou perçue comme un marqueur des banlieues, cette langue souffre d’une image négative.
      Par ailleurs, la confusion entre arabe littéraire, coranique et dialectal complique son apprentissage. L’arabe littéraire, utilisé dans les médias, la littérature et l’éducation, repose sur une structure grammaticale exigeante. Les dialectes, eux, varient selon les régions et intègrent des influences berbères, françaises, italiennes ou espagnoles. Cette dualité provoque des frustrations chez les apprenants, car la langue apprise en classe diffère souvent de celle entendue au quotidien.

      Contribuer à une société plus inclusive

      Malgré une demande croissante, l’enseignement de l’arabe reste marginal. En 2017, seuls 10 000 élèves apprenaient l’arabe littéraire au collège et au lycée, soit 0,2 % des élèves, et à peine 500 à l’école primaire . Pourtant, on estime à cinq millions le nombre de personnes d’origine arabe et à neuf millions celles ayant une origine musulmane en France.

      Le système éducatif peine à répondre à cette demande : en 2024, seuls sept postes au capes d’arabe ont été ouverts, sur un total de 1 271 pour toutes les langues vivantes. De plus, l’enseignement de l’arabe est souvent relégué à des horaires périphériques, tandis que le contenu des cours est parfois contrôlé par des pays étrangers ou par des associations, suscitant des critiques légitimes.

      En l’absence de reconnaissance institutionnelle, de nombreuses familles se tournent vers des associations culturelles ou religieuses pour transmettre cette langue, ce qui alimente certaines inquiétudes. Cette marginalisation renforce le sentiment d’exclusion des jeunes issus de l’immigration, qui se retrouvent stigmatisés en France pour parler arabe et moqués dans leur pays d’origine pour leur maîtrise imparfaite de cette langue.
      Pourtant, enseigner l’arabe pourrait être un vecteur d’intégration. Reconnaître les liens historiques entre la France et la culture arabe permettrait d’intégrer cette langue dans le récit national, contribuant ainsi à une société plus inclusive.
      Sur le plan économique, l’arabe constitue également un atout stratégique. Cinquième langue la plus parlée au monde, avec plus de 400 millions de locuteurs, elle pourrait renforcer la position de la France sur les marchés du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Intégrer l’arabe dans les musées, les bibliothèques ou même les documents administratifs favoriserait une meilleure compréhension entre les différentes composantes de la société française.

      L’immense écrivain Khalil Gibran (1883-1931) dans son recueil de textes poétiques paru en 1923, Le Prophète, fait dire à son sage, Al Mustapha : « Et qu’est-ce que la connaissance de la parole sinon l’ombre d’une connaissance sans paroles ? » L’#enseignement institutionnel de l’arabe offrirait aux #jeunes_issus_de_l’immigration un outil de valorisation de leur héritage culturel, tout en facilitant leur intégration au sein de la société française.

    • « Le bon Arabe, c’est celui qui choisit d’être le meilleur en français plutôt qu’en arabe »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/09/30/le-bon-arabe-c-est-celui-qui-choisit-d-etre-le-meilleur-en-francais-plutot-q

      Nabil Wakim, journaliste au « Monde » né au Liban et ayant grandi en France, publie « L’Arabe pour tous. Pourquoi ma langue est taboue en France » (Seuil), une enquête personnelle sur le rapport des enfants de l’immigration avec leur langue maternelle. Extraits.

      https://archive.ph/9eeFK#selection-1971.0-1975.266

    • Ah oui (et zut ! les Fayrouz indiqués ont disparus de YT...).
      J’envisageais un aspect non pas supérieur mais banal de l’enseignement de l’arabe. L’orientalisme d’en haut se ferait déborder par le bas, par des usages que l’institution scolaire saurait favoriser. Hypothèse de ravi de la crèche.
      Sauf qu’en matière d’antifascisme si on peut pour un bon moment douter de l’efficacité des barrages, ce n’est pas le cas de la nécessité des ponts.
      (Si vous voulez « vendre » une idée de gauche à feu le NFP, faites-vous plaisir.)

      En dépit de la biologie, le poisson pourrit par la tête.

  • En défense de Merwane Benlazar, cible d’un racisme plus idiot et décomplexé que jamais
    https://www.lesinrocks.com/societe/en-defense-de-merwane-benlazar-cible-dun-racisme-plus-idiot-et-decomplex

    Depuis sa première chronique dans l’émission “C à vous”, l’humoriste est l’objet d’une sidérante campagne raciste et diffamatoire portée par l’extrême droite. La ministre de la Culture a en outre annoncé le 5 février qu’il “ne sera plus à l’écran”. Il est crucial de démonter ces accusations et de le soutenir.

    [...]

    Ce qui se joue ici n’est rien de moins que le droit des arabes au second degré. Benlazar est suspect par principe : le sarcasme même le plus ostensiblement signalisé est retenu contre lui – s’il fait cette blague, ce serait qu’au fond il n’en pense pas moins, et manœuvrerait sous couvert d’humour pour banaliser l’islam radical. Celles et ceux qui colportent ces soupçons se déshonorent – peut-être par bêtise, leurs a priori les empêchant de saisir des registres ironiques pourtant à la portée d’un enfant de douze ans ; peut-être par mauvaise foi, sachant leurs accusations mensongères, mais les propageant quand même, afin de ne pas manquer une occasion de faire payer coûte que coûte le prix fort à celui qui a eu l’outrecuidance en 2025 d’être un arabe à la télévision française.

    • Polémique autour de l’humoriste Merwane Benlazar : un cas avéré de délit de faciès raciste
      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/polemique-autour-de-lhumoriste-merwane-benlazar-un-cas-avere-de-delit-de-

      Les accusations d’islamisme à l’encontre du stand-uppeur, après un sketch à l’émission « C à vous » sur France 5, montrent que le droit au second degré n’est aujourd’hui pas permis à un arabe musulman, dénonce Guillaume Orignac, scénariste.

      Une frange de ce pays n’entend plus rien à l’#humour. Comme c’est probablement la même qui a peur des #Arabes, il suffit que l’un d’entre eux fasse du second degré pour qu’elle chavire dans la paranoïa. Cette semaine, l’humoriste Merwane Benlazar en a fait les frais. « Il ne sera plus à l’écran sur les chaînes publiques », a déclaré Rachida Dati. Qu’une ministre de la Culture prenne soin d’annoncer elle-même le bannissement d’un humoriste des antennes publiques, endossant ainsi ouvertement la décision, est inquiétant. Les raisons de cette éviction le sont encore plus.

      Car #Merwane_Benlazar n’a rien fait d’autre que de faire une chronique d’humour dans l’émission C à vous sur France 5, avec sa barbe, un bonnet de hipster ou de début de calvitie, et une tête d’Arabe. Tout le monde ayant convenu que la chronique ne posait pas de problème, ne restait que sa tenue pour susciter le scandale. Barbe, bonnet et tête d’arabe : c’est comme la tête à Toto, facile à dessiner, sauf qu’ici ça fait un salafiste, apparemment. Du genre à vouloir imposer la charia en faisant des blagues. Merwane Benlazar qui, en plus d’être drôle, est intelligent, l’avait d’ailleurs lui-même prédit : dans un sketch, il expliquait avoir laissé pousser sa barbe parce que « juste Arabe, en France, c’est trop facile. Et moi, il me faut des vrais défis ».

      Lecture biaisée

      Il faut croire que le défi était trop élevé. Pris dans une polémique d’une ampleur médiatique et politique insensée, Merwane Benlazar est tombé dans un cas avéré de délit de faciès raciste. Bien sûr, ses détracteurs se sont empressés de le nier. « L’apparence ne doit pas disqualifier sans aucun fondement », a ainsi précisé Rachida Dati. Alors, ils ont creusé, et déterré des posts sur Twitter qui devaient trahir son agenda islamiste. Que ces posts relèvent du deuxième degré, de la vanne, plus ou moins habile et drôle, ne leur a pas traversé l’esprit, tout entier occupé à guetter les signes appuyant leur thèse. Un tweet où il surjoue le musulman rigoriste blâmant le comportement d’une jeune femme devient une preuve. Sauf que ce tweet est adressé à une amie proche avec laquelle il échange de manière ironique.

      Mais on aura beau démonter patiemment tous les raccourcis accusateurs, rien n’y fera. Les voilà qui dénoncent sa supposée misogynie sur le fondement de leur lecture biaisée. On les renverra alors à cette chronique radio où il s’amuse de la ringardise sexiste du concours de Miss France (« waouh, défilez les gonzesses ! » en mimant un spectateur) pour en conclure qu’« on est des porcs », comme dans le slogan « balance ton porc ». Eux n’entendront dans ce mot qu’une insulte islamiste. Chaque parole de Merwane Benlazar voit son sens renversé pour alimenter son dossier d’accusation. Son image est ensablée dans leurs travaux d’arasement systématique du #second_degré puisqu’ils ne veulent plus entendre que les signaux confirmant leurs angoisses xénophobes. Merwane Benlazar est piégé, précisément, dans cette chausse-trape où on a désormais fait tomber l’humour : celui de la #littéralité.

      Autodérision, instrument essentiel du stand-up

      Car le stand-up, dont est issu Benlazar est un art comique du décalage. Le jeune humoriste en est, aujourd’hui, une des figures les plus talentueuses. Un blagueur né qui a le sens de la formule et de la descente rapide au second degré. Du genre à pouvoir engager très vite une relation avec le public en l’emmenant avec aisance sur les territoires de l’humour, tiré par l’extraordinaire aura de sympathie qu’il dégage.

      Avec sa tête d’Arabe, sa barbe et son large sourire, il a su jouer sur scène de cette figure de « musulman sympathique » qu’il dégage pour regarder, entre autres, nos impensés racistes sous l’angle du rire. Une part de son autodérision consiste à en triturer l’image qu’on s’en fait en France. « Bienvenue à cette conférence sur l’islam ! », lance-t-il à son arrivée sur la scène du Festival de Montreux. Et tout le monde rit. Il leur a donné un cliché. Et la possibilité de s’en moquer, et de se moquer du regard raciste qui l’a animé.

      Mais pour en rire, il faut lui accorder le droit au second degré. Ce que révèlent les accusations à son encontre, c’est ce que ce droit est aujourd’hui refusé à un arabe musulman. Un arabe musulman, ça n’est pas drôle. Juste dangereux. Un pur bloc de littéralité, de la barbe aux babouches.

      Or, la force du stand-up, un art encore mal compris en France, est d’instituer justement un écart imperceptible mais significatif entre la personne et sa projection sur la scène comique. Et c’est dans ce déplacement-là que peut se jouer l’autodérision qui est son instrument essentiel. Avec elle, l’humoriste trouve le moyen de se mettre au niveau du public qu’il va ensuite charrier pour atteindre cet état joyeux et cathartique où l’on affronte nos tabous collectifs. Car voilà ce que fait le stand-up quand on sait s’en servir : descendre dans la cave bourbeuse de nos psychés, mais avec le rappel de la blague pour pouvoir en remonter. Et Merwane Benlazar sait s’en servir. Sauf qu’aujourd’hui, on veut lui couper la corde.

      Réalisateur de la série-documentaire Stand-up, la rage de rire (Arte) et critique de stand-up sur France Culture, Guillaume Orignac a aussi publié, en 2021, un essai chez Façonnage éditions, Rire au temps de la honte. Une histoire de Louis C.K.

    • Elle est bonne :

      Merwane Benlazar qui, en plus d’être drôle, est intelligent, l’avait d’ailleurs lui-même prédit : dans un sketch, il expliquait avoir laissé pousser sa barbe parce que « juste Arabe, en France, c’est trop facile. Et moi, il me faut des vrais défis ».

    • « J’ai reçu entre 10 et 15 insultes par minute » : Merwane Benlazar répond à la polémique par un sketch
      https://www.leparisien.fr/culture-loisirs/humour/jai-recu-entre-10-et-15-insultes-par-minute-merwane-benlazar-repond-a-la-

      L’humoriste de 29 ans a publié ce samedi en fin de journée sur ses réseaux sociaux un sketch enregistré jeudi soir à l’Européen (XVIIe), dans lequel il revient sur l’emballement consécutif à sa première chronique télévisuelle, le 31 janvier.
      Par Grégory Plouviez
      Le 8 février 2025

      https://www.instagram.com/reel/DF0l_G-gUP0

  • Hégémonie sur le terrain, normalisation, racisme : les ressorts du vote RN |
    https://www.mediapart.fr/journal/politique/270624/hegemonie-sur-le-terrain-normalisation-racisme-les-ressorts-du-vote-rn


    Benoît Coquard et Félicien Faury. © Photomontage Mediapart

    L’un a travaillé sur les zones rurales du Grand Est, l’autre sur l’électorat RN dans la région Sud-Paca. #Benoît_Coquard et #Félicien_Faury échangent sur le ressort du #vote pour l’#extrême_droite, à l’heure où l’hégémonie qu’ils ont observée sur leurs terrains se décline à grande échelle.
    Fabien Escalona
    27 juin 2024

    Après les européennes et à quelques jours du premier tour des élections législatives anticipées, les médias et les responsables politiques les ont sollicités plus que d’ordinaire, saisis par les nouveaux seuils franchis par le vote en faveur du Rassemblement national (#RN). Benoît Coquard, sociologue à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), est l’auteur de Ceux qui restent (La Découverte, 2019). Félicien Faury, chercheur postdoctoral au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip), vient de publier Des électeurs ordinaires (Seuil, 2024).

    Tous deux travaillent sur des zones de force du RN, qui n’ont pas les mêmes caractéristiques. D’un côté, Benoît Coquard écrit sur les campagnes désindustrialisées du Grand Est ; de l’autre, Félicien Faury a installé son dispositif d’enquête dans la région attractive du Sud-Paca (Provence-Alpes-Côtes d’Azur). S’ils ont tous deux déjà accordé des entretiens à Mediapart (ici ou là), ils n’avaient encore jamais échangé. Le croisement de leurs perspectives nous intéressait, et aussi leur sentiment de chercheurs à l’heure où le scénario d’une majorité absolue pour le parti lepéniste n’a jamais été aussi crédible. 

    Mediapart : Vous travaillez depuis des années sur l’électorat RN. Comment lisez-vous la période actuelle ?

    Félicien Faury : Sur le strict plan des rapports de force électoraux, elle n’est pas surprenante. Le RN continue de prolonger des courbes électorales qui étaient déjà ascendantes. Depuis plusieurs années, on repérait que, y compris dans un contexte très abstentionniste, le RN continuait à mobiliser ses électeurs. On disait son électorat volatil, notamment aux élections intermédiaires, mais une fidélisation croissante était à l’œuvre, qu’on a retrouvée aux élections européennes du 9 juin. Un noyau électoral puissant a été solidifié.

    Benoît Coquard : Désormais, l’hégémonie de l’extrême droite que l’on observe sur nos terrains se décline avec de plus en plus de force au niveau national, que ce soit dans les urnes ou à travers la manière dont Emmanuel Macron l’a posée en adversaire centrale.
    Chez beaucoup de gens aujourd’hui règne l’impression d’être du côté des vainqueurs, ce qui est conforté par les effets d’entourage et des médias consommés. Quand on se souvient des vieilles affiches du Front national, représentant Jean-Marie Le Pen avec un bâillon, incarnant un vote de gens marginalisés qu’on ne laissait pas parler, c’était vraiment un monde différent. 

    Félicien Faury : Je suis tout à fait d’accord. Dans beaucoup de territoires, le RN ne peut absolument plus être considéré comme un parti « stigmatisé », c’est même tout l’inverse.

    Dans vos travaux respectifs, vous insistez sur le fait que le vote RN n’est pas un vote de personnes isolées ou atomisées, comme on l’entend parfois. Est-ce qu’on ne peut pas admettre, comme le chercheur Matthijs Rooduijn, qu’elles sont prises dans des liens sociaux qui n’ont pas la force de ceux des syndicats ou des Églises ?

    Benoît Coquard : Le vote RN n’est pas mon objet de recherche et je l’attrape justement par cette question des liens sociaux. J’ai travaillé sur la reconstitution des appartenances dans des bourgs désindustrialisés, et j’y ai observé des formes de repli, mais pas d’individualisme. En fait, les classes populaires n’en ont pas le luxe.
    Il ne s’agit pas tant de liens faibles que d’un resserrement de la conscience collective sur un petit nombre de personnes homogènes dans leur vision du monde et qui pensent aussi pouvoir s’entraider. Cette observation ethnographique corrobore de grandes enquêtes sociologiques menées à l’échelle européenne. Celles-ci établissent une corrélation ente le fait de ne faire confiance qu’à un petit nombre de personnes et le vote pour l’extrême droite. 

    Félicien Faury : Nos travaux diffèrent par leur objet. Benoît travaille sur les sociabilités rurales, les modes de vie, en explorant les différentes scènes d’une existence. De mon côté, la focale est plus restreinte autour de l’acte de vote, en se demandant ce qui est politisé ou « électoralisé » dans la vie des personnes. Mais je crois, en effet, que même dans l’isoloir et à bulletin secret, on continue à voter en groupe, comme les gens de qui on se sent proches socialement.
    La « normalisation » du RN, c’est aussi ça : quand ce vote devient légitime auprès de ceux qui comptent et qui font autorité près de soi. Cela vaut également pour le racisme. On pourrait avoir tendance à penser que c’est le défaut d’institutions et de « social » qui amène les gens à se replier et à devenir racistes. Or, c’est triste à dire, mais le #racisme, c’est aussi du #lien_social. Il existe des sociabilités qui entretiennent et autorisent l’expression de la parole raciste.

    De façon générale, je trouve que l’argument de l’atomisation ou des liens sociaux faibles revient parfois à « battre en retraite » sociologiquement. Le lien social est toujours présent, reste à savoir avec qui et quoi. Il faut donc plutôt se demander quels type de liens sociaux créent quels types de vote.
    Sur la question du « repli sur soi », j’aimerais souligner à quel point la question du diplôme est fondamentale. C’est un capital immatériel, sanctifié par l’État, qui vous donne de grandes possibilités de « voyager socialement ». Il y a comme une sécurité symbolique qui voyage avec vous lors de votre confrontation avec d’autres groupes sociaux. Lorsque vous n’en bénéficiez pas, comme c’est souvent le cas des électeurs du RN, l’ancrage local et le patrimoine matériel deviennent particulièrement importants – d’où le grand impact affectif des cambriolages, par exemple.
    Benoît Coquard : Effectivement, plus on est diplômé, plus on part facilement de sa campagne, moins on est tenu par les enjeux réputationnels qui y prévalent, moins on y souffre d’un éventuel déclassement territorial. Quand toutes vos ressources sont locales, en revanche, c’est très différent. On est alors beaucoup plus exposé à l’idée de l’extrême droite selon laquelle il faut faire passer les gens exactement comme soi avant, sinon on ne s’en sortira pas. C’est l’une des choses qui me font dire que les populations acquises à cette idée sont engagées dans le vote RN pour longtemps.

    Vous venez d’employer la notion de « #déclassement », de plus en plus mobilisée pour éclairer le vote RN. Est-ce qu’elle vous parle, ou est-ce qu’elle vous semble trop réductrice, quand ce parti est aussi capable de percer dans des milieux plutôt favorisés ?

    Félicien Faury : Il faut préciser de quoi on parle. Dans le Sud-Est où j’ai travaillé, c’est l’incertitude économique et le pessimisme résidentiel qui dominaient. Mes enquêtés, peu fragiles sur le marché du travail, ne vivent pas le déclassement sur un mode individuel mais plutôt collectif, avec l’idée que « tout se dégrade ». Ça se vit à l’échelle du quartier, du lotissement, de la commune, et ça peut s’extrapoler à la région et au pays. 

    Benoît Coquard : J’ai pour ma part écrit contre les théories de la France périphérique et de l’insécurité culturelle. Les milieux populaires ruraux que je côtoie ne peuvent pas être décrits comme des « petits Blancs » vivant dans un sentiment d’abandon, même s’ils peuvent exprimer ce discours face à des journalistes qui les rencontrent en quelques minutes. Ils développent en fait des contre-modèles de style de vie, affirment volontiers une mentalité insulaire, du type « on est maîtres chez nous ».

    Félicien Faury : Pour le coup, j’ai moins rencontré cette mentalité insulaire en Paca. Contrairement aux campagnes en déclin étudiées par Benoît, le Sud-Est est un territoire attractif, si bien que l’arrivée régulière de nouveaux résidents remet régulièrement en cause le capital local des résidents les plus anciens. Si ces évolutions peuvent être regardées avec colère ou amertume, j’observe néanmoins une résignation face à « l’invasion du haut » par les classes supérieures, quand les migrations du « bas » sont beaucoup plus facilement politisées. 

    Benoît Coquard, vous avez exprimé récemment l’idée que les propositions sociales du Nouveau Front populaire (NFP) pourraient parler aux fractions populaires de l’électorat RN. Cela peut sembler en contradiction avec les arguments de Félicien Faury qui met en avant la « matrice raciale » de ces comportements électoraux. Est-ce que vous avez une divergence ou des nuances sur le sujet ?

    Benoît Coquard : Je disais surtout que ces propositions seraient invisibles pour cet électorat, par manque de mixité politique dans son entourage et en raison de ses sources d’information. Le fait même d’être exposé à ces propositions n’est pas évident. Plutôt que de convertir des électeurs, l’enjeu me semble de s’adresser aux classes populaires entourées de gens qui votent RN, et qui n’osent pas dire autour d’elles qu’elles ne votent pas RN, car sinon elles se font traiter d’« #assistées ». 
    De fait, les stigmates associés à la #gauche sur mon territoire, c’est surtout ceux des « branleurs », des « cas sociaux ». Ce n’est que dans un second temps que le qualificatif d’« #Arabes » finit par arriver. On racialise le social, et les divisions sociales entre les précaires et les stables marchent d’autant plus qu’elles sont raciales.
    Cette dimension est clairement plus forte dans ce qu’écrit Félicien. Cela peut être lié à l’enquêteur, notamment avec qui on va parler, quelle place on prend dans les sociabilités. Moi, par exemple, j’étais au milieu des commérages. Du coup, je voyais beaucoup de dénigrement latéral entre habitants non racisés.

    Félicien Faury : J’ai aussi rencontré un sentiment « anti-assistés » très fort. Et effectivement, quand on laisse dérouler les discours, on se rend compte que ce sentiment se retrouve particulièrement exacerbé quand les personnes visées sont en plus identifiées comme « immigrées », c’est-à-dire jugées « moins françaises » que d’autres. Dans mon enquête, je constate que c’est lors de ce redoublement que la critique de l’#assistanat devient particulièrement politisée, et vient nourrir plus spécifiquement le vote RN.
    J’essaie de poser la question du racisme autrement qu’en termes de « présence » ou d’« absence », et d’observer plutôt les formes qu’il prend, et comment ça s’articule à des expériences sociales concrètes. Par ailleurs, il y a des enjeux de parole publique : à quel point faut-il insister sur cette dimension raciste ? C’est une question que je me suis beaucoup posée durant l’écriture, et encore davantage maintenant lors des présentations de mon travail en public et dans les médias. 

    Le fait d’avoir travaillé surtout sur les petites classes moyennes, et non sur le vote RN ouvrier, a pu contribuer à ce que je m’autorise à utiliser le terme de « racisme » et à le mettre au cœur de mes études. Comme le sens courant (et non sociologique) en donne une définition associée à la bêtise et à l’archaïsme, son usage peut contribuer à stigmatiser des groupes subalternes.

    Mais le risque inverse serait de ne pas en parler du tout. Il faut bien que cette dimension centrale soit rappelée, dans un contexte où son omission serait tout de même étrange, avec une extrême droite aux portes du pouvoir. J’essaie aussi d’insister dès que je le peux sur le caractère transversal du racisme, qui existe dans tous les milieux sociaux – y compris la bourgeoisie culturelle de gauche. Je vois bien que cette partie-là de mon propos est plus rarement reprise…

    Benoît Coquard : Je trouve que Félicien s’explique très clairement à ce sujet dans son livre. Si le racisme était absent de son explication causale des conduites électorales, ce serait effectivement l’éléphant dans la pièce.
    Il y aurait d’ailleurs quelque chose de méprisant à ne pas écouter les arguments des gens qu’on interviewe. Je ne vois pas pourquoi, parce qu’un enquêté est ouvrier ou moins diplômé, il faudrait retraduire ses propos au point qu’ils ne lui ressemblent plus. Là où il faut être prudent, c’est qu’il est important de relier les affects aux transformations macrosociales qui leur donnent du sens.

    La question raciale, en particulier, ne peut pas être envisagée sans les exclusions économiques qu’elle permet. Il y a comme un « #salaire_psychologique minimum », un capital minimal procuré par le fait de savoir que tu as toujours quelqu’un en dessous de toi. Le RN arrive à mettre ça en place localement.
    Cela me rappelle des groupes d’amis très unis sur lesquels j’ai travaillé, incluant des binationaux franco-algériens. Quand il y avait des accrochages, entre Blancs on s’insultait de « cas soc’ », mais quand cela les concernait, ils étaient traités de « sales Arabes ». L’exclusion était redoublée par un racisme resurgissant sur ces gens-là. Leur place ne tenait qu’à un fil car ce registre-là, exercé contre « plus tricard que soi », permettait de les exclure à n’importe quel moment.

    Félicien Faury : Je suis tout à fait d’accord, et j’ai d’ailleurs toujours cherché à relier les propos, parfois très explicites, que je pouvais entendre à des processus collectifs en termes de classe ou de ségrégation, dont les électeurs du RN sont au fond très peu responsables. Le racisme de ces électeurs n’émerge qu’en s’adossant à des processus de racialisation collectifs qui dépassent très largement la seule extrême droite.
    Encore une fois, je vois bien comment certains groupes sociaux pourraient s’autorassurer en se disant que le racisme, c’est au RN, que les racistes, « ce sont eux », et s’innocenter ainsi à bon compte. Cette mise à distance est évidemment trop facile.

    À court et plus long terme, quelles sont les pistes que peuvent suivre les gauches, ou du moins les adversaires du RN, pour reconquérir des milieux conquis par ce parti ?

    Félicien Faury : Je ne sais pas s’il faut poser la question de cette manière. Est-ce que le seul but doit être de « faire baisser le RN » ? Si oui, en Paca, si vous voulez prendre des électeurs au RN, le plus efficace est sans doute de mener une politique de droite dure ! La vocation de la gauche reste de lutter contre les inégalités de classe, la domination masculine, le racisme… Bien sûr, la stratégie électorale est très importante, mais la conquête des électeurs du RN ne doit pas être le seul horizon. 
    Une fois dit cela, il faut bien sûr ajouter que les #classes_populaires ne sont en aucun cas condamnées à voter pour le RN. Il y a un ensemble de points, sur les services publics, le pouvoir d’achat, les inégalités, à propos desquels la gauche peut activer des affects dans son sens. C’est un travail de long terme qui doit être mené. 
    Ce qui m’a frappé dans les espaces sociaux sur lesquels j’ai enquêté, c’est que les discours qui circulent, cadrés en faveur du RN, ne sont jamais contredits. Il n’y a jamais aucune sanction sociale face aux propos négatifs sur, par exemple, les « assistés » ou les « immigrés ». Il faudrait parvenir à diffuser des contre-discours, pour éviter ces effets de consensus autour de thématiques favorables à l’extrême droite.

    Par ailleurs, il faut aussi poser la question de l’incarnation et du recrutement politique au sein des partis de gauche. Trop souvent, les corps et manières d’être de la gauche, à la télé comme sur le terrain, témoignent de l’éloignement des mondes sociaux.

    Benoît Coquard : On se rejoint car je rappelle toujours que des modèles de respectabilité sociale sont essentiels pour offrir un autre son de cloche. Il n’y a pas de slogan magique.
    On parle des scores réalisés par La France insoumise dans les quartiers populaires racisés de Paris ou d’autres grandes villes, mais je ne suis pas sûr qu’ils soient aussi impressionnants dans ceux des bourgs et petites villes du Grand Est où je travaille. Je mets aussi en garde contre l’idée que les abstentionnistes seraient un réservoir évident pour la gauche. Là où le RN est hégémonique, en tout cas, les abstentionnistes, dans l’état actuel des choses, se sentent proches de Marine Le Pen.
    Et même si la gauche reprend des voix parmi les milieux populaires, ceux-ci auront été imprégnés des discours du RN. Il y a donc un travail de fond à faire en reprenant pied en milieu populaire au quotidien.

    Félicien Faury : On peut aussi ajouter que la politisation du racisme, dont les succès du RN sont un des symptômes, vient après une période où le racisme existait tout autant sinon plus, mais était naturalisé. Il y a eu des contestations et des victoires du côté des mouvements antiracistes et des minorités ethnoraciales, qui ont entraîné une forme de réaction, de réflexe défensif. On peut faire un parallèle avec le backlash [le « retour de bâton » – ndlr ]suscité par la révolution féministe.

    Si la montée de l’extrême droite se greffe à un appareil d’État, les cartes pourraient être rebattues de manière inquiétante, évidemment. Mais on peut aussi lire la situation comme un potentiel chant du cygne de certaines formes de domination raciale.

    "Je préfère une société de travail à l’assistance", un premier ministre de gauche, 1998.

  • Thread by sim_kern on Thread Reader App – Thread Reader App
    https://threadreaderapp.com/thread/1786500008742687217.html

    Jewish author here, and for years I’ve used my social media to teach folks about the history of “antisemitism,” but I will not be using that term anymore. And to fully explain why, we need to get clear on the history of the word. 1/🧵

    Jews facing hate and violence in Europe is as old as the Roman adoption of Christianity, but the term “antisemitism is far more recent. It was first popularized in the 1860’s by #Wilhelm_Marr, the original redpilled, alt-right racistbro. 2/🧵

    In his youth, he fought for minority rights. But after life kicked him in the teeth a bit—a failed revolution, a failed business in Costa Rica, two divorces, one from a Jewish woman, and another Jewish wife who died on him, he decides his WHOLE THING is going to be hating J’s. 3/

    At the time, regular-ol’ J Hate was called just that—“#Judenhass.” Wilhelm Marr turned this hate into politics. In 1871, German Jews were legally emancipated. And In 1879 Wilhelm Marr establishes the “League of #Antisemites,” whose main goal was reversing Jewish emancipation. 4/

    Always has to be a backlash to anti-racist progress, doesn’t there? Same shit as Neo-NZ’s rebranding themselves as “alt right” following the Obama presidency. Marr coined a new term to legitimize an old hate, establishing the political framework that would become the N-Z party.5/

    The “Semite” in anti-semitism came from 18th c. linguistics, which divided languages with so-called “Aryan” roots from those with “Semitic” roots such as Hebrew. Proof, according to galaxy-brained racial scientists, that Jews and Christian Germans were different races. 6/

    –Pause to remember that #race science is not real, & race is always a social construct-
    Now, traditionally us J’s had been hated since the middle ages because Christians thought we were 🧙‍♂️’s who worshipped the 👿and drank 🩸, and if we’d just convert to Christianity, fine! 7/

    But self-proclaimed Antisemites were modern, secular men, who hated us because of “science.” This meant no matter what Jews did, how much we assimilated, secularized, or even converted, we would always be a threat to Germany. Because our “badness” was racial, was in our blood. 8/

    In the early twentieth century, Jewish writers such as #Lucien_Wolf, were careful to distinguish between this new antisemitism thing happening in German versus “traditional” J-Hate in Russia, which was that old superstition that was sure to die out in the modern world. 9/

    In the 1880’s Zionism starts gaining popularity alongside “antisemitism.” Wolf was fiercely antizionist, because he saw Z’a enacting all the antisemites’ worst fantasies. Antisemites claimed Jews could never be truly German and…Zionist Jews were saying the same thing. 10/

    Wolf fought for minority rights at the Paris Peace Conference after World War I and secured the “minority treaties” from the League of Nations, which were SUPPOSED to protect Jews and other ethnic and religious minorities across Europe. But that…obviously did not work out. 11/

    Because following WWI, half of Europe is desperately impoverished, and desperately impoverished people are easy to manipulate into hateful mobs, and self-proclaimed “antisemitic” politicians took full advantage of that to get elected. 12/

    So there’s this explosion of anti-Jewish hate, violence, and discriminatory laws, and by the 1930’s, Wolf and other Jewish writers have dropped this distinction between “Judenhass,” and “antisemitism," and the terms are used synonymously. 13/

    But the word transforms again with the violent, colonial creation of the state of Israel in 1948. Because Zionists, at this point, start claiming that any criticism of their Jewish state, is antisemitism. (A conflation that’s always been contested by antizionist Jews). 14/

    In “In the article “Towards a History of the Term Antisemitism,” (free to read!) David Feldman sums up the absurdity of this conflation. “the creation of the state of Israel transformed the relationship of Jews to state power” and to minorities. 15/

    Jews in 1930s Germany had far more in common with Palestinians today than w/Israeli Jews, in terms of oppression.

    Because antisemitism in Germany THEN was white supremacy. And anti-Palestinian hate NOW is white supremacy. All that’s changed is who gets to define whiteness. 16/

    So when the US Congress says, “anti-zionism is antisemitism,” that’s like saying a thing is its opposite. It’s as absurd as saying, “anti-racism is racism.” Now I don’t think we should let Congress decide…much of anything, including the meanings of words... 17/

    But the term is also confusing. Every time I use it lately, I get a flood of comments saying, “Arabs are semites too, so being anti-Palestinian IS anti-semitic.” And I used to respond, well, words don’t always mean exactly the sum of their parts... 18/

    Antisemitism was coined to mean J-hate, and has always been used to mean J-hate. And besides the whole category of “semite” is this relic of bogus race science. But regardless, Palestinians and Arabs more broadly feel erased by the term, and we should take that seriously. 19/

    More and more, I don’t see the point in “fighting” for this term that was coined by H*tler’s idol, is based on 18th-century race science, and that Zionists use so often, in such fatuous, bad-faith, obfuscating ways that I’m starting to flinch at the sound of it. 20/

    So I’m going back to the OG term “Judenhass,” specifically, I’m gonna say “anti-Jewish hate.” That’s actually one syllable fewer than antisemitism. And it’s clearer, and doesn’t carry all this racist baggage. 21/

    And I’m also fundraising this week for a family in Gaza. If you appreciated/ learned something from this thread, please donate what you can spare to Alaa, who’s 8 months pregnant. She needs to evacuate so she can deliver her baby in a hospital. 22/

    If you donate at least $6, you can enter a giveaway for a signed, first-edition copy of my book THE FREE PEOPLE’S VILLAGE by sending a screenshot of your receipt to T4Gaza[at]gmail[dot]com. I’ll choose the winner on Monday! /end

    #antisémitisme #sémites #Arabes #Juifs #judaïsme #antisionisme #racistes #suprémacisme #suprémacistes #sionisme #sionistes

  • Ces Françaises et Français de confession musulmane « bien installés » qui songent de plus en plus à émigrer
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/18/francais-de-confession-musulmane-la-tentation-du-depart_6228469_3224.html

    A leurs yeux, 2015 marque le début de la suspicion permanente « de la part des pouvoirs publics, au travail, dans certains cercles amicaux », décrit Ismail ; des injonctions à « s’exprimer contre, être contre », raconte Hanan Ben Rhouma, de Saphirnews ; « condamner dans la seconde haut et fort les attentats, les messages de haine sur les réseaux, le voile, l’Iran, le Hamas ou que sais-je encore », énumère Haroun, le banquier de Bordeaux ; et des justifications incessantes. Samir n’en revient pas : « J’ai été contraint de montrer à des gens des photos de ma femme en maillot de bain à la plage et de ma fille en train de faire de la gymnastique pour prouver que je n’étais pas un intégriste. Vous n’imaginez pas ce que c’est humiliant. »

    « Il y a une accélération des départs depuis 2015 avec une montée du sentiment de stigmatisation post-attentats, confirme le sociologue Julien Talpin. De nombreuses personnes avec qui nous avons échangé, plus de 70 %, évoquent des expériences de discriminations directes mais beaucoup parlent d’une atmosphère, d’une ambiance dégradée qui fait peser sur eux une pression permanente qui les pousse à faire attention à tout ce qu’ils font, ce qu’ils disent… »

    #musulmans #Arabes #racisme #exil #émigration

    • Samir a 39 ans, un master de sociologie en poche et quinze années de bons et loyaux services dans la fonction publique territoriale, dans le Nord. « J’y croyais à la réussite républicaine, martèle-t-il. J’avais tort, quoi que je fasse, ça n’est jamais assez. Mon nom est sorti dans la presse dans une affaire absurde de soupçons d’“entrisme communautaire” : quand on vit dans les banlieues, les gens pensent qu’on ne fait que foutre le bordel, et quand on en sort, on est suspecté de vouloir “infiltrer” la République. »

    • Shades of Anger
      (c’était en 2011...)
      https://www.youtube.com/watch?v=m2vFJE93LTI&t=72s

      Allow me to speak my Arab tongue
      before they occupy my language as well.
      Allow me to speak my mother tongue
      before they colonise her memory as well.
      I am an Arab woman of color.
      and we come in all shades of anger.
      All my grandfather ever wanted to do
      was wake up at dawn and watch my grandmother kneel and pray
      in a village hidden between Jaffa and Haifa
      my mother was born under an olive tree
      on a soil they say is no longer mine
      but I will cross their barriers, their check points
      their damn apartheid walls and return to my homeland

      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      And did you hear my sister screaming yesterday
      as she gave birth at a check point
      with Israeli soldiers looking between her legs
      for their next demographic threat
      called her baby girl “Janeen”.

      And did you hear Amni Mona screaming
      behind their prison bars as they teargassed her cell
      “We’re returning to Palestine!”
      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      But you tell me, this womb inside me
      will only bring you your next terrorist
      beard wearing, gun waving, towelhead, sand nigger
      You tell me, I send my children out to die
      but those are your copters, your F16′s in our sky
      And let’s talk about this terrorism business for a second
      Wasn’t it the CIA that killed Allende and Lumumba
      and who trained Osama in the first place
      My grandparents didn’t run around like clowns
      with the white capes and the white hoods on their heads lynching black people

      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      “So who is that brown woman screaming in the demonstration?”
      Sorry, should I not scream?
      I forgot to be your every orientalist dream
      Jinnee in a bottle, belly dancer, harem girl, soft spoken Arab woman
      Yes master, no master.
      Thank you for the peanut butter sandwiches
      raining down on us from your F16′s master
      Yes my liberators are here to kill my children
      and call them “collateral damage”
      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      So let me just tell you this womb inside me
      will only bring you your next rebel
      She will have a rock in one hand and a Palestinian flag in the other

      I am an Arab woman of color
      Beware! Beware my anger…

      https://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=67746&lang=it

      #Rafeef_Ziadah #poésie #Palestine #arabe #langue #langue_arabe #poème #dommages_collatéraux #conflit #Israël #terrorisme #colère

  • Une projection de « La Zone d’intérêt » présentée par un collectif de militants juifs antisionistes suscite la controverse

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/02/05/une-projection-de-la-zone-d-interet-presentee-par-un-collectif-de-militants-

    #antisionnisme

    Johann Chapoutot, spécialiste du #nazisme, a annulé sa participation à une soirée prévue mardi 6 février autour de la #projection de La Zone d’intérêt, le film de #Jonathan_Glazer sur la vie quotidienne de Rudolf Höss, le commandant d’#Auschwitz. Organisée au Grand Action, dans le 5e arrondissement de Paris, une rencontre entre l’historien et la chercheuse en langues, littératures et cultures arabes et #hébraïques Sadia Agsous-Bienstein devait être animée par le #collectif_juif_antisioniste Tsedek !.

    « Je ne peux pas, en conscience, participer à vos activités », a écrit, le 1er février, Johann Chapoutot à Samuel Leter, membre de Tsedek ! chargé de ce ciné-club. En cause : le communiqué du collectif publié le 7 octobre 2023. Dans ce message, toujours en ligne sur Instagram, le groupe écrit : « Il ne nous appartient pas de juger de la stratégie de la résistance palestinienne. Mais il est de notre responsabilité de rappeler sa légitimité fondamentale. »

    M. Chapoutot n’en avait pas connaissance avant la parution, le 1er février, d’un article de Télérama consacré à une première annulation de cet événement, lequel aurait dû se tenir le 30 janvier au Majestic Bastille, à Paris, avec Sadia Agsous-Bienstein (#Johann_Chapoutot ayant eu une contrainte d’agenda). « Ce n’était pas possible pour moi, explique le chercheur. Je suis spécialiste du nazisme et de la Shoah, le #Hamas est un mouvement #négationniste. Tuer des enfants et violer des femmes ne sont pas des actes de #résistance. Il s’agit d’un massacre de nature #terroriste, dont la dimension #antisémite ne peut pas être contestée. »

    Simon Assoun, un des porte-parole de Tsedek !, dénonce « une lecture malhonnête de ce communiqué », citant également celui que le collectif a publié le 12 octobre : « L’ampleur et la brutalité des massacres commis (…) doivent être dénoncées pour ce qu’ils sont : des crimes de guerre. Les centaines de vies israéliennes et palestiniennes arrachées nous meurtrissent. »

    « La Shoah fait partie de notre histoire »
    Samuel Leter affirme ne pas comprendre la réaction tardive de l’historien : « Dans le mail où il a accepté de participer à la rencontre, il dit qu’il admire notre courage ! » Dans ce message du 10 janvier 2024, Johann Chapoutot fait notamment référence à l’avocat Arié Alimi : « Je connais bien votre collectif, dont j’admire le courage, tout comme celui d’Arié, qui est, je crois, des vôtres. »

    En réalité, l’historien a cru dialoguer avec #Golem, le mouvement cofondé par Arié Alimi dans la foulée de la marche contre l’antisémitisme du 12 octobre. « J’ai fait l’erreur de répondre spontanément, sans vérifier, afin d’aider ce qui me semblait devoir l’être : un collectif de juifs de gauche qui s’était opposé à la participation du RN [Rassemblement national] à la manifestation contre l’antisémitisme, le RN-FN [Front national] ayant été fondé, rappelons-le, par des vétérans de la Waffen-SS et de la Milice », explique-t-il.

    #Tsedek ! comme Golem sont marqués à gauche. Tsedek !, #décolonial, affirme « lutter contre le racisme d’Etat en France et pour la fin de l’apartheid et l’occupation en Israël-Palestine ». Golem milite contre tous les racismes et dénonce l’instrumentalisation de la lutte contre l’#antisémitisme. « Tsedek ! est une organisation qui ne dénonce pas l’antisémitisme de la gauche ou de la #France_insoumise, décrypte l’historien #Tal_Bruttmann, proche de Golem. Ils servent de paravent à des gens qui sont ouvertement antisémites et ils dénoncent l’instrumentalisation de la #Shoah dans une seule direction. »

    La rencontre du 6 février animée par Tsedek ! au Grand Action est annulée. Le #cinéma explique que « des pressions extérieures ont conduit à l’annulation de la participation des intervenant.e.s prévue.e.s ». Samuel Leter juge que ces annulations équivalent à de la censure : « Nous sommes #juifs, la Shoah fait partie de notre histoire. Il ne peut y avoir de #monopole_de_la_mémoire de la Shoah. »

    La pertinence d’un échange avec une spécialiste des littératures #palestinienne et #israélienne au sujet d’un film sur la Shoah a été débattue avant la première annulation du ciné-club, ce que déplore Sadia Agsous-Bienstein : « Tsedek !, que je connais, m’invite à parler d’un film sur la Shoah, un film sur la banalité de la vie d’une famille allemande à côté d’un #camp d’extermination. J’ai travaillé sur la Shoah et c’est un film sur la Shoah. En quoi ne suis-je pas #légitime sur la question ? Parce que je suis #algérienne ? » L’une de ses recherches, « La Shoah dans le #contexte_culturel #arabe », a été cofinancée par le #Mémorial de la Shoah.

    Ce n’est pas la première fois qu’un événement animé par Tsedek ! suscite la #controverse. En décembre, une conférence coorganisée par le collectif a été annulée par la #Mairie_de_Paris. Raison invoquée : la présence parmi les organisateurs de l’#association #Paroles_d’honneur, dont est membre la #militante_décoloniale #Houria_Bouteldja.

    #Zineb_Dryef

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    • You’re welcome, @kassem. J’avais vu la publication. Que tu la signale m’a donné l’occasion de trouver et lire l’article. Ce qui n’a pas été sans désagrément.

      à l’est de Detroit, une autre enclave de la communauté arabe et une tout autre ambiance : Hamtramck, vingt-deux mille habitants et 40 % de la population née à l’étranger. Les courants migratoires viennent désormais essentiellement du #Yémen, où se déroule depuis des années une guerre civile dans laquelle les Etats-Unis ont longtemps apporté leur soutien à la coalition sunnite menée par l’Arabie saoudite. Et, comme à chaque fois, une guerre lointaine dépose un flot de #réfugiés pauvres sur les porches des petites maisons ouvrières américaines construites pour d’autres migrants, au début du XXe siècle.

      Le visage et le corps des femmes disparaissent sous le voile et la robe islamique, celui des hommes reste fermé, tandis que leurs enfants affichent un sourire inversement ­proportionnel à la discrétion de leurs parents. Ils ont défilé en famille dans les rues de Hamtramck pour un cessez-le-feu à #Gaza et pour la #Palestine. La petite ville, naguère majoritairement polonaise, a longtemps connu au sein de son conseil municipal la mixité des origines et des religions, sous la houlette d’une femme, Karen Majewski. La maire avait autorisé, il y a vingt ans déjà, les appels à la prière musulmane, puisque sonnent ici les cloches de l’église catholique.

      Mais, depuis les dernières élections locales, le conseil municipal est désormais exclusivement arabe, musulman et masculin. Et l’ambiance a radicalement changé. « Est-ce que l’Holocauste n’était pas une punition préventive de Dieu contre “le peuple élu” et sa sauvagerie actuelle contre les enfants et les civils palestiniens ? », a écrit Nasr Hussain, un proche du maire sur l’une des pages Facebook d’un groupe dédié à la ville. L’édile, Amer Ghalib, d’origine yéménite et sans étiquette politique, a refusé de se désolidariser de ces propos ouvertement antisémites.

      Une immense brèche s’était déjà ouverte, il y a six mois, quand le conseil municipal avait fait retirer du fronton des édifices publics et sur l’avenue centrale tous les drapeaux autres que celui des Etats-Unis. C’était en réalité pour éradiquer l’arc-en-ciel LGBTQ qui flottait dans la ville, parmi les bannières des pays d’origine de ses habitants. Des membres des minorités sexuelles sont venus s’embrasser sous les yeux horrifiés des élus, lors du temps de parole accordé au public par le conseil municipal.

      Des haines à géométrie variable

      Des plaintes pour discrimination ont été déposées contre la ville. Ce qui n’a pas empêché le maire, comme un immense bras d’honneur, de poser, en août et en septembre, avec l’ancien conseiller à la sécurité de Donald Trump Michael Flynn. Ce républicain congédié par l’ancien président (qui l’a depuis publiquement regretté) pour ses liens avec la Russie en 2017, connu également pour sa proximité avec le groupe conspirationniste d’extrême droite QAnon, est aujourd’hui en tournée aux Etats-Unis pour lancer un mouvement chrétien et nationaliste. En d’autres temps, il dénonçait l’islam comme un « cancer vicieux », mais la politique a des frontières et des haines à géométrie variable. Et les religieux, des ennemis en commun.

      Mais c’est sur l’autre versant que pleuvent les accusations d’antisémitisme. (...)

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Arabes_américains

  • Le monde d’après | Mona Chollet
    https://www.la-meridienne.info/Le-monde-d-apres

    Toute la circulation de la compassion est détraquée dans cette guerre. Le dispositif idéologique qui s’est mis en place exige constamment des soutiens des Palestiniens qu’ils fournissent des preuves de leur empathie pour les civils israéliens tués, tout en semblant s’acharner, simultanément, à essayer de décourager cette compassion. En la refusant obstinément aux Palestiniens, d’abord, et ce, depuis des décennies. Source : La méridienne

  • Arrêter le génocide en cours en Palestine, l’appel de la FIDH à la communauté internationale
    12/12/2023. | Communiqué

    https://www.fidh.org/fr/regions/maghreb-moyen-orient/israel-palestine/arreter-le-genocide-en-cours-en-palestine-l-appel-de-la-fidh-a-la

    La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) reconnaît qu’Israël mène un génocide contre le peuple palestinien. Les États et les individus qui fournissent une assistance à Israël en sont complices. Un cessez-le-feu immédiat est impératif pour sauver des vies civiles et mettre fin aux crimes qui ont lieu depuis le début de l’offensive. La Cour pénale internationale est appelée à délivrer immédiatement des mandats d’arrêt à l’encontre des responsables israéliens des crimes internationaux commis contre les Palestinien·nes. (...)

    #génocide

  • « Il est faux et anachronique de considérer le Coran comme antisémite », Meir M. Bar-Asher

    Si le Coran contient des passages polémiques sur les juifs, d’autres donnent une vision plus positive des « enfants d’Israël ». Cette ambivalence rend impossible une lecture univoque du texte sacré de l’islam, explique l’islamologue de confession juive Meir M. Bar-Asher, dans un entretien au « Monde ».
    Propos recueillis par Raphaël Buisson-Rozensztrauch


    A l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, sur le complexe connu par les musulmans comme Al-Haram Al-Sharif et par les juifs comme le mont du Temple, dans la vieille ville de Jérusalem, en 2017. AMMAR AWAD / REUTERS

    « La lutte du Hamas contre Israël a un aspect national et un aspect religieux, ce dernier étant le plus substantiel », assure l’islamologue et philosophe Meir M. Bar-Asher. Le mouvement islamiste palestinien, comme d’autres à travers le monde, puise dans certains textes fondamentaux de l’#islam, à commencer par le #Coran, pour alimenter sa haine anti-Israël, voire antijuifs. Néanmoins, selon ce professeur en études islamiques à l’Université hébraïque de Jérusalem – auteur, entre autres, de Les Juifs dans le Coran (Albin Michel, 2019) –, si le livre sacré de l’islam contient effectivement de nombreux passages ambigus à l’égard des #juifs, il recèle aussi plusieurs clés pour les dépasser.

    Comment avez-vous vécu personnellement les attaques terroristes du Hamas le 7 octobre contre Israël ?

    Le 7 octobre 2023, lorsque les événements se sont produits, j’étais à Paris. J’ai suivi les nouvelles de là-bas, et suis retourné en #Israël quelques jours plus tard. Comme tout le monde dans le pays, j’ai été terriblement choqué par l’atrocité des crimes du Hamas et je dois avouer que, bien que leur idéologie me soit très connue, je n’imaginais pas leurs membres susceptibles de commettre ce genre d’actes.

    On observe, depuis les attentats du 7 octobre et le début de la riposte israélienne à Gaza, une recrudescence des actes antisémites dans le monde entier, en France notamment. Y a-t-il une dimension religieuse à ce conflit ?

    Oui, absolument. La lutte du Hamas contre Israël a un aspect national et un aspect religieux, ce dernier étant le plus substantiel. Le Hamas considère que personne d’autre que les #musulmans n’a le droit de dominer la #Terre_sainte (« al-ard al-muqaddasa »). La terre leur a été donnée à la fois par #Dieu et par l’acte de #conquête sur les chrétiens, c’est-à-dire l’Empire byzantin, au début du VIIe siècle, peu après la mort de Muhammad [Mahomet]. Par le fait même de sa conquête, la terre est devenue un waqf, c’est-à-dire un territoire sacré.

    Les juifs, qui y ont vécu dans un passé très lointain, à l’époque biblique et jusqu’à la destruction du second temple (en l’an 70 de l’ère chrétienne), ont perdu le droit d’y revenir puisqu’ils ont rompu, selon le Coran, l’alliance que Dieu avait conclue avec eux. Ils ne peuvent vivre dans le pays qu’en tant que minorité « protégée » sous la domination de l’islam.

    Que dit le Coran concernant la relation des juifs à la Judée antique ?

    Cette terre a été promise aux juifs, comme précise le Coran : « Ô mon peuple, entrez dans la Terre sainte que Dieu vous assigne » (sourate 5 [La Table], 21). Mais Dieu les a abandonnés à cause de leurs péchés et a élu les #Arabes à leur place : « Vous êtes [les musulmans] la meilleure #communauté qui ait jamais été donnée comme exemple aux hommes » (sourate 3 [la Famille d’Imran], 110).

    Pourquoi la place des juifs dans le Coran constitue-t-elle un sujet toujours brûlant, selon vous ?

    Tout d’abord parce que ce sujet traite de deux #religions, chacune portée par un peuple, qui existent toujours. Ces deux peuples que sont les Arabes et les Juifs se sont combattus à divers niveaux, dans plusieurs moments de leurs histoires respectives. Les problématiques évoquées en 2019 dans mon ouvrage Les Juifs dans le Coran sont, pour certaines, cristallisées dans le #conflit_israélo-palestinien.

    Bien que ce conflit ne soit pas nécessairement d’ordre religieux, dans plusieurs périodes de leur histoire, des penseurs des deux côtés ont tenté de lui donner une dimension essentiellement religieuse ; ces penseurs ont dépeint la situation d’opposition entre Juifs et Arabes en utilisant une terminologie et une conceptualisation religieuses. C’est de cela qu’on hérite aujourd’hui, et qui rend la question si complexe.$

    Comment les juifs sont-ils nommés dans le Coran ?

    Divers termes sont employés, et chacune de ces dénominations se réfère à un aspect particulier des juifs. L’un des termes abondamment utilisé dans le Coran pour nommer les juifs est celui de Banû Israʼîl, que l’on peut traduire par « fils d’Israël » : il désigne les anciens Israélites, cités dans la Bible.

    Lorsque le Coran raconte des événements se rapportant au récit biblique, c’est presque toujours ce terme qui est utilisé pour désigner les ancêtres des juifs. C’est lui que l’on retrouve dans ce verset : « O fils d’Israël, n’oubliez pas la grâce dont je vous ai comblés en vous choisissant parmi toutes les nations. »

    Un autre terme, yahûd, désigne les juifs dans un sens plutôt péjoratif : ce terme est très répandu dans les #sourates_médinoises, donc les plus tardives du Coran, qui sont les plus hostiles aux juifs et aux chrétiens.

    Un troisième terme présent à plusieurs reprises est celui d’ahl-al-Kitâb, « peuple du Livre », qui désigne par moments juifs et chrétiens. Ce terme est tantôt positif, tantôt négatif : il évoque parfois le don de la Torah aux juifs, mais rappelle aussi « l’âne chargé de livres » qu’est le peuple juif ayant reçu le don de la révélation, tout en étant incapable de le porter convenablement.

    Quelles étaient les relations entre Juifs et Arabes dans l’Arabie préislamique ?

    Avant Muhammad [Mahomet], les juifs étaient établis dans la péninsule Arabique, principalement au sud – les juifs yéménites en seraient les descendants –, et dans le Hijaz, c’est-à-dire au nord-ouest de la péninsule où l’islam est né. On peut estimer que les juifs dominaient une grande partie de l’Arabie : ils s’appuyaient sur le royaume juif d’Himyar, établi dans l’actuel Yémen. Les rapports culturels et commerciaux entre Juifs et Arabes étaient intenses jusqu’à l’hégire [l’exil de Mahomet de La Mecque vers #Médine, en 622].

    Ces éléments sont importants, car ils constituent l’arrière-plan culturel auquel Muhammad est confronté en Arabie. Quelques chercheurs diraient même la chose suivante : Muhammad a choisi d’émigrer à Médine, une région fortement peuplée de juifs, car il comptait sur ces derniers pour le rejoindre autour d’une conception nouvelle du #monothéisme. Muhammad a sans doute estimé qu’il serait accepté par les juifs du Hijaz.

    On constate également la pensée politique fine du prophète de l’islam lorsqu’il envoie, vers l’an 616 de notre ère, un groupe de ses adeptes à destination du royaume chrétien d’Ethiopie, pour les mêmes raisons. La forte présence de juifs et de chrétiens en Arabie à l’époque de Muhammad explique l’omniprésence d’éléments bibliques, juifs ou chrétiens, dans plusieurs sourates du Coran.

    L’islam a-t-il hérité de pratiques issues du judaïsme ?

    Du point de vue philologique et historique, c’est certain. Au-delà des éléments bibliques, on peut déjà dire que l’islam, au même titre que le judaïsme, est une religion « légale », centrée sur la #loi et les #commandements, à l’inverse du christianisme. La #jurisprudence, le rôle de la Halakha (la loi et la jurisprudence juives) ou de la charia (la loi islamique) sont fondamentales dans ces deux religions, et des ressemblances s’ensuivent – mais ces dernières ont leur limite.

    Au début de la prédication de Muhammad, on perçoit chez lui un désir de se rapprocher des pratiques juives. Cependant, une fois passé le moment où la majorité des juifs refusent de le suivre, s’exprime un désir d’émancipation de l’islam par rapport au judaïsme et au christianisme. Ce qui est naturel : toute religion doit finir par affirmer son indépendance vis-à-vis des traditions passées dont elle hérite.
    Pour donner un exemple : au départ, la direction de la prière pour les musulmans est Jérusalem ; une fois consommé le divorce entre les juifs et les premiers musulmans, La Mecque devient la nouvelle direction pour la prière. Deux étapes apparaissent clairement : ressemblance, puis différenciation.

    Le Coran est-il « antisémite » ?

    Il est faux et anachronique de considérer le Coran ainsi, et certains le font dans un but de propagande contre l’islam. Tout d’abord, le terme « antisémitisme » fait référence à un phénomène bien ultérieur [le terme est apparu en Allemagne au XIXe siècle, il s’attaque aux juifs en tant que peuple et non en tant que pratiquants d’une religion].
    On peut considérer que, dans le Coran, certains versets peuvent servir à nourrir une pensée antisémite, à l’instar des « versets de la guerre » de la #sourate_9 [incitant au combat à mort contre les juifs, les chrétiens, les polythéistes et tous les « #mécréants » en général]. Mais dire explicitement que le Coran est un texte antisémite, c’est faux.

    Je vis d’ailleurs mal cette conception, même en tant que juif. Je lis le Coran depuis mon adolescence avec beaucoup d’intérêt, je l’ai appris avec des Arabes, je l’enseigne à l’université hébraïque de Jérusalem et dans d’autres endroits du monde depuis plus de trente ans… J’ai beaucoup de respect pour ce texte, qui m’a énormément appris et contient des passages extraordinaires.

    Il y a bien des extraits qui me gênent en tant que juif, mais comme ils gêneraient un chrétien, ou tout simplement un être humain ! On peut toutefois dire exactement la même chose de certains versets bibliques, qui sont violents et inacceptables, sans remettre en cause l’intérêt de ces Ecritures.

    Le Coran semble néanmoins donner une image paradoxale des juifs. Comment en sortir ?

    Lors d’un séminaire sur ce thème, un étudiant musulman chiite m’a dit la chose suivante : « Je pense que cela vaut la peine que les sages musulmans adaptent ou suppriment la sourate 9 du Coran [plus tardive, et donc polémique vis-à-vis des juifs et des chrétiens], pour aider à construire une autre image du judaïsme et faciliter la rencontre. Qu’en pensez-vous ? »

    Je lui ai répondu que je suis opposé à toute altération d’un texte canonisé. Des millions de personnes croient en la sainteté du Coran et en sa nature miraculeuse, on ne doit donc rien y changer. Ce qu’on peut changer, en revanche, c’est notre attitude face au texte.

    Le fait qu’il y ait une ambivalence du texte coranique sur ce sujet est, à mes yeux, une clé vers la solution. Le Coran s’exprime de diverses manières sur les juifs, les #chrétiens, et sur bien d’autres sujets aussi. Pour comprendre ces apparentes contradictions, il faut les ramener à leur contexte initial : les polémiques contre les juifs sont à replacer dans le contexte de la prédication de Muhammad dans une région donnée, durant une époque donnée, et ne doivent pas être considérées comme une généralisation sur les juifs. Le fait que le Coran semble paradoxal et contradictoire constitue, en vérité, un remède au littéralisme.

    Quels arguments peut-on opposer, à partir du Coran, à la haine antijuive et à la justification de violences contre les juifs ?

    Tous les stéréotypes et accusations que le Coran adresse aux juifs sont continuellement invoqués pour délégitimer les juifs et leur religion : l’accusation qu’ils ont tué des prophètes, qu’ils ont rompu l’alliance que Dieu avait conclue avec eux, qu’ils ont falsifié les Ecritures divines qui leur ont été révélées, et bien d’autres accusations. Pour autant, dans certains versets du Coran, Dieu répand aussi ses louanges sur les enfants d’Israël.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Meir Bar-Asher : « Quelques versets du Coran peuvent créer une ambiance pacifique et d’autres un climat terrible »

    Ces louanges se répartissent en trois catégories :

    – la vision des enfants d’Israël comme peuple élu ;

    – la sortie d’Egypte et l’arrivée en Terre promise ;

    – l’Alliance et le don de la Torah, vue comme une source qui confirme l’islam.

    L’idée de l’élection d’Israël revient souvent dans le Coran. Tantôt cela concerne le peuple tout entier, tantôt seulement quelques personnalités ou quelques familles comme celle d’Abraham, de ‘Imrân (c’est-à-dire ‘Amram, père d’Aaron, de Moïse et de Myriam dans la Bible) ou encore certains prophètes.

    Dans certains versets coraniques, l’idée d’élection se dégage par elle-même de la grâce de Dieu envers Israël et des nombreux bienfaits que Dieu répand sur eux : « Nous avons donné aux fils d’Israël le Livre (al-kitâb), la Sagesse (al-hukm) et la Prophétie (al-nubuwwa). Nous les avons pourvus d’excellentes nourritures. Nous les avons élevés au-dessus des mondes » (45, 16). Ou encore dans un autre verset : « O mon peuple ! Souvenez-vous de la grâce de Dieu à votre égard, quand il a suscité parmi vous des prophètes ; quand il a suscité pour vous des rois ! Il vous a accordé ce qu’il n’avait donné à nul autre parmi les mondes » (5, 20).

    Aucun texte, a fortiori un texte religieux souvent difficile comme le Coran, ne se donne à lire de manière absolue, et le sens qu’on en retire dépend beaucoup du contexte que l’on prête à ces versets.

    Certaines phrases à fort potentiel polémique lorsqu’elles sont prises isolément se voient ainsi « neutralisées » quand elles sont ramenées à un contexte historique précis ; à l’inverse, des versets dont l’interprétation traditionnelle a toujours cherché à éclaircir le contexte deviennent « explosifs » quand ils sont sciemment décontextualisés pour être brandis contre les juifs et les chrétiens d’aujourd’hui.

    Raphaël Buisson-Rozensztrauch
    https://www.lemonde.fr/le-monde-des-religions/article/2023/11/26/pourquoi-il-est-faux-et-anachronique-de-considerer-le-coran-comme-antisemite

  • Henry Laurens : « On est sur la voie d’un processus de destruction de masse » à Gaza, entretien avec Rachida El Azzouzi (19 novembre 2023).

    Pour l’historien, spécialiste de la Palestine, professeur au collège de France, « l’effondrement des conditions sanitaires et l’absence de ravitaillement à destination des populations concernées peuvent indiquer que l’on est sur la voie d’un processus de destruction de masse » dans la bande de Gaza.

    L’historien et universitaire Henry Laurens est l’un des plus grands spécialistes du #Moyen-Orient. Professeur au Collège de France où il est titulaire de la chaire d’histoire contemporaine du #monde_arabe, il a mis la question palestinienne au cœur de son travail. Il est l’auteur de très nombreux livres dont cinq tomes sans équivalent publiés entre 1999 et 2015, consacrés à La question de Palestine (Fayard).
    Dans un entretien à Mediapart, il éclaire de sa connaissance l’exceptionnalité du conflit israélo-palestinien et le « corps à corps que même l’émotion n’arrive pas à séparer » dans lesquels les deux peuples sont pris depuis des décennies. Il dit son pessimisme quant à la résolution du conflit qui peut durer « des siècles » : « Vous ne pouvez espérer de sortie possible que par une décolonisation, mais à horizon immédiat, cette décolonisation n’est pas faisable. Dans les années 1990, elle l’était. Il y avait 30 000 colons. Aujourd’hui, ils sont 500 000 dont quelques dizaines de milliers qui sont des colons ultrareligieux et armés. »

    Plus d’une vingtaine de rapporteurs de l’organisation des Nations unies (ONU) s’inquiètent d’« un génocide en cours » à Gaza. Est-ce que vous employez ce terme ?

    Il y a deux sens au terme de « génocide ». Il y a le #génocide tel que défini par l’avocat polonais Raphael Lemkin en 1948, la seule définition juridique existante, aujourd’hui intégrée au protocole de Rome créant la #CPI [Cour pénale internationale – ndlr]. Lemkin a été obligé, pour que ce soit voté par les Soviétiques et par le bloc de l’Est, d’éliminer les causes politiques du génocide – massacrer des gens dans le but de détruire une classe sociale –, parce qu’il aurait fallu reconnaître le massacre des koulaks par les Soviétiques.

    La définition de Lemkin implique que ceux qui commettent un génocide appartiennent à un autre peuple que celui des victimes. D’où le problème aussi qu’on a eu avec le #Cambodge, qu’on ne pouvait pas appeler un génocide parce que c’étaient des Cambodgiens qui avaient tué des Cambodgiens. Là, on est dans une définition étroite. C’était le prix à payer pour obtenir un accord entre les deux Blocs dans le contexte du début de la #guerre_froide.

    Vous avez ensuite une définition plus large du terme, celui d’une destruction massive et intentionnelle de populations quelles qu’en soient les motivations.

    Il existe donc deux choses distinctes : la première, ce sont les actes, et la seconde, c’est l’intention qui est derrière ces actes. Ainsi le tribunal international pour l’ex-Yougoslavie a posé la différence entre les nettoyages ethniques dont la motivation n’est pas génocidaire parce que l’#extermination n’était pas recherchée, même si le nombre de victimes était important, et les actes de génocide comme celui de Srebrenica, où l’intention était claire.

    On voit ainsi que le nombre de victimes est secondaire. Pour Srebrenica, il est de l’ordre de 8 000 personnes.

    L’inconvénient de cette #logique_judiciaire est de conduire à une casuistique de l’intentionnalité, ce qui ne change rien pour les victimes. 

    Au moment où nous parlons, le nombre de victimes dans la bande de #Gaza est supérieur à celui de Srebrenica. On a, semble-t-il, dépassé la proportion de 0,5 % de la population totale. Si on compare avec la France, cela donnerait 350 000 morts.

    Le discours israélien évoque des victimes collatérales et des boucliers humains. Mais de nombreux responsables israéliens tiennent des discours qui peuvent être qualifiés de génocidaires. L’effondrement des conditions sanitaires et l’absence même de ravitaillement à destination des populations concernées peuvent indiquer que l’on est sur la voie d’un processus de destruction de masse avec des controverses à n’en plus finir sur les intentionnalités. 

    La solution à deux États n’est plus possible.

    La crainte d’une seconde « #Nakba » (catastrophe), en référence à l’exil massif et forcé à l’issue de la guerre israélo-arabe de 1948, hante les #Palestiniens. Peut-on faire le parallèle avec cette période ?

    La Nakba peut être considérée comme un #nettoyage_ethnique, en particulier dans les régions autour de l’actuelle bande de Gaza où l’#intentionnalité d’expulsion est certaine. Des responsables israéliens appellent aujourd’hui à une #expulsion de masse. C’est d’ailleurs pour cela que l’Égypte et la Jordanie ont fermé leurs frontières.

    Dans l’affaire actuelle, les démons du passé hantent les acteurs. Les juifs voient dans le 7 octobre une réitération de la Shoah et les Palestiniens dans les événements suivants celle de la Nakba.

    Faut-il craindre une annexion de la bande de Gaza par Israël avec des militaires mais aussi des colons ?

    En fait, personne ne connaît la suite des événements. On ne voit personne de volontaire pour prendre la gestion de la bande de Gaza. Certains responsables israéliens parlent de « dénazification » et il y a une dimension de vengeance dans les actes israéliens actuels. Mais les vengeances n’engendrent que des cycles permanents de violence.

    Quelle est votre analyse des atrocités commises le 7 octobre 2023 par le Hamas ?

    Elles constituent un changement considérable, parce que la position de l’État d’Israël est profondément modifiée au moins sur deux plans : premièrement, le pays a subi une invasion pour quelques heures de son territoire, ce qui n’est pas arrivé depuis sa création ; deuxièmement, le 7 octobre marque l’échec du projet sioniste tel qu’il a été institué après la Seconde Guerre mondiale, un endroit dans le monde où les juifs seraient en position de sécurité. Aujourd’hui, non seulement l’État d’Israël est en danger, mais il met en danger les diasporas qui, dans le monde occidental, se trouvent menacées ou, en tout cas, éprouvent un sentiment de peur.

    Le dernier tome de votre série consacrée à « La question de Palestine » (Fayard) était intitulé « La paix impossible » et courait sur la période 1982-2001. Vous étiez déjà très pessimiste quant à la résolution de ce conflit, mais aussi concernant l’avenir de la région, comme si elle était condamnée à demeurer cette poudrière. Est-ce que vous êtes encore plus pessimiste aujourd’hui ? Ou est-ce que le #conflit_israélo-palestinien vous apparaît soluble, et si oui, quelle issue apercevez-vous ?

    La réelle solution théorique serait d’arriver à un système de gestion commune et équitable de l’ensemble du territoire. Mais un État unitaire est difficile à concevoir puisque les deux peuples ont maintenant plus d’un siècle d’affrontements.

    Qu’en est-il de la solution à deux États, dont le principe a été adopté en 1947 par l’ONU, après la fin du mandat britannique ? Est-elle possible ?

    La solution à deux États n’est plus possible dès lors que vous avez 500 000 colons, dont quelques dizaines de milliers qui sont des #colons ultrareligieux et armés. Vous avez une violence quotidienne en #Cisjordanie. La sécurité des colons ne peut se fonder que sur l’insécurité des Palestiniens. Et l’insécurité des Palestiniens provoque la violence qui engendre l’insécurité des colons.

    C’est un cercle vicieux et vous ne pouvez espérer de sortie possible que par une décolonisation, mais à horizon immédiat, cette #décolonisation n’est pas faisable. Dans les années 1990, elle l’était. Il y avait 30 000 colons. On pouvait, sans trop de dégâts, faire une décolonisation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. 

    Aujourd’hui, nous sommes dans une position de domination, et cette solution peut prendre des siècles parce qu’il y a l’exceptionnalité juive qui crée une exceptionnalité israélienne qui elle-même crée une exceptionnalité palestinienne. C’est-à-dire que sans être péjoratif, les Palestiniens deviennent des juifs bis.

    Qu’entendez-vous par là ?

    Nous sommes depuis le 7 octobre devant un grand nombre de victimes. Mais ces dernières années, nous en avons eu bien plus en Irak, en Syrie, au Soudan et en Éthiopie. Cela n’a pas provoqué l’émoi mondial que nous connaissons aujourd’hui. L’émotion a été suscitée parce que les victimes étaient juives, puis elle s’est déplacée sur les victimes palestiniennes. Les deux peuples sont dans un corps à corps que même l’émotion n’arrive pas à séparer.

    Les années 1990 ont été marquées par les accords d’Oslo en 1993. Relèvent-ils du mirage aujourd’hui ?
     
    Non, on pouvait gérer une décolonisation. Mais déjà à la fin des accords d’Oslo, il n’y a pas eu décolonisation mais doublement de la #colonisation sous le gouvernement socialiste et ensuite sous le premier gouvernement Nétanyahou. Ce sont l’occupation, la colonisation, qui ont amené l’échec des processus. Il n’existe pas d’occupation, de colonisation pacifique et démocratique.

    Aujourd’hui, c’est infiniment plus difficile à l’aune de la violence, des passions, des derniers événements, des chocs identitaires, de la #haine tout simplement. Qui plus est, depuis une trentaine d’années, vous avez une évolution commune vers une vision religieuse et extrémiste, aussi bien chez les juifs que chez les Palestiniens.

    La Palestine fonctionne en jeu à somme nulle, le progrès de l’un se fait au détriment de l’autre.

    Vous voulez dire que le conflit territorial est devenu un conflit religieux ?

    Il a toujours été religieux. Dès l’origine, le mouvement sioniste ne pouvait fonctionner qu’en utilisant des références religieuses, même si ses patrons étaient laïcs. La blague de l’époque disait que les sionistes ne croyaient pas en Dieu mais croyaient que Dieu leur avait promis la Terre promise.

    Le projet sioniste, même s’il se présentait comme un mouvement de sauvetage du peuple juif, ne pouvait fonctionner qu’en manipulant les affects. Il était de nature religieuse puisqu’il renvoyait à la Terre sainte. Vous avez une myriade d’endroits qui sont des #symboles_religieux, mais qui sont aussi des #symboles_nationaux, aussi bien pour les #juifs que pour les #musulmans : l’esplanade des Mosquées, le tombeau des Patriarches, le mur des Lamentations. Et puis il y a les gens qui se sentent mandatés par Dieu.

    De même, les musulmans ont cherché des alliés en jouant sur la solidarité islamique. Dès les années 1930, la défense de la mosquée Al-Aqsa est devenue un thème fédérateur.

    Pourquoi est-il devenu difficile d’invoquer une lecture coloniale du conflit depuis les massacres du Hamas du 7 octobre ?

    Le sionisme est à l’origine un corps étranger dans la région. Pour arriver à ses fins, il a eu besoin d’un soutien européen avant 1914, puis britannique et finalement américain. Israël s’est posé comme citadelle de l’#Occident dans la région et conserve le #discours_colonial de la supériorité civilisatrice et démocratique. Cet anachronisme est douloureusement ressenti par les autres parties prenantes.

    Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les responsables sionistes n’hésitaient pas à se comparer à la colonisation britannique en Afrique noire avec la nécessité de mater les protestations indigènes. 

    La Palestine fonctionne en jeu à somme nulle, le progrès de l’un se fait au détriment de l’autre. La constitution de l’État juif impliquait un « transfert » de la population arabe à l’extérieur, terme poli pour « expulsion ». La #confiscation des #terres détenues par les Arabes en est le corollaire. Les régions où ont eu lieu les atrocités du 7 octobre étaient peuplées d’Arabes qui ont été expulsés en 1948-1950.

    Dire cela, c’est se faire accuser de trouver des excuses au terrorisme. Dès que vous essayez de donner des éléments de compréhension, vous vous confrontez à l’accusation : « Comprendre, c’est excuser. » Il faut bien admettre que le #Hamas dans la bande de Gaza recrute majoritairement chez les descendants des expulsés. Cela ne veut pas dire approuver ce qui s’est passé.

    Le slogan « From the river to the sea, Palestine will be free » (« De la rivière à la mer, la Palestine sera libre ») utilisé par les soutiens de la Palestine fait polémique. Est-ce vouloir rayer de la carte Israël ou une revendication légitime d’un État palestinien ?

    Il a été utilisé par les deux parties et dans le même sens. Les mouvements sionistes, en particulier la droite sioniste, ont toujours dit que cette terre devait être juive et israélienne au moins jusqu’au fleuve. Le parti de l’ancêtre du Likoud voulait même annexer l’ensemble de la Jordanie.

    Chez certains Palestiniens, on a une vision soft qui consiste à dire que « si nous réclamons un État palestinien réunissant la bande de Gaza et la Cisjordanie, nous considérons l’ensemble de la terre comme la Palestine historique, comme partie de notre histoire, mais nous ne la revendiquons pas dans sa totalité ».

    Israël depuis sa fondation n’a pas de #frontières définies internationalement. Il a toujours revendiqué la totalité de la Palestine mandataire, voire plus. Il a ainsi rejeté l’avis de la Cour internationale de justice qui faisait des lignes d’armistice de 1949 ses frontières permanentes.

    Cette indétermination se retrouve de l’autre côté. La libération de la Palestine renvoie à la totalité du territoire. D’autres exigeaient la carte du plan de partage de 1947. Pour l’Organisation de libération de la Palestine (#OLP), faire l’#État_palestinien sur les territoires occupés en 1968 était la concession ultime.

    Les Arabes en général ont reçu sans grand problème les réfugiés arméniens durant la Grande Guerre et les années suivantes. Ces Arméniens ont pu conserver l’essentiel de leur culture. Mais il n’y avait pas de question politique. Il n’était pas question de créer un État arménien au Levant.

    Dès le départ, les Arabes de Palestine ont vu dans le projet sioniste une menace de dépossession et d’expulsion. On ne peut pas dire qu’ils ont eu tort…

    Le mouvement islamiste palestinien, le Hamas, classé #terroriste par l’Union européenne et les États-Unis, est aujourd’hui le principal acteur de la guerre avec Israël…

    Définir l’ennemi comme terroriste, c’est le placer hors la loi. Bien des épisodes de décolonisation ont vu des « terroristes » devenir du jour au lendemain des interlocuteurs valables. 

    Bien sûr, il existe des actes terroristes et les atrocités du 7 octobre le sont. Mais c’est plus une méthodologie qu’une idéologie. C’est une forme de guerre qui s’en prend aux civils selon les définitions les plus courantes. Jamais un terroriste ne s’est défini comme tel. Il se voit comme un combattant légitime et généralement son but est d’être considéré comme tel. Avec l’État islamique et le 7 octobre, on se trouve clairement devant un usage volontaire de la cruauté.

    La rhétorique habituelle est de dire que l’on fait la guerre à un régime politique et non à un peuple. Mais si on n’offre pas une perspective politique à ce peuple, il a le sentiment que c’est lui que l’on a mis hors la loi. Il le voit bien quand on dit « les Israéliens ont le droit de se défendre », mais apparemment pas quand il s’agit de Palestiniens.

    D’aucuns expliquent qu’Israël a favorisé l’ascension du Hamas pour qu’un vrai État palestinien indépendant ne voie jamais le jour au détriment de l’#autorité_palestinienne qui n’administre aujourd’hui plus que la Cisjordanie. Est-ce que le Hamas est le meilleur ennemi des Palestiniens ? 

    Incontestablement, les Israéliens ont favorisé les #Frères_musulmans de la bande de Gaza dans les années 1970 et 1980 pour contrer les activités du #Fatah. De même, après 2007, ils voulaient faire du Hamas un #sous-traitant chargé de la bande de Gaza, comme l’Autorité palestinienne l’est pour la Cisjordanie. 

    Le meilleur moyen de contrer le Hamas est d’offrir aux Palestiniens une vraie perspective politique et non de bonnes paroles et quelques aides économiques qui sont des emplâtres sur des jambes de bois. 

    Quel peut être l’avenir de l’Autorité palestinienne, aujourd’hui déconsidérée ? Et du Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas, pressé par la base de renouer avec la lutte armée et le Hamas ?

    Le seul acquis de l’Autorité palestinienne, ou plus précisément de l’OLP, c’est sa légitimité diplomatique. Sur le terrain, elle est perçue comme un sous-traitant de l’occupation israélienne incapable de contrer un régime d’occupation de plus en plus dur. Elle est dans l’incapacité de protéger ses administrés. Le risque majeur pour elle est tout simplement de s’effondrer.

    Le Hamas appelle les Palestiniens de Cisjordanie à se soulever. Un soulèvement généralisé des Palestiniens peut-il advenir ?

    En Cisjordanie, on a surtout de petits groupes de jeunes armés totalement désorganisés. Mais la violence et la répression sont devenues quotidiennes et les violences permanentes. À l’extérieur, l’Occident apparaît complice de l’occupation et de la répression israéliennes. L’Iran, la Chine et la Russie en profitent.

    Le premier tome de votre monumentale « Question de Palestine » s’ouvre sur 1799, lorsque l’armée de Napoléon Bonaparte entre en Palestine, il court jusqu’en 1922. Avec cette accroche : l’invention de la Terre sainte. En quoi cette année est-elle fondatrice ?

    En 1799, l’armée de Bonaparte parcourt le littoral palestinien jusqu’à Tyr. En Europe, certains y voient la possibilité de créer un État juif en Palestine. Mais l’ouverture de la Terre sainte aux Occidentaux est aussi l’occasion d’une lutte d’influences entre puissances chrétiennes. 

    Dans le tome 4, « Le rameau d’olivier et le fusil du combattant » (1967-1982), vous revenez sur ce qui a été un conflit israélo-arabe, puis un conflit israélo-palestinien. Est-ce que cela peut le redevenir ?

    Jusqu’en 1948, c’est un conflit israélo-palestinien avant tout. En 1948, cela devient un #conflit_israélo-arabe avec une dimension palestinienne. À partir de la fin des années 1970, la dimension palestinienne redevient essentielle.

    Ben Gourion disait que la victoire du sionisme était d’avoir transformé la question juive en problème arabe. Les derniers événements semblent montrer que le #problème_arabe est en train de redevenir une #question_juive.

    Le rôle des États-Unis a toujours été déterminant dans ce conflit. Que nous dit leur position aujourd’hui ? 

    La question de Palestine est en même temps une question intérieure pour les pays occidentaux du fait de l’histoire de la Shoah et de la colonisation. Il s’y ajoute aux États-Unis une dimension religieuse du fait du biblisme protestant et du « pionniérisme ». Les Palestiniens leur semblent être quelque part entre les Indiens et les Mexicains…

    La « République impériale » vient encore de montrer son impressionnante capacité de projection militaire dans la région, mais aussi son incapacité à obtenir un règlement politique satisfaisant.

    Pourquoi ce conflit déclenche-t-il autant de passions et clive-t-il autant dans le monde entier, où comme en France, le président appelle à « ne pas importer le conflit » ?

    C’est un conflit gorgé d’histoire. La Terre sainte est celle des trois religions monothéistes. Le conflit lui-même porte avec lui la mémoire de la Shoah et de la colonisation, d’où l’extraordinaire position d’exceptionnalité des acteurs.

    Vous avez écrit cinq tomes sur la question de Palestine. Après l’ultime « La Paix impossible », quel pourrait être le sixième ?
     
    Peut-être le retour de la question juive, mais c’est loin d’être une perspective encourageante.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/191123/henry-laurens-est-sur-la-voie-d-un-processus-de-destruction-de-masse-gaza

    #discours_génocidaire #religion (s) #sionisme

  • Ni Mediapart, ni le Monde, ni Libération, ni le Le Nouvel Obs, n’ont rendu compte, ni publié, la lettre du Directeur du bureau de New York du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui a démissioné en protestant contre la si faible action de l’ONU pour faire respecter les Droits de l’Homme à Gaza.

    Dans une lettre à son supérieur, rendue publique, il dit, entre autres :

    "Il s’agit d’un cas d’école de génocide. Le projet colonial européen, ethno-nationaliste, de colonisation en Palestine est entré dans sa phase finale, vers la destruction accélérée des derniers vestiges de la vie palestinienne indigène. en Palestine ."
    ...

    "Les USA, le Royaume-Uni et la majorité de l’Europe sont complices de l’agression horrible.

    Non seulement ces gouvernements refusent de remplir leurs obligations de faire respecter les Conventions de Genève, mais ils arment activement Israël, lui procurent un soutien économique et de renseignement, et donnent une couverture politique et diplomatique aux atrocités commises par Israël."

    https://twitter.com/Raminho/status/1719385390086271164?s=20

    https://www.nydailynews.com/2023/10/31/un-official-resigns-genocide-palestine-israel

    La TV française est israélienne-CRIF-Netanyahu mais les journaux, même de gauche, en France me posent question.

    #Israel #USA #UE #France #Grande-Bretagne #Allemagne #Genocide #Gaza #Palestiniens #Armes #VentesArmes #Corruption #Lobby #Racisme #Suprémacisme #Colonialisme #Massacres #AssassinatsEnfants #AssassinatsCivils #Medias #Mediapart #LeMonde #Deshumanisation #Arabes

  • Le conflit qui rend fou | Mona Chollet
    https://www.la-meridienne.info/Le-conflit-qui-rend-fou

    Ces deux dernières semaines, rivée aux informations en provenance d’Israël-Palestine, j’ai eu plusieurs fois l’impression – comme beaucoup, je crois – de perdre la tête. Il y a d’abord ce télescopage permanent entre deux grilles de lecture contradictoires, qu’on pourrait appeler la grille « héroïque » et la grille « coloniale ». Source : La méridienne

  • Nostalgie
    https://tagrawlaineqqiqi.wordpress.com/2023/10/21/nostalgie

    Chose rare, j’ai été saisie hier d’une vague de nostalgie. Ça ne m’arrive pas souvent, ça n’est pas franchement dans ma nature, et il y a un je-ne-sais-quoi de « c’était mieux avant » que je n’aime pas dans la nostalgie. Mais ça m’arrive quand même parfois de regarder le passé, puis le présent, et de pousser […]

    #Société #contrôle_social #musique #Politique
    https://0.gravatar.com/avatar/cd5bf583a4f6b14e8793f123f6473b33bb560651f18847079e51b3bcad719755?s=96&d=

  • En direct. Guerre Israël-Hamas : l’Egypte autorise l’entrée à Gaza de camions d’aide humanitaire
    https://www.ledauphine.com/defense-guerre-conflit/2023/10/19/guerre-israel-hamas-l-egypte-autorise-l-entree-a-gaza-de-camions-d-aide-

    Guerre Israël-Hamas : l’Egypte autorise l’entrée à Gaza de camions d’aide humanitaire

    Vous avez bien lu, c’est l’Egypte qui ENFIN autorise l’entrée de l’aide humanitaire.

    J’y ajoute cet éclairage qu’apporte un entretien avec François Dubuisson publié dans Télérama :
    https://www.telerama.fr/debats-reportages/israel-palestine-la-guerre-des-mots-decryptee-par-un-prof-de-droit-internat

    Crimes de guerre

    « Ils peuvent être commis même sans guerre entre deux États, dans le cadre de conflits entre un État et des groupes non étatiques comme le Hamas. L’attaque de ce dernier contre des civils israéliens a déclenché l’application du droit relatif à la conduite des hostilités, qui comprend le droit international humanitaire. Toutes ses violations ne constituent pas des crimes de guerre, seulement les plus graves : les massacres de civils, les prises d’otage… Affamer délibérément une population en la privant des biens nécessaires à sa survie est aussi un crime de guerre, même si proclamer et établir un siège n’est pas, en soi, illégal. Si un convoi humanitaire parvient à franchir la frontière égyptienne, Israël pourra arguer du fait que le blocus n’a pas été total…"

    #arabes_fourbes

  • Le porte-parole de l’Union juive pour la paix se confie à Algeriepatriotique
    Pierre Stambul, porte-parole de l’UJFP le 14 octobre - UJFP
    https://ujfp.org/interview-de-pierre-stambul-par-algerie-patriotique

    Algeriepatriotique : Une propagande de guerre s’est mise en place dès après l’attaque du Hamas sur Israël. Pouvez-vous nous décrire la situation réelle qui prévaut au Proche-Orient actuellement ?

    Pierre Stambul : Une grande militante de Gaza est chez moi. Je reçois à tout moment des nouvelles et des vidéos de Gaza. On voit des tours de 15 étages pulvérisées les unes à la suite des autres, des quartiers entiers totalement détruits, les enfants cherchent dans les gravats un souvenir de ce qu’était leur vie. Un ami très cher a perdu deux de ses fils. Un autre a sa maison transformée en refuge : plus de 100 personnes mais il n’y a plus d’eau, ni de nourriture. À Jabalia, dans l’hôpital Al Awda, on soigne tant bien que mal les blessés. L’ordre d’évacuation donné par l’armée israélienne est synonyme de mort pour eux.

    Et pourtant, les médias occidentaux ne parlent que des victimes israéliennes ou des Français morts là-bas. Pendant un court instant, les civils d’une société coloniale, Israël, ont connu l’horreur de ce qu’est une guerre. Les Palestiniens vivent ça depuis des décennies. Amnesty International dit que le Hamas a commis des crimes de guerre. Je les crois, mais quand ils expliquent qu’Israël est un État d’apartheid, là les médias s’insurgent. Quand l’armée israélienne affirme que des « bébés ont été décapités », les démentis de CNN n’ont plus d’effet. Le ministre israélien Yoav Galant affirme que les Palestiniens sont des « animaux humains » et quelque chose qui ressemble de plus en plus à un génocide peut commencer.

    Pour les dirigeants israéliens, les Palestiniens sont des terroristes. Qui a expulsé tout un peuple en 1948 ? Qui occupe illégalement la Cisjordanie ? Qui a transformé Gaza en une cage bouclée par terre, par air et par mer depuis 17 ans ? Tant que ce colonialisme écrasera la Palestine, Israël ne sera pas en sécurité. (...)

  • Une vingtaine de groupes néo-nazi infiltré, @Tajmaat_Service
    https://threadreaderapp.com/thread/1642506496956137472.html

    THREAD - Une vingtaine de groupes néo-nazi infiltré, appel aux meurtres, menace de mort contre un élu, ratonnades, des centaines de personnes impliquées dont des militaires et policiers.

    Notre enquête choc sur le groupuscule « FRDETER ». #FRDeterGate
    Image
    Le groupuscule néo-nazi « #FRDETER », est un groupe créé pour réunir des identitaires de toute la France.

    Composé de sous groupe départemental, des modérateurs sont chargés de surveiller et de recruter les personnes les plus actives, afin d’aboutir à des actions coups de poing.

    Le co-fondateur du groupe, « VLAD », affirme dans des vocaux ne pas être néo-nazi.

    Cependant, nous avons pu retrouver l’historique de ses conversations où il affirme bien que les ennemis sont « Les #Arabes, les #Musulmans, et les #Noirs »
    Un administrateur et ami du co-fondateur, affirme que le groupe a également pour vocation de rediriger les recrues dans des structures déjà existantes.

    Il revendique également l’action du groupe néo-nazi GUD, où une personne avait été agressé. twitter.com/i/web/status/1…

    Les admins du groupe principal et des sous-groupes départementaux ne cachent pas leur haine envers les #Maghrébins.

    Apologie du terrorisme et actions violentes, ils poussent les recrues à commettre des ratonnades. #FrDeterGate

    Dans le groupe « #FRDETER », des internautes expliquent que pour « tuer des #Maghrébins ou d’autres étrangers », il faut s’en prendre à des sans papiers pour éviter des enquêtes, d’autres souhaitent « violer une femme #Maghrébine » car elle porte le voile.

    #extrême_droite #identitaires #gud #la_cocarde

  • Trahison #arabe de la #Palestine : ne pas minorer la #normalisation avec #Israël.
    https://bit.ly/38SfMdW
    Le parlement #irak|ien prononce la criminalisation de tout contact avec les #sionistes.
    samedi 4 juin 2022, par Azouz Benhocine

    La criminalisation des contacts de citoyens arabes avec l’entité sioniste et ses colons déferlant de plusieurs contrées du Monde, est le propre des pays et institutions qui se disent engagés pour la cause palestinienne. Ce schéma ne souffre d’aucune ambiguïté. Tous les révolutionnaires qui défendent les causes des peuples agressées par des forces externes et conquérantes de territoires en délogeant les indus occupants, prennent une position.

  • Gai Pied Hebdo – [سي نجيب]
    https://sinedjib.com/index.php/tag/gai-pied-hebdo
    Le site de Nedjib Sidi Moussa

    #Rachid_Taha, le chanteur-leader de #Carte_de_Séjour est un vieux pote à moi. On s’est flashé dans les années 80, quand son groupe donnait des concerts en banlieue parisienne. Grand déconneur et provocateur en diable, Rachid parle avec humour et sans ambage de la situation des Arabes en France, du code de la nationalité, et d’homosexualité. Tout à fait le genre d’amant arabe dont on rêve !

    Article de Pablo Rouy paru dans #Gai_Pied_Hebdo, n° 275, du 20 au 26 juin 1987, p. 26-27

    « Est-ce que je suis un beur ? » me dit Rachid. « Je réponds par la phrase d’un copain : « J’ai déjà du mal à être arabe à l’endroit. Comment veux-tu que je sois arabe à l’envers ! Le mot beur, je m’en fous. Les médias ont besoin d’étiquettes, mais ça fait des années qu’on emploie ce mot en banlieue. Entre nous, on s’appelle des biques, comme vous des pédés. Carte de Séjour n’est pas un groupe beur, mais bar ! (Rires.) En arabe, bar veut dire le puits où on se désaltère quand on a soif. Ceux qu’on appelle la deuxième génération ont les mêmes envies, les mêmes plaisirs que tout le monde, mais on leur refuse tout à cause de leur gueule. Il faut arrêter cette haine entretenue par les médias, les partis et les journalistes comme Louis Pauwels. Depuis la mort de Coluche, hélas, il n’y a plus personne pour gueuler contre ça ! »

    https://twitter.com/LignesDeForce/status/1481195935170543617
    #arabes #beurs #homosexualité #racisme #musique

  • La sénatrice s’étonne d’une niche fiscale en faveur de Tsahal, elle est menacée de mort

    Faire un don à l’armée israélienne permettrait aux Français d’obtenir une réduction d’impôts... La sénatrice UDI-UC Nathalie Goulet a reçu des menaces de mort après s’être étonnée de cette possibilité offerte aux contribuables français qui font un don à l’armée israélienne, Tsahal, de bénéficier d’une réduction d’impôts de 60%, a-t-elle annoncé vendredi.

    La sénatrice Nathalie Goulet affirme avoir reçu des menaces de mort à la suite d’une question écrite sur une niche fiscale accordée aux contribuables français faisant un don à Tsahal

    La sénatrice de l’Orne, vice-présidente de la commission de la Défense, avait posé le 10 mars une question écrite au secrétaire d’Etat chargé du budget, Christian Eckert, pour attirer son attention sur le sujet. Souhaitant « avoir l’explication de cette disposition exorbitante du droit commun », elle avait souligné qu’il s’agissait là « d’une niche fiscale payée par le contribuable français au profit d’une armée étrangère ».

    Des dons directs à Tsahal ne permettraient pas une réduction d’impôts. Ce sont plutôt des dons à des associations qui serviraient à financer des équipements individuels et de la nourriture pour les jeunes qui font leur service militaire, qui permettraient cette réduction fiscale.

    Reste que Nathalie Goulet n’a pas eu de réponse du ministre, mais a reçu des menaces de mort anonymes sur les réseaux sociaux.

    https://www.leparisien.fr/resizer/c6h2skDQvyJeeH5Ij5kfi80QX9M=/622x132/arc-anglerfish-eu-central-1-prod-leparisien.s3.amazonaws.com/public/WFTNVIHYW3AFZJLPBV55XZF4HI.jpg

    Source : https://www.leparisien.fr/politique/la-senatrice-s-etonne-d-une-niche-fiscale-en-faveur-de-tsahal-elle-est-me

    #Israel #israël #Gaza #Gazaouis #CrimesdeGuerre #Palestine #BDS #Apartheid #colonisation #nakba #Ramallah #violences #Arabes_israéliens ##Palestine_assassinée #occupation #colonisation #racisme #sionisme