• Les étudiant·es et artistes de cirque lancent un appel contre le harcèlement et les violences

    Chères et chers artistes, compagnies, professionnel.le.s de la culture et tous leurs soutiens,

    Le collectif Balance Ton Cirque est né le 2 juillet 2021 pour agir contre toutes formes de violences physiques et psychologiques (humiliation, injure, harcèlement moral, abus de pouvoir, discrimination, outrage sexiste…) exercées dans l’enceinte du centre national des arts du cirque à Châlons-en-Champagne.

    Nous voulions agir vite, et nous avons profité d’une des soirées des Échappées 2021 pour rendre publiques nos revendications et lancer un mouvement d’étudiant.e.s et d’artistes ayant subi des violences au CNAC. En parallèle à cette action, la page Instagram @balancetoncirque a été créée pour regrouper des témoignages de victimes, élèves et ancien.ne.s élèves d’école de cirque à l’international. En trois semaines, nous avons reçu plus de 100 témoignages provenant de sept écoles différentes ce qui démontre bien que les violences sont un problème structurel ancré dans le fonctionnement des écoles de cirque. Elles sont systémiques et institutionnalisées et le cas du CNAC n’est pas isolé. Cet appel a vocation à susciter des réactions dans d’autres écoles professionnelles de cirque en France et en Europe.

    Nous appelons à signer le texte (voir ci-dessous) pour manifester votre soutien au mouvement. Les signatures récoltées permettront d’appuyer nos revendications et de nous donner de la force lors des discussions à venir avec le ministère, la direction et les professeurs.

    Cet appel servira d’appui pour engager un dialogue favorable à une école où chacune et chacun puisse se former dans le respect de son intégrité morale et physique.

    Parce que nos blessures sont politiques, nos récits seront publics.

    Le collectif Balance Ton Cirque, 16.08.2021

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    Lettre de soutien – Balance Ton Cirque

    Nous dénonçons l’apprentissage sous pression et l’école de la course à la performance. La compétition entre élèves n’est pas une pédagogie. Nous dénonçons le fait que, dans une école supérieure d’art dont le cursus est “dédiée au développement de l’identité d’artiste [des élèves], ainsi qu’à l’expérimentation en piste”, il soit aussi difficile d’affirmer des pratiques, des corps ou des esthétiques qui sortent des canons de la tradition du cirque contemporain. Les discriminations et les outrances répétées de la direction et des professeur.e.s impactent les élèves dans leur parcours et entravent leur créativité, ainsi que leur capacité à développer un langage artistique qui leur soit propre. Nous refusons d’être des produits mis à disposition des metteur.e.s en scène d’un réseau prédéfini.

    Nous avons rapporté les commentaires dégradants et les discriminations tenus à répétition par des professeurs. On nous a répondu qu’il fallait les accepter parce qu’ils venaient de personnes qualifiées pour leur travail de coaching “que de toute manière ce serait pire dans le monde professionnel”.

    Nous avons pointé du doigt le stress et la pression comme source de blessures, celles qui sont nommées : blessures de fatigue. On nous a répondu “qu’à l’époque c’était bien pire et qu’il fallait s’estimer heureux.euse d’être là”.

    Ces commentaires, remarques et insultes touchent à nos corps et nous accompagnent par la suite dans tout notre parcours, à chaque fois que nous mettons un pied sur scène.

    Quand on dit qu’on a mal, c’est qu’on a mal.

    Quand on veut une deuxième parade, c’est qu’on a besoin d’une deuxième parade.

    Quand on ne veut pas qu’on nous touche, c’est qu’on ne veut pas.

    Quand on dit non, c’est non.

    Nous dénonçons encore l’immobilité de la direction, des professeurs, des professionnel.le.s, du conseil d’administration et du ministère face aux déclarations de harcèlements et de discriminations au sein de l’établissement.

    Au CNAC, des affaires judiciaires ont été passées sous silence, des violences sexuelles ont été réglées en interne, des personnes ont subi un harcèlement moral continu, d’autres des outrages répétés sans que rien ne soit mis en place.

    A chaque fois, les affaires sont “réglées” en interne, prenant grand soin de ne pas salir la réputation de la “maison”.

    L’environnement dans lequel nous étudions et évoluons comme artistes n’est pas à la hauteur d’un centre national.

    Nous sommes témoin.te.s de malaises, de départs soudains, d’arrêts maladies prolongés au sein de l’équipe administrative et enseignante. La fragilité et l’effacement des employé.e.s favorisent la centralité du pouvoir.

    Ces situations de dysfonctionnements se répercutent sur nous, car nous n’avons plus de référent.e.s administratif, et sur notre formation artistique dont le suivi pédagogique n’est plus assuré.

    Les aménagements mis en place : groupe d’écoute, charte éthique pour l’égalité, semblent davantage être des invitations à étouffer les affaires et à décrédibiliser nos dénonciations. Ils ne protègent en aucun cas les victimes.

    Les personnes aux postes de pouvoir restent intouchables.

    Le centre national des arts du cirque a une réputation à tenir. Et cette réputation nécessite notre silence.

    Nous dénonçons les menaces et le climat de peur qui règnent au sein de l’école mais aussi l’élitisme, le favoritisme et le copinage qui permettent de mettre en avant certain.e.s artistes, d’en couler d’autres ou encore d’étouffer des violences.

    Nous dénonçons le fonctionnement en réseau et la dépendance des élèves vis-à-vis de la direction, de l’ensemble des professeur.e.s, des intervenant.e.s artistiques, des metteur.e.s en scène et autres professionnel.le.s, qu’iels soient membre d’un jury ou programmateur.trice.s. Nos carrières sont liées de trop près à ces commentaires, remarques et insultes. Ce contexte de dépendance est particulièrement propice aux abus de pouvoir, au harcèlement et aux discriminations.

    Finalement, nous dénonçons la structure hiérarchique permettant la toute-puissance des postes de direction (direction générale, pédagogique et artistique).

    Plus jamais ça.

    Parmi les missions formulées dans la fiche de recrutement du poste de Direction Générale, publiée par le ministère de la culture, figure celle de : “garantir la qualité du dialogue social au sein de l’établissement, faire respecter les principes d’égalité entre les femmes et les hommes, et lutter contre toutes les formes de violence et discrimination”. L’actuelle direction n’a pas respecté la mission pour laquelle elle était engagée et les mesures mises en place par le ministère de la Culture n’ont pas permis de remédier à cette situation.

    Nous exigeons de la part du ministère de la Culture et de la nouvelle Direction Générale que cette mission soit respectée.

    Nous exigeons qu’une réelle écoute et prise en compte soit établie envers les personnes ayant subi des violences et discriminations. Qu’elles soient accompagnées dans leurs démarches et que ces situations ne soient plus réglées en interne.

    Nous exigeons une restructuration de la hiérarchie interne du CNAC pour que cessent les abus de pouvoir ainsi que toutes les formes de harcèlements.

    Nous exigeons la mise en place d’un protocole pour assurer notre consentement et définir le cadre des contacts physiques entre les professeur.e.s et les élèves (parades, corrections de mouvements, assouplissements, etc). Nous sommes dépendants des professeur.e.s qui nous assurent (parfois au risque de blessures graves) et nous devons pouvoir exprimer librement nos limites et nos besoins.

    Nous exigeons que le corps enseignant, les intervenant.e.s ainsi que l’administration et les élèves soient formé.e.s à réagir et à reconnaître les violences, les abus et le harcèlement.

    Nous vivons une période historique, où “on se lève et on se casse“, où la page instagram @victims_voices_circus a déjà ouvert la voie, où différents comités #balancetonecoledart ont été créés et ont obtenu la démission des personnes mises en cause, où il n’est plus possible d’ignorer la maltraitance structurelle du monde du cirque, du sport, du théâtre, de la danse et du cinéma.

    Cette fois-ci nous n’allons pas régler l’affaire ensemble, en interne, à coup de dialogue social et de groupe parité. Nous ne nous tairons plus. Pas tant que la parole des victimes ne sera ni soutenue ni entendue.

    Nous rappelons aussi que toutes les victimes ne parlent pas.

    Nous rappelons que nous avons tous.tes une responsabilité face à la violence.


    Nous rappelons enfin qu’une école d’art ne doit jamais apprendre à se taire.

    Cette année, la direction du CNAC sera renouvelée et nous exigeons que plus rien de tout cela ne puisse se reproduire à l’avenir. Nous souhaitons réaffirmer l’importance de cette école publique sur le territoire français et notre volonté pour qu’elle puisse être à nouveau un lieu d’innovation et de diversité, ouvert sur le monde où chacune et chacun puisse se former dans le respect de son intégrité morale et physique.

    Voici quelques-unes de nos propositions à mettre en place pour garantir le respect et l’intégrité des élèves et professeur.e.s au sein de l’école. Nous nous assurerons de l’assimilation de ces propositions pour de réels changements :

    - Mettre en place une formation ou atelier corporel sur le consentement assuré par une structure externe à l’école
    - Mettre en place une formation sur la communication non violente assurée par une structure externe à l’école
    - Appliquer un protocole de parade sûr et respectueux
    - Appliquer des méthodes de retour suite aux présentations des élèves au sein de l’école, sans la présence de la direction
    – Avoir un.e référent.e externe à l’écoute de problèmes de harcèlement au sein de l’école
    - Décentraliser le pouvoir décisionnel de la direction, ne pas avoir à passer par eux pour des demandes de stages, travail. Plus de transparence

    Pour signer l’appel :
    https://framaforms.org/lettre-de-soutien-balance-ton-cirque-1628615396

    https://academia.hypotheses.org/32711

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    voir aussi :
    D’anciens étudiants balancent leurs écoles de cirque
    https://seenthis.net/messages/922352

  • D’anciens étudiants balancent leurs écoles de cirque

    Après un #happening à Châlons pour sensibiliser l’opinion publique, le collectif « #Balance_ton_cirque », dont la plupart des membres sont issus du #Centre_national_des_arts_du_cirque (#Cnac), souhaite libérer la parole des étudiants victimes de #violences_sexuelles, sexistes ou morales dans leurs écoles. Et surtout, faire en sorte qu’elles cessent.

    L’année se termine sur une note amère pour le Centre national des arts du cirque (Cnac). Vendredi dernier, à l’issue des #Echappées, représentations individuelles des étudiants en piste, un happening s’organisait devant le cirque historique de Châlons, porté par une vingtaine de personnes, anciens étudiants et artistes confondus. Dans un silence sépulcral, toutes pancartes brandies, le collectif « balance ton cirque » a dénoncé ce que beaucoup ne soupçonnaient pas, ou de loin : les #violences verbales, physiques, sexuelles et morales subies dans les #écoles_circassiennes. Toutes les écoles, le Cnac y compris. Et les témoignages, que certains classeraient volontiers dans la catégorie du #sexisme_ordinaire, sont glaçants. Sur les écriteaux, des propos rapportés de professeurs ou de directeurs à l’encontre des étudiants donnent le ton : « Ton corps change, tu deviens une femme », « C’est pas gagné, t’as pas un corps de danseur », ou encore « Tu as mis une petite culotte rose aujourd’hui. Demain, ce sera quelle couleur ? »

    Près d’une centaine de témoignages recueillis

    Ledit collectif, principalement constitué d’anciens du Cnac, revendique son indépendance et son envie de faire bouger les lignes. « Pour éviter à d’autres de vivre ce qu’on a vécu, expliquent ses membres. On imagine que certaines personnes de l’équipe pédagogique du Cnac ont pris notre démarche pour elles, mais on ne les vise pas. On souhaite que la parole se libère. Et si on a choisi les Echappées pour notre action publique, c’est aussi parce que le jury pluridisciplinaire qui évalue les étudiants était présent à Châlons ce jour-là. Il se compose de tout un tas de profils. Des gens qui n’ont absolument rien vu ou au contraire qui ont fermé les yeux, d’autres qui ont aussi subi ces violences et qui nous soutiennent. » Depuis cette mobilisation, près d’une centaine de témoignages issus du monde circassien européen ont été recueillis et publiés de façon anonymisée via le compte Instagram #balancetoncirque. Pas simple à gérer émotionnellement pour les lanceurs d’alerte, eux-mêmes victimes et / ou témoins. « On parle d’#agressions_sexuelles, mais également de #harcèlement_moral et d’#emprise_psychologique, parfois même de violences entre les élèves. On sait que des promotions actuelles y sont toujours confrontées. C’est incroyable que des écoles supérieures, des institutions comme le Cnac ou d’autres, ne le dénoncent pas et restent dans le déni. » Puis d’évoquer une « #omerta » et une « #pression permanente » entretenues par les directions. « Tout se règle en interne. On s’est déjà entendu dire : « si tu veux réussir, il va falloir te taire ». Les dirigeants ont les pleins pouvoirs et se permettent tout, même en dehors de l’école. »

    « C’était un rêve d’enfant, c’est devenu un cauchemar d’adulte. »

    Certains membres du collectif, par exemple, se sont vus interpeller à Châlons dans un cadre personnel et ont reçu des remarques désobligeantes concernant leur vie privée. D’autres ont été interrogés sur leur orientation sexuelle lors des auditions de sélection du Cnac. « Avec le recul et en échangeant tous ensemble, on réalise la gravité de ces faits, la façon dont on nous infantilise, dont on nous manipule. Pourtant, on a la chance de suivre une formation incroyable. Mais elle est gâchée à cause de quelques personnes seulement. C’était un rêve d’enfant, c’est devenu un #cauchemar d’adulte. » Plusieurs courriers adressés par des étudiants au ministère de la Culture ainsi qu’aux fédérations française et européenne des écoles de cirque sont restés sans réponse.

    Des actions en justice ?

    Prochaines étapes pour #balancetoncirque : prendre attache avec les associations référentes sur ces questions et suivre des formations d’écoutant(e)s afin de mieux orienter et accompagner les témoins. Des actions en #justice sont-elles envisagées ? « Ce n’est pas la vocation première de notre collectif, mais il n’est pas exclu que des démarches soient entreprises individuellement. Elles auront tout notre appui. On veut surtout que les gens parlent, se réunissent, pour changer les choses. » Et puisque la direction du Cnac doit être renouvelée d’ici la fin de l’année, le timing s’avère on ne peut mieux choisi.

    http://www.lhebdoduvendredi.com/article/40942/danciens-etudiants-balancent-leurs-ecoles-de-cirque

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