• Paris, le 7 décembre 2012

    L’OIP demande la fermeture immédiate des Baumettes

    La situation de la prison des Baumettes mérite une autre réaction politique que des justifications. Dans sa réponse aux recommandations du Contrôleur général sur le centre pénitentiaire de Marseille rendues publiques ce jeudi 6 décembre 2012, la ministre de la Justice se contente en effet d’avancer une série de dispositions engagées par ses prédécesseurs. Elles n’ont pourtant apporté « aucune amélioration substantielle » selon le Contrôleur, face à des conditions de détention dénoncées depuis 20 ans comme relevant du traitement inhumain et dégradant.

    d’euros pour le maintien en condition opérationnElle indique ainsi que depuis dix ans, l’État « a investi quelque 7,9 millionselle (sic) de l’établissement ». Il convient notamment de s’interroger sur l’utilisation du budget « destiné à l’entretien et à la maintenance » de l’établissement, augmenté de 12 % entre 2011 et 2012 pour atteindre 572 000 euros. Le Contrôleur évoque pour sa part des cellules insalubres : « pas de lumière (ampoule manquante) », murs sales, « dégradés », « sol sale », « pas de cabine de douche ni d’eau chaude », W-C « récent mais non fixé au sol et chasse d’eau quasi inexistante », « réfrigérateur très sale et infesté de cafards »…

    Alors que le ministère se targue d’un marché de « prestation de dératisation et désinsectisation, qui prévoit deux types de prestations, préventives (six par an) et curatives (cinq par an) », ainsi que d’un accroissement de la fréquence de cette intervention « qui a entraîné des coûts supplémentaires », le Contrôleur a relevé que « depuis deux ans, les rats pullulent », les surveillants étant réduits à faire « leur ronde de nuit en tapant des pieds pour les éloigner ». Et de conclure : « l’insalubrité et l’absence d’hygiène sont consubstantielles à la plus grande partie de l’établissement ». Pour toute réponse, la ministre ré-annonce le projet de restructuration du centre pénitentiaire, dont l’achèvement n’est prévu qu’en 2017. Alors que la loi pénitentiaire de 2009 pose comme principe que « l’administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits », il ne peut être toléré que des personnes restent incarcérées pendant encore cinq ans dans de telles conditions.

    Afin de désengorger la prison des Baumettes et d’accueillir les personnes détenues « dans de meilleures conditions », Christiane Taubira invoque notamment sa circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012 dont elle escompte « une baisse des effectifs dans les établissements pénitentiaires » au moyen d’un « développement des alternatives à l’incarcération et des mesures d’aménagement de peine ». De telles préconisations, dont les effets, s’ils se manifestent dans le sens espéré, ne seront que très progressifs, apparaissent d’emblée insuffisantes, d’autant qu’elles ne s’accompagnent pas d’une augmentation des moyens dévolus à la prise en charge des personnes condamnées en milieu ouvert. De plus, les faits semblent démentir l’attente de la ministre puisqu’au niveau national, le nombre de personnes détenues a légèrement augmenté en octobre 2012 (+ 0,9 % par rapport au mois précédant), ainsi qu’en novembre (+ 0,8 %), s’élevant à 67 225. A Marseille, le taux d’occupation atteint 136 % au 1er novembre.

    Une surpopulation, avec son cortège de tensions et violences, face à laquelle la députée Christiane Taubira s’exprimait en des termes sévères au cours d’une séance du 17 septembre 2009 à l’occasion des débats sur le projet de loi pénitentiaire : « je me disais que si, dans cet hémicycle, l’on était obligé de partager un siège à plusieurs, une telle surpopulation susciterait peut-être quelques impatiences et quelques tentations d’intolérance parmi nous, et un gnon pourrait partir de temps en temps ! On ne peut pas se prévaloir des turpitudes de l’État, qui n’a toujours pas su mettre fin à la surpopulation carcérale, pour justifier que l’on aille crescendo dans la répression d’attitudes qui sont générées par le confinement, par la réduction de l’espace vital, par les conditions de vie extrêmement pénibles des détenus ». Devant les phénomènes de violences et caïdat dénoncés par le Contrôleur aux Baumettes, la garde des Sceaux d’aujourd’hui appelle les parquets d’Aix et de Marseille à la plus grande fermeté « pour identifier et traduire en justice les auteurs de tels faits ».

    Appeler à un renforcement de la répression en détention ne fait qu’agir sur des symptômes et non sur les causes. Et les mesures de rénovation qui viennent d’être annoncées ne contribueront qu’à pérenniser un établissement dont le maintien en activité est aujourd’hui questionné. Dénoncée par le Contrôleur général, la défaillance des pouvoirs publics depuis 20 ans est une faute qui doit aujourd’hui cesser.

    L’OIP en appelle au courage politique dont la garde des Sceaux a notamment su faire preuve dans nombre de ses déclarations afin de prendre la seule décision qui s’impose à un État garant du respect de la dignité des personnes détenues et des personnels exerçant dans l’établissement : le Président de la République et son gouvernement doivent annoncer la fermeture immédiate de la maison d’arrêt hommes du centre pénitentiaire des Baumettes.

    #prison #Baumettes #OIP

  • Être là - L’acid - Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion
    http://www.lacid.org/films-soutenus/etre-la

    Face aux soignantes du service psy de la prison des Baumettes …
    En se situant sur cette brèche de l’univers carcéral, regardant les combattantes de ce front trop ignoré par-dessus l’épaule de ces hommes en souffrance, ce film fait œuvre, une œuvre nécessaire.
    C’est d’abord en fondant son dispositif, en trouvant la seule place possible dans cet univers où les prisonniers sont interdits d’image, que le film s’affirme. Il prend appui sur les contraintes pour y puiser une énergie formelle très prégnante, mais qui ne fait jamais écran à la vérité nue de ce qu’il montre. C’est un film qui bouleverse, qui coupe le souffle souvent, qui fait mal, et qui ne passe pas à côté de toute la complexité de la situation : il ne tait ni la trivialité ni la pauvreté âpre des échanges ni la profondeur inaccessible des douleurs. Il ne tait rien de cet harassant combat contre le chaos et la barbarie.

    Être là
    Un film de Régis Sauder
    France - 2012
    1h34 min - DCP
    Sortie : 7 novembre 2012

    #baumettes #prison #psychiatrie

  • Une description de l’état désastreux de la prison des Baumettes par le contrôleur général

    Il est très utile, de temps à autre, de lire le journal officiel...

    Recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté du 12 novembre 2012 prises en application de la procédure d’urgence et relatives au centre pénitentiaire des Baumettes, à Marseille, et réponse de la garde des sceaux, ministre de la justice, du 4 décembre 2012

    Journal officiel (JORF) n°0284 du 6 décembre 2012
    texte n° 123

    http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000026729330&dateTexte=&

    Le constat dressé par la vingtaine de contrôleurs qui ont visité, du 8 au 19 octobre, le centre pénitentiaire des Baumettes, à Marseille, fait apparaître, sans aucun doute, une violation grave des droits fondamentaux, notamment au regard de l’obligation, incombant aux autorités publiques, de préserver les personnes détenues, en application des règles de droit applicables, de tout traitement inhumain et dégradant.

    • On en parlait ce matin sur France info

      Pas de lumière, pas de chasse d’eau, pas de cloison d’intimité, réfrigérateur infesté de cafards, des cloportes, pas d’eau chaude, pas de placard, pas de quoi s’asseoir, pas de table... C’est ainsi que deux détenus décrivent leur cellule dans ce rapport, une description « dont la véracité a été vérifiée par le contrôle général. »

      Au total, sur 98 cellules visitées, seules neuf n’ont pas fait l’objet d’observation. Ajoutons pour complèter ce tableau que 3 à 5 douches seulement sur 10 fonctionnent.

      Mais cette dénonciation de l’insalubrité et de la vétusté n’est qu’une partie de ce rapport qui critique également la surpopulation - pour 1190 places, 1769 personnes présentes au 1er ctobre 2012 soit un taux d’occupation de 145% - et la violence, « reflet de la vie marseillaise et de ses quartiers nord. »

      http://www.franceinfo.fr/justice/rapport-sur-la-prison-des-baumettes-infection-de-cafards-surpopulation-et

    • @klaus, voila, les vendeurs de meubles sont en toile de fond, et le sujet des conditions de vie en prison est là.
      J’étais naïvement persuadée que cette problématique était partagée par tout être digne d’humanité, qu’il soit de droite ou de gauche, cela dépassait forcément ces clivages. Les conditions de vie et de privations en prison, n’est-ce pas très révélateur de la société que nous crééons ? N’est-ce pas justement là le noyau sur lequel il faudrait repenser notre vivre ensemble ? Mais non, lorsque j’aborde le sujet on me rétorque souvent que je n’ai pas à me préoccuper du confort de ceux qui sont punis. On en revient donc toujours à cela, le surveiller et punir. Pourtant imposer la souffrance à un autre être humain sans s’y opposer fait de nous des monstres. Dans ce cas, la barbarie du reste de la société est évidente et coule de cette source du non-dit.

      Alors ce n’est pas possible de considérer que nous vivons dans une société évoluée dont nous voudrions faire perdurer le modèle.

      #prison #baumettes #survivre

  • « Être là », cellules grises
    http://next.liberation.fr/cinema/2012/11/06/etre-la-cellules-grises_858520

    Régis Sauter et son équipe de tournage (beau travail de prise de son) ne laissent rien échapper des bruits de la prison, boucan maboul qui à force de répétition paraît horriblement normal. A l’image, on s’accoutume de même aux rites locaux : la distribution des médicaments, les incidents divers, entre tentatives de suicide, automutilations et agressions des soignantes.

    Maquisardes. Cette banalisation par la répétition donne d’autant plus de relief à ce qui se dit : la vie, tu parles ! Comme un coup de hache dans la glace de nos cœurs. Du côté des soignantes qui ne lâchent jamais l’affaire de l’attention, de l’humour, de la bonté, quand, en face, ça yoyote sévère. Celle qui dit : « Pour pouvoir être mieux, il ne faut pas que vous fassiez peur. » Du côté des « fous » aussi, aux aphorismes coupants : « Ça m’emmerde de m’occuper du malheur et du bonheur des autres. »

    #prison #psychiatrie #Marseille #baumettes #film