• – « Je ne dirais jamais qu’il y a des violences policières », Valérie Pécresse

      – « Je veux que vous redeveniez les chasseurs, pas les gibiers », Eric Zemmour

      – « Nous devons établir une présomption de légitime défense renforcée », Marine Le Pen

      Le 2 février 2022, le syndicat policier d’extrême droite Alliance organisait un « Grand oral » des candidats à l’élection présidentielle. L’événement en tant que tel révèle le degré de toute puissance d’une police qui est désormais un pouvoir autonome, un État dans l’État. Imaginez : les candidats doivent venir se faire valider par un syndicat policier radicalisé, en prononçant le discours le plus répressif possible devant un énorme logo Alliance. Le tout retransmis à la télé. Il y a encore quelques années, personne n’aurait imaginé une telle dystopie.

      BAC Nord

      C’est donc dans un ciné-club parisien qu’a lieu l’événement. En introduction, le film « BAC Nord », un long métrage de propagande. En 2012, 18 policiers membres de la BAC du Nord de Marseille étaient arrêtés pour corruption, racket, trafic de drogue et enrichissement personnel. Les enquêteurs découvrent par exemple plus de 150 000€ en liquide chez un policier, des sachets de cannabis dans les placards du commissariat, entre autres. L’affaire est tellement accablante que la plupart sont condamnés. Ce film, sorti en 2021, est une œuvre d’inversion : des ripoux y sont montrés en héros qui ne font que leur devoir, les habitants des quartiers sont des silhouettes cagoulées et sanguinaires, l’IGPN est incarnée par des enquêteurs sévères et antipathiques, qui cherchent à faire condamner injustement la BAC. Ce film qui a bénéficié d’une promotion massive dans les médias, a été acclamé par l’extrême droite dès sa sortie, Marine Le Pen twittant notamment « la réalité c’est ce film ! Allez le voir ! » Le 2 février, après la projection, le patron d’Alliance fait acclamer « les collègues de Marseille » et réclame un « choc d’autorité ». Le décors est posé.
      Surenchère sécuritaire

      Vient le « Grand oral ». Seul Mélenchon n’a pas été invité : les policiers le détestent parce qu’il a eu le tort de dénoncer les violences policières. Preuve que la police fait bloc, qu’elle soutient les criminels dans ses rangs plutôt que de les condamner. Parler de violences policières est déjà un motif d’exclusion. Les candidats de centre-gauche ont, de leur côté, décliné l’invitation.

      Valérie Pécresse commence, elle promet elle aussi aux policiers un « électrochoc d’autorité », l’extension de la légitime défense, l’obligation du flouter les photos d’agents. Elle veut aussi permettre à certains policiers de devenir juges. Après une série de promesses et de cadeaux, Pécresse annonce l’élargissement des « interdictions administratives » de participer à des mobilisations, une mesure contraire à la Déclaration des droits de l’homme et à la liberté fondamentale de manifester. Elle est immédiatement suivie par Darmanin, applaudi par la salle. Le patron d’Alliance assume : « Vous êtes notre ministre et on en est satisfaits. Pourvu que ça dure ! » Les vrais chefs de la police française ne sont pas élus, ils sont désignés par les syndicats de police.

      Le ministre de l’Intérieur se vante de ce qu’Emmanuel Macron « a fait concrètement et discrètement » pour la police, « peut-être trop discrètement ». Comme les achats d’armes, de grosses voitures, les primes, les médailles, l’exonération de pass sanitaire et autres cadeaux ? Ça n’était pourtant pas très discret.

      C’est le tour d’Eric Zemmour, avec un discours ouvertement fasciste : « Vous êtes aux premières loges d’un combat de civilisation. Face à vous, ce ne sont pas que des délinquants, c’est une autre civilisation avec laquelle on ne peut pas co-exister pacifiquement ». Pour lui, la France est en guerre civile, et la police doit éradiquer un ennemi intérieur. « Les délinquants du quotidien et les djihadistes, ce sont les mêmes. Mêmes origines, mêmes parcours, mêmes quartiers ». Il promet de « supprimer le juge des libertés », qui a un « rôle néfaste », et de réduire la place des avocats. Il va aussi élargir la « légitime défense » pour tout le monde, à l’américaine : un permis de tuer si l’on a eu « peur ». Il promet d’attaquer les « enclaves étrangères » et conclut, halluciné : « Je veux que vous redeveniez les chasseurs, pas les gibiers ». Le programme d’une dictature. Tonnerre d’applaudissements. La police acclame donc un délinquant fasciste multi-condamné.

      Pour terminer, Marine Le Pen a du mal à aller plus loin que les précédentes interventions. Alors elle annonce à son tour la « présomption de légitime défense » pour les policiers, le retour des peines plancher, le floutage obligatoire, le jugement en procédure accélérée de chaque outrage… Nouveaux applaudissements d’un public comblé.

      La police au pouvoir

      Des candidats représentants, dans les sondages, 70% des intentions de vote sont donc allés se soumettre à un syndicat d’extrême droite, en multipliant les propositions dictatoriales. Voilà où nous en sommes : après avoir militarisé la police, après lui avoir donné tous les droits, après avoir écrasé toute opposition, le régime ne tient plus que par la répression. Et les forces de l’ordre le font savoir. La police veut à présent le pouvoir. Elle s’est déjà autonomisée, elle ne répond plus à aucune règle, elle ne rend plus aucun compte : c’est à la fois un camp et un parti. Ce « Grand oral » policier donne un aperçu d’un régime où Alliance n’aurait pas de contre-pouvoirs : une dictature policière fasciste.

    • « Bon, on a bien rigolé avec #BacNord. Mais ce qui s’est passé hier au "Grand oral" du #fascisme c’est super grave.
      Donc c’est parti : on nomme et on dénonce les acteurs culturels qui font le jeu de #l'extrême-droite ! »

      1/ Shame on you #Club-De-l'Etoile

      Ça joue les héritiers de l’esprit « ciné-club », les fans de pop culture, puis ça finit par programmer une soirée 100% facho ou on discute tranquillement de la prochaine guerre civile ?!
      On attend vos explications.

      2/ Shame on you #France2tv, #myCANAL et #Chi-Fou-Mi.
      Vous avez produit le film, validé le scénario. Vous saviez que ça allait nourrir des discours de haine sur l’insécurité, la justice, les quartiers populaires.
      Ah c’est sûr ça vous a rapporté du pognon. Bravo !

      3/ Shame on you #CedricJimenez

      Non, l’amour de l’extrême-droite pour ton film n’est pas une « malheureuse récupération politique ». C’est la putain de SUITE LOGIQUE de tes choix de cinéaste.
      Tu sais ce qui te ferait honneur ? D’assumer ta part de responsabilité dans cet enfer.

      4/ Shame on you #GillesLellouche

      Tu te souviens de la conférence de presse à Cannes ? Celle où Fiachra Gibbons, le journaliste irlandais, vous alerte sur la proximité avec les idées de #LePen. Ça t’avait bien fait rigoler, à l’époque.
      Who’s laughing now ?


      5/ Shame on you #leJDD

      Vous aviez fait la promo de Bac Nord en le qualifiant de « western urbain ». Ça veut dire quoi : que les pauvres sont des Indiens ? Que c’est normal d’envoyer la cavalerie pour « civiliser » les cités ? Expliquez-nous.
      .../...

      https://twitter.com/SansAvenir_pod/status/1489182503818645512

    • Zemmour à #Lille : La police, Service d’ordre De L’extrême-droite

      Ce samedi 5 février à Lille, le candidat pétainiste sponsorisé par le milliardaire Bolloré, venait tenir un meeting.

      Meeting massivement retransmis par tous les médias dominants, qui mènent une véritable campagne en faveur de l’extrême droite depuis des mois, sans jamais donner la parole à celles et ceux qui défendent l’égalité et la justice. Sauf pour les diaboliser.

      La population lilloise refusait ce grand rassemblement néofasciste : une manifestation contre l’extrême droite à l’appel de nombreuses organisations était lancé. Plusieurs milliers de personnes ont répondu présent.

      Mais la police a lancé une série de charges très violentes pour voler les banderoles des manifestants, puis en organisant une véritable chasse à l’homme contre les opposant-es à Zemmour.

      Comme à Nantes, comme à Paris, la police lilloise a fait office de milice pour le candidat d’extrême droite, et plus généralement contre toute parole antifasciste. Cela n’a pas empêché le défilé, hétérogène, de faire entendre ses voix dans les rues de Lille.

      Les temps sont durs, faisons bloc.

      https://twitter.com/Nantes_Revoltee/status/1490059947220025347?cxt=HHwWhoCygZPo4K0pAAAA

  • « Bac Nord » sera diffusé demain lors d’un « grand oral » sur « la réalité des policiers » organisé par Alliance - où sont attendus Zemmour, Le Pen, Darmanin et Pécresse.

    Son réalisateur ne « cautionne » pas cette « malheureuse récupération politique » selon lui.

    « Bac Nord » continue d’être un objet politique au grand dam de Cédric Jimenez
    https://www.huffingtonpost.fr/entry/bac-nord-continue-detre-un-objet-politique-au-grand-dam-de-cedric-jim

    Précédemment cité par Marine Le Pen, Eric Zemmour ou Valérie Pécresse, le film sera diffusé en amont du "grand oral" des candidats à la présidentielle à l’initiative du syndicat de police Alliance.

    CINÉMA - “Les faits, personnages, propos et opinions sont fictifs”, précise un message en lettres blanches en ouverture du film. Pourtant depuis sa sortie à l’été 2021, Bac Nord s’invite dans des débats politiques bien réels, cités par des candidats de droite et d’extrême droite pour justifier leurs thèses sécuritaires. Une “malheureuse récupération politique” pour #Cédric-Jimenez, qui s’intensifie à l’approche de la présidentielle.

    Fraîchement nommé à sept reprises pour la prochaine cérémonie des César (meilleur acteur pour Gilles Lellouche, meilleur second rôle pour François Civil et Karim Leklou ou encore meilleur film), ce n’est pourtant pas pour ses qualités cinématographiques que le long-métrage sur trois flics intervenant dans les quartiers Nord de Marseille va être au centre de l’attention ce mercredi 2 février. Le polar est diffusé au Club de l’Étoile à Paris en préambule d’un “grand oral” sur “la réalité des policiers” organisé par Alliance et réunissant une centaine de responsables du syndicat de policiers venus de toute la France.

    Dans la foulée, Valérie Pécresse (LR), le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui représentera le candidat putatif LREM Emmanuel Macron, Éric Zemmour (Reconquête !), et Marine Le Pen (RN) viendront l’un après l’autre exposer leur programme présidentiel pour la sécurité. La candidate PS Anne Hidalgo et celui du PCF Fabien Roussel ont décliné l’invitation ainsi que Yannick Jadot (EELV). Quant à Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise), Alliance ne l’a pas invité pour des raisons que le secrétaire général d’Alliance Fabien Vanhemelryck n’a pour le moment pas détaillées.

    Cette projection de Bac Nord, en amont de prises de paroles de candidats de droite et d’extrême droite uniquement, est de la “seule initiative” d’Alliance, assure au HuffPost Cédric Jimenez qui n’a été ni contacté ni prévenu de cet événement. Impuissant devant la transformation de son film en objet politique, le réalisateur préfère “ne pas réagir afin de ne pas alimenter” cette “malheureuse récupération politique”. “Ça ne veut pas dire que je la cautionne. Bien au contraire”, nous précise-t-il.

    Après sa sortie le 18 août, le polar rythmé a attiré plus de 2,2 millions de spectateurs en salles et est devenu le 5e film le plus vu de l’année en France. Et parmi eux, de nombreux hommes et femmes politiques. Valérie Pécresse figure certainement parmi les exemples les plus récents de cette “récupération politique”. Sur le plateau de l’émission “La France dans les yeux” sur BFMTV le 18 janvier, elle lance : “On parle de reconquête républicaine de quartiers minés par l’ultraviolence, je vous conseille d’aller voir Bac Nord vous comprendrez ce que je veux dire” pour justifier son idée de “créer des brigades coup de poing” pour ”éradiquer” la violence.

    Avant elle, Éric Zemmour et Marine Le Pen se sont à plusieurs reprises servis du film pour appuyer leurs déclarations. “Je ne sais pas si vous avez vu le film Bac Nord. Vous voyez la réalité de la police aujourd’hui dans les cités. Vous voyez qu’ils ne peuvent pas rentrer. Ils sont moins armés que les caïds de la drogue qui les méprisent. (...) Dans ces places fortes étrangères, on ne veut pas de la France”, assurait le candidat d’extrême droite lors d’un débat face à Jean-Luc Mélenchon sur BFMTV encore.

    “Bac Nord : alors que le Président va faire un show médiatique à Marseille, la réalité c’est ce film ! Allez le voir ! Prenez conscience de cette terrible réalité et de l’urgence à reprendre la main”, tweetait aussi Marine Le Pen à la fin de l’été alors qu’Emmanuel Macron était dans la cité phocéenne pour annoncer le renfort de 300 policiers d’ici la fin 2022 et le financement de 500 caméras vidéos -un outil qui fait débat dans la ville- pour “ne rien lâcher” dans la lutte contre le trafic de drogues.

    Du point de vue policier

    “Un film reste un film, c’est une fiction qui raconte un fait divers bien particulier, ça ne raconte pas l’ensemble des quartiers Nord”, avait réagi Cédric Jimenez à l’automne sur France Inter, ulcéré par ces “mauvaises interprétations” de son long-métrage par des candidats d’extrême droite. “Quand on est candidat à la présidence de la République, on ne prend pas un film comme exemple. Ce n’est pas sérieux, on présente un programme. Surtout en mettant sur le film des valeurs qu’il ne représente pas.”

    Inspiré de l’affaire judiciaire réelle - et non achevée - dite “des ripoux” de la BAC Nord, pour laquelle 18 anciens policiers ont été jugés pour acquisition, détention et transport de stupéfiants, mais aussi divers vols, d’argent, de stupéfiants ou de cartouches de cigarettes, le film n’est ”pas un documentaire” sur les quartiers Nord insistait le cinéaste, mais bien “une fiction” sur le travail de la police. “La banlieue, c’est le contexte.”

    Interrogé sur RTL par Pascal Praud ce jeudi 27 janvier, le secrétaire général du syndicat Unité SGP Police-Force Ouvrière Grégory Joron estimait pour sa part que la représentation du quotidien des policiers dans le film “n’est pas complètement hors sol par rapport à ce que vivent mes collègues”. Déplorant la perte de sens du métier de policier, la souffrance au travail et la brutalité hiérarchique auxquels certains sont confrontés, “il y a forcément des choses assez réelles”, indiquait-il.

    Mais de nombreuses critiques, qui ont émergé dès la présentation du film au Festival de Cannes, ont aussi reproché au film un manque de subtilité et un parti pris pour la police à travers un traitement partial du fait divers dont s’inspire l’œuvre. “D’un côté, puiser dans le réel permet au film d’exploiter à souhait tous les fantasmes liés aux quartiers Nord et à sa brigade anti-criminalité, première de France par son effectif. De l’autre, la mise à distance du réel, et donc de la vérité judiciaire, tronque les enjeux de cette affaire hors norme. Pour offrir sur un plateau tous les arguments de la défense policière”, décrivait ainsi dans Marsactu la journaliste Clara Martot sur “le paradoxe” du film.

    “J’ai choisi de faire un film du point de vue de ces trois flics de la Bac. Ce que j’ai voulu raconter, c’est la façon dont des individus se sont retrouvés broyés par la machine. C’est d’ailleurs le thème de tous mes films”, expliquait Cédric Jimenez au Parisien. Interrogé sur ceux qui qualifiaient Bac Nord de “film de droite”, le cinéaste disait “accepter les critiques” des journalistes. Après tout, c’est le sort réservé à toute œuvre cinématographique. Mais devenir un objet de récupération politique en est un autre.