• En Algérie, une révolution numérique contre le harcèlement de rue

    En Algérie, un vent de révolte souffle sur les réseaux sociaux. Excédées par un harcèlement de rue devenu banal, des femmes ont décidé de ne plus se taire. Armées de leurs smartphones, elles filment désormais leurs agresseurs et diffusent les vidéos sur TikTok, sous le hashtag #BalanceTonHarceleur. Ce mouvement inédit dans le pays s’inscrit dans la lignée des mobilisations féministes mondiales, tout en adaptant les codes numériques à la réalité sociale algérienne.

    https://medfeminiswiya.net/2025/05/12/en-algerie-une-revolution-numerique-contre-le-harcelement-de-rue

    #feminisme #algérie

  • Comment les #passeurs profitent des politiques migratoires restrictives dans les #Balkans

    Les #réseaux_criminels étendent leur mainmise sur la route migratoire des Balkans. De plus en plus de passeurs parviennent à exploiter les politiques frontalières de l’Union européenne.

    Dans les zones frontalières de la #Serbie, de la #Bosnie et de la #Hongrie, la dynamique migratoire est en constante évolution. Alors que les camps de détention aux frontières ont été fermés et que les politiques frontalières de l’Union européenne (UE) deviennent de plus en plus restrictives, les migrants empruntent des itinéraires toujours plus dangereux, contrôlés par des réseaux de trafic toujours plus sophistiqués.

    C’est le constat fait par de nombreuses ONG qui travaillent avec les migrants le long de ces itinéraires.

    Milica Svabic, de l’organisation KlikAktiv, une ONG serbe qui développe des politiques sociales, explique que « malheureusement, de plus en plus de migrants ont fait état d’#enlèvements, d’#extorsions et d’autres formes d’#abus de la part de passeurs et de groupes criminels ces derniers mois. »

    Selon elle, des groupes de passeurs afghans opèrent actuellement aux frontières de la Serbie avec la Bosnie et la Hongrie. #KlikAktiv a ainsi recueilli des témoignages d’abus commis aux deux frontières.

    Le paysage changeant des réseaux de passeurs

    En Serbie, ces changements sont frappants. Les camps de fortune ont disparu des zones frontalières. Désormais, les personnes migrantes se retrouvent cachées dans des #appartements_privés dans les centres urbains et ne se déplacent plus que la nuit.

    Les bandes criminelles afghanes et des réseaux locaux ont pris le contrôle à travers une #logistique complexe, clandestine et dangereuse.

    Milica Svabic a expliqué à InfoMigrants que son organisation a également documenté « des cas de migrants enlevés et retenus dans des lieux isolés (généralement des logements privés) jusqu’à ce que leur famille paie une #rançon pour leur libération ». Elle précise que cette rançon s’élève souvent à plusieurs milliers d’euros.

    La plateforme d’investigation Balkan Investigative Reporting Network, le #BIRN, a récemment documenté comment des membres du #BWK, un gang afghan notoire opérant en Bosnie, ont retenu des demandeurs d’asile en otage dans des camps en pleine #forêt, en exigeant des rançons de leurs proches, tout en les soumettant à d’horribles #sévices, y compris des #viols et de la #torture. Ces #agressions sont parfois filmées et envoyées aux familles comme preuve de vie et moyen de pression.

    Rados Djurovic, directeur de l’ONG serbe #Asylum_Protection_Center, confirme que les passeurs ont recours à des #appartements et d’autres lieux tenus secrets dans les grandes #villes pour y cacher des migrants, les maltraiter et organiser le passage des frontières.

    « Ces opérations sont devenues de plus en plus violentes, les passeurs ayant recours à la force pour imposer leur contrôle et obtenir des #pots-de-vin. Ils enlèvent des personnes, les retiennent dans ces appartements et extorquent de l’argent à leurs familles à l’étranger », ajoute-t-il.

    D’autres groupes de défense des droits humains et des experts en migration rapportent des cas similaires.

    Un rapport du #Mixed_Migration_Center (MMC) relate des témoignages de #vol, de #violence_physique et d’extorsion. Roberto Forin, du MMC, souligne toutefois que « le rapport n’identifie pas spécifiquement les groupes armés d’origine afghane comme étant les auteurs de ces actes ».

    L’impact des politiques frontalières et des #refoulements

    Le renforcement des mesures de sécurité le long des frontières expliquerait en partie cette évolution.

    Un porte-parole du Border Violence Monitoring Network (BVMN) explique que « l’apparition de ces groupes est simplement la conséquence de la sécurisation croissante des régions frontalières dans toute l’Europe. Alors que les politiques frontalières européennes déploient des méthodes de plus en plus violentes pour empêcher la migration, les migrants n’ont d’autre choix que de recourir à des méthodes informelles pour franchir les frontières ».

    Ce point de vue est partage par le Mixed Migration Center.

    Le réseau BVMN ajoute qu’en fin de compte, « ce sont les personnes en déplacement qui sont les plus touchées par la violence que ce soit de la part des autorités publiques ou des groupes qui prétendent les aider dans leur périple ».

    Roberto Forin du MMC prévient que « la violence et les restrictions aux frontières exacerbent la #vulnérabilité des migrants à l’#exploitation et aux abus ».

    Rados Djurovic du Asylum Protection Center souligne également le « lien direct entre les pratiques de refoulement à la frontière hongroise et l’augmentation du trafic de migrants, tant en termes d’ampleur que de violence ».

    « Par peur des refoulements et de la violence, les migrants évitent les institutions et les autorités de l’État et font confiance aux passeurs, qui exploitent souvent cette confiance », ajoute Milica Svabic, de KlikAktiv.

    Les Etats concernés dans une forme de #déni

    Le rapport du BIRN montre que des membres du #gang afghan BWK possèdent des documents d’identité délivrés par l’UE sur la base du statut de protection qui leur aurait été accordé par l’Italie.

    Selon le BIRN, certains membres du gang pourraient avoir utilisé ces documents pour franchir sans encombres les frontières dans les Balkans et échapper aux autorités. Contacté par InfoMigrants, les autorités italiennes ont refusé de commenter ces allégations.

    Plus largement, les Etats concernés par des accusations de refoulement ou de négligence le long de leurs frontières nient avec véhémence toute #responsabilité. Cette posture pourrait encourager un sentiment d’#impunité chez les passeurs.

    Les migrants se retrouvent ainsi dans un cercle vicieux. Des demandeurs d’asile déclarent avoir été battus par des forces de l’ordre. Ils se retrouvent ensuite aux mains de #bandes_criminelles qui les soumettent à d’autres #traitements_inhumains.

    Lawrence Jabs, chercheur à l’université de Bologne, affirme dans l’enquête du BIRN qu’il existe « un lien certain entre les refoulements et les prises d’otages ».

    Les conclusions du BIRN mettent en lumière un problème plus général dans les Balkans : le #crime_organisé prospère dans les régions où l’application de la loi est violente et où l’obligation de rendre des comptes semble absente. Dans certains cas, des membres du BWK se seraient infiltrés dans des #camps_de_réfugiés gérés par l’État via l’intermédiaire d’informateurs locaux, qui auraient informé le gang des passages de frontière à venir.

    En octobre 2024, plusieurs membres présumés du BWK ont été arrêtés pour avoir enlevé des migrants turcs et filmé leur torture.

    La police bosniaque décrit les opérations du BWK comme « bien établies et très rentables », certains individus associés au réseau détenant des comptes bancaires avec plus de 70 000 euros de dépôts.

    L’enquête du BIRN décrit comment un gang dirigé par des migrants afghans bénéficie d’une certaine protection en Italie. De nombreux experts en matière de migration soulignent également que la nature de ces gangs est par définition transnationale.

    Selon Rados Djurovic du Asylum Protection Center, « ces réseaux ne sont pas uniquement constitués de ressortissants étrangers. Ils sont souvent liés à des groupes criminels locaux. Il arrive même que des migrants fassent passer de la #drogue pour d’autres, toujours avec le soutien de la population locale ».

    Les bandes criminelles s’appuient aussi sur des chauffeurs et des fixeurs locaux pour faciliter le passage des frontières.

    Rados Djurovic explique à InfoMigrants que ces groupes « impliquent à la fois des populations locales et des réfugiés. Chaque personne a son rôle ». Aussi, son organisation a « documenté des cas de personnes réfugiées voyageant légalement au sein de l’UE pour rejoindre ces groupes en vue d’un gain matériel. »

    Réponse de la police

    Le 14 avril, deux corps de migrants ont été retrouvés près d’un cimetière à Obrenovac, dans la banlieue de Belgrade, la capitale serbe.

    La forêt qui entoure le cimetière est devenue un campement informel exploité par des #passeurs_afghans. Les victimes seraient des ressortissants afghans poignardés à mort. Deux autres migrants ont été blessés, l’un au cou et l’autre au nez.

    Milica Svabic précise que « des incidents similaires se sont produits par le passé, généralement entre des groupes de passeurs rivaux qui se disputent le territoire et les clients ».

    Selon Rados Djurovic, bien qu’il y ait une volonté politique de lutter contre les réseaux criminels et la migration irrégulière, le souci de préserver une bonne image empêche un véritable engagement pour s’attaquer aux causes profondes.

    Il explique que la nature lucrative de l’activité et l’implication de la population locale rendent « presque impossible le démantèlement de ces réseaux ».

    La #dissuasion plutôt que la #protection

    Malgré les efforts des ONG, le soutien institutionnel reste inadapté. « Au lieu de se concentrer uniquement sur la lutte contre la migration irrégulière et le trafic de migrants, les institutions devraient développer des mécanismes pour soutenir ceux qui ont besoin de protection », estime Rados Djurovic.

    Il rappelle que « les routes migratoires ont changé. Elles ne sont plus visibles pour les médias, le public, les institutions et dans les camps. Mais cela ne signifie pas que les gens ne continuent pas à traverser (les frontières) ».

    Cette évolution coïncide avec la fermeture de camps d’accueil de migrants situés le long des principales routes de transit. « Sur 17 camps, seuls cinq fonctionnent encore, et aucun n’est situé sur les principaux axes de transit. Il n’existe plus de camp opérationnel dans toute la région de Voïvodine, dans le nord de la Serbie, à la frontière de l’UE ».

    Or, sans accès à un logement et confrontés à des expulsions régulières, les migrants n’ont que peu d’options. « Cela renforce les passeurs. Ces derniers comblent alors le vide en proposant des logements comme un service payant », observe Rados Djurovic.

    Et les ONG ne peuvent combler l’absence de structures étatiques. Roberto Forin, du Mixed Migration Center, constate que « si certaines ONG fournissent un soutien juridique et psychosocial, la couverture n’est pas permanente et de nombreux migrants ne sont pas au courant des services disponibles ». De plus, les travailleurs humanitaires s’exposent aux dangers des bandes criminelles, limitant ainsi leur champ d’action.

    Enfin, la Serbie a pour objectif de rejoindre l’UE et cherche à s’aligner sur les politiques migratoires européennes. En ce sens, montrer que la frontière serbe est forte est devenu une priorité.

    Selon Rados Djurovic, le Serbie veut « marquer des points sur la question de la migration ». Ainsi « ils peuvent prétendre que le recours à la violence, à la police des frontières et aux opérations conjointes stoppe la migration, même si ce n’est pas vrai. Tout le monde y gagne : les personnes qualifiées d’ »étrangères" sont ciblées et la lutte contre l’immigration devient à la fois politiquement et financièrement lucrative".

    https://www.infomigrants.net/fr/post/64299/comment-les-passeurs-profitent-des-politiques-migratoires-restrictives
    #route_des_Balkans #politiques_migratoires #responsabilité #migrations #réfugiés #frontières #fermeture_des_frontières #criminalité

    ping @karine4

  • Slovénie : forte baisse des entrées irrégulières au premier trimestre 2025

    Entre janvier et mars 2025, 3 876 franchissements irréguliers de la frontière ont été comptabilisés par la police slovène, une baisse de 60% par rapport à la même période l’année précédente. Une tendance commune à l’ensemble de l’Union européenne. Selon l’agence européenne Frontex, le nombre de franchissements irréguliers des frontières de l’UE « a diminué de 31% au premier trimestre 2025 ».

    Selon les chiffres de la police slovène, le nombre de franchissements irréguliers de la frontière a drastiquement chuté. Entre janvier et mars 2025, 3 876 personnes ont rejoint la Slovénie illégalement. C’est 60% de moins par rapport à l’année précédente à la même période.

    Près de 3 300 migrants ont exprimé leur intention de demander une protection internationale, soit près de trois fois moins qu’au cours des trois premiers mois de 2024. Et parmi eux, seulement 833 ont finalement déposé une demande, soit une baisse de près de moitié par rapport à la même période l’année dernière. La plupart ont quitté le pays avant la fin de la procédure, la Slovénie étant le plus souvent un pays de transit pour les migrants qui désirent poursuivre leur route en l’ouest ou le nord de l’Europe.

    En 2024, la migration irrégulière avait déjà baissé d’un quart après une année 2023 très intense. Au moins 46 192 migrants avaient rejoint la Slovénie, contre 60 587 en 2023.

    Une tendance commune à l’ensemble de l’Union européenne (EU). Selon son agence de surveillance, Frontex, le nombre de franchissements irréguliers des frontières de l’UE « a diminué de 31% au premier trimestre 2025 » pour s’établir à près de 33 600. Une baisse observée sur toutes les grandes routes migratoires vers l’UE, « avec des baisses allant de 64% le long de la route des Balkans occidentaux à 8% le long de la frontière terrestre orientale ».

    Cette chute pourrait coïncider avec la chute du régime de Bachar al-Assad en Syrie car les ressortissants syriens, qui ont fui par milliers la dictature et la guerre, représentaient la majeure partie des migrants l’année dernière. Et en ce début d’année, leur nombre a chuté de plus de 90%, passant de 3 806 au premier trimestre 2024 à seulement 234, en 2025.

    Le nombre d’Afghans et de Marocains a également baissé de moitié, ils étaient nombreux ces dernières années à traverser la Slovénie pour tenter de rejoindre l’Italie ou les pays d’Europe du nord sans passer par la Méditerranée, une voie « couteuse » et « dangereuse ». Respectivement, ils étaient 524 et 375 à avoir traversé la frontière ces trois derniers mois.

    En revanche, le nombre de migrants en provenance du Bangladesh et d’Égypte a, lui, augmenté.

    Face à ce flux migratoire qui se tarit, Slovénie, Italie et Croatie se sont mis d’accord en janvier 2025 pour mettre en place des patrouilles à la frontière slovèno-croate en remplacement des contrôles aux frontières. Rétablis en octobre 2023 pour six mois, ces contrôles avaient depuis été prolongés de multiples fois par les trois pays.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/64180/slovenie--forte-baisse-des-entrees-irregulieres-au-premier-trimestre-2

    #asile #migrations #2025 #chiffres #statistiques #réfugiés #Balkans #route_des_Balkans

  • #BalanceTonPorc : le premier mis en cause, Eric Brion, a été fait chevalier de l’ordre national du Mérite – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/droits-des-femmes/balancetonporc-le-premier-mis-en-cause-eric-brion-a-ete-fait-chevalier-de

    Il a été fait chevalier de l’ordre national du Mérite. Eric Brion, le premier homme mis en cause dans le mouvement #BalanceTonPorc en France pour avoir tenu des propos sexuels à la journaliste Sandra Muller, a été décoré par la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, mercredi 2 avril, rapporte Mediapart.

    C’est Eric Brion lui-même qui a relayé l’information sur sa page LinkedIn, en partageant une vidéo du moment où la ministre lui épingle l’insigne. « Un moment d’une immense émotion », écrit l’ancien directeur de la chaîne Equidia, félicité par des personnalités de la télévision.

    Interrogé par le média d’investigation, le cabinet de la ministre du Travail met en avant l’« engagement professionnel » d’Eric Brion au sein de différentes chaînes de télévision, notamment « comme dirigeant chez Equidia », mais aussi son « engagement plus large pour la filière comme fondateur de l’Association des chaînes du câble et du satellite [devenue l’Association des chaînes conventionnées éditrices de services (Acces), ndlr], qu’il a présidé de 2004 à 2008 ». Les propos qu’il a tenus à l’égard de Sandra Muller ont-ils, à un moment, dissuadé la ministre de lui remettre l’ordre national du Mérite ? « Non », répond simplement son cabinet.
    Onde de choc #MeToo

    Cette décoration aurait été décidée en novembre 2013, « par le président de la République François Hollande, sur proposition de la ministre de la Culture Aurélie Filippetti », affirme le cabinet de la ministre. Soit quatre ans avant que ne soient révélée l’affaire. Sans avoir le souvenir de cette décision, Aurélie Filippetti estime auprès de nos confrères de Mediapart que « c’est tout à fait possible » : « Nous recevions des listes de noms pour les décorations, proposés par untel ou untel. Ce devait être, comme cela se fait communément, une forme de gratification symbolique à la fin d’un mandat. En tout cas, ce n’était pas un choix personnel de ma part, car je ne connais pas Eric Brion. » De son côté, Brion élude : « J’ai attendu douze ans pour me la faire remettre. Et rassembler mes amis et ma famille. Est-ce que cela mérite un article ? Pas sûr. »

    Eric Brion est a été le premier visé par le hashtag #BalanceTonPorc, en octobre 2017, en pleine onde de choc #MeToo. Après les révélations de l’affaire Weinstein et des centaines de milliers de témoignages de violences sexistes et sexuelles sur les réseaux sociaux, Sandra Muller, directrice éditoriale de la Lettre de l’audiovisuel, avait rapporté sur Twitter (devenu X) les propos sexuels que lui avait tenus Eric Brion lors d’un événement professionnel : « Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit. »

    Quelques heures plus tôt, la journaliste avait lancé le mouvement en appelant les internautes à raconter leur agression ou harcèlement sexuel. En un an, près d’un million de tweets étaient publiés sous le hashtag #BalanceTonPorc et 18 millions sur #MeToo, a comptabilisé la cour d’appel de Paris en 2021.

    Eric Brion a reconnu avoir prononcé ces propos, concédant avoir été « lourdingue », « couillon » et avoir « mal agi », démentant toutefois tout « harcèlement sexuel », faisant valoir qu’il n’avait pas réitéré ses paroles et qu’il s’était excusé. Très médiatisé, il s’est plaint que sa vie soit « sociale détruite pour quelques mots grossiers » – une condamnation à « mort », a-t-il dénoncé, estimant que « #BalanceTonPorc, c’est de la délation ».
    Victoire judiciaire pour Sandra Muller

    Devant la justice, alors qu’Eric Brion avait attaqué Sandra Muller en diffamation, le tribunal lui a donné raison en 2019, condamnant la journaliste à verser 15 000 euros de dommages et intérêts au plaignant au titre du préjudice moral, 5 000 euros au titre des frais de justice, à retirer le post litigieux et à publier des communiqués judiciaires sur son compte Twitter et dans deux organes de presse.

    Mais en 2021, la décision a été infirmée par la cour d’appel de Paris, qui a au contraire reconnu la « bonne foi » et le « but légitime » de la démarche de Sandra Muller. L’année suivante, la Cour de cassation, plus haute juridiction de France, a débouté définitivement l’ex-patron de la chaîne Equidia, rappelle Mediapart.

    Sollicitée jeudi au sujet de la décoration d’Eric Brion, la journaliste, qui vit à New York, s’est dite « choquée » : « J’ai été réveillée dans la nuit, avec le décalage horaire, par le message d’une amie qui m’a avertie de la décoration de M. Brion et j’ai été plus que troublée. » Une décoration loin des promesses d’Emmanuel Macron de faire de la lutte contre les inégalités femmes-hommes la « grande cause » de ses quinquennats.

  • #Border_memory

    This website was created to remember, document, and research the people on the move who got missing or died along the migratory routes through the Balkans.

    We do not intend to merely collect statistics, but to transform personal grief into collective action for truth and justice for our missing loved ones and for the end of the European border regime.

    This is not meant to be simply a site, but a common and open space to build solidarity alliances across and against borders, to unite sorrow and resistance, to struggle together.

    https://www.bordermemory.org
    #cartographie #visualisation #mémoire #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #frontières #migrations #réfugiés #Balkans #route_des_Balkans #mémorial #mémorial_virtuel #cartographie_narrative

    ping @reka

  • Finland will exit global #land_mine treaty as #Russia fears grow – POLITICO - United Kingdom
    https://www.europesays.com/uk/1126

    Last month, #Poland and the three #Baltic countries announced they would leave the international convention as well. #Finland shares a 1,340-kilometer border with Russia.

    C’est #frontex qui se frotte les mains... dans la mesure où comme tu le sais, les russes mènent une guerre hybride, en laissant les noirs et les arabes envahir la sainte europe depuis leurs frontières. Et avec des champs de mines, ça sera plus facile de ne pas laisser passer les barbares.

  • Government considering sending failed asylum seekers to overseas ’migrant hubs’

    Labour’s strategy to tackle small boat arrivals comes as a number of migrants were pictured arriving in Dover on Saturday.

    The government is considering sending failed asylum seekers, including those arriving on small boats, to overseas ’#migrant_hubs', Sky News understands.

    A Home Office source has told political correspondent #Amanda_Akass that the government is in the “very early stages” of discussions around the idea, and is keen to learn about what Italy has been doing in Albania.

    The right-wing Italian government has built two facilities in the Balkan country aiming to hold migrants there while processing their asylum requests.

    Government sources told The Times newspaper that UK ministers are planning to approach countries in the western Balkans including Albania, Serbia, Bosnia and North Macedonia.

    It comes as a number of migrants were pictured arriving in Dover, Kent, on Saturday.

    On Friday, 246 people made the perilous journey across the Channel from France in five boats - bringing the provisional total for the year so far to 5,271.

    On Thursday, 341 people crossed in six boats.

    This is the earliest point in the year that crossings have reached the 5,000 mark since data on Channel crossings was first reported in 2018.

    Labour’s strategy is expected to differ substantially from the previous Tory government’s Rwanda plan, which aimed to deport all migrants who arrived in the UK illegally, regardless of whether or not their asylum claims would be successful.

    The Supreme Court ruled in 2023 that Rwanda was considered an “unsafe” country.

    Amanda Akass said the Home Office source “won’t say which countries are being considered because they don’t want to pre-empt any discussions which haven’t even officially begun yet”.

    “But I am told that the government is closely looking at the example of Italy, which has a treaty with Albania and has built two detention centres in Albania to house asylum seekers while their claims are being processed there.”

    Akass noted there have been legal challenges to that deal, adding: “But it looks like the government are watching that to see what the outcome may be.”

    https://news.sky.com/story/government-considering-sending-failed-asylum-seekers-to-overseas-migrant-h
    #accord #UK #Angleterre #Balkans #externalisation #migrations #réfugiés #asile #return_hubs #pays_tiers #renvois #expulsions #Manche

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    ajouté à la métaliste sur les tentatives de différentes pays européens d’#externalisation non seulement des contrôles frontaliers (►https://seenthis.net/messages/731749), mais aussi de la #procédure_d'asile dans des #pays_tiers :
    https://seenthis.net/messages/900122

  • Srpska policija već koristila zvučno oružje i to na migrantima
    –> La police serbe a déjà utilisé des #armes_sonores sur des migrants

    Organizacija koja se bavi pravima izbeglica utvrdila da je srpska policija još u novembru 2023. koristila „uređaj sličan oružju za proizvodnju zvuka“ prilikom prisilnog iseljavanja izbeglica iz objekta u kome su boravili u predgrađu Sombora, otkriva BIRN

    Dana 7. novembra 2023. godine, oko 13 časova, oko 35 izbeglica – mahom muškaraca, uz nekoliko žena i dece – panično je pokušalo da pobegne kroz polja nadomak napuštene kuće u predgrađu Sombora. Policija je upravo ušla u njihovo prebivalište, a iz pravca polja iza naselja odjednom je odjeknuo glasan, prodoran zvuk.

    „Redovno policijski vozilo Srbije je ušlo u naselje, što je uticalo da ljudi pobegnu u polja iza naselja. Delovalo je kao da je policija bila postavljena u polju iza naselja kako bi presrela ljude koji su pobegli“, navodi se u belešci jedne od organizacija koja je bila na licu mesta, a u koju je BIRN imao uvid.

    Ipak, iz nečeg što je izgledalo kao standardna policijska akcija izdvojila se specifična stvar.

    „Tokom pometnje, glasan probadajući zvuk – višeg tonaliteta od pucnja – emitovan je iz uređaja koji je ličio na oružje, a koji je koristio jedan od policajaca u polju iza mesta prebivališta [izbeglica]. Pretpostavlja se da je ovo korišćeno da se ubrza proces hvatanja ljudi koji su pobegli“, navodi se u belešci.

    Ovo saznanje BIRN-a da je neka vrsta zvučnog oružja upotrebljena protiv izbeglica, poklapa se sa onim što je kratko navedeno u izveštaju „Grupe za praćenje nasilja na granicama“ (Border Violence Monitoring Group) koju čini više organizacija koje se bave pravima izbeglica i migranata, objavljenom u novembru 2024. godine.

    U njemu se navodi da je srpska policija koristila „uređaj sličan oružju za proizvodnju zvuka“ prilikom prisilnog iseljavanja izbeglica iz objekta u kome su boravili.

    „Poslednje, ali ne manje važno, osoblje Collective Aid-a izvestilo je da su videli upotrebu uređaja sličnog oružju koji koristi zvučne talase kako bi proizvodio buku i plašio ljude tokom iseljenja“, navodi se u izveštaju.

    U izveštaju koji se bavi nadzornom tehnologijom koja se koristi nad izbeglicama i migrantima, ističe se i da se sumnja da je u pitanju LRAD uređaj.

    LRAD je engleska skraćenica od Long range acustic device, odnosno zvučnog uređaja dugog dometa.

    U novembru 2023, srpska policija je već neko vreme sprovodila najopsežniju akciju protiv naoružanih krijumčarskih bandi poreklom iz Avganistana, Maroka i Sirije. Tokom tih akcija stručnjaci za prava ljudi u pokretu su ukazivali i na kršenje prava običnih izbeglica, koje nemaju veze sa kriminalnim aktivnostima.

    U opsežnoj policijskoj akciji, koja je trajala više meseci, angažovani su i pripadnici redovne policije, interventnih snaga jedinica policije, žandarmerije, ali i Specijalne antiterorističke jedinice, SAJ.
    Koje zvučno oružje je korišćeno 15. marta u Beogradu?

    Ovaj događaj posebno je značajan u svetlu velikog protesta u Beogradu 15. marta, kada se pojavila sumnja da je zvučno oružje korišćeno protiv građana tokom petnaestominutne tišine, što su demantovali MUP, BIA i Vojska Srbije.

    Ne samo da su demantovali korišćenje oružja na protestu, već i inače. Ministar unutrašnjih poslova Ivica Dačić za dnevni list Danas je potvrdio da policija poseduje sonično oružje ili kolokvijalno nazvano „zvučni top“, tj. da su ti sistemi, koji su kupljeni 2021. godine, u vlasništvu MUP-a.

    Dačić je izjavio da „ti sistemi stoje „u magacinima u kutijama“ i da nisu u upotrebi, jer ne postoji zakon kojim bi njihovo korišćenje bilo dozvoljeno“.

    https://birn.rs/srpska-policija-zvucno-oruzje-migranti-sombor

    #Long_Range_Acoustic_Device (#LRAD) #frontières #migrations #armes_sonores #technologie #son #armes_soniques
    #Serbie #Balkans #route_des_Balkans

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    En 2021, en Grèce :
    La Grèce allonge son mur et le fortifie avec un #mur_acoustique...
    https://seenthis.net/messages/920711

  • At the Heart of Fortress Europe II: The Politics of Fear. Austria’s Role in Border Externalisation Policies in the Balkans

    This study provides a broad mapping of Austrian-based actors, organisations, and multilateral cooperation involved in the #push-backs of people on the move. For their part, the Austrian-based actors are heavily involved in the border externalisation policies of the whole European Union.

    Austria has been active in border regime externalisations and policing in the Balkans for decades. Its actions are often implemented through different platforms, networks, and modes of cooperation that include other EU countries on bi- and multilateral levels.

    Austria’s preferred method in strengthening externalisation structures is to build strong connections with politicians in the region, in exchange for presumed assistance in the uncertain and slow-moving European integration processes, accompanied by the strengthening of the economic ties and investments in the region.

    Part II of the study shows that on the ground, police agencies are more involved in “managing” migrations than are legal experts or humanitarian organisations. This approach has led to shifting the main focus away from establishing structures that meet the needs of people on the move and basic human rights – including the right to asylum or simply the right to freedom of movement – to combating smugglers, presented as the biggest challenge for the states, borders, and migrants. In this regard, the Austrian approach mirrors the EU one.

    https://transform-network.net/publication/at-the-heart-of-fortress-europe-ii-the-politics-of-fear
    #rapport #Autriche #externalisation #migrations #réfugiés #asile #frontières #Balkans #route_des_Balkans #refoulements

  • La Suisse continue les renvois en Croatie, malgré les alertes sur les refoulements violents - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/63179/la-suisse-continue-les-renvois-en-croatie-malgre-les-alertes-sur-les-r

    La Suisse continue les renvois en Croatie, malgré les alertes sur les refoulements violents
    Par La rédaction Publié le : 06/03/2025
    Interpellé par une coalition d’ONG, le gouvernement suisse maintient sa politique de renvois des demandeurs d’asile dublinés vers la Croatie. Les ONG demandaient la fin de ces transferts en raison des alertes sur des « pushbacks » violents et sur le manque d’infrastructures médicales. Les autorités suisses ont indiqué, lundi, vouloir poursuivre les renvois de demandeurs d’asile vers la Croatie, malgré les interpellations d’ONG qui ont dénoncé le traitement réservé aux demandeurs d’asile dans ce pays.
    Le 20 février, l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), qui compte une dizaine de membres dont Amnesty International et Caritas, avait recommandé de renoncer aux transferts Dublin vers la Croatie, en particulier pour les « personnes vulnérables ayant besoin de soins médicaux réguliers » et celles ayant été « victimes de violences policières en Croatie ».
    Elle pointe en effet une infrastructure médicale « insuffisante », et accuse la police croate d’actes de violence vis-à-vis des personnes migrantes notamment lors des « pushbacks ». Lors d’une mission effectuée en octobre 2024, l’OSAR a constaté les « faiblesses du système de l’asile croate » sur plusieurs plans : lenteur du traitement des demandes, saturation des structures de soins physiques et psychiques, manque d’accès à des interprètes... « Un arrêt des transferts vers la Croatie n’est pas indiqué à l’heure actuelle », a répondu le Secrétariat d’Etat suisse aux migrations (SEM) en début de semaine, rappelant qu’il « évalue au cas par cas si le retour vers la Croatie est admissible et raisonnablement exigible », rapporte 20 Minutes.
    Le gouvernement opère une montée en puissance de ces renvois depuis deux ans, avec un tournant en 2023. Cette année-là en effet, 206 requérants d’asile ont été renvoyés vers la Croatie en 2023. Dix fois plus que les années précédentes, enregistrait alors la RTS. Au niveau européen, la Croatie est devenu le second pays le plus sollicité pour des transferts Dublin, derrière l’Italie, selon les données Eurostat. Depuis 2020, le nombre de requêtes n’a cessé d’augmenter, jusqu’à dépasser le seuil des 7 000 requêtes en 2023 (les données 2024 ne sont pas encore disponibles).
    Le Secrétariat d’Etat suisse aux migrations considère en outre qu’"à ce jour, aucun lien n’a été établi entre les renvois dans le cadre de la procédure de Dublin et les pushbacks à la frontière". (...)
    Le gouvernement croate s’était défendu auprès de la RTS : « La Croatie respecte complètement les standards européens. Nous avons une tolérance zéro pour toute action policière illégale. Nous l’avons clairement fait comprendre aux policiers à la frontière par des consignes écrites et des formations ». Sollicité par InfoMigrants au sujet des accusations de nouveau portées par l’OSAR, le ministère de l’Intérieur croate n’a, pour l’heure, pas répondu à nos questions.
    La Croatie se trouve sur la route dite des Balkans, empruntée par de nombreux migrants du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Ceux-ci qui arrivent en Grèce depuis la Turquie et traversent ensuite les Balkans pour rejoindre la Croatie. Le pays est membre de l’espace Schengen depuis le 1er janvier 2023 - ce qui, en théorie, permet aux exilés de sortir du pays et passer en Slovénie ou en Italie voisines sans être contrôlés.
    « Un total de 26 534 passages illégaux de frontières ont été enregistrés au cours des dix premiers mois de 2024 », avait détaillé fin 2024 le ministère croate de l’Intérieur. La plupart de ces migrants sont originaires d’Afghanistan, de Syrie, de Turquie, de Russie et d’Egypte. Malgré les dénégations du gouvernement croate, InfoMigrants a recueilli ces dernières années plusieurs témoignages de « pushbacks », ces refoulements à chaud pourtant illégaux.
    Antérieurement, en mai 2020, InfoMigrants avait reçu des photographies d’hommes avec des croix orange marquées à la bombe de peinture sur leur crâne. Ces hommes accusaient la police croate. Peter Van Der Auweraert, responsable de l’Organisation internationale des migrations (OIM) en Bosnie, avait alors confirmé à InfoMigrants au moins 18 cas similaires. Le ministère croate de l’Intérieur avait réfuté dans un communiqué (en réaction à un article du Guardian relayant des photographies similaires) des accusations « complètement absurdes, voire dangereuses s’il on prend en compte le fait qu’elles sont portées pendant l’époque du ramadan ».
    Fin 2021, le consortium de journalistes Lighthouse Reports avait réussi à filmer un violent refoulement mené par les Croates. On y voyait des hommes masqués frapper avec leurs matraques des jeunes migrants en leur intimant de retourner sur l’autre rive, vers la Bosnie. Ces hommes faisaient partie de la mission dite « Koridor », une unité spéciale créée en 2016 et financée en partie (uniformes, hébergement, indemnités journalières) avec l’argent de l’Union européenne, via leur Fonds de sécurité intérieure. Confrontée à ces investigations, la Commission européenne s’était dite « fermement » opposée aux pushbacks. « Nous avons indiqué aux autorités nationales que de telles pratiques sont illégales et doivent faire l’objet d’une enquête ».
    Mais la pratique perdure. Sur la seule année 2023, l’ONG Danish Refugee Coucil décomptait 3 323 refoulements de la Croatie vers la Bosnie. La moitié avec des violences physiques. (...) Dans ce contexte, en novembre 2023, l’Italie, la Croatie et la Slovénie ont convenu de lancer des patrouilles conjointes à leurs frontières. Les trois pays échangent aussi régulièrement des informations clé sur la surveillance de leurs zones frontalières

    #Covid-19#migrant#migration#croatie#italie#slovenie#bosnie#balkan#suisse#politiquemigratoire#sante#pushback

  • Sur les traces de la présence grecque en #Turquie : le romeika et ses locuteurs
    https://metropolitiques.eu/Sur-les-traces-de-la-presence-grecque-en-Turquie-le-romeika-et-ses-l

    La Turquie conserve aujourd’hui une communauté grécophone, principalement dans la région de la #mer_Noire. Pistant les derniers locuteurs du grec pontique, Faruk Bilici revient sur leurs liens avec l’État turc, la religion musulmane et la culture nationale. Le #Caucase des langues et des cultures trouve son prolongement dans la mer Noire orientale turque. Sur les rives méridionales de cette mer autrefois nommée Pont-Euxin – d’où l’adjectif « pontique » – par les Grecs, la survivance des langues rares #Essais

    / #histoire, Turquie, mer Noire, #langue, Caucase, #islam, #Grèce, #Balkans, #nationalisme, #Trabzon

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_bilici.pdf

  • « L’Europe refuse de voir que Vladimir Poutine mène en réalité une guerre contre elle et contre l’Occident »

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/02/24/l-europe-refuse-de-voir-que-vladimir-poutine-mene-en-realite-une-guerre-cont

    Qu’attend encore l’Europe ? Il y a dix ans, lorsque les troupes russes ont occupé la Crimée et lancé une insurrection de criminels et de séparatistes dans l’est de l’Ukraine, on pouvait encore se permettre d’être « choqué » et « stupéfait ». Même à la veille du 24 février 2022, après des mois de déploiement de centaines de milliers de soldats russes, on refusait encore de croire qu’on en arriverait à un véritable conflit territorial de grande ampleur contre un pays européen.

    Depuis trois ans maintenant, l’Europe voit presque quotidiennement aux informations ce qui se passe à moins de deux heures de vol d’ici : le bombardement incessant des villes, la fuite de millions de personnes hors des zones de guerre et au-delà des frontières, d’innombrables crimes perpétrés contre la population civile, des frappes de missiles à proximité d’installations nucléaires – bref, l’anéantissement des moyens de subsistance de la nation ukrainienne. Il s’agit de plonger l’Ukraine dans le froid et l’obscurité et de la contraindre à la capitulation.

    Tout cela ne se passe pas quelque part on ne sait où mais en plein cœur de l’Europe. C’est Kiev, ville millénaire avec ses cathédrales et ses monastères, qui est touchée. A Kharkiv, métropole aux gratte-ciel modernistes des années 1920, des quartiers entiers sont en ruine. Même la « petite Vienne » (Lviv, l’ancienne Lemberg habsbourgeoise) n’a pas été épargnée par les missiles russes. Odessa, dont nous connaissons la promenade et l’escalier du Potemkine grâce au film de Sergueï Eisenstein (1898-1948), Le Cuirassé Potemkine (1927), est livrée aux attaques de drones iraniens. Comment réagiraient les Européens si des bombes tombaient sur Trieste, en Italie, ou sur Marseille ?

    Une dangereuse illusion
    C’est une dangereuse illusion de supposer qu’il ne s’agit que d’un conflit russo-ukrainien. Depuis le début, les dirigeants russes n’ont laissé planer aucun doute, ni par leurs déclarations ni par leurs actes, sur leurs objectifs : reprendre le contrôle de l’Europe centrale et orientale et restaurer l’Europe de Yalta, que Milan Kundera (1929-2023) avait appelée un jour l’« Occident kidnappé », dans un article paru en 1983 dans la revue Le Débat (Gallimard).

    Un avant-goût nous en est donné dans les territoires occupés de l’est de l’Ukraine, avec les camps d’emprisonnement et les chambres de torture. L’Europe, qui détourne les yeux, refuse de voir que Vladimir Poutine mène en réalité une guerre contre l’Europe et l’Occident.

    Cela est pourtant exprimé ouvertement dans un langage qui combine les mythes panslavistes du théoricien du XIXe siècle, Nikolaï Danilevski (1822-1885), avec les diatribes des propagandistes moscovites actuels contre la « Gayrope », la décadence de l’Occident et le « libéralisme totalitaire ». Les idéologues de Poutine connaissent la vulnérabilité du monde transatlantique, ils analysent les rivalités au sein de l’Union européenne ainsi que les conflits sociaux propres à chaque Etat. Poutine est passé maître dans l’art d’attiser les peurs et les ressentiments, mais il est surtout un expert dans l’instrumentalisation de la peur que la Russie, puissance nucléaire, utilise à tout moment pour faire du chantage – non sans succès, comme en témoigne le déclin de la solidarité envers l’Ukraine dans de nombreux pays européens.

    La guerre de Poutine ne vise pas seulement à épuiser les Ukrainiens après plus de mille jours de combats, mais aussi à saper la volonté d’aide de l’Occident, à engendrer l’usure et la résignation d’une société submergée par les crises. Il ne s’agit pas seulement de désinformation ciblée ou de la destruction de la crédibilité par un relativisme généralisé du type « Nothing Is True and Everything Is Possible » (« Rien n’est vrai et tout est possible »), du journaliste britannique Peter Pomerantsev, mais aussi d’actions concrètes de subversion et de sabotage, qui ont récemment visé des infrastructures militaires.

    La #Russie de #Poutine cherche à devenir le centre de tous les courants #nationalistes et hostiles à l’Europe. « #Briser_l’épine_dorsale de l’Europe », telle est la formule de Sergueï Karaganov, si nécessaire par l’emploi d’armes nucléaires, mais l’option la plus avantageuse serait un accord avec le président américain, sans que ni l’Ukraine ni les Européens aient leur mot à dire.

    Les Européens, qui ont pu compter jusqu’ici sur la protection militaire des Etats-Unis, doivent désormais apprendre à ne compter enfin que sur eux-mêmes, comme l’a bien montré le discours arrogant et provocateur tenu le 14 février par le vice-président J. D. Vance lors de la Conférence de Munich sur la sécurité. La capitulation de l’Ukraine aux conditions russes – la cession des territoires occupés, le désarmement, la neutralité sans garanties de sécurité – reviendrait à livrer une nation européenne aux appétits d’une puissance néo-impérialiste à tendance fascisante.

    Manifestations d’#érosion
    Il n’est pas possible de savoir si et comment les Européens, abandonnés par un Donald Trump version #MAGA (« Make America Great Again »), réussiront à s’affirmer. Il ne s’agit pas seulement d’être capable de se défendre et de faire la guerre, l’enjeu est aussi le combat idéologique contre le poutinisme et sa vision du monde. Une nouvelle frontière et un nouveau front traversent aujourd’hui le continent. Ce sont surtout les #Ukrainiens, les #Polonais et les #Baltes qui sont en première ligne pour défendre l’Europe, bientôt suivis, il faut l’espérer, par une « alliance des volontaires » qui savent ce qui est en jeu.

    Des manifestations d’érosion sont aujourd’hui partout visibles, qu’il s’agisse de la querelle sur l’immigration, du coût de la défense, du fossé croissant entre les riches et les pauvres, du conflit entre les intérêts nationaux particuliers et le bien commun à l’Europe.

    Pour relever ce défi, il est utile de se replonger dans l’histoire des grands débats intellectuels européens du XXe siècle. Je pense à La #Trahison des clercs (Grasset, 1927) du philosophe Julien Benda (1867-1956), écrit en pleine crise morale des années 1920, mais surtout au combat de toute une vie mené par Raymond Aron (1905-1983) contre la tentation totalitaire, et surtout au message plein d’espoir qu’il avait formulé il y a près d’un demi-siècle, certes dans un tout autre contexte historique, dans son livre Plaidoyer pour l’Europe décadente (Robert Laffont, 1977) : « Les crises de l’Europe ne sont pas seulement des signes d’épuisement, de résignation et d’angoisse face à l’avenir, mais aussi des signes de la vitalité persistante d’une civilisation qui, par l’autocritique et l’autocorrection, est en mesure de se réinventer. »

    Personne ne peut dire ‒ et les historiens ont appris que toute histoire est ouverte ‒ comment l’Europe sortira de sa #crise au terme d’une longue période d’après-guerre.

    (Traduit de l’allemand par Pierre Deshusses)

    #Karl_Schlögel est un historien allemand. Il a reçu, le 11 décembre 2024, le 18e prix Jacques Delors du livre européen pour son essai « L’Avenir se joue à Kyiv. Leçons ukrainiennes », traduit de l’allemand et préfacé par Thomas Serrier (Gallimard, 2024).

    • Là aussi c’est délirant ! Il faudrait qu’on aille mourir la bas ? Parce que les russes veulent annexer Sedan ? Pour reprendre certaines infos du Monde, ça arrivera avant ou après que Poutine meure du cancer ? Ou que son peuple l’ait largué ? Est-ce qu’il reste assez de soldats russes pour nous envahir (cause l’Ukraine dominait le combat armé et les soldats russes passaient au « hachoir à viande ») ? Bah, la seule chose de sûr c’est que ce journal n’a même plus sa place au sortir du trône.
      C’est des dingues, ou alors ils veulent leur livre de chair...

    • Une "livre de chair", vous mégotez @butadaie ! Dans ces affaires, de masse, on compte au minimum par quintal.

      Et puis n’en déplaise aux amateurs de clichés fangeux qui viennent en meute avant, pendant et après les créateurs, ce type qui veut se venger des humiliations que lui ont fait subir les chrétiens, à lui et son peuple, ce

      (...) Shylock, méprisé de tous, tient aussi une longue tirade sur l’humanité des Juifs et l’absurdité des préjugés antisémites qui en font, dans certaines représentations, un personnage tragique voire sympathique.

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Shylock

      « Un Juif n’a-t-il pas des yeux ? Un Juif n’a-t-il pas des mains, des organes, des dimensions, des sens, de l’affection, de la passion ; nourri avec la même nourriture, blessé par les mêmes armes, exposé aux mêmes maladies, soigné de la même façon, dans la chaleur et le froid du même hiver et du même été que les Chrétiens ? Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ?
      Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne mourrons-nous pas ? Et si vous nous bafouez, ne nous vengerons-nous pas ? »

      William Shakespeare, Le Marchand de Venise, Acte III, scène 114

  • #serbia: uno sguardo d’insight sulle mobilitazioni
    https://radioblackout.org/2025/02/serbia-uno-sguardo-dinsight-sulle-mobilitazioni

    Il 28 Gennaio Miloš Vučević ha dato le dimissioni a seguito delle grandi #proteste nel paese, ma allo stato attuale è ancora il primo ministro e l’assemblea serba non ha ancora approvato le dimissioni. Anche qualora venissero approvate rimarrebbe primo ministro ad interim. Qusto non ha indebolito minimamente le mobilitazioni che hanno continuato ad occupare […]

    #Blackout_Inside #L'informazione_di_Blackout #Balcani
    https://cdn.radioblackout.org/wp-content/uploads/2025/02/SerbiaBalcanInsight.mp3

  • Immigration : démantèlement d’un réseau de passeurs afghans dans plusieurs pays d’Europe - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/62857/immigration--demantelement-dun-reseau-de-passeurs-afghans-dans-plusieu

    Immigration : démantèlement d’un réseau de passeurs afghans dans plusieurs pays d’Europe
    Par La rédaction Publié le : 14/02/2025
    Seize ressortissants afghans, soupçonnés d’appartenir à un réseau de trafiquants, ont été arrêtés en Belgique, en Italie et au Royaume-Uni. Ils proposaient des passages dans la Manche contre de grosses d’argent, en communiquant avec les candidats à l’exil sur TikTok notamment.Seize personnes ont été arrêtées en Belgique, au Royaume-Uni et en Italie, dans le cadre d’une opération de police internationale coordonnée par un juge belge, ciblant un réseau afghan de passeurs de migrants. Ce réseau est soupçonné d’avoir extorqué de grosses sommes d’argent à des exilés pour les amener en Angleterre depuis le Moyen-Orient, via la Turquie, la route des Balkans puis les côtes françaises ou belges, a annoncé jeudi 13 janvier le parquet d’Anvers.
    Les suspects, présentés comme membres d’"une organisation criminelle afghane", proposaient de franchir la Manche dans des voitures, des camions mais aussi par la voie maritime dans de petits bateaux, communiquant avec leurs victimes via TikTok notamment, explique le parquet. Huit d’entre eux ont été interpellés en Belgique, principalement en Flandre (nord), six au Royaume-Uni et les deux autres en Italie, lors de perquisitions menées simultanément mercredi dans le cadre d’une enquête ouverte en octobre 2023 à Anvers.
    Au Royaume-Uni, les arrestations ont eu lieu à Leicester et Birmingham, dans le centre de l’Angleterre, ainsi que dans l’Essex (sud-est du pays), a précisé l’agence britannique de lutte contre la criminalité (NCA) dans un communiqué.Comme pour ceux arrêtés en Italie, ces suspects étaient visés par un mandat d’arrêt émis par les autorités belges. Trois d’entre eux ont comparu mercredi devant le tribunal de Westminster, à Londres, où une procédure d’extradition a débuté. Trois autres devaient comparaître jeudi devant cette même juridiction.
    Le parquet d’Anvers a dénoncé les pratiques « inhumaines » reprochées aux suspects, motivées par des raisons « purement financières », et faisant courir des risques insensés aux exilés « souvent dans des situations vulnérables ou désespérées ».
    « La menace posée par la criminalité organisée liée à l’immigration est chronique, et nous avons 70 enquêtes actuellement en cours sur les gangs impliqués », a souligné de son côté le directeur adjoint de la NCA Craig Turner.En décembre 2024, la NCA avait arrêté trois Afghans au Royaume-Uni pour des infractions similaires, dans le cadre d’une enquête distincte. Ces trois hommes sont également réclamés par la justice belge.
    « Les mesures que nous avons prises montrent que notre travail visant à perturber et à démanteler les gangs à l’origine de cette criminalité ne s’arrêtera pas, et nous travaillerons avec nos partenaires internationaux pour contribuer à traduire les auteurs présumés devant les tribunaux », a également déclaré Craig Turner.
    Depuis quelques mois, le Royaume-Uni multiplie les mesures de sanction à l’encontre des passeurs. À son arrivée au pouvoir en juillet 2024, le Premier ministre britannique Keir Starmer avait promis de renforcer la lutte contre les réseaux de passeurs, qu’il entend traiter « comme des terroristes ».En janvier, le ministre des Affaires étrangères David Lammy a annoncé un plan pour s’attaquer financièrement aux réseaux de trafiquants : il prévoit, comme pour les sanctions internationales, de geler les avoirs des passeurs et des fabricants de « small boats » qui collaboreraient avec les trafiquants. « Cela contribuera à prévenir, combattre, dissuader et perturber l’immigration irrégulière et le trafic de migrants vers le Royaume-Uni », avait déclaré le ministre.
    Ce nouveau dispositif, qui doit entrer en vigueur dans le courant de l’année, permettra « de cibler les individus et entités qui organisent ces dangereuses traversées » de la Manche, et qui « réalisent d’importants profits en exploitant des personnes vulnérables », avait insisté le Foreign Office.Malgré toutes ces mesures, les traversées de la Manche, à bord d’embarcations précaires et non adaptées à la navigation, ne faiblissent pas. Au contraire. En 2024, 36 816 personnes ont débarqué sur les rives britanniques depuis les côtes françaises. C’est 25 % de plus qu’en 2023. Ce chiffre est toutefois en deçà du record atteint en 2022, avec 45 774 arrivées.

    #Covid-19#migrant#migration#france#royaumeuni#belgique#italie#balkan#turquie#trafic#migrationirreguliere#sante

  • #serbia: le #proteste contro il governo costringono alle dimissioni il premier Vučević
    https://radioblackout.org/2025/01/95267

    Il 1° novembre scorso una pensilina della stazione ferroviaria di Novi Sad è crollata, provocando la morte di 15 persone. “Siamo tutti sotto la pensilina“ è una frase che non ha cessato di risuonare dal 1° novembre, data di inizio di massicce proteste da parte di cittadini serbi che ogni venerdì alle 11:52 bloccano le strade […]

    #L'informazione_di_Blackout #Balcani
    https://cdn.radioblackout.org/wp-content/uploads/2025/01/MARCOSIRAGUSAinfo.mp3

  • #Frontex : l’UE va signer un accord de coopération avec la #Bosnie-Herzégovine

    Le Conseil a adopté ce jour une décision autorisant l’UE à signer un accord avec la Bosnie-Herzégovine concernant les activités opérationnelles menées par l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex).

    Cet accord permettra à l’UE et à la Bosnie-Herzégovine d’organiser des opérations conjointes associant des garde-frontières de Frontex et de Bosnie-Herzégovine. Il prévoit également que les équipes de Frontex affectées à la gestion des frontières peuvent être déployées en Bosnie-Herzégovine et il permettra à Frontex d’aider la Bosnie-Herzégovine à gérer les flux migratoires, à lutter contre l’immigration illégale et à combattre la criminalité transfrontière.

    Contexte

    Afin d’accomplir ses tâches, Frontex peut mener des actions relatives à la #gestion_des_frontières de l’UE sur le territoire d’un pays tiers, sous réserve de l’accord de ce pays.

    Depuis l’adoption, en 2019, d’un nouveau règlement relatif à l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, le personnel de Frontex peut exercer des pouvoirs d’exécution dans un pays tiers, tels que les vérifications aux frontières et l’enregistrement des personnes.

    En 2022, le Conseil a autorisé l’ouverture de #négociations avec quatre partenaires des Balkans occidentaux sur la coopération avec Frontex. Depuis lors, l’UE a signé des accords de coopération en matière de gestion des frontières avec la Serbie, la Macédoine du Nord et le Monténégro.

    https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2025/01/27/frontex-eu-to-sign-cooperation-agreement-with-bosnia-and-herzegovin

    #migrations #frontières #externalisation #Balkans #route_des_Balkans #réfugiés

  • Sur la route migratoire entre l’Algérie et l’Espagne, une hausse effrayante des naufrages - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/61991/sur-la-route-migratoire-entre-lalgerie-et-lespagne-une-hausse-effrayan

    Sur la route migratoire entre l’Algérie et l’Espagne, une hausse effrayante des naufrages
    Par Marlène Panara Publié le : 31/12/2024 Dernière modification : 02/01/2025
    D’après l’ONG espagnole Caminando Fronteras, plus de 500 personnes sont mortes en 2024 sur la route migratoire menant de l’Algérie à la péninsule ibérique ou à l’archipel des Baléares. Des chiffres qui font de ce passage en mer Méditerranée la deuxième route la plus meurtrière pour l’Espagne, derrière celle des Canaries.
    Youssef* connaissait bien la mer. Le jeune Algérien de 26 ans a plusieurs fois été pêcheur, et était bon nageur. Il a aussi été saisonnier sur le littoral algérien. Cette nuit de fin novembre, lorsqu’il a embarqué avec 12 autres personnes dans un petit bateau à moteur sur une plage d’Alger pour gagner l’Espagne, « il avait conscience des risques qu’il prenait », assure sa cousine qui préfère garder l’anonymat. « Mais il avait tellement de copains qui étaient partis comme ça et qui avaient réussi … » Mais Youssef n’arrivera jamais à Alicante, sa destination. Après cinq kilomètres seulement en mer, son embarcation prend l’eau. S’ensuit une altercation avec le conducteur du bateau, qui finit par se renverser. « Tout le monde est tombé à l’eau, y compris une famille avec une enfant de 6 ans et un bébé », raconte sa cousine. Les gardes-côtes algériens sont prévenus, mais la localisation du naufrage n’est pas la bonne. Les naufragés, qui n’ont pas de gilet de sauvetage, attendent près de six heures en pleine mer. Youssef fait grimper la petite fille sur un bidon d’essence. Lorsqu’un groupe de jeunes, prévenus de leur départ, parvient finalement à les retrouver, il est trop tard. Le bébé et sa mère sont retrouvés morts. Youssef et deux autres passagers sont portés disparus.
    Ce naufrage est loin d’être un cas isolé. Sur cette route migratoire qui relie l’Algérie à l’Espagne, les drames sont « de plus en plus fréquents », et « des cadavres apparaissent sur la côte [espagnole] plusieurs jours après [...] que les secours ont été alertés », indique la Garde civile dans un document consulté par le média Levante. D’après le dernier rapport de l’ONG Caminando Fronteras publié le 26 décembre, au moins 517 personnes sont mortes sur cette voie en 2024. Elles étaient 464 en 2022, et 191 en 2021.
    Cette année aussi, 26 embarcations ont « totalement disparu » en mer, avec tous leurs passagers. Des chiffres qui font de ce passage en Méditerranée la deuxième route la plus meurtrière pour l’Espagne, derrière celle des Canaries. Empruntée depuis plusieurs années par les candidats à l’exil, cette voie s’est réellement consolidée depuis 2021, affirme Caminando Fronteras. Les passagers déboursent entre 2 000 et 4 000 euros, parfois plus, pour effectuer ce trajet à bord de petits bateaux à moteurs de 60 à 140 chevaux, totalement inadaptés à ce type de traversées en pleine mer. En 2024, 13 952 migrants ont été comptabilisés sur cette voie.
    Les candidats au départ embarquent depuis Oran, Mostaganem, Tipaza ou Alger et naviguent en direction du sud de la péninsule ibérique. Ils sont parfois secourus au large d’Almeria, Carthagène, Murcie ou Alicante. Mais depuis 2022, la route algérienne se déplace de plus en plus à l’est, en direction des îles Baléares, une zone moins surveillée. Le 29 décembre, 18 personnes ont atteint l’île de Formentera, et ont été rejointes par 74 migrants arrivés dans trois embarcations distinctes quelques heures plus tard. Depuis le 1er janvier 2024, 5 793 personnes au total ont débarqué aux Baléares, soit 154,3 % de plus que les 2 278 exilés arrivés dans l’archipel en 2023, d’après les chiffres de l’agence de presse espagnole EFE.
    Cet itinéraire, moins couvert par les secours, est tout aussi « périlleux », prévient Caminando Fronteras. « Les dangers de cette traversée sont même plus importants en raison des distances plus longues, mais aussi parce qu’il existe un risque élevé de perdre le cap et de se retrouver dans les zones les plus hostiles de la mer Méditerranée ».
    Sur cette voie, les profils des « harragas », littéralement « brûleurs de frontières », sont aussi plus vulnérables. Le rapport constate la présence régulière « d’adolescents qui voyagent seuls », et qui cherchent à rejoindre de la famille en Europe. « Pour beaucoup, en France », précise-t-on. Ces mineurs sont habituellement originaires d’Algérie, mais de plus en plus de jeunes subsahariens, syriens, ou palestiniens embarquent, eux aussi, depuis les côtes algériennes. D’après l’ONG espagnole, « près de 40 % des personnes qui s’engagent sur cette route maritime des Baléares proviennent désormais de pays autres que l’Algérie ».
    Les jeunes enfants accompagnés de leurs mères sont également de plus en plus nombreux. « Beaucoup d’entre eux étaient précédemment passés par la Libye et la Tunisie avant d’être refoulés dans le désert », précise l’association. Ces dernières années, les embarcations de fortune parties d’Algérie se remplissent souvent de familles entières. En octobre 2021, Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) décrivait ce phénomène comme « une ’harga [migration en français]’ familiale inédite », qui trouve racine dans la morosité économique plombant le pays depuis 2014 et la chute du cours du pétrole.
    « En Algérie, il n’y a pas la guerre. Mais le chômage des jeunes, même diplômés, poussent la plupart à partir. Dans ce pays, si vous ne connaissez personne pour vous pistonner, vous n’avez pas d’avenir », explique la cousine de Youssef. « Et quand vous voyez que la plupart des gens que vous connaissez ont quitté le pays, sont heureux ailleurs et que vous, vous continuez à galérer malgré les années, partir devient votre seul objectif ». « Ici, même les jeunes avec un diplôme ne trouvent pas de travail, et ils s’ennuient », avait également confié en mai dernier Kenza, dont le frère originaire de Tizi Ouzou avait disparu en mer. « Hamza disait que la vie en Algérie, c’était fatigant. Alors quand il est entré à l’université de sociologie, il a rapidement fait des demandes de visa étudiant. À chaque fois, elles ont été refusées ». Youssef avait lui aussi d’abord envisagé de partir de chez lui « dans les règles », sur les conseils de sa famille. Le jeune homme avait fait des demandes de visa pour l’Union européenne, le Canada et le Royaume-Uni. Mais, comme Hamza, aucune ne lui a été accordée. Aujourd’hui, la mère de Youssef « pense qu’il est en prison en Espagne ». « On ne lui a pas dit ce qu’il s’était vraiment passé, car elle a une santé très fragile », confie sa cousine. Tous les jeunes du quartier, en revanche, ont appris la mort de Youssef et des autres passagers. « Le lendemain du drame, beaucoup embarquaient à leur tour dans un bateau ».

    #Covid-19#migrant#migration#sante#algerie#espagne#baleares#routemigratoire#mortalite#sante#jeunesse#mediterranee

  • Sur la route migratoire entre l’#Algérie et l’#Espagne, une hausse effrayante des #naufrages

    D’après l’ONG espagnole #Caminando_Fronteras, plus de 500 personnes sont mortes en 2024 sur la route migratoire menant de l’Algérie à la péninsule ibérique ou à l’archipel des #Baléares. Des chiffres qui font de ce passage en mer Méditerranée la deuxième route la plus meurtrière pour l’Espagne, derrière celle des Canaries.

    Youssef* connaissait bien la mer. Le jeune Algérien de 26 ans a plusieurs fois été pêcheur, et était bon nageur. Il a aussi été saisonnier sur le littoral algérien. Cette nuit de fin novembre, lorsqu’il a embarqué avec 12 autres personnes dans un petit bateau à moteur sur une plage d’Alger pour gagner l’Espagne, « il avait conscience des risques qu’il prenait », assure sa cousine qui préfère garder l’anonymat. « Mais il avait tellement de copains qui étaient partis comme ça et qui avaient réussi … »

    Mais Youssef n’arrivera jamais à Alicante, sa destination. Après cinq kilomètres seulement en mer, son embarcation prend l’eau. S’ensuit une altercation avec le conducteur du bateau, qui finit par se renverser. « Tout le monde est tombé à l’eau, y compris une famille avec une enfant de 6 ans et un bébé », raconte sa cousine. Les gardes-côtes algériens sont prévenus, mais la localisation du naufrage n’est pas la bonne. Les naufragés, qui n’ont pas de gilet de sauvetage, attendent près de six heures en pleine mer. Youssef fait grimper la petite fille sur un bidon d’essence.

    Lorsqu’un groupe de jeunes, prévenus de leur départ, parvient finalement à les retrouver, il est trop tard. Le bébé et sa mère sont retrouvés morts. Youssef et deux autres passagers sont portés disparus.

    Ce naufrage est loin d’être un cas isolé. Sur cette route migratoire qui relie l’Algérie à l’Espagne, les drames sont « de plus en plus fréquents », et « des cadavres apparaissent sur la côte [espagnole] plusieurs jours après [...] que les secours ont été alertés », indique la Garde civile dans un document consulté par le média Levante. D’après le dernier rapport de l’ONG Caminando Fronteras publié le 26 décembre, au moins 517 personnes sont mortes sur cette voie en 2024. Elles étaient 464 en 2022, et 191 en 2021.

    Cette année aussi, 26 embarcations ont « totalement disparu » en mer, avec tous leurs passagers. Des chiffres qui font de ce passage en Méditerranée la deuxième route la plus meurtrière pour l’Espagne, derrière celle des Canaries.
    La route des Baléares de plus en plus privilégiée

    Empruntée depuis plusieurs années par les candidats à l’exil, cette voie s’est réellement consolidée depuis 2021, affirme Caminando Fronteras. Les passagers déboursent entre 2 000 et 4 000 euros, parfois plus, pour effectuer ce trajet à bord de petits bateaux à moteurs de 60 à 140 chevaux, totalement inadaptés à ce type de traversées en pleine mer. En 2024, 13 952 migrants ont été comptabilisés sur cette voie.

    Les candidats au départ embarquent depuis Oran, Mostaganem, Tipaza ou Alger et naviguent en direction du sud de la péninsule ibérique. Ils sont parfois secourus au large d’Almeria, Carthagène, Murcie ou Alicante.

    Mais depuis 2022, la route algérienne se déplace de plus en plus à l’est, en direction des îles Baléares, une zone moins surveillée. Le 29 décembre, 18 personnes ont atteint l’île de Formentera, et ont été rejointes par 74 migrants arrivés dans trois embarcations distinctes quelques heures plus tard. Depuis le 1er janvier 2024, 5 793 personnes au total ont débarqué aux Baléares, soit 154,3 % de plus que les 2 278 exilés arrivés dans l’archipel en 2023, d’après les chiffres de l’agence de presse espagnole EFE.

    Cet itinéraire, moins couvert par les secours, est tout aussi « périlleux », prévient Caminando Fronteras. « Les dangers de cette traversée sont même plus importants en raison des distances plus longues, mais aussi parce qu’il existe un risque élevé de perdre le cap et de se retrouver dans les zones les plus hostiles de la mer Méditerranée ».

    Sur cette voie, les profils des « harragas », littéralement « brûleurs de frontières », sont aussi plus vulnérables. Le rapport constate la présence régulière « d’adolescents qui voyagent seuls », et qui cherchent à rejoindre de la famille en Europe. « Pour beaucoup, en France », précise-t-on. Ces mineurs sont habituellement originaires d’Algérie, mais de plus en plus de jeunes subsahariens, syriens, ou palestiniens embarquent, eux aussi, depuis les côtes algériennes. D’après l’ONG espagnole, « près de 40 % des personnes qui s’engagent sur cette route maritime des Baléares proviennent désormais de pays autres que l’Algérie ».

    Les jeunes enfants accompagnés de leurs mères sont également de plus en plus nombreux. « Beaucoup d’entre eux étaient précédemment passés par la Libye et la Tunisie avant d’être refoulés dans le désert », précise l’association.
    « Pas d’avenir »

    Ces dernières années, les embarcations de fortune parties d’Algérie se remplissent souvent de familles entières. En octobre 2021, Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) décrivait ce phénomène comme « une ’harga [migration en français]’ familiale inédite », qui trouve racine dans la morosité économique plombant le pays depuis 2014 et la chute du cours du pétrole.

    « En Algérie, il n’y a pas la guerre. Mais le chômage des jeunes, même diplômés, poussent la plupart à partir. Dans ce pays, si vous ne connaissez personne pour vous pistonner, vous n’avez pas d’avenir », explique la cousine de Youssef. « Et quand vous voyez que la plupart des gens que vous connaissez ont quitté le pays, sont heureux ailleurs et que vous, vous continuez à galérer malgré les années, partir devient votre seul objectif ».

    « Ici, même les jeunes avec un diplôme ne trouvent pas de travail, et ils s’ennuient », avait également confié en mai dernier Kenza, dont le frère originaire de Tizi Ouzou avait disparu en mer. « Hamza disait que la vie en Algérie, c’était fatigant. Alors quand il est entré à l’université de sociologie, il a rapidement fait des demandes de visa étudiant. À chaque fois, elles ont été refusées ».

    Youssef avait lui aussi d’abord envisagé de partir de chez lui « dans les règles », sur les conseils de sa famille. Le jeune homme avait fait des demandes de visa pour l’Union européenne, le Canada et le Royaume-Uni. Mais, comme Hamza, aucune ne lui a été accordée.

    Aujourd’hui, la mère de Youssef « pense qu’il est en prison en Espagne ». « On ne lui a pas dit ce qu’il s’était vraiment passé, car elle a une santé très fragile », confie sa cousine. Tous les jeunes du quartier, en revanche, ont appris la mort de Youssef et des autres passagers. « Le lendemain du drame, beaucoup embarquaient à leur tour dans un bateau ».

    https://www.infomigrants.net/fr/post/61991/sur-la-route-migratoire-entre-lalgerie-et-lespagne-une-hausse-effrayan
    #mourir_en_mer #morts_en_mer #migrations #réfugiés #frontières #mourir_aux_frontières

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/1089939

  • Espagne : près de 100 migrants atteignent l’archipel des Baléares en une journée - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/62015/espagne--pres-de-100-migrants-atteignent-larchipel-des-baleares-en-une

    Espagne : près de 100 migrants atteignent l’archipel des Baléares en une journée
    Par La rédaction Publié le : 02/01/2025
    Quatre embarcations avec 98 exilés à bord ont rejoint les côtes d’Ibiza, Formentera et Majorque mercredi 1er janvier. En tout, près de 6 000 migrants sont arrivés aux Baléares en 2024, près de trois fois plus que l’an passé. Une route migratoire de plus en plus empruntée. Mercredi 1er janvier, 98 migrants à bord de quatre canots différents ont débarqué sur les îles Baléares, à l’est de la péninsule ibérique. Vers midi, la Garde civile locale a intercepté 20 personnes d’Afrique subsaharienne et une personne d’origine maghrébine qui arrivaient en bateau sur la plage de La Xanga, sur l’île d’Ibiza, rapporte la presse espagnole.
    Deux heures plus tard, une embarcation transportant 21 exilés d’origine maghrébine a été localisée dans la zone de Pilar de la Mola, au sud de Formentera. Un troisième bateau, avec à son bord 31 personnes d’origine nord-africaine, a lui aussi été intercepté au cours de la journée par la Garde civile dans la même zone.
    Dans la soirée, les secours maritimes espagnols sont venus en aide à 25 autres ressortissants d’Afrique subsaharienne, à bord d’un quatrième canot repéré à une vingtaine de kilomètres de Santa Ponça, au sud-ouest de Majorque.
    Depuis 2022, la route migratoire algérienne qui relie l’Algérie à l’Espagne se déplace de plus en plus à l’est, en direction des îles Baléares, une zone moins surveillée. Les arrivées y sont de plus en plus fréquentes. Le 29 décembre déjà, 18 personnes ont atteint l’île de Formentera, et ont été rejointes par 74 migrants arrivés dans trois embarcations distinctes quelques heures plus tard.
    Selon le décompte de l’agence de presse espagnole EFE, au cours de l’année 2024, au moins 5 924 exilés ont débarqué aux Baléares, contre 2 278 l’an passé, soit presque trois fois plus.
    Fin novembre, après l’arrivée de près de 300 personnes dans l’archipel, la police nationale, en charge de l’enregistrement des nouveaux arrivants dans les Baléares, s’était dite « débordée », rapportait le média Cronica Balear. L’augmentation des arrivées sur ces îles a d’ailleurs fait l’objet d’un débat au Sénat espagnol à la mi-novembre. « Au cours des sept derniers jours, près de 1 000 migrants ont atteint les côtes des îles Baléares, parmi lesquels des jeunes, des enfants et des femmes enceintes », avait alors déclaré le sénateur de l’archipel Miquel Jerez. « Les administrations locales ont atteint leurs limites, et sont seules et abandonnées », avait-il ajouté. En réponse, le ministre de l’Intérieur Fernando Grande-Marlaska avait assuré devant les parlementaires que cette route migratoire « ne s’était pas consolidée » cette année.
    Cet itinéraire, moins couvert par les secours, est cependant tout aussi « périlleux », prévient l’ONG Caminando Fronteras dans son dernier rapport publié le 26 décembre. « Les dangers de cette traversée sont même plus importants en raison des distances plus longues, mais aussi parce qu’il existe un risque élevé de perdre le cap et de se retrouver dans les zones les plus hostiles de la mer Méditerranée », précise l’association.
    D’après Caminando Fronteras, au moins 517 personnes sont décédées en 2024 sur la route algérienne, qui conduit aux Baléares et au sud de l’Espagne. Elles étaient 464 en 2022, et 191 en 2021. Cette année aussi, 26 embarcations ont « totalement disparu » en mer, avec tous leurs passagers. Des chiffres qui font de ce passage en Méditerranée la deuxième route la plus meurtrière pour l’Espagne, derrière celle des Canaries. Le rapport de Caminando Fronteras constate également la présence régulière « d’adolescents qui voyagent seuls », et qui cherchent à rejoindre de la famille en Europe. « Quand vous voyez que la plupart des gens que vous connaissez ont quitté le pays, sont heureux ailleurs et que vous, vous continuez à galérer malgré les années, partir devient votre seul objectif », a par exemple relaté auprès d’InfoMigrants la cousine de Youssef*, un jeune algérien de 26 ans porté disparu fin novembre, après le naufrage du canot sur lequel il avait pris place pour rejoindre l’Espagne depuis Alger. Ces mineurs sont habituellement originaires d’Algérie, mais de plus en plus de jeunes subsahariens, syriens, ou palestiniens embarquent, eux aussi, depuis les côtes algériennes. D’après l’ONG espagnole, « près de 40 % des personnes qui s’engagent sur cette route maritime des Baléares proviennent désormais de pays autres que l’Algérie ».

    #Covid-19#migration#migrant#routemigratoire#migrationirreguliere#algerie#espagne#baleares#mineur#subsaharien#syrie#palestinien#sante

  • Suivi du #droit_à_la_vie – Année #2024

    En 2024, 10 457 personnes sont mortes à la frontière occidentale euro-africaine.

    Notre rapport “Droit à la vie 2024” fait état de la période la plus meurtrière jamais enregistrée, avec des chiffres dévastateurs de 30 morts par jour en moyenne. Parmi les victimes figurent 421 femmes et 1 538 enfants et adolescents.

    La route de l’Atlantique, avec 9 757 morts, reste la plus meurtrière au monde. Les tragédies ont particulièrement augmenté sur la route mauritanienne, consolidant ce pays comme le principal point de départ vers les îles Canaries. La route algérienne, en mer Méditerranée, est la deuxième plus meurtrière selon nos registres, avec 517 victimes. Le #détroit_de_Gibraltar a coûté la vie à 110 personnes et 73 autres ont perdu la vie sur la #route_d’Alboran. En outre, 131 bateaux ont été perdus avec toutes les personnes à bord.

    L’omission du devoir de sauvetage et l’#externalisation des frontières et du sauvetage sont parmi les principales causes de l’augmentation du nombre de décès aux frontières de l’État espagnol

    Outre ces chiffres, le rapport Droit à la Vie 2024 dénonce les principales causes de cette augmentation des naufrages et des victimes. Parmi les causes principales, nous soulignons l’omission du devoir d’assistance, la priorisation du contrôle migratoire sur le droit à la vie, l’externalisation des frontières dans des pays sans ressources adéquates, l’inaction et l’arbitraire dans les sauvetages, la criminalisation des organisations sociales et des familles, ainsi que les situations d’extrême vulnérabilité qui poussent les migrants à se jeter à la mer dans des conditions très précaires.

    Les #femmes confrontées à la #violence_structurelle à la frontière

    Le rapport analyse également la situation des femmes lors des traversées migratoires, qui se font principalement dans des embarcations pneumatiques entre #Agadir et #Dakhla. En transit, ces femmes subissent des violences, des #discriminations, du #racisme, des #expulsions et des #violences_sexuelles, et sont contraintes de survivre dans des conditions extrêmes qui les poussent à la #mendicité, à la #prostitution et à des #emplois_précaires, tout en risquant d’être recrutées par des réseaux de trafiquants d’êtres humains.

    Un nombre croissant de femmes migrantes se déplacent en #pirogue depuis le #Sénégal, la #Gambie et la #Mauritanie pour échapper aux conflits et à l’impact du #changement_climatique dans les régions appauvries. On observe également une présence croissante de femmes sur la route des #Baléares en provenance d’Afrique centrale et occidentale, traversant la Libye et la Tunisie et subissant des violences, de l’#esclavage, des #féminicides raciaux et des #déplacements_forcés vers l’#Algérie.

    Le manque de protection des #enfants sur les routes migratoires

    Notre rapport fait état d’une augmentation du nombre d’enfants et d’adolescents sur les principales routes migratoires vers l’Espagne, qui continuent de souffrir d’un manque de protection et de garanties de la part des autorités. Ces mineurs sont traités comme des migrants plutôt que comme des enfants, et sont donc exposés au marketing politique et sont la cible de discours de haine, ce qui les expose à des situations dans lesquelles leurs droits sont violés.

    La situation est particulièrement critique aux #îles_Canaries, où des enfants non identifiés comme tels vivent avec des adultes dans des centres d’accueil, une réalité qui les expose à de graves dangers.

    Il reste difficile pour les familles de dénoncer et de rechercher leurs #enfants_disparus le long des routes migratoires

    Un autre aspect analysé dans le rapport Droit à la vie 2024 est la réalité des familles qui recherchent leurs proches #disparus à la frontière occidentale euro-africaine. Malgré quelques progrès dans la réception des plaintes et des exemples de bonnes pratiques, les obstacles à l’exercice de leurs droits restent nombreux, et les difficultés à prélever des échantillons d’ADN ou à déposer des plaintes sont particulièrement choquantes. Ces familles sont ainsi re-victimisées par un système qui les stigmatise et considère leurs proches comme des victimes de seconde zone. En l’absence de garanties pour l’exercice de leurs droits, les familles courent le risque de tomber entre les mains de bandes d’extorqueurs.

    Face à ces situations difficiles, les familles s’organisent en réseaux communautaires et se tournent vers la famille élargie pour surmonter les obstacles qui les empêchent de retrouver leurs proches. Chaque année, les familles à la recherche de leurs proches sont confrontées à un système de mort systématique aux frontières qui fait des milliers de victimes comme celles décrites dans ce rapport.

    https://caminandofronteras.org/fr/monitoreo/suivi-du-droit-a-la-vie-annee-2024
    #caminando_fronteras #rapport #route_Atlantique #Espagne #statistiques #chiffres #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #migrations #réfugiés #identification #disparitions #missing

    ping @6donie

  • Paradoxe des flux de capitaux: et si les pays riches étaient financés par les pays émergents [2021]
    https://www.swissinfo.ch/fre/politique/paradoxe-des-flux-de-capitaux-et-si-les-pays-riches-%c3%a9taient-financ%c3%a9s-par-les-pays-%c3%a9mergents/46991792

    La publication [de la CNUCED] montre que le montant total des #flux_financiers qui sortent des #pays_en_développement excède largement ceux qui y entrent depuis les pays riches (l’#aide_au_développement, mais aussi les #investissements_directs_étrangers ou encore les flux commerciaux).

    Ce phénomène « contredit les théories économiques néoclassiques, selon lesquelles les capitaux devraient naturellement circuler des pays riches vers les pays déficitaires en capital », explique Rachid Bouhia. « Il montre aussi que certains modèles de développement mis en avant ces dernières décennies, non seulement n’ont pas marché, mais ont créé beaucoup de vulnérabilité. »

    Les fuites de capitaux résultent de plusieurs facteurs, mais sont particulièrement liées à « la fragilité financière inhérente à l’#endettement extérieur des pays en développement », relève la publication.

    Incités à s’endetter envers l’étranger pour se développer, certains pays ont atteint des niveaux de dettes très élevés, qui les entraînent dans une spirale : les paiements d’intérêts et de transferts de bénéfices l’emportent sur les revenus.

    Les statistiques de l’ONG britannique Jubilee Debt Campaign, qui milite pour une annulation de la #dette des pays du Sud, montrent que la part de leur revenu consacrée au paiement de la dette extérieure est en hausse. Elle avoisine par exemple les 60% au Gabon et 46% en Angola, contre 3 à 4% dans la plupart des pays d’Europe occidentale et 0,4% en Suisse.

    Rachid Bouhia évoque aussi le déficit de la #balance_commerciale dans beaucoup de pays émergents – qui importent davantage qu’ils n’exportent, ou exportent des #matières_premières dont les cours fluctuent fortement.

    « De nombreux pays n’ont pas réussi à développer une industrie suffisante pour pouvoir exporter vers les pays développés et sont restés coincés dans des ‘trappes à pauvreté’ », explique l’économiste.

    Autre élément encore : « pour se prémunir des risques, les pays en développement se sont lancés dans une course à accumuler des monnaies étrangères, en particulier du dollar », ce qui correspond à une sortie de capitaux pour le pays qui achète, et à une entrée pour le pays qui fabrique la devise.

    Le déficit cumulé pour les pays en développement entre 2000 et 2017 serait ainsi proche des 11’000 milliards de dollars, 500 milliards de dollars pour la seule année 2017 (plus du triple de l’APD totale cette année-là).

    Et il ne s’agit que des chiffres officiels, qui ne prennent pas en compte les flux financiers illicites (#FFI, ajoutés à titre indicatif sur le graphique de la CNUCED). Ces derniers recouvrent en partie les transactions criminelles, le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, etc. mais, surtout, du commerce licite « qui n’est pas facturé correctement (…) dans une optique d’optimisation fiscale », explique le professeur à l’IHEID Gilles Carbonnier.

    #impérialisme

  • Border imperialism in the Balkans

    Our guest is #Manja_Petrovska, a PhD candidate at the University of Amsterdam and the Université libre de Bruxelles.

    We start our conversation today in the Balkans. Before her PhD, Manja spent five years supporting people travelling through the Balkans to Europe’s more affluent northwest, including at the Macedonian-Greek border and in Bosnia.

    Witnessing the intense violence that Croatian, Greek, Macedonian, and other police forces inflicted on people on the move, she increasingly started questioning who governs and funds this violence. This led her to focus on the International Organization for Migration, or the IOM.

    From this five-year engagement, Manja co-authored a report from this five-year engagement, titled Repackaging Imperialism: The EU-IOM Border Regime in the Balkans, published by the Transnational Institute. Although the report’s other authors are not featured in this episode, everything we discuss related to the report is based on their work as well, so special thanks to Nidžara Ahmetašević, Sophie-Anne Bisiaux, and Lorenz Naegeli, as well as Niamh Ni Bhriain, who was the report’s main editor.

    As the report lays out, while the IOM portrays itself as a neutral broker and knowledge center on migration, it is, in fact, an active implementer of particular states’ border policies, bolstering police, border guards, and private contractors known to commit atrocities. Most IOM funding comes from affluent states that can directly commission projects, which the IOM then implements in regions far from its primary funders.

    What emerges from the conversation is a European Union border regime that extends its influence into the Balkans through the IOM, funding violence that northwestern European states can then distance themselves from by mobilizing racist depictions of brutality as always something occurring in various elsewheres. From the perspective of people living in the region, this is not a new phenomenon but rather one that echoes the efforts of past empires that sought to shape what we now call the Balkans. Hence the report’s title: Repackaging Imperialism.

    In addition to affecting the lives of people on the move, this regime is also leading to a remilitarization of borders in a region still recovering from war and genocide.

    We then move to discussing Manja’s current PhD project. As part of this project, she has recently attended a number of border technology fairs, which are marketplaces where security companies showcase their ideas for border security, with government officials as their clients. Manja takes us into a world where cowboy hats, raffles, and rampant alcohol consumption are used to aid in the selling of heartbeat monitors, document scanners, and weapons—illustrating how absurdly and soul-crushingly removed the worlds of weapons sales are from the people whose lives these weapons affect.

    Finally, Manja recounts her own encounter with border enforcement. After leaving one of the last security fairs she attended, she was administratively detained and taken to immigration detention in Belgium. There, she met and tried to support many others who were in a much worse situation than she was, mainly people from other Balkan states and Palestinians.

    We end the conversation by reflecting once again on the ongoing genocide in Gaza and the need to resist the brutal slaughter, starvation, displacement, and land theft of Palestinians at the hands of the Israeli state. We feel pain at this destruction of life. Weapons companies, Manja explains, profit, not only from causing mass death but also from surveilling, governing, and dividing people when displaced, once again showing us that our struggles are deeply interconnected.

    https://pca.st/1fo2d7kg

    #frontières #impérialisme #violence #Balkans #route_des_Balkans #IOM #OIM #militarisation_des_frontières
    #audio #podcast

    ping @karine4 @_kg_

  • L’#extractivisme, des marges amazoniennes au militantisme anticapitaliste

    Créée pour décrire l’économie de #cueillette constitutive des marges amazoniennes, la notion d’extractivisme a beaucoup évolué en un siècle : elle est devenue un mot-clef du militantisme, un condensé de critiques et d’impensés. Synonyme d’appropriation, d’exploitation… elle finit par ne plus dire ce qu’elle dénonce exactement et n’est plus appréciée que pour sa charge critique. Il est temps d’interroger les limites d’un concept à la dérive.

    Le suffixe -isme, en français, revêt diverses significations. Il peut désigner un système de pensée, que ce soit le communisme ou le libéralisme, une religion, le christianisme comme le bouddhisme, une activité, comme le journalisme et l’alpinisme, un comportement, que ce soit l’égoïsme ou l’autisme, une situation, comme l’analphabétisme ou l’anachronisme… Cette présentation n’est pas exhaustive ; l’-isme est particulièrement labile.

    Néanmoins, d’un mot à l’autre, d’un contexte à l’autre, l’ambiguïté n’est pas de mise. À chaque fois, on en comprend le sens. Pourtant, lorsqu’on interroge la notion d’extractivisme, dont l’usage actuel va croissant, on peine un peu à en saisir la connotation. Faut-il y voir simplement une pratique, une économie qui serait fondée sur l’extraction ? Ou bien une pensée, une doctrine qui légitimerait l’industrie extractive, voire l’encouragerait ?

    Le mot, rappelons-le, est originaire du Brésil : extrativismo en portugais. Son usage semble remonter à la fin des années 1930 – peut-être est-il antérieur. Il s’appliquait alors aux marges amazoniennes, là où on récoltait le #caoutchouc (#borracha), la #gomme_de_Balata (#balata), le #baume_d’Amazonie (#copaíba), la #noix_du_Brésil (#castenha), la #fève_tonka (#cumaru), diverses espèces de #bois… C’était avant tout une #économie_de_cueillette.

    Le mot portugais dérive lui-même d’une #catégorisation économique qui remonte au XIXe siècle, et plus précisément d’une proposition avancée en 1842 par #Charles_Dunoyer dans le Journal des économistes : « On a voulu aussi les assimiler à l’#industrie_agricole ; mais encore le moyen de confondre avec l’art de la culture celui de la pêche, de la chasse ou de l’exploitation des mines ? Toutes les industries de la classe dont il s’agit ici remplissent une fonction qui leur est propre, et qui se distingue nettement de celles accomplies par les trois autres grandes classes : elles extraient mécaniquement du sein des eaux, des bois, de l’air, de la terre, sans leur faire subir d’ailleurs aucune façon déterminée, des matériaux innombrables, qui servent ensuite à l’exercice d’une multitude d’arts. Je demande la permission de les désigner par un nom pris de la fonction même qu’elles remplissent, et d’en former, sous le nom d’industries extractives, une classe tout à fait séparée »[1] – industrie étant ici à entendre au sens ancien et général d’activité économique. C’est ainsi que, dans les années 1930, le ministère de l’Agriculture brésilien comportait un département consacré spécialement aux « plantes extractives et industrielles » (Secção de Plantas Extrativas e Industriais).

    La question est donc légitime de savoir ce qui distinguerait l’extractivisme de l’#économie_extractive en général, ou de comprendre la connotation apportée par le mot extrativismo.

    Or peu d’auteurs, pour ne pas dire aucun, ont pris le temps, au milieu du XXe siècle, de définir ce qu’était l’extractivisme. Son usage s’est imposé comme une évidence lorsqu’il s’est agi de parler de l’activité de cueillette dans les provinces amazoniennes du #Brésil. De fait, on peut penser que le sens du mot était précisément là pour désigner une économie primaire, exclusivement extractive et non productive.

    En cela, le terme n’était peut-être pas dénué de connotation péjorative, soulignée parfois par l’ajout de l’adjectif « pur » : #puro_extrativismo, comme dans ce discours du président brésilien #Gaspar_Dutra en mars 1947 : « La nécessité d’une solution adéquate aux immenses problèmes de l’Amazonie me semble d’autant plus urgente qu’il est certain que ses conditions de vie difficiles s’aggravent de jour en jour. Les habitants travailleurs de cette région lointaine sont confrontés à des difficultés sans précédent, qui découlent d’une multitude de facteurs négatifs, tels que, entre autres, la pénurie démographique, l’immensité du territoire, l’éloignement des principaux centres de production et de consommation du pays, une économie primaire de pur extractivisme forestier [puro extrativismo florestal], une structure économique et sociale à la merci des fluctuations des prix de ses matières premières essentielles[2]. »

    L’extractivisme est, fondamentalement, une activité économique des #marges_forestières du Brésil. Il n’y a nulle idéologie dans le mot, mais un simple constat, une manière de désigner une forme de sous-développement économique, précaire et nomade, qu’on oppose à l’#agriculture, « seule manière de fixer l’homme à la terre », ou à la #sylviculture, qui permettrait une exploitation moins destructrice.

    En 1982, #Alfredo_Homma avait introduit une distinction entre « #extractivisme_de_collecte » (#extrativismo_de_coleta), qui préserve – plus ou moins – les ressources, et « extractivisme par #annihilation ou #déprédation » (extrativismo por aniquilamento ou depreção), qui les détruit, immédiatement ou à court terme[3]. L’extractivisme pouvait-il être une économie durable ? En un sens, cela a été le combat des #seringueiros durant les années 1980. Ils cherchaient à maintenir leur activité face à une #déforestation croissante. La figure la plus connue de cette résistance est #Chico_Mendes, qui a été assassiné en 1988. Il avait créé le #Conselho_Nacional_dos_Seringueiros dont la revendication principale était la création de zones forestières, pour des motifs à la fois environnementaux, économiques, sociaux et culturels. Ces #réserves_extractivistes (reservas extractivistas) devaient permettre de préserver un espace naturel et un mode d’exploitation considéré comme non prédateur.

    Quatre grandes réserves extractivistes furent créées en 1990 dans le cadre du programme national pour l’environnement, puis d’autres, de moindre importance, dans les années qui ont suivi. Cela correspondait parfaitement à la logique de développement durable qui venait d’être formulée dans le #rapport_Brundtland de 1987 et qui fut reprise par la #déclaration_de_Rio sur le développement et l’environnement en 1992. Ainsi, l’extractivisme amazonien était la version acceptable d’une #exploitation dont on commençait à dénoncer les excès, voire la solution à la déforestation. Pour Florence Pinton et Catherine Aubertin, « la réputation écologique de l’extractivisme s’est construite à partir du repoussoir que représentent les désastres enregistrés par les différents programmes d’occupation de l’Amazonie »[4].

    Mais depuis une vingtaine d’années, le terme a connu une évolution notable dans ses usages. Il s’est chargé d’une forte valeur critique, à la fois décoloniale et environnementale.

    Dès le départ, l’extractivisme implique que l’activité de transformation se fasse ailleurs. Il y a une logique spatiale, et coloniale. Les ressources sont collectées afin d’être acheminées vers des centres de production, au Brésil, en Amérique du Sud, voire dans les centres industriels d’Amérique du Nord ou d’Europe. C’est vrai pour le latex, mais aussi pour l’or ou d’autres ressources car l’extractivisme peut être végétal, animal ou bien minier. L’Amazonie est ainsi devenue un territoire menacé par l’#exploitation_pétrolière[5]. Mais les exemples sont multiples, au Niger, au Cameroun, au Groenland…

    Le dernier livre de Justine Augier, Personne morale, dans lequel elle fait le récit des errances de l’entreprise Lafarge, prête aux pires compromissions pour garantir l’extraction de pétrole en Syrie au moment de la montée en puissance de Daech, ne serait qu’un exemple parmi tant d’autres des errances d’un système où le profit semble pouvoir tout justifier, au détriment des populations locales. Les exactions commises par les soldats chargés de protéger le site gazier de Total au Mozambique montrent bien la violence d’un capitalisme dont les activités extractives constituent la base.

    L’extractivisme, en ce sens, est devenu synonyme d’#appropriation et a été employé dans des domaines pour le moins éloignés du contexte initial. Pascal Marichalar considère, par exemple, que l’installation de télescopes sur des montagnes du Chili ou de Hawaï, sur des terres prises aux populations locales dans des contextes coloniaux, justifie l’expression d’« #extractivisme_scientifique ». Stricto sensu, il n’y a évidemment aucune extraction, mais une #dépossession de #montagnes qui avaient souvent une valeur – non marchande – pour les populations autochtones. Autre exemple : sur la base du rapport rédigé par Felwine Sarr et Bénédicte Savoy, en 2018, sur la restitution du patrimoine culturel africain, Aksel Kozan n’hésite pas à parler d’« #extractivisme_patrimonial »[6].

    Que les #conquêtes_coloniales aient été l’occasion de multiples #spoliations patrimoniales ne fait pas question, qu’on parle d’extractivisme, en revanche, interroge car cela réduirait les objets pillés à de simples ressources, à des #matières_premières, alors que leur intérêt tient précisément à leur valeur culturelle.

    Parallèlement à cette évolution, le terme d’extractivisme a été pensé comme une forme d’extraction à outrance, une #exploitation_intensive. On pourrait presque se demander si certains auteurs, par extractivisme, n’entendent pas quelque chose comme #extractivissime, autrement dit, s’ils ne font pas du suffixe -isme une sorte de superlatif. Mais peut-être est-ce surinterpréter.

    En tout cas, la notion semble comprise comme désignant une #idéologie qui justifierait l’extraction, « quelque chose comme un “goût pour l’extraction” », écrit Anna Bednik[7]. En ce sens, l’extractivisme serait l’envers du #productivisme. Sauf que les deux mots n’ont pas la même histoire ni la même connotation. Productivisme a été forgé en France par Ernest Solvay à la toute fin du XIXe siècle. Produire plus était un objectif souhaitable afin d’apporter la prospérité au plus grand nombre. Or, on l’a vu, ce n’est pas le cas de l’extractivisme, dont l’extraction n’est pas un but en soi. C’est même plutôt un contresens. Les activités extractives ne font qu’alimenter le système productif, elles en sont la conséquence, non la cause. Attaquer l’extractivisme ne détournerait-il pas la critique de sa cible principale : le productivisme, voire le capitalisme lui-même, si tant est que le productivisme serait le propre du capitalisme, ce qu’on pourrait discuter.

    Le mot est mobilisé pour désigner des situations extractives qui ne situent plus uniquement dans des territoires autrefois colonisés, mais qui seraient aussi dans des pays du Nord. Les récents projets miniers en France peuvent-ils être considérés comme de l’extractivisme ? Qu’en est-il des activités extractives menées par la Chine sur son propre territoire ? Il ne s’agit absolument pas de justifier les dégradations environnementales provoquées par nombre de ces exploitations, mais d’interroger les limites d’un concept qui semble parfois à la dérive. Quand passerait-on de l’extraction à l’extractivisme ? Existe-t-il une forme acceptable d’activité extractive ? À se focaliser uniquement sur les lieux d’extraction, le risque est non nul de céder à des logiques de NIMBY, « not in my back yard » [pas dans mon jardin, ndlr]. Peut-il y avoir production sans extraction ? Les questions sont multiples, et la prudence peut-être pas inutile.

    Personne ne peut se prétendre berger des mots, mais on peut parfois s’interroger sur certains effets de mode. En à peine un siècle, extractivisme a beaucoup évolué : il est devenu un mot-clé, un condensé de critiques et un raccourci d’impensés. Synonyme d’appropriation, d’exploitation, de déprédation, il finit par ne plus dire ce qu’il dénonce exactement et semble surtout être apprécié pour la charge dénonciatrice qu’il porterait, un mot neuf pour une critique ancienne. Le géographe allemand Ernst Friedrich, en 1904, avait un mot pour dire tout cela : die #Raubwirtschaft, l’#économie_de_pillage[8] !

    Car le constat d’une économie déprédatrice n’est pas nouveau. Qu’on m’excuse de terminer par une très longue citation, empruntée à Franz Schrader, géographe français, cousin d’Élisée Reclus. Elle est extraite de l’introduction à l’Atlas de géographie moderne, paru en 1889 chez Hachette, un livre a priori plutôt neutre, destiné à un public assez large. En une page, toute la violence de l’exploitation du système industriel européen à l’échelle de la planète y est décrite et dénoncée, avec ses conséquences en termes d’extraction. Mais Franz Schrader ne s’y trompe pas. C’est bien la question de la production à outrance qui est soulevée, d’une production considérée comme un objectif en soi et non comme un moyen.

    « Depuis le commencement de ce siècle, une partie de l’humanité a brusquement transformé ses rapports avec la planète. L’homme blanc, devenu pour ainsi dire un être nouveau, s’est créé une organisation factice qui bouleverse les conditions de sa vie traditionnelle, révolution dont il n’a pas encore mesuré toute l’importance et dont il nous est impossible de prévoir les résultats ultimes.

    « Depuis ce jour où, par l’invention du feu et des premiers outils, l’homme s’est nettement différencié des autres êtres vivants et a cessé d’être l’esclave de la Terre pour tendre à en devenir le maître, une élite intellectuelle a parcouru des étapes successives de culture, entraînant avec elle ou laissant en arrière diverses fractions de l’espèce humaine. À l’outil, qui complétait ou corrigeait les organes humains, a succédé la machine, qui les aide et leur prête sa force. Jusqu’au dix-neuvième siècle, l’homme a surtout demandé secours aux forces naturelles en pleine activité, au vent, à l’eau courante. Il se bornait à utiliser un mouvement déjà produit par le jeu de la vie planétaire. Au dix-neuvième, une fraction de l’humanité imagine de se faire non plus aider, mais remplacer. De substances inertes, houille, métaux, acides, eau surchauffée, etc., elle apprend à dégager des forces latentes, à les discipliner, à les obliger à l’action. Dès lors, tous les organes moteurs ou mécaniques de l’homme se transforment, se décuplent ou se centuplent. Sa puissance de locomotion s’accroît jusqu’aux vapeurs transocéaniques et jusqu’aux chemins de fer transcontinentaux. La portée de sa parole n’a plus de limites, le télégraphe la transporte autour du monde ; la vapeur, les substances explosibles donnent à son bras une force incalculable. Ce n’est plus l’homme des siècles passés, c’est un nouvel être, qui n’admet plus aucune résistance. Plus de limites à l’ambition de l’homme blanc, doublé de ses organes de métal, de sa vapeur, de son électricité. Ses télégraphes enserrent le globe, ses navires à vapeur raccourcissent les océans, ses rails veulent se poser partout ; qui n’en veut pas devra se soumettre, qui résiste sera brisé. Et l’Indien, le Nègre, l’Australien, le Chinois se voient avec terreur envahis, débordés par cette humanité nouvelle, avide, violente, inexorable, toujours plus pressée, haletante comme ses machines.

    « En effet, tandis que le moteur mécanique, sans cesse perfectionné, aide, déplace ou remplace le travailleur, change incessamment les conditions du travail, un appel se produit sur tous les points du globe, et la race blanche s’y précipite, transportant avec elle les mêmes besoins, la même activité, les mêmes machines, la même surexcitation cérébrale. […]

    « Un tel état de choses ne peut pas se développer indéfiniment. D’abord, la civilisation industrielle n’est pas un but, mais un moyen. Le jour où elle aura atteint le résultat qu’en attendent les esprits élevés, et donné à tout homme sa part de secours matériel, lui permettant ainsi de vivre d’une vie plus morale et plus intellectuelle, elle devra se borner, précisément pour ne pas détruire son œuvre. En outre, on ne fabrique que pour des besoins, et la capacité de consommation de l’humanité est forcément limitée. La force mécanique à l’œuvre sur le globe est déjà égale à celle d’un milliard d’hommes (1889), et elle ne cesse de s’accroitre. Amenât-on la population entière de la sphère terrestre à l’état de tributaire ou d’acheteur momentané, il est évident que cette force n’est pas appliquée dans des conditions normales. La civilisation industrielle dont nous admirons l’épanouissement n’est donc qu’une étape et devra prochainement se transformer.

    « Une loi inexorable, du reste, ne tardera pas à l’y obliger. Elle exploite trop avidement la terre, ne songe qu’à l’avenir immédiat, et arriverait à ruiner la planète elle-même.

    « Dans cette fièvre de fabrication ou d’utilisation à outrance, en effet, on demande de toutes parts au sol des produits rapides et immédiatement vendables, et on détruit sans réflexion toute production spontanée, naturelle, surtout la végétation forestière, trop lente à se renouveler.

    « C’est ainsi que presque toute la surface de la Terre va se dénudant avec une effrayante rapidité. Comme conséquence, le sol se délite, les montagnes se désagrègent, les sources tarissent, les fleuves s’appauvrissent ou débordent, le climat lui-même, privé des influences adoucissantes des vastes régions boisées, se détériore et se déséquilibre. En outre, les pays nouvellement ouverts à la culture tirent d’abord d’un sol vierge des récoltes abondantes, ruineuses par leur bon marché pour les pays de vieille culture. Mais bientôt ce sol auquel on a trop demandé s’appauvrit, tandis que des terres nouvelles se mettent en valeur à leur tour.

    « Chaque jour l’intensité du mouvement, l’activité de l’exploitation s’accroît ; par cela même approche le moment où l’homme, voyant son avidité le mener à des désastres irrémédiables, sera obligé de se rapprocher de la nature et de demander à la science, non plus la richesse immédiate, mais le salut. […]

    « Le remède, par bonheur, est à côté du mal. Les progrès de l’industrie ne sont que le résultat premier, matériel, du progrès général de la science ; ce progrès même doit amener une équilibration. L’homme use en ce moment de ses nouvelles forces comme un enfant qui dissipe son bien, le croyant inépuisable. L’âge de raison viendra, et l’humanité pensera alors à régler le présent de façon à sauvegarder l’avenir. Dans ce travail de régularisation, l’étude de la Terre aura la plus large place, car c’est de la Terre que tout vient, c’est à elle que tout retourne. Sans l’homme scientifiquement équilibré ne pourra pas lui rendre les alluvions descendues à la mer, ni ressusciter les peuples disparus, qui vraisemblablement leur place marquée dans l’harmonie de l’humanité ; et c’est un genre humain appauvri qui sera chargé de réparer sur une Terre appauvrie les fautes de notre imprévoyante génération[9]. »

    Où en sommes-nous aujourd’hui ? Nous ne sommes pas sortis de l’ère industrielle, la population humaine depuis la fin du XIXe siècle est passée d’environ 1,5 milliards d’habitants à plus de 8 milliards et nos besoins en matières premières ne cessent de croître. Le dernier rapport publié par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) sur les ressources planétaires dresse un tableau très cru. L’extraction mondiale annuelle de matériaux est passée de 30,9 milliards de tonnes en 1970 à 95,1 milliards de tonnes en 2020 et devrait atteindre 106,6 milliards de tonnes en 2024. On l’estime à 160 milliards de tonnes au milieu du siècle. La moyenne mondiale de la demande de matériaux était de 8,4 tonnes par habitant en 1970, de 13,2 tonnes en 2024.

    Les minéraux non métalliques (dont le sable, le gravier, l’argile) sont devenus la catégorie la plus importante, avec 48 %, en 2024, contre 31 % en 1970, « signe d’une transition d’un métabolisme agraire basé sur la biomasse vers un métabolisme industriel basé sur les minéraux »[10]. Or la solution scientiste et techniciste n’est sans doute qu’une illusion. La dénoncer, inversement, ne doit pas nourrir un discours antiscientifique qui nivellerait opinions et savoirs. L’objectif défini par le PNUE est le découplage du bien-être humain de l’utilisation de ressources. Cela passe aussi par une meilleure répartition de ces ressources. La question environnementale et la question sociale sont inextricablement liées, et ce à l’intérieur d’un cadre plus général qui est celui des rapports de pouvoir et de domination.

    https://aoc.media/opinion/2024/12/11/lextractivisme-des-marges-amazoniennes-au-militantisme-anticapitaliste
    #Amazonie