• Bombes et obus : l’Allemagne part à la pêche en mer Baltique
    https://reporterre.net/Bombes-et-obus-l-Allemagne-part-a-la-peche-en-mer-Baltique

    La récupération de #bombes au large des plages blanches de Scharbeutz, dans la baie de Lübeck ? Non, Corinna Conradt, éditrice berlinoise qui revient fréquemment sur les lieux de son enfance, n’a rien vu cet été. « Mais je connais le problème. Et, sans mauvais jeu de mots, c’est une bombe à retardement. Dans la région, les municipalités évitent consciencieusement le sujet et les gens du cru ne l’évoquent qu’à demi-mots, raconte-t-elle. En même temps, ici, tout le monde connait l’histoire des morceaux d’ambre que l’on trouve au bord de l’eau et qui parfois s’enflamment. Ce sont en réalité des bouts de phosphore, échappés de bombes incendiaires immergées. »

    Au fond de la Baltique et de la mer du Nord, ces bombes incendiaires ne sont qu’un élément d’une vaste panoplie d’engins explosifs remplis de substances toutes plus dangereuses les unes que les autres pour la flore, la faune et l’espèce humaine.

    #armement #pollution_toxique #mer_baltique #bombe_à_retardement
    https://seenthis.net/messages/1039940

  • #Bernadette_Bensaude-Vincent : « Beaucoup de chercheurs ont envie de tout plaquer ou d’aller vers des actions militantes »

    Devant l’urgence climatique, le milieu de la recherche préfère s’inscrire dans l’#action plutôt que de se cantonner à la publication de ses découvertes dans des revues spécialisées. Le point sur ces évolutions avec Bernadette Bensaude-Vincent, philosophe des sciences, professeure émérite à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, membre des comités d’éthique du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

    Pourquoi la posture du scientifique a-t-elle autant évolué ?

    Il y a eu une remise en question du fonctionnement de la recherche scientifique en réaction à son alignement sur le modèle néolibéral, à partir de l’an 2000. Cette année-là, l’adoption de l’agenda de Lisbonne, visant à faire de l’Europe une société fondée sur la connaissance, a entériné la conception d’une science tournée vers des fins de compétition économique et de souveraineté politique. Le changement que nous observons est donc particulièrement prononcé en Europe, notamment en Allemagne et en France, ainsi qu’au Royaume-Uni, mais la réflexion n’en est pas moins générale, dans un monde où les postures scientifiques s’uniformisent dans une compétition globale.

    Le chercheur est-il en train de devenir activiste ?

    Beaucoup de chercheurs ont envie de tout plaquer, ou d’aller vers des actions militantes. Selon moi, le mouvement en cours n’appartient pas au registre de l’activisme, mais à celui de l’action. Dans les universités, nombreux sont celles et ceux qui souhaitent faire évoluer le système de l’intérieur. A l’Inrae, une pétition a circulé pour que la direction ne soit plus confiée à un ingénieur X-Ponts mais à un collectif interne, sur le modèle de l’autogestion. Parmi les jeunes diplômés, beaucoup refusent que leurs futurs travaux de recherche servent une agriculture soumise aux intérêts industriels, et non une agriculture qui se développerait conformément aux questions écologiques. On touche aux valeurs qui sous-tendent la recherche scientifique, et il y a là un désaccord profond avec ce qui a pu être dit et décidé ces vingt dernières années.

    La science a-t-elle des valeurs ?

    La communauté scientifique prend conscience que la science n’est pas neutre, qu’elle est inféodée à des systèmes qui orientent les programmes de recherche. On peut ainsi se demander pourquoi, dans les pays riches, tant d’argent est investi dans l’intelligence artificielle, au motif que celle-ci serait en mesure de résoudre tous nos problèmes, plutôt que dans la lutte contre la pauvreté ou l’élaboration de réponses au changement climatique. L’intelligence artificielle consomme de l’énergie et développe un type de recherche qui n’est pas du tout en prise avec le monde réel. Ce sont bien là des valeurs qui sont en jeu.

    D’où l’idée de neutralité de la science venait-elle ?

    Elle est relativement récente, car, au XIXe siècle, la science était considérée comme fondamentalement bonne, bienfaitrice et pacificatrice. Pendant la première guerre mondiale, l’usage des gaz de combat a provoqué un énorme choc et donné naissance, dans les années 1930, à un mouvement technocritique dénonçant l’alliance de la recherche avec certaines valeurs, comme la compétition économique et le consumérisme. Cette problématique a ressurgi avec Hiroshima.

    La bombe atomique a été le deuxième coup de semonce qui a conduit à mettre en place le concept de recherche duale, consistant à dire que la science est neutre, qu’elle peut servir autant au mal qu’au bien, selon la façon dont on s’en sert. Mais la conviction que la science œuvre au bien commun, qu’elle se situe au-delà des intérêts particuliers, perdure dans le public, si l’on en croit les sondages.

    Comment tout cela a-t-il affecté le travail des chercheurs ?

    On demande aux experts d’être neutres, alors qu’on sait très bien qu’ils ne peuvent pas l’être. C’est tout le paradoxe ! Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en sait quelque chose. Accusé d’être au service de certaines valeurs, il s’est livré à une autocritique et fait maintenant des efforts pour élargir ses sources, en tenant compte des sciences humaines, des savoirs vernaculaires et des savoirs d’expérience, comme ceux des travailleurs sociaux. Résultat, dans son dernier rapport, le GIEC a significativement changé son diagnostic et ses recommandations sur le climat.

    Par ailleurs, tout le monde est d’accord pour dire que la recherche doit réduire son empreinte carbone, et s’orienter vers des pratiques moins compétitives et plus participatives, plus coopératives. Cela vaut en particulier pour les organismes de recherche qui restaient englués dans le postcolonialisme. Mieux aider les pays émergents nécessite de ne plus imposer nos critères occidentaux de développement. Ce raisonnement n’est pas très nouveau, mais il est vraiment en train de s’appliquer concrètement.

    On parle aussi beaucoup de science inclusive…

    La science devient de plus en plus participative, en effet, avec une meilleure prise en compte des retours d’expérience, qui permettent d’éviter certains pièges. Des programmes de recherche interdisciplinaires et participatifs sont en cours, sur la question de l’adaptation au changement climatique, notamment. C’est le cas d’ExposUM, qui développe une approche multidisciplinaire des problèmes de toxicité et de pollution, doublée d’une volonté d’inclusion avec des associations, des malades, des agriculteurs… Ce n’est pas facile à mettre en place, mais c’est financé par les agences de recherche, les collectivités régionales et l’Europe.

    A quoi l’expertise ressemblera-t-elle, demain ?

    Pour pouvoir émettre un avis d’expert, il faut déjà reconnaître les limites des connaissances acquises et pointer les domaines non explorés, savoir déterminer les recherches qu’il faudrait mener pour avoir un avis plus englobant et plus objectif. Cette attitude réflexive et critique peut éloigner du sacro-saint consensus et générer du conflit. Pourquoi pas ? C’est par la confrontation d’avis divergents que la science peut avancer.

    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2024/10/03/bernadette-bensaude-vincent-beaucoup-de-chercheurs-ont-envie-de-tout-plaquer
    #recherche #militantisme #posture_scientifique #recherche_scientifique #agenda_de_Lisbonne #activisme #action #ESR #université #neutralité #valeurs #compétition_économique #consumérisme #histoire #bombe_atomique #recherche_duale #paradoxe #GIEC #climat #compétition #coopération #développement #recherche_participative #expertise #connaissances

  • L’extraction minière menace fortement la #biodiversité

    L’extraction minière est une #bombe_à_retardement pour la biodiversité. Près de 8 % des vertébrés – 4 642 espèces exactement – seraient menacés par l’extraction minière, d’après une étude menée par des chercheurs de l’université de Cambridge, au Royaume-Uni. Parmi les espèces de vertébrés étudiées, les poissons se trouvent être les plus menacés par nos activités minières, notamment offshore. Viennent ensuite les reptiles, les amphibiens, les oiseaux et, enfin, les mammifères. Les espèces frayant dans des habitats d’eau douce sont particulièrement touchées. La menace est globalement répartie sur la planète entre Amérique du sud, Afrique de l’Ouest, et Arctique.

    Les mines ont une empreinte directe sur 101 583 km2 dans le monde. La #pollution provenant des mines de #minéraux_métalliques affecte 479 200 km de rivières et 164 000 km2 de plaines inondables. L’extraction minière entraîne tout un ensemble de #menaces directes et indirectes pour la biodiversité, dont la principale est la perte et/ou la dégradation de l’#habitat sur les sites concernés.

    Pour autant, la biodiversité peut être affectée à distance du site : d’après l’étude, 37 % de la masse terrestre (non antarctique) se trouve actuellement à moins de 50 km d’une mine. Or, les impacts hors des sites existent bel et bien : l’exploitation artisanale de l’or à petite échelle est la plus grande source de pollution par le #mercure à l’échelle mondiale ; l’extraction de ressources peut accroître la #déforestation jusqu’à 70 km de distance des sites miniers en Amazonie ; l’exploitation du sable modifie la structure du lit des #rivières et les niveaux d’eau dans l’ensemble des deltas fluviaux.

    Une industrie lucrative

    Dans les environnements marins, les marées noires peuvent toucher de vastes zones. En 2010, l’explosion sous-marine de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon avait provoqué une marée noire sur 15 000 km2 dans le golfe du Mexique.

    Avec la demande croissante de minéraux métalliques et/ou de matériaux de construction, l’exploitation minière a la pelleteuse en poupe, ce qui fait de ce secteur une des industries les plus lucratives au monde, avec un chiffre d’affaires total de 863 milliards d’euros en 2022 pour les 40 plus grandes entreprises du secteur.

    Dans sa précipitation à fournir nos sociétés en produits miniers, cette industrie rechigne à protéger son environnement plus ou moins immédiat. Ainsi, entre 2000 et 2018, l’exploration et l’extraction minière ont causé 78 % des opérations de réduction ou de déclassement d’aires protégées dans le monde. Rien qu’en Afrique subsaharienne, le nombre de mines situées à moins de 10 km d’une aire protégée a augmenté de 250 % sur la même période !

    https://reporterre.net/L-extraction-miniere-menace-fortement-la-biodiversite

    #mines #minières #extraction_minière #extractivisme #menace

  • Ruth Werner - Courier, traitor, bigamist, fabulist : behind the mythology of a superspy
    https://www.coldspur.com/wp-content/uploads/2020/12/Courier-traitor-bigamist-fabulist-behind-the-mythology-of-a-superspy.pdf
    Ursula (Ruth Werner) Kuczynski et son frère Jürgen n’ont jamais renoncé à leurs convictions communistes et montrent par leurs exemple qu’il y a des intellectuels d’origine bourgeoise qui ne trahissent pas les résultats et conséquences des analyses de la société capitaliste qu’ils ont pu réaliser. Cette confiance en soi et dans la science font la différence avec des esprits comme George Orwell dont la développement suit un itinéraire plus aléatoire empreigné par le vécu et les sentiments qui à un age avancé les fait retourner vers une identité petite bourgeoise.

    Aprés la guerre Orwell dénonce aux services de sécurité britanniques ses connaissances pas assez fiables à son avis alors que les Kuczynski se tournent vers la recherche scientifique et l’écriture de livres socialistes pour enfants. L’auteur Ben Macintyre essaye de reconstruire l’itinéraire de l’espionne Sonya en partant de son autobiographie Sonjas Report .

    Agent Sonya: Moscow’s Most Daring Wartime Spy, Ben Macintyre, New York: Crown, an imprint of Random House, 2020, 377 pp., $28.00 (Hardback). ISBN: 9780593136300

    Writing biographies of intelligence agents is a hazardous business. The subjects have led a life of subterfuge and deception, and their memoirs are similarly untrustworthy; their employers indulge in campaigns of disinformation; such few archives as do exist have frequently been extensively redacted, or have false entries deposited in them. A methodology for sifting the chaff and reconciling conflicting stories is a necessary part of the armoury.

    #histoire #espionnage #guerre_froide #bombe_nucléaire #URSS #DDR

    • Merci @rastapopoulos , c’est très intéressant ce qu’on trouve che Agone.
      https://agone.org/malheureux-iii-1

      On peut en conclure que « Sonya », son frère Jürgen Kuczynski et Klaus Fuchs ont choisi un camp et Orwell celui de ses adversaires. C’est compréhensible vu les crimes des stalinistes dont l’auteur de « 1984 » a été le témoin. Ursula Kuczynski alias Sonja alias Ruth Werner alias Ursula Beurton dit qu’elle a travaillé pour l’Union Soviétique pas pour Staline.

      A l’époque il faillait choisir son camp. Orwell s’est alors rangé parmi les collaborateurs de l’empire britannique. Il me rappelle les étudiants de 1968 qu’on a appellé à rentrer chez eux et de continuer leur carrière dans les cabinets d’avocat et de médecin paternels.

      Orwell n’a pas été un méchant délateur qui livrait ses amis aux tortionnaires de la MI5, il a simplement agi selon sa situation de petit bourgeois qui préférait sa patrie au monde ouvrier communiste déchiré. J’en retien que dans sa vie personnelle il n’a en fin de compte pas été assez anarchiste pour occuper une place importante dans la généalogie des révolté/es.

      En 2006, dans la notice consacrée à l’entrée « Information Research Department (IRD) » du glossaire du livre de John Newsinger, La Politique selon Orwell (Agone, 2006, p. 331-332), Jean-Jacques Rosat donne une synthèse de l’affaire et toutes les références nécessaires pour s’en faire une idée précise :

      Organisme créé en 1948 par le gouvernement travailliste comme un bureau semi-officiel de propagande anticommuniste et antisoviétique du ministère des Affaires étrangères. En mars 1949, Celia Kirwan – proche amie d’Orwell et qui y travaillait – demanda à celui-ci de participer à ses activités . Orwell, trop malade, refusa d’écrire quoi que ce soit ; mais il communiqua une liste de personnalités qu’il pensait susceptibles de collaborer ; et, surtout, il proposa d’indiquer les noms d’écrivains et de journalistes qu’il tenait pour des crypto-communistes et auxquels l’IRD ferait mieux, selon lui, de ne pas s’adresser. Pour cela, il s’appuya sur une liste personnelle qu’il tenait à jour depuis 1942 et où figuraient les noms de toutes les personnalités du monde politique et intellectuel dont il se demandait de quel côté elles seraient en cas de conflit avec l’Union soviétique. Cette liste de 135 noms comporte des commentaires et de nombreux points d’interrogation, ratures et marques d’incertitude et d’hésitation . Le 2 mai 1949, Orwell adressa à Celia Kirwan une liste beaucoup plus courte de 38 noms, qui a été retrouvée dans les dossiers du ministère des Affaires étrangères et rendue publique en 2003 *. Quelque jugement que l’on porte sur ce geste accompli par Orwell en pleine guerre froide, trois points sont clairs : 1. l’IRD ne relevait ni de la police ni des services secrets britanniques (même si ceux-ci n’ont sûrement pas été indifférents à ses activités) ; 2. la liste d’Orwell n’était pas une liste noire : il ne s’agissait pas d’interdire à certains journalistes ou écrivains d’exercer leur profession mais de suggérer à l’IRD de ne pas les employer comme propagandistes anticommunistes parce qu’ils risquaient d’être peu fiables dans cette tâche ; 3. aucune des 38 personnalités figurant sur la liste n’a jamais eu d’ennui avec les autorités britanniques. Sur cette affaire, on peut lire George Orwell devant ses calomniateurs. Quelques observations [Ivrea, 1997, dont nous donnons de larges extraits ici]. Pour des mises au point plus récentes qui tiennent compte des derniers documents retrouvés, lire D. J. Taylor, Orwell. The Life, Londres, Chatto & Windus, 2003, p. 408-410, et Timothy Garton Ash, « Orwell’s List », The New York Review of Books, 25 septembre 2003, vol. 50, n° 14

      #stalinisme #anarchisme #révolte

    • Il me semble que tu évinces le contexte, car en 1949, on n’est pas du tout sur « les soviets », ni sur « le monde ouvrier », concernant l’URSS, on est en plein stalinisme hard, et on est l’année où Staline obtient les bombes nucléaires, en pleine guerre froide avec une vraie peur et un vrai risque en Europe de l’ouest (pour le commun des mortels) de se faire éclater la gueule. Du coup ya rien de spécialement petit bourgeois à être anti-stalinistes à ce moment de l’histoire (ni à aucun moment en fait…)

    • Les crimes de Staline et de l’homme soviétique (homo sovieticus) particuliérement opportuniste ne représentent qu’une face de la médaille communiste de l’époque. Klaus Fuchs et Ursula Kuczinski considèrent alors qu’ils travaillent pour l’Union Soviétique et le socialisme, une position contestée par Koestler, Orwell et d’autres bourgeois et petit bourgeois attachés à leur statut. Les qualifications de bourgeois / petit bourgeois / paysan / etc. ne sont en rien péjoratives mais la déscription de la situation de classe et de la conscience politique d’un individu. L’ex communiste Koestler par exemple est parfaitement bourgeois, Orwell plutôt petit bourgeois. Mais là n’est pas la question.

      Depuis la célèbre phrase de Karl Liebknecht sur les relations de classe en temps de guerre l’attitude à adopter est évidente pour chaque révolutionnaire :

      Der Hauptfeind steht im eigenen Land.

      Conclusion : A défaut de pouvoir les combattre on ne collabore pas avec les capitalistes maîtres de son pays parce que c’est eux les responsables qui profitent de la guerre froide et chaude. On ne les soutient pas. Jamais, d’aucune manière.

      Ceci signifie que pendant ses dernières années Orwell est tout sauf un anarchiste ou révolutionnaire mais un petit bourgeois très cultivé et talentueux. Pour lui contrairement à par exemple Lev Tolstoï ou Maxime Gorki le plus haut sommet qu’il peut alors atteindre est le statut de grand écrivain vivant dans une union symbiotique avec la société britannique.

      C’est dommage pour un grand écrivan qui sait viser plus loin, mais à cause de la force des choses de la vie c’est prèsque inévitable pour la majorité des esprits moindres passé un certain age. Pour eux la révolution c’est un truc de jeunesse et du passé. C’est d’ailleurs une des raison pour le déclin du parti Die Linke .
      O.K. on ne peut jamais être complètement sûr de telles conclusions, mais c’est que j’observe quand je regarde autour de moi.

    • La liste, fallait quand le faire, l’écrire et la remettre à un service odieux impérialiste ...

      En 2006 paraît un dernier supplément aux Complete Works of George Orwell, sous le titre Lost Orwell (Timewell Press). On y trouve reproduite la « Liste des noms de cryptocommunistes et de compagnons de route envoyés à l’IRD le 2 mai 1949 » (p. 141-149)  :

      Anderson, John → Journaliste spécialisé dans l’industrie (Manchester Guardian) → Probablement sympathisant seulement. Bon journaliste. Stupide.
      Aldred (nom de famille ? Guy) → Romancier (« Of many Men », etc.) → Q. si ouvertement membre du PC.
      Beavan, John → Rédacteur en chef (Manchester Evening News et autres journaux) → Sympathisant sentimental uniquement. Pas subjectivement pro-PC. Peut avoir changé d’avis.
      Blackett, Professeur P. M. S → Vulgarisateur scientifique (physique). → []
      Carr, Professeur E. H. → The « Times ». Aberystwith University. Livres sur Bakounine, etc. → []
      Chaplin, Chas → [] → ?
      Comfort, Alex → Médecin. Poète, romancier. Contribut. à « Now » & périodiques similaires. Connexions avec Grey Walls Press (?) → Potentiel seulement. Pacifiste-anarchiste. Très antibritannique. Subjectivement pro-allemand pendant la guerre, semble de tempérament pro-totalitaire. Pas moralement courageux. Une main paralysée. Très talentueux.
      Crowther, D. J. → Scientifique (biologiste ?) → ? Frère de Geoffrey Crowthern (de The Economist.) Oui
      Childe, Professeur, Gordon → Vulgarisateur scientifique (anthropologie et histoire des sciences) → ?
      Calder-Marshall, Arthur → Romancier et journaliste → Autrefois proche compagnon de route. A changé, mais pas de manière fiable. Personne non sincère.
      Deutscher, I. → Journaliste (Observer, Economist et autres journaux) → Sympathisant seulement. Juif polonais. Auparavant trotskiste, il a changé d’avis principalement à cause de la question juive. Pourrait changer à nouveau.
      Duranty, W. → Correspondant étranger bien connu. Livres sur la Russie, etc. → []
      Driberg, Tom → Député de Malden et chroniqueur (Reynolds’ News, anciennement Daily Express) → Généralement qualifié de « crypto », mais à mon avis PAS vraiment pro-PC.
      Dover, Cedric → Écrivain (« Half Caste », etc.) et journaliste. Formation à la zoologie → Eurasien. Très anti-Blancs (en particulier anti-États-Unis), mais aussi pro-russe sur tous les sujets importants. Très malhonnête. Personne vénale.
      Goldring, D. → Écrivain (principalement de romans) → Carrière déçue.
      Hooper, Major → Expert militaire. Brochures, livres sur l’URSS. → Q. si CR ou simplement sympathisant.
      Jacob, Alaric → Correspondant étranger (D. Express et autres journaux) → Époux d’Iris Morley.
      Kohn, Marjorie → Enseignante et journaliste (New Statesman et autres journaux) → Sympathisante stupide.
      Litauer, Stefan → Expert en affaires étrangères. Correspondant polonais du News Chron. → Manifestement malhonnête. Aurait été auparavant un soutien de Pilsudski.
      Morley, Iris → Correspondante étrangère (Observer et autres journaux) → Très solide compagnon de route. Q. si elle est ouvertement membre du PC.
      Macmurray, Professeur John → S.C.M. du National Peace Council. Mouvement personnaliste. Beaucoup de livres → ? Pas de lien structurel, mais subjectivement très pro-URSS. Il est à noter que la branche française du mouvement personnaliste est en partie dominée par les compagnons de route.
      Martin, H. Kingsley → Éd. New Statesman → ?? Trop malhonnête pour être « crypto » ou un compagnon de route mais sûrement pro-russe sur toutes les questions importantes.
      Mackenzie, Norman → Journaliste (New Statesman) → Q. si ouvertement membre du PC
      McLeod, Joseph → Écrivain sur des sujets théâtraux, anciennement annonceur de la BBC → ? ?
      Mitchison, N. → Romancière → Sympathisante idiote. Sœur de J. B. S. Haldane.
      Moore, Nicholas → Poète → ? Tendances anarchistes.
      McDiarmid, H. → Poète et critique. Mouvement nationaliste écossais → Communiste dissident, mais sûrement pro-russe.
      Mende, Tibor → Expert en affaires étrangères. Livres → Hongrois. Peut-être seulement sympathisant.
      Neumann, R. → Romancier. Éditeur d’« International Authors » pour Hutchinsons pendant quelques années. → Allemand
      O’Donnell, Peader → Critique → Q. si ouvertement membre du PC.
      Parker, Ralph → Correspondant étranger (News Chronicle et autres journaux) → []
      Priestley, J. B. → Romancier et présentateur radio → ?
      Padmore, George → Ligue contre l’impérialisme et activités apparentées. Beaucoup de brochures → Noir. Dissident communiste (expulsé à partir de 1936 environ), mais sûrement pro-russe.
      Redgrave, Michael → Acteur → ?
      Smollett, Peter (de son vrai nom Smolka ?) → Correspondant, D. Express, etc. Section russe du MOI pendant la guerre → Selon C. Pers, ne serait qu’un carriériste, mais il donne la forte impression d’être une sorte d’agent russe. Personne très louche.
      Schiff, Leonard (Révérend) → Pasteur de C.E. (moderniste). Connaissance de l’Inde. Brochures. → ?
      Werth, Alexander → Correspondant étranger (Manchester Guardian et autres journaux) → ? N’est peut-être pas un compagnon de route mais donne cette impression.
      Young, Commandant E. P. (R. N.) → Expert naval. Brochures → presque certainement « crypto » CR ?
      Stewart, Margaret → Journaliste (News Chronicle, Economist et autres journaux). Actif dans le NUJ → Il y a environ 5 ans, était membre clandestin du PC. Elle a peut-être changé d’avis. Personne très compétente.

      --*—

      Si tu veux avoir mon avis - en tant qu’être humain à peu près sincère il faut toujours se tenir à l’écart des services secrets, si on ne veut pas se compromettre moralement. Quand on apercoit même de loin un agent des services, on change de trottoir. S’ils frappent á ta porte tu la leur fermes au nez malgré leurs menaces. Si en ce faisant tu coinces violemment un de leurs membres, c’est bien fait. Ils n’avaient qu’à te laisser tranquille. Si tu acceptes les échanges même de mots avec eux, tu entres dans leur jeu où tu sera toujours perdant.

      C’est tout ce je peux tirer comme conclusion de ma propre expérience comme de celle me mes proches qui ont vécu la guerre, l’époque du troisième reich et l’après guerre immédiat

      Les personnages historiques comme Orwell ou les espions comme Klaus Fuchs avaient des raisons pour adopter une attitude différente. Qu’on les juge suivant leurs mobiles et erreurs, sachant qu’il est impossible de revivre leurs combats.

  • Bombes, grenades, torpilles… Où se trouvent les #munitions explosives ou toxiques enfouies dans les #fonds_marins français ?

    Franceinfo publie un #recensement inédit des #décharges d’explosifs immergées, en collaboration avec les équipes de l’émission « Vert de rage » diffusée sur France 5.

    Les deux guerres mondiales ont laissé derrière elles des centaines de tonnes de #munitions chimiques et conventionnelles (#bombes, #grenades, #torpilles) inutilisées. Dès 1920, le gouvernement français s’est servi de la mer comme d’une #poubelle pour se délester à moindre coût de ces #armes toxiques et dangereuses. Mais où se trouvent exactement ces décharges à munitions ? Dans un nouveau numéro, diffusé lundi 27 mai sur France 5, l’émission « Vert de rage » tente de reconstituer le plus précisément possible les emplacements de ces décharges, mais aussi la présence avérée de munitions ou de mines dans des épaves.

    Cet inventaire, non exhaustif, permet de donner une idée de l’ampleur des immersions, qu’elles soient volontaires ou non. Pour ce faire, les données ont été collectées à partir de plusieurs sources : cartes maritimes du service hydrographique et océanographique de la Marine (Shom), archives de presse, rapports de la Commission Oslo-Paris. Cette convention internationale définit les modalités de la coopération pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est.

    Certaines de ces zones sont bien identifiées et protégées par des interdictions de plongée, de baignade ou de navigation, établies par les préfectures maritimes et indiquées sur les cartes maritimes. Mais, en l’absence d’un recensement précis, d’autres zones restent accessibles au public, pouvant présenter un danger pour les pêcheurs et les plongeurs.

    Une pratique qui a eu cours jusqu’en 2002

    Dès les années 1920, trois méthodes de déversement en mer étaient utilisées pour se débarrasser des munitions : le sabordage des navires pour les faire couler ; le pétardage, qui consistait à enterrer des munitions pour les faire exploser (ce fut notamment le cas en baie de Somme) ; et l’immersion des munitions, par avion, sous-marin ou bateau, dans des endroits plus ou moins profonds, et peu fréquentés par les bateaux, comme la fosse du cap Levi (près de Cherbourg) ou celle des Casquets (au nord de Guernesey). C’est cette technique qui était la plus répandue. « A partir de 1998, la Marine a réduit substantiellement les volumes concernés. A cette période, le volume annuel de matière explosive était inférieur à 10 tonnes par an », explique la préfecture maritime, qui assure que les dernières opérations ont eu lieu quatre ans plus tard, en 2002.

    « On les balançait dans des zones qui n’étaient pas chalutées, pas travaillées par les pêcheurs. A l’époque, on pensait qu’elles allaient rester là, puis disparaître au fil du temps. » (Bertrand Sciboz, chasseur de mines)

    Le #pétardage, lui, fut pratiqué jusqu’au 30 avril 1997, jour de l’accident mortel du navire La Fidèle, relaté par France Bleu. Ce bateau de la Marine nationale avait pour mission d’immerger 1 450 grenades conventionnelles (représentant 600 kg d’explosifs) au large de Cherbourg. Les circonstances exactes restent floues, mais certaines grenades auraient explosé avant d’être immergées, tuant cinq personnes et en blessant dix-sept autres. Mais, selon Bertrand Sciboz, plongeur sous-marin français spécialisé dans le renflouement d’épaves, bien que le nombre de munitions immergées volontairement soit important, « la majorité des munitions présentes dans le milieu sous-marin est située dans des navires de guerre bombardés et naufragés ».

    « Un problème insoluble »

    Ces immersions font aujourd’hui courir deux risques majeurs pour la #biodiversité : les #explosions_sous-marines, qui font l’effet d’un tremblement de terre pour les poissons, et l’érosion des gaines en métal protégeant les munitions, qui provoque la fuite de substances toxiques. Dans le cas des #munitions_chimiques, le #gaz_moutarde finit ainsi par se diffuser dans les fonds marins, infectant les mollusques, les algues, les poissons, et par conséquent l’ensemble de la #chaîne_alimentaire. Aujourd’hui est une période critique puisque les scientifiques estiment qu’il faut 80 à 100 ans pour qu’une munition finisse par s’abîmer.

    La #dissémination de ces composants toxiques dans l’environnement sous-marin crée aussi une réaction chimique qui mène à l’#hypoxie, un taux d’oxygène insuffisant dans l’eau, étouffant au passage les organismes vivants, selon plusieurs études menées en mer Méditerranée et en mer Baltique, connue pour être la plus grande zone d’immersions du monde. « Le problème, c’est qu’aujourd’hui, nous n’avons pas de solution technique pour récupérer ces munitions chimiques », explique Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique à Paris.

    « Il est probable que le remède soit pire que le mal : manipuler des munitions érodées, qui sont depuis des dizaines d’années dans la mer, risque d’accélérer la dissémination des agents chimiques dans l’eau. » (Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique à Paris)

    Pour les munitions dites conventionnelles, plusieurs techniques existent, comme le #contre-minage, c’est-à-dire la destruction des armes avec d’autres charges explosives. Des opérations sont régulièrement menées par les préfectures maritimes, comme à Plouguerneau (Finistère) en octobre 2023. « Le contre-minage concerne principalement les mines allemandes qui étaient les plus dangereuses et les plus fréquentes », détaille Bertrand Sciboz. Dans certains cas, les munitions peuvent être « océanisées », c’est-à-dire déplacées vers une zone plus profonde, comme ce fut le cas à Nouméa en mai 2018.
    Des taux de composants d’explosifs jamais observés

    En plus de son travail de recensement, « Vert de rage » a réalisé, en partenariat avec le chercheur Aaron Beck, responsable du groupe de travail Geomar, des mesures de composants d’explosifs, tels que le #TNT et ses dérivés, dont la #toxicité est préoccupante. L’équipe a plongé à Fouras (Charente-Maritime), au-dessus d’une décharge d’explosifs recensée sur les cartes marines et interdite à la plongée, où des milliers de munitions de la Première Guerre mondiale ont été immergées par l’armée française dans les années 1920. Des prélèvements ont également été effectués dans une épave située dans la Manche, près de Courseulles (Calvados), rouverte à la plongée après avoir fait l’objet d’opérations de déminage.

    Résultat : à Fouras, les taux de #DANT, une molécule issue de la dégradation du TNT, atteignent 2 401 nanogrammes par litre (ng/L) dans l’eau. C’est le taux le plus élevé jamais observé par l’équipe de chercheurs allemands. Le TNT est potentiellement cancérigène et suspecté de nuire à la fertilité, ainsi que de provoquer des malformations génétiques. Un autre échantillon affiche 827 ng/L de tétryl, un explosif toxique utilisé dans le passé, jamais détecté auparavant par les chercheurs. Le sable de Fouras contient quant à lui jusqu’à 2 355 nanogrammes par kilo (ng/kg) de TNT brut. On y retrouve aussi des niveaux importants de cobalt, nickel, arsenic et plomb, qui dépassent les seuils de risques environnementaux.

    Même conclusion du côté de Courseulles, où les niveaux de contamination étaient similaires aux taux observés en mer Baltique, où plusieurs milliers de tonnes d’armes conventionnelles et chimiques ont été immergées. Des résidus de TNT et de ses dérivés, jusqu’à 242 ng/kg, ont aussi été retrouvés dans le sable.

    « Une question ultrasensible » pour les autorités

    A ce jour, le nombre exact de munitions immergées est difficile à estimer et aucune cartographie officielle et exhaustive n’existe, malgré la promesse du ministère de la Transition écologique d’en produire une. En décembre dernier, Patrice Vergriete, alors ministre délégué chargé du Logement, a affirmé que des travaux interministériels, « échelonnés sur plusieurs années », étaient en cours, sans préciser le calendrier. Trois ans plus tôt, Annick Billon, sénatrice centriste de la Vendée, avait posé une question similaire au gouvernement, et reçu exactement la même réponse.

    Comment expliquer la difficulté du recensement ? « Ces immersions ont été effectuées par des services différents, en métropole comme en outre-mer. L’administration est tellement complexe qu’elle ne sait pas elle-même où elle a mis ces dossiers », argue Bertrand Sciboz. « Les premières immersions ont été effectuées immédiatement après la Première Guerre mondiale, sans que ces opérations soient forcément documentées », renchérit Olivier Lepick.

    Toutes les données existantes sont donc produites par des commissions internationales comme la convention Ospar (Oslo-Paris) ou par des associations. Selon Olivier Lepick, un travail de recensement, même non exhaustif, a certainement dû être effectué par la Direction générale de l’armement (DGA) depuis le début des années 1990. « Le problème, c’est que ces données ne sont pas accessibles au public et encore moins publiées. » En effet, la France oppose le secret-défense à toute question relative au déversement d’armes en mer. Un secret-défense renforcé en 2008, sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

    « C’est une question ultrasensible : quels responsables politiques seraient prêts à reconnaître que la France a eu des comportements aussi inacceptables ?, poursuit Olivier Lepick. Ces immersions ont eu lieu à une époque où la sensibilité environnementale était très réduite, voire nulle. » De son côté, le caractère dangereux des munitions (en particulier chimiques) n’encourage pas les autorités à une diffusion d’informations trop précises sur les stocks et la localisation des armes immergées.

    https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/biodiversite/carte-visualisez-l-emplacement-des-munitions-chimiques-et-conventionnel

    #cartographie #visualisation #mer #France

  • The Adenauer-Ben-Gurion Deal - Did Israel´s atomic bomb emerge from the Nazi womb ? (2019)

    https://www.youtube.com/watch?v=E1yBJl2wI4M

    L’histoire que Gaby Weber a déterré en portant plainte contre les archives et institutions de plusieurs états va à l’encontre de tous les mythes officiels. Il faut insister sur le fait qu’elle est une journaliste expérimentée qui fournit toujours les document nécessaires pour prouver ses points de vue.

    https://gabyweber.com/index.php/en/films/159-adenauer-ben-gurion-deal

    It was the last days of the administration of US President Dwight Eisenhower. On December 13, 1960, “Time” magazine alerted the world: Israel was secretly building an atomic bomb. The commotion was big; nobody wanted to know anything about it. Had Eisenhower not always pronounced himself against a nuclear power in the Middle East?

    The international community and the parliaments were systematically lied to. The truth is that already in 1960, Western governments knew about the Israeli nuclear project. They had authorized and supported the construction of this weapon of mass destruction. The Israeli atomic bomb was built with German money and German technology, developed during World War II - in the name of the “Führer” Adolf Hitler. Their knowledge was put at the service of Israel since the late nineteen fifties. The heavy water came from Norway, where the Nazis had produced it during the war. The uranium was supplied, with the consent of the United States, by the Argentine Atomic Commission, which was created after 1945 with the assistance of Nazi scientists.

    #Allemagne #France #Israël #USA #Argentine #nazis #nucléaire #bombe_nucléaire

  • Quand le #comité_d’éthique du #CNRS se penche sur l’#engagement_public des chercheurs et chercheuses

    #Neutralité ? #Intégrité ? #Transparence ?

    Le Comité d’éthique du CNRS rappelle qu’il n’y a pas d’#incompatibilité de principe, plaide pour un « guide pratique de l’engagement » et place la direction de l’institution scientifique devant les mêmes obligations que les chercheurs.

    Avec la crise climatique, la pandémie de covid-19, l’accroissement des inégalités, le développement de l’intelligence artificielle ou les technologies de surveillance, la question de l’#engagement public des chercheurs est d’autant plus visible que les réseaux sociaux leur permettent une communication directe.

    Cette question dans les débats de société n’est pas nouvelle. De l’appel d’#Albert_Einstein, en novembre 1945, à la création d’un « #gouvernement_du_monde » pour réagir aux dangers de la #bombe_atomique à l’alerte lancée par #Irène_Frachon concernant le #Médiator, en passant par celle lancée sur les dangers des grands modèles de langage par #Timnit_Gebru et ses collègues, les chercheurs et chercheuses s’engagent régulièrement et créent même des sujets de #débats_publics.

    Une question renouvelée dans un monde incertain

    Le #comité_d'éthique_du_CNRS (#COMETS) ne fait pas semblant de le découvrir. Mais, selon lui, « face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée ». Il s’est donc auto-saisi pour « fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public » et vient de publier son #rapport sur le sujet [PDF].

    Il faut dire que les deux premières années du Covid-19 ont laissé des traces dans la communauté scientifique sur ces questions de prises de paroles des chercheurs. Le COMETS avait d’ailleurs publié en mai 2021 un avis accusant Didier Raoult alors que la direction du Centre avait rappelé tardivement à l’ordre, en août de la même année, et sans le nommer, le sociologue et directeur de recherche au CNRS Laurent Mucchielli, qui appelait notamment à suspendre la campagne de vaccination.

    Le COMETS relève que les chercheurs s’engagent selon des modalités variées, « de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog ». Il souligne aussi que les #réseaux_sociaux ont « sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés ».

    La présidente du comité d’éthique, Christine Noiville, égrène sur le site du CNRS, les « interrogations profondes » que ces engagements soulèvent :

    « S’engager publiquement, n’est-ce pas contraire à l’exigence d’#objectivité de la recherche ? N’est-ce pas risquer de la « politiser » ou de l’« idéologiser » ? S’engager ne risque-t-il pas de fragiliser la #crédibilité du chercheur, de mettre à mal sa réputation, sa carrière ? Est-on en droit de s’engager ? Pourrait-il même s’agir d’un devoir, comme certains collègues ou journalistes pourraient le laisser entendre ? »

    Pas d’incompatibilité de principe

    Le comité d’éthique aborde les inquiétudes que suscite cet engagement public des chercheurs et pose franchement la question de savoir s’il serait « une atteinte à la #neutralité_scientifique ? ». Faudrait-il laisser de côté ses opinions et valeurs pour « faire de la « bonne » science et produire des connaissances objectives » ?

    Le COMETS explique, en s’appuyant sur les travaux de l’anthropologue #Sarah_Carvallo, que ce concept de neutralité est « devenu central au XXe siècle, pour les sciences de la nature mais également pour les sciences sociales », notamment avec les philosophes des sciences #Hans_Reichenbach et #Karl_Popper, ainsi que le sociologue #Max_Weber dont le concept de « #neutralité_axiologique » – c’est-à-dire une neutralité comme valeur fondamentale – voudrait que le « savant » « tienne ses #convictions_politiques à distance de son enseignement et ne les impose pas subrepticement ».

    Mais le comité explique aussi, que depuis Reichenbach, Popper et Weber, la recherche a avancé. Citant le livre d’#Hilary_Putnam, « The Collapse of the Fact/Value Dichotomy and Other Essays », le COMETS explique que les chercheurs ont montré que « toute #science s’inscrit dans un #contexte_social et se nourrit donc de #valeurs multiples ».

    Le comité explique que le monde de la recherche est actuellement traversé de valeurs (citant le respect de la dignité humaine, le devoir envers les animaux, la préservation de l’environnement, la science ouverte) et que le chercheur « porte lui aussi nécessairement des valeurs sociales et culturelles dont il lui est impossible de se débarrasser totalement dans son travail de recherche ».

    Le COMETS préfère donc insister sur les « notions de #fiabilité, de #quête_d’objectivité, d’#intégrité et de #rigueur de la #démarche_scientifique, et de transparence sur les valeurs » que sur celle de la neutralité. « Dans le respect de ces conditions, il n’y a aucune incompatibilité avec l’engagement public du chercheur », assure-t-il.

    Liberté de s’engager... ou non

    Il rappelle aussi que les chercheurs ont une large #liberté_d'expression assurée par le code de l’éducation tout en n’étant pas exemptés des limites de droit commun (diffamation, racisme, sexisme, injure ...). Mais cette liberté doit s’appliquer à double sens : le chercheur est libre de s’engager ou non. Elle est aussi à prendre à titre individuel, insiste le COMETS : la démarche collective via les laboratoires, sociétés savantes et autres n’est pas la seule possible, même si donner une assise collective « présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.) ».

    Le comité insiste par contre sur le fait que, lorsque le chercheur s’engage, il doit « prendre conscience qu’il met en jeu sa #responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique ».

    Il appuie aussi sur le fait que sa position privilégiée « crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser ».

    Des #devoirs lors de la #prise_de_parole

    Outre le respect de la loi, le COMETS considère, dans ce cadre, que les chercheurs et chercheuses ont des devoirs vis-à-vis du public. Notamment, ils doivent s’efforcer de mettre en contexte le cadre dans lequel ils parlent. S’agit-il d’une prise de parole en nom propre ? Le thème est-il dans le domaine de compétence du chercheur ? Est-il spécialiste ? A-t-il des liens d’intérêts ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? Le #degré_de_certitude doit aussi être abordé. Le Comité exprime néanmoins sa compréhension de la difficulté pratique que cela implique, vu les limites de temps de paroles dans les médias.

    Une autre obligation qui devrait s’appliquer à tout engagement de chercheurs selon le COMETS, et pas des moindres, est de l’asseoir sur des savoirs « robustes » et le faire « reposer sur une démarche scientifique rigoureuse ».

    Proposition de co-construction d’un guide

    Le COMETS recommande, dans ce cadre, au CNRS d’ « élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public » ainsi que des formations. Il propose aussi d’envisager que ce guide soit élaboré avec d’autres organismes de recherche.

    La direction du CNRS à sa place

    Le Comité d’éthique considère en revanche que « le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements », que ce soit dans l’évaluation des travaux de recherche ou dans d’éventuelles controverses provoquées par un engagement public.

    « La direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs », affirme-t-il. La place du CNRS est d’intervenir en cas de problème d’#intégrité_scientifique ou de #déontologie, mais aussi de #soutien aux chercheurs engagés « qui font l’objet d’#attaques personnelles ou de #procès_bâillons », selon lui.

    Le comité aborde aussi le cas dans lequel un chercheur mènerait des actions de #désobéissance_civile, sujet pour le moins d’actualité. Il considère que le CNRS ne doit ni « se substituer aux institutions de police et de justice », ni condamner par avance ce mode d’engagement, « ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire ». Une #sanction_disciplinaire peut, par contre, être envisagée « éventuellement », « en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur ».

    Enfin, le Comité place la direction du CNRS devant les mêmes droits et obligations que les chercheurs dans son engagement vis-à-vis du public. Si le CNRS « prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution ».

    https://next.ink/985/quand-comite-dethique-cnrs-se-penche-sur-engagement-public-chercheurs-et-cherc

    • Avis du COMETS « Entre liberté et responsabilité : l’engagement public des chercheurs et chercheuses »

      Que des personnels de recherche s’engagent publiquement en prenant position dans la sphère publique sur divers enjeux moraux, politiques ou sociaux ne constitue pas une réalité nouvelle. Aujourd’hui toutefois, face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée. Nombre d’entre eux s’investissent pour soutenir des causes ou prendre position sur des enjeux de société – lutte contre les pandémies, dégradation de l’environnement, essor des technologies de surveillance, etc. – selon des modalités variées, de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog. Par ailleurs, le développement des médias et des réseaux sociaux a sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés.

      Dans le même temps, de forts questionnements s’expriment dans le monde de la recherche. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les modalités de l’engagement public, son opportunité et son principe même. Ils se demandent si et comment s’engager publiquement sans mettre en risque leur réputation et les valeurs partagées par leurs communautés de recherche, sans déroger à la neutralité traditionnellement attendue des chercheurs, sans perdre en impartialité et en crédibilité. Ce débat, qui anime de longue date les sciences sociales, irrigue désormais l’ensemble de la communauté scientifique.

      C’est dans ce contexte que s’inscrit le présent avis. Fruit d’une auto-saisine du COMETS, il entend fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public.

      Le COMETS rappelle d’abord qu’il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre, d’un côté, l’engagement public du chercheur et, de l’autre, les normes attribuées ou effectivement applicables à l’activité de recherche. C’est notamment le cas de la notion de « neutralité » de la science, souvent considérée comme une condition indispensable de production de connaissances objectives et fiables. Si on ne peut qu’adhérer au souci de distinguer les faits scientifiques des opinions, il est illusoire de penser que le chercheur puisse se débarrasser totalement de ses valeurs : toute science est une entreprise humaine, inscrite dans un contexte social et, ce faisant, nourrie de valeurs. L’enjeu premier n’est donc pas d’attendre du chercheur qu’il en soit dépourvu mais qu’il les explicite et qu’il respecte les exigences d’intégrité et de rigueur qui doivent caractériser la démarche scientifique.

      Si diverses normes applicables à la recherche publique affirment une obligation de neutralité à la charge du chercheur, cette obligation ne fait en réalité pas obstacle, sur le principe, à la liberté et à l’esprit critique indissociables du travail de recherche, ni à l’implication du chercheur dans des débats de société auxquels, en tant que détenteur d’un savoir spécialisé, il a potentiellement une contribution utile à apporter.

      Le COMETS estime que l’engagement public doit être compris comme une liberté individuelle et ce, dans un double sens :

      -- d’une part, chaque chercheur doit rester libre de s’engager ou non ; qu’il choisisse de ne pas prendre position dans la sphère publique ne constitue en rien un manquement à une obligation professionnelle ou morale qui lui incomberait ;

      -- d’autre part, le chercheur qui s’engage n’a pas nécessairement à solliciter le soutien de communautés plus larges (laboratoire, société savante, etc.), même si le COMETS considère que donner une assise collective à une démarche d’engagement présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.).

      S’il constitue une liberté, l’engagement nécessite également pour le chercheur de prendre conscience qu’il met en jeu sa responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique. En effet, en s’engageant publiquement, le chercheur met potentiellement en jeu non seulement sa réputation académique et sa carrière, mais aussi l’image de son institution, celle de la recherche et, plus généralement, la qualité du débat public auquel il contribue ou qu’il entend susciter. Le chercheur dispose d’une position privilégiée qui crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser. Le COMETS rappelle dès lors que tout engagement public doit se faire dans le respect de devoirs.

      Ces devoirs concernent en premier lieu la manière dont le chercheur s’exprime publiquement. Dans le sillage de son avis 42 rendu à l’occasion de la crise du COVID-19, le COMETS rappelle que le chercheur doit s’exprimer non seulement en respectant les règles de droit (lois mémorielles, lois condamnant la diffamation, l’injure, etc.) mais aussi en offrant à son auditoire la possibilité de mettre son discours en contexte, au minimum pour ne pas être induit en erreur. A cet effet, le chercheur doit prendre soin de :

      situer son propos : parle-t-il en son nom propre, au nom de sa communauté de recherche, de son organisme de rattachement ? Quel est son domaine de compétence ? Est-il spécialiste de la question sur laquelle il prend position ? Quels sont ses éventuels liens d’intérêts (avec telle entreprise, association, etc.) ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? ;
      mettre son propos en perspective : quel est le statut des résultats scientifiques sur lesquels il s’appuie ? Des incertitudes demeurent-elles ? Existe-t-il des controverses ?

      Le COMETS a conscience de la difficulté pratique à mettre en œuvre certaines de ces normes (temps de parole limité dans les médias, espace réduit des tribunes écrites, etc.). Leur respect constitue toutefois un objectif vers lequel le chercheur doit systématiquement tendre. Ce dernier doit également réfléchir, avant de s’exprimer publiquement, à ce qui fonde sa légitimité à le faire.

      En second lieu, les savoirs sur lesquels le chercheur assoit son engagement doivent être robustes et reposer sur une démarche scientifique rigoureuse. Engagé ou non, il doit obéir aux exigences classiques d’intégrité et de rigueur applicables à la production de connaissances fiables – description du protocole de recherche, référencement des sources, mise à disposition des résultats bruts, révision par les pairs, etc. Le COMETS rappelle que ces devoirs sont le corollaire nécessaire de la liberté de la recherche, qui est une liberté professionnelle, et que rien, pas même la défense d’une cause, aussi noble soit-elle, ne justifie de transiger avec ces règles et de s’accommoder de savoirs fragiles. Loin d’empêcher le chercheur d’affirmer une thèse avec force dans l’espace public, ces devoirs constituent au contraire un soutien indispensable à l’engagement public auquel, sinon, il peut lui être facilement reproché d’être militant.

      Afin de munir ceux qui souhaitent s’engager de repères et d’outils concrets, le COMETS invite le CNRS à élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public. Si de nombreux textes existent d’ores et déjà qui énoncent les droits et devoirs des chercheurs – statut du chercheur, chartes de déontologie, avis du COMETS, etc. –, ils sont éparpillés, parfois difficiles à interpréter (sur l’obligation de neutralité notamment) ou complexes à mettre en œuvre (déclaration des liens d’intérêt dans les médias, etc.). Un guide de l’engagement public devrait permettre de donner un contenu lisible, concret et réaliste à ces normes apparemment simples mais en réalité difficiles à comprendre ou à appliquer.

      Le COMETS recommande au CNRS d’envisager l’élaboration d’un tel guide avec d’autres organismes de recherche qui réfléchissent actuellement à la question. Le guide devrait par ailleurs être accompagné d’actions sensibilisant les chercheurs aux enjeux et techniques de l’engagement public (dont des formations à la prise de parole dans les médias).

      Le COMETS s’est enfin interrogé sur le positionnement plus général du CNRS à l’égard de l’engagement public.

      Le COMETS considère que de manière générale, le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements. En pratique :

      – dans l’évaluation de leurs travaux de recherche, les chercheurs ne devraient pas pâtir de leur engagement public. L’évaluation de l’activité de recherche d’un chercheur ne devrait porter que sur ses travaux de recherche et pas sur ses engagements publics éventuels ;

      – lorsque l’engagement public conduit à des controverses, la direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs ;

      – le CNRS doit en revanche intervenir au cas où un chercheur contreviendrait à l’intégrité ou à la déontologie (au minimum, les référents concernés devraient alors être saisis) ou en cas de violation des limites légales à la liberté d’expression (lois mémorielles, lois réprimant la diffamation, etc.) ; de même, l’institution devrait intervenir pour soutenir les chercheurs engagés qui font l’objet d’attaques personnelles ou de procès bâillons.

      – au cas où un chercheur mènerait des actions de désobéissance civile, le CNRS ne devrait pas se substituer aux institutions de police et de justice. Il ne devrait pas condamner ex ante ce mode d’engagement, ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire. A posteriori, en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur, le CNRS peut éventuellement considérer que son intervention est requise et prendre une sanction.

      Plus généralement, le COMETS encourage le CNRS à protéger et à favoriser la liberté d’expression de son personnel. Il est en effet de la responsabilité des institutions et des communautés de recherche de soutenir la confrontation constructive des idées, fondée sur la liberté d’expression.

      Si le CNRS venait à décider de s’engager en tant qu’institution, c’est-à-dire s’il prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution.

      Pour télécharger l’avis :
      https://comite-ethique.cnrs.fr/wp-content/uploads/2023/09/AVIS-2023-44.pdf

      https://comite-ethique.cnrs.fr/avis-du-comets-entre-liberte-et-responsabilite-engagement-public

      #avis

  • Épaves de guerre en mer du Nord - Une bombe à retardement - | ARTE
    https://www.arte.tv/fr/videos/110288-000-A/epaves-de-guerre-en-mer-du-nord-une-bombe-a-retardement

    C’est une véritable #bombe_à_retardement que l’Europe a jusque-là préféré ignorer. La mer du Nord ressemble à un gigantesque #cimetière_de_navires et d’avions : dans ses fonds gisent quelque 10 000 #épaves, dont 700 vestiges des deux #guerres_mondiales encore chargés de munitions rouillées. Des substances hautement toxiques s’en échappent parfois – particulièrement le trinitrotoluène (TNT) –, qui contaminent l’environnement et la faune marine dans des rayons étendus, pouvant aussi empoisonner les hommes. À seulement quelques encablures de la cité de Sheerness, à l’est de Londres, le cargo américain SS Richard-Montgomery, qui a coulé le 20 août 1944 et dont les mâts émergent à l’horizon, renferme encore 1 400 tonnes d’explosifs. Si personne n’ose s’en approcher, c’est parce que ses bombes sont susceptibles de créer une déflagration telle qu’elle pourrait provoquer un tsunami et menacer la capitale britannique. Alors que le recensement de ces croiseurs, patrouilleurs, submersibles et autres engins marins devrait prendre des décennies et se fait dans des conditions périlleuses et très coûteuses, une équipe internationale de scientifiques se lance aujourd’hui à leur recherche.

    https://seenthis.net/messages/966395

  • Blinne Ní Ghrálaigh: Lawyer’s closing statement in ICJ case against Israel praised

    This was the powerful closing statement in South Africa’s genocide case against Israel.

    Senior advocate #Blinne_Ní_Ghrálaigh addressed the International Court of Justice on day one of the hearing.

    ICJ: Blinne Ní Ghrálaigh’s powerful closing statement in South Africa case against Israel
    https://www.youtube.com/watch?v=ttrJd2aWF-Y&embeds_referring_euri=https%3A%2F%2Fwww.thenational.sco

    https://www.thenational.scot/news/24042943.blinne-ni-ghralaigh-lawyers-closing-statement-icj-case-israel

    #Cour_internationale_de_justice (#CIJ) #Israël #Palestine #Afrique_du_Sud #justice #génocide

    • Israël commet-il un génocide à #Gaza ? Le compte rendu d’une #audience historique

      Alors que les massacres israéliens à Gaza se poursuivent, l’Afrique du Sud a tenté de démontrer, jeudi 11 et vendredi 12 janvier devant la justice onusienne, qu’un génocide est en train d’être commis par Israël à Gaza.

      « Une #calomnie », selon l’État hébreu.

      Devant le palais de la Paix de #La_Haye (Pays-Bas), la bataille des #mots a commencé avant même l’audience. Jeudi 11 janvier au matin, devant la #Cour_de_justice_internationale_des_Nations_unies, des manifestants propalestiniens ont exigé un « cessez-le-feu immédiat » et dénoncé « l’#apartheid » en cours au Proche-Orient. Face à eux, des familles d’otages israélien·nes ont montré les photos de leurs proches kidnappés le 7 octobre par le Hamas.

      Pendant deux jours, devant 17 juges internationaux, alors que les massacres israéliens à Gaza continuent de tuer, de déplacer et de mutiler des civils palestiniens (à 70 % des femmes et des enfants, selon les agences onusiennes), le principal organe judiciaire des Nations unies a examiné la requête, précise et argumentée, de l’Afrique du Sud, destinée à imposer au gouvernement israélien des « #mesures
      _conservatoires » pour prévenir un génocide de la population palestinienne de Gaza.

      La première et plus urgente de ces demandes est l’arrêt immédiat des #opérations_militaires israéliennes à Gaza. Les autres exigent des mesures urgentes pour cesser les tueries, les déplacements de population, faciliter l’accès à l’eau et à la nourriture, et prévenir tout génocide.

      La cour a aussi entendu les arguments d’Israël, qui nie toute #intention_génocidaire et a martelé son « #droit_à_se_défendre, reconnu par le droit international ».

      L’affaire ne sera pas jugée sur le fond avant longtemps. La décision sur les « mesures conservatoires », elle, sera rendue « dès que possible », a indiqué la présidente de la cour, l’États-Unienne #Joan_Donoghue.

      Rien ne dit que les 17 juges (dont un Sud-Africain et un Israélien, Aharon Barak, ancien juge de la Cour suprême israélienne, de réputation progressiste mais qui n’a jamais critiqué la colonisation israélienne) donneront raison aux arguments de l’Afrique du Sud, soutenue dans sa requête par de nombreux États du Sud global. Et tout indique qu’une décision sanctionnant Israël serait rejetée par un ou plusieurs #vétos au sein du #Conseil_de_sécurité des Nations unies.

      Cette #audience solennelle, retransmise sur le site de l’ONU (revoir les débats du jeudi 11 et ceux du vendredi 12), et relayée par de nombreux médias internationaux, a pourtant revêtu un caractère extrêmement symbolique, où se sont affrontées deux lectures radicalement opposées de la tragédie en cours à Gaza.

      « Israël a franchi une limite »

      Premier à prendre la parole, l’ambassadeur sud-africain aux Pays-Bas, #Vusi_Madonsela, a d’emblée replacé « les actes et omissions génocidaires commis par l’État d’Israël » dans une « suite continue d’#actes_illicites perpétrés contre le peuple palestinien depuis 1948 ».

      Face aux juges internationaux, il a rappelé « la Nakba du peuple palestinien, conséquence de la #colonisation_israélienne qui a [...] entraîné la #dépossession, le #déplacement et la #fragmentation systématique et forcée du peuple palestinien ». Mais aussi une « #occupation qui perdure depuis cinquante-six ans, et le siège de seize ans imposé [par Israël] à la bande de Gaza ».

      Il a décrit un « régime institutionnalisé de lois, de politiques et de pratiques discriminatoires, mises en place [par Israël – ndlr] pour établir sa #domination et soumettre le peuple palestinien à un apartheid », dénonçant des « décennies de violations généralisées et systématiques des #droits_humains ».

      « En tendant la main aux Palestiniens, nous faisons partie d’une seule humanité », a renchéri le ministre de la justice sud-africain, #Ronald_Ozzy_Lamola, citant l’ancien président Nelson Mandela, figure de la lutte contre l’apartheid dans son pays.

      D’emblée, il a tenté de déminer le principal argument du gouvernement israélien, selon lequel la procédure devant la Cour internationale de justice est nulle et non avenue, car Israël mènerait une #guerre_défensive contre le #Hamas, au nom du #droit_à_la_légitime_défense garanti par l’article 51 de la charte des Nations unies – un droit qui, selon la Cour internationale de justice, ne s’applique pas aux #Territoires_occupés. « Gaza est occupée. Israël a gardé le contrôle de Gaza. [...] Ses actions renforcent son occupation : la légitime défense ne s’applique pas », insistera un peu plus tard l’avocat Vaughan Lowe.

      « L’Afrique du Sud, affirme le ministre sud-africain, condamne de manière catégorique la prise pour cibles de civils par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens le 7 octobre 2023. Cela étant dit, aucune attaque armée contre le territoire d’un État, aussi grave soit-elle, même marquée par la commission des #crimes atroces, ne saurait constituer la moindre justification ni le moindre prétexte, pour se rendre coupable d’une violation, ni sur le plan juridique ni sur le plan moral », de la #convention_des_Nations_unies_pour_la_prévention_et_la_répression_du_crime_de_génocide, dont est accusé l’État hébreu.

      « La réponse d’Israël à l’attaque du 7 octobre, a-t-il insisté, a franchi cette limite. »

      Un « génocide » au caractère « systématique »

      #Adila_Hassim, principale avocate de l’Afrique du Sud, s’est évertuée à démontrer méthodiquement comment Israël a « commis des actes relevant de la définition d’#actes_de_génocide », dont elle a martelé le caractère « systématique ».

      « Les Palestiniens sont tués, risquent la #famine, la #déshydratation, la #maladie, et ainsi la #mort, du fait du siège qu’Israël a organisé, de la #destruction des villes, d’une aide insuffisante autorisée à atteindre la population, et de l’impossibilité à distribuer cette maigre aide sous les #bombardements incessants, a-t-elle énuméré. Tout ceci rend impossible d’avoir accès aux éléments essentiels de la vie. »

      Adila Hassim s’est attelée à démontrer en quoi la #guerre israélienne cochait les cases du génocide, tel qu’il est défini à l’article 2 de la convention onusienne : « Des actes commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. »

      Le « meurtre des membres du groupe », premier élément du génocide ? Adila Hassim évoque le « meurtre de masse des Palestiniens », les « 23 000 victimes dont 70 % sont des femmes ou des enfants », et « les 7 000 disparus, présumés ensevelis sous les décombres ». « Il n’y a pas de lieu sûr à Gaza », dit-elle, une phrase empruntée aux responsables de l’ONU, répétée de nombreuses fois par la partie sud-africaine.

      Hasssim dénonce « une des campagnes de bombardement les plus lourdes dans l’histoire de la guerre moderne » : « 6 000 bombes par semaine dans les trois premières semaines », avec des « #bombes de 900 kilos, les plus lourdes et les plus destructrices », campagne qui vise habitations, abris, écoles, mosquées et églises, dans le nord et le sud de la bande de Gaza, camps de réfugié·es inclus.

      « Les Palestiniens sont tués quand ils cherchent à évacuer, quand ils n’ont pas évacué, quand ils ont pris la #fuite, même quand ils prennent les itinéraires présentés par Israël comme sécurisés. (...) Des centaines de familles plurigénérationelles ont été décimées, personne n’ayant survécu (...) Personne n’est épargné, pas même les nouveau-nés (...) Ces massacres ne sont rien de moins que la #destruction_de_la_vie_palestinienne, infligée de manière délibérée. » Selon l’avocate, il existe bien une #intention_de_tuer. « Israël, dit-elle, sait fort bien combien de civils perdent leur vie avec chacune de ces bombes. »

      L’« atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe », et la « soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle », autres éléments constitutifs du génocide ? Adila Hassim évoque « la mort et la #mutilation de 60 000 Palestiniens », les « civils palestiniens arrêtés et emmenés dans une destination inconnue », et détaille le « #déplacement_forcé de 85 % des Palestiniens de Gaza » depuis le 13 octobre, sans retour possible pour la plupart, et qui « répète une longue #histoire de #déplacements_forcés de masse ».

      Elle accuse Israël de « vise[r] délibérément à provoquer la faim, la déshydratation et l’inanition à grande échelle » (93 % de la population souffrent d’un niveau critique de faim, selon l’Organisation mondiale de la santé), l’aide empêchée par les bombardements et qui « ne suffit tout simplement pas », l’absence « d’eau propre », le « taux d’épidémies et de maladies infectieuses qui s’envole », mais aussi « les attaques de l’armée israélienne prenant pour cible le système de santé », « déjà paralysé par des années de blocus, impuissant face au nombre de blessures ».

      Elle évoque de nombreuses « naissances entravées », un autre élément constitutif du génocide.

      « Les génocides ne sont jamais annoncés à l’avance, conclut-elle. Mais cette cour a devant elle 13 semaines de #preuves accumulées qui démontrent de manière irréfutable l’existence d’une #ligne_de_conduite, et d’#intentions qui s’y rapportent, justifiant une allégation plausible d’actes génocidaires. »

      Une « #déshumanisation_systématique » par les dirigeants israéliens

      Un autre avocat s’avance à la barre. Après avoir rappelé que « 1 % de la population palestinienne de Gaza a été systématiquement décimée, et qu’un Gazaoui sur 40 a été blessé depuis le 7 octobre », #Tembeka_Ngcukaitobi décortique les propos des autorités israéliennes.

      « Les dirigeants politiques, les commandants militaires et les représentants de l’État d’Israël ont systématiquement et explicitement exprimé cette intention génocidaire, accuse-t-il. Ces déclarations sont ensuite reprises par des soldats, sur place à Gaza, au moment où ils anéantissent la population palestinienne et l’infrastructure de Gaza. »

      « L’intention génocidaire spécifique d’Israël, résume-t-il, repose sur la conviction que l’ennemi n’est pas simplement le Hamas, mais qu’il est à rechercher au cœur même de la société palestinienne de Gaza. »

      L’avocat multiplie les exemples, encore plus détaillés dans les 84 pages de la requête sud-africaine, d’une « intention de détruire Gaza aux plus hauts rangs de l’État » : celle du premier ministre, #Benyamin_Nétanyahou, qui, à deux reprises, a fait une référence à #Amalek, ce peuple que, dans la Bible (I Samuel XV, 3), Dieu ordonne d’exterminer ; celle du ministre de la défense, qui a comparé les Palestiniens à des « #animaux_humains » ; le président israélien #Isaac_Herzog, qui a jugé « l’entièreté de la nation » palestinienne responsable ; celle du vice-président de la Knesset, qui a appelé à « l’anéantissement de la bande de Gaza » (des propos condamnés par #Nétanyahou) ; ou encore les propos de nombreux élus et députés de la Knesset appelant à la destruction de Gaza.

      Une « déshumanisation systématique », dans laquelle les « civils sont condamnés au même titre que le Hamas », selon Tembeka Ngcukaitobi.

      « L’intention génocidaire qui anime ces déclarations n’est nullement ambiguë pour les soldats israéliens sur le terrain : elle guide leurs actes et leurs objectifs », poursuit l’avocat, qui diffuse devant les juges des vidéos où des soldats font eux aussi référence à Amalek, « se filment en train de commettre des atrocités contre les civils à Gaza à la manière des snuff movies », ou écoutent un réserviste de 95 ans les exhorter à « tirer une balle » sur leur « voisin arabe » et les encourager à une « destruction totale ».

      L’avocat dénonce le « manquement délibéré de la part du gouvernement à son obligation de condamner, de prévenir et de réprimer une telle incitation au génocide ».

      Après une plaidoirie technique sur la capacité à agir de l’Afrique du Sud, #John_Dugard insiste : « Gaza est devenu un #camp_de_concentration où un génocide est en cours. »

      L’avocat sud-africain #Max_du_Plessis exhorte la cour à agir face à Israël, qui « depuis des années (...) s’estime au-delà et au-dessus de la loi », une négligence du droit rendue possible par l’#indifférence de la communauté internationale, qui a su, dans d’autres conflits (Gambie, Bosnie, Ukraine) décider qu’il était urgent d’agir.

      « Gaza est devenu inhabitable », poursuit l’avocate irlandaise #Blinne_Ni_Ghralaigh. Elle énumère d’autres chiffres : « Au rythme actuel », égrène-t-elle, « 247 Palestiniens tués en moyenne chaque jour », dont « 48 mères » et « plus de 117 enfants », et « 629 blessés ». Elle évoque ces enfants dont toute la famille a été décimée, les secouristes, les enseignants, les universitaires et les journalistes tués dans des proportions historiques.

      « Il s’agit, dit-elle, du premier génocide de l’Histoire dont les victimes diffusent leur propre destruction en temps réel, dans l’espoir vain que le monde fasse quelque chose. » L’avocate dévoile à l’écran les derniers mots du docteur #Mahmoud_Abu_Najela (Médecins sans frontières), tué le 23 novembre à l’hôpital Al-Awda, écrits au feutre sur un tableau blanc : « À ceux qui survivront. Nous avons fait ce que nous pouvons. Souvenez-vous de nous. »

      « Le monde, conclut Blinne Ni Ghralaigh, devrait avoir #honte. »

      La réponse d’Israël : une « calomnie »

      Vendredi 12 janvier, les représentants d’Israël se sont avancés à la barre. Leur argumentation a reposé sur deux éléments principaux : un, la Cour internationale de justice n’a pas à exiger de « mesures conservatoires » car son armée ne commet aucun génocide ; deux, si génocide il y a, il a été commis par le Hamas le 7 octobre 2023.

      Premier à prendre la parole, #Tal_Becker, conseiller juridique du ministère des affaires étrangères israélien, invoque l’Histoire, et le génocide infligé aux juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, « le meurtre systématique de 6 millions de juifs dans le cadre d’une destruction totale ».

      « Israël, dit-il, a été un des premiers États à ratifier la convention contre le génocide. » « Pour Israël, insiste-t-il, “#jamais_plus” n’est pas un slogan, c’est une #obligation_morale suprême. »

      Dans « une époque où on fait bon marché des mots, à l’heure des politiques identitaires et des réseaux sociaux », il dénonce une « #instrumentalisation » de la notion de génocide contre Israël.

      Il attaque une présentation sud-africaine « totalement dénaturée des faits et du droit », « délibérément manipulée et décontextualisée du conflit actuel », qualifiée de « calomnie ».

      Alors que les avocats sud-africains avaient expliqué ne pas intégrer les massacres du Hamas dans leur requête devant la justice onusienne, car « le Hamas n’est pas un État », Tal Becker estime que l’Afrique du Sud « a pris le parti d’effacer l’histoire juive et tout acte ou responsabilité palestiniens », et que les arguments avancés « ne se distinguent guère de ceux opposés par le Hamas dans son rejet d’Israël ». « L’Afrique du Sud entretient des rapports étroits avec le Hamas » et le « soutient », accuse-t-il.

      « C’est une guerre qu’Israël n’a pas commencée », dit-il en revenant longuement, images et enregistrements à l’appui, sur les atrocités commises par le Hamas et d’autres groupes palestiniens le 7 octobre, « le plus important massacre de juifs en un jour depuis la #Shoah ».

      « S’il y a eu des actes que l’on pourrait qualifier de génocidaires, [ils ont été commis] contre Israël », dit-il, évoquant le « #programme_d’annihilation » des juifs par le Hamas. « Israël ne veut pas détruire un peuple, poursuit-il. Mais protéger un peuple : le sien. »

      Becker salue les familles d’otages israéliens présentes dans la salle d’audience, et montre certains visages des 130 personnes kidnappées dont le pays est toujours sans nouvelle. « Y a-t-il une raison de penser que les personnes que vous voyez à l’écran ne méritent pas d’être protégées ? », interroge-t-il.

      Pour ce représentant de l’État israélien, la demande sud-africaine de mesures conservatoires revient à priver le pays de son droit à se défendre.

      « Israël, poursuit-il, se défend contre le Hamas, le Djihad palestinien et d’autres organisations terroristes dont la brutalité est sans limite. Les souffrances sont tragiques, sont déchirantes. Les conséquences sont parfaitement atroces pour les civils du fait du comportement du Hamas, qui cherche à maximiser les pertes de civils alors qu’Israël cherche à les minorer. »

      Becker s’attarde sur la « #stratégie_méprisable » du Hamas, une « méthode de guerre intégrée, planifiée, de grande ampleur et odieuse ». Le Hamas, accuse-t-il, « a, de manière systématique, fondu ses opérations militaires au sein de zones civiles densément peuplées », citant écoles, mosquées et hôpitaux, des « milliers de bâtiments piégés » et « utilisés à des fins militaires ».

      Le Hamas « a fait entrer une quantité innombrable d’armes, a détourné l’aide humanitaire ». Remettant en cause le chiffre « non vérifié » de 23 000 victimes (pourtant confirmé par les Nations unies), Tal Becker estime que de nombreuses victimes palestiniennes sont des « militants » qui ont pu prendre « une part directe aux hostilités ». « Israël respecte le droit », martèle-t-il. « Si le Hamas abandonne cette stratégie, libère les otages, hostilités et violences prendront fin. »

      Ponte britannique du droit, spécialiste des questions juridiques liées aux génocides, #Malcom_Shaw embraie, toujours en défense d’Israël. Son discours, technique, est parfois interrompu. Il se perd une première fois dans ses notes, puis soupçonne un membre de son équipe d’avoir « pris [sa] #plaidoirie pour un jeu de cartes ».

      Shaw insiste : « Un conflit armé coûte des vies. » Mais Israël, dit-il, « a le droit de se défendre dans le respect du #droit_humanitaire », citant à l’audience les propos de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le 19 octobre 2023. Il poursuit : « L’#usage_de_la_force ne peut constituer en soi un acte génocidaire. » « Israël, jure-t-il, ne cible que les cibles militaires, et ceci de manière proportionnée dans chacun des cas. »

      « Peu d’éléments démontrent qu’Israël a eu, ou a, l’intention de détruire tout ou partie du peuple palestinien », plaide-t-il. Shaw estime que nombre de propos tenus par des politiciens israéliens ne doivent pas être pris en compte, car ils sont « pris au hasard et sont sortis de leur contexte », parce qu’ils témoignent d’une « #détresse » face aux massacres du 7 octobre, et que ceux qui les ont prononcés n’appartiennent pas aux « autorités pertinentes » qui prennent les décisions militaires, à savoir le « comité ministériel chargé de la sécurité nationale » et le « cabinet de guerre ».

      Pour étayer son argumentation, Shaw cite des directives (non publiques) de Benyamin Nétanyahou destinées, selon lui, à « éviter un désastre humanitaire », à proposer des « solutions pour l’approvisionnement en eau », « promouvoir la construction d’hôpitaux de campagne au sud de la bande de Gaza » ; les déclarations publiques de Benyamin Nétanyahou à la veille de l’audience (« Israël n’a pas l’intention d’occuper de façon permanente la bande de Gaza ou de déplacer sa population civile ») ; d’autres citations du ministre de la défense qui assure ne pas s’attaquer au peuple palestinien dans son ensemble.

      « La requête de l’Afrique du Sud brosse un tableau affreux, mais incomplet et profondément biaisé », renchérit #Galit_Rajuan, conseillère au ministère de la justice israélien, qui revient longuement sur les #responsabilités du Hamas, sa stratégie militaire au cœur de la population palestinienne. « Dans chacun des hôpitaux que les forces armées israéliennes ont fouillés à Gaza, elles ont trouvé des preuves d’utilisation militaire par le Hamas », avance-t-elle, des allégations contestées.

      « Certes, des dommages et dégâts ont été causés par les hostilités dans les hôpitaux, parfois par les forces armées israéliennes, parfois par le Hamas, reconnaît-elle, mais il s’agit des conséquences de l’utilisation odieuse de ces hôpitaux par le Hamas. »

      Rajuan martèle enfin qu’Israël cherche à « atténuer les dommages causés aux civils » et à « faciliter l’aide humanitaire ». Des arguments connus, que de très nombreuses ONG, agences des Nations unies et journalistes gazaouis présents sur place réfutent régulièrement, et que les journalistes étrangers ne peuvent pas vérifier, faute d’accès à la bande de Gaza.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/120124/israel-commet-il-un-genocide-gaza-le-compte-rendu-d-une-audience-historiqu

    • Gaza, l’accusa di genocidio a Israele e la credibilità del diritto internazionale

      Il Sudafrica ha chiesto l’intervento della Corte internazionale di giustizia dell’Aja per presunte violazioni di Israele della Convenzione sul genocidio del 1948. Triestino Mariniello, docente di Diritto penale internazionale alla John Moores University di Liverpool, presente alla storica udienza, aiuta a comprendere il merito e le prospettive

      “Quello che sta succedendo all’Aja ha un significato che va oltre gli eventi in corso nella Striscia di Gaza. Viviamo un momento storico in cui la Corte internazionale di giustizia (Icj) ha anche la responsabilità di confermare se il diritto internazionale esiste ancora e se vale alla stessa maniera per tutti i Paesi, del Nord e del Sud del mondo”. A parlare è Triestino Mariniello, docente di Diritto penale internazionale alla John Moores University di Liverpool, già nel team legale delle vittime di Gaza di fronte alla Corte penale internazionale (Icc), che ha sede sempre all’Aja.

      Non vanno confuse: l’aula di tribunale ripresa dalle tv di tutto il mondo l’11 e il 12 gennaio scorsi, infatti, con il team legale sudafricano schierato contro quello israeliano, è quella della Corte internazionale di giustizia, il massimo organo giudiziario delle Nazioni Unite, che si esprime sulle controversie tra Stati. L’Icc, invece, è indipendente e legifera sulle responsabilità penali individuali.

      Il 29 dicembre scorso il Sudafrica ha chiesto l’intervento della prima per presunte violazioni da parte di Israele della Convenzione sul genocidio del 1948, nei confronti dei palestinesi della Striscia di Gaza. Un’udienza storica a cui Mariniello era presente.

      Professore, qual era innanzi tutto l’atmosfera?
      TM A mia memoria mai uno strumento del diritto internazionale ha avuto tanto sostegno e popolarità. C’erano centinaia, probabilmente migliaia di persone all’esterno della Corte, emittenti di tutto il mondo e apparati di sicurezza, inclusi droni ed elicotteri. Sentire anche le tv più conservatrici, come quelle statunitensi, parlare di Palestina e genocidio faceva comprendere ancora di più l’importanza storica dell’evento.

      In estrema sintesi, quali sono gli elementi più importanti della tesi sudafricana?
      TM Il Sudafrica sostiene che Israele abbia commesso atti di genocidio contro la popolazione di Gaza, ciò significa una serie di azioni previste dall’articolo 2 della Convenzione sul genocidio, effettuate con l’intento di distruggere del tutto o in parte un gruppo protetto, in questo caso i palestinesi di Gaza. Questi atti, per il Sudafrica, sono omicidi di massa, gravi lesioni fisiche o mentali e l’imposizione di condizioni di vita volte a distruggere i palestinesi, come l’evacuazione forzata di circa due milioni di loro, la distruzione di quasi tutto il sistema sanitario della Striscia, l’assedio totale all’inizio della guerra e la privazione di beni essenziali per la sopravvivenza. Ciò che caratterizza un genocidio rispetto ad altri crimini internazionali è il cosiddetto “intento speciale”, la volontà cioè di voler distruggere del tutto o in parte un gruppo protetto. È l’elemento più difficile da provare, ma credo che il Sudafrica in questo sia riuscito in maniera solida e convincente. Sia in aula sia all’interno della memoria di 84 pagine presentata, vi sono, infatti, una serie di dichiarazioni dei leader politici e militari israeliani, che proverebbero tale intento. Come quella del premier Benjamin Netanyahu che, a inizio guerra, ha invocato la citazione biblica di Amalek, che sostanzialmente significa: “Uccidete tutti gli uomini, le donne, i bambini e gli animali”. O una dichiarazione del ministro della Difesa, Yoav Gallant, che ha detto che a Gaza sono tutti “animali umani”. Queste sono classiche dichiarazioni deumanizzanti e la deumanizzazione è un passaggio caratterizzante tutti i genocidi che abbiamo visto nella storia dell’umanità.

      Qual è stata invece la linea difensiva israeliana?
      TM Diciamo che l’impianto difensivo di Israele è basato su tre pilastri: il fatto che quello di cui lo si accusa è stato eseguito da Hamas il 7 ottobre; il concetto di autodifesa, cioè che quanto fatto a Gaza è avvenuto in risposta a tale attacco e, infine, che sono state adottate una serie di precauzioni per limitare l’impatto delle ostilità sulla popolazione civile. Israele, inoltre, ha sollevato il tema della giurisdizione della Corte, mettendola in discussione, in quanto non vi sarebbe una disputa in corso col Sudafrica. Su questo la Corte si dovrà pronunciare, ma a tal proposito è stato ricordato come Israele sia stato contattato dal Sudafrica in merito all’accusa di genocidio e non abbia risposto. Questo, per l’accusa, varrebbe come disputa in corso.

      Che cosa chiede il Sudafrica?
      TM In questo momento l’accusa non deve dimostrare che sia stato commesso un genocidio, ma che sia plausibile. Questa non è un’udienza nel merito, siamo in una fase d’urgenza, ma di richiesta di misure cautelari. Innanzitutto chiede il cessate fuoco, poi la rescissione di tutti gli ordini che possono costituire atti di genocidio. Si domanda alla Corte di imporre un ordine a Israele per preservare tutte le prove che potrebbero essere utili per indagini future e di porre fine a tutti gli atti di cui il Sudafrica lo ritiene responsabile.

      Come valuta le due memorie?
      TM La deposizione del Sudafrica è molto solida e convincente, sia in merito agli atti genocidi sia all’intento genocidiario. E credo che anche alla luce dei precedenti della Corte lasci veramente poco spazio di manovra. Uno dei punti di forza è che fornisce anche una serie di prove in merito a quello che è successo e che sta accadendo a Gaza: le dichiarazioni dei politici israeliani, cioè, hanno ricevuto un’implementazione sul campo. Sono stati mostrati dei video di militari, ad esempio, che invocavano Amalek, la citazione di Netanyahu.

      In realtà il Sudafrica non si limita allo scontro in atto, ma parla di una sorta Nakba (l’esodo forzato dei palestinesi) ininterrotto.
      TM Ogni giurista dovrebbe sempre analizzare qualsiasi ostilità all’interno di un contesto e per questo il Sudafrica fa riferimento a 75 anni di Nakba, a 56 di occupazione militare israeliana e a 16 anni di assedio della Striscia.

      Come valuta la difesa israeliana?
      TM Come detto, tutto viene ricondotto all’attacco di Hamas del 7 ottobre e a una risposta di autodifesa rispetto a tale attacco. Ma esiste sempre un contesto per il diritto penale internazionale e l’autodifesa -che per uno Stato occupante non può essere invocata- non può comunque giustificare un genocidio. L’altro elemento sottolineato dal team israeliano, delle misure messe in atto per ridurre l’impatto sui civili, è sembrato più retorico che altro: quanto avvenuto negli ultimi tre mesi smentisce tali dichiarazioni. Basti pensare alla privazione di beni essenziali e a tutte le informazioni raccolte dalle organizzazioni internazionali e dagli organismi delle Nazioni Unite. A Gaza non esistono zone sicure, ci sono stati casi in cui la popolazione evacuata, rifugiatasi nelle zone indicate da Israele, è stata comunque bombardata.

      Ora che cosa pensa succederà?
      TM La mia previsione è che la Corte si pronuncerà sulle misure cautelari entro la fine di gennaio e l’inizio di febbraio, quando alcuni giudici decadranno e saranno sostituiti. In alcuni casi ha impiegato anche solo otto giorni per pronunciarsi. Ora ci sono delle questioni procedurali, altri Stati stanno decidendo di costituirsi a sostegno di Israele o del Sudafrica.

      Che cosa implica tale sostegno?
      TM La possibilità di presentare delle memorie. La Germania sosterrà Israele, il Brasile, i Paesi della Lega Araba, molti Stati sudamericani, ma non solo, si stanno schierando con il Sudafrica.

      Il ministro degli Esteri italiano, Antonio Tajani, ha dichiarato che non si tratta di genocidio.
      TM L’Italia non appoggerà formalmente Israele dinnanzi all’Icj. La Francia sarà neutrale. I Paesi del Global South stanno costringendo quelli del Nord a verificare la credibilità del diritto internazionale: vale per tutti o è un diritto à la carte?

      Se la Corte decidesse per il cessate il fuoco, quali sarebbero le conseguenze, visto che non ha potere politico?
      TM Il parere della Corte è giuridicamente vincolante. Il problema è effettivamente di esecuzione: nel caso di un cessate il fuoco, se non fosse Israele ad attuarlo, dovrebbe intervenire il Consiglio di sicurezza.

      Con il rischio del veto statunitense.
      TM Siamo sul terreno delle speculazioni, ma se la Corte dovesse giungere alla conclusione che Israele è responsabile di un genocidio a Gaza, onestamente riterrei molto difficile un altro veto degli Stati Uniti. È difficile al momento prevedere gli effetti dirompenti di un’eventuale decisione positiva della Corte. Certo è che, quando si parla di Israele, la comunità internazionale, nel senso dei Paesi occidentali, ha creato uno stato di eccezione, che ha sempre posto Israele al di sopra del diritto internazionale, senza rendersi conto che le situazioni violente che viviamo in quel contesto sono il frutto di questo eccezionalismo anche a livello giuridico. Fino a quando si andrà avanti con questo contesto di impunità non finiranno le spirali di violenza.

      https://altreconomia.it/gaza-laccusa-di-genocidio-a-israele-e-la-credibilita-del-diritto-intern

    • La Cour internationale de justice ordonne à Israël d’empêcher un génocide à Gaza

      Selon la plus haute instance judiciaire internationale, « il existe un #risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé » aux Palestiniens de Gaza. La Cour demande à Israël de « prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission […] de tout acte » de génocide. Mais n’appelle pas au cessez-le-feu.

      Même si elle n’a aucune chance d’être appliquée sur le terrain, la #décision prise vendredi 26 janvier par la plus haute instance judiciaire des Nations unies marque incontestablement un tournant dans la guerre au Proche-Orient. Elle intervient après quatre mois de conflit déclenché par l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, qui a fait plus de 1 200 morts et des milliers de blessés, conduit à la prise en otage de 240 personnes, et entraîné l’offensive israélienne dans la bande de Gaza, dont le dernier bilan s’élève à plus de 25 000 morts.

      La Cour internationale de justice (CIJ), basée à La Haye (Pays-Bas), a expliqué, par la voix de sa présidente, la juge Joan Donoghue, « être pleinement consciente de l’ampleur de la #tragédie_humaine qui se joue dans la région et nourri[r] de fortes #inquiétudes quant aux victimes et aux #souffrances_humaines que l’on continue d’y déplorer ». Elle a ordonné à Israël de « prendre toutes les #mesures en son pouvoir pour prévenir la commission à l’encontre des Palestiniens de Gaza de tout acte » de génocide.

      « Israël doit veiller avec effet immédiat à ce que son armée ne commette aucun des actes » de génocide, affirme l’#ordonnance. Elle « considère également qu’Israël doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide à l’encontre des membres du groupe des Palestiniens de la bande de Gaza ».

      La cour de La Haye, saisie à la suite d’une plainte de l’Afrique du Sud, demande « en outre » à l’État hébreu de « prendre sans délai des #mesures_effectives pour permettre la fourniture des services de base et de l’#aide_humanitaire requis de toute urgence afin de remédier aux difficiles conditions d’existence auxquelles sont soumis les Palestiniens de la bande de Gaza ».

      Enfin, l’ordonnance de la CIJ ordonne aux autorités israéliennes de « prendre des mesures effectives pour prévenir la destruction et assurer la conservation des #éléments_de_preuve relatifs aux allégations d’actes » de génocide.

      La juge #Joan_Donoghue, qui a donné lecture de la décision, a insisté sur son caractère provisoire, qui ne préjuge en rien de son futur jugement sur le fond des accusations d’actes de génocide. Celles-ci ne seront tranchées que dans plusieurs années, après instruction.

      La cour « ne peut, à ce stade, conclure de façon définitive sur les faits » et sa décision sur les #mesures_conservatoires « laisse intact le droit de chacune des parties de faire valoir à cet égard ses moyens » en vue des audiences sur le fond, a-t-elle poursuivi.

      Elle considère cependant que « les faits et circonstances » rapportés par les observateurs « suffisent pour conclure qu’au moins certains des droits » des Palestiniens sont mis en danger et qu’il existe « un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé ».

      Environ 70 % de #victimes_civiles

      La CIJ avait été saisie le 29 décembre 2023 par l’Afrique du Sud qui, dans sa requête, accuse notamment Israël d’avoir violé l’article 2 de la Convention de 1948 sur le génocide, laquelle interdit, outre le meurtre, « l’atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe » visé par le génocide, l’imposition de « conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle » ou encore les « mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ».

      Le recours décrit longuement une opération militaire israélienne qualifiée d’« exceptionnellement brutale », « tuant des Palestiniens à Gaza, incluant une large proportion de femmes et d’enfants – pour un décompte estimé à environ 70 % des plus de 21 110 morts [au moment de la rédaction du recours par l’Afrique du Sud – ndlr] –, certains d’entre eux apparaissant avoir été exécutés sommairement ».

      Il soulignait également les conséquences humanitaires du déplacement massif des populations et de la destruction massive de logements et d’équipements publics, dont des écoles et des hôpitaux.

      Lors des deux demi-journées d’audience, jeudi 11 et vendredi 12 janvier, le conseiller juridique du ministère des affaires étrangères israélien, Tal Becker, avait dénoncé une « instrumentalisation » de la notion de génocide et qualifié l’accusation sud-africaine de « calomnie ».

      « C’est une guerre qu’Israël n’a pas commencée », avait poursuivi le représentant israélien, affirmant que « s’il y a eu des actes que l’on pourrait qualifier de génocidaires, [ils ont été commis] contre Israël ». « Israël ne veut pas détruire un peuple mais protéger un peuple : le sien. »
      Gaza, « lieu de mort et de désespoir »

      La CIJ, de son côté, a fondé sa décision sur les différents rapports et constatations fournis par des organisations internationales. Elle cite notamment la lettre du 5 janvier 2024 du secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de l’ONU, Martin Griffiths, décrivant la bande de Gaza comme un « lieu de mort et de désespoir ».

      L’ordonnance rappelle qu’un communiqué de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) du 21 décembre 2023 s’alarmait du fait que « 93 % de la population de Gaza, chiffre sans précédent, est confrontée à une situation de crise alimentaire ».

      Le 12 janvier 2024, c’est l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui lançait un cri d’alerte. « Cela fait maintenant 100 jours que cette guerre dévastatrice a commencé, que la population de Gaza est décimée et déplacée, suite aux horribles attaques perpétrées par le Hamas et d’autres groupes contre la population en Israël », s’alarmait-il.

      L’ordonnance souligne, en miroir, les multiples déclarations de responsables israéliens assumant une répression sans pitié dans la bande de Gaza, si nécessaire au prix de vies civiles. Elle souligne que des rapporteurs spéciaux des Nations unies ont même pu s’indigner de « la rhétorique manifestement génocidaire et déshumanisante de hauts responsables du gouvernement israélien ».

      La CIJ pointe par exemple les propos du ministre de la défense Yoav Gallant du 9 octobre 2023 annonçant « un siège complet de la ville de Gaza », avant d’affirmer : « Nous combattons des animaux humains. »

      Le 12 octobre, c’est le président israélien Isaac Herzog qui affirmait : « Tous ces beaux discours sur les civils qui ne savaient rien et qui n’étaient pas impliqués, ça n’existe pas. Ils auraient pu se soulever, ils auraient pu lutter contre ce régime maléfique qui a pris le contrôle de Gaza. »

      Et, à la vue des intentions affichées par les autorités israéliennes, les opérations militaires dans la bande de Gaza ne sont pas près de s’arrêter. « La Cour considère que la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza risque fort de se détériorer encore avant qu’elle rende son arrêt définitif », affirme l’ordonnance.

      « À la lumière de ce qui précède, poursuivent les juges, la Cour considère qu’il y a urgence en ce sens qu’il existe un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé aux droits qu’elle a jugés plausibles avant qu’elle ne rende sa décision définitive. »

      Si la décision de la CIJ est juridiquement contraignante, la Cour n’a pas la capacité de la faire appliquer. Cependant, elle est incontestablement une défaite diplomatique pour Israël.

      Présente à La Haye, la ministre des relations internationales et de la coopération d’Afrique du Sud, Naledi Pandor, a pris la parole à la sortie de l’audience. Si elle a regretté que les juges n’aient pas appelé à un cessez-le-feu, elle s’est dite « satisfaite que les mesures provisoires » réclamées par son pays aient « fait l’objet d’une prise en compte » par la Cour, et qu’Israël doive fournir un rapport d’ici un mois. Pour l’Afrique du Sud, lancer cette plainte, a-t-elle expliqué, « était une façon de s’assurer que les organismes internationaux exercent leur responsabilité de nous protéger tous, en tant que citoyens du monde global ».

      Comme l’on pouvait s’y attendre, les autorités israéliennes ont vivement critiqué les ordonnances d’urgence réclamées par les juges de La Haye. Si le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, s’est réjoui de ce que ces derniers n’aient pas réclamé, comme le demandait l’Afrique du Sud, de cessez-le-feu – « Comme tout pays, Israël a le droit fondamental de se défendre. La CIJ de La Haye a rejeté à juste titre la demande scandaleuse visant à nous priver de ce droit », a-t-il dit –, il a eu des mots très durs envers l’instance : « La simple affirmation selon laquelle Israël commet un génocide contre les Palestiniens n’est pas seulement fausse, elle est scandaleuse, et la volonté de la Cour d’en discuter est une honte qui ne sera pas effacée pendant des générations. »

      Il a affirmé vouloir continuer « à défendre [ses] citoyens dans le respect du droit international ». « Nous poursuivrons cette guerre jusqu’à la victoire absolue, jusqu’à ce que tous les otages soient rendus et que Gaza ne soit plus une menace pour Israël », a ajouté Nétanyahou.

      Jeudi, à la veille de la décision de la CIJ, le New York Times avait révélé que les autorités israéliennes avaient fourni aux juges de La Haye une trentaine de documents déclassifiés, censés démonter l’accusation de génocide, parmi lesquels « des résumés de discussions ministérielles datant de la fin du mois d’octobre, au cours desquelles le premier ministre Benyamin Nétanyahou a ordonné l’envoi d’aide, de carburant et d’eau à Gaza ».

      Cependant, souligne le quotidien états-unien, les documents « ne comprennent pas les ordres des dix premiers jours de la guerre, lorsqu’Israël a bloqué l’aide à Gaza et coupé l’accès à l’électricité et à l’eau qu’il fournit normalement au territoire ».

      Nul doute que cette décision de la plus haute instance judiciaire des Nations unies va renforcer les appels en faveur d’un cessez-le-feu. Après plus de quatre mois de combats et un bilan lourd parmi la population civile gazaouie, Nétanyahou n’a pas atteint son objectif d’éradiquer le mouvement islamiste. Selon les Israéliens eux-mêmes, près de 70 % des forces militaires du Hamas sont intactes. De plus, les familles d’otages toujours aux mains du Hamas ou d’autres groupes islamistes de l’enclave maintiennent leurs pressions.

      Le ministre palestinien des affaires étrangères Riyad al-Maliki s’est réjoui d’une décision de la CIJ « en faveur de l’humanité et du droit international », ajoutant que la communauté international avait désormais « l’obligation juridique claire de mettre fin à la guerre génocidaire d’Israël contre le peuple palestinien de Gaza et de s’assurer qu’elle n’en est pas complice ». Le ministre de la justice sud-africain Ronald Lamola, cité par l’agence Reuters, a salué, lui, « une victoire pour le droit international ». « Israël ne peut être exempté du respect de ses obligations internationales », a-t-il ajouté.

      De son côté, la Commission européenne a appelé Israël et le Hamas à se conformer à la décision de la CIJ. L’Union européenne « attend leur mise en œuvre intégrale, immédiate et effective », a-t-elle souligné dans un communiqué.

      La France avait fait entendre pourtant il y a quelques jours une voix discordante. Le ministre des affaires étrangères Stéphane Séjourné avait déclaré, à l’Assemblée nationale, qu’« accuser l’État juif de génocide, c’est franchir un seuil moral ». Dans un communiqué publié après la décision de la CIJ, le ministère a annoncé son intention de déposer des observations sur l’interprétation de la Convention de 1948, comme le lui permet la procédure. « [La France] indiquera notamment l’importance qu’elle attache à ce que la Cour tienne compte de la gravité exceptionnelle du crime de génocide, qui nécessite l’établissement d’une intention. Comme le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a eu l’occasion de le noter, les mots doivent conserver leur sens », indique le texte.

      Les États-Unis ont estimé que la décision était conforme à la position états-unienne, exprimée à plusieurs reprises par Joe Biden à son allié israélien, de réduire les souffrances des civils de Gaza et d’accroître l’aide humanitaire. Cependant, a expliqué un porte-parole du département d’État, les États-Unis continuent « de penser que les allégations de génocide sont infondées » et notent « que la Cour n’a pas fait de constat de génocide, ni appelé à un cessez-le-feu dans sa décision, et qu’elle a appelé à la libération inconditionnelle et immédiate de tous les otages détenus par le Hamas ».

      C’est dans ce contexte que se déroulent des discussions pour obtenir une trêve prolongée, la deuxième après celle de novembre, qui avait duré une semaine et permis la libération de plusieurs dizaines d’otages.

      Selon les médias états-uniens, Israël a proposé une trêve de 60 jours et la libération progressive des otages encore retenu·es. Selon ce projet, a affirmé CNN, les dirigeants du Hamas pourraient quitter l’enclave. Selon la chaîne d’informations américaine, « des responsables américains et internationaux au fait des négociations ont déclaré que l’engagement récent d’Israël et du Hamas dans des pourparlers était encourageant, mais qu’un accord n’était pas imminent ».

      Le Washington Post a révélé jeudi que le président américain Joe Biden allait envoyer dans les prochains jours en Europe le directeur de la CIA, William Burns, pour tenter d’obtenir un accord. Il devrait rencontrer les chefs des services de renseignement israélien et égyptien, David Barnea et Abbas Kamel, et le premier ministre qatari Mohammed ben Abdulrahman al-Thani. Vendredi soir, l’Agence France-Presse (AFP) a affirmé qu’ils se retrouveraient « dans les tout prochains jours à Paris », citant « une source sécuritaire d’un État impliqué dans les négociations ».

      https://www.mediapart.fr/journal/international/260124/la-cour-internationale-de-justice-ordonne-israel-d-empecher-un-genocide-ga

  • Fermes, coopératives... « En #Palestine, une nouvelle forme de #résistance »

    Jardins communautaires, coopératives... En Cisjordanie et à Gaza, les Palestiniens ont développé une « #écologie_de_la_subsistance qui n’est pas séparée de la résistance », raconte l’historienne #Stéphanie_Latte_Abdallah.

    Alors qu’une trêve vient de commencer au Proche-Orient entre Israël et le Hamas, la chercheuse Stéphanie Latte Abdallah souligne les enjeux écologiques qui se profilent derrière le #conflit_armé. Elle rappelle le lien entre #colonisation et #destruction de l’#environnement, et « la relation symbiotique » qu’entretiennent les Palestiniens avec leur #terre et les êtres qui la peuplent. Ils partagent un même destin, une même #lutte contre l’#effacement et la #disparition.

    Stéphanie Latte Abdallah est historienne et anthropologue du politique, directrice de recherche au CNRS (CéSor-EHESS). Elle a récemment publié La toile carcérale, une histoire de l’enfermement en Palestine (Bayard, 2021).

    Reporterre — Comment analysez-vous à la situation à #Gaza et en #Cisjordanie ?

    Stéphanie Latte Abdallah — L’attaque du #Hamas et ses répercussions prolongent des dynamiques déjà à l’œuvre mais c’est une rupture historique dans le déchaînement de #violence que cela a provoqué. Depuis le 7 octobre, le processus d’#encerclement de la population palestinienne s’est intensifié. #Israël les prive de tout #moyens_de_subsistance, à court terme comme à moyen terme, avec une offensive massive sur leurs conditions matérielles d’existence. À Gaza, il n’y a plus d’accès à l’#eau, à l’#électricité ou à la #nourriture. Des boulangeries et des marchés sont bombardés. Les pêcheurs ne peuvent plus accéder à la mer. Les infrastructures agricoles, les lieux de stockage, les élevages de volailles sont méthodiquement démolis.

    En Cisjordanie, les Palestiniens subissent — depuis quelques années déjà mais de manière accrue maintenant — une forme d’#assiègement. Des #cultures_vivrières sont détruites, des oliviers abattus, des terres volées. Les #raids de colons ont été multipliés par deux, de manière totalement décomplexée, pour pousser la population à partir, notamment la population bédouine qui vit dans des zones plus isolées. On assiste à un approfondissement du phénomène colonial. Certains parlent de nouvelle #Nakba [littéralement « catastrophe » en Arabe. Cette expression fait référence à l’exode forcé de la population palestinienne en 1948]. On compte plus d’1,7 million de #déplacés à Gaza. Où iront-ils demain ?

    « Israël mène une #guerre_totale à une population civile »

    Gaza a connu six guerres en dix-sept ans mais il y a quelque chose d’inédit aujourd’hui, par l’ampleur des #destructions, le nombre de #morts et l’#effet_de_sidération. À défaut d’arriver à véritablement éliminer le Hamas – ce qui est, selon moi, impossible — Israël mène une guerre totale à une population civile. Il pratique la politique de la #terre_brûlée, rase Gaza ville, pilonne des hôpitaux, humilie et terrorise tout un peuple. Cette stratégie a été théorisée dès 2006 par #Gadi_Eizenkot, aujourd’hui ministre et membre du cabinet de guerre, et baptisée « la #doctrine_Dahiya », en référence à la banlieue sud de Beyrouth. Cette doctrine ne fait pas de distinction entre #cibles_civiles et #cibles_militaires et ignore délibérément le #principe_de_proportionnalité_de_la_force. L’objectif est de détruire toutes les infrastructures, de créer un #choc_psychologique suffisamment fort, et de retourner la population contre le Hamas. Cette situation nous enferme dans un #cycle_de_violence.

    Vos travaux les plus récents portent sur les initiatives écologiques palestiniennes. Face à la fureur des armes, on en entend évidemment peu parler. Vous expliquez pourtant qu’elles sont essentielles. Quelles sont-elles ?

    La Palestine est un vivier d’#innovations politiques et écologiques, un lieu de #créativité_sociale. Ces dernières années, suite au constat d’échec des négociations liées aux accords d’Oslo [1] mais aussi de l’échec de la lutte armée, s’est dessinée une #troisième_voie.

    Depuis le début des années 2000, la #société_civile a repris l’initiative. Dans de nombreux villages, des #marches et des #manifestations hebdomadaires sont organisées contre la prédation des colons ou pour l’#accès_aux_ressources. Plus récemment, s’est développée une #économie_alternative, dite de résistance, avec la création de #fermes, parfois communautaires, et un renouveau des #coopératives.

    L’objectif est de reconstruire une autre société libérée du #néolibéralisme, de l’occupation et de la #dépendance à l’#aide_internationale. Des agronomes, des intellectuels, des agriculteurs, des agricultrices, des associations et des syndicats de gauche se sont retrouvés dans cette nouvelle forme de résistance en dehors de la politique institutionnelle. Une jeune génération a rejoint des pionniers. Plutôt qu’une solution nationale et étatique à la colonisation israélienne — un objectif trop abstrait sur lequel personne n’a aujourd’hui de prise — il s’agit de promouvoir des actions à l’échelle citoyenne et locale. L’idée est de retrouver de l’#autonomie et de parvenir à des formes de #souveraineté par le bas. Des terres ont été remises en culture, des #fermes_agroécologiques ont été installées — dont le nombre a explosé ces cinq dernières années — des #banques_de_semences locales créées, des modes d’#échange directs entre producteurs et consommateurs mis en place. On a parlé d’« #intifada_verte ».

    Une « intifada verte » pour retrouver de l’autonomie

    Tout est né d’une #prise_de_conscience. Les #territoires_palestiniens sont un marché captif pour l’#économie israélienne. Il y a très peu de #production. Entre 1975 et 2014, la part des secteurs de l’agriculture et de l’#industrie dans le PIB a diminué de moitié. 65 % des produits consommés en Cisjordanie viennent d’Israël, et plus encore à Gaza. Depuis les accords d’Oslo en 1995, la #production_agricole est passée de 13 % à 6 % du PIB.

    Ces nouvelles actions s’inscrivent aussi dans l’histoire de la résistance : au cours de la première Intifada (1987-1993), le #boycott des taxes et des produits israéliens, les #grèves massives et la mise en place d’une économie alternative autogérée, notamment autour de l’agriculture, avaient été centraux. À l’époque, des #jardins_communautaires, appelés « les #jardins_de_la_victoire » avait été créés. Ce #soulèvement, d’abord conçu comme une #guerre_économique, entendait alors se réapproprier les #ressources captées par l’occupation totale de la Cisjordanie et de la #bande_de_Gaza.

    Comment définiriez-vous l’#écologie palestinienne ?

    C’est une écologie de la subsistance qui n’est pas séparée de la résistance, et même au-delà, une #écologie_existentielle. Le #retour_à_la_terre participe de la lutte. C’est le seul moyen de la conserver, et donc d’empêcher la disparition totale, de continuer à exister. En Cisjordanie, si les terres ne sont pas cultivées pendant 3 ou 10 ans selon les modes de propriété, elles peuvent tomber dans l’escarcelle de l’État d’Israël, en vertu d’une ancienne loi ottomane réactualisée par les autorités israéliennes en 1976. Donc, il y a une nécessité de maintenir et augmenter les cultures, de redevenir paysans, pour limiter l’expansion de la #colonisation. Il y a aussi une nécessité d’aller vers des modes de production plus écologiques pour des raisons autant climatiques que politiques. Les #engrais et les #produits_chimiques proviennent des #multinationales via Israël, ces produits sont coûteux et rendent les sols peu à peu stériles. Il faut donc inventer autre chose.

    Les Palestiniens renouent avec une forme d’#agriculture_économe, ancrée dans des #savoir-faire_ancestraux, une agriculture locale et paysanne (#baladi) et #baaliya, c’est-à-dire basée sur la pluviométrie, tout en s’appuyant sur des savoirs nouveaux. Le manque d’#eau pousse à développer cette méthode sans #irrigation et avec des #semences anciennes résistantes. L’idée est de revenir à des formes d’#agriculture_vivrière.

    La #révolution_verte productiviste avec ses #monocultures de tabac, de fraises et d’avocats destinée à l’export a fragilisé l’#économie_palestinienne. Elle n’est pas compatible avec l’occupation et le contrôle de toutes les frontières extérieures par les autorités israéliennes qui les ferment quand elles le souhaitent. Par ailleurs, en Cisjordanie, il existe environ 600 formes de check-points internes, eux aussi actionnés en fonction de la situation, qui permettent de créer ce que l’armée a nommé des « #cellules_territoriales ». Le #territoire est morcelé. Il faut donc apprendre à survivre dans des zones encerclées, être prêt à affronter des #blocus et développer l’#autosuffisance dans des espaces restreints. Il n’y a quasiment plus de profondeur de #paysage palestinien.

    « Il faut apprendre à survivre dans des zones encerclées »

    À Gaza, on voit poindre une #économie_circulaire, même si elle n’est pas nommée ainsi. C’est un mélange de #débrouille et d’#inventivité. Il faut, en effet, recycler les matériaux des immeubles détruits pour pouvoir faire de nouvelles constructions, parce qu’il y a très peu de matériaux qui peuvent entrer sur le territoire. Un entrepreneur a mis au point un moyen d’utiliser les ordures comme #matériaux. Les modes de construction anciens, en terre ou en sable, apparaissent aussi mieux adaptés au territoire et au climat. On utilise des modes de production agricole innovants, en #hydroponie ou bien à la #verticale, parce que la terre manque, et les sols sont pollués. De nouvelles pratiques énergétiques ont été mises en place, surtout à Gaza, où, outre les #générateurs qui remplacent le peu d’électricité fournie, des #panneaux_solaires ont été installés en nombre pour permettre de maintenir certaines activités, notamment celles des hôpitaux.

    Est-ce qu’on peut parler d’#écocide en ce moment ?

    Tout à fait. Nombre de Palestiniens emploient maintenant le terme, de même qu’ils mettent en avant la notion d’#inégalités_environnementales avec la captation des #ressources_naturelles par Israël (terre, ressources en eau…). Cela permet de comprendre dans leur ensemble les dégradations faites à l’#environnement, et leur sens politique. Cela permet aussi d’interpeller le mouvement écologiste israélien, peu concerné jusque-là, et de dénoncer le #greenwashing des autorités. À Gaza, des #pesticides sont épandus par avion sur les zones frontalières, des #oliveraies et des #orangeraies ont été arrachées. Partout, les #sols sont pollués par la toxicité de la guerre et la pluie de #bombes, dont certaines au #phosphore. En Cisjordanie, les autorités israéliennes et des acteurs privés externalisent certaines #nuisances_environnementales. À Hébron, une décharge de déchets électroniques a ainsi été créée. Les eaux usées ne sont pas également réparties. À Tulkarem, une usine chimique considérée trop toxique a été également déplacée de l’autre côté du Mur et pollue massivement les habitants, les terres et les fermes palestiniennes alentour.

    « Il existe une relation intime entre les Palestiniens et leur environnement »

    Les habitants des territoires occupés, et leur environnement — les plantes, les arbres, le paysage et les espèces qui le composent — sont attaqués et visés de manière similaire. Ils sont placés dans une même #vulnérabilité. Pour certains, il apparaît clair que leur destin est commun, et qu’ils doivent donc d’une certaine manière résister ensemble. C’est ce que j’appelle des « #résistances_multispécifiques », en écho à la pensée de la [philosophe féministe étasunienne] #Donna_Haraway. [2] Il existe une relation intime entre les Palestiniens et leur environnement. Une même crainte pour l’existence. La même menace d’#effacement. C’est très palpable dans le discours de certaines personnes. Il y a une lutte commune pour la #survie, qui concerne autant les humains que le reste du vivant, une nécessité écologique encore plus aigüe. C’est pour cette raison que je parle d’#écologisme_existentiel en Palestine.

    Aujourd’hui, ces initiatives écologistes ne sont-elles pas cependant menacées ? Cet élan écologiste ne risque-t-il pas d’être brisé par la guerre ?

    Il est évidemment difficile d’exister dans une guerre totale mais on ne sait pas encore comment cela va finir. D’un côté, on assiste à un réarmement des esprits, les attaques de colons s’accélèrent et les populations palestiniennes en Cisjordanie réfléchissent à comment se défendre. De l’autre côté, ces initiatives restent une nécessité pour les Palestiniens. J’ai pu le constater lors de mon dernier voyage en juin, l’engouement est réel, la dynamique importante. Ce sont des #utopies qui tentent de vivre en pleine #dystopie.

    https://reporterre.net/En-Palestine-l-ecologie-n-est-pas-separee-de-la-resistance
    #agriculture #humiliation #pollution #recyclage #réusage #utopie

    • La toile carcérale. Une histoire de l’enfermement en Palestine

      Dans les Territoires palestiniens, depuis l’occupation de 1967, le passage par la prison a marqué les vécus et l’histoire collective. Les arrestations et les incarcérations massives ont installé une toile carcérale, une détention suspendue. Environ 40 % des hommes palestiniens sont passés par les prisons israéliennes depuis 1967. Cet ouvrage remarquable permet de comprendre en quoi et comment le système pénal et pénitentiaire est un mode de contrôle fractal des Territoires palestiniens qui participe de la gestion des frontières. Il raconte l’envahissement carcéral mais aussi la manière dont la politique s’exerce entre Dedans et Dehors, ses effets sur les masculinités et les féminités, les intimités. Stéphanie Latte Abdallah a conduit une longue enquête ethnographique, elle a réalisé plus de 350 entretiens et a travaillé à partir d’archives et de documents institutionnels. Grâce à une narration sensible s’apparentant souvent au documentaire, le lecteur met ses pas dans ceux de l’auteure à la rencontre des protagonistes de cette histoire contemporaine méconnue.

      https://livres.bayard-editions.com/livres/66002-la-toile-carcerale-une-histoire-de-lenfermement-en-pal
      #livre

  • Mine de lithium dans l’Allier : le rapport qui dévoile une bombe toxique
    https://disclose.ngo/fr/article/mine-de-lithium-dans-lallier-le-rapport-qui-devoile-une-bombe-toxique

    Il y a un an, le gouvernement a annoncé l’ouverture, dans l’Allier, de la plus grande mine de lithium d’Europe. D’après un rapport inédit dévoilé par Disclose et Investigate Europe, le secteur, fortement contaminé à l’arsenic et au plomb, présente « un risque significatif pour l’environnement et la santé humaine ». Une véritable bombe à retardement passée sous silence par les autorités. Lire l’article

    • Des mines de lithium en #Limousin ? L’impossible débat

      De l’Allier jusqu’à la #Haute-Vienne, la fièvre minière suscite la controverse.

      C’est à Échassières, petit bourg de 400 habitants dans l’Allier que la multinationale #Imerys prévoit d’ouvrir la plus grande mine de lithium d’Europe et d’extraire plus d’un million de tonnes d’#oxyde_de_lithium en 25 ans. Ce volume permettra de produire 700 000 #batteries de #voitures_électriques.

      C’est bien la #transition_écologique et le #tout-électrique qui font grimper les cours du lithium, rendant à présent sa prospection intéressante en Europe et en France, où les lois environnementales sont pourtant contraignantes pour les industriels. Les deux plus grand pays producteurs que sont l’#Australie et le #Chili (70 % du volume mondial) ne semblent en effet que bien peu s’embarrasser du sort des populations autochtones vivant sur les territoires miniers.

      Les occidentaux font partie des plus grands consommateurs de lithium au monde. Dès lors, refuser une #extraction_locale au nom de l’écologie serait-il faire la promotion d’une « #écologie_coloniale » ? À l’inverse, peut-on parler de « transition écologique » lorsque les groupes industriels produisent à l’envie des smartphones à l’obsolescence programmée et des voitures électriques toujours plus lourdes et gourmandes type SUV, Tesla et autres ? Le débat parait impossible, tant les contradictions fusent de part et d’autre.

      Dans ce reportage nous écouterons les habitants de la ville d’Échassières, des militants de #Stopmines23, Rafael Solans-Ezquerra, élu à la mairie d’#Ambazac favorable à l’extraction de lithium sur sa commune, et Laurent Richard, spécialiste des sols. À travers leurs témoignages nous entendrons peut-être qu’une sortie par le haut de cet impossible débat serait déjà de se poser la question de nos réels besoins fondamentaux. Nous les entendrons évoquer le principe de sobriété mais aussi la manière dont les industriels ont exploité les divers minerais de la région par le passé, notamment l’uranium.

      https://telemillevaches.net/videos/des-mines-de-lithium-en-limousin-limpossible-debat

    • Dans l’Allier, un projet d’exploitation d’une mine de lithium divise

      Le gouvernement français relance l’extraction minière. En Auvergne, un projet de mine de lithium, présenté comme vertueux pour la lutte contre le réchauffement climatique, rencontre de l’opposition.

      Un projet de mine de lithium, un minerai blanc utilisé dans la fabrication, entre autres, de batteries automobiles électriques, divise la population. D’un côté, la région, le gouvernement et une société vantent un projet qui accompagnerait une stratégie globale de décarbonation. De l’autre, des citoyens et des associations craignent des retombées négatives ; pollution, effets sur l’accès au sol et à l’eau...

      Mais le sujet dépasse l’Allier où la mine pourrait voir le jour, et la seule production de lithium. En effet, le gouvernement français, et au-delà, les institutions européennes, comptent relancer l’extraction minière sur le sol européen.

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-transition-de-la-semaine/dans-l-allier-un-projet-d-exploitation-d-une-mine-de-lithium-divise-2830

    • Mine de lithium dans l’Allier : « Voulons-nous que nos voitures fonctionnent au pétrole, ou à l’électricité du soleil et du vent » ?

      Alors que le débat public s’achève sur le projet de mine à Echassières (Allier) devons-nous laisser dormir les centaines de milliers de tonnes de lithium que renferme son granite ? Ou sécuriser les approvisionnements des usines de batteries en construction dans les Hauts-de-France ? interroge Cédric Philibert, chercheur associé à l’Ifri (1) .

      Le projet de la société Imerys d’ouvrir une mine de lithium à Echassières, dans l’Allier, sur le site d’une carrière de kaolin qu’elle exploite, fait débat. Ce débat est organisé par la commission nationale du débat public, comme pour tout investissement de cette ampleur. Les réunions publiques tenues au fil des dernières semaines permettent d’en repérer peu à peu les principaux arguments et les lignes de force, et les positions des divers acteurs.

      Certains des futurs voisins de la mine ou des installations connexes s’inquiètent de possibles nuisances, visuelles ou auditives. Pêcheurs, agriculteurs et environnementalistes craignent un gaspillage de ressources hydriques et de possibles pollutions des eaux souterraines. La mine demande « énormément d’eau », affirme Antoine Gatet, le président de France Nature Environnement (Libération du 10 mars 2024).

      Mais des oppositions plus radicales s’expriment. A quoi bon extraire du lithium ? A quoi bon fabriquer des voitures électriques, si c’est pour perpétuer la voiture ? L’historien Jean-Baptiste Fressoz s’interroge dans le Monde : « D’où vient cette idée que, pour sauver le climat, il faut absolument ouvrir des mines ? » A quoi bon, en effet, puisque « la voiture électrique ne réduit que de 60 % les émissions de CO2 par rapport à un véhicule thermique. » La transition ne serait qu’un prétexte pour réenchanter la mine : « Le lobby minier parle maintenant “des métaux pour la transition”, alors qu’il s’agit souvent de métaux pour l’électronique et l’industrie en général », poursuit-il. Et qu’importe si les batteries de nos téléphones, de nos ordinateurs portables et, surtout, de nos véhicules électriques représenteront d’ici à 2030 pas moins de 95 % de la demande de lithium.
      Nous ne sommes pas seuls au monde

      Bien sûr, la voiture électrique est indispensable pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. La France compte une voiture pour deux habitants, c’est trop. Admettons que nous réussissions, d’ici à 2050, à ramener le nombre de voitures à une pour cinq habitants – en multipliant les transports en commun, les pistes cyclables, en incitant à l’exercice physique… Mais beaucoup d’entre nous, vivant dans les villages et les bourgs ou en banlieues lointaines serons encore dépendants de leur voiture pour se déplacer dans vingt-cinq ans.

      Et nous ne sommes pas seuls au monde. Nous serons bientôt dix milliards, et il n’y a pas de raison que dans les autres pays, sur les autres continents, on n’arrive pas au même niveau d’équipement que les sobres Français. Ça fera tout de même deux milliards de voitures en tout, deux fois plus qu’aujourd’hui… Voulons-nous qu’elles fonctionnent au pétrole, ou à l’électricité du soleil et du vent, alors devenue majoritaire dans le mix énergétique mondial ?

      Pourtant, sceptiques et opposants n’ont pas forcément tort… Nous pourrions ne pas créer la mine d’Echassières, et laisser dormir les quelques centaines de milliers de tonnes de lithium que renferme son granite. Le monde regorge de lithium, on s’en rend compte maintenant qu’on en cherche. Les réserves, économiquement exploitables aujourd’hui, estimées à 17 millions de tonnes, il y a quatre ans, sont désormais évaluées à 28 millions de tonnes, de quoi soutenir un demi-siècle de production intensive de batteries.

      On les trouve au Chili, au Pérou, en Argentine, en Australie, en Chine… et aux Etats-Unis, où la plus récente découverte pourrait encore doubler les réserves d’un seul coup. Les ressources connues, peut-être un jour exploitables, sont quatre fois plus importantes que ces réserves.

      Certes, sécuriser autant que possible les approvisionnements des usines de batteries que nous sommes en train de construire dans les Hauts-de-France, cela pourrait se révéler utile, dans un monde qui se hérisse de barrières et de conflits. Mais qu’avons-nous besoin de fabriquer des batteries, ou même des voitures ? Nous les achèterons à la Chine… Plus sérieusement, si nous devons acheter à l’étranger, et surtout à la Chine, les métaux nécessaires à la fabrication des batteries et voitures européennes, autant en limiter les volumes autant que possible.
      Toutes les études ne sont pas terminées

      Aucune mine n’est bien sûr sans impact sur l’environnement. Mais ces impacts peuvent être drastiquement réduits. Le projet d’Imerys est à cet égard très intéressant. La mine sera souterraine, limitant fortement les nuisances, et fera essentiellement appel à des machines électriques. Le mica voyagera d’abord dans des conduites souterraines, puis des wagons, en aucun cas des camions. L’usine de conversion du mica en hydroxyde lithium, située près de Montluçon, n’utilisera que l’eau d’une station d’épuration.

      Dans la mine elle-même, 95 % de l’eau utilisée pour le lavage des concentrés sera recyclée, limitant le prélèvement dans la Sioule à 600 000 m³ par an, 0,1 % de son débit moyen, moins de 1 % de son débit d’étiage. Moins d’un mètre cube pour la batterie d’une voiture électrique, à peine la quantité d’eau nécessaire pour produire une demi-tablette de chocolat…

      Toutes les études ne sont pas terminées, les autorisations ne sont pas délivrées, mais le projet est sous étroite surveillance des pouvoirs publics, des ONG, des médias. Au nom de quoi nous priverions-nous du surcroît de souveraineté que procure une production domestique ? Et si l’on préfère considérer toute mine comme un fardeau pour notre environnement – fardeau relatif, qui aide à éviter un mal bien plus grand encore, celui du changement climatique, mais fardeau tout de même – au nom de quoi devrions-nous laisser ce fardeau à des peuples lointains ?

      Contrairement à nous, ils n’ont pas toujours les moyens d’exiger des industries minières les mesures indispensables de préservation de leur environnement immédiat. On peut donc voir, dans l’ouverture de mines en Europe pour fournir au moins une partie des matériaux de la transition énergétique, un enjeu moral autant que de souveraineté.

      (1) Dernier ouvrage paru : Pourquoi la voiture électrique est bonne pour le climat, Les Petits Matins-Institut Veblen, mars 2024.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/mine-de-lithium-dans-lallier-voulons-nous-que-nos-voitures-fonctionnent-a

    • Le #lithium, de l’#or_blanc en barre

      Promesse économique et énergétique, risque écologique : « Les Jours » enquêtent sur ce métal rare niché dans le sol français.

      À #Échassières (#Allier)

      Échassières, département de l’Allier. Un petit bourg tranquille, jusqu’au 24 octobre dernier. Au petit matin, la brume s’attarde sur la #forêt_domaniale des #Colettes. La route s’enfonce sous les arbres, remonte en douceur les flancs du massif granitique de La Bosse avant de redescendre vers le village. Échassières, 400 âmes, un château, un clocher, cinq commerces soutenus à bout de bras par la municipalité, une minuscule école primaire et un Ehpad dont les locataires font sérieusement grimper la moyenne d’âge de la population. Et puis, le 24 octobre 2022, le groupe français de minéraux industriels Imerys a annoncé son intention d’y ouvrir l’une des plus grandes mines européennes de lithium, ce métal mou et léger, composant essentiel des batteries électriques. Alors dans les semaines qui ont suivi, les journalistes ont défilé sur la place de l’église et le secrétariat de la mairie a ployé sous les appels de ses administrés.

      « Dans l’ensemble, la population est plutôt ouverte au projet », estime Frédéric Dalaigre, le maire (sans étiquette) d’Échassières. Il faut dire que l’on se trouve ici en terre minière. « La mine, c’est l’ADN de la région », s’exclame Jean-Christophe Thenot, animateur du musée géologique local, Wolframines. Ce natif du coin, passionné de minéralogie, déploie son enthousiasme pour la richesse géologique locale à grand renfort de superlatifs et d’érudition. « C’est un site exceptionnel, dont la diversité minéralogique et minière est unique et réputée », assure-t-il. Chaque année, des dizaines de scientifiques et passionnés de minéralogie viennent arpenter les flancs du massif. Mais l’économie locale, elle, s’est surtout bâtie sur l’extraction minière. Dans le coin, on a commencé à creuser dès l’époque gallo-romaine, pour extraire de l’étain principalement. Des siècles plus tard, à l’aube du XIXe siècle, c’est le kaolin qui intéresse – cette argile blanche, principalement utilisée dans la confection de céramiques. Les nobles locaux ouvrent une tripotée de carrières, dont la première, celle de Beauvoir, est toujours en activité. Propriété d’Imerys depuis 2005, elle emploie une trentaine de salariés. C’est là que le groupe minier prévoit d’ouvrir son site d’extraction de lithium. Mais l’exploitation sera autrement conséquente. Avec le projet #Emili (pour « Exploitation de mica lithinifère par #Imerys »), l’entreprise espère produire quelque 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an, dès 2028. De quoi équiper 700 000 véhicules électriques chaque année, estime le groupe. Et ce pour une durée d’au moins ving-cinq ans, le temps d’exploiter un gisement parmi les plus prometteurs de l’Hexagone.

      À Échassières, si certains ont été quelque peu soufflés par la nouvelle, les anciens, eux, ne sont pas surpris. « Du lithium, ça fait belle lurette qu’on sait qu’il y en a et qu’on attend qu’il soit exploité », sourit Danièle Chammartin. Trente-sept ans de secrétariat de mairie et deux mandats à la tête de la commune, l’ancienne élue est une véritable mémoire du village. Dans le salon de sa maison, face à l’église, elle raconte. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a effectué des sondages à Échassières dès les années 1970, décelant la présence de lithium au cœur du granit du massif, dans le mica lépidolite formé par des milliers d’années d’évolution géologique. Et dans les années 1980, plusieurs élus locaux et un député ont bataillé pour convaincre de l’intérêt d’exploiter le gisement de Beauvoir. Haroun Tazieff, alors secrétaire d’État chargé de la Prévention des risques naturels et technologiques majeurs, est même venu à Échassières, en 1984, pour constater le potentiel filon.

      Mais à l’époque, le lithium n’intéresse pas grand-monde. « Pas assez rentable », déplore Danièle. Longtemps utilisé dans la production de verres et céramiques, ou encore en médecine, pour le traitement des patients bipolaires, ce n’est que dans les années 1970 que l’on découvre le potentiel de stockage d’électricité de ce minuscule atome. Les batteries dites « Li-ion » commencent certes à être commercialisées dans les années 1980 pour les caméscopes, les ordinateurs, et leur production augmente au fil des années. Mais on préfère produire ailleurs, en Chine notamment. La mondialisation bat son plein et la France ferme ses mines plutôt que d’en ouvrir de nouvelles. Près de quarante ans plus tard, la donne a changé. Le climat s’emballe, les dirigeants mondiaux s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, investissent dans les énergies renouvelables et, en parallèle, l’Union européenne acte la fin des véhicules thermiques en interdisant leur vente à partir de 2035. L’ère de la transition énergétique et de la voiture électrique est lancée. Le lithium, avec les autres métaux rares constituant les batteries, devient plus recherché que jamais et le marché explose. Les chiffres sont vertigineux. De moins de 40 000 tonnes en 2016, la production mondiale de lithium a dépassé 100 000 tonnes par an en 2021, selon l’Institut des études géologiques américain. Et elle peine à suivre la demande. D’après l’Agence internationale de l’énergie, la consommation annuelle mondiale de lithium pourrait atteindre 800 000 tonnes en 2040 pour les seuls véhicules électriques. Les prix s’envolent, quintuplant entre 2021 et 2022 pour atteindre 80 000 dollars la tonne de lithium qualité batterie, rapporte L’Usine nouvelle. La course au « nouvel or blanc », tel qu’il a été surnommé, est lancée.

      « Avec la transition énergétique, on passe d’une dépendance aux hydrocarbures à une dépendance aux métaux rares », résume le journaliste et chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) Guillaume Pitron, auteur de La guerre des métaux rares. Alors, aux quatre coins du monde, on explore ses ressources pour y piocher sa part. Un enjeu économique, certes, mais aussi stratégique. Car cette transition redistribue également les cartes des dépendances géopolitiques. Pour l’heure, la production de lithium est essentiellement assurée par quatre pays : l’Australie, fournissant à elle seule plus de la moitié de l’extraction, le Chili (un quart de l’extraction mondiale), la Chine (16 %) et l’Argentine (7 %). Mais extraire du lithium ne suffit pas. De la mine à la batterie, le métal doit subir plusieurs processus de séparation et de transformation. Et en la matière, la Chine s’est depuis longtemps imposée. 60 % du raffinage de l’« or blanc » se fait sur son territoire. Si l’on y ajoute les autres métaux présents dans les batteries pour véhicules électriques (manganèse, nickel, graphite, cobalt), c’est près de 80 % de la production mondiale qui y serait transformée.

      Alors l’Union européenne peut bien rêver d’assurer 25 % de la production mondiale de batteries électriques en 2030, elle n’en a, pour l’heure, pas les ressources. Tandis que la guerre en Ukraine met cruellement en relief nos dépendances énergétiques, cette domination de la Chine sur le marché irrite. Et d’un bout à l’autre du Vieux Continent, on parle mines et relocalisation de la production, Emmanuel Macron le premier. « En France, on n’a pas de pétrole, mais on a du lithium », lançait le président de la République sur France 2 le 26 octobre, reprenant la petite phrase de Valéry Giscard d’Estaing en pleine crise pétrolière, en 1976 (« En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées »). Dix jours plus tôt, il déclarait aux Échos : « Dans la campagne, j’ai fixé un objectif : une filière [de voitures électriques] 100 % produite en France. » Et de rappeler que trois « gigafactories » – comprenez « très grosses usines » – de batteries de véhicules électriques se sont récemment implantées dans le Nord de la France, la première devant commencer sa production en 2023. Restent l’extraction et le raffinage des ressources et, parmi celles-ci, du lithium.

      Dans ce contexte, l’annonce du projet Emili a donc été accueillie avec enthousiasme par le gouvernement. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, et le ministre de l’Industrie Roland Lescure sont même cités dans le communiqué d’Imerys. « Ce projet, exemplaire sur le plan environnemental et climatique, réduira drastiquement nos besoins d’importation de lithium », salue le premier, ajoutant qu’il sera bien entendu soutenu par le gouvernement.

      Enjeu écologique, enjeu stratégique et géopolitique, enjeu économique. À Échassières, la promesse économique fait rêver certains d’un retour à la grande époque minière du village. À partir de 1912, la principale exploitation minière d’Échassières était celle du wolfram, dont était extrait le tungstène, un métal destiné principalement aux aciers de coupe, blindages et divers usages militaires. Exploitée par la Compagnie minière des Montmins, la mine emploie au plus fort de ses activités jusqu’à 450 salariés. Roger, l’époux de Danièle, était de ceux-là. « Au village, il y avait deux “familles”, ceux du tungstène, qui avaient le statut de mineurs, qui étaient mieux payés, avaient plus d’avantages, et ceux du kaolin, qui gagnaient moins bien. » Avec sa dizaine de commerces et ses 800 habitants, le village prospère. Mais en 1962, le couperet tombe. Les cours du tungstène s’effondrent, l’exploitation d’Échassières n’est plus rentable et la mine ferme. « C’était brutal. Du jour au lendemain, mon mari et les autres ont été licenciés, s’exclame Danièle. Sans préavis, sans indemnités. » La Compagnie minière des Montmins a mis la clé sous la porte en abandonnant sur place toute l’infrastructure.

      À quelques kilomètres du bourg, le spectre de l’ancienne usine de transformation de tungstène pourrit toujours lentement, le long de la route. La végétation a envahi les ateliers et les bureaux, les planchers se sont effondrés, les structures métalliques se balancent dans la brise depuis soixante ans. Un repaire de chats errants qui viennent se nourrir chez Roger Konate. Débarqué de Marseille en 2008, l’homme a acheté un ancien atelier de l’usine pour une bouchée de pain et l’a retapé pour s’en faire une maison : « Je suis venu ici parce que c’était la région de ma mère, et puis que c’était vraiment pas cher. » Juste à côté de sa maison, dissimulée sous des rideaux de lierre, se trouve l’entrée d’une ancienne galerie de transport de la mine, rebouchée depuis. Du lithium et d’Imerys, Roger Konate ne sait pas trop quoi en penser. « De toute façon, c’est déjà décidé, qu’est-ce que vous voulez qu’on y fasse ?, lâche-t-il. J’espère juste qu’ils ne rouvriront pas les anciennes galeries et que je ne me retrouverai pas exproprié ! Enfin, je serais dédommagé, mais bon, je suis bien tranquille ici. » Au milieu des fantômes du passé.

      Car avec le départ de la Compagnie des Montmins, le glas des années minières a sonné à Échassières. « Dans la décennie qui a suivi, les carrières de kaolin ont fermé, les unes après les autres », raconte Danièle. Son mari, qui avait trouvé un emploi à la carrière des Colettes, a été licencié à nouveau avant de retrouver un poste de conducteur d’engins sur le site Beauvoir, le seul resté en activité. « Mais pour le village, ça a été une catastrophe, poursuit sa femme. De 800 habitants, la population est passée en quelques années à peine à 400 et n’est jamais remontée depuis. » Alors pour elle, le projet Emili est une belle opportunité. « Quelque part, c’est l’aboutissement d’un espoir qu’on avait depuis les années 1970, dit-elle. C’est la possibilité de soutenir les commerces, de maintenir le service public. »

      Le maire actuel, Frédéric Dalaigre, ne dit pas autre chose : « L’opportunité économique est évidente. » Lors de l’annonce, c’est 1 000 emplois qui ont été évoqués par Imerys. Même si ceux-ci ne seront pas tous à Échassières, tempère le maire : « Ils seront répartis entre le site d’extraction et le site de conversion, dans un autre lieu encore non-déterminé. La majorité des emplois sera vraisemblablement sur ce dernier. Mais ce n’est pas grave. Nous n’avons pas besoin de 1 000 emplois. Nous n’avons pas les capacités actuellement d’accueillir tant de monde. » En attendant, l’arrivée de nouveaux habitants permettra peut-être d’ouvrir de nouvelles classes à l’école primaire – laquelle accueille actuellement 60 élèves des cinq communes environnantes –, de soutenir les commerces existants et peut-être d’en voir ouvrir de nouveaux, espère-t-il. Mais s’il est, a priori, plutôt favorable au projet, Frédéric Dalaigre est trop prudent pour s’emballer. Car une mine n’est pas sans conséquences, il le sait. Imerys assure vouloir faire d’Emili une mine « verte », mais entre promesse d’exemplarité et réalité de l’exploitation minière, l’écart est difficile à combler. Et dans la région, nombreux sont ceux qui craignent de devoir troquer la richesse de la nature pour une éphémère embellie économique.

      https://lesjours.fr/obsessions/lithium-france/ep1-lithium-sous-sol-france

    • Mine de lithium dans l’Allier : l’#eau, point faible du projet d’Imerys

      Le géant minier a achevé, fin juillet, un cycle de débats publics visant à convaincre de sa capacité à mettre en œuvre les technologies les plus innovantes pour créer une mine « propre » sur leur territoire. Mais de sérieuses incertitudes subsistent, notamment sur les besoins en eau de ce complexe industriel à l’heure du changement climatique.

      Une mine saine dans un esprit sain. Tel est le leitmotiv que le groupe minier Imerys s’est efforcé d’inculquer aux habitant·es de l’Allier au cours des cinq derniers mois, dans le cadre d’un cycle de débats publics arrivé à son terme fin juillet. L’esprit sain, c’est celui de la transition énergétique, qu’est censée faciliter la mine d’Échassières puisque celle-ci, si elle voit le jour, fournira assez d’hydroxyde de lithium pour produire chaque année, à partir de 2028 et pendant au moins vingt-cinq ans, 663 000 batteries de voitures électriques.

      La #mine_saine, c’est la promesse d’une infrastructure mettant les technologies les plus avancées au service du plus faible coût environnemental possible. Concernant l’utilisation de l’eau, une des principales sources d’inquiétude de la population, Imerys assure que son complexe industriel sera un modèle de #sobriété et de #propreté, grâce notamment à une réutilisation de la ressource en #circuit_fermé et à une politique du #zéro_déchet liquide.

      Il suffira ainsi de 600 000 mètres cubes d’eau par an pour faire tourner la mine et son usine de concentration, à Échassières, et d’une quantité équivalente pour l’usine de conversion prévue à #Montluçon. Soit un niveau de consommation d’eau « 10 à 20 fois moins élevé que l’eau nécessaire pour la production de lithium dans les #salars [bassins d’évaporation – ndlr] sud-américains », affirme Imerys dans son dossier de maîtrise d’ouvrage.

      Le site sera alimenté par des prélèvements réalisés sur la #Sioule, un affluent de l’Allier prenant sa source dans le Puy-de-Dôme, et celui de Montluçon par des eaux sorties de l’usine de retraitement de la ville, initialement issues du Cher. Là encore, pas d’inquiétude affirme l’industriel : « Sur la Sioule, on est à 0,1 % du débit moyen annuel actuel, et en étiage [quand le débit est le plus faible – ndlr], on atteint 0,6 % du débit mensuel », souligne Fabrice Frébourg, chef de projet environnement chez Imerys. Sur le Cher, les taux seraient respectivement de 0,1 % et 2 %, selon les documents fournis par Imerys.

      Pourtant la marge de manœuvre de l’industriel est beaucoup moins large qu’il n’y paraît. Le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) 2022-2027 du bassin Loire-Bretagne classe la Sioule parmi les bassins « qui montrent un équilibre très fragile entre la ressource et les prélèvements, à cause de #prélèvements excessifs ou de l’#évaporation par les #plans_d’eau, ou bien d’un régime d’étiage naturel trop faible ». Il impose pour cette raison « une limitation des prélèvements en période de basses eaux au niveau actuel ».

      Dès lors, Imerys ne pourra pas brancher ses pompes sur la Sioule avant d’avoir négocié avec les autres acteurs déjà présents sur le bassin une nouvelle répartition des prélèvements. Les pompages industriels étant de faible volume et incompressibles, le seul interlocuteur du groupe minier dans cette négociation est la #chambre_d’agriculture de l’Allier.

      Bataille de quotas avec le monde agricole

      Celle-ci s’est vu confier par arrêté préfectoral, fin 2015, une #autorisation_unique_de_prélèvement (#AUP) portant sur 4,92 millions de mètres cubes d’eau à ponctionner annuellement dans la Sioule sur un étiage courant de juin à septembre, à charge pour elle de répartir la ressource entre tous les irrigants et irrigantes. Ce chiffre a ultérieurement été révisé à 4,6 millions de mètres cubes.

      Or les agriculteurs et agricultrices n’ont jamais utilisé à plein leurs autorisations, leurs pompages réels n’ayant jamais dépassé 3,7 millions de mètres cubes, selon Nicolas Bonnefous, vice-président de la chambre d’#agriculture. Ce qui fait dire à Fabrice Frébourg qu’Imerys, qui n’a besoin de prélever que 50 000 mètres cubes d’eau par mois, soit 200 000 mètres cubes sur la période d’étiage, « serait capable de rentrer dans ces quotas ».

      « Le problème, c’est que nous avons bel et bien besoin de toute l’eau autorisée, même si nous ne prélevons que 3,1 ou 3,3 millions de mètres cubes », tempère cependant Nicolas Bonnefous. La chambre d’agriculture répartit en effet l’eau prélevée dans la Sioule entre des dizaines d’irrigant·es qui, d’une année sur l’autre, au gré des aléas météorologiques, utiliseront en totalité ou seulement en partie la part qui leur a été attribuée. L’addition de ces quotas non utilisés s’appelle le #foisonnement. « Et non, on n’est pas capables de dégager des marges sur le foisonnement, insiste Bonnefous. L’État doit prendre ses responsabilités et donner l’eau à Imerys sans prendre aux agriculteurs. »

      Déjà, des voix se font entendre parmi les irrigant·es pour dénoncer un possible coup de force. « Avec les précipitations variables d’aujourd’hui, l’#irrigation devient essentielle, a prévenu Adelaïde Giraud, présidente de l’association d’irrigants ASA des Champagnes, lors d’une réunion publique le 30 mai à Vichy. La Sioule ne semble pas pouvoir accueillir un intervenant supplémentaire [et] nous espérons sincèrement ne pas être une variable d’ajustement. »

      Impacts inéluctables

      Des pourparlers n’en sont pas moins en cours entre la chambre d’agriculture, le groupe minier, les services de l’État et #EDF, opérateur du barrage des Fades, en amont du site d’implantation de la mine, qui assure déjà un supplément de soutien d’étiage au bénéfice des irrigant·es. Et non, « ce n’est pas la profession agricole qui amènera un blocage », assure Patrice Bonnin, président de la chambre. « On a l’eau, on a le tuyau, il faut juste que l’administration trouve le bon robinet » réglementaire pour permettre l’opération, poursuit-il.

      Le « robinet » souhaité par les agriculteurs et agricultrices pourrait prendre la forme d’une sortie du classement du bassin de la Sioule en zone à prélèvements limités, ou celle d’une prise en compte des lâchers d’eau estivaux par le barrage de Fades pour augmenter les autorisations de prélèvements, évoque Nicolas Bonnefous.

      Si l’approvisionnement en eau de la mine semble déjà problématique au vu des réglementations actuelles, basées sur des évaluations de besoins remontant au début des années 2010, qu’en sera-t-il dans quatre ans, au moment théorique de l’entrée en activité du site ? Le Sdage stipule en effet que l’autorisation unique de prélèvement accordée à la chambre d’agriculture ne sera valable que jusqu’à l’ajout d’une analyse HMUC (hydrologie, milieux, usages, climat), soit « au plus tard, en 2027 ».

      Cette analyse, qui devra être diligentée par la commission locale de l’eau (CLE) chargée du schéma d’aménagement et de gestion des eaux (Sage) de la Sioule, permettra de déterminer le #volume_potentiellement_mobilisable (#VPM) de la rivière, c’est-à-dire la part de son débit restant à disposition après soustraction de l’eau réservée aux milieux aquatiques, aux réseaux d’eau potable ou encore à la sécurité anti-incendie.

      Pour Céline Boisson, animatrice du Sage Sioule, il est peu probable que les résultats de l’analyse HMUC permettent d’ouvrir en grand les vannes des stations de pompage. « La Sioule est déjà affectée par le #changement_climatique : son débit moyen a baissé de 15 % en trente ans, et son débit d’étiage de 48 % », avait-elle rappelé lors de la réunion publique de Vichy.

      Interrogée par Mediapart, l’experte précise que les seuils de crise ne sont jamais atteints sur la Sioule en aval du #barrage_de_Fades grâce aux lâchers d’eau diligentés par EDF, en vertu d’un accord avec la chambre d’agriculture. « Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de crise. Clairement, l’amont du barrage est en crise, tout comme la #Bouble », petite #rivière appartenant au même bassin, ajoute-t-elle, avant de conclure : « Je ne suis pas sûre que tout le monde sera satisfait du résultat de l’analyse. Il y aura forcément un partage à faire. »

      S’il se dit confiant dans la capacité du barrage de #Fades, fort de ses 65 millions de mètres cubes d’eau, à pourvoir aux besoins de la mine, Fabrice Frébourg évoque également des pistes à l’étude chez Imerys pour permettre au complexe d’Échassières de disposer de ses « propres solutions de modulation ».

      Il s’agit principalement de renforcer la capacité de deux petits lacs déjà présents sur le site, en la faisant passer de 55 000 à 100 000 mètres cubes, ou éventuellement d’utiliser des galeries d’exploitation de la mine pour du stockage d’eau. La gestion des périodes de maintenance pour les faire coïncider avec l’étiage est également une « piste d’optimisation du projet ».

      Ces solutions ne convainquent pas les défenseurs et défenseuses des milieux aquatiques. « Depuis vingt ans, il n’y a quasiment plus de crues morphogènes sur la Sioule. Or elles sont essentielles pour le cours d’eau car elles permettent le transit sédimentaire et le décolmatage du lit, indispensable pour la réussite de la reproduction de certaines espèces, explique Mickaël Lelièvre, directeur de la fédération de pêche de l’Allier. Si on augmente le soutien d’étiage ou le stockage, on aggrave ce phénomène de réduction des crues morphogènes. »

      Menaces sur des #poissons déjà en danger

      Le pêcheur est soutenu par Aurore Baisez, directrice du Logrami, centre de recherche sur les poissons migrateurs du bassin de la Loire, qui souligne qu’une infime variation du niveau de la crue peut suffire à perturber la migration des espèces fréquentant la Sioule (saumon, lamproie, anguille, alose) et le Cher (les mêmes moins le saumon). « Les crues sont le signal du départ dans un sens ou dans l’autre. La perte de ce signal se traduit par de faibles remontées des poissons, ou très en aval », indique la scientifique, précisant que l’alose et la lamproie sont « classées en danger critique d’extinction, à l’instar du tigre du Bengale ou de l’éléphant d’Afrique ».

      À Montluçon, où le #mica_lithinifère – principal minerai du lithium – sera transformé en #hydroxyde_de_lithium, Imerys n’est pas soumis aux mêmes contraintes réglementaires que dans la vallée de la Sioule, puisque son alimentation en eau proviendra de l’usine de retraitement des eaux usées de la ville et ne peut donc être comptabilisée comme un « prélèvement » sur le Cher. Elle n’en occasionnera pas moins une « perte d’eau nette » d’environ 600 000 mètres cubes par an pour une rivière déjà en crise, classée « zone de répartition des eaux » – impliquant un contrôle des prélèvements toute l’année – par le Sdage Loire-Bretagne en raison d’un « déséquilibre quantitatif avéré ».

      « Certes, on parle d’une ponction limitée. Mais le #Cher n’a pas de réserves, très peu de nappe alluviale. Quand il ne pleut plus, il n’y a plus de débit », commente Jonathan Bourdeaux-Garrel, animateur du Sage Cher-Amont. Il y a bien un petit barrage, #Rochebut, censé assurer un débit garanti de 1,55 mètre cube par seconde. « Mais quand il n’y a pas d’eau dans le barrage, ça descend jusqu’à 800 litres par seconde, et il faut voir alors la tête du Cher. »

      Mickaël Lelièvre, de la fédération de pêche, confirme et renchérit : « La situation hydrologique est très dégradée sur le Cher. Sans le soutien d’étiage par le barrage, il n’y aurait plus d’eau dans la rivière. Rien que cela devrait imposer d’interdire tout nouveau prélèvement. » L’expert met par ailleurs en cause les statistiques fournies par Imerys, basées sur des moyennes quinquennales de débit et donc aveugles aux aléas de faible durée qui frappent régulièrement la rivière.

      Du côté d’Imerys, Fabrice Frébourg assure « qu’on prend la chose très au sérieux ». Le cadre assure que son entreprise choisira un indice « beaucoup plus pénalisant que les moyennes quinquennales » dans ses prochaines études sur l’impact du réchauffement climatique. Il évoque également la piste, « apportée par l’administration, d’un possible soutien d’étiage par le barrage de Rochebut ». Comme le faisait remarquer un intervenant en réunion publique, « les poissons ne peuvent pas se mettre entre parenthèses » à chaque assèchement du Cher.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/030824/mine-de-lithium-dans-l-allier-l-eau-point-faible-du-projet-d-imerys
      #promesses

  • #TotalÉnergies : 33 « #bombes_climatiques » en prévision

    À travers le monde, TotalÉnergies est impliquée dans trente-trois projets super-émetteurs, qui risquent de « faire exploser le climat ». Tel est le résultat d’un rapport publié par Greenpeace, le 25 octobre, intitulé « Les bombes climatiques de TotalÉnergies, la forêt derrière l’arbre Eacop » (https://www.greenpeace.fr/espace-presse/rapport-ces-projets-de-totalenergies-qui-vont-faire-exploser-le-climat), qui liste les projets fossiles auxquels la major participe.

    L’ONG conclut que « la frénésie de TotalÉnergies pour l’#exploration et le développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers », que l’ONG considère comme autant de « bombes climatiques », compromet l’objectif de l’Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.

    Depuis 2015, TotalÉnergies a été impliquée dans l’acquisition de nouvelles #licences_d’exploration_fossile dans le cadre de 84 projets. Les #licences de onze d’entre eux ont même été acquises après 2021, année de la parution du rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui appelait à arrêter le développement de nouvelles infrastructures fossiles. Trente-trois autres projets « pourraient potentiellement émettre encore 93 milliards de tonnes de CO2 équivalent, soit plus que les émissions cumulées d’un pays comme le Royaume-Uni sur la période 1850-2021 ».

    Le projet #Vaca_Muerta en #Argentine (14,5 milliards de tonnes de CO2 équivalent) et les projets #North_Field_East au #Qatar (7 milliards de tonnes de CO2 équivalent) figurent en tête de liste des #projets les plus émetteurs. Par ailleurs, dix-neuf de ces projets sont situés à moins de 50 km d’une zone de #biodiversité protégée.

    « Ces projets sont non seulement un #désastre pour le climat, mais sont également susceptibles d’alimenter des situations de #corruption, de #conflits_armés, de violations des #droits_humains et des #libertés_fondamentales », rappelle Edina Ifticène, chargée de campagne énergies fossiles pour Greenpeace France. La majorité de ces projets super-émetteurs sont situés dans des États en guerre, et/ou dans des pays où les régimes sont jugés « autoritaires ».

    https://reporterre.net/TotalEnergies-33-bombes-climatiques-en-prevision
    #climat #changement_climatique #pétrole #gaz

    • Ces projets de TotalEnergies qui vont faire exploser le climat

      A la veille de l’annonce des résultats du groupe au troisième trimestre, Greenpeace France publie un nouveau rapport, intitulé Les bombes climatiques de TotalEnergies, la forêt derrière l’arbre EACOP dans lequel elle pointe la frénésie de TotalEnergies pour l’exploration et le développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers. L’association y dévoile également une liste de projets fossiles super-émetteurs auxquels la major participe [1]. Autant de « bombes climatiques » qui compromettent l’objectif 1,5° C de l’Accord de Paris et contredisent les propres engagements de la multinationale d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 [2].

      Barnett Shale au Texas ou Vaca Muerta en Argentine – où on exploite du gaz de schiste dont la production est interdite en France – Artic LNG en Russie, Mozambique LNG, North Field au Qatar, ce rapport montre que EACOP en Ouganda, n’est que l’arbre qui cache la forêt des projets hautement contestables de TotalEnergies, aussi bien sur le plan environnemental qu’au niveau des droits humains.

      Une expansion en contradiction avec l’objectif 1,5° C

      L’Accord de Paris a fixé l’objectif de “limiter l’élévation de la température à 1,5 °C”, ce qui supposait, dès sa signature en décembre 2015, de laisser dans le sol une grande partie des réserves fossiles.

      Pourtant, depuis 2015 :

      - TotalEnergies a été impliquée dans l’acquisition de nouvelles licences d’exploration fossile dans le cadre de 84 projets.
      – Pour 11 de ces projets, ces licences ont même été acquises après 2021, soit après que l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) a publiquement recommandé de renoncer au développement de nouveaux champs pétroliers ou gaziers pour rester aligner sur l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050 [2].

      « Le PDG de TotalEnergies va encore se présenter en bienfaiteur de l’humanité qui ne ferait que ‘répondre à la demande en énergies fossiles’. Mais en continuant à développer de nouveaux projets pétroliers et gaziers, l’industrie fossile crée cette fameuse demande pour continuer à engranger des profits faramineux, et nous enferme dans une dépendance aux énergies fossiles pour plusieurs décennies”, souligne Edina Ifticène, chargée de campagne Énergies fossiles pour Greenpeace France.

      Des projets super émetteurs destructeurs du climat

      Selon nos calculs estimatifs, sur l’ensemble des projets de production d’hydrocarbures dans lesquels TotalEnergies est impliquée, on dénombre en 2022, 33 projets super-émetteurs, répartis dans 14 pays. Ensemble, ces 33 projets pourraient potentiellement émettre encore 93 Gt de CO₂e, soit plus que les émissions cumulées d’un pays comme le Royaume-Uni sur la période 1850-2021.

      En haut du tableau, se trouvent notamment le projet Vaca Muerta en Argentine, dont les émissions pourraient atteindre encore 14,5 Gt de CO₂e ainsi que les projets North Field et North Field E au Qatar qui représenteraient chacun encore plus de 7 Gt de CO₂e, toujours selon les calculs estimatifs de Greenpeace France.

      De plus, parmi ces 33 projets “super-émetteurs”, 19 sont situés à moins de 50 km d’une zone de biodiversité protégée.

      Une stratégie à risques multiples

      En plus de leur empreinte climatique et environnementale, le rapport de Greenpeace s’intéresse aux situations de conflits, de corruption ou d’atteintes aux droits humains dans lesquelles interviennent ces projets. L’organisation a ainsi produit des cartes superposant les projets auxquels TotalEnergies participe avec plusieurs classements internationaux, comme le Global Peace Index produit par The Institute for Economics & Peace, le Democracy Index de l’Economist Intelligence Unit, l’indice de perception de la corruption de Transparency International et l’indice des droits des travailleurs et des travailleuses dans le monde de la Confédération syndicale internationale.

      Sur les 33 projets fossiles super-émetteurs auxquels TotalEnergies participe en 2022 :

      - les 2/3 de ces projets super-émetteurs sont situés dans des États dont le niveau de paix n’est pas bon
      – les 3/4 dans des pays dont les régimes sont jugés “autoritaires”
      - 42 % dans des États en-dessous de la moyenne mondiale en termes de perception de la corruption
      - 70 % dans des pays dont les régimes sont mal classés en termes de respect des droits des travailleur·ses

      “La vie réelle évoquée par Patrick Pouyanné aux universités d’été du MEDEF, ce sont ces projets qui sont non seulement un désastre pour le climat, mais sont également susceptibles d’alimenter des situations de corruption, de conflits armés, de violations des droits humains et des libertés fondamentales. A quelques semaines de la COP 28, les responsables politiques doivent aller au-delà des grands discours sur la sortie des énergies fossiles : des mesures doivent être prises pour contraindre l’industrie fossile”, poursuit Edina Ifticène.

      Alors que TotalEnergies a annoncé sa volonté d’augmenter sa production d’hydrocarbures de 2 % à 3 % par an lors des cinq prochaines années [4] et malgré la poursuite-bâillon adressée par TotalEnergies à Greenpeace en avril 2023 à la suite de la publication de son dernier rapport sur le bilan carbone de la major, Greenpeace France n’entend pas se laisser intimider et continuera de dénoncer la politique d’expansion fossile et de profit à tout prix de TotalEnergies [5].

      Notes aux rédactions

      [1] Pour identifier les projets “super-émetteurs” impliquant TotalEnergies, Greenpeace France s’est basée sur la définition d’un projet selon la base de données de Rystad et a comptabilisé les projets qui pourraient encore émettre, d’après nos calculs estimatifs, au moins 1 Gt de CO₂e, si toutes les réserves qu’il restait à extraire fin 2022 étaient exploitées (voir la partie “Méthodologie” du rapport).
      Les données de Rystad ont été extraites au mois d’avril 2023.

      [2] https://totalenergies.com/company/transforming/ambition/net-zero-2050

      [3] https://www.iea.org/reports/net-zero-by-2050

      [4] https://totalenergies.com/fr/medias/actualite/communiques-presse/presentation-strategie-perspectives-2023

      [5] https://www.greenpeace.fr/espace-presse/justice-totalenergies-tente-de-museler-greenpeace

      https://www.greenpeace.fr/espace-presse/rapport-ces-projets-de-totalenergies-qui-vont-faire-exploser-le-climat
      #rapport #Greenpeace

    • Questions et réponses sur l’utilisation du phosphore blanc par Israël à Gaza et au Liban
      https://www.hrw.org/fr/news/2023/10/12/questions-et-reponses-sur-lutilisation-du-phosphore-blanc-par-israel-gaza-et-au

      Ces attaques ont suscité une réaction d’indignation aux niveaux international, mais aussi national. En 2013, en réponse à une requête déposée devant la Haute Cour de justice d’Israël concernant les attaques à Gaza, l’armée israélienne a affirmé qu’elle n’utiliserait plus de phosphore blanc dans les zones peuplées, sauf dans deux types de situations précis qu’elle a décrits uniquement aux juges. Dans la décision du tribunal, la juge Edna Arbel a conclu que l’utilisation du phosphore blanc serait donc « une exception extrême dans des circonstances très précises ». Bien que cet engagement envers la Cour ne représentait pas un changement officiel de la politique israélienne, la juge Arbel a appelé l’armée israélienne à procéder à un « examen approfondi et complet » de cette question, et à adopter une directive militaire permanente au sujet du phosphore blanc.

      Par la suite en 2013, l’armée israélienne a annoncé qu’elle développait de nouveaux obus fumigènes, sans phosphore blanc. Elle a ajouté qu’elle se réservait le droit d’utiliser et de stocker ses munitions au phosphore blanc jusqu’à ce qu’elle dispose d’alternatives suffisantes. Le communiqué des Forces de défense israéliennes a précisé : « Selon le résultat de ce processus de développement, les nouveaux obus sont destinés à remplacer progressivement les obus fumigènes actuels en tant que principal moyen utilisé par les FDI [Forces de défense israéliennes] comme écrans de fumée. »

      #once_again #Israël #Gaza #bombes_au_phosphore

    • « Il n’y a aucune raison tactique et militaire pouvant justifier de l’usage de cette munition dans un environnement urbain. On pourrait suggérer que cette arme est juste utilisée à des fins de destruction et de terreur », estime Chris Cobb-Smith, expert en balistique et directeur du Chiron Resources, une société britannique de conseil en sécurité à destination des médias. Après avoir pris connaissance des contenus vérifiés par franceinfo, ce spécialiste confirme avoir reconnu du phosphore blanc.

      [...]

      L’usage en plein jour de ces bombes sur le port de Gaza, une zone résidentielle, pose donc question. « Les obus à phosphore blanc sont tirés avec une fusée à explosion, ce qui garantit la répartition des fragments de phosphore blanc sur une vaste zone. Cela implique qu’ils sont utilisés comme une arme de zone, et qu’ils ne sont pas dirigés contre une cible spécifique. Il existe donc une probabilité de dommages collatéraux », relève Chris Cobb-Smith. Il est donc très probable que l’armée israélienne ait mis en danger des populations civiles en utilisant du phosphore blanc à Gaza mercredi.

      [...]

      Contacté par franceinfo, l’armée israélienne assure qu’elle « utilise ses munitions conformément au droit international ». Les forces de défense israéliennes ajoutent que « les versions communes de munitions fumigènes, dont celles habituellement utilisées par l’armée israélienne, ne contiennent pas de phosphore blanc ». Elles font valoir que « conclure que des munitions fumigènes contiennent du phosphore sur des seules preuves photographiques n’est pas fiable » et soulignent que « même les munitions fumigènes contenant du phosphore blanc ne sont pas illégales, et plusieurs armées occidentales en font l’usage ».

  • Le film Oppenheimer garde le silence sur les premières victimes de l’ère nucléaire
    https://www.les-crises.fr/le-film-oppenheimer-garde-le-silence-sur-les-premieres-victimes-de-l-ere-

    Le film, qui dure trois heures est un drame captivant et une histoire précieuse, mais il fait abstraction des premières victimes de l’ère nucléaire. Source : Responsible Statecraft, Connor EcholsTraduit par les lecteurs du site Les-Crises Le 16 juillet 1945, ce fut la fin du monde. C’est du moins ce que pensaient les habitants du […]

  • The dark — and often misunderstood — nuclear history behind Oppenheimer | Alex Wellerstein
    https://www.vox.com/politics/2023/7/24/23800777/oppenheimer-christopher-nolan-atomic-bomb-true-story-los-alamos-manhattan-proje

    There’s a whole line of scholarship now that is not new — it’s 20 to 30 years old, or older — which gets into the fact that the standard narrative that most people have about the use of the atomic bombs and World War II is wrong.

    We can call that the decision-to-use-the-bomb narrative, like just the idea that Harry Truman very carefully weighed whether to use the bomb or not. It was a question of, “Do you bomb? Or do you invade?” And so with a heavy heart, he chose to bomb and that was the lesser of two evils. That is just 100 percent not what happened at the time.

    It’s much less rationalized and thought out. They were planning to bomb and invade. And they didn’t know what the future would be. And Truman played very little role in all of this. This isn’t news to any scholars, but it hasn’t penetrated popular culture. And it’s not in this film at all.

    [...] So a lot of the discussions we have about the decision to use the atomic bomb — in elementary schools and high schools and even in college — it’s really a question of, if you have two bad options in front of you, are you allowed to take one of them? Are you forced to take one? So it’s about, what are the conditions in which you were allowed to destroy an entire city?

    And when we construct it that way, we are actually repeating a bad version of history that was invented by people trying to justify the use of the atomic bomb. Because if you get into the situation where you’re saying, is it better to use the atomic bomb or is it better to have this horrible, terrible invasion that will kill some giant number of people, it’s really hard to conclude that the atomic bomb wasn’t justified.

    That wasn’t how it was seen in 1945. One of the questions that often comes up is, did they have to use two bombs? Why #Nagasaki, so soon after #Hiroshima? There’s a whole way to justify that in this rational language: you say, the first bomb was to prove we had one; the second was to prove that we had more than one. And we had to do it because the Japanese didn’t respond to Hiroshima. So it was necessary. And that’s why they chose to do it. That’s all false.

    It’s false in the sense that there was no strategic choice about Nagasaki. Truman didn’t even know Nagasaki was going to happen. The [military] people on the island Tinian, who were in charge of dropping the bombs, had an order that they could drop the bombs as soon as they were ready to use, and they happened to have two bombs ready at about the same time. They got a weather forecast that said the planned date for the second bombing was going to have bad weather. So they moved it up a day to accommodate the weather. It had nothing to do with high-level strategy.

    The Japanese were, at this time, still trying to figure out what had happened at Hiroshima. They hadn’t actually concluded or even deliberated about it in any formal way. It wasn’t part of some grand scheme. It complicates the discussion quite a bit when you know those details.

    [...] There’s a colleague of mine at Princeton named Michael Gordin, and he has a book called Five Days in August: How World War II Became a Nuclear War, which is all about how people thought about the atomic bomb in-between Hiroshima and the surrender of Japan. At that point, it’s not clear that the bomb has actually ended the war. And if that is the case, then your feelings on, “Well, is it some world-changing weapon or is it just a really efficient way of doing what they could already do?” [A single night of incendiary bombing killed more than 100,000 people in Tokyo on March 9, 1945.]

    So those guys on the island who decided to go ahead with the Nagasaki mission on their own choice, they see it as just another weapon. Whereas there are other people, including some of the politicians, who do not see it that way. They see it as this really core political strategic device. Once the war ends, the bomb as a special political thing, that viewpoint wins out. Looking at how people’s attitudes change, you can get a lot out of that.

    • Turns out Oppenheimer’s boss lied, repeatedly, about radiation poisoning
      https://slate.com/news-and-politics/2023/08/oppenheimer-manhattan-project-radiation-atomic-bomb-declassified.html

      On Nov. 27 [1945], months after the memo about the biological effects of the atomic explosions in Hiroshima and Nagasaki, Stafford Warren, the project’s chief medical officer, wrote Groves with even more definitive proof. Of the roughly 4,000 patients admitted to hospitals in Hiroshima and Nagasaki, he wrote, “1300 or 33% showed effects of radiation and, of this number, approximately one-half died.”

      Nonetheless, three days later, in testimony before the Senate Special Committee on Atomic Energy, Groves was asked if there was any “radioactive residue” at the two bombed Japanese cities. Groves replied, “There is none. That is a very positive ‘none.’

      [...] in a comment that sealed his reputation among his critics, Groves said that irradiated victims who died not right away, but after some time, would do so “without undue suffering. In fact,” he said, “they say it is a very pleasant way to die.

      Groves discounted, downplayed, then denied the reports about radiation sickness because, like many at the time, he thought that nuclear weapons would be the centerpiece of U.S. defense policy (as indeed they were for the next few decades) and that the American public would rebel against them if they were seen as something like poison gas—and thus beyond a moral threshold.

  • Was the Oppenheimer test site unpopulated? - Los Angeles Times
    https://www.latimes.com/delos/story/2023-07-26/oppenheimer-atomic-bomb-new-mexico-cancer-aftermath

    In the film, both the test site and the Los Alamos Laboratory in Northern New Mexico are remote, unpopulated areas — a depiction that’s largely in line with most historical accounts of the Manhattan Project. The reality is starkly different. The land acquired by the U.S. government to build and test the bomb was occupied, as was the 150-mile radius surrounding the Trinity Test — areas settled predominantly by Hispanic and Native American ranchers and homesteaders.

    #mensonges #crimes #bombe #sans_vergogne

  • #Nucléaire en #Polynésie : en quête de vérité

    Sous la présidence du général de Gaulle, la France se dote de la force de dissuasion nucléaire convoitée depuis le début de la Ve République. À quel prix ?
    Les 193 essais nucléaires réalisés de 1966 à 1996 en Polynésie, dans les atolls de Fangataufa et Mururoa, ont bouleversé l’existence des Polynésiens, contaminant certains par les retombées toxiques, dégradant des écosystèmes fragiles dans lesquels des déchets radioactifs ont été hâtivement jetés à la mer. Au long de cette gigantesque entreprise qui a mobilisé une centaine de milliers d’hommes et des milliards de francs, le mode de vie des habitants s’est trouvé transformé, des Marquises à Bora-Bora.
    Depuis les hésitations des décideurs politiques métropolitains sur le choix du lieu jusqu’aux conséquences sanitaires, environnementales et socio-économiques, ce film lève le voile sur une période de l’histoire polynésienne et postcoloniale française longtemps demeurée sous le signe du secret.

    https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/67435_0
    #film #documentaire #film_documentaire
    #France #Polynésie_française #De_Gaulle #essais_nucléaires #dissuasion_nucléaire #Pacifique #DOM-TOM #surveillance #Centre_d'expérimentation_du_Pacifique (#CEP) #Tahiti #Moruroa #Fangataufa #Hao #tourisme #modernisation #Commissariat_de_l'énergie_atomique (#CEA) #bombe_atomique #Archipel_des_Gambier #contamination #Général_Thiry #comité_d'indemnisation_des_victimes_des_essais_militaires (#CIVEM) #santé #déchets_nucléaires #indemnisation

  • 13 mai 1985, le #bombardement de #MOVE : un #crime_d'État oublié - Contre Attaque
    https://contre-attaque.net/2023/05/15/13-mai-1985-le-bombardement-de-move-un-crime-detat-oublie

    Le mouvement MOVE est fondé en 1972 dans la ville de #Philadelphie aux USA. Composé de militants et militantes noires qui vivent en communauté, le mouvement est anticapitaliste, anti-raciste et écologiste. Ses membres sont végétariens, s’opposent à la répression et critiquent le militarisme. Ils organisent des protestations dans des zoos, des manifestations, donnent des cours à domicile…

    Au sein de MOVE, les #afro-descendant-es changent leur nom de famille, souvent issu des propriétaires esclavagistes, pour le nom Africa, de la même manière que Malcolm X ou Mohammed Ali ont changé leurs noms d’origine.

    À la fin des années 1970, MOVE s’installe dans une copropriété dans une résidence calme, dans un quartier de classe moyenne de Philadelphie. Les voisins se plaignent notamment d’ordures ménagères autour du pâté de maison, et de slogans chantés au mégaphone devant la propriété. Des faits anodins, qui provoquent pourtant le choix de la mairie d’arrêter plusieurs membres de MOVE et de les expulser.

    Le 13 mai 1985, il y a 38 ans presque jour pour jour, la police donne l’assaut. Près de 500 policiers et le chef de la police municipale entourent le pâté de maison et font évacuer tout le voisinage. Sept adultes et six enfants sont présents dans la maison de MOVE. L’eau et l’électricité sont coupés pour déloger les habitant-es. Des grenades lacrymogènes sont tirées dans le logement. Une fusillade éclate. À 14h le commissaire ordonne le bombardement du bâtiment. Des hélicoptères larguent des #bombes_incendiaires sur la maison, qui s’enflamme rapidement. 11 personnes sont brûlées vives, dont 5 enfants. Deux personnes seulement, une femme et un enfant, parviennent à s’échapper et survivent, malgré des tirs policiers en leur direction

    https://encrypted-tbn0.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcRTmn-PVSy7oM8p2YRR7faiglRMnToGaO-ZrQ&usqp

  • Ça fait plusieurs fois que je constate que des médias supposés de gauche de Youtube, pour montrer l’opposition au projet des retraites, te passent amplement des extraits des politicien·nes de gauche, mais insèrent systématiquement le commentaire de La Pen ou du Bardella.

    C’est merdique.

  • Etats-Unis : qu’est-ce qu’une « bombe cyclonique », le phénomène météo qui paralyse une partie du pays pour Noël ?
    https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/etats-unis-qu-est-ce-qu-une-bombe-cyclonique-le-phenomene-meteo-qui-par

    Les Etats-Unis traversent une « tempête ne survenant qu’une fois par génération », selon le National Weather Service (NWS). Alors que des dizaines de millions d’Américains doivent voyager pour les fêtes, entre vendredi 23 décembre et lundi 2 janvier, le site météorologique privé AccuWeather évoque une inquiétante « bombe cyclonique ». En quoi consiste ce phénomène qui paralyse une grande partie du pays ?

    https://twitter.com/NWSMissoula/status/1605931571084554240
    La vidéo montre le gel instantanée de l’eau bouillante jetée en l’air. Bon, après pour le bruit, ça doit être un chasse-neige ou une déneigeuse.

    https://video.twimg.com/ext_tw_video/1605930462651682817/pu/vid/720x1280/NLDDlYT6HA3JZXCN.mp4

    #climat #bombe_cyclonique #extrêmes_climatiques conséquence du #réchauffement_climatique

  • Cette menace à 2.200 milliards de dollars qui plane sur les devises… (Les Échos)

    Le risque de non-livraison d’une monnaie concerne potentiellement 2.200 milliards de $ par jour.

    Soit près du 1/3 des volumes quotidiens mondiaux, selon la Banque des règlements internationaux.

    Le plus grand marché au monde, celui des #monnaies, recèle en son sein une #bombe_à_retardement. Les #devises ne circulent entre les intervenants que s’ils honorent leurs engagements dans les temps. La liquidité peut s’interrompre brutalement, notamment lors des crises. Si un acteur important fait défaut, un effet domino peut se produire pour le système financier international. Entre le moment où une monnaie est achetée contre une autre puis effectivement livrée, il s’écoule deux jours, le délai standard sur les changes. Si le vendeur (#banque, institution financière, fonds…) fait faillite ou n’est pas en mesure d’honorer son engagement, l’acheteur se retrouve privé de sa devise, avec des conséquences néfastes en cascade si le montant est important. En 2008, la banque allemande KfW enregistra ainsi 300 millions de dollars, du fait de la faillite de sa contrepartie, la banque Lehman Brothers.

    En 2022, pas moins de 2.200 milliards de dollars, soit 31 % des volumes quotidiens, comportaient un risque plus ou moins grand de non-règlement et d’échec de livraison des monnaies dans les temps, selon un rapport de la Banque des règlements internationaux (#BRI). Ce risque a augmenté de 15 % en trois ans. Il est le plus important dans les pays émergents où jusqu’aux 3/4 des transactions peuvent connaître des retards, voire l’échec de la réception des monnaies. Plus les devises sont exotiques et peu traitées, plus ce risque est élevé. […]

    #marché_des_devises #spéculation #bourse #marché_financier #capitalisme

  • Tic tac. 62 décharges marines d’armes, parfois chimiques, sont laissées à l’abandon le long des côtes de la Manche et atlantiques. Comme ces obus, fréquemment observés par les plongeurs à l’île de Groix. Mais face au risque, l’État oppose le « secret défense ». Une enquête d’Actu.fr sur les décharges d’armes chimiques au large des côtes françaises : une « bombe à retardement ».
    https://splann.org/glane-pour-vous-dans-la-presse-en-juin-2022
    Enquête. Des décharges d’armes chimiques au large des côtes françaises : une "bombe à retardement" | Enquêtes d’actu
    https://actu.fr/societe/des-decharges-d-armes-chimiques-au-large-des-cotes-francaises-une-bombe-a-retar

    Des décharges marines d’armes parfois chimiques polluent les océans depuis un siècle. Le risque de destruction de toute vie est réel. L’État oppose le « secret-défense ».


    #splann #tic_tac

  • “Carbon Bombs” - Mapping key fossil fuel projects - ScienceDirect
    https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0301421522001756

    Meeting the Paris targets requires reducing both fossil fuel demand and supply, and closing the “production gap” between climate targets and energy policy. But there is no supply-side mitigation roadmap yet. We need criteria to decide where to focus efforts.

    Here, we identify the 425 biggest fossil fuel extraction projects globally (defined as >1 gigaton potential CO2 emissions). We list these “carbon bombs” by name, show in which countries they are located and calculate their potential emissions which combined exceed the global 1.5 °C carbon budget by a factor of two. Already producing carbon bombs account for a significant percentage of global fossil fuel extraction. But 40% of carbon bombs have not yet started extraction.

    Climate change mitigation efforts cannot ignore carbon bombs. Defusing them could become an important dimension of climate change mitigation policy and activism towards meeting the Paris targets. So far, few actors, mainly from civil society, are working on defusing carbon bombs, but they are focussing on a very limited number of them. We outline a priority agenda where the key strategies are avoiding the activation of new carbon bombs and putting existing ones into “harvest mode”.

    #extractivisme #énergie #écologie #carbone