• « L’art peut participer à la guerre de position », Sandra Lucbert, BALLAST
    https://www.revue-ballast.fr/sandra-lucbert-lart-peut-participer-a-la-guerre-de-position

    Son troi­sième livre, Personne ne sort les fusils, a racon­té de l’in­té­rieur le pro­cès de France Télécom-Orange, qui s’est tenu durant l’an­née 2019. On se sou­vient : suite à la pri­va­ti­sa­tion de la socié­té de télé­com­mu­ni­ca­tions et à son ouver­ture à la concur­rence, les sala­riés, mal­trai­tés, har­ce­lés et ter­ro­ri­sés par les nou­velles formes de mana­ge­ment, se sont mas­si­ve­ment sui­ci­dés — trente-cinq cas au cours des seules années 2008 et 2009. Le PDG, Didier Lombard, avait alors par­lé d’« une mode ». Avec son nou­vel ouvrage, Le Ministère des contes publics, l’écri­vaine Sandra Lucbert ajoute une pierre à son entre­prise de ren­ver­se­ment lit­té­raire du capi­ta­lisme : elle vise, cette fois, la sacra­li­sa­tion de la dette publique et l’im­pact du lan­gage sur la per­cep­tion du monde de la finance. Littérature et poli­tique : une dis­cus­sion affilée.

    À la ques­tion que George Orwell se pose quant aux rai­sons qui le poussent à écrire, il répond qu’il aspire à « faire de l’écriture poli­tique un art à part entière ». Vous ratifiez ?

    Absolument. Avec cepen­dant une pré­ci­sion : je ne consi­dère pas du tout que la lit­té­ra­ture ait essen­tiel­le­ment à être poli­tique. Comme tout art, elle jouit d’une pleine auto­no­mie dans le choix de ses objets ou de ses pro­pos, et tous sont éga­le­ment éli­gibles. Ce que je crois en revanche, c’est qu’il y a des périodes par­ti­cu­lières où per­sis­ter à tour­ner le dos aux objets poli­tiques quand on est auteur ou artiste est un pro­blème. En cer­taines conjonc­tures, la hau­teur des enjeux, des urgences et même des périls nous requiert. Je ne veux pas dire qu’il est inad­mis­sible, pour une auteure ou une artiste, même dans ces conjonc­tures, de conti­nuer à tra­vailler sur des ques­tions ou des objets non poli­tiques, mais si tous les sec­teurs de l’art demeurent dans ce type de ques­tion­ne­ment et dans ce type seule­ment, alors ils col­la­borent objec­ti­ve­ment à ne rien ten­ter du tout pour enrayer les des­truc­tions en cours. Or je pense que nous vivons pré­ci­sé­ment une de ces époques où nous sommes requis. L’art ne peut plus se com­plaire dans la seule pré­oc­cu­pa­tion de l’innovation for­melle : il faut le _tran­si­ti­ver_1, en l’occurrence poli­ti­que­ment. Le sen­ti­ment d’urgence poli­tique m’est venu hors de la lit­té­ra­ture, mais c’est par elle et par ses exi­gences for­melles que j’arrive à faire quelque chose de ce sen­ti­ment d’urgence.

    « Hors de la lit­té­ra­ture », c’est-à-dire où ?

    La herse néo­li­bé­rale, je l’ai sen­tie au tra­vail (dans l’éducation natio­nale et l’hôpital public) comme beau­coup de gens — et, par la lit­té­ra­ture, je cherche les moyens de (me) figu­rer ce qui nous tient, sans quoi je risque la dis­lo­ca­tion. J’ajoute main­te­nant que « faire de l’écriture poli­tique un art à part entière » com­mence par congé­dier l’opposition inepte entre art « à thèse » et art tout court. Si on peut dire d’un roman à sujet poli­tique : roman à thèse, c’est sim­ple­ment que le tra­vail for­mel est insuf­fi­sant à méta­bo­li­ser la matière ana­ly­tique qu’il entend tra­vailler. C’est que ce roman échoue à en faire de la lit­té­ra­ture : pro­duit un suc­cé­da­né d’essai, ou de tract, dégui­sé en roman. L’art poli­tique véri­ta­ble­ment art pose donc une double exi­gence : ana­ly­tique et for­melle. Exigence ana­ly­tique d’abord, car, par défi­ni­tion, l’art requis, l’art poli­ti­que­ment tran­si­ti­vé, se donne pour but de dire quelque chose des objets du social-his­to­rique poli­tique. Pour dire quelque chose d’un objet, il faut l’avoir pen­sé — contrai­re­ment à ce que sou­tiennent les hérauts de l’art du sen­sible-inef­fable, de l’art qui ne réflé­chit pas. Et quand il s’agit des objets du social-his­to­rique capi­ta­liste, la barre ana­ly­tique est pla­cée très haut — il est certes moins fati­guant de s’abandonner à ses pentes asso­cia­tives. Mais ça n’est pas tout : un art poli­tique doit « par­ler » des objets, mais il doit en par­ler à sa manière : avec l’intransigeance de ses exi­gences propres. Travailler les objets poli­ti­co-éco­no­miques, oui, mais dans la gram­maire de l’art. C’est ici qu’il faut sou­li­gner les mérites de l’autonomie du champ — lorsqu’elle ne se dégrade pas en une forme de céci­té poli­tique. Car c’est l’indépendance rela­tive des logiques de l’art qui est garante de l’exigence for­melle dont je parle.

    [...] S’éloignant de sa détestation originelle du règne bourgeois, le champ de l’art a glissé dans l’ignorance de ce qui l’environne et le détermine. C’est là un des effets du refermement autoréférentiel du champ : moins d’incitation à regarder au dehors. Pourtant il y a pire : car, malgré tout, oui, les artistes, bien forcés par les crises, ont fini par se saisir des objets du social-historique. Mais d’une manière où, cette fois, éclate l’ignorance de ce que le dehors fait au-dedans, des effets qu’entraîne pour le champ le fait d’être plongé dans un monde capitaliste qui détermine largement les conditions de la reproduction matérielle et symbolique dans le champ. De sorte que l’anticonformisme dont vous parlez, celui d’un champ qui confond désormais autonomie et méconnaissance du dehors, se retrouve de fait indexé sur la direction hégémonique. (...)

    Un exemple-type, même : la manière dont la question pourtant éminemment politique du « Monde vivant » est traitée. Faire parler la nature pour la rendre sensible, c’est normalement une démarche dictée par la menace qui pèse sur elle. Mais d’où vient cette menace, sinon du capitalisme en ses structures, ses institutions et ses mécanismes ? Or les propositions artistiques sur le Monde vivant s’appliquent à faire surgir du vivant invisible mais jamais l’invisible des structures capitalistes — qui détruisent l’invisible du vivant. Une cécité effarante frappe nombre d’artistes-auteures quand ils ou elles s’aventurent dans un hors-champ qu’ils réduisent à la nature exclusivement — lors même que c’est le hors-champ social historique, capitaliste, qui massacre ce hors-champ naturel. Les bons sentiments ne suffisent pas, et il n’est pas exclu que cela demande un certain effort de sauver les vies invisibles. S’émerveiller de la vie des poulpes avec Vinciane Despret ou de l’ancêtre replié dans l’éponge avec laquelle Baptiste Morizot prend sa douche8 est sans doute un heureux réveil de nos sensibilités, mais c’est un peu léger contre le démantèlement pur et simple de l’ONF ou les creusements de nouveaux pipelines de Total. En l’absence d’une problématisation formelle minimale de ce que fait effectivement le capitalisme fossile, on finit par rendre à Total et ses amis un grand service : on fait circuler de bien belles émotions concernant les morses — pendant que les causes de leur extermination, jamais dégagées, continuent d’opérer.

    #littérature #politique #bourgeoisie_culturelle

  • Une géohistoire populaire de Nantes Christophe Batardy
    https://metropolitiques.eu/Une-geohistoire-populaire-de-Nantes.html

    Un livre retraçant l’histoire populaire de Nantes explore des lieux et des édifices autres que ceux généralement retenus dans les ouvrages d’histoire locale. Au fil des pages, le regard décentré dessine une géohistoire populaire de Nantes, mise ici en relief par la cartographie de Christophe Batardy.
    Recensé : Alain Croix, Thierry Guidet, Gwenaël Guillaume et Didier Guyvarc’h, Histoire populaire de Nantes, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, 480 p.

    Comme le rappellent les auteurs en introduction, rares sont les travaux d’historiens qui tentent d’écrire une histoire populaire. Howard Zinn en 1999 ouvre la voie avec son ouvrage, Une histoire populaire des États-Unis, suivi en France par Michelle Zancarini-Fournel et plus récemment encore Gérard Noiriel. L’Histoire populaire de Nantes constitue la première tentative d’écriture d’une histoire locale du populaire, du « silence du grand nombre » pour reprendre une formule d’Arlette Farge

    Les auteurs proposent ainsi de faire « sortir le peuple de la nuit des temps » (titre du premier chapitre). Ils considèrent néanmoins qu’il ne s’agit pas pour autant d’une contre-histoire de Nantes mais plutôt d’« une autre manière d’interroger l’histoire », refusant toute démarche « populiste » qui ferait du peuple « un acteur idéal de l’histoire ». Dans l’ouvrage, celui-ci est d’ailleurs considéré de manière différente selon les périodes. Jusqu’au XIXe siècle il s’agit de la population dont le sort dépend d’acteurs sociaux qui constituent une élite politique et économique. À partir du XIXe siècle, c’est une définition plus politique qui est retenue, celle du Nantais Ange Guépin – témoin et acteur des journées révolutionnaires de juillet 1830 – qui considère qu’il y a « désormais un peuple en France, mais plus de populace ». La Révolution française est passée par là avec l’apprentissage de la politique. Le peuple tente d’être acteur de son Histoire.

    L’ouvrage est découpé en vingt-quatre chapitres, auxquels s’ajoutent une annexe chronologique (« Le temps du peuple ») et deux chapitres de conclusion dont l’un, « L’atelier de l’historien », décrit utilement la démarche des auteurs, dans un souci de transparence – même si on pourra regretter la quasi-absence d’appareil bibliographique, qui rend difficile l’accès aux travaux mobilisés. Comment les auteurs sont-ils parvenus à rendre compte des différentes incarnations du peuple à chaque période ? Et que produit cette histoire par le bas en matière de découpage chronologique et de regard porté sur le patrimoine local ? Ce sont ces deux questionnements qui ont guidé la lecture de l’ouvrage.

    Avant le XIXe siècle : le peuple et les élites
    À la Renaissance sont mises en place une administration municipale et une gestion des archives qui rend possible pour la première fois un comptage des « pauvres », c’est-à-dire ceux qui n’ont pas de biens et peuvent à tout moment tomber dans la mendicité. Si au milieu du XIVe siècle, 5 à 8 % des 20 000 habitants sont mendiants, ceux susceptibles de rejoindre cette classe représentent la moitié de la population. Parallèlement, la charité dépend de moins en moins de l’Église et de plus en plus de la bourgeoisie, qui s’est arrogé la gestion municipale, souhaitant éviter les troubles engendrés par cette pauvreté sans pour autant faire participer le peuple à la vie locale. Les auteurs récusent à ce propos les affirmations des historiens nantais Olivier Pétré-Grenouilleau et Guy Saupin, selon lesquelles le vote pour les maires et échevins en 1598 aurait produit une ouverture politique par l’intégration des habitants (p. 61).

    L’ouvrage ne comporte pas de carte, qui aurait permis au lecteur de situer le quartier du Marchix, ou la rue de la Casserie (première rue mentionnée p. 54) et le quartier Saint-Léonard (p. 60), seul quartier pauvre situé dans l’enceinte de Nantes au XVIIe siècle, les autres quartiers populaires étant alors situés dans les faubourgs (Saint-Nicolas, Saint-Jacques). Dès le XVIIIe siècle se dessine une géographie ouvrière avec ses milliers d’ouvriers habitant les mêmes quartiers, préfigurant déjà les concentrations de la révolution industrielle. Les indienneurs (ouvriers fabricants les « indiennes », ces étoffes peintes ou imprimées) résident dans les îles de la Loire et dans les faubourgs du sud (Pirmil et Saint-Jacques), alors que les tisserands habitent dans le quartier du Marchix et de Saint-Clément, et les travailleurs des chantiers près de la rue de la Fosse.

    Un comptage des occurrences des toponymes permet de proposer une cartographie (figure 1) des lieux et des édifices qui participent de cette histoire populaire. Pour la période précédant le XIXe siècle, le Sanitat, dédié aux contagieux et l’Hôtel Dieu qui accueille les indigents sont ainsi les lieux les plus cités dans l’ouvrage. A contrario, il n’est question du château des Ducs de Bretagne qu’à cinq reprises. Cette histoire populaire fait ainsi émerger de nouveaux lieux, différents de ceux qui sont aujourd’hui les plus connus, en proposant de les inclure dans le patrimoine local. Une nouvelle géographie patrimoniale se dessine.


    Figure 1. Occurrences des lieux cités dans Histoire populaire de Nantes
    Cartographie : Christophe Batardy – CNRS-ESO Nantes. D’après A. Croix, T. Guidet, G. Guillaume et D. Guyvarc’h, Histoire populaire de Nantes, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017.

    La chronologie propose également un autre regard. La date de 1532 est mise en exergue non pas tant parce qu’elle correspond, pour l’histoire de la monarchie et la mémoire régionale, à la date du rattachement de la Bretagne au royaume de France et à l’entrée de François 1er dans la ville, mais parce que la ville de Nantes connaît alors la « pire famine » de son histoire (p. 49).

    La question de l’autre, de l’étranger, de celui qui est considéré comme extérieur à la ville par la majorité des habitants même s’il y réside, est ici questionnée. En 1572 pour la Saint Barthélémy, il n’y a déjà plus de protestants dans la ville, raison pour laquelle il n’y a pas de massacre à Nantes. En revanche en 1622, 700 personnes sont capturées lors des affrontements entre troupes royales et armée protestante et sont entassées au Sanitat, puis massacrées (p. 81). En 1636 et 1637 des émeutiers s’en prennent à des Portugais qu’ils accusent d’être des juifs convertis.

    Les auteurs reviennent aussi sur les mythes qui entourent certaines personnalités de l’histoire nantaise. C’est le cas de Petitpierre, célèbre indienneur, dont l’histoire ne retient habituellement que les indiennes sortant de sa manufacture, et dont les auteurs soulignent son rôle dans l’exlpoitation économique des classes populaires locales (p. 113). De la même façon Gérard Mellier – maire de Nantes de 1720 à 1729 – n’est pas selon eux le grand maire vanté dans l’histoire de Nantes. Bon nombre de ses interventions témoignent de son rejet des classes populaires considérées comme dangereuses, au point d’envisager l’expulsion des vagabonds vers Terre-Neuve.

    XIXe et XXe siècle : le peuple et la politique
    Les auteurs soulignent que le XIXe siècle est aussi sans pitié pour les pauvres, le vol d’un mouchoir pouvant donner lieu à une condamnation à trois mois de prison en 1835. Le bureau de bienfaisance de la ville secourt ainsi jusqu’à 20 000 indigents aux alentours des années 1846-1849, soit le quart de la population nantaise (p. 204). Les inégalités sociales sont telles qu’un ouvrier d’une conserverie ne peut pas s’acheter une boîte de sardines avec le salaire d’une journée. La différence avec l’Ancien Régime est que l’on ne meurt plus de faim. Au XIXe siècle, le choléra sévit aussi de manière récurrente en raison de la mauvaise qualité de l’eau distribuée et de la pollution de l’Erdre, utilisée comme dépotoir. Mais les inégalités sont fortes entre classes sociales : si la mortalité infantile est de 9 % en centre-ville, elle atteint 50 % rue des Olivettes ou rue des Fumiers (actuel rue Marmontel) aux alentours de 1830. Au même moment, près de 600 prostituées logent dans une trentaine de rues, dont la rue d’Ancin, celle des Trois-Matelots et la rue des Marins.

    À partir du XIXe siècle, la ville s’étend avec la révolution industrielle. En 1908, les communes de Chantenay et de Doulon sont annexées à Nantes, qui gagne alors 30 000 habitants, dont deux tiers d’ouvriers. Même si ces deux quartiers populaires sont les lieux le plus souvent cités dans l’ouvrage (figure 1), les auteurs n’évoquent pas les conséquences politiques de ces annexions. Nantes, en effet, à la différence de la plupart des grandes villes françaises, ne verra pas l’apparition d’une « banlieue rouge », bastion du communisme municipal, qu’auraient pu former Chantenay et Doulon si elles étaient restées indépendantes.

    Selon les auteurs, il n’existe pas vraiment de ségrégation spatiale en centre-ville au XIXe siècle. Aucune rue n’y est exclusivement bourgeoise en raison d’une mixité verticale, à l’instar du Temple du Goût dans le quartier du Bouffay (p. 215). . . . . .

    La suite : https://metropolitiques.eu/Une-geohistoire-populaire-de-Nantes.html

    #Nantes #Histoires #Géographie #histoire_populaire #peuple #bourgeoisie #exploitation #classes_sociales

    • Réforme des Chambres régionales des comptes : « La fin d’un contre-pouvoir réel à celui des élus » Benjamin Peyrel
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      Inutile de se mentir  : le sujet est aussi technique qu’il est important. Appelée de ses vœux par l’ensemble des acteurs concernés depuis plusieurs années, la réforme a donc été longue à être élaborée. Son objet  ? Modifier en profondeur le fonctionnement de l’ensemble des juridictions financières du pays  : la Cour des comptes, bien sûr, mais aussi l’ensemble des Chambres régionales des comptes. Soit les institutions qui, au niveau national et local, ont pour mission de s’assurer du bon emploi de l’argent public par l’État et les collectivités, puis d’en rendre compte au public.

      Pays de la Loire et des jugements prononcés par ses magistrats. C’était le cas, pour ne citer que quelques exemples récents, à propos du transfert du CHU de Nantes, de la gestion de l’École des Beaux-Arts et de la condamnation de son trésorier ou encore des rapports entre la ville de Nantes et les Machines de l’île.


      Dans une interview aux Échos, le 15 septembre, Pierre Moscovici se félicitait d’une réforme «  historique  », dont l’objectif serait de «  se concentrer sur les fautes graves, avec de vraies sanctions à la clé, plutôt que des contrôles tatillons sans suite effective  ». Un point de vue loin d’être partagé au sein des juridictions qu’il contrôle. D’Acteurs publics à Mediapart (auquel Pierre Moscovici a répondu dans un plaidoyer pour la réforme), plusieurs articles de presse se sont récemment fait l’écho des craintes qu’inspire le projet gouvernemental aux magistrats financiers. Leurs principales craintes  : la «  disparition du juge des finances publiques locales dans les territoires  » et «  l’affaiblissement programmé  » des CRC, comme l’expliquait le Syndicat des juridictions financières (SJF), dans un communiqué publié le 14 septembre.
      Représentant du SJF dans les Pays de la Loire, Louis-Damien Fruchaud explique à Mediacités les risques que, selon lui, une telle réforme fait peser sur la justice financière au niveau local.
      . . . . . . .
      L’intégralité de l’article avec les liens : https://www.mediacites.fr/interview/nantes/2021/09/30/reforme-des-chambres-regionales-des-comptes-la-fin-dun-contre-pouvoir-ree

  • Pleurnicher le Vivant par Frédéric Lordon, 29 septembre 2021
    https://blog.mondediplo.net/pleurnicher-le-vivant

    Rechercher dans la page : « capital » — Expression non trouvée.

    Pourtant avec capital on avait mot compte triple : capital, capitalistes, capitalisme. On fait des recherches dans l’article de tête de Nicolas Truong qui introduit une grande série d’été dans Le Monde : « Les penseurs du vivant ». Pas une occurrence. Enfin si, il faut être honnête, une : « Nous vivons un bouleversement capital ». Si la situation terrestre n’était pas si tragique, ce serait presque drôle.

    Des penseurs concernés

    Nous apprenons en tout cas qu’il y a maintenant des « penseurs du vivant ». Jusqu’à présent c’étaient plus ou moins des biologistes ou des zoologistes. « Penser le vivant », ça doit être davantage. Mais quoi exactement ? Essentiellement : être concerné. Penser le vivant c’est ajouter à la compétence biologique (ou ornithologique, ou entomologique, ou philosophique) le fait d’être concerné. Car Le-Vivant ne va pas bien, il est même gravement en danger, on en pleurerait de concernement. Et puis ? Et puis c’est tout. Dame, c’est déjà pas mal. Avec un si beau concernement, on peut faire des festivals des idées tout l’été, aller à Beaubourg, ou bien sur France Culture, pour être une Grande conscience.

    « Grande conscience » est un segment parfaitement identifié de la division du travail culturel. Il faut avoir une vue altière, l’inquiétude des enjeux essentiels, parler au nom des entités maximales (le Vivant, la Terre, bientôt le Cosmos), sonner des alarmes, et ne rien déranger. Alors on est reçu partout à bras ouverts — puisque c’est pour rire. En tout cas pour ceux qui contrôlent la définition du sérieux : les capitalistes. Le « sérieux », c’est quand on commence à s’en prendre à leurs intérêts. Autrement, c’est pour rire. Ce que les capitalistes trouvent formidable avec la bourgeoisie culturelle, c’est qu’elle prend systématiquement le « pour rire » pour du sérieux — et ignore le sérieux. Dans ces conditions on peut tolérer, encourager même les Grandes consciences (« elles nous secouent, elles nous éclairent ») — et personne ne pourra contester l’intimité du capitalisme et du pluralisme démocratique. À la Fondation Cartier, par exemple, on peut faire une exposition « Nous les arbres », d’abord parce qu’il y a des arbres dans le jardin, ensuite parce que, les arbres, c’est important. Quand il y a trop de CO2. Bolsonaro dévaste l’Amazonie. Bolsonaro est un personnage vraiment hideux. Qui peut aimer Bolsonaro ? À peu près personne. En tout cas pas la Fondation Cartier, ni les commissaires de l’exposition « Nous les arbres », ni les visiteurs. Qui repartiront en ayant compris qu’il y avait de l’arbre en eux et, du coup, se sentiront plus solidaires...

    #bourgeoisie-culturelle

    • Lordon dit ne traiter que du latourisme politique et pas du latourisme théorique. C’est comme si la crise écologique servait de prétexte à l’anticapitalisme sans en modifier grand chose d’autre qu’une gamme d’exemples sur la destructivigté de celui-ci ? Une occasion de revenir sur #Bruno_Latour et ce qu’il serait possible (ou pas) de faire avec son travail avec les auteures de Nous en sommes pas seuls.

      @N_n_s_p_s

      https://twitter.com/N_n_s_p_s/status/1384126546043031565

      1. Du dernier Latour, nous retenons avant tout ceci : la nouvelle lutte des classes géo-sociales n’a plus rien à voir avec le capitalisme et l’extraction de survaleur ; la notion de camp n’a plus de sens ; et la révolution doit être abandonnée pour la métamorphose. Voir p. 149 :

      2. « Plus seulement une histoire de la lutte des classes, mais une histoire des nouvelles ‘classes géosociales’. Le devenir non-humain des humains déplace l’injustice : ce n’est plus la ‘plus-value’ qui est accaparée, mais les capacités de genèse, la plus-value de subsistance ».

      3. Voilà une analyse qui brouille plus les cartes qu’elle ne les rebat habilement ! Une analyse faisant comme si nous étions devons une alternative : ou bien l’analyse marxiste, ou bien l’analyse écologique/terrestre.

      4. Soit vous restez bloqué dans le combat éculé autour de « l’infrastructure économique », depuis laquelle se repéraient les anciennes injustices et s’identifiait le sujet révolutionnaire par le passé ; soit vous changez totalement de paradigme, pour aller vers le « terrestre »

      5. Là où le premier pôle, « révolutionnaire », combattait la capture de la valeur économique, engendrée par les ouvriers, contre le camp du Capital, le second, « métamorphique », s’occuperait de la capture de la valeur écologique, l’habitabilité engendrée par les formes de vie

      @BrunoLatourAIME, la lutte contre l’extraction de survaleur est-elle une histoire du passé ? Comme on peut le penser avec Moore, le capitalisme ne consiste-t-il pas, justement, à capter les capacités de genèse des vivants pour fabriquer de la survaleur (et des inégalités) ?

      7. La conséquence est la suivante : Latour ne nous indique plus précisément qui est l’agent de cette capture, ni dans quel but elle se réalise… (si ce n’est les « Extracteurs »… mais qu’au final nous serions tous… il n’y a plus de camps politiques on vous dit !).

      8. Là où Latour fait jouer écologie contre #marxisme (lutte pour l’habitabilité contre lutte anticapitaliste), le capitalisme continue en réalité d’être l’opérateur de la « capture des capacités de genèse », étendue au non-humain, donc une catégorie plus que jamais pertinente

      9. Il ne faut justement pas sortir le capitalisme de l’analyse comme agent politique du ravage planétaire, mais écologiser notre analyse du capitalisme en intégrant une multiplicité d’autres agents, autres qu’humains – CO2, atmosphère, forêts, microfaunes, rivières…

      10. Il s’agit moins de rejeter Latour que de voir que ses formulations se « dé-brouillent » dès lors que l’on dit que le capitalisme est ce système de domination qui capte les capacités de genèse des formes de vie pour fabriquer ses plus-values, capacités humaines et non-humaines

      11… capturées selon différentes modalités : le salariat = l’exploitation de la force de travail ; et hors du marché, par l’appropriation d’un travail extra-économique, gratuit ou quasi, non-reconnu comme tel : travail domestique, écologique, animal et métabolique, cf. Moor Barua

      #travail #mise_au_travail_du_vivant #vivant

    • A propos de cette critique publié sur @lundimatin, j’en cite un passage :

      C’est pourquoi nous divergeons aussi sur les remèdes à apporter à la destruction du vivant. Si l’on en reste au niveau du slogan, plutôt que de « Raviver les braises du vivant, il semblerait plus opportun de « Déboulonner la Mégamachine ».

      Alors que les penseurs du vivant nous enjoignent à agir sur les relations au vivant pour infléchir la direction catastrophique dans laquelle nous emporte la Mégamachine, ce serait en réalité le mouvement inverse qu’il faut envisager : en finir avec la Mégamachine afin de retrouver des relations au vivant qui permettent aux humains et aux non-humains de coexister, ouvrant la voie à des cosmologies débarrassées des paradigme de la modernité avec ses grands partages.

      Ainsi que la note 18 :

      [18] « Déboulonner la Mégamachine » était le titre d’une conférence donnée à Toulouse le 22 octobre 2021 par Aurélien Berlan et Fabian Scheidler, ce dernier étant l’auteur d’un livre qui reprend les concepts de Mumford : « Pour en finir avec la Mégamachine », 2020 (traduit par le Aurélien Berlan).

      La conférence évoquée (en deux parties) :

      https://www.youtube.com/watch?v=IhtxhWTrluQ

      https://www.youtube.com/watch?v=XdmgkmbXsTc

  • Eric Zemmour : après la bourgeoisie start-up, la bourgeoisie fasciste

    Dans une émission face à Laurent Ruquier et Léa Salamé, Eric Zemmour s’est promis de réunir la bourgeoisie de droite CSP+ et les classes populaires de droite, recette qui fit ses preuves au siècle dernier et qui, si elle réussit, permet effectivement à l’extrême droite de parvenir au pouvoir.
    Pourtant, à en croire la jeune garde militante de la “Génération Z”, le mouvement né en faveur de sa candidature, s’il réussit bien à attirer les premiers, les seconds en sont fortement absents.

    En effet, Zemmour, qui semble être particulièrement obsédé par les prénoms, ne paraît être entouré que par des Stanislas d’école de commerce et des Jean-Eude de Sciences Po. Et pour cause.

    La pensée d’Eric Zemmour, celle du “très grand intellectuel de la droite française” est largement connue et a l’avantage, malgré son immense complexité, de pouvoir être résumée assez correctement et sans trahir l’esprit génial de son auteur, en deux ou trois phrases. 

    Tentative : la France est chrétienne et blanche par essence. Les musulmans et autres étrangers violents et fanatisés veulent, et réussiront, à remplacer les vrais Français si nous n’agissons pas. Il faudrait alors, comme il le disait à un journaliste italien, les déporter (“par avion ou par bateau”, précisait-il), ou à minima stopper toute immigration, etc. Tout a été dit sur ces positions et chez Frustration, nous pensons que rien ne sert d’ajouter du bruit au bruit et de participer au petit jeu qui consiste à s’effaroucher chaque fois qu’un éditiorialiste droitard et un intellectuel bourgeois de seconde zone lève le doigt, les laissant ainsi polariser le conflit autours de leurs thématiques. Toutefois, Eric Zemmour est désormais un quasi-candidat à la présidence de la République. Un point mort de son discours, et probablement de son programme à venir, attire alors notre attention : quelle est la pensée sociale d’Eric Zemmour ?
    Quelles sont ses positions sur l’économie, c’est-à-dire sur ce qui détermine une grande partie de nos vies ? On ne sait généralement rien, ou si peu, de sa “pensée” sur le sujet. Elle existe pourtant, et spoiler… ce n’est pas bien glorieux. 
    Eric Zemmour combat l’oligarchie mondialisée mais (étrange), celle-ci semble beaucoup l’apprécier
    La suite et les liens de cet extrait d’article : https://www.frustrationmagazine.fr/zemmour-bourgeoisie

    #racisme #france #zemmour #extrême_droite #en_vedette #islamophobie #sexisme #histoire #médias ( #eric_zemmour #extrême-droite #culture_du_viol #xénophobie #bourgeoisie qui se croit #haute_bourgeoisie #oligarchi
    #école_de_commerce #sciences_po #sciences_popo

  • Jean Paul Belmondo, élu président du Syndicat français des acteurs CGT en 1963 par Claude Liscia
    https://maitron.fr/spip.php?article16181

    Né le 9 avril 1933 à Neuilly-sur-Seine (Seine, Hauts-de-Seine), mort le 6 septembre 2021 ; comédien ; président du syndicat français des acteurs (CGT).

    Fils du sculpteur Paul Belmondo, Jean-Paul Belmondo fut scolarisé à l’École alsacienne, une des meilleures écoles privées de Paris, dont il fut renvoyé pour indiscipline. Il réussit le concours d’entrée au Conservatoire national d’art dramatique dont il suivit les cours jusqu’en 1956.

    Encore étudiant, il fut découvert par Henri Aisner, à la recherche d’un jeune comédien qui ne parût pas issu de milieux bourgeois, pour un film commandé par la CGT. Les Copains du dimanche fut ainsi tourné en 1956, au lendemain de l’invasion de la Hongrie par les chars soviétiques et du rapport Khrouchtchev dénonçant les crimes de Staline. Confrontée à une forte baisse de ses adhérents, la CGT voulait que ce film constitue une propagande en faveur des comités d’entreprise, encore peu développés dix ans après leur création. Jean-Paul Belmondo incarna un ouvrier métallurgiste de dix-huit ans, ayant perdu son père à la guerre, travaillant 55 heures par semaine et habitant avec sa mère en banlieue ; son seul luxe : une guitare. Entraîné par un camarade dans la création d’un aéroclub ouvrier, le personnage se range du côté d’une jeunesse ouvrière honnête, laborieuse, solidaire, opposé à une jeunesse dorée, oisive et immorale. Le film décrit le double piège de division syndicale et de récupération patronale pour conclure en exaltant la force de l’union des syndicats et des générations.

    Le film ne fut pas projeté en salles, car le syndicat des producteurs fit pression sur celui des distributeurs pour empêcher sa diffusion ; irrités par son plaidoyer en faveur de l’ouverture vers les autres syndicats, certains militants de la CGT n’en furent pas mécontents. Cependant le réalisateur Marcel Carné vit le film, y remarqua le comédien et le fit tourner dans Les Tricheurs, film sur la jeunesse dorée sorti en 1958. Rapidement, Jean-Paul Belmondo devint l’acteur fétiche des jeunes réalisateurs de la Nouvelle Vague en train d’émerger et qui devait marquer fortement l’histoire du cinéma français. En 1960, avec A bout de souffle de Jean-Luc Godard, il acquit une célébrité durable.

    Comptant sur cette aura de modernité pour servir sa cause, le Syndicat français des acteurs (SFA) l’élut le 5 novembre 1963 à sa présidence pour remplacer Michel Etcheverry, qui assuma désormais avec Michel Piccoli la vice-présidence. Le syndicat espérait renouveler l’aventure menée en 1957 avec Gérard Philipe* qui, sollicité presque par hasard, s’était beaucoup investi dans ce rôle, son prestige rejaillissant sur la lutte syndicale. Or, quatre ans après le décès prématuré de Gérard Philipe, il s’adressait à celui-là même dont le tempérament et le style marquaient une rupture avec l’acteur culte de l’après-guerre. En effet, critiques aux Cahiers du cinéma dans les années cinquante, les réalisateurs de la Nouvelle Vague avaient été les seules voix discordantes, acerbes même, à l’égard de Gérard Philipe, de son jeu, du mythe qu’il devenait ; en utilisant Jean-Paul Belmondo pour incarner un héros voyou et désinvolte, beau gosse sans pathétisme, ils imposaient un style d’acteur différent. Les deux comédiens divergeaient également sur le plan politique. Engagé dans le combat pour la paix, Gérard Philipe avait été un compagnon de route du Parti communiste jusqu’à l’entrée des chars russes dans Budapest. Jean-Paul Belmondo se défiait du communisme et accepta, mais non sans réticence la présidence du SFA, affilié à la CGT. Néanmoins, à l’occasion de sa ré-élection en septembre 1965, il confia : « Si nous faisons tous partie de la CGT, c’est parce que c’est le seul syndicat qui nous soutienne. »

    Il se révéla peu disponible. Aussi Robert Sandrey, le délégué général, le tenait-il scrupuleusement au courant de la vie interne et externe du SFA, et lui soumettait-il lettres et documents à signer, insistant pour que le comédien ne soit présent qu’en cas de nécessité extrême - et n’y réussissant pas toujours. Malgré tout, dans ces limites-là, Jean-Paul Belmondo se plia au jeu, défendant publiquement le syndicat, le mentionnant dans ses interviews. Ainsi s’exprimait-il en décembre 1964 dans La Vie ouvrière, l’hebdomadaire de la CGT : « C’est un syndicat comme les autres. Je sais que vous allez penser aux vedettes, aux gros cachets... Nous sommes quoi, une dizaine peut-être ? N’en parlons pas, car là il ne s’agit plus à proprement parler de notre métier d’acteur. Nous sommes traités à ce niveau non pas comme des comédiens, mais comme des marques de pâte dentifrice. Ce n’est pas ça le spectacle. Le spectacle, ce sont les quelque vingt mille comédiens, acteurs de cinéma, de théâtre, de télé, qui travaillent quand on veut bien leur en donner l’occasion et dont beaucoup ont bien du mal à vivre de leur métier, ce métier qu’ils ont choisi et qu’ils aiment. Et ceux-là, je vous assure, ils ont besoin d’être syndiqués et de se battre pour la vie. J’ai des tas d’amis qui travaillent trois mois par an et moins parfois. Mais il faut manger pendant douze mois. Les sources d’emploi, voilà le problème. » Car, en ces années, le souci majeur du syndicat était l’exploitation des comédiens par la télévision, qui n’était pas encore astreinte à la législation du travail en vigueur dans le cinéma et le théâtre ; aussi, des pourparlers furent-ils engagés pour assurer aux acteurs un paiement en cas de rediffusion. Le déclin du théâtre, concurrencé par le cinéma et la télévision, constitua une autre préoccupation du syndicat qui, pour y remédier, apporta son soutien au Comité de sauvegarde du théâtre.

    En 1965, Jean-Paul Belmondo fut reconduit à la présidence du SFA tout en demeurant très sollicité par le cinéma et par son propre vedettariat. Son absentéisme chronique finit par générer une certaine amertume. En particulier, il fut critiqué - sur la forme plus que sur le fond, lui précisa Robert Sandrey - à la suite d’un entretien avec Michel Cournot dans Le Nouvel Observateur, où il se montrait caustique à l’égard du Conservatoire d’art dramatique. Le syndicat lui demandant un rectificatif, il refusa ; peu après il annonçait sa démission, rendue officielle en septembre 1966 : « La profession dans la période de trouble si grave qu’elle traverse, disait-il, avait besoin d’un président plus actif, et surtout plus présent. » Dès lors il poursuivit une carrrière de premier plan.

    #CGT #Syndicalisme #Jean_Paul_Belmondo #école_alsacienne #luttes

    • Pendant qu’on y est

      L’école du gotha - Enquête sur l’Alsacienne par Lucas Bretonnier, Editions du Seuil
      https://www.seuil.com/ouvrage/l-ecole-du-gotha-lucas-bretonnier/9782021451139

      Salamé ? Présente. Starck ? Présent. Pinault, Seydoux, Badinter, Goldman ? Présents ! Faire l’appel des anciens élèves de l’École alsacienne, c’est passer en revue des milliers de patronymes illustres dans tous les domaines : politique, affaires, médias, édition ou encore cinéma.

      Si une grande majorité des Français n’en a jamais entendu parler, à Saint-Germain-des-Prés, tout le monde connaît cette école qui plaît aux intellos chics notamment pour sa pédagogie progressiste et humaniste.

      L’École de la rue d’Assas a su de longue date cultiver les exigences de l’époque : épanouissement de l’élève, rapport horizontal à l’autorité, valorisation des pratiques artistiques, etc. Mais cet établissement de rêve n’est pas pour tous. L’Alsacienne déjà ultra sélective est victime de son succès.

      Difficile, voire impossible d’y faire entrer son enfant si l’on n’a ni les codes ni un solide carnet d’adresses. Comment est-on passé d’une école d’avant-garde à la forteresse de l’entre-soi d’une élite éclairée ?

      Dans cet ouvrage, on croise des protestants alsaciens, des rejetons de ministres, d’acteurs, ou d’écrivains, des parents qui réseautent aux goûters d’anniversaires, Gabriel Attal et Juan Branco en frères ennemis…

      À partir d’une centaine d’entretiens, la première grande enquête sur l’École alsacienne décrypte les mécanismes d’un autre séparatisme scolaire et social qui ne dit pas son nom.

      Lucas Bretonnier est journaliste indépendant. L’École du gotha est son premier livre.

      #école_alsacienne #gotha #haute_bourgeoisie #bourgeoisie (qui s’y croit) #politique #france #inégalités #domination

  • Bernard-Henri Levy arrêté alors qu’il tentait de s’enterrer vivant au Panthéon
    https://www.legorafi.fr/2021/08/26/bernard-henri-levy-arrete-alors-quil-tentait-de-senterrer-vivant-au-pantheo

    Le philosophe Bernard-Henri Levy est actuellement en garde-à-vue après avoir été arrêté en train de s’enterrer vivant au Panthéon

    Au commissariat du Vème arrondissement, c’est l’effervescence, la star des plateaux télé, le polémiste de Saint-Germain-des-Prés est dans une de leurs cellules. Yoann, policier de 35 ans, n’en revient toujours pas de la scène surréaliste à laquelle il a assisté : “On nous a signalé une entrée par effraction dans le Panthéon. On nous a dit que l’individu était ‘Un type mal coiffé avec une chemise blanche qui ne cache que son nombril’. On a tout de suite pensé à un patient en psychiatrie. Et non, c’était BHL !”

    L’agent, encore sous le choc, continue son récit : “Quand on est entrés, il nous a fixé, sans sourciller. Il était en sueur, en train de soulever la tombe de Victor Hugo avec une pelle. Il avait déjà un pied dedans ! Il criait ‘Maudit soit le pays qui ne m’a pas encore inhumé ! Je suis le plus grand intellectuel que le monde n’a jamais connu !’ Franchement j’ai vu des trucs glauques dans ma carrière, mais jamais comme ça” continue-t-il, nerveux, frottant ses mains moites.

    Selon Yoann, dans sa cellule, le philosophe n’a réclamé qu’une seule chose : “Pas un livre, un carnet ou un stylo… Non, il a demandé un miroir ! Pour des raisons de sécurité, on l’a placé hors de sa cellule, mais devant sa porte. Et depuis 24 heures, il s’admire et déclame des trucs incompréhensibles”. En tendant l’oreille, au bout d’un couloir, on a pu entendre BHL hurler : “Je suis meilleur que Rousseau, Zola, Simone Veil et Malraux réunis ! Vive moi ! Je t’aime Bernard !”

    #bhl #Panthéon #bernard-henri-levy #grand_homme haute #bourgeoisie de #Paris

  • #belgique #confinement : La Défense ouvre une enquête sur une Covid-party avec stripteaseuse à la caserne de Tielen, à Anvers
    https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_la-defense-ouvre-une-enquete-sur-une-covid-party-avec-stripteaseuse-a-la

    Le ministère de la Défense a décidé d’ouvrir une enquête pour faire la lumière sur une Covid-party à la caserne de Tielen (province d’Anvers), à laquelle une stripteaseuse était présente, d’après des informations du quotidien Het Laatste Nieuws et la chaîne de télé flamande VTM, confirmées à Belga. Des vidéos de la fête montrent une vingtaine de membres du 3e Bataillon Parachutiste, une unité d’élite de la Défense, ne respectant manifestement pas les mesures sanitaires d’application à l’époque.

    D’après VTM NIEUWS, les images datent du mois de mai et montrent un soldat attaché à une chaise et fouetté avec un martinet par une stripteaseuse, qui aurait été introduite clandestinement dans la caserne sécurisée.

    Stripteaseuse présente
    Les images montrent également un autre militaire posant nu pour une photo de groupe avec des collègues. Beaucoup dansent et boivent de l’alcool alors qu’à l’époque les rassemblements de ce genre étaient encore strictement interdits à cause du coronavirus. Aucune distanciation sociale n’est respectée, et l’absence de masques buccaux est notable.

    Le ministère de la Défense prend les faits très au sérieux et a décidé d’ouvrir une enquête, notamment sur le fait qu’une stripteaseuse a pu entrer de la sorte dans le bâtiment. Des mesures de sécurité très strictes entourent normalement la caserne de Tielen.

    « Cela n’a aucunement sa place au sein de la Défense et nuit à l’image de tous les militaires qui font un travail exemplaire à l’étranger et en Belgique, notamment pour soutenir la nation pendant la pandémie ou après les inondations », a déploré la ministre de la Défense Ludivine Dedonder (PS). « Des enquêtes sont en cours au sein de la Défense pour trois violations possibles : la sécurité des quartiers militaires, les règles de distanciation sociale dans le cadre de la pandémie de coronavirus et la consommation d’alcool sur le lieu de travail. Si les enquêtes confirment ces violations, la Défense prendra les sanctions disciplinaires et/ou juridiques appropriées. »

    #confinement (pas pour certains) #privilégiés #covid-19 pas de #cas_contact #coronavirus #santé #covid #sars-cov-2 #pandémie #prostitution #orgie #partouze #bourgeoisie

  • L’écran de la Samaritaine Didier Rykner
    https://www.latribunedelart.com/l-ecran-de-la-samaritaine

    La Tribune de l’Art avait combattu le projet de la Samaritaine, mené par LVMH avec le soutien de la Ville de Paris et du Ministère de la Culture ( https://www.latribunedelart.com/paris-samaritaine ). Détruire un ensemble de maisons anciennes des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles au cœur de Paris nous faisait revenir au vandalisme des années 1960. La décision du Conseil d’État validant cette opération en désavouant le tribunal administratif était un parfait scandale. Mais on ne lutte pas contre Bernard Arnault, surtout quand celui-ci bénéficie de tous les soutiens politiques, de la droite à la gauche, en passant par une grande partie de la presse ( https://www.latribunedelart.com/la-samaritaine-lvmh-et-la-presse-l-eternel-retour ).


    8. La vue panoramique sur écran depuis la Samaritaine : un écran filmant la Seine... - Photo : Didier Rykner

    Le bâtiment construit par SANAA, nous avons déjà eu l’occasion de l’écrire ( https://www.latribunedelart.com/samaritaine-la-victoire-de-bernard-arnault-la-defaite-du-patrimoine ), est d’une grande médiocrité, et en rupture totale avec son environnement. Contrairement au procès d’intention que nous font certains, nous ne sommes évidemment pas hostile à l’architecture contemporaine. Il y a d’excellents architectes comme Tadao Andō ou Rudy Ricciotti [1], des architectes capables du meilleur comme du pire, tel Jean Nouvel. Mais il y a aussi des architectes que nous préférons ne pas qualifier, comme Yves Lion, Dominique Perrault ou encore Bruno Gaudin.

    Il paraît que SANAA est un grand cabinet d’architectes. Le Louvre Lens n’en témoigne pas vraiment, même si l’on peut trouver pire. L’édifice qu’ils viennent de construire pour la Samaritaine n’est pas seulement médiocre extérieurement (ill. 1), il l’est aussi à l’intérieur (ill. 2 et 3). Ce n’est même pas médiocre, ce n’est rien. On pourrait se trouver dans un centre commercial de Tokyo ou de Dubaï, il n’y aurait aucune différence. Voilà pourquoi on a détruit un îlot du Paris historique !


    Intérieur du nouveau bâtiment de la Samaritaine - Architectes : SANAA - Photo : Didier Rykner

    La restauration elle-même des bâtiments Art nouveau et Art déco de la Samaritaine nous semble plutôt réussie (ill. 4 à 6), même s’il faudrait sans doute l’étudier plus soigneusement. L’architecte qui en est le maître d’œuvre est un de nos bons architectes en chef, Jean-François Lagneau. Nous l’avons contacté sur un point qui nous inquiétait : à l’origine, le bâtiment d’Henri Sauvage était construit avec des dalles Saint-Gobain en verre qui faisaient office de planchers à tous les niveaux, et qui donnaient à l’ensemble une luminosité et une transparence exceptionnelles. Cet aspect a complètement disparu et Jean-François Lagneau nous a indiqué que ce n’était pas faute d’avoir cherché une solution qui puisse correspondre aux normes de sécurité actuelles. Or, il semble impossible d’installer des planchers en verre qui ne s’écrouleraient pas au moindre incendie. Dont acte, même si cela est bien triste.


    Un des grands halls de la Samaritaine après restauration - Photo : Didier Rykner

    Nous nous interrogions sur deux autres points. D’abord, les lettres formant le mot « Samaritaine », qui datent de l’origine et font partie de la façade classée, n’ont pas encore été remplacées (ill. 6 et 7) et l’on pouvait s’inquiéter d’y voir à la place apparaître les mots « Cheval Blanc », nom de la chaîne d’hôtels de luxe qui s’y est installée. C’était en tout cas le souhait de LVMH. Heureusement, la DRAC Île-de-France nous a confirmé qu’elle tient à sa repose après restauration. Espérons que ce sera le cas.


    Façade de la Samaritaine d’Henri Sauvage (état actuel, sans le nom sur la façade) - Photo : Didier Rykner

    Le second point concernait des appliques Art déco de part et d’autre de la porte d’entrée du magasin, qui n’existent plus. Il s’avère qu’il s’agissait en réalité d’œuvres récentes, datant des années 1980, d’un designer américain, Hilton McConnico. Celui-ci avait créé deux pastiches fort réussis, qui furent vendus chez Lucien à Paris https://www.lucienparis.com/lot/6580/1482598?offset=170& le 14 juin 2010. Si l’on peut regretter que ces deux éléments, qui d’une certaine façon faisaient partie de l’histoire du bâtiment, aient été supprimés, on ne peut décemment crier au scandale. La commande était celle de l’ancien restaurant Toupary qui occupait la terrasse au dernier étage.


    8. La vue panoramique depuis la Samaritaine : un écran filmant la Seine... - Photo : Didier Rykner

    Rappelons qu’Anne Hidalgo célébrait ce projet https://twitter.com/Anne_Hidalgo/status/2518629569 en soulignant qu’il « servait au mieux la mixité sociale » sous prétexte qu’une crèche de 80 places devait être créée. Pas de chance : pour l’instant, aucune place de crèche n’existe encore ( https://www.leparisien.fr/paris-75/paris-la-creche-de-la-samaritaine-n-a-aucun-enfant-pour-ses-80-berceaux-0 ), et cela n’en prend pas le chemin, le Ier arrondissement n’étant pas « une zone prioritaire » . Mieux encore : désormais, seuls les clients de l’hôtel de luxe qui s’est installé derrière la façade sur la Seine pourront jouir de la vue magnifique qui autrefois était accessible à tous. Les simples parisiens pourront monter à l’étage sous les toits et s’asseoir pour regarder un écran géant montrant en direct la Seine qu’ils ne peuvent plus admirer de la terrasse (ill. 8). La mixité sociale, pour Anne Hidalgo, c’est mettre ses administrés devant un écran filmant la Seine. Peut-on imaginer un tel mépris ?

    #anne_hidalgo #bourgeoisie #mépris #Grand_Paris #urbanisme #métropole #métropolisation #france #logement #hidalgo #ps #ville_de_paris #mixité_sociale #ségrégation #luxe #vandalisme #Art_nouveau #Art_déco #ecrans

  • L’État moderne, de l’époque féodale à nos jours Un appareil d’oppression au service des classes dominantes, que les travailleurs devront renverser (texte intégral) | Conférence de Lutte Ouvrière (mai 2021)

    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/letat-moderne-de-lepoque-feodale-nos-jours-un-appareil-doppression-a

    SOMMAIRE

    – Au #Moyen_Âge, naissance et essor de la #bourgeoisie
    – Les débuts du #capitalisme et le rôle de la #monarchie_absolue
    – Les révolutions bourgeoises en Angleterre et en France
    – Le rôle des États dans la #révolution_industrielle
    – L’échec des révolutions de #1848
    – Aux États-Unis et au Japon, les dernières révolutions industrielles
    – Le mouvement ouvrier et sa politique face à la bourgeoisie et ses États
    – À la fin du 19e siècle, le capitalisme atteint le stade impérialiste de son développement
    – Les États bourgeois, instruments de la dictature du #grand_capital #état_bourgeois
    – Quand les dirigeants réformistes deviennent ministres
    – Le #nazisme en Allemagne
    – Le #New_Deal aux États-Unis
    – Le #Front_populaire en France
    – L’hégémonie américaine après 1945
    – En France, une politique étatiste au service des grands groupes capitalistes
    – À partir des années 1970, le capitalisme en #crise #crise_économique
    – La #financiarisation de l’économie et ses conséquences
    – L’#État sous la coupe des financiers #état_moderne
    – Un État totalement au service de la bourgeoisie
    – Exproprier la bourgeoisie #révolution_sociale

  • Il y a 240 ans était démembré Pierre-Nicolas Chenaux, tragique héros fribourgeois Serge Kurschat, historien

    Le 4 mai 1781, Pierre-Nicolas Chenaux, qui avait levé une armée de 2500 hommes contre le patriciat fribourgeois, est assassiné, puis démembré. L’historien Serge Kurschat rappelle 240 ans plus tard son parcours, et l’influence qu’il a eue jusqu’au Brésil 

    C’est à La Tour-de-Trême, le 26 février 1740, que Pierre-Nicolas Chenaux voit le jour, lors d’un hiver particulièrement rigoureux. D’abord aide-major au régiment de Gruyères, il se tourne ensuite vers le commerce. Il se lance dans différents projets économiques : importation de céréales, fabrication et commerce de fromage, tannerie, investissements fonciers, prospection minière, commerce des mulets. Confronté à des circonstances très défavorables et victime de contextes climatiques, épidémiques ou familiaux néfastes, Chenaux, éternel malchanceux, voit ses affaires péricliter.

    La période 1773-1776 en Gruyère reste dans l’histoire cantonale comme celle de « l’affaire de bois de Sautaux ». Il s’agit d’un mouvement qui s’oppose aux autorités locales sur l’attribution de coupes de bois. Alors que le patriciat gère, selon ses propres intérêts, l’attribution de ces coupes, Chenaux et certains de ses concitoyens se refusent à obtempérer aux autorités patriciennes, en procédant sans leur autorisation à un prélèvement dans des coupes de bois. L’objet du litige est situé dans la forêt de Sautaux, au sud-ouest de Bulle.

    C’est ainsi que s’instaure une lutte entre le pouvoir central d’une oligarchie conquérante, qui souhaite se moderniser et devenir plus efficace, et les paysans d’un ancien monde composé d’anciennes règles, dénommées généralement « us et coutumes », auxquelles ils sont fortement attachés et qui font office de lois fondamentales nécessaires à leur survie.

    Une armée de 2500 hommes
    En 1781, Pierre-Nicolas Chenaux, à la tête d’une armée de 2500 hommes, fait une tentative infructueuse de soulèvement contre le patriciat de Fribourg afin de démocratiser la gestion urbaine, appelé « soulèvement Chenaux ». La ville, effrayée, appelle à l’aide Berne, qui envoie illico sa garde, avec cavalerie et artillerie. Les assiégeants sont mis en déroute et Chenaux se retrouve seul. Dans la nuit du 4 mai 1781, il est assassiné d’un coup de baïonnette par François-Nicolas-Henri Rossier, appâté par la promesse d’une importante récompense. Les autorités décident la décapitation et le démembrement du cadavre de Chenaux le 5 mai 1781, en application du Code pénal de l’époque, la terrible Lex Carolina, selon laquelle la mort n’éteint pas l’action judiciaire.

    La tête de Chenaux est exposée durant deux années et demie sur le toit de la tour de la porte de Romont

    Le bourreau Hans-Wilhelm Heini, ivre, doit s’y prendre à plusieurs reprises afin de partager en quatre le corps de Chenaux après en avoir séparé la tête à grands coups de hache. La tête de Chenaux est exposée durant deux années et demie sur le toit de la tour de la porte de Romont, le visage tourné vers son lieu natal. Le soir de l’exécution, les membres de la Chambre secrète (la structure qui est au pouvoir et que les gens ne connaissent pas forcément) dansent avec leurs dames devant cette tête ensanglantée. Toutefois, le peuple voue un culte à Pierre-Nicolas Chenaux et des litanies sont chantées en son honneur. Tant et si bien que l’évêque de Lausanne se voit contraint d’intervenir par un mandement qu’il publie en novembre 1781 afin de faire cesser ces processions et condamner cet hommage pieux rendu à Chenaux.

    Réhabilitation solennelle en 1848
    A la suite de l’insurrection de mai 1781, des troubles éclatent dans la ville de Fribourg, qui accentuent d’une part la lutte de la bourgeoisie commune de Fribourg contre le patriciat, d’autre part les dissensions à l’intérieur de la classe dirigeante. Chenaux voit son influence perdurer parmi les insurgés en fuite en France à travers la création du Club helvétique¹ et l’affaire des Gardes suisses des tuileries² le 10 août 1792. Ces insurgés se montrent plus agressifs que les révolutionnaires français par leur pugnacité, et plus particulièrement un caporal Joseph Chenaux, entré au service de France depuis 1784, tenant le rôle d’informateur lors du massacre des officiers patriciens.

    Il faut attendre juillet 1848 pour que le Grand Conseil réhabilite solennellement Chenaux, et, le 24 septembre 1933, un monument est enfin érigé face au château à Bulle. En 1942, la ville de Fribourg, baptise « Nicolas Chenaux » une rue du quartier Beauregard. Le 25 mars 1980 est donné, en première mondiale à Utrecht en Hollande, un opéra en trois actes intitulé Chenaux d’un compositeur et chef d’orchestre allemand, Richard Müller-Lampertz. La même année, un film et une pièce de théâtre célèbrent le bicentenaire de sa mort.

    Symbole de la liberté
    Aujourd’hui, sa postérité réside en grande partie au Brésil où de nombreux Fribourgeois ont émigré au début du XIXe siècle pour fonder la communauté de Nova Friburgo. La nouveauté de l’interprétation débarrassée des vieux poncifs et la diversité des sources nous incitent à nuancer l’importance du portrait psychologique de Chenaux, que l’historiographie a décrit, jusqu’à nos jours, comme un raté.

    A l’instar de nombreux entrepreneurs traversant la crise actuelle du covid, Chenaux, malgré les échecs, a toujours fait preuve d’audace en se réinventant et en réexaminant ses activités en vue de les diversifier. Ne dit-on pas qu’un esprit a besoin de son contraire pour savoir qui il est et ainsi prendre la pleine mesure de sa force de vie ? Aussi, en dépit de ses fautes et d’une vie menée tambour battant, Pierre-Nicolas Chenaux fut en quelque sorte un coryphée digne d’une tragédie grecque symbolisant encore, dans la mémoire populaire, la « liberté » faisant face à toutes les oppressions.

    1) Le Club helvétique de Paris appelé aussi Club des patriotes suisses, né à l’initiative des rescapés fribourgeois de 1781, s’est réuni à Paris du 6 juin 1790 au 3 août 1791. Ennemi juré du pouvoir aristo-patricien en place à Fribourg, ce club révolutionnaire s’est donné pour mission d’instituer un régime démocratique.

    2) Le 10 août 1792, Louis XVI et sa famille sont aux Tuileries, entourés par leurs gardes suisses. Le peuple va envahir le lieu. Avec le massacre d’un régiment de gardes suisses dans le palais des Tuileries, ce jour met brutalement fin à 13 siècles de monarchie en France.

    Source : https://www.letemps.ch/opinions/y-240-ans-etait-demembre-pierrenicolas-chenaux-tragique-heros-fribourgeois

    #patriciat #bourgeoisie #Fribourg #classe_dirigeante #Brésil #Nova_Friburgo #Club_helvétique_de_Paris #Lex_Carolina #Révolution_Française

  • Philosophie de (comptoir) ... pardon, « terrasses »

    Terrassés ou terrassiers
    https://lundi.am/Terrasses-ou-terrassiers

    « Nous ne faisons que fermer sur nous-mêmes d’embarrassantes parenthèses » dit Raoul Vaneigem en parlant de ces doigts à la terrasse d’un café qui « repoussent la monnaie du pourboire et les doigts du garçon qui l’agrippent, tandis que les visages des deux hommes en présence, comme soucieux du masque de l’infamie consentie, revêt les marques de la plus parfaite indifférence » (Traité de savoir-vivre à l’usage des jeunes générations, Raoul Vaneigem)

    Si la terrasse se développe si bien dans la société du spectacle c’est qu’on se retrouve pris dans une zone tampon entre le monde actif de la rue et l’arrêt, entre le mouvement vers la vie et l’inertie de la mort. Entre l’authenticité du vécu et l’aliénation de la marchandise, maintenu vivant dans la tension du spectacle.

    • Je le trouve sacrément faible, ce texte. Grosso modo il y a les terrasses où les gens s’assoient pour boire un café en contemplant la rue, et ce sont des terrasses bourgeoises. Et il y a les terrasses où l’auteur s’assoit pour boire un café en contemplant la rue, et ce ne sont pas des terrasses bourgeoises.

      Et sinon, oui, le fait que le bar-pas-bobo, habituellement, c’est un lieu de sociabilité presque exclusivement masculin, c’est un problème. (Les bars associatifs et militants, c’est sans doute très bien, mais c’est pas les plus fréquents parmi les bars-pas-bourgeois, et je ne sais pas si c’est là que les éboueurs vont se faire expliquer l’anticolonialisme par le propriétaire.)

    • en exergue d’un article bien plus écrit et plus craignoss, lui aussi avec #terrasses... et rafale :

      NOUS SOMMES FAROUCHEMENT RELIGIEUX et, dans la mesure où notre existence est la condamnation de tout ce qui est reconnu aujourd’hui, une exigence intérieure veut que nous soyons également impérieux.
      Ce que nous entreprenons est une guerre.

      Georges Bataille, « La conjuration sacrée », Acéphale n°1_

      https://lundi.am/La-guerre-veritable

      On nous propose des variations sur l’#ennui (cet "opium du peuple", G.B., 1935) aujourd’hui au coeur de la "convivialité" forcée (tout aura été renversé par la contre révolution), cet ennui accepté qui fait les esclaves (vieille image aristocratique), bourgeois inclus.

      #bourgeoisie #avant-garde #littérature

    • C’est que je devais avoir en souvenir ces bars étudiants ou prolos (les deux catégories se mélangeaient encore à l’époque) dans les années 70. Le Bar de l’U à Besançon était un de ces repaires où on tapait la discut’ des heures durant à tenter de refaire le monde sans problème de coexistence entre genres ... Bref, depuis le temps a passé et je n’ai plus trop retrouvé cette ambiance. C’est peut-être aussi pour ça que je ne fréquente plus les bars.

    • Assis à une terrasse de café on regarde le monde depuis sa table, et le monde nous regarde. De nombreuses règles tacites régissent cette pratique sociale et trahissent la théâtralité du pouvoir.

      J’observe les passants et les passants m’observent. D’un seul regard j’appelle le serveur. Une seule posture et un seul objet (la table) me sépare du SDF assis sur une chaise devant le métro. Pas de trêve entre agresseurs et agressés. La trivialité quotidienne de l’humiliation dénonce l’organisation économique où la production et la consommation de l’offense s’équilibrent.

  • Bruxelles : Le monde de l’art bourgeois expulse des sans papiers, pour faire la fête

    Le collectif “Not Standing for Hypocrito-Bourgeoise culture” s’est attaqué avec une action de collage aux panneaux publicitaires et au centre du festival du Kunstenfestivaldesarts, hébergé à l’Institut Pacheco cette année, pour dénoncer l’hypocrisie qui règne dans le milieu artistique et politique de cette ville.

    L’Institut Pacheco est vide depuis 4 années et différents groupes de personnes sans papiers et sans abris ont essayé de l’occuper. Ces tentatives se sont à chaque fois soldées par un refus du bourgmestre de la Ville de Bruxelles Philippe Close (PS) et du CPAS de Bruxelles. “Sur leur site, le Kunstenfestivaldesarts annonce fièrement son partenariat avec le CPAS de Bruxelles pour occuper l’Institut Pacheco et en faire leur centre du festival ce mois de mai, et souligne l’accueil chaleureux que leur public de culturo-bourgeois y recevra. Pour les personnes sans papiers qui ont voulu s’y héberger en février l’accueil était malheureusement moins chaleureux. 38 personnes ont été arrêtées violemment lors de l’expulsion par la police envoyée par Philippe Close” , peut-on lire dans le communiqué du collectif.

    Pour le collectif, il est illogique d’autoriser l’organisation d’événements alors que les sans-papiers et logements ont fait une demande d’occupation en bonne et due forme qui a été refusée. “Devant un propriétaire (même public) avec lequel négocier une occupation temporaire, certains publics sont plus sexy que d’autres,”  conclut le collectif.

    V.Lh. – Photo : Collectif Not Standing for Hypocrito-Bourgeoise culture

    source : https://bx1.be/categories/news/un-collectif-denonce-loccupation-de-pacheco-par-le-kunstenfestival/?theme=classic

    #bourgeoisie #bruxelles #PS #capitalisme #politique #inégalités #domination #violence #migrations#sans-papiers #réfugiés #asile 

  • Des élues genevois dénoncés pour violation des règles sanitaires

    Un policier a rédigé une note de service pour signaler le comportement inadéquat de plusieurs élus à Genève en marge de la prestation de serment de la nouvelle conseillère d’Etat Fabienne Fischer. Parmi eux, le procureur général Olivier Jornot et des conseillers d’Etat.

    La verrée pour l’intronisation de la conseillère d’Etat genevoise Fabienne Fischer a fait l’objet d’une note de service de la police, a appris la RTS. Un agent présent sur place a signalé à sa hiérarchie des comportements inadéquats de la part d’élus en lien avec le respect des normes sanitaires. La direction de la police genevoise est saisie.

    Les faits remontent à jeudi soir. Fabienne Fischer prête serment devant le Grand Conseil en présence des représentants des trois pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. S’en suit une agape. Le Bureau du Grand Conseil genevois a autorisé la nouvelle édile à partager un verre avec sa famille et des invités pour célébrer son intronisation.

    Vers 18h00, une dizaine de convives se réunissent autour de la magistrate à la buvette du Parlement, située temporairement dans l’enceinte de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Ils sont rejoints, dans un autre endroit de la pièce, par plusieurs députés et conseillers d’Etat, ainsi que par le procureur général Olivier Jornot, présent pour l’occasion. Au total, une trentaine de femmes et d’hommes se retrouvent dans la salle au même moment.

    L’exemplarité en jeu
    Un policier, témoin de la scène, estime que les règles sanitaires, comme la distanciation sociale, le port du masque, voire le nombre de personnes présentes dans un même lieu fermé, ont été violées. Il rédige donc une note de service à sa hiérarchie. Il y dénonce des comportements inappropriés de la part des participants.

    L’affaire est sensible, car elle concerne des élus de haut vol. L’enjeu, c’est évidemment l’exemplarité. Comment des représentants de l’autorité, qui exigent de la population le respect des normes sanitaires, peuvent-ils s’y soustraire ? C’est ce qui a conduit l’agent de police à avertir ses supérieurs. L’enquête dira si ces infractions dénoncées sont avérées ou non.
    . . . . . .
    la suite : https://www.rts.ch/info/regions/geneve/12176513-des-elus-genevois-denonces-pour-violation-des-regles-sanitaires.html

    #bourgeoisie #haute_bourgeoisie #priviléges #femmes #inégalités #femmes #domination #confinement #covid #passe_droit #OMM

  • A la recherche des électeurs de Guillaume Delbar à Roubaix 30 avril 2021 - mediacité

    De qui le maire de Roubaix est-il l’élu ? C’est la question posée par trois politologues lillois - Rémy Bretton-Wylk, Fabien Desage et Tristan Haute - il y a un peu plus d’une semaine, dans la revue en ligne spécialisée Métropolitiques. Une question fort attrayante pour tous les amoureux de la chose électorale. Mais qui risque d’être un peu déçus par la réponse de nos experts. Bien que riche d’enseignements, en effet, celle-ci n’est que partielle. Nous avons donc tenté d’en savoir plus en interrogeant un des auteurs.


    Guilaume Delbar. Photo Francis Verhelst/Wikipedia.
    Le pitch de départ est connu : Guillaume Delbar https://www.mediacites.fr/portrait/lille/2019/12/06/roubaix-guillaume-delbar-la-revanche-de-loutsider , maire sortant, ex-LR, passé en 2019 dans l’orbite d’Emmanuel Macron, est réélu assez confortablement au deuxième tour des municipales de juin 2020. Il s’impose face au candidat d’union d’une partie de la gauche, Karim Amrouni https://www.mediacites.fr/portrait/lille/2020/06/19/municipales-le-quitte-ou-double-du-docteur-amrouni-a-roubaix , par 56 % des voix contre 44 %. Et ce alors qu’il ne l’avait emporté que de justesse en 2014, à l’issue d’une quadrangulaire très disputée. Un succès incontestable à un petit-gros détail près : l’abstention a été massive.

    Près de 8 électeurs sur 10 ne se sont pas déplacés. Résultat, avec seulement 5776 voix - un millier de moins . . .

    La suite payante : https://www.mediacites.fr/breve/lille/2021/04/30/a-la-recherche-des-electeurs-de-guillaume-delbar-a-roubaix

    #Roubaix #politique #élections #bourgeoisie #élections

    • De qui le maire de Roubaix est-il l’élu ?

      Rémy Bretton-Wilk & Fabien Desage & Tristan Haute - 19 avril 2021

      Analysant les effets croisés de la ségrégation spatiale et de l’abstention sur les résultats électoraux, Rémy Bretton-Wilk, Fabien Desage et Tristan Haute démontrent l’existence d’une « prime au vote bourgeois » dans l’une des villes les plus pauvres de France.

      Souvent présentée comme « la ville la plus pauvre de France », Roubaix, qui avait placé Jean-Luc Mélenchon (LFI) en tête du premier tour de la dernière élection présidentielle avec 36 % des voix, est dirigée depuis 2014 par Guillaume Delbar, un maire Les Républicains (devenu « divers droite » en 2017). Élu de justesse dans une quadrangulaire en 2014 (34,8 % des suffrages exprimés au second tour) malgré l’importance du score LFI en 2017, le maire est parvenu à conserver assez facilement la mairie en 2020 avec 56 % des suffrages exprimés au second tour.

      La déconnexion entre les résultats aux élections nationales et locales à Roubaix ne peut se comprendre qu’en tenant compte d’un différentiel d’abstention important qui, loin de concerner la ville de manière homogène, touche plus fortement ses quartiers populaires. La victoire aisée de la droite lors de la dernière élection municipale s’explique par une mobilisation électorale à la fois faible et socialement différenciée, ainsi que par une impressionnante capacité de la droite à mobiliser la bourgeoisie locale, là où la gauche, divisée, ne parvient plus à attirer les classes populaires pourtant largement majoritaires. Pour le dire autrement, l’abstention massive dans les quartiers populaires donne une véritable « prime » aux votes dans les quartiers bourgeois, dont le poids relatif dans l’élection se trouve accru.

      Une abstention massive et socialement située

      Le cas roubaisien a été peu étudié en sociologie électorale (Etchebarne 1983 ; Lefebvre 2002). À l’image de ce qui a été observé au niveau national (Jaffré 2020), la ville connaît une hausse continue de l’abstention depuis les années 1990, aggravée par le niveau du chômage, la précarité socio-économique et la faiblesse des diplômes au sein de la population locale. Ainsi, l’abstention était majoritaire dès 2001, atteignant 55 % au premier tour des élections municipales contre 33 % au niveau national : dix points de plus qu’en 1995 et vingt de plus qu’en 1989 (Lefebvre 2002). Depuis, elle n’a cessé d’augmenter : 60 % en 2008, 62 % en 2014 et 78 % en 2020, en pleine crise sanitaire. Plus de trois Roubaisiens inscrits sur quatre ne se sont donc pas rendus aux urnes.

      Les maires de Roubaix sont de plus en plus « mal élus », au sens où leur élection repose sur un nombre de suffrages de plus en plus faible. En 2001 et en 2008, René Vandierendonck, tête de liste de la gauche socialiste mais ancien dauphin du maire UDF-CDS André Diligent (1983-1994), était élu avec respectivement 8 787 et 8 907 voix. En 2014, Guillaume Delbar n’était élu qu’avec 6 949 voix. En 2020, sa victoire ne reposait plus que sur 5 776 voix dans une ville qui compte près de 100 000 habitants.

      Pour les candidats, l’enjeu est dès lors moins de conquérir des « parts de marché électoral » que de s’assurer le soutien des groupes les plus mobilisés, dont le poids relatif dans l’élection se trouve accru. Or, à Roubaix comme ailleurs, l’abstention est socialement située (Haute 2020 ; Braconnier et al. 2017). Bien que majoritaire en 2020, l’abstention dans les bureaux « bourgeois » reste quinze points inférieure à celle observée dans le reste de la ville (voir Tableau 1). À cette abstention plus faible s’ajoute également une meilleure inscription sur les listes électorales dans ces quartiers privilégiés (Braconnier et al. 2017).

      Les inégalités sociales de mobilisation électorale tendent ainsi à renforcer le poids électoral des classes supérieures : si les quatre bureaux « bourgeois » ne rassemblent que 6 % de la population roubaisienne âgée de 15 ans et plus, ils agrègent déjà 8 % des inscrits sur les listes électorales et entre 12 % et 13 % des votants (respectivement au 1er et 2e tour des municipales de 2020). Leur poids relatif dans le résultat final s’en trouve très sensiblement accru.

      Ce constat n’est pas spécifique aux scrutins locaux mais, lors de la présidentielle, le poids de ces bureaux était réduit du fait de la plus forte participation dans l’ensemble de la ville : les quatre bureaux bourgeois rassemblent moins de 10 % des votants au premier tour de l’élection présidentielle de 2017, contre plus de 12 % en 2020.

      Tableau 1. Résultats des élections municipales de 2020 et présidentielles de 2017 selon le type de bureau de vote (en % des inscrits)


      Source : Ministère de l’Intérieur, 2020 ; traitements par les auteurs.

      Roubaix, pauvre mais aussi ségréguée _

      À l’image de ce qui a été réalisé dans d’autres villes (Rivière 2014 ; Batardy et al. 2017), détailler l’analyse des données électorales et sociodémographiques, à l’échelle des quarante-six bureaux de vote de la ville permet de mieux saisir l’hétérogénéité sociale et électorale d’un espace urbain.

      En l’occurrence, à Roubaix, l’effet de la différenciation sociale des comportements électoraux est amplifié par la ségrégation de la ville. Véritable « ville usine » du textile (Pétillon 2006), Roubaix est victime de la désindustrialisation dès les années 1960 et connaît vite un chômage de masse. Loin d’enrayer la situation, les politiques urbaines tendent plutôt à accroître les inégalités au sein de la ville (Vulbeau 2018 ; Collectif Degeyter 2017). À Roubaix cohabitent en effet les fractions les plus précaires des classes populaires et une bourgeoisie, au passé industriel mais reconvertie dans d’autres secteurs d’activité (grande distribution, banques…), à laquelle se sont greffés des cadres du privé travaillant dans la métropole lilloise et séduits par un immobilier bon marché. Ces classes supérieures se concentrent dans une toute petite partie de la ville, aux abords du parc Barbieux notamment (figures 2 à 5), à quelques kilomètres mais à « mille lieues » des logements sociaux et de l’habitat privé modeste qui caractérisent les anciens quartiers industriels de la ville, comme Le Pile, Le Cul de Four, l’Alma, ou l’Épeule (figure 1).

      Figure 1. Les quartiers de Roubaix


      Source : Ville de Roubaix, 2017, typologie couleur par les auteurs.

      Figure 2. Avenue Jean-Jaurès (qui longe le parc Barbieux) - Photo : F. Desage.

      Figure 3. Avenue Gustave-Delory (est du parc Barbieux) - Photo : F. Desage.

      Figure 4. Boulevard du Général-de-Gaulle (nord du parc Barbieux) - Photo : F. Desage.

      Figure 5. Rue Colbert (nord-ouest du parc Barbieux) - Photo : F. Desage

      Cette ségrégation socio-spatiale se traduit dans les caractéristiques des bureaux de vote. Le tableau 2 révèle ainsi le profil social très spécifique de quatre d’entre eux, que nous qualifions ici de « bourgeois », marqués par une surreprésentation très nette des diplômés du supérieur, des retraités, des cadres et des propriétaires et par une sous-représentation des immigrés.

      Tableau 2. Caractéristiques sociales des bureaux de vote roubaisiens - Source : INSEE, 2016 ; traitement par les auteurs

      Une bourgeoisie acquise à la droite, une gauche qui ne mobilise pas les quartiers populaires

      En pourcentage des inscrits le résultat de la liste de Guillaume Delbar dans les quatre bureaux bourgeois est près de trois fois supérieur à son résultat dans le reste de la ville, au premier comme au second tour. Les bureaux bourgeois, qui ne pèsent que pour 6 % de la population roubaisienne, fournissent ainsi respectivement 20 % et 18 % des voix de la liste de Guillaume Delbar au premier et au second tour.

      Si elles ne font pas basculer l’élection, les 1 045 voix recueillies par G. Delbar au second tour dans les quatre bureaux bourgeois (contre 4 731 dans les 42 autres bureaux de la ville) lui assurent une victoire confortable : sans ces quatre bureaux, l’écart entre le maire élu et son challenger divers gauche, Karim Hamrouni, aurait été de moins de 500 voix.

      Deux anamorphoses permettent de préciser l’analyse. Dans la première (figure 6), l’aire des bureaux de vote est proportionnelle à la population résidente. Dans la seconde (figure 7), l’aire des bureaux de vote est proportionnelle au nombre de voix obtenues par la liste Delbar au 2e tour des municipales de 2020. La comparaison des cartes fait apparaître deux types de déformations. D’un côté, les quartiers de Barbieux et du Nouveau Roubaix occupent une surface bien plus importante dans la figure 7 que dans la figure 6 : quelques quartiers concentrent les votes en faveur de la liste Delbar. D’un autre côté, les quartiers populaires (l’Alma, le Cul de Four, le Pile, l’Épeule) voient leur surface nettement réduite dans la figure 7 par rapport à la figure 6, preuve que, même si la population roubaisienne s’y concentre, ces quartiers contribuent très marginalement à la victoire électorale de la droite.

      Figure 6. Anamorphose : l’aire des bureaux de vote est proportionnelle à leur population résidentielle


      Source : INSEE, 2016 ; Ville de Roubaix, 2017 ; traitement : R. Bretton-Wilk, Qgis 3.14.

      Figure 7. Anamorphose : l’aire des bureaux de vote est proportionnelle au résultat qu’y obtient la liste Delbar au second tour (2020)


      Source : Ministère de l’Intérieur, 2020 ; traitement : Rémy Bretton-Wilk, Qgis 3.14.

      Cette surmobilisation de la bourgeoisie locale en faveur de la droite et la faible capacité de la gauche à mobiliser son camp, en particulier les nouvelles classes populaires racisées et discriminées, ne sont pas nouvelles (Masclet 2003 ; Hadj Belgacem 2016). D’une part, si Roubaix fut un « bastion socialiste », longtemps détenu par la SFIO, la majorité socialiste n’était obtenue, dès 1945, qu’à la faveur d’une alliance de « troisième force » avec les chrétiens-démocrates (Lefebvre 2004). Après la victoire de la droite en 1983, le retour à gauche de la ville, en 2001, s’explique d’ailleurs en grande partie par le ralliement à la gauche du maire centriste sortant, René Vandierendonck (Lefebvre 2002 ; Desage 2006). D’autre part, la géographie électorale roubaisienne apparaît très stable sur le temps long, à l’instar des lignes de clivage socio-spatiales au sein de la ville : les bureaux autour du parc Barbieux étaient déjà, en 1983, les plus favorables au nouveau maire UDF-CDS (Etchebarne 1983) et constituaient, en 2001, la principale zone de force électorale d’une droite divisée et passée dans l’opposition (Lefebvre 2002).

      Ce double effet de polarisation sociale et de surmobilisation de la bourgeoisie locale prend toutefois un aspect décisif, dès lors que la gauche, fortement divisée, ne parvient plus à mobiliser l’électorat populaire. Le faible intérêt pour la politique institutionnelle et la pratique intermittente du vote n’empêchent pas l’existence d’autres formes de mobilisations sociales (Collectif Rosa Bonheur 2019) et politiques (Talpin 2020), mais celles-ci se traduisent difficilement en dynamiques partisanes et électorales.

      Prime au vote bourgeois et orientations de l’action publique

      Si le maire de Roubaix n’est pas le maire des seuls quatre quartiers bourgeois – dont les suffrages n’auraient pas suffi à le faire élire – il leur est néanmoins électoralement redevable.

      Ce soutien électoral des quartiers privilégiés ne résume pas à lui seul l’influence des habitants les plus insérés économiquement et socialement sur la politique du maire : ils disposent d’autres ressources pour se faire entendre. Il serait toutefois naïf de penser que ce soutien électoral ne joue aucun rôle. Les recherches de Max Rousseau (2010) sur les origines des politiques de « gentrification » à Roubaix dans les années 1990 ou de Yoan Miot (2012) sur les politiques de « renouvellement urbain » pointent en effet le rôle décisif des élites économiques locales dans la promotion de politiques publiques favorables aux intérêts des propriétaires et investisseurs : leur poids se retrouve notamment dans l’adoption de mesures valorisant la « bonne image » de la ville, son patrimoine et son « attractivité ».

      Les effets électoraux de cette répartition géographique très inégalitaire de l’électorat étant attestés, il serait utile d’analyser plus en détail ses conséquences tant sur les actions engagées par les municipalités de droite que sur la marginalisation des groupes sociaux les moins audibles.

      Bibliographie *
      • Audemard, J. et Gouard, D. 2016. « Le bureau de vote : objet et terrain d’enquêtes électorales », Pôle Sud, n° 44, p. 5-19.
      • Batardy, C., Bellanger, E., Gilbert, P. et Rivière, J. 2017. « Présidentielle 2017. Les votes des grandes villes au microscope », Métropolitiques [en ligne], 9 mai 2017.
      • Braconnier, C., Coulmont, B. et Dormagen, J.-Y. 2017. « Toujours pas de chrysanthèmes pour les variables lourdes de la participation électorale. Chute de la participation et augmentation des inégalités électorales au printemps 2017 », Revue française de science politique, 2017, n° 67, p. 1023-1040.
      • Collectif Degeyter. 2017. Sociologie de Lille, Paris : La Découverte.
      • Collectif Rosa Bonheur. 2019. La Ville vue d’en bas. Travail et production de l’espace populaire, Paris : Éditions Amsterdam.
      • Desage, F. 2006. « Roubaix et la construction de l’institution communautaire : une contribution paradoxale », in M. David, B. Duriez et R. Lefebvre (dir.), Roubaix : 50 ans de transformation urbaine et de mutation sociale, Lille : Presses du Septentrion, p. 129-147.
      • Etchebarne, S. 1983. « L’urne et le xénophobe. À propos des élections municipales à Roubaix en mars 1983 », Espace, populations, sociétés, n° 2, p. 133-138.
      • Gombin, J. 2017. « spReapportion : Reapportion Data From one Geography to Another », R package, version 0.1.0.9001.
      • Hadj Belgacem, S. 2016. « Reconquérir la jeunesse des cités ? Enjeux et contradictions d’un Conseil Local des Jeunes dans une municipalité communiste », Mouvements, n° 85, p. 95-103.
      • Haute, T. 2020. « La participation électorale en temps de crise sanitaire : évolutions et persistances », Pouvoirs locaux, n° 118, p. 29-34.
      • Jaffré, J. 2020. « L’abstention aux élections municipales depuis l’après-guerre (1947-2014) », note Sciences Po/CEVIPOF, mars 2020.
      • Lefebvre, R. 2004. « Le socialisme français soluble dans l’institution municipale ? Forme partisane et emprise institutionnelle : Roubaix (1892-1983) », Revue française de science politique, vol. 54, n° 2, p. 237-260.
      • Lefebvre, R. 2002. « Roubaix. Entre recomposition politique et stabilité électorale », in B. Dolez et A. Laurent (dir.), Le Vote des villes, Paris : Presses de Sciences Po, p. 257-274.
      • Masclet, O. 2003. La Gauche et les cités : enquêtes sur un rendez-vous manqué, Paris : La Dispute.
      • Miot, Y. 2012. Face à la décroissance urbaine, l’attractivité résidentielle ? Le cas des villes de tradition industrielle de Mulhouse, Roubaix et Saint-Étienne, thèse de doctorat d’Aménagement et urbanisme, Université Lille 1.
      • Pétillon, C. 2006. La Population de Roubaix. Industrialisation, démographie et société, 1750-1880, Lille : Presses du Septentrion.
      • Rivière, J. 2014. « Les divisions sociales des métropoles françaises et leurs effets électoraux. Une comparaison des scrutins municipaux de 2008 », Métropolitiques [en ligne], 21 mars 2014.
      • Rousseau, M. 2010. « Gouverner la gentrification. Différentiel de loyer et coalitions de croissance dans la ville en déclin », Pôle Sud, n° 32, p. 59-72.
      • Talpin, J. 2020. Bâillonner les quartiers. Comment le pouvoir réprime les mobilisations populaires, Lille : Les Étaques.
      • Vulbeau, J. 2018. « La rénovation urbaine à Roubaix : une modernisation sous tension (1957-1972) », Revue du Nord, n° 424, p. 191-219.

      #vote #maires #abstention #quartiers_populaires #ségrégation #bourgeoisie #élections #Nord–Pas-de-Calais #Roubaix #cartes #sociologie #classes_populaires #droite #gauche #géographie_électoral #gentrification #renouvellement_urbain # élites #politiques_publiques #inégalités #électorat_populaire

  • De qui le maire de #Roubaix est-il l’élu ?
    https://metropolitiques.eu/De-qui-le-maire-de-Roubaix-est-il-l-elu.html

    Analysant les effets croisés de la #ségrégation spatiale et de l’abstention sur les résultats électoraux, Rémy Bretton-Wilk, Fabien Desage et Tristan Haute démontrent l’existence d’une « prime au #vote bourgeois » dans l’une des villes les plus pauvres de France. Souvent présentée comme « la ville la plus pauvre de France », Roubaix, qui avait placé Jean-Luc Mélenchon (LFI) en tête du premier tour de la dernière élection présidentielle avec 36 % des voix, est dirigée depuis 2014 par Guillaume Delbar, un maire #Terrains

    / #Hauts-de-France, #Nord–Pas-de-Calais, vote, #maires, #abstention, #quartiers_populaires, ségrégation, #bourgeoisie, (...)

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_brettondesagehaute.pdf

  • 150 ans après, l’actualité de la Commune de Paris

    Présentation du Cercle Léon Trotsky (vidéo) https://www.lutte-ouvriere.org/player/155827 / https://www.youtube.com/watch?v=uKSE_-sZrV8


    Le texte intégral de la conférence https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html

    Sommaire :

    #Marx et la Commune

    Aux origines de la Commune
    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html#
    – La révolution de #1848
    – Les transformations du second Empire
    – Le prolétariat se développe et s’organise
    – Socialistes, blanquistes, proudhoniens
    – L’#Association_internationale_des_travailleurs (#AIT)
    – De la guerre contre la Prusse à la proclamation de la République

    Du 4 septembre 1870 au 18 mars 1871  : La République bourgeoise
    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html#
    – Le gouvernement de la Défense nationale
    – La Garde nationale  : le prolétariat en armes
    – Agitation politique à Paris et en province
    – L’Assemblée des monarchistes contre Paris
    – Le Comité central de la #Garde_nationale, embryon de pouvoir ouvrier  ?

    Le #18_mars  : le pouvoir aux mains des Parisiens
    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html#
    – La Commune  : première ébauche d’un #État_ouvrier
    – Le #Comité_central se met en retrait
    – Fallait-il marcher sur Versailles  ?
    – Les élus de la Commune
    – Le rôle des #femmes dans la Commune
    – Travailleurs de tous les pays, unissons-nous  !
    #Démocratie_prolétarienne contre #démocratie_bourgeoise
    – Les répercussions de la Commune en #province
    – La première attaque des versaillais et le décret sur les otages

    L’œuvre de la Commune
    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html#
    – Des mesures pour les travailleurs et pour reprendre en main la production
    – Contre la misère  : remise des échéances, le mont-de-piété, l’assistance publique
    – Égalité et #éducation pour tous  !
    – La Banque de France et le respect de la légalité

    La #Commune_de_Paris, devenue symbole de la lutte des classes entre le #prolétariat et la #bourgeoisie
    https://www.lutte-ouvriere.org/publications/brochures/150-ans-apres-lactualite-de-la-commune-de-paris-de-1871-155999.html#
    – La #Semaine_sanglante
    – La haine de classe de la bourgeoisie
    – Le drapeau rouge des travailleurs
    – «  Que nos défaites nous apprennent à vaincre  !  » (J-B Clément)
    – Conclusion

  • Notes anthropologiques (LV)

    Georges Lapierre

    https://lavoiedujaguar.net/Notes-anthropologiques-LV

    Notes sur la pensée comme aliénation

    Au début, avec l’émergence d’un peuple dominant qui va constituer l’aristocratie sociale, la pratique du don reste importante et forme encore le fondement de la vie en commun, son esprit. Cet aspect, je dois dire, ne ressort pas de l’étude des historiens, nous le retrouvons parfois au cinéma, dans les récits de voyage ou d’exploration, nous en faisons aussi l’expérience si nous nous donnons l’occasion de nous immerger dans d’autres civilisations que la nôtre. Il faut croire que les historiens ne vont pas au cinéma, ne lisent pas des récits de voyage et ne font pas d’autres expériences de vie que celle que leur impose leur civilisation. Il me semble que l’idéologie tient une place trop envahissante chez eux et qu’ils délaissent, pour des préjugés tenaces, l’ouverture sur le réel et sa diversité que leur propose encore le monde. C’est bien sur une conception grandiose du don, le don cérémoniel d’hospitalité, que repose le prestige de la classe dominante dans notre antiquité, mais le don sous une forme moins grandiloquente et ostentatoire n’a sans doute pas disparu de la vie sociale de la population et constitue encore l’esprit des échanges que les habitants ont entre eux.

    Pourtant cette pratique va se trouver chevauchée par une pratique tout autre, celle du marchand. Nous nous trouvons dans une société partagée entre l’esprit sous son aspect subjectif reposant sur le don et l’esprit sous son aspect que je qualifierai d’objectif lié à l’intérêt de l’individu, représenté par le marchand. (...)

    #pensée #aliénation #peuple #aristocratie #marchands #Antiquité #Sparte #monnaie #Lycurgue #Corinthe #Athènes #Solon #négoce #enrichissement #subjectivité #dette #bourgeoisie

  • Contre le virus capitaliste et sa société désolante

    Nedjib Sidi Moussa

    https://lavoiedujaguar.net/Contre-le-virus-capitaliste-et-sa-societe-desolante

    Les gardiens de l’ordre capitaliste martèlent à l’unisson qu’« il y aura un avant et un après cette épidémie ». Or, rien ne garantit un futur préférable à la situation qui prévalait pour la majorité de la population laborieuse avant l’apparition du Covid-19.

    La crise multidimensionnelle dans laquelle nous ont plongés les irresponsables gouvernementaux rappelle, s’il en était encore besoin, que la bourgeoisie et son État ne se contentent pas de reprendre d’une main ce qu’ils prétendent donner de l’autre.

    « Quoi qu’il en coûte », le pouvoir cherche en effet à protéger les intérêts des patrons au détriment de la santé des exploités. « Nous sommes en guerre », certes. Sauf que le conflit ne se cantonne pas au domaine sanitaire : il est éminemment politique et social.

    Quand, avec un cynisme certain, une porte-parole salue les salariés qui vont travailler « la boule au ventre », il s’agit surtout de refuser l’exercice du droit de retrait pour ceux dont les employeurs feraient respecter les fumeuses « mesures barrières ». (...)

    #capitalisme #virus #exploitation #bourgeoisie #État #Thanatos

  • Une meute de chasseurs terrorise un cerf jusque dans une gare en bloquant les trains plusieurs heures.
    https://actu.orange.fr/france/sncf-un-cerf-traque-par-des-chasseurs-bloque-la-circulation-des-trains-m

    Selon un témoin interrogé par France 3 Hauts-de-France, les chasseurs ont poursuivi le cerf « avec leurs chiens jusque dans la gare ». La même source rapporte que les forces de l’ordre ont dû intervenir pour repousser les chasseurs, et garder les curieux à distance.

    #chasseurs
    #france_de_merde
    #terreur

  • Un pas de plus dans l’infamie - Freddy Gomez, A Contretemps, Bulletin bibliographique
    http://acontretemps.org/spip.php?article818

    On ne sait pas comment ça finira, mais on n’aura pas cessé d’alerter sur comment ça a commencé et se poursuit. Ce « ça », c’est l’infamie qu’on expérimente depuis maintenant deux grosses années [quatre en fait, ndc], une infamie qu’on ne cherche pas à adjectiver, mais que l’on ne peut que constater à chaque rassemblement et #manifestation où nous nous rendons, une infamie qui nous livre à l’infinie violence d’une #police dépourvue de toute conscience – y compris celle de ses propres intérêts –, une infamie qui, de palier en palier et d’acte en acte, ne répond qu’à un seul objectif, fixé par l’#État_policier : briser nos résistances, terroriser nos indignations, mutiler nos colères, organiser l’auto-confinement de nos désirs pluriels et convergents d’émancipation.

    Le samedi 12 décembre, jour de manifestation parisienne « autorisée », un nouveau cap fut franchi dans « la méthode », comme disent les stratèges flicards de cabinet. Il s’agissait, clairement, d’expérimenter sur une foule compacte de plusieurs milliers de personnes [1] un nouveau dispositif à l’allemande procédant par « bonds offensifs » aléatoires, véloces et répétés à l’intérieur du cortège en distribuant des horions à tour de bras et en ramassant du gardé à vue pour faire du chiffre. Tout cela à partir de critères assez basiques pour être compris par les cognes de base : quand c’est habillé de noir, c’est du black bloc ; à défaut de noir, on tape à côté. Cinquante mètres après la place du Châtelet, d’où partait, en remontant le Sébasto, la manifestation déclarée « pour la défense des #libertés », la première pénétration sauvage de flics eut lieu, de droite et de gauche par charges multiples. Premier avantage : créer des situations de panique à l’intérieur du cortège ; second avantage : le scinder, le morceler, le maintenir sous contrôle serré, multiplier les nasses en son sein, le réduire à n’être plus qu’un troupeau qui peut être abattu sur place à tout moment. La « méthode » procède d’une scélératesse inouïe. Elle est pensée pour déstabiliser, frapper de stupeur, humilier, terrifier. L’impression dominante, c’est que la rue ne nous appartient plus, qu’on défile dans une cour de prison, que le destin nous échappe. Tout ce qui fait de la manifestation un moment unique de réappropriation de l’espace nous est refusé. La fuite aussi, d’ailleurs, puisque le nassage latéral ne la permet pas.

    Le 12 décembre, à Paris, plus de 3 000 flics dopés à la haine occupèrent, rue par rue, le périmètre de la manif, chargeant constamment et sans raison un cortège déjà réduit à n’être plus qu’une foule emprisonnée et vouée à la bastonnade. Comment admettre une telle pratique ? Au nom de quel intérêt supérieur de l’État ? Pour qui nous prend-on pour nous traiter ainsi ? Au nom de quelle logique devrait-on admettre que des flics surarmés interviennent à la féroce au sein d’un cortège déjà maté du fait de leur écrasante présence pour le disloquer sous les coups. Et ce, non pour des actes commis ou en voie d’être commis, mais à partir des seules intentions que la hiérarchie policière prêterait à tel ou tel manifestant. Comment nommer cela ? Il fut un temps où aucune manifestation placée sous contrôle serré des flics ne se passait sans que résonnât ici ou là, et parfois à voix forte, le rituel slogan « Le fascisme ne passera pas ! ». On pourrait être en droit de se demander pourquoi on ne le l’entend plus, désormais. Et avancer comme explication que, pour nombre de manifestants d’aujourd’hui, la police est devenue si détestable, sa hiérarchie si sûre d’être couverte et l’État si objectivement dépendant d’elle que la Macronie, née d’un « vote utile » contre l’extrême droite, chasse désormais – et comment ! – sur son terrain. Ce qui est passé avec elle, c’est une politique de dévastation généralisée où aucun droit social, aucune garantie démocratique gagnés de vieille lutte, aucun refus de se plier à ses diktats ne sauraient être tolérés. Ce régime s’est mis de lui-même dans les pognes d’une police dirigée par des psychopathes à casquette prêts à tout pour écraser la « canaille » que nous sommes. Ce 12 décembre 2020, on aura au moins compris à quoi elle est prête, cette police. Il n’est pas sûr que sa démonstration de force brutale nous ait définitivement découragés, mais il est certain que cette date, où aucun black bloc n’a pété aucune vitrine, restera à jamais celle où cette police s’est lâchée sans complexe contre celles et ceux qui, souvent très jeunes, manifestaient un réel courage dans la constance de leurs convictions.

    Au total, il y eut 149 interpellations, 123 gardes à vue de 24 à 48 heures dont la plupart des interpellés, éradiqués du cortège comme black blocs potentiels, seront relâchés sans charge. Six d’entre eux en revanche se verront déférés en comparution immédiate devant le tribunal pour « groupements en vue de… », pour « outrage » ou pour « dissimulation de visage », chef d’inculpation qui, en situation de Korona galopant, ne manque pas d’être ubuesque. Il faut vraiment être juge et macronard pour faire preuve d’une telle sagacité.

    Vue par les #médias mainstream et le journalisme de préfecture, l’infamante gestion policière de cette manifestation fut décrite comme une parfaite réussite. À preuve : les sauvages manifestants dont elle a l’habitude de faire son spectacle avaient été privés de saccages. (...)

    #fascisation

    • Il fut un temps où le bloc bourgeois ordonna à sa police de tirer au ventre. L’Histoire avec une grande hache fourmille d’exemples de tueries en masse de ce genre. Il en fut un autre où, au sein même du bloc bourgeois, des « démocrates sincères », porteurs d’une tradition d’humanisme intransigeant, furent capables de défendre, becs et ongles, cette essentielle #liberté_de_manifester qu’à juste titre ils voyaient comme une soupape. Car ces gens-là, simplement éclairés, étaient des opposants au désordre, mais dotés de la capacité d’en discerner les causes et les effets dans leur propre camp – c’est-à-dire celui où s’épanouissaient leurs privilèges, leurs statuts et leurs rangs – quand il pouvait être menacé par des foules hostiles prêtes à tout pour laver les offenses que leur classe leur faisait subir. Souvent apparentée à la gauche, mais débordant aussi ses rivages, cette fraction du bloc bourgeois était le fruit d’une tradition historique, celle de la Révolution française, qui fut interclassiste. Jusqu’à mai 68 et la décennie agitée qui suivit la convulsion, cette fraction joua son rôle : elle défendit la liberté d’expression et de manifestation et elle veilla, tant que faire ce pouvait, à dénoncer les agissements des polices d’un Papon ou d’un Marcellin.

      On s’étonna, au vu de la très sévère répression qu’on appliqua aux Gilets jaunes, de l’absence majuscule de réaction pétitionnaire ou manifestante de cette fraction éclairée du bloc bourgeois. La raison, pourtant, en était simple. C’est qu’elle avait cessé d’être, que ces « grandes consciences » ou ces « belles âmes » avaient tout bonnement disparu, comme s’étaient considérablement réduites les zones d’influence où elle s’exerçait (...)

      #tradition_humaniste #bourgeoisie #démocrates

  • La maire de Marseille, Michèle Rubirola, annonce démissionner pour raisons de santé
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/12/15/la-maire-de-marseille-michele-rubirola-annonce-sa-demission_6063475_823448.h

    Où l’on apprend que #Rubirola n’aime pas la tambouille électorale :

    « Benoît et moi, c’est un peu le yin et le yang. Il est très politique ; moi, je n’apprécie pas la tambouille électorale. Fonctionner en binôme, déléguer, faire confiance, c’est une vision écolo de la politique. J’aimerais porter une autre façon d’être maire »

    #Marseille

    • Sa démission était annoncé mi-octobre par le même journal
      « Tu es au courant que je ne reste que trois mois ? » : à Marseille, les débuts déroutants de Michèle Rubirola
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/10/14/tu-es-au-courant-que-je-ne-reste-que-trois-mois-a-marseille-les-debuts-derou

      Elue en juin, la maire écologiste s’interrogeait encore en octobre sur son rôle et laissait alors souvent la main à son premier adjoint, #Benoît_Payan.

      Qui est Benoit Payan, le futur plus jeune maire de Marseille ?
      https://www.challenges.fr/politique/benoit-payan-l-interi-maire_742197

      Depuis juillet dernier, Benoit Payan était maire officieux de Marseille. Il pourrait être, lundi prochain, maire officiel, ce qui aura le mérite de simplifier les choses. A 42 ans, il serait le plus jeune maire de Marseille, coiffant un autre socialiste, Gaston Deferre, au poteau d’une année – ce dernier ayant été élu à 43 ans.

      Benoît Payan
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Benoît_Payan

      Désolé, cette page a été récemment supprimée (dans les dernières 24 heures)

      15 décembre 2020 à 16:49 Cédric Boissière discuter contributions a protégé Benoît Payan [Créer=Autoriser uniquement les administrateurs] (expire le 18 décembre 2020 à 16:49) (Attendons son élection)

      15 décembre 2020 à 16:49 Cédric Boissière discuter contributions a supprimé la page Benoît Payan (Ne répond pas aux critères d’admissibilité)

      15 décembre 2020 à 16:33 Wikisud82 discuter contributions a créé la page Benoît Payan (Nouvelle page : ’’’Benoît Payan’’’ est un homme politique français. Premier adjoint à la maire de Marseille Michèle Rubirola de juillet à décembre 2020, il assure ces fonctions par…) Balises : Modification par mobile Modification par le web mobile Modification sur mobile avancée

      24 juillet 2020 à 15:11 Enrevseluj discuter contributions a supprimé la page Benoît Payan (Décision communautaire)

      24 juillet 2020 à 15:01 Axelcortes13 discuter contributions a créé la page Benoît Payan (Création de la Page et de 3 sections plus d’une Infobox) Balise : Éditeur visuel

      2 février 2020 à 14:59 OT38 discuter contributions a supprimé la page Benoît Payan (Page supprimée suite à une décision communautaire)

      [je vois pas plus d’historique, ndc]

      Pas du coin, sauf brèves incursions, je suis certain qu’on entendra du "Cochon de Payan", du " Payan ! Au bagne !" et d’autres compliments idoines dans la ville un de ces quatre. Mais peut-être en existe-t-il déjà ?
      #PS

    • Municipales à Marseille : les raisons du succès de l’écologiste Michèle Rubirola , Gilles Rof (Marseille, correspondant) et Solenn de Royer, 01 août 2020, Màj le 04 août 2020
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/08/01/municipales-marseille-les-raisons-du-succes-de-l-ecologiste-michele-rubirola

      Une note de la Fondation Jean-Jaurès, que dévoile « Le Monde », met en évidence le rôle joué par une « classe moyenne et supérieure éduquée » dans la victoire du Printemps marseillais.

      Et « l’inconcevable » se produisit à Marseille. Médecin et conseillère départementale écologiste, Michèle Rubirola, âgée de 63 ans, totalement inconnue du grand public il y a six mois, a été élue maire de la deuxième ville de France, le 4 juillet, après vingt-cinq ans de règne de Jean-Claude Gaudin. Comment ce basculement historique a-t-il pu se produire et pourquoi ? Dans une épaisse note dévoilée par Le Monde, intitulée « Comment la gauche néomarseillaise a éjecté la bourgeoisie locale ? » , la Fondation Jean-Jaurès – qui s’est penchée sur les résultats des deux tours des élections municipales – donne quelques clés.

      Le think tank progressiste [et youplaboum] analyse ainsi la montée en puissance de la « gauche culturelle » dans cette commune de 870 000 habitants, dont une partie s’est renouvelée au cours des dernières années. S’ils concèdent que la #gentrification reste un phénomène « homéopathique (…) peu susceptible de faire bouger les équilibres locaux » , et qu’il serait « absurde d’attribuer aux seuls #néo-Marseillais la victoire » de Michèle Rubirola, le géographe Sylvain Manternach et l’essayiste Jean-Laurent Cassely soulignent le « rôle moteur » joué par une « classe moyenne et supérieure éduquée » dans le succès du Printemps marseillais.

      Comme à Lyon ou à Bordeaux, qui ont vu le triomphe des écologistes, un électorat « rajeuni, culturellement favorisé et mobile » a eu raison d’un électorat de notables, plus âgés et installés dans les beaux quartiers, ou alors issus de la petite bourgeoisie. Le vote pour le Printemps marseillais a été ainsi d’autant plus fort dans les quartiers qui ont vu leur population changer depuis une quinzaine d’années, notent les auteurs de la note. Les trois arrondissements qui ont connu un renouvellement de plus de 30 % de leur électorat (le 1er, le 6e et le 2e) ont tous les trois donné au Printemps marseillais des scores supérieurs à 30 % au premier tour, soit 6 points au-dessus de sa moyenne (23,44 %).

      Elan de centre-ville, militant et dégagiste

      L’arrondissement le plus renouvelé, le 1er, est celui qui offre au Printemps marseillais son meilleur score, avec une majorité absolue de 54,7 % des voix dès le premier tour, écrivent Sylvain Manternach et Jean-Laurent Cassely. A l’inverse, poursuivent-ils, dans les arrondissements d’« autochtones », « là où une plus forte part des électeurs est restée stable par rapport à la précédente élection, le score du Printemps marseillais est de 7 à 9 points en dessous de sa moyenne de premier tour ».

      L’analyse de la Fondation Jean-Jaurès relève également avec justesse [oh ben dis donc] que le Printemps marseillais a obtenu ses meilleurs scores dans les quartiers les plus centraux de la ville – un territoire clairement défini qui chevauche les 1e, 5e et 6e arrondissements. Le 1er est « peuplé d’#étudiants et d’#intellectuels_précaires » , le 5e a été gagné par le processus de gentrification et le 6e est plus bourgeois. « C’est aussi dans ces quartiers et arrondissements que réside une #classe_moyenne alternative à la petite bourgeoisie traditionnelle votant à droite », observent les auteurs de la note.

      Dans l’hypercentre, l’émergence d’une force politique homogène traduit « un vote de militants de gauche, porté par les populations diplômées et d’intellos précaires du centre-ville, proches des nombreux collectifs et associations bâtis autour de l’écologie, de la mixité sociale, de l’aménagement urbain ». Un vote qui, dans un contexte d’#abstention « historiquement élevée » – 64 % au second tour à Marseille –, voit son poids électoral prendre « une importance stratégique jamais acquise dans un scrutin jusqu’à présent ».

      L’analyse des bureaux les plus favorables au Printemps marseillais fait clairement émerger un cercle d’un ou deux kilomètres de diamètre dont l’épicentre est le quartier de #la_Plaine. Dans cette zone d’habitat dense, où prédominent les immeubles typiques en « trois fenêtres marseillais » , prisés par les nouveaux arrivants, une dizaine de bureaux ont voté à près de 80 % pour les listes de Michèle Rubirola au second tour. De cet élan de centre-ville, militant et dégagiste, la Fondation Jean-Jaurès différencie un vote d’adhésion au Printemps marseillais plus centriste, dont une partie est « Macron-compatible » .

      Rejet de l’équipe sortante

      « Un vote émanant de quartiers préservés qui subissent de plein fouet l’urbanisation et la #bétonisation de Marseille, lié à une population nouvellement arrivée qui, installée dans les quartiers de bord de mer, se confronte géographiquement et socialement à la bourgeoisie locale historique dont elle ne partage ni les valeurs ni la vision de la ville », explique la Fondation. Une bourgeoisie de néo-Marseillais « plus moderne et plus mobile » qui rêve d’une ville enfin en phase avec ses attentes dans les domaines de la propreté, du transport et du confort urbain.

      Les quartiers qui donnent de très bons scores au Printemps marseillais sont aussi ceux où s’est cristallisé le rejet de l’équipe sortante, dont Martine Vassal, la candidate Les Républicains, est l’héritière. Les arrondissements du centre-ville ont vécu très directement deux des crises majeures du dernier mandat du maire sortant, Jean-Claude Gaudin. D’une part, les effondrements de la #rue_d’Aubagne, le 5 novembre 2018, qui ont fait huit morts et ouvert une crise du logement indigne frappant directement près de 4 000 délogés – et donc beaucoup d’électeurs –, notamment en centre-ville.

      Mais aussi la « bataille de la Plaine », affaire plus locale mais à la forte capacité de mobilisation. Une violente polémique autour d’un projet de rénovation de la place Jean-Jaurès (6e), brutalement imposé par la municipalité. Le chantier, débuté en octobre 2018, est toujours en cours. Il a transformé ce lieu de vie du centre-ville alternatif en un chaos de travaux à ciel ouvert qui n’a fait qu’accentuer la colère des habitants contre l’équipe en place. Le poids de cette opération d’aménagement controversée se lit dans les résultats du premier tour. Avec un électorat moins renouvelé que celui des quartiers voisins (26,73 % de nouveaux inscrits de plus de 24 ans), la Plaine a donné au Printemps marseillais un de ses meilleurs scores (41,7 %).

      L’étude du vote dans le 3e secteur, remporté par Michèle Rubirola en personne, est sûrement celle qui apporte le plus de valeur à l’analyse de la Fondation Jean-Jaurès. On y voit le poids du Printemps marseillais dans une trame de rues en complète transformation dont la colonne vertébrale est le boulevard Chave. Cette artère jusqu’alors somnolente voit éclore, depuis quelques années, bars et restaurants nocturnes, épiceries paysannes et commerces branchés.

      Basculement géographique inédit

      Le vote pour le sénateur Bruno Gilles (ex-Les Républicains, LR), vainqueur sans discontinuer des municipales dans ce secteur depuis 1995, apparaît comme repoussé vers une ceinture périphérique, par l’avancée de ce « nouveau Marseille ». Il illustre un « Marseille d’avant » qui s’appuie plus fortement sur des réseaux traditionnels, notamment à travers les comités d’intérêt de quartier, les clubs de boulistes ou de sport. Ce territoire prend naissance au-delà du Jarret, sorte de périphérique marseillais, et des voies de la gare Saint-Charles, et reste encore à l’écart du nouvel épicentre dynamique. L’étude observe ainsi « une ligne de séparation assez nette entre le Marseille dense des immeubles anciens, qui vote à gauche, et un Marseille périphérique, pavillonnaire et des immeubles plus récents, résidences ou grands ensembles, au nord et à l’est ».

      Les auteurs observent en revanche que « l’élan réformateur du Printemps marseillais » a rencontré moins d’écho dans le sud de la ville, « où s’est installée de longue date une #bourgeoisie plus économique que culturelle », ou à l’est, « où s’épanouit une version plus périurbaine de la vie marseillaise ». Même si certaines enclaves du sud, notamment autour du port de la Pointe-Rouge, que l’étude définit comme un « micromarché immobilier très prisé des nouveaux arrivants », se sont montrées plus favorables au changement. Il s’agit d’un basculement géographique inédit du centre de gravité de la gauche marseillaise.

      A l’échelle de la ville, outre la rupture entre nord et sud, encore clairement visible à travers le vote favorable à Martine Vassal au premier tour, concentré au sud d’une ligne prolongeant le Vieux-Port, c’est une opposition entre gauche de centre-ville et droite périphérique que dessine la victoire de Michèle Rubirola. Les quartiers qui votent LR sont « pour la plupart moins denses, peu mixtes socialement et ethniquement et adoptent un modèle périurbain » qui s’appuie sur l’utilisation de la voiture.
      Reflet de cette « gauche de centre-ville », le Printemps marseillais n’a d’ailleurs pas convaincu le gros de l’électorat populaire, notamment celui des #quartiers_nord de Marseille. A l’instar des autres métropoles, dans lesquelles les listes écologistes et citoyennes ont fait campagne, le discours des candidats du Printemps marseillais s’est principalement adressé aux habitants plutôt favorisés, en tout cas culturellement, et vivant dans le centre-ville. « Les militants des listes écologistes et citoyennes n’ont pas su appréhender les attentes des quartiers excentrés à forte composante immigrée », résument les auteurs.