• Les #expulsions ont des conséquences délétères sur la vie des #enfants

    L’Observatoire des expulsions des lieux de vie informels dénonce, dans son rapport annuel, des opérations qui compromettent la #scolarité des enfants et le #suivi_médical des #femmes_enceintes, à cause de l’#errance forcée qu’elles provoquent.

    Des femmes enceintes qui ne peuvent pas bénéficier d’un suivi médical continu, des enfants brutalement retirés de l’école, des mineur·es isolé·es démuni·es et traumatisé·es : les conséquences des expulsions des personnes occupant des lieux de vie informels sont multiples et délétères.

    C’est la conclusion du cinquième rapport annuel de l’Observatoire des expulsions de lieux de vie informels (#squats, #bidonvilles et #campements, #caravanes, #voitures ou camions) publié mardi 28 novembre. Il regroupe huit associations indépendantes, parmi lesquelles le Collectif national droits de l’homme Romeurope, la Fondation Abbé Pierre ou encore Médecins du monde.

    Elles ont recensé, entre le 1er novembre 2022 et le 31 octobre 2023, date du début de la trêve hivernale, 1 111 expulsions sur le territoire national, dont 729 pour le littoral nord (Calais, Pas-de-Calais, Dunkerque dans le Nord).

    Si les expulsions sur le littoral nord ont diminué de 58 %, elles ont augmenté de 24 % en un an sur le reste du territoire, outremer inclus, et concerné en moyenne 74 personnes chaque jour.

    85 % de ces expulsions sont dites « sèches », car elles n’ont donné lieu à aucune solution d’hébergement ou de relogement. 14 % ont donné lieu à des mises à l’abri pour au moins une partie des habitant·es. 1 % seulement ont donné lieu à un dispositif d’insertion, un hébergement stable ou un logement, pour au moins une partie des habitant·es, détaille l’Observatoire.

    L’organisme explique qu’il est difficile d’avoir des données précises sur les enfants mais compte cette année 5 531 enfants expulsés (contre 3 212 l’année précédente). Ce chiffre est très largement sous-estimé, a-t-il précisé lors de la conférence de presse de présentation du rapport.
    Le suivi compromis des grossesses

    Cette année, l’Observatoire s’est focalisé sur les conséquences concrètes des expulsions sur la vie des enfants et de leurs mères. Il rappelle que « la précarité, et en particulier l’absence de logement, est depuis longtemps identifiée par la littérature scientifique comme un facteur de risque lors de la grossesse ».

    Les chiffres sont éloquents. Une femme enceinte devrait avoir accès à sept consultations prénatales et à trois échographies au moins, rappelle Médecins du monde.

    Or, plus d’une femme enceinte sur trois rencontrées par les équipes des programmes fixes de Médecins du monde en France en 2022 présente un retard de suivi de grossesse, comme la quasi-totalité des femmes enceintes rencontrées par le programme de médiation en santé du Comité pour la santé des exilés (Comede) en Île-de-France. Un écart majeur avec la population générale, parmi laquelle moins de 5 % des personnes enceintes sont dans ce cas.

    Les associations soulignent que les suivis médicaux et de grossesse sont déjà erratiques d’ordinaire. Notamment parce que l’ouverture de droits à une couverture maladie exige une domiciliation administrative. Les démarches, surtout avec la barrière de la langue, peuvent être délicates. Certaines personnes peuvent aussi perdre des papiers dans la cohue des expulsions impromptues.

    Ces dernières insécurisent aussi les futures mères, qui cherchent « en premier lieu à répondre à des besoins de stricte survie », quitte à sacrifier leur santé.

    « Il y a des personnes qu’on va perdre de vue à la suite des expulsions. Elles vont se réinstaller beaucoup plus loin, dans une autre commune, à l’autre bout d’une métropole, a détaillé Antoine Bazin, coordinateur Médecins du monde à Toulouse, devant la presse. Et les suivis par les PMI [centres de Protection maternelle et infantile – ndlr] de secteur, par exemple, pour les femmes enceintes, les suivis par des médecins traitants si on peut en avoir, ou par des centres de santé, vont être rendus plus compliqués parce que les personnes vont être isolées. »

    Les expulsions compliquent aussi le suivi de pathologies. Dans son rapport, l’Observatoire rapporte comment une opération de dépistage de la tuberculose dans un bidonville du Val-d’Oise, au printemps 2023, après la découverte d’un cas sur le lieu de vie et quatre hospitalisations d’enfants, a été compromise par des expulsions successives.

    Même chose pour les campagnes de vaccination ou le repérage des cas de saturnisme, dus à une exposition au plomb pouvant affecter le développement psychomoteur des enfants.

    Par ailleurs, la vie quotidienne d’un enfant vivant dans un lieu de vie informel est aussi bouleversée par l’instabilité provoquée par les expulsions. La scolarité de ces enfants mais aussi leur équilibre mental et psychique sont ébranlés. En 2022, l’Unicef avait déjà alerté sur l’état de santé mentale dégradé des enfants sans domicile.

    Les expulsions sont de plus en plus violentes (voir l’opération « Wuambushu » à Mayotte), dénonce l’Observatoire. Antoine Bazin, de Médecins du monde, explique que les enfants sont les « acteurs passifs » de ces événements et vont vivre la violence intrinsèque au déroulement des opérations d’expulsions. En « vraies éponges », ils vont en conserver des souvenirs qui peuvent avoir des conséquences sur leur construction psychique.

    Julie Bremont, représentante du Comité de pilotage interassociatif MNA Nord-Littoral, confirme : « Les expulsions sont en elles-mêmes un moment très générateur d’anxiété et de peur pour les jeunes. Déjà, de par la violence du dispositif, avec des dizaines de camions de CRS et des policiers en uniforme. Ces opérations d’expulsion sont très souvent accompagnées de violences verbales et physiques. »
    Décrochages scolaires

    De son côté, Célia Mougel, coordinatrice de l’Observatoire des expulsions, souligne que 77 % des expulsions recensées (en dehors du Nord littoral) ont eu lieu pendant l’année scolaire, ce qui, évidemment, produit des décrochages, des déscolarisations, notamment quand on sait que pour réinscrire un enfant, il faut au moins six mois. Si les municipalités coopèrent, ce qui n’est pas toujours le cas.

    Contraindre ces familles à quitter leur lieu de vie et leur point d’ancrage entraîne des effets à long terme sur les enfants. Ils rencontrent alors des difficultés dans la continuité pédagogique, un sentiment d’exclusion ou encore des problèmes d’apprentissage.

    Le cas d’un collégien, Alex, raconté dans le rapport, le prouve. Le garçon aura vécu trois expulsions qui lui auront fait perdre une année scolaire entière. Aujourd’hui, à 12 ans, Alex et sa famille dorment sous un pont en Seine-Saint-Denis et il n’est plus scolarisé.

    Pour toutes ces raisons, l’Observatoire enjoint aux pouvoirs publics de suspendre les expulsions pendant l’année scolaire, pour éviter l’exclusion scolaire et le décrochage des enfants en cours d’année. Manuel Domergue, de la Fondation Abbé Pierre, considère qu’il faudrait aussi déployer davantage de médiateurs scolaires dans ces lieux de vie informels.

    Le reste du temps, les associations estiment qu’aucune expulsion ne devrait avoir lieu sans qu’un diagnostic social préliminaire (l’instruction du 25 janvier 2018 qui le recommandait n’est pas respectée), un accompagnement social global et des solutions de relogement dignes, adaptées et pérennes n’aient été mis en place. Cela pour permettre « une sortie des bidonvilles par le haut ».

    https://www.mediapart.fr/journal/france/281123/les-expulsions-ont-des-consequences-deleteres-sur-la-vie-des-enfants
    #enfance #mineurs #statistiques #chiffres #2022 #expulsions_sèches #santé_mentale #SDF #sans-abrisme #sans-abris #déscolarisation

    • Pour les seuls squats et foyers de travailleurs migrants, le collectif Schaeffer, signataire de la lettre ouverte, estime à 4 100 le nombre de ressortissants de pays africains qui ont été déplacés de la Seine-Saint-Denis après le démantèlement de leur lieu de vie. Pour l’essentiel, ils vivent désormais sur les berges du Canal Saint-Denis, selon les organisations qui leur viennent en aide.

      A ceux-là s’ajoutent les plus de 1 600 personnes qui ont été transférées depuis six mois dans des « sas » d’hébergement en régions, ouverts en avril par le gouvernement pour y orienter les personnes migrantes à la rue en Ile-de-France, où les situations de #campements sont récurrentes et l’hébergement d’urgence saturé. Les autorités ont également tenté d’interdire début octobre les distributions alimentaires dans un quartier populaire du nord de Paris, une décision finalement retoquée en justice.

      [...]
      Les associations, elles, appellent les autorités à « garantir une continuité de la prise en charge des personnes en situation de précarité et d’exclusion, avant, pendant et après les Jeux » olympiques (26 juillet-11 août). Elles demandent également à intégrer les comités de pilotage des JO. Paul Alauzy [#Médecins_du_monde] défend la demande : « On connaît le terrain et on peut aider à ce que les choses se passent bien ».

      #JO #nettoyage_social #Paris #squats #migrants foyers

  • À la frontière serbo-hongroise, les exilés entre deux feux

    C’est le « game » : franchir la #clôture anti-migrants que la Hongrie a érigée à la frontière serbe en 2015, puis espérer échapper à la violence des patrouilles hongroises. Environ un millier d’exilés attendent leur tour à #Subotica, dans des squats ou dans la forêt, en jouant au chat et à la souris avec la police serbe. Reportage.

    « J’ai déjà tenté dix fois de passer en Hongrie, ça n’a pas marché », confie Arman. « Mais je n’abandonne pas ! » Assis sur un vieux tapis poussiéreux, sous une tonnelle bricolée avec du bois et une grande bâche bleue de récupération, le jeune Afghan d’une vingtaine d’années, qui espère rejoindre le Royaume-Uni, décortique des pistaches en écoutant de la musique sur une petite enceinte portable avec deux de ses amis. C’est là qu’ils ont trouvé un refuge temporaire, entre les lignes de chemin de fer et un vieux bâtiment abandonné de la gare de Subotica, au nord de la Serbie, à la frontière avec la Hongrie. Pour le moment, en cette fin de matinée chaude et ensoleillée, Arman et ses deux compagnons de route patientent. Mais le soir venu, c’est sûr, ils tenteront une fois de plus le « game ».

    Le « game », c’est-à-dire quitter la ville de Subotica, atteindre la forêt qui jouxte la frontière, puis tenter de franchir le « mur anti-migrants », formule du Premier ministre hongrois, Viktor Orbán : il s’agit d’une double barrière de plus de trois mètres de haut, dont l’une est surmontée de barbelés Concertina, longue de 175 kilomètres, dotée de caméras et de détecteurs de mouvements, et surveillée par de multiples patrouilles de la police hongroise. Quelque 800 millions d’euros ont été nécessaires pour ériger ce dispositif construit à la fin de l’été 2015, alors que des milliers d’exilés cherchaient à se réfugier en Europe, fuyant la guerre en Syrie ou la violence et la pauvreté dans leur pays.

    Franchir le « mur » ne garantit cependant pas de pouvoir continuer la route vers l’Union européenne. « Quand les policiers hongrois nous attrapent, avant de nous renvoyer en Serbie, ils confisquent ou détruisent nos téléphones », témoigne Arman. « Ils se montrent souvent violents, particulièrement quand ils découvrent que nous sommes afghans. » Des pratiques de refoulements (ou « pushback ») qui ont valu à la Hongrie une condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en décembre 2020, mais qui n’étonnent plus Maria Marga, chargée des programmes de Collective Aid, une organisation qui soutient les exilés à Subotica. Présente depuis 2019, l’équipe sur place recueille très régulièrement des témoignages d’exilés refoulés par la police hongroise, souvent violemment, « et ce en dépit des lois internationales et du principe de non-refoulement », souligne la responsable associative.

    En attendant de passer la frontière, la plupart des exilés survivent dans des campements informels faits de tentes et d’abris de fortune dans des « jungles » au cœur de la forêt. Le Centre de réception, ouvert en 2015 par les autorités à l’entrée sud de la ville, qui héberge actuellement plus de 400 personnes pour une capacité de 220 places, reste sous-doté pour accueillir les exilés présents à la frontière, estimés à un millier. Rencontré à proximité du camp, Naïm, un adolescent de quatorze ans, semble un peu perdu. « Je suis là depuis trois jours, il n’y a pas de place dans le camp, alors je dors ici », indique Naïm en désignant la terre battue qui jouxte le centre. L’adolescent a quitté il y a six mois Deir Ez Zor, dans l’est de la Syrie, puis a transité par la Turquie, la Bulgarie avant d’atteindre le nord de la Serbie. Malgré ses quatorze ans, il passera la nuit dehors.

    Naïm n’est pas le seul à dormir à l’extérieur du camp. D’autres exilés squattent où ils peuvent en ville ou bien s’abritent dans la forêt située à une dizaine de kilomètres au nord de Subotica. Selon Maria Marga, « les expulsions de campements et de squats menées par la police serbe ont été constantes ces trois derniers mois ». Dans un récent rapport, le réseau d’associations Border Violence Monitoring Network (dont Collective Aid est membre) a recensé 27 opérations d’expulsions menées au cours du seul mois de juillet 2023, dont certaines ont été émaillées de violences de la part des forces de l’ordre, de destructions de tentes et de vols d’affaires appartenant à des exilés. « Ces expulsions accentuent la précarité des exilés, qui se retrouvent isolés et éprouvent des difficultés à se procurer nourriture et eau », déplore Maria Marga.
    Frontex en renfort

    Début août, les autorités serbes ont mobilisé plus de 800 policiers et gendarmes pour une vaste opération destinée à démanteler des réseaux de passeurs : treize personnes ont été arrêtées et des armes ont été saisies. Maria Marga souligne que la communication des autorités serbes n’évoque pas « les 300 personnes exilées qui ont aussi été arrêtées avant d’être envoyées par bus dans des camps, dont celui de Preševo, à 500 kilomètres, tout au sud de la Serbie ». L’objectif de ce type d’opérations, selon elle : éloigner ces personnes de la frontière avec la Hongrie. « Ces expulsions visent simplement à plonger les exilés dans un climat d’hostilité et d’insécurité », conclut la responsable associative.

    L’agence Frontex a recensé 145 600 franchissements irréguliers de frontières en 2022 dans la région des Balkans occidentaux, en augmentation de 136% par rapport à 2021, selon les données collectées par ses services. Pour les autorités européennes, la « route des Balkans » empruntées par de nombreux exilés venus du Proche et du Moyen-Orient est présentée comme une priorité. En octobre dernier, la Commission européenne a ainsi acté le renforcement du rôle de Frontex en Serbie, en Bosnie-Herzégovine, au Monténégro et en Albanie, et débloqué 39,2 millions d’euros destinés à « sécuriser » les frontières de ces pays via l’achat de systèmes de surveillance mobiles, de drones ou d’appareils biométriques.

    Une préoccupation déjà visible sur le terrain, comme en témoigne Maria Marga, qui constate « la présence depuis le début de l’année de policiers italiens, allemands ou néerlandais, tous avec leurs uniformes nationaux, mais portant un brassard Frontex ». Ce nouveau déploiement de l’agence, accusée par ailleurs d’avoir couvert les refoulements pratiqués par les garde-côtes grecs, inquiète la responsable associative. « À ce stade, les nouvelles missions des agents de Frontex sont peu claires : sont-ils ici pour soutenir les actions de la police serbe et patrouiller aux frontières ? Ou pour collecter des données ? »

    Alors que la nuit tombe sur Subotica, Arman et ses deux amis se mettent en route vers la Hongrie. Ce soir peut-être, le « game » le rapprochera un peu plus du Royaume-Uni, ou l’ancrera un peu plus longtemps en Serbie.

    https://www.courrierdesbalkans.fr/Exiles-a-la-frontiere-serbo-hongroise
    #Serbie #Hongrie #frontières #asile #migrations #réfugiés #game #the_game #route_des_Balkans #Balkans #murs #barrière_frontalière #forêt #campements #militarisation_des_frontières #Frontex

  • #Orientation des migrants en région : des retours du terrain « de plus en plus inquiétants », faute de places dans l’#hébergement_d’urgence

    Des opérateurs craignent que la politique de #désengorgement de l’#Ile-de-France, qui passe par la création de « #sas », des centres d’#accueil_temporaire, n’offre pas de #solution pérenne.

    Marie (son prénom a été modifié) est déjà repartie. Cette Angolaise est arrivée à Bordeaux aux alentours de la mi-juin, avec son garçon de 6 ans. Cela faisait trois ans qu’ils étaient logés dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (#CADA) dans le 12e arrondissement de #Paris.

    Courant avril, les gestionnaires de l’établissement ont commencé, selon Marie, à expliquer à certains des occupants – ceux qui avaient été #déboutés de leur demande d’asile ou qui avaient obtenu leur statut de réfugié – qu’ils devaient quitter les lieux, laisser la place à des personnes en cours de procédure. Ils leur ont proposé d’aller en région, à Bordeaux et en banlieue rennaise, dans des #centres_d’accueil temporaires.

    Certains ont refusé. Marie, elle, a été « la dernière à [se] décider à partir », sous la « #pression ». On lui avait fait miroiter une scolarisation pour son fils – déjà en CP à Paris – et un hébergement. Elle a vite déchanté. « On a pris mes empreintes à la préfecture et donné un récépissé pour une demande de réexamen de ma demande d’asile alors que je ne souhaitais pas faire cela, explique-t-elle. Je n’ai pas d’éléments nouveaux à apporter et je risque une nouvelle OQTF [obligation de quitter le territoire français]. On m’a expliqué que sans ça, je n’aurais pas le droit à un logement et que le 115 [l’#hébergement_d’urgence] à Bordeaux, c’est pire qu’à Paris, qu’on nous trouve des hébergements pour deux jours seulement. » Marie n’a pas hésité longtemps. Revenue à Paris, elle « squatte » désormais chez une amie. La semaine, elle envoie son fils au centre de loisirs tandis qu’elle fait des ménages au noir dans un hôtel. Tous les jours, elle appelle le 115 pour obtenir un hébergement. En vain.

    Cet exemple symbolise les difficultés du gouvernement dans sa politique d’ouverture de « sas ». Ces #centres_d’accueil_temporaire, installés en province, sont censés héberger des migrants qui se trouvent à la rue, dans des #hôtels_sociaux, des #gymnases ou encore dans les centres réservés aux demandeurs d’asile qui sont en cours de procédure.

    Approche discrète

    Cette politique, commencée début avril pour désengorger l’Ile-de-France – dont les dispositifs sont exsangues et plus coûteux pour le budget de l’Etat –, se veut pourtant innovante. Dix « sas » de cinquante places chacun doivent à terme ouvrir, dans lesquels les personnes transitent trois semaines au plus, avant d’être basculées principalement vers de l’hébergement d’urgence généraliste ou, pour celles qui en relèvent, vers le #dispositif_d’accueil des demandeurs d’asile. Ces « sas » reposent sur le #volontariat et, pour susciter l’adhésion, sont censés « permettre d’accélérer le traitement des situations des personnes dont l’attente se prolonge en Ile-de-France sans perspective réelle à court et moyen termes », défend, dans un courriel adressé au Monde, le ministère du logement.

    C’est ce dernier qui pilote désormais la communication autour du dispositif. Au moment du lancement de celui-ci, c’est le ministère de l’intérieur qui en avait présenté les contours. Un changement d’affichage qui n’est pas anodin. Dans un contexte sensible, où plusieurs projets de centres d’accueil pour migrants en région ont suscité des manifestations hostiles, voire violentes de l’extrême droite, les pouvoirs publics optent pour une approche discrète.

    Dans les faits, d’après les premiers éléments remontés et portant sur plusieurs centaines de personnes orientées, « 80 % sont des réfugiés statutaires et des demandeurs d’asile », le restant étant constitué de personnes sans-papiers, rapporte Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui chapeaute quelque 870 structures de lutte contre l’exclusion, dont les opérateurs de ces « sas » régionaux. « C’est un travail auprès des #sans-abri, migrants ou pas, ce n’est pas le sujet », martèle-t-on néanmoins au cabinet d’Olivier Klein, le ministre délégué au logement.

    « On est en train de planter le dispositif »

    Une posture qui agace Pascal Brice. Il dresse un parallèle avec la situation qui a prévalu à Saint-Brevin (Loire-Atlantique), où le maire (divers droite), Yannick Morez, a démissionné en dénonçant l’absence de soutien de l’Etat. L’édile avait été victime de menaces de mort et son domicile incendié dans un contexte de déménagement d’un CADA. « Il faut se donner les moyens politiques de réussir ce dispositif, or l’Etat n’assume pas sa politique d’accueil organisé et maîtrisé. Il fait les choses en catimini », regrette M. Brice. Les remontées du terrain seraient, en outre, « de plus en plus inquiétantes », assure le président de la FAS.

    Adoma, l’opérateur d’un « sas » de cinquante places dans le 10e arrondissement de Marseille, considère que ce dernier « joue son rôle ». « Nous en sommes au troisième accueil de bus et ça fonctionne. Nous avons la garantie que les gens ne seront pas remis à la rue », rapporte Emilie Tapin, directrice d’hébergement pour #Adoma dans la cité phocéenne, où ont jusque-là été accueillis une majorité d’hommes afghans en demande d’asile. Mais ailleurs, le manque de places d’hébergement d’urgence vers lesquelles faire basculer les personnes après leur passage en « sas » se dresse comme un sérieux obstacle.

    « Notre 115 est saturé et on a déjà des #squats et des #campements », s’inquiète Floriane Varieras, adjointe à la maire écologiste de Strasbourg. Une commune voisine, Geispolsheim, accueille un « sas ». « Sans création de places nouvelles, la tension sur l’hébergement d’urgence est tellement forte qu’on craint que le schéma vertueux qui visait à éviter que les personnes ne reviennent en région parisienne ne craque », signale à son tour la directrice générale de France terre d’asile, Delphine Rouilleault, qui s’occupe d’un « sas » près d’Angers.

    Le ministère du logement assure que 3 600 places ont été « sanctuarisées dans le parc d’hébergement d’urgence pour faciliter la fluidité à la sortie des structures d’accueil temporaires ». Ce qui sous-entend que ces orientations se feront à moyens constants.

    « On est en train de planter le dispositif, alerte Pascal Brice. Des gens sont orientés vers le 115 depuis les “sas” et remis à la rue au bout de quarante-huit heures. C’est insoutenable. Je me suis rendu dans plusieurs régions et, partout, l’Etat ferme des places d’hébergement d’urgence. Si les conditions perduraient, la FAS devrait à son plus grand regret envisager un retrait de ce dispositif. »

    La province ? « Tu ne peux pas bosser là-bas »

    Outre la question de l’hébergement, le succès des « sas » devait s’appuyer sur la promesse faite aux personnes d’une étude bienveillante de leur situation administrative. Sans parler franchement de régularisation, le ministère de l’intérieur avait assuré au Monde, en mars, qu’il y aurait des réexamens au regard du #droit_au_séjour. « Il y a un travail de conviction qui n’est pas encore installé », considère à ce stade Mme Rouilleault.

    Le Monde a rencontré plusieurs familles ayant refusé une orientation en #province, à l’image de Hawa Diallo, une Malienne de 28 ans, mère de deux filles, dont une âgée de 10 ans et scolarisée dans le 15e arrondissement. « J’ai beaucoup de rendez-vous à Paris, à la préfecture, à la PMI [protection maternelle et infantile], à l’hôpital, justifie-t-elle. Et puis le papa n’a pas de papiers, mais il se débrouille à gauche, à droite avec des petits boulots. »

    La province ? « Pour ceux qui sont déboutés de l’asile, ça ne sert à rien. Quand tu n’as pas de papiers, tu ne peux pas bosser là-bas », croit à son tour Brahima Camara. A Paris, cet Ivoirien de 30 ans fait de la livraison à vélo pour la plate-forme #Deliveroo. « Je loue un compte à quelqu’un [qui a des papiers] pour 100 euros par semaine et j’en gagne 300 à 400. C’est chaud, mais c’est mieux que voler. » Sa compagne, Fatoumata Konaté, 28 ans, est enceinte de quatre mois. Les deux Ivoiriens n’ont jamais quitté la région parisienne depuis qu’ils sont arrivés en France, il y a respectivement quatre et deux ans. Ils ont, un temps, été hébergés par le 115 dans divers endroits de l’Essonne. Depuis un an, « on traîne à la rue », confie Fatoumata Konaté. « Parfois, on dort dans des squats, parfois on nous donne des tentes. »

    Chaque nuit, rien qu’à Paris, un millier de demandes auprès du 115 restent insatisfaites. Lasses, le 6 juillet, plus d’une centaine de personnes en famille originaires d’Afrique de l’Ouest ont investi deux accueils de jour de la capitale tenus par les associations Aurore et Emmaüs et y ont passé la nuit, faute de solution. « La situation devient intenable, prévient le directeur général d’Emmaüs Solidarité, Lotfi Ouanezar. On ne résoudra rien si on ne change pas de braquet. »

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/17/orientation-des-migrants-en-region-des-retours-du-terrain-de-plus-en-plus-in

    #migrations #asile #réfugiés #France #hébergement #SDF #dispersion

    via @karine4

  • La Battue. L’Etat, la police et les étrangers

    « #Zéro_point_de_fixation. » De Calais à #Dunkerque, c’est l’expression employée par les autorités pour définir la politique de la France en matière d’immigration à la frontière franco-britannique. Caractérisée par des battues ou chasses à l’homme organisées toutes les 48 heures, cette stratégie de gestion policière des #campements d’exilés a pour but de dissuader les personnes de s’installer et de se regrouper. Une manière de gouverner par l’image, l’exemple et la violence.

    Louis Witter a passé dix-huit mois sur place. Dix-huit mois à enquêter sur cette stratégie de politique intérieure lancée par Bernard Cazeneuve et renforcée par Emmanuel Macron et son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Une stratégie cachée, qui se joue derrière un périmètre que très peu de journalistes ont franchi, dont Louis Witter.

    Dans ce livre, à mi-chemin entre l’enquête et l’essai, Louis Witter montre comment la politique locale, le droit, les politiques institutionnelles et les pratiques policières œuvrent de concert pour légitimer toujours plus de violences envers les personnes étrangères.

    Un phénomène qui témoigne d’un rapport particulier, inquiétant et renouvelé que la police et l’État entretiennent avec les étrangers et la citoyenneté.

    https://www.seuil.com/ouvrage/la-battue-louis-witter/9782021498523
    #livre #Calais #migrations #asile #réfugiés #violence #police #forces_de_l'ordre #points_de_fixation #répression #frontières #battue #chasse_à_l'homme #dissuasion

  • #3 Carnet de route – Sur le campement « de la Liberté », l’espoir ne fait vivre personne

    Une fois toutes les deux semaines, Carnet de route documente les évacuations de #campements, de #bidonvilles et de squats en Île-de-France. Cette semaine, Julie Déléant et Nnoman rapportent la situation d’un campement, à #Ivry-sur-Seine, où quelque 200 mineurs étrangers vivent sans eau potable à proximité ou électricité.

    Contexte : Depuis le 11 juin 2022, près de 200 mineurs isolés vivent dans un campement à Ivry-sur-Seine. Du provisoire qui dure. Sur ce lieu, baptisé le campement “de la Liberté”, ces jeunes se retrouvent en situation de grande détresse.

    La suite ici :

    https://www.bondyblog.fr/societe/carnet-de-route/3-carnet-de-route-sur-le-campement-de-la-liberte-lespoir-ne-fait-vivre-per

    #toponymie_migrante #campement_de_la_liberté #campement #hébergement #asile #migrations #réfugiés #SDF #sans-abris #sans-abrisme

  • #Maroc. À #Nador, les morts sont africains, l’argent européen

    Le 24 juin 2022, au moins 23 migrants sont morts à la frontière entre le Maroc et l’Espagne, et il y a eu plus d’une centaine de blessés des deux côtés. L’ONU et l’Union africaine exigent une enquête indépendante. La coopération migratoire entre le Maroc et l’#Espagne est de nouveau pointée du doigt. Reportage à Nador.

    Il est 14 h à Nador, nous sommes le samedi 25 juin 2022, le lendemain des tragiques incidents sur la frontière entre le Maroc et #Melilla, enclave sous occupation espagnole. Un silence de mort règne dans cette ville rifaine. Chez les officiels locaux, l’omerta règne. Les portes sont closes. « Revenez lundi », nous dit-on sur place. Aucune information ne filtre sur le nombre exact des morts, des blessés et des personnes refoulées vers d’autres villes marocaines. Un homme s’active pour informer le monde sur ce qui se passe ; il s’appelle Omar Naji.

    L’odeur de la mort

    Ce militant de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH) à Nador alerte l’opinion publique et les autorités sur ce drame écrit d’avance depuis une décennie. « Les acteurs de ce drame sont les politiques européennes d’#externalisation des frontières, le Maroc qui agit en tant qu’exécutant et des organisations internationales faiblement impliquées pour protéger les migrants et les réfugiés », accuse-t-il, sans détour. Faute d’une enquête judiciaire, Omar Naji tente dès les premières heures de la tragédie de récolter quelques pièces à conviction.

    Nous rencontrons Omar à la sortie de la morgue de Nador où se trouvent les corps des migrants morts sur la frontière. Ce militant sent l’odeur de la mort. « Les scènes que je viens de voir sont insoutenables. Des corps jonchent le sol depuis 24 heures. Les dépouilles baignent dans leur sang. Les installations de la morgue sont débordées », lâche-t-il, encore sous le coup de l’émotion.

    Deuxième étape dans cette quête d’indices pour reconstituer le puzzle de drame du 24 juin. À la permanence, les policiers ont passé une nuit blanche à réaliser les procès-verbaux des 68 migrants qui allaient être présentés le lundi 27 juin au parquet. La police a rassemblé les bâtons et les quelques objets tranchants utilisés par les migrants lors de la tentative de franchissement de la barrière. Pour la police judiciaire, ce sont les « pièces à conviction » qui ont permis au procureur de demander des poursuites judiciaires contre les migrants aujourd’hui en détention provisoire.

    Troisième étape dans cette contre-enquête de Omar Naji, la récolte de témoignages de personnes en migration. Nous nous rendons sur le mont Gourougou, où les migrants sont dans des campements de fortune. La voiture du militant démarre, nous sommes pris en filature par des membres de services de sécurité. Sur la route de la rocade méditerranéenne, nous passons devant les murs de Nador-Melilla. Ce dispositif est composé de 3 clôtures de 6 mètres de haut et 12 kilomètres de long. Les lames tranchantes, responsables de graves blessures parmi les migrants durant des années, ont été remplacées par des obstacles anti-grimpe et une haute technologie de surveillance, le tout financé par l’Union européenne (UE). « Le Maroc creuse une deuxième tranchée pour compliquer le passage des migrants. Le pays joue son rôle de gendarme, surtout depuis la reprise de la coopération sécuritaire et migratoire avec l’Espagne en mars 2022 », estime Naji. Une semaine avant les incidents, les ministères de l’intérieur des deux pays se sont engagés à « poursuivre leur #coopération_sécuritaire ». Le 6 mai dernier, le groupe migratoire mixte permanent maroco-espagnol avait fixé l’agenda sécuritaire de coopération entre les deux pays.

    Chasse aux migrants ou lutte contre « les réseaux » ?

    À #Barrio_Chino, point frontalier où s’est déroulée une partie des événements, des vêtements de migrants sont encore accrochés aux grillages. Canon à eau et forces d’intervention sont stationnés sur place pour faire face à de nouveaux assauts. Nous continuons notre chemin à la recherche de campements de migrants. Tout au long de l’année, les forces de l’ordre marocaines mènent des opérations pour chasser les migrants sous l’argument du « démantèlement de réseaux de trafic des êtres humains ». Pour Ali Zoubeidi, chercheur spécialiste en migrations, « il y a des réseaux de trafic présents dans d’autres endroits du Maroc, mais pas vers Melilla », observe-t-il, dans une déclaration à Infomigrants. La #Boza par Melilla est gratuite, c’est la route empruntée par les migrants sans moyens. Dans les faits, les #ratissages visent à disperser les migrants le plus loin possible de la frontière avec Melilla.

    Dans un communiqué, 102 organisations africaines et européennes dénoncent les violations systématiques des #droits_humains à Nador : « Depuis plus d’un an et demi, les personnes en migration sont privées d’accès aux médicaments, aux soins, voient leurs campements brûlés et leurs biens spoliés ».

    En 2021, l’AMDH Nador avait recensé 37 opérations de ratissage. Un chiffre en nette baisse en raison du Covid-19 et du confinement. En 2019, les opérations avaient atteint le chiffre record de 134 interventions. « Cette route a été réalisée spécialement pour permettre aux engins des forces de l’ordre d’accéder à la forêt », rappelle Naji, dont le téléphone ne cesse de recevoir des appels de journalistes d’un peu partout dans le monde. En pleine forêt, nous passons devant un campement des #Forces_auxiliaires, corps de sécurité géré directement par le ministère de l’intérieur. Ce camp, avec ses bâtisses en dur et plusieurs tentes, a été construit spécialement pour permettre des interventions rapides dans les #campements.

    Après une heure de route, Naji arrive à la conclusion suivante : « Les opérations menées par les forces de l’ordre ont poussé les migrants à fuir la forêt et toute la ville de Nador ». Nous quittons la forêt et nous croisons sur notre chemin les hauts responsables sécuritaires de la région, venus à bord de deux véhicules militaires, des #Humvee, pour inspecter les lieux. Les seuls migrants présents dans cette ville sont soit morts, soit à l’hôpital, soit emprisonnés. Les migrants ont été dispersés vers plusieurs villes du centre du Maroc (Béni Mellal et Kelaat Sraghna). Cette situation dramatique, au retentissement international, est la conséquence d’une #coopération_sécuritaire entre le Maroc et l’Espagne, avec un financement européen.

    L’UE, cynique bailleur de fonds

    Depuis 2007, l’UE a versé au Maroc 270 millions d’euros pour financer les différents volets sécuritaires de la politique migratoire marocaine. Ce financement se fait directement ou via des instances européennes et espagnoles (Fondation internationale et ibéro-américaine pour l’administration et les politiques publiques, International, Center for Migration Policy Development, etc.). Des montants que le Maroc considère « insuffisants au regard des efforts déployés par le pays pour la gestion des frontières ».

    Depuis 2013, cette coopération s’inscrit dans le cadre du #Partenariat_pour_la_mobilité. Le financement européen en matière d’immigration aussi passe par le #Fonds_fiduciaire_d’urgence de l’Union européenne pour l’Afrique ou des agences souvent espagnoles chargées d’acquérir des équipements sécuritaires pour le royaume chérifien (drones, radars, quads, bus, véhicules tout-terrain…). La Commission européenne (CE) présente ce financement avec des éléments de langage connus : « développer le système marocain de gestion des frontières, et de lutter de manière plus efficace contre le trafic d’êtres humains ». L’UE soutient aussi la #Stratégie_nationale_pour_l’immigration_et_l’asile adoptée par le Maroc en 2014. Cette politique est désormais en stand-by, avec un retour en force d’une vision sécuritaire.

    Dans ses négociations avec la CE, le Maroc compte un allié de taille, l’Espagne. Le royaume fait valoir de son côté « une reprise de la pression migratoire sur le Maroc », comme aime le rappeler #Khalid_Zerouali, directeur de l’immigration et de la surveillance des frontières au ministère de l’intérieur marocain, dans ses sorties médiatiques adressées à ses partenaires européens. Le Maroc se positionne comme partenaire fiable de l’UE et invite son partenaire européen à « la #responsabilité_partagée ». Les routes migratoires marocaines sont les premières portes d’entrée vers l’Europe depuis 2019. L’Intérieur brandit ses chiffres de 2021 : 63 121 migrants arrêtés, 256 réseaux criminels démantelés et 14 000 migrants secourus en mer, en majorité des Marocains.

    Chantages et pressions

    Dans ce contexte, un #chantage est exercé de part et d’autre. L’UE veut amener le Maroc à héberger des centres de débarquement de migrants (#hotspots) et signer avec le royaume un #accord_de_réadmission globale Maroc-UE. Sur ces deux sujets, Rabat continue d’afficher une fin de non-recevoir à ces demandes. Sur le plan bilatéral, la France fait un chantage aux #visas pour pousser le Maroc à rapatrier ses immigrants irréguliers. De son côté, le Maroc a fait de la gestion de l’immigration irrégulière une carte diplomatique, comme l’ont montré les évènements de Ceuta en mai 2021.

    La migration devient ainsi un moyen de pression pour obtenir des gains sur le dossier du Sahara. Un sujet sensible qui a été le cœur d’un gel diplomatique entre le Maroc et l’Espagne durant plus d’un an. La reprise des relations entre les deux pays en mars 2022 a réactivé la coopération sécuritaire entre les deux pays voisins. Pour les 102 organisations des deux continents, ce retour de la coopération est à la source du drame de Nador. « La mort de ces jeunes Africains sur les frontières alerte sur la nature mortifère de la coopération sécuritaire en matière d’immigration entre le Maroc et l’Espagne », peut-on lire dans ce document.

    Mehdi Alioua, sociologue et professeur à l’Université internationale de Rabat, accuse en premier l’UE et sa politique migratoire : « Ces frontières sont celles de la honte parce qu’elles sont totalement absurdes et hypocrites. Ces frontières sont incohérentes, elles sont là pour mettre en scène la “#frontiérisation”. […] La #responsabilité des Européens est directe. La responsabilité du Maroc de ce point de vue est indirecte », déclare-t-il dans une interview pour Medias24
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    Des migrants criminalisés et des corps à la morgue

    Nador, avec ses deux frontières maritime et terrestre avec l’Europe, est pris au piège de ces frontières. Les migrants payent le prix fort. L’an dernier 81 personnes sont mortes à Nador, noyées ou sur les grillages. Face au tollé mondial suscité par ces événements, le gouvernement marocain est sur la défensive. L’exécutif tente de présenter sa version des faits. Signe des temps, cette stratégie de damage control a été sous-traitée par des universitaires, des ONG ou des médias proches de l’État. Ils accusent tous… l’Algérie. Le chef du gouvernement espagnol accuse les “mafias” qui seraient responsables de ce drame tout en “saluant le Maroc pour son professionnalisme”.

    Loin de cette bataille des récits, les militants sur le terrain continuent à panser les blessures des migrants, rechercher les noms des disparus et leurs nationalités, tenter de mobiliser les avocats pour la défense des migrants poursuivis à Nador. Ce procès, qui a démarré le 27 juin, s’annonce comme le plus grand procès des personnes en migration au Maroc. Vingt-huit migrants sont poursuivis avec de lourdes charges pénales. Un deuxième groupe de 37 migrants, dont un mineur, est poursuivi pour des délits. Pendant ce temps, les corps des migrants morts sont toujours à la morgue, sans autopsie ni enquête judiciaire pour établir les circonstances de leurs décès.

    https://orientxxi.info/magazine/maroc-a-nador-les-morts-sont-africains-l-argent-europeen,5734
    #décès #morts #migrations #asile #réfugiés #mourir_en_Europe #frontières #mourir_aux_frontières

    • La forme de protestation a d’abord été une grève « prolétarienne » classique. Dans la nuit du 3 au 4 janvier, une #grève_sauvage a débuté dans les entreprises pétrolières de Tengiz. La grève s’est rapidement étendue aux régions voisines. Aujourd’hui, le mouvement de grève a deux principaux foyers : Janaozen et Aktaou.

      Aujourd’hui, les théoriciens du complot écrivent que les troubles au Kazakhstan ont été soigneusement préparés en Occident, en s’appuyant sur l’organisation et la #coordination minutieuses des #manifestants. Selon les mots de Kurmanov :

      Ce n’est pas un scénario à la Maïdan, bien que de nombreux analystes politiques essaient de le présenter ainsi. D’où est venue cette incroyable auto-organisation ? C’est l’expérience et la tradition des travailleurs. Des grèves secouent la région de Manguistaou depuis 2008, et le mouvement de grève a commencé dans les années 2000. Même en l’absence de toute contribution du Parti communiste ou d’autres groupes de gauche, il y avait des demandes constantes de nationalisation des compagnies pétrolières. Les travailleurs ont tout simplement vu de leurs propres yeux ce à quoi aboutissaient la privatisation et la prise de contrôle par les capitalistes étrangers. Au cours de ces premières manifestations, ils ont acquis une énorme expérience de lutte et de #solidarité. La vie dans le désert en elle-même a fait que les gens se sont serré les coudes. C’est dans ce contexte que la classe ouvrière et le reste de la population se sont réunis. Les manifestations des travailleurs de Janoazen et Aktaou ont ensuite donné le ton à d’autres régions du pays. Les yourtes et les tentes, que les manifestants ont commencé à monter sur les principales places des villes, n’ont pas du tout été extraites de l’expérience « Euromaïdan » : ils se tenaient dans la région du Manguistaou pendant les grèves locales de l’année dernière. La population elle-même a apporté de l’eau et de la nourriture aux manifestants.

      #industrie_pétrolière #rente #privatisation #insurrection_ouvrière (et pas #insurrectionalisme) #luttes #luttes_ouvrières #campements

      bon, l’article va être vu. il était signalé en seen de la mention d’un article de CrimethInc (mais pas de ►) https://seenthis.net/messages/943976#message944930

  • Violences policières : à Calais, Darmanin ment ! [Actions collectives] ⋅ #GISTI
    https://www.gisti.org/spip.php?article6690
    Interviewé par France 3 Hauts-de-France le 9 octobre 2021, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a déclaré :

    « […] Ce que je peux dire, c’est que malgré tous les procès d’intention qu’on fait aux forces de l’ordre, je constate que pas un policier et pas un gendarme sur la côte littoral n’a été poursuivi par la justice […] et j’aimerais qu’on les respecte et qu’on les soutienne plutôt qu’on les insulte surtout lorsque manifestement ce sont des mensonges […] »

    Il répondait à une question concernant le dernier rapport de Human Rights Watch, « Infliger la détresse. Le traitement dégradant des enfants et des adultes migrants dans le nord de la France » [2] qui met en évidence le #harcèlement_policier dont sont victimes les personnes migrantes dans le nord de la France.
    https://www.infomigrants.net/fr/tag/calais
    https://www.youtube.com/watch?v=EW773L0d2-I&t=229s


    le « premier flic de France » est un menteur et All Cops Are bastards
    #violences_policières #Calais

    • France : #Traitement_dégradant des migrants dans la région de Calais

      Une stratégie de détresse infligée aux enfants et aux adultes

      Les autorités françaises soumettent régulièrement les adultes et les enfants migrants vivant dans des campements de fortune dans la région de Calais à des traitements dégradants, conclut Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Cinq ans après la démolition par les autorités françaises du vaste camp de migrants souvent surnommé « la Jungle », plus d’un millier de personnes vivent dans des campements dans et aux alentours de la ville.

      Le rapport de 86 pages, intitulé « Enforced Misery : The Degrading Treatment of Migrant Children and Adults in Northern France » (« Infliger la détresse : Le traitement dégradant des enfants et adultes migrants dans le nord de la France »), documente les opérations répétées d’expulsion massive, le harcèlement policier quasi quotidien et les restrictions pesant sur la délivrance d’aide humanitaire et sur l’accès à cette aide. Les autorités mettent en œuvre ces pratiques abusives principalement dans le but de forcer les personnes à partir ailleurs, sans résoudre leur statut migratoire ni l’absence d‘abri et sans dissuader de nouvelles arrivées.

      « Rien ne peut justifier de soumettre des personnes à une humiliation et un harcèlement quotidiens », selon Bénédicte Jeannerod, directrice France de Human Rights Watch. « Si l’objectif est de décourager les migrants de se regrouper dans le nord de la France, ces politiques sont un échec flagrant, et entraînent de graves souffrances. »

      Human Rights Watch a mené des entretiens avec plus de 60 personnes migrantes, dont 40 se sont identifiées comme des enfants non accompagnés, à Calais et aux alentours, ainsi que dans la commune voisine de #Grande-Synthe, d’octobre à décembre 2020, puis de juin à juillet 2021. Human Rights Watch a également rencontré des responsables de la préfecture et du département du #Pas-de-Calais, ainsi que de la mairie de Grande-Synthe.

      Environ deux mille personnes, dont au moins 300 enfants non accompagnés, vivaient dans des campements à Calais et ses alentours à la mi-2021, d’après les associations humanitaires. Plusieurs centaines de personnes supplémentaires, dont de nombreuses familles avec enfants, étaient installées dans une forêt à Grande-Synthe, près de la ville de Dunkerque.

      Les actions de la #police visant à faire partir les adultes et enfants migrants de Calais et de Grande-Synthe n’ont pas découragé les nouvelles arrivées et ne semblent pas avoir réduit le nombre de traversées irrégulières de la Manche, qui ont battu des records en juillet et août. En revanche, ces pratiques policières ont infligé une détresse croissante aux personnes migrantes.

      « Quand la police arrive, nous avons cinq minutes pour sortir de la tente avant qu’elle ne détruise tout. Mais ce n’est pas possible, pour cinq personnes dont de jeunes enfants, de s’habiller en cinq minutes dans une tente », a indiqué une femme kurde d’Irak à Human Rights Watch en décembre 2020.

      Les policiers exigent très fréquemment des migrants qu’ils quittent temporairement le terrain sur lequel ils se trouvent pendant qu’ils confisquent – et souvent détruisent – les tentes, bâches et sacs de couchage que les gens n’ont pas réussi à emporter avec eux. Au cours de l’année 2020 et de la première moitié de 2021, la police a soumis la plupart des #campements de Calais à ces #expulsions de routine environ un jour sur deux. À Grande-Synthe, ces expulsions ont eu lieu une à deux fois par semaine.

      En 2020, la police a procédé à plus de 950 opérations routinières d’expulsion à Calais et au moins 90 expulsions de routine à Grande-Synthe, saisissant près de 5 000 tentes et bâches et des centaines de sacs de couchage et de couvertures, d’après Human Rights Observers (HRO), une association qui assure un suivi régulier des expulsions de ces campements par la police.

      La police expulse aussi régulièrement tous les occupants d’un campement, prétendant qu’il s’agit d’opérations de « mise à l’abri ». Mais l’abri n’est fourni que pour quelques jours. De plus, les autorités procédant à ces expulsions collectives n’assurent pas efficacement l’identification des enfants non accompagnés et ne prennent pas de mesures spécifiques pour les protéger.

      Du fait de ces #tactiques, les enfants et les adultes sont constamment en alerte et concentrés sur leur survie au jour le jour. Beaucoup sont hagards, en manque de sommeil et, comme l’a observé l’institution française de la Défenseure des droits en septembre 2020, « dans un état d’#épuisement physique et mental ».

      Les autorités font par ailleurs peser des restrictions légales et pratiques sur la délivrance d’#aide_humanitaire et sur l’accès à cette aide. Des arrêtés municipaux interdisent la #distribution_de_nourriture et d’#eau par les associations humanitaires dans le centre-ville de Calais. Les sites où une assistance est fournie par l’État sont souvent déplacés ; ou bien l’aide est distribuée en même temps que les expulsions.

      Les services des autorités ne répondent pas aux besoins des femmes et des filles. Les campements de fortune à Calais ne disposent pas de toilettes séparées pour les femmes et il n’y a pas de toilettes à Grande-Synthe. Les #toilettes existantes ne sont par ailleurs pas correctement éclairées, exposant les #femmes et les #filles à des risques particuliers. Toutes les personnes vivant dans les campements manquent d’eau en raison des difficultés pour y accéder, mais cela pose des problèmes particuliers aux femmes et aux filles lors de leurs #menstruations.

      L’#hébergement_d’urgence, en France, est en principe accessible à toute personne en ayant besoin, mais le système est débordé. Les hébergements d’urgence à Calais sont souvent complets et encore plus limités à Grande-Synthe. L’hébergement d’urgence est habituellement limité à quelques nuits, même pour les familles avec de jeunes enfants. Il existe un système distinct d’#accueil_d’urgence pour les #mineurs_non_accompagnés, mais il est également souvent complet ou presque, et de nombreux enfants s’en voient refusé l’accès.

      Les policiers ont par ailleurs harcelé des bénévoles de HRO, d’Utopia 56 et d’autres associations non gouvernementales qui observent la police lors des expulsions. Certains policiers ont déclaré à tort aux observateurs qu’ils ne pouvaient pas filmer leurs opérations, les menaçant d’arrestation.

      Ces #pratiques_abusives contribuent à une politique de #dissuasion par laquelle les autorités cherchent à éliminer ou éviter tout ce qui, à leurs yeux, attire les migrants dans le nord de la France ou encourage l’établissement de campements. Cette approche ne tient pas compte de la réalité, à savoir que le réel attrait de cette côte est sa proximité avec le Royaume-Uni, situé à seulement 30 km au niveau du pas de Calais.

      « Les exilés ne voyagent pas jusqu’au nord de la France parce qu’ils ont entendu dire qu’ils pourraient y camper dans les bois ou dormir sous un pont. Ils ne viennent pas parce que des associations distribuent un peu d’eau et de nourriture. Ils viennent parce que c’est là que se trouve la frontière », a expliqué Charlotte Kwantes, coordonnatrice nationale d’Utopia 56.

      La fin de la période de transition du Brexit implique que le Royaume-Uni ne peut plus renvoyer la plupart des demandeurs d’asile adultes vers la France sans avoir préalablement examiné leur demande d’asile. Le gouvernement britannique a également cessé d’accepter de nouvelles demandes de transfert au nom du regroupement familial, qui était en pratique la seule option légale permettant aux enfants non accompagnés d’entrer au Royaume-Uni.

      Les préfets du Pas-de-Calais et du Nord, départements où se situent Calais et Grande-Synthe, devraient mettre fin aux #expulsions_répétées des campements de migrants et cesser de saisir les biens des personnes, a déclaré Human Rights Watch. Les préfectures devraient travailler de concert avec les autorités départementales pour assurer des solutions alternatives d’hébergement à même de permettre aux personnes de se poser et de les aider à faire des choix éclairés, comme demander l’asile ou un autre statut en France ou ailleurs, ou bien repartir dans leur pays d’origine.

      Les autorités françaises de protection de l’enfance devaient faire davantage pour informer les enfants non accompagnés au sujet des options qui s’offrent à eux, notamment intégrer le système d’aide sociale à l’enfance, leur permettant d’accéder à un statut légal à leur majorité.

      L’Union européenne devrait mettre en place un système de partage des responsabilités entre ses États membres qui évite de faire peser une pression excessive sur les pays de première arrivée et les pays de destination les plus prisés, et qui tienne dûment compte des liens familiaux et sociaux, ainsi que des préférences individuelles des demandeurs d’asile.

      Le gouvernement britannique devrait mettre en place des moyens sûrs et légaux permettant aux personnes migrantes de se rendre au Royaume-Uni afin de demander refuge, d’être réunies avec les membres de leur famille, de travailler ou d’étudier.

      « Les autorités françaises devraient renoncer à leur stratégie défaillante à l’égard des migrants », conclut Bénédicte Jeannerod. « Il est nécessaire qu’elles adoptent une nouvelle approche pour aider les gens, au lieu de constamment les harceler et leur infliger des abus. »

      https://www.hrw.org/fr/news/2021/10/07/france-traitement-degradant-des-migrants-dans-la-region-de-calais

      #rapport #HRW #points_de_fixation

    • merci @cdb_77
      https://www.hrw.org/fr/news/2021/10/14/le-deni-par-le-ministre-francais-de-linterieur-des-abus-policiers-contre-les
      https://twitter.com/MichaelBochenek/status/1446130172126654466

      Le harcèlement systématique et les restrictions d’accès à l’aide humanitaire que les autorités françaises font subir aux migrants n’empêchent pas les nouvelles arrivées, mais provoquent une grande détresse.

      https://video.twimg.com/ext_tw_video/1446129388735500288/pu/vid/720x720/0FaLXNbE9O8_G1DV.mp4

  • Tous chasseurs cueilleurs !
    https://www.franceinter.fr/emissions/comme-un-bruit-qui-court/comme-un-bruit-qui-court-08-juin-2019

    Quand la civilisation menace l’#environnement... retour à la chasse et la cueillette. Entretien avec James C. Scott autour de son livre "#HomoDomesticus, une histoire profonde des premiers Etats".

    On a tous en tête des souvenirs d’école sur les débuts de l’Histoire avec un grand H. Quelque part entre le Tigre et l’Euphrate il y a 10 000 ans, des chasseurs-cueilleurs se sont peu à peu sédentarisés en domestiquant les plantes et les animaux, inventant dans la foulée l’#agriculture, l’écriture et les premiers Etats. C’était l’aube de la #civilisation et le début de la marche forcée vers le #progrès.

    Cette histoire, #JamesScott, anthropologue anarchiste et professeur de sciences politiques, l’a enseignée pendant des années à ses élèves de l’Université de Yale. Mais les découvertes archéologiques dans l’actuel Irak des dernières années l’ont amené à réviser complètement ce « storytelling » du commencement des sociétés humaines, et par là même remettre en question notre rapport au monde dans son dernier livre : Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers Etats (Ed. La Découverte).

    Alors même que climat et biodiversité sont aujourd’hui plus que jamais menacés par les activités humaines, James C. Scott propose de réévaluer l’intérêt des sociétés d’avant l’Etat et l’agriculture. Car ces chasseurs-cueilleurs semi-nomades ont longtemps résisté face aux civilisations agraires, basées sur les céréales et qui, en domestiquant le monde, se sont domestiqués eux-mêmes, en appauvrissant leur connaissance du monde.

    Un reportage de Giv Anquetil.
    Les liens

    James C. Scott : « Le monde des chasseurs-cueilleurs était un monde enchanté » (Le grand entretien) par Jean-Christophe Cavallin, Diakritik

    Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce, Réflexions sur l’effondrement, Corinne Morel Darleux, Editions Libertalia

    "Amador Rojas invite Karime Amaya" Chapiteau du Cirque Romanès - Paris 16, Paris. Prochaine séance le vendredi 14 juin à 20h.

    Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers Etats, James C. Scott (Editions La Découverte)

    Eloge des chasseurs-cueilleurs, revue Books (mai 2019).

    HOMO DOMESTICUS - JAMES C. SCOTT Une Histoire profonde des premiers États [Fiche de lecture], Lundi matin

    Bibliographie de l’association Deep Green Resistance
    Programmation musicale

    "Mesopotamia"- B52’s

    "Cholera" - El Rego et ses commandos

    #podcast @cdb_77

    • Homo Domesticus. Une histoire profonde des premiers États

      Aucun ouvrage n’avait jusqu’à présent réussi à restituer toute la profondeur et l’extension universelle des dynamiques indissociablement écologiques et anthropologiques qui se sont déployées au cours des dix millénaires ayant précédé notre ère, de l’émergence de l’agriculture à la formation des premiers centres urbains, puis des premiers États.
      C’est ce tour de force que réalise avec un brio extraordinaire #Homo_domesticus. Servi par une érudition étourdissante, une plume agile et un sens aigu de la formule, ce livre démonte implacablement le grand récit de la naissance de l’#État antique comme étape cruciale de la « #civilisation » humaine.
      Ce faisant, il nous offre une véritable #écologie_politique des formes primitives d’#aménagement_du_territoire, de l’« #autodomestication » paradoxale de l’animal humain, des dynamiques démographiques et épidémiologiques de la #sédentarisation et des logiques de la #servitude et de la #guerre dans le monde antique.
      Cette fresque omnivore et iconoclaste révolutionne nos connaissances sur l’évolution de l’humanité et sur ce que Rousseau appelait « l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes ».


      https://www.editionsladecouverte.fr/homo_domesticus-9782707199232

      #James_Scott #livre #démographie #épidémiologie #évolution #humanité #histoire #inégalité #inégalités #Etat #écologie #anthropologie #ressources_pédagogiques #auto-domestication

    • Fiche de lecture: Homo Domesticus - James C. Scott

      Un fidèle lecteur de lundimatin nous a transmis cette fiche de lecture du dernier ouvrage de James C. Scott, (on peut la retrouver sur le blog de la bibliothèque fahrenheit) qui peut s’avérer utile au moment l’institution étatique semble si forte et fragile à la fois.
      « L’État est à l’origine un racket de protection mis en œuvre par une bande de voleurs qui l’a emporté sur les autres »
      À la recherche de l’origine des États antiques, James C. Scott, professeur de science politique et d’anthropologie, bouleverse les grands #récits_civilisationnels. Contrairement à bien des idées reçues, la #domestication des plantes et des animaux n’a pas entraîné la fin du #nomadisme ni engendré l’#agriculture_sédentaire. Et jusqu’il y a environ quatre siècles un tiers du globe était occupé par des #chasseurs-cueilleurs tandis que la majorité de la population mondiale vivait « hors d’atteinte des entités étatiques et de leur appareil fiscal ».
      Dans la continuité de #Pierre_Clastres et de #David_Graeber, James C. Scott contribue à mettre à mal les récits civilisationnels dominants. Avec cette étude, il démontre que l’apparition de l’État est une anomalie et une contrainte, présentant plus d’inconvénients que d’avantages, raison pour laquelle ses sujets le fuyait. Comprendre la véritable origine de l’État c’est découvrir qu’une toute autre voie était possible et sans doute encore aujourd’hui.

      La première domestication, celle du #feu, est responsable de la première #concentration_de_population. La construction de niche de #biodiversité par le biais d’une #horticulture assistée par le feu a permis de relocaliser la faune et la flore désirable à l’intérieur d’un cercle restreint autour des #campements. La #cuisson des aliments a externalisé une partie du processus de #digestion. Entre 8000 et 6000 avant notre ère, Homo sapiens a commencé à planter toute la gamme des #céréales et des #légumineuses, à domestiquer des #chèvres, des #moutons, des #porcs, des #bovins, c’est-à-dire bien avant l’émergence de sociétés étatiques de type agraire. Les premiers grands établissements sédentaires sont apparus en #zones_humides et non en milieu aride comme l’affirment les récits traditionnels, dans des plaines alluviales à la lisière de plusieurs écosystèmes (#Mésopotamie, #vallée_du_Nil, #fleuve_Indus, #baie_de_Hangzhou, #lac_Titicata, site de #Teotihuacan) reposant sur des modes de subsistance hautement diversifiés (sauvages, semi-apprivoisés et entièrement domestiqués) défiant toute forme de comptabilité centralisée. Des sous-groupes pouvaient se consacrer plus spécifiquement à une stratégie au sein d’un économie unifiée et des variations climatiques entraînaient mobilité et adaptation « technologique ». La #sécurité_alimentaire était donc incompatible avec une #spécialisation étroite sur une seule forme de #culture ou d’#élevage, requérant qui plus est un travail intensif. L’#agriculture_de_décrue fut la première à apparaître, n’impliquant que peu d’efforts humains.
      Les #plantes complètement domestiquées sont des « anomalies hyperspécialisées » puisque le cultivateur doit contre-sélectionner les traits sélectionnés à l’état sauvage (petite taille des graines, nombreux appendices, etc). De même les #animaux_domestiqués échappent à de nombreuses pressions sélectives (prédation, rivalité alimentaire ou sexuelle) tout en étant soumis à de nouvelles contraintes, par exemple leur moins grande réactivité aux stimuli externes va entraîner une évolution comportementale et provoquer la #sélection des plus dociles. On peut dire que l’espèce humaine elle-même a été domestiquée, enchaînée à un ensemble de routines. Les chasseurs-cueilleurs maîtrisaient une immense variété de techniques, basées sur une connaissance encyclopédique conservée dans la mémoire collective et transmise par #tradition_orale. « Une fois qu’#Homo_sapiens a franchi le Rubicon de l’agriculture, notre espèce s’est retrouvée prisonnière d’une austère discipline monacale rythmée essentiellement par le tic-tac contraignant de l’horloge génétique d’une poignée d’espèces cultivées. » James C. Scott considère la #révolution_néolithique récente comme « un cas de #déqualification massive », suscitant un #appauvrissement du #régime_alimentaire, une contraction de l’espace vital.
      Les humains se sont abstenus le plus longtemps possible de faire de l’agriculture et de l’élevage les pratiques de subsistance dominantes en raison des efforts qu’elles exigeaient. Ils ont peut-être été contraints d’essayer d’extraire plus de #ressources de leur environnement, au prix d’efforts plus intenses, à cause d’une pénurie de #gros_gibier.
      La population mondiale en 10 000 avant notre ère était sans doute de quatre millions de personnes. En 5 000, elle avait augmenté de cinq millions. Au cours des cinq mille ans qui suivront, elle sera multipliée par vingt pour atteindre cent millions. La stagnation démographique du #néolithique, contrastant avec le progrès apparent des #techniques_de_subsistance, permet de supposer que cette période fut la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité sur le plan épidémiologique. La sédentarisation créa des conditions de #concentration_démographique agissant comme de véritables « parcs d’engraissement » d’#agents_pathogènes affectant aussi bien les animaux, les plantes que les humains. Nombre de #maladies_infectieuses constituent un « #effet_civilisationnel » et un premier franchissement massif de la barrière des espèces par un groupe pathogènes.
      Le #régime_alimentaire_céréalier, déficient en #acides_gras essentiels, inhibe l’assimilation du #fer et affecte en premier lieu les #femmes. Malgré une #santé fragile, une #mortalité infantile et maternelle élevée par rapport aux chasseurs-cueilleurs, les agriculteurs sédentaires connaissaient des #taux_de_reproduction sans précédent, du fait de la combinaison d’une activité physique intense avec un régime riche en #glucides, provoquant une #puberté plus précoce, une #ovulation plus régulière et une #ménopause plus tardive.

      Les populations sédentaires cultivant des #céréales domestiquées, pratiquant le commerce par voie fluviale ou maritime, organisées en « #complexe_proto-urbain », étaient en place au néolithique, deux millénaires avant l’apparition des premiers États. Cette « plateforme » pouvait alors être « capturée », « parasitée » pour constituer une solide base de #pouvoir et de #privilèges politiques. Un #impôt sur les céréales, sans doute pas inférieur au cinquième de la récolte, fournissait une rente aux élites. « L’État archaïque était comme les aléas climatiques : une menace supplémentaire plus qu’un bienfaiteur. » Seules les céréales peuvent servir de base à l’impôt, de part leur visibilité, leur divisibilité, leur « évaluabilité », leur « stockabilité », leur transportabilité et leur « rationabilité ». Au détour d’un note James C. Scott réfute l’hypothèse selon laquelle des élites bienveillantes ont créé l’État essentiellement pour défendre les #stocks_de_céréales et affirme au contraire que « l’État est à l’origine un racket de protection mis en œuvre par une bande de voleurs qui l’a emporté sur les autres ». La majeure partie du monde et de sa population a longtemps existé en dehors du périmètre des premiers États céréaliers qui n’occupaient que des niches écologiques étroites favorisant l’#agriculture_intensive, les #plaines_alluviales. Les populations non-céréalières n’étaient pas isolées et autarciques mais s’adonnaient à l’#échange et au #commerce entre elles.
      Nombre de #villes de #Basse_Mésopotamie du milieu du troisième millénaire avant notre ère, étaient entourées de murailles, indicateurs infaillibles de la présence d’une agriculture sédentaire et de stocks d’aliments. De même que les grandes #murailles en Chine, ces #murs d’enceinte étaient érigés autant dans un but défensif que dans le but de confiner les paysans contribuables et de les empêcher de se soustraire.
      L’apparition des premiers systèmes scripturaux coïncide avec l’émergence des premiers États. Comme l’expliquait #Proudhon, « être gouverné, c’est être, à chaque opération, à chaque transaction, à chaque mouvement, noté, enregistré, recensé, tarifé, timbré, toisé, coté, cotisé, patenté, licencié, autorisé, apostillé, admonesté, empêché, réformé, redressé, corrigé ». L’#administration_étatique s’occupait de l’#inventaire des ressources disponibles, de #statistiques et de l’#uniformisation des #monnaies et des #unités_de_poids, de distance et de volume. En Mésopotamie l’#écriture a été utilisée à des fins de #comptabilité pendant cinq siècle avant de commencer à refléter les gloires civilisationnelles. Ces efforts de façonnage radical de la société ont entraîné la perte des États les plus ambitieux : la Troisième Dynastie d’#Ur (vers 2100 avant J.-C.) ne dura qu’à peine un siècle et la fameuse dynastie #Qin (221-206 avant J.-C.) seulement quinze ans. Les populations de la périphérie auraient rejeté l’usage de l’écriture, associée à l’État et à l’#impôt.

      La #paysannerie ne produisait pas automatiquement un excédent susceptible d’être approprié par les élites non productrices et devait être contrainte par le biais de #travail_forcé (#corvées, réquisitions de céréales, #servitude pour dettes, #servage, #asservissement_collectif ou paiement d’un tribu, #esclavage). L’État devait respecter un équilibre entre maximisation de l’excédent et risque de provoquer un exode massif. Les premiers codes juridiques témoignent des efforts en vue de décourager et punir l’#immigration même si l’État archaïque n’avait pas les moyens d’empêcher un certain degré de déperdition démographique. Comme pour la sédentarité et la domestication des céréales, il n’a cependant fait que développer et consolider l’esclavage, pratiqué antérieurement par les peuples sans État. Égypte, Mésopotamie, Grèce, Sparte, Rome impériale, Chine, « sans esclavage, pas d’État. » L’asservissement des #prisonniers_de_guerre constituait un prélèvement sauvage de main d’œuvre immédiatement productive et compétente. Disposer d’un #prolétariat corvéable épargnait aux sujets les travaux les plus dégradants et prévenait les tensions insurrectionnelles tout en satisfaisant les ambitions militaires et monumentales.

      La disparition périodique de la plupart de ces entités politiques était « surdéterminée » en raison de leur dépendance à une seule récolte annuelle d’une ou deux céréales de base, de la concentration démographique qui rendait la population et le bétail vulnérables aux maladies infectieuses. La vaste expansion de la sphère commerciale eut pour effet d’étendre le domaine des maladies transmissibles. L’appétit dévorant de #bois des États archaïques pour le #chauffage, la cuisson et la #construction, est responsable de la #déforestation et de la #salinisation_des_sols. Des #conflits incessants et la rivalité autour du contrôle de la #main-d’œuvre locale ont également contribué à la fragilité des premiers États. Ce que l’histoire interprète comme un « effondrement » pouvait aussi être provoqué par une fuite des sujets de la région centrale et vécu comme une #émancipation. James C. Scott conteste le #préjugé selon lequel « la concentration de la population au cœur des centres étatiques constituerait une grande conquête de la civilisation, tandis que la décentralisation à travers des unités politiques de taille inférieure traduirait une rupture ou un échec de l’ordre politique ». De même, les « âges sombres » qui suivaient, peuvent être interprétés comme des moments de résistance, de retours à des #économies_mixtes, plus à même de composer avec son environnement, préservé des effets négatifs de la concentration et des fardeaux imposés par l’État.

      Jusqu’en 1600 de notre ère, en dehors de quelques centres étatiques, la population mondiale occupait en majorité des territoires non gouvernés, constituant soit des « #barbares », c’est-à-dire des « populations pastorales hostiles qui constituaient une menace militaire » pour l’État, soit des « #sauvages », impropres à servir de matière première à la #civilisation. La menace des barbares limitait la croissance des États et ceux-ci constituaient des cibles de pillages et de prélèvement de tribut. James C. Scott considère la période qui s’étend entre l’émergence initiale de l’État jusqu’à sa conquête de l’hégémonie sur les peuples sans État, comme une sorte d’ « âge d’or des barbares ». Les notions de #tribu ou de peuple sont des « #fictions_administratives » inventées en tant qu’instrument de #domination, pour désigner des #réfugiés politiques ou économiques ayant fuit vers la périphérie. « Avec le recul, on peut percevoir les relations entre les barbares et l’État comme une compétition pour le droit de s’approprier l’excédent du module sédentaire « céréales/main-d’œuvre ». » Si les chasseurs-cueilleurs itinérants grappillaient quelques miettes de la richesse étatique, de grandes confédérations politiques, notamment les peuples équestres, véritables « proto-États » ou « Empires fantômes » comme l’État itinérant de #Gengis_Kahn ou l’#Empire_Comanche, constituaient des concurrents redoutables. Les milices barbares, en reconstituant les réserves de main d’œuvre de l’État et en mettant leur savoir faire militaire au service de sa protection et de son expansion, ont creusé leur propre tombe.

      Dans la continuité de Pierre Clastres et de David Graeber, James C. Scott contribue à mettre à mal les récits civilisationnels dominants. Avec cette étude, il démontre que l’apparition de l’État est une #anomalie et une #contrainte, présentant plus d’inconvénients que d’avantages, raison pour laquelle ses sujets le fuyait. Comprendre la véritable origine de l’État c’est découvrir qu’une toute autre voie était possible et sans doute encore aujourd’hui.

      https://lundi.am/HOMO-DOMESTICUS-Une-Histoire-profonde-des-premiers-Etats
      #historicisation

  • À #Calais, l’absurde #confiscation des #tentes des migrants

    À Calais, l’#expulsion tous les deux jours des terrains occupés par les exilés se double d’une confiscation de leurs #effets_personnels. Tentes, duvets, documents... sont, en théorie, stockés et peuvent être récupérés. Dans les faits, huit à dix tonnes d’affaires finissent chaque mois à la poubelle.

    Calais (Pas-de-Calais), reportage

    9 heures du matin, par 2 °C. Janvier à Calais. En bord d’un terrain à l’est de la ville, Matin [1] et ses amis frissonnent, le visage enfoncé jusqu’au nez dans leur col, les poings roulés dans les manches étirées. Ils sont jeunes, certains mineurs, originaires de plusieurs provinces afghanes, et viennent de se faire expulser du terrain de sable et de boue qu’ils occupent en bordure d’une voie ferrée. Ils ont une question, qu’ils répètent en boucle aux journalistes : « Why ? » — pourquoi ? Car ces opérations, menées toutes les 48 heures dans sept endroits différents de la ville, sont suivies de peu d’effets, tant en termes de mise à l’abri que d’accompagnement social, notamment en ce qui concerne les mineurs isolés. Il faut juste, à intervalles réguliers, faire le vide sur place — « éviter les points de fixation », dit l’État. « Tout est rendu difficile », peste Matin, regard dans ses pieds. « Ils arrivent, nous disent simplement go ! go ! Et on n’a pas intérêt à rester discuter. »

    Pour éviter les installations de #campements, plusieurs leviers existent. La mairie de Calais a ainsi lancé une série de #déboisements le long des routes et dans les zones de promenade, où les exilés ont l’habitude de camper. Autre moyen de pression : l’expulsion régulière des terrains occupés, avec saisie des effets personnels laissés sur place. En 2020, Human Rights Observers (HRO) a comptabilisé 967 d’expulsions.

    Les jeunes sont remontés : ce matin, l’opération s’est déroulée sans interprète. Impossible de palabrer avec les forces de l’ordre pour réclamer l’essentiel, impossible de passer le cordon des gendarmes pour aller récupérer leurs affaires. Tentes, couchages... autant d’équipements pourtant capitaux en hiver. De toute façon, tout ce qu’ils n’auront pas pu traîner en vitesse dans la bâche à leurs pieds sera soit jeté, soit emporté. [2] Il leur faut donc vider les lieux, puis négocier, réclamer leurs biens. Une routine à laquelle se plient, de mauvais gré, migrants et associations qui les accompagnent. Après le passage des uniformes, des silhouettes en veste bleue s’activent : ce sont les nettoyeurs d’#APC, société privée sous contrat, qui récupère les objets susceptibles de faire l’objet d’une réclamation. Le convoi se termine immanquablement par un camion chargé de tentes, duvets, tapis de sol, vêtements, téléphones, documents ou argent.

    528 tentes et #bâches ont été prises rien que sur le mois de décembre 2020

    Destination poubelle ? Jusqu’à récemment — janvier 2018 — c’était encore le cas. En colère, les associations avaient même porté une plainte [3], classée sans suite. Depuis, l’État a mis en place un processus spécifique à Calais. Outre les nettoyeurs d’APC, un acteur de l’économie solidaire a été sollicité pour récupérer et mettre à disposition les affaires emportées. Elle aussi située dans l’est de la ville, la #Ressourcerie_du-Calaisis, gérée par #Face_Valo, une association d’insertion, fait office de #dépôt depuis trois ans. Un accord non lucratif, comme le précise un encadrant technique du magasin qui souhaite rester anonyme : « Nous sommes simplement défrayés à la quantité d’objets qui passe par le stockage ici, au poids. Nous tenons des registres. »

    Les quantités en question : plusieurs tonnes par mois, dont des centaines de tentes, cruciales en hiver. Selon Human Rights Observers, qui documente l’action des pouvoirs publics à Calais, 528 tentes et bâches ont été prises rien que sur le mois de décembre 2020.

    « On court toujours après ! Tout ce que l’on retire d’ici est soit abîmé, soit trempé »

    C’est à la ressourcerie que les jeunes Afghans se regroupent en fin de matinée, comme toutes les 48 heures. Leur terrain est à proximité. Ils sont les seuls à être venus attendre en petit groupe l’arrivée du convoi du jour. « Ceux des autres camps plus éloignés, comme #Fort-Nieulay par exemple, ne viennent presque jamais, malgré le fait que nous les informions du dispositif lors de nos maraudes », déplore Pénélope, coordinatrice pour HRO. Le manque de temps peut expliquer ce désintérêt : l’accord prévoit un accès aux affaires deux heures durant, tous les jours ouvrés, de 10 h à midi. Des horaires qui coïncident avec la fin des expulsions matinales d’une part, et les distributions de nourriture et d’eau de l’association la Vie Active de l’autre. « Il faut donc faire un choix entre sauter un repas ou perdre sa tente », selon Pénélope.

    Le taux de casse et de pertes explique aussi le peu d’intérêt des migrants pour ce système. Le jour de notre reportage, le camion d’APC, arrivé non à 10 h mais à 11 h 20, a déchargé des tentes disloquées, brisées, alourdies de matériel. Pour certaines, elles ont déjà fait ce voyage quatre ou cinq fois. Une tutelle supplémentaire : ce sont les bénévoles de #HRO, et non les migrants, qui doivent remettre la liste des objets réclamés, suivant ce qu’ils ont pu observer. C’est Isabella qui en était chargée ce matin-là. Problème : comme les journalistes, HRO est maintenu en dehors des cordons de police, et ne peut donc pas correctement observer ce qui a été pris — en plus de noter les atteintes aux droits humains. « On fait le décompte comme on peut, selon ce que nous rapportent les expulsés, et on compare avec ce qui est déchargé », dit-elle à Reporterre, appuyée sur la porte du camion d’APC pour annoter son tableau. Les nettoyeurs, eux, font des va-et-vient dans le conteneur.

    Charge aux migrants, autorisés à entrer en groupe de trois dans l’édicule en tôle blanche, de faire le tri. « On n’a pas l’impression que ces affaires sont à nous, on court toujours après ! Tout ce que l’on retire d’ici est soit abîmé, soit trempé », soupirait Hamar [4], sorti en trombe — midi sonnait — avec une tente sur le dos, le masque sur le nez et des gants en plastique empruntés. Vu le gel nocturne, récupérer des affaires sèches est un enjeu de survie. Matin, lui, était à la recherche de son téléphone : un coup d’œil dans le containeur lui a été accordé, juste avant la fermeture. Peine perdue.

    « Neuf fois sur dix, aller réclamer un papier perdu en ressourcerie se solde par un échec »

    Avec ses moyens, HRO travaille à comptabiliser le différentiel affaires prises / affaires restituées en état. « Pour le moment, nous n’avons à disposition que des chiffres concernant une minorité des cas : les personnes qui se sont présentées à la ressourcerie », explique Pénélope. Des chiffres évocateurs : sur l’année écoulée, 52 % des personnes venues réclamer leurs affaires ont déclaré à HRO les avoir récupérées en état satisfaisant et en totalité. Un taux qui s’effondre à un inquiétant 27 % quand il s’agit d’objets de valeur : médicaments, smartphones, argent liquide et documents. « On est proche de mettre en place un stockage bien plus adapté », répond l’encadrant de la ressourcerie. Le magasin plancherait sur un local où les biens seraient présentés catégorisés, à l’abri des intempéries. Quant aux objets de valeur au taux de perte si importants, les documents notamment, « quand ils sont retrouvés, nous avons déjà pour consigne stricte de les réserver à part et de les mettre à disposition ».

    Margot Sifre, juriste de la Cabane juridique, une structure d’accompagnement des migrants, recueille les doléances de ceux qui ont perdu un papier : « Neuf fois sur dix, aller réclamer un papier perdu en ressourcerie se solde par un échec. Au lieu de compter dessus, les déclarations de perte et demandes de récépissés se systématisent, simplement pour ne pas être en défaut trop longtemps face aux autorités. »

    Contrairement à ce qui est encore en pratique dans la commune de Grande-Synthe, où les affaires enlevées finissent directement à la benne, le dispositif calaisien a le mérite de poser, sur le papier, la question de la propriété de ces biens. Dans les faits, les affaires restent très majoritairement jetées et le conteneur vidé environ tous les dix jours. Selon le magasin, ce sont huit à dix tonnes d’affaires non réclamées qui finissent chaque mois emportées par les camions-poubelles. Direction un site d’enfouissement, à trente kilomètres à vol d’oiseau.

    https://reporterre.net/A-Calais-l-absurde-confiscation-des-tentes-des-migrants
    #migrations #asile #réfugiés #harcèlement #frontières

    ping @karine4 @isskein

  • De l’usage des #campements dans les #politiques_migratoires

    La litanie des #expulsions de migrants se poursuit, après Paris place de la République fin novembre, les associations alertent sur l’accélération du phénomène à #Calais au cours du mois écoulé. Alors que l’expérience longue pourrait informer de nouvelles pratiques, pourquoi ce recours systématique à l’expulsion perdure-t-il ? Parce que les campements sont un répertoire des politiques migratoires, et non la conséquence d’un trop plein auquel nos capacités d’accueil ne pourraient plus faire face.

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    Lundi 23 novembre 2020, vers 19h, plusieurs centaines de personnes exilées issues du campement de St-Denis n’ayant pu bénéficier de “la #mise_à_l’abri” organisée par la préfecture de Paris la semaine précédente, accompagnées d’associations de soutien, d’avocats, d’élus et de journalistes, déploient 200 tentes sur la #place_de_la_République. Malgré la résistance des exilés et de leurs soutiens, la place sera évacuée le soir même. La police pourchassera jusque tard dans la nuit et en dehors de #Paris celles et ceux qui n’ont plus où aller. La #violence déployée fera l’objet de nombreuses images sur les réseaux sociaux.

    Cette opération est loin d’être inhabituelle, contrairement à ce que laisse penser la médiatisation inédite à laquelle elle a donné lieu et qui s’explique par une conjonction de facteurs : le lieu de la scène (le centre de Paris), le moment (montée des critiques sur les violences policières et adoption d’une loi interdisant de les filmer), les acteurs (des journalistes et des élus violentés et non plus seulement des exilés et leurs soutiens). Depuis le 2 juin 2015 et l’évacuation d’un campement dans Paris (sous le métro la Chapelle), on dénombre soixante-six opérations de ce type dans la capitale et sa petite couronne (une moyenne d’un par mois). Dans le Calaisis, elles relèvent de la routine.

    Les évacuations de campement sont ainsi devenues courantes, relayées par des articles de presse qui se suivent et se ressemblent, préférant souvent à l’analyse un alignement de faits bruts immédiats, peu éloignés des communiqués de la préfecture de police. Que révèle donc la litanie dans laquelle s’inscrit cet énième épisode ? Que cristallise-t-il comme phénomènes ?

    Pour le comprendre, nous proposons de revenir sur la manière dont sont fabriqués ces campements et mises en scène ces évacuations en faisant l’effort d’inverser le regard, de le diriger vers les coulisses que la lumière des projecteurs laisse dans l’ombre.

    La fabrique des campements

    À première vue, le campement apparaît comme le signe d’un #trop_plein, preuve que les étrangers seraient trop nombreux et que nous aurions atteint les limites de nos #capacités_d’accueil, d’un point de vue économique comme social. Les campements sont en réalité davantage fabriqués par les choix de politiques migratoires de l’État, que par une submersion par le nombre.

    Ceux qui survivent dans les campements du Nord de Paris sont majoritairement en demande d’asile, certains attendent une réponse, d’autres de pouvoir simplement déposer une demande, une minorité a été déboutée. Ils sont majoritairement Afghans et Soudanais, mais aussi Ethiopiens et Erythréens et dans une moindre mesure Guinéens et Ivoiriens. Pas de Chinois, de Sri-Lankais, de Maliens… qui sont accueillis – bien ou mal – par des compatriotes installés de longue date. Pas non plus de Syriens – qui sont peu venus en France.

    Les campements sont le résultat de #politiques_publiques qui ont précarisé les demandeurs d’asile au lieu de les laisser doucement s’intégrer au tissu économique et social de notre pays. Car en vertu d’une loi adoptée en 1991, les demandeurs d’asile n’ont pas le droit de travailler. En contrepartie, ils sont censés bénéficier d’un #hébergement, d’une #allocation et de l’#accès_aux_soins. En leur interdisant l’accès au marché de l’emploi, on les assigne à une #dépendance, qui leur est ensuite reprochée. Et qui s’est transformée en #précarité extrême – jusqu’à la rue pour certains – à mesure que les réformes successives ont introduit de nombreuses conditions pour accéder et se maintenir dans le #dispositif_d’aide. Des aides par ailleurs attribuées dans la pratique de manière toujours plus tardive, incomplète et fréquemment suspendues sous divers motifs, ou simplement par erreur.

    Les campements sont également fabriqués par le #choix_politique de sous-dimensionner de manière structurelle le #dispositif_d’hébergement dédié aux demandeurs d’asile. Ce choix, car il s’agit bien d’un choix et non d’une fatalité, est spécifiquement français. On ne trouve en effet aucun campement dans les rues des pays européens comparables à la France. Les seuls pays confrontés à ce phénomène sont ceux qui, situés aux portes de l’Europe, conjuguent arrivées massives et contexte économique dégradé, tels la Grèce, la Bulgarie ou l’Italie.

    Au plus fort des mouvements migratoires vers l’Europe en 2015, la France ne recensait que 79 000 demandeurs d’asile (soit 0,1% de sa population) là où l’Allemagne en comptabilisait un million, mais aucun camp de rue. L’#Allemagne a en effet choisi d’ouvrir des #hébergements, réquisitionner des centaines de gymnases et même un ancien aéroport, plutôt que de laisser les exilés dehors. En France, c’est la théorie de l’#appel_d’air, selon laquelle des conditions favorables risqueraient d’attirer les migrants et des conditions défavorables de les dissuader de venir, qui explique le choix de privilégier une politique basée sur l’#insuffisance_structurelle.

    À la fois issu de dynamiques spontanées (des personnes à la rue qui se regroupent pour passer la nuit) et organisées (des soutiens qui apportent nourritures, tentes et vêtements puis qui exigent des pouvoirs publics l’installation de points d’eau et de WC), les campements apparaissent et s’étendent jusqu’au jour où, jugés trop gros et/ou trop visibles, les autorités décident d’une opération d’évacuation. Ces évacuations laissent cependant toujours dans leur sillage les germes du prochain campement.

    Car si une partie des personnes est effectivement mise à l’abri dans des #hôtels pour entrer dans le #dispositif_national_d’accueil, d’autres sont placées dans des #gymnases avant d’être remises à la rue une ou deux semaines plus tard. Un dernier groupe est systématiquement laissé sur le trottoir sans aucune solution, pas même celle de retourner au campement puisque celui-ci a été détruit pour des raisons sanitaires.

    Un sondage organisé par des associations en 2020 a montré qu’une évacuation laisse en moyenne un quart des personnes sans solution le jour même et que près de la moitié de ceux qui sont mis à l’abri se retrouvent à la rue le mois suivant. Les deux-tiers des personnes évacuées l’auraient ainsi déjà été plusieurs fois.

    Rien d’étonnant donc à ce que les campements succèdent aux opérations de mise à l’abri, et inversement. Cela n’empêche pas la préfecture d’annoncer à chaque évacuation, que cette fois c’est la dernière.

    Une question se pose alors. À la soixante-sixième évacuation, alors que l’expérience longue pourrait informer de nouvelles pratiques, pourquoi rien ne change ?

    Est-ce de l’impuissance ? De l’impréparation ? Et si le campement et l’évacuation constituaient des répertoires de l’#action_publique, plutôt que les manifestations d’un phénomène qui la dépassent ? Ils serviraient alors à cadrer le débat en mettant en scène et en image l’immigration comme un problème, un « trop-plein », justifiant selon la théorie – jamais démontrée – de l’appel d’air, une politique de fermeté.

    Le campement : invisible mais pas trop

    Le campement doit pouvoir servir d’illustration sans cependant prendre trop d’ampleur. D’où une gestion subtile par l’État de la visibilité des campements qui nécessite de naviguer habilement entre la #mise_en_scène du débordement et la maîtrise du #désordre.

    Les campements existent de longue date en France (campements Rroms, campements du Calaisis depuis la fin des années 1990) ainsi que les regroupements informels (à Paris, gare de l’Est au début des années 2000, puis à Austerlitz en 2014) mais ne surgissent dans l’espace médiatique qu’à partir de l’été 2015. Leurs images, relayées par les médias et les réseaux sociaux, entrent en résonance avec les messages, différents selon les publics, que les autorités souhaitent faire passer sur l’immigration.

    Aux citoyens français, on montre l’immigration comme problème en mettant en #spectacle des migrants non seulement trop nombreux mais aussi affamés, sales, malades qui suscitent dès lors un mélange d’#empathie, de #dégoût et de #crainte. La persistance des campements malgré les évacuations fait apparaître l’immigration comme un puits sans fond en donnant l’impression qu’on écume, mais que l’inondation est trop importante.

    Aux migrants, c’est le message du #non-accueil (« il n’y a pas de place pour vous ») qu’on espère faire passer par ces images dans l’objectif de faire fuir ceux qui sont déjà là et décourager ceux qui pourraient vouloir venir.

    Mais les campements ne doivent pas non plus être trop visibles car ils peuvent susciter une #solidarité susceptible de se mettre en travers des politiques migratoires restrictives. Pour peu qu’ils soient au cœur des villes, ils peuvent devenir lieux de rencontre, d’apprentissages, d’engagement et de mobilisation. La quasi-totalité des #collectifs_solidaires est ainsi née dans les campements. Leur recrutement dans les milieux non militants et leur mode de fonctionnement agile et horizontal ont largement renouvelé et même bousculé le champ du soutien aux étrangers.

    Les campements, lieux où personne a priori ne souhaite se retrouver, sont ainsi devenus, dans un renversement, un objectif, un moyen d’obtenir quelque chose pour les exilés et leur soutien. Car, paradoxalement, alors que les évacuations avaient pour objectif affiché de faire disparaître les campements, elles ont abouti à en faire une modalité d’accès à l’hébergement, bien souvent la seule.

    « Faire tenir » un campement est devenu dès lors stratégique pour les personnes exilées et les militants. Il constitue non seulement une solution immédiate bien que précaire mais il permet aussi de rendre visible la situation des exilés et susciter par là une solution plus pérenne. Ce n’est dès lors plus seulement le campement mais aussi sa visibilité qui est devenue une ressource, pour les exilés et leurs soutiens. Et c’est bien en retour la lutte contre cette visibilité qui est devenue un enjeu pour les pouvoirs publics.

    D’où l’ambivalence du traitement étatique à l’égard des campements : les laisser se former tant qu’ils restent de petite taille et peu visibles, les évacuer mais jamais complètement ; les tolérer mais pas n’importe où. Surtout pas au centre, à Paris : depuis 2016, la politique de la préfecture de police de la capitale, appuyée en cela par la Mairie, consiste à repousser les campements à la périphérie puis à l’extérieur de la ville. Les consignes des policiers auprès des personnes exilées sont sans ambiguïté : pour espérer poser sa couverture quelque part, il faut partir en dehors de Paris.

    Le campement revient néanmoins sous les feu des projecteurs au moment de l’évacuation organisée comme un spectacle.

    L’évacuation : le spectacle… et ensuite

    L’évacuation est autant une opération de #maintien_de_l’ordre que de #communication. C’est le moment où l’État met en scène sa #responsabilité et sa #fermeté. Son #humanité aussi. Il doit laisser voir un subtil mélange de deux facettes : non, il n’est pas laxiste en matière d’immigration mais oui, il respecte les valeurs républicaines et humanistes. Il doit aussi faire croire aux habitants du campement, comme aux médias, que tout le monde va être mis à l’abri… tout en ayant prévu un nombre de places insuffisant.

    D’où les deux moments de l’évacuation : celui visible du spectacle sur une scène centrale sous les projecteurs, en présence de nombreux acteurs ; puis quand ces derniers sont partis, la suite en coulisses, où la violence peut se déployer à l’abri des regards.

    Après 66 évacuations parisiennes, il est possible d’identifier un #rituel respecté à la lettre. Les mêmes gestes sont répétés avec précision et minutie, sans presque aucune variation.

    D’abord la date : un vrai-faux mystère est savamment entretenu autour du jour de l’évacuation. Certains acteurs, les structures d’hébergement mais aussi les journalistes, doivent être au courant. D’autres, les associations et les personnes exilées, doivent être tenus dans l’ignorance pour limiter les risques d’installations de dernière minute sur le campement. Les collectifs solidaires seront néanmoins les premiers sur place au petit matin pour distribuer boissons chaudes et informations, tenter de récupérer du matériel et surveiller les comportements des policiers.

    Les opérations proprement dites débutent à 5h du matin par l’encerclement du campement par des policiers lourdement équipés ; le préfet arrive, il ouvre la conférence de presse à laquelle assistent les journalistes, les élus et l’opérateur France Terre d’Asile. Il déclare qu’il convient de lutter contre les « #points_de_fixation » que constituent les campements parce qu’ils sont dangereux « pour les riverains comme pour les migrants », il annonce que suffisamment de places ont été mobilisées pour que tout le monde soit hébergé, que c’est la dernière évacuation et que le campement ne se reformera pas. Les journalistes relaient le nombre de places rendues disponibles et interviewent un exilé et un soutien.

    Les exilés montent dans les bus après avoir été fouillés un par un, pendant que leurs tentes, sacs de couchage et autres affaires sont détruites. Les soutiens profitent de la fenêtre d’attention médiatique pour déployer une banderole destinée à être photographiée et relayée sur les réseaux sociaux.

    Alors que les journalistes et les élus sont partis depuis longtemps, on « s’apercevra » qu’il n’y a pas assez de place. Commence alors la seconde partie de l’évacuation. La mise à l’abri prend un sens différent : il s’agit de mettre à l’abri des regards ceux qui demeurent à la rue. Les policiers laissés seuls face à cette pénurie organisée, ayant ordre de faire disparaître « le campement », piochent alors dans leur répertoire : violence verbale et physique, coups de matraque, coups de pied, gaz lacrymo… pour chasser les personnes vers un ailleurs indéfini. Ce que les exilés et les soutiens encore présents s’efforceront de rendre visible par des photos et films sur les réseaux sociaux.

    *

    Comme les « faux mineurs isolés » et les « étrangers qui abusent » (des allocations, du système de soin et d’asile), les campements et leur évacuation sont une figure centrale du #récit_médiatique sur le phénomène migratoire. Pourtant, ils n’en représentent qu’une toute petite partie et nous en disent moins sur ce dernier que sur nos choix politiques. Ce récit sert tout autant à raconter une histoire qu’à en taire une autre.

    Les campements et les évacuations racontent l’immigration comme #problème et les étrangers comme trop nombreux et trop coûteux pour pouvoir être bien accueillis. L’horizon des politiques migratoires est dès lors restreint à une seule question : comment réduire le nombre des arrivées et éviter les « appels d’airs » ? Ainsi racontée, l’histoire interdit de prendre le recul nécessaire à une compréhension fine du phénomène migratoire. Elle dirige toutes les ressources vers le #non_accueil, le #contrôle et la #répression et les détourne de l’investissement dans l’accueil, la formation, l’insertion et tous les autres outils permettant aux étrangers de construire leur place dans notre société.

    Ce #récit laisse dans l’ombre l’histoire d’un #État qui condamne à la misère les nouveaux arrivants en les privant du droit de travailler, substitué par un système d’accueil structurellement sous-dimensionné et de moins en moins accessible. Il permet enfin de continuer à ignorer les recherches qui depuis maintenant plus de 30 ans démontrent de manière presque unanime que l’immigration est très loin de constituer un problème, économique, social ou démographique.

    Les campements sont un répertoire des politiques migratoires et non la conséquence d’un #trop_plein. Ils perdurent jusqu’à ce jour car ils sont non seulement le résultat mais aussi une justification des politiques migratoires restrictives. À rebours du campement et des impasses qui nous tiennent aujourd’hui lieu de politique, les recherches et les pratiques de terrain, vivifiées par l’émergence en 2015 d’un mouvement solidaire inédit, inventent des #alternatives et dessinent des perspectives où l’immigration n’est ni un problème ni une solution, mais bien ce qu’on en fait.

    https://aoc.media/analyse/2021/01/05/de-lusage-des-campements-dans-les-politiques-migratoires
    #campement #migrations #asile #réfugiés #Karen_Akoka #Aubépine_Dahan #précarisation #visibilité #in/visibilité #vide #plein #droit_au_travail #travail #SDF #sans-abris #sans-abrisme #destruction #ressources_pédagogiques

    ping @isskein @karine4

  • Les « #instant_cities » – Villes réimaginées sans histoire, sans avenir

    Le thème des « instant cities », ces villes bâties du jour au lendemain, revient dans les débats des urbanistes et architectes, inspirés par l’expérience des campements et autres zones à défendre (ZAD). L’anthropologue #Michel_Agier nous entretient du sujet dans un texte publié sur le site AOC : https://aoc.media/opinion/2020/09/28/utopie-dystopie-non-fiction-faire-ville-faire-communaute-3-3

    #Utopie, #dystopie, #non-fiction#Faire_ville, faire communauté

    Le thème des « instant cities », ces villes bâties du jour au lendemain, revient dans les débats des urbanistes et architectes d’aujourd’hui, inspirés par l’expérience des #campements et autres #ZAD. La ville est ré-imaginée sans histoire et sans avenir, comme marquée d’abord par l’#immédiateté, l’#instantanéité et la #précarité. Des réflexions qui rejoignent celles de l’ethnologue qui se demande ce que « faire ville » veut dire, elles permettent de penser la ville en se libérant de la contrainte du réel et du présent, comme le font le plus librement les fictions post-catastrophe.

    Avec la montée des #incertitudes et des formes de vie précaires dans toutes les régions du monde et plus particulièrement dans les contextes migratoires, le thème des instant cities (villes « instantanées », bâties « du jour au lendemain ») revient dans les débats des urbanistes et architectes d’aujourd’hui, et peuvent aider à penser la ville de demain en général. Le thème est ancien, apparu dans les années 1960 et 1970, d’abord avec l’histoire des villes du #far_west américain, nées « en un jour » et très vite grandies et développées comme le racontent les récits de #San_Francisco ou #Denver dans lesquels des migrants arrivaient et traçaient leurs nouvelles vies conquises sur des espaces nus.

    À la même époque, des architectes anglais (Peter Cook et le groupe #Archigram) s’inspiraient des lieux de #rassemblements et de #festivals_précaires comme #Woodstock pour imaginer des villes elles-mêmes mobiles – une utopie de ville faite plutôt d’objets, d’images et de sons transposables que de formes matérielles fixes. Troisième forme desdites instant cities, bien différente en apparence, celle qui est allée des villes de l’instant aux « #villes_fantômes », à l’instar des utopies graphiques des #villes_hors-sol construites en Asie, dans le Golfe persique et au Moyen-Orient principalement, sur le modèle de #Dubaï.

    Nous sommes aujourd’hui dans une autre mise en œuvre de ce modèle. En 2015, la Cité de l’architecture et du patrimoine montrait l’exposition « Habiter le campement » qui réincarnait très concrètement le concept à travers les rassemblements festivaliers (la « ville » de trois jours du festival #Burning_Man aux États-Unis), mais aussi les campements de #yourtes pour les #travailleurs_migrants, les #campings et #mobile_homes pour touristes et travellers, ou les #camps-villes pour réfugiés. Allant plus loin dans la même démarche, le groupe #Actes_et_Cité publie en 2018 l’ouvrage La ville accueillante où, inspirées de l’expérience du « #camp_humanitaire » de la ville de #Grande-Synthe, différentes solutions d’espaces d’#accueil sont étudiées (quartiers d’accueil, squats, campements aménagés, réseau de maisons de migrants, etc.), leur rapidité de mise en œuvre (quelques semaines) et leur coût réduit étant des critères aussi importants que leur potentiel d’intégration et d’acceptation par la population établie.

    On pourrait encore ajouter, pour compléter ce bref tour d’horizon, le géant suédois du meuble #Ikea qui, après une tentative d’implantation dans le marché des abris pour camps de réfugiés en association avec le HCR dans les années 2010-2015, a lancé en 2019 « #Solarville », un projet de #Smartcity fondé sur l’architecture en bois et l’énergie solaire.

    L’idée de la #table_rase permet de penser la ville en se libérant de la contrainte du réel et du présent, comme le font le plus librement les fictions post-catastrophes.

    Le point commun de toutes ces expériences d’instant cities est leur ambition de réduire, voire de supprimer l’écart entre le #temps et l’#espace. Immédiateté, instantanéité et #précarité de la ville, celle-ci est ré-imaginée sans histoire et sans avenir. Sans empreinte indélébile, la ville se pose sur le sol et ne s’ancre pas, elle est associée à la précarité, voire elle-même déplaçable. Ce seraient des villes de l’instant, des #villes_présentistes en quelque sorte. Dans tous les cas, l’idée de la table rase, image du rêve extrême de l’architecte et de l’urbaniste, permet de penser la ville en se libérant de la contrainte du réel et du présent, comme le font le plus librement les #fictions_post-catastrophes. Dans leur excentricité même, ces images et fictions dessinent un horizon de villes possibles.

    C’est cette ville à venir que j’aimerais contribuer à dessiner, non pas pourtant à partir de la table rase de l’architecte, mais à partir de l’ethnographie d’une part au moins du présent. Un présent peut-être encore marginal et minoritaire, et donc hors des sentiers battus, quelque chose d’expérimental pour reprendre le mot très pragmatique de Richard Sennett, peu visible encore, mais qui a toutes les chances de s’étendre tant il sait répondre à des besoins croissants, dans cet avenir qui nous inquiète.

    C’est dans un « #présent_futuriste » que j’ai trouvé quelques éléments de réponse, un futur déjà là, quelque peu anachronique donc, mais aussi inédit, tout à fait décentré de la ville historique, notamment européenne, à laquelle nous nous référons encore trop souvent pour penser l’universalité des villes. Je me suis familiarisé avec la vie quotidienne des zones de #marges ou frontières, de #borderlands, et avec celles et ceux qui les habitent ou y passent. Rien d’exotique dans cela, rien d’impossible non plus, ce sont des lieux quelconques réinvestis, détournés, occupés pour un temps plus ou moins long, des déplacements et des attachements plus ou moins profonds aux lieux de résidence, de passage ou de refuge, et ce sont des événements – politiques, catastrophiques ou artistiques, prévus ou fortuits – créateurs d’échanges, éphémères ou non, et nous faisant occuper et donner un sens à des lieux parfois inconnus. Ces formes sociales, ces moments partagés, toutes ces situations rendent les espaces fréquentés plus familiers, partagés et communs, même sans en connaître le devenir.

    Loin d’être exceptionnelle, cette expérience de recherche m’a semblé expérimentale et exemplaire d’un certain futur urbain. Cela résonne avec les propos des urbanistes rebelles qui pensent comme #Jane_Jacob ou #Richard_Sennett un urbanisme pratique – ou « pragmatique », dit lui-même Sennett, qui ancre depuis longtemps sa réflexion dans l’#homo_faber, dans le faire de l’humain. Il faut, écrit-il, « placer l’homo faber au centre de la ville ». C’est ce que je ferai ici, en poursuivant cette interrogation sur le faire-ville dans sa double dimension, qui est de faire communauté, créer ou recréer du commun, et de faire la ville, c’est-à-dire l’inventer et la fabriquer.

    Une écologie et une anthropologie urbaines sont tout à inventer pour le monde à venir.

    C’est un présent futuriste fait d’étranges établissements humains : des armatures flexibles, modelables à volonté, des murs transparents, des cubes réversibles ou transposables. Curieusement, ces lieux font d’emblée penser à une ville mais précaire et #démontable, ce sont des #agglomérations_temporaires dont la matière est faite de murs en toile plastifiée, de charpentes en planches, en tubes métalliques ou en branchages, de citernes d’eau en caoutchouc, de canalisations et latrines en prêt-à-monter, prêt-à-défaire, prêt-à-transporter.

    Les lumières de la ville sont intermittentes et blafardes, fournies par des moteurs électrogènes mis en route à chaque nouvelle arrivée (fruit d’un désordre ou d’une catastrophe), devenue elle-même prévisible tout comme ses conséquences techniques – ruptures dans les flux et les stocks d’énergie, de nourriture ou de services. Les va-et-vient incessants de camions blancs bâchés emmènent des grandes quantités de riz, de boulgour et de personnes déplacées. Parfois, sur quelques terrains vagues, d’autres enfants jouent au football, ou bien des adultes inventent un terrain de cricket.

    À partir de la matière première disponible dans la nature (terre, eau, bois de forêt) ou de la matière résiduelle de produits manufacturés disponible (planches, palettes, bâches plastifiées, toiles de sac, feuilles métalliques d’emballage, plaques de polystyrène), des habitants bricolent et pratiquent une #architecture_adaptative, réactive, avec les moyens du bord, comme ailleurs ou autrefois une architecture des #favelas ou des #bidonvilles. Des maisons en pisé côtoient d’autres constructions en tissus, carton et tôle. Cette matérialité est en constante transformation.

    Malgré la surprise ou la perplexité qu’on peut ressentir à l’énumération de ces étranges logistiques urbaines, ce n’est pas de la fiction. Ce sont mes terrains d’#ethnographie_urbaine. On y verra sans doute une #dystopie, un mélange cacophonique de prêt-à-monter, de #récupérations et de #bricolages, j’y vois juste l’avenir déjà là, au moins sur les bords, dans un monde certes minoritaire (en Europe au moins), frontalier, à la fois mobile et précaire, mais terriblement efficace et qui a toutes les chances de s’étendre. #Ville_en_kit serait le nom de ce modèle qui viendrait après celui de la ville historique et rejoindrait, « par le bas », celui de la ville générique, dont il serait l’envers moins visible.

    Une écologie et une anthropologie urbaines sont tout à inventer pour le monde à venir, nous n’en connaissons encore presque rien si ce n’est qu’elles seront marquées par une culture de l’#urgence, du présent et de l’#incertitude, organisant et meublant des espaces nus ou rasés ou abandonnés, pour des durées inconnues. Ce qui est marquant est la répétition du #vide qui prévaut au premier jour de ces fragiles agglomérations, mais aussi la résurgence rapide de la #vie_sociale, de la #débrouille_technique, d’une #organisation_politique, et de la quête de sens. Cette ville en kit semble plus périssable, mais plus adaptable et « résiliente » aussi que la ville historique, qu’il nous faut donc oublier. Celle-ci était délimitée dans des enceintes visibles, elle était en dur, elle se développait de plus en plus à la verticale, avec ses voies goudronnées vite saturées de véhicules et de bruits. Cette ville historique maintenant implose, pollue et expulse les malchanceux au-delà de ses limites, mais elle continue de fournir le modèle de « la ville » dans le monde. Pourtant, le modèle s’écarte des réalités.

    On peut s’interroger sur le caractère utopique ou dystopique des #imaginaires_urbains qui naissent de l’observation des contextes dits « marginaux » et de leur permanence malgré leurs destructions répétées partout. Faut-il opposer ou rapprocher une occupation de « ZAD », une invasion de bidonvilles et une installation de migrants sans abri devenue « #jungle », selon le pourquoi de leur existence, toujours spécifique, ou selon le comment de leur processus, toujours entre résistance et adaptation, et les possibles qu’ils ont ouverts ? Si ces établissements humains peuvent être considérés, comme je le défends ici, comme les tout premiers gestes d’un processus urbain, du faire-ville dans son universalité, alors il convient de s’interroger sur ce qu’ils ouvrent, les décrire en risquant des scénarios.

    Ce partage d’expériences suppose une prise de conscience de l’égalité théorique de toutes les formes urbaines.

    Comment passe-t-on de cette #marginalité qui fait #désordre à de la ville ? Une pensée concrète, une #architecture_an-esthétique, un #habitat_minimal, évolutif, peuvent rendre #justice à ces situations et leur donner une chance d’inspirer d’autres expériences et d’autres manières de faire ville. Je reprends là en partie quelques-uns des termes de l’architecte grec et français #Georges_Candilis (1913-1995), pour qui l’observation directe, au Pérou, dans la périphérie de Lima, au début des années 70, d’un processus d’installation et construction d’une « #invasión » fut un choc. Dans la nuit, « des milliers de personnes » avaient envahi un terrain vague « pour construire une nouvelle ville », l’alerta son collègue péruvien.

    C’est moins l’invasion elle-même que la réaction de l’architecte européen qui m’intéresse ici. Longtemps collaborateur de Le Corbusier, Candilis a ensuite passé des années à concevoir, en Europe essentiellement, des très grands ensembles à bas prix, pour « les plus démunis ». Il voit dans le mouvement d’invasion urbaine à Lima un « raz de marée populaire », devant lequel les autorités cèdent et qui va « construire une maison, une ville, sans matériaux ni architectes, avec la seule force du Plus Grand Nombre et le seul espoir de survivre ». Le deuxième jour de l’invasion, sous les yeux de l’architecte devenu simple témoin, les maisons commencent à s’édifier avec des matériaux de récupération, des quartiers se forment et les habitants (« y compris les enfants ») votent pour désigner leurs responsables. « J’assistais émerveillé, écrit Candilis quelques années plus tard, à la naissance d’une véritable “communauté urbaine” », et il évoque, enthousiaste, « l’esprit même de la ville ».

    Je ne pense pas qu’il ait voulu dupliquer en France ce qu’il avait vu à Lima, mais certainement s’inspirer de ses principes. Il exprimait l’intense découverte que cet événement avait représentée pour lui, et surtout le fait que le faire-ville passe par un événement, qui est l’irruption d’un sujet citadin, porteur de l’esprit de la ville et faiseur de communauté urbaine. C’est ce sujet citadin et cette communauté urbaine qui font la ville et qui permettent de penser à nouveaux frais le modèle des instant cities, en le renversant sur lui-même en quelque sorte, contre l’idée qu’il puisse naître hors-sol et qu’il puisse produire des villes fantômes qui attendront leur peuplement.

    Ce partage d’expériences, pour devenir systématique et efficace sans être du mimétisme ni du collage formel, suppose une prise de conscience de l’égalité théorique de toutes les formes urbaines, que j’ai rappelée au tout début de cette réflexion. C’est une démarche qui ne demande ni exotisme ni populisme, mais une attention à ce qu’il y a de plus universel dans le #faire-ville, qui est une énergie de #rassemblement et de #mise_en_commun, dont la disparition, à l’inverse, engendre les étalements diffus et les ghettos qu’on connaît aussi aujourd’hui.

    https://formes.ca/territoire/articles/les-instant-cities-villes-reimaginees-sans-histoire-sans-avenir
    #villes_instantanées #urban_matter #urbanisme #présent #passé #futur

  • Les exilé·es chassé·es de la #République. #Violence d’un soir, continuité d’une politique

    Lundi soir, place de la République, les forces de police ont brutalement appliqué le principe "#zéro_tolérance" qui résume à lui seul la politique de #harcèlement méthodiquement menée contre les exilé·es qui tentent, faute de solutions d’hébergement, de survivre en s’installant dans les #interstices de l’#espace_public.

    Au cœur de #Paris, sur cette place symbole et sous le regard de témoins qui peuvent et savent se faire entendre, la violence de cette politique est devenue visible : les coups, les tentes arrachées et confisquées, leurs occupant·es pourchassé·es à coups de grenades lacrymogènes ou de désencerclement ont répliqué à la "constitution d’un campement" qui n’était tout simplement "pas acceptable" selon le communiqué par lequel la préfecture de police et celle de la région Île-de-France (Prif) ont tenté de justifier "la dispersion de cette occupation illicite ».

    Cette opération de police n’a fait que mettre en évidence le traitement que les exilé·es subissent, en réalité, depuis des mois sinon des années. En tout cas depuis que la doctrine du gouvernement repose sur un même credo : parce que leur seule présence n’est "pas acceptable", empêcher qu’ils se rassemblent, disperser tout regroupement, interdire la (re)constitution de tout ce qui peut ressembler, de près ou de loin, à un lieu de vie. Et pour ce faire, entraver et discréditer l’action de toutes celles et ceux qui tentent de substituer l’entraide à l’isolement, la solidarité au dénuement.

    Que personne ne s’y trompe, ces #violences sont depuis longtemps le lot quotidien des habitants des #campements. À Paris et dans les environs de Paris où, par exemple, celles et ceux que la dispersion de celui de Saint Denis, le mardi précédent, avait laissé·es sans solution d’hébergement étaient, ces derniers soirs, systématiquement traqués jusque dans les fourrés où ils étaient contraints de se cacher.

    Si la brutalité policière de la place de la République justifie pleinement les condamnations indignées qu’elle suscite, elle n’a pour autant rien à envier à celle que subissent pareillement, à Calais et dans sa région, les centaines d’exilé·es qui tentent, depuis plusieurs années, de survivre dans le même dénuement et où sévit, sous l’autorité du ministre de l’intérieur, la même politique d’éradication des "points de fixation". Dispersion systématique des campements, harcèlement policier permanent, confiscation des tentes et des effets personnels, coups, invectives, gazages, sont régulièrement constatés et documentés par les associations et bénévoles qui, dans une indifférence fataliste, s’épuisent à tenter d’inverser la logique du rejet.

    En confiant une enquête à l’IGPN sur les événements de la place de la République, le ministre feint d’ignorer que le mauvais scénario qui s’y est joué n’est que la réplique de l’action constante de ses forces de police et le produit d’une politique délibérée qui prétend faire du harcèlement une méthode de dissuasion. Aurait-il soudainement pris conscience des excès, voire même des impasses, de la guerre d’usure ainsi menée contre les exilé·es ?

    Ce serait un revirement spectaculaire de celui qui, après avoir reçu la maire de Calais le 10 septembre dernier, annonçait le renforcement des effectifs de CRS et avoir demandé au préfet du Pas de Calais de prendre un arrêté interdisant aux associations de distribuer de la nourriture aux exilé·es dans le centre de la ville [1].

    « Choquantes », c’est le qualificatif que Gérald Darmanin a choisi à propos des images et vidéos non floutées que les réseaux sociaux ont permis de diffuser et qui lui auraient ouvert les yeux sur les violences exercées par ses propres services.

    Si d’aventure il entendait convaincre de sa volonté de tourner le dos à la politique sur laquelle les événements de la place de la République ont jeté une lumière crue, le retrait du projet de loi sur la sécurité globale serait un premier test de sa sincérité.

    https://www.gisti.org/spip.php?article6508
    #violences_policières #asile #migrations #réfugiés #destruction #démantèlement #France #23_novembre_2020
    #place_de_la_République

    • Evacuation de la place de la République : le #rapport vite fait mal fait de l’#IGPN

      Dans son rapport de synthèse sur la soirée de lundi, rendu public sur décision de Gérald Darmanin, la « police des polices » n’évoque que trois scènes. Et concède d’éventuels #manquements dont deux sont déjà aux mains de la justice.

      C’est la copie médiocre d’un élève pris par le temps, mais obligé de rendre son devoir. Saisie d’une #enquête_administrative sur l’évacuation de la place de la République, lundi soir, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) explique qu’elle a fait de son mieux compte tenu du délai imparti et du cadre posé : « la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos et de messages évoquant des comportements inappropriés de policiers ».

      Dans un « rapport de synthèse » de deux pages adressé au préfet de police de Paris Didier Lallement et rendu public jeudi soir (à télécharger ici) – Gérald Darmanin s’y était engagé –, la directrice de l’IGPN s’excuse presque. « Dans le temps imparti (48 heures), je ne peux vous rendre compte que des conclusions provisoires qui sont contenues dans les trois rapports d’enquête joints. » Lesdits rapports restent confidentiels, les citoyens ayant seulement accès à leur substantifique moelle.

      Il faut souligner, d’abord, ce que le rapport de synthèse n’évoque pas. Rien sur le dispositif policier en lui-même, sa pertinence, sa proportionnalité, les ordres donnés, le recours à des BAC de nuit plutôt qu’à des unités spécialisées dans le maintien de l’ordre. Rien sur les nasses dans lesquelles se sont retrouvés piégés des manifestants et des élus, des avocats, des journalistes. Rien, surtout, sur les migrants vidés de leurs tentes comme des jambons, les affaires confisquées, les chaussures manquantes, la poursuite dans les rues puis la reconduite aux frontières de Paris.

      Invité sur France 2 pour une interview de sept minutes, jeudi soir, le ministre de l’intérieur n’a développé aucun discours critique sur le déroulement de l’opération, renouvelant son soutien au préfet de police. Gérald Darmanin a rappelé que la manifestation place de la République était « illégale » puisque sans « aucune autorisation ». « J’ai demandé qu’on évacue, bien sûr, cette place », a ajouté le ministre, appelant ses concitoyens à ne pas « toujours juger dans l’émotion » provoquée, selon lui, par les images.

      Le rapport de l’IGPN ne porte pas sur la soirée entière mais sur trois scènes, filmées et largement relayées sur les réseaux sociaux comme dans les médias traditionnels. Deux d’entre elles ont déclenché, mardi, l’ouverture d’enquêtes préliminaires menées par le parquet de Paris pour « violences par personne dépositaire de l’autorité publique ». C’est sur celles-là que le rapport s’attarde.

      La première scène montre le croche-pied d’un policier sur un migrant qui tombe au sol, interrompu dans sa fuite. L’auteur de ce croche-pied, un commissaire divisionnaire de la BAC nuit en Seine-Saint-Denis, a reconnu son geste, qu’il explique par la fatigue, la lassitude et un dispositif de maintien de l’ordre mal construit.

      Selon le rapport de synthèse, ce commissaire « avait reçu la mission d’empêcher les usagers d’emprunter la rue dont il tentait d’interdire l’accès ». « S’il est possible de comprendre qu’au regard de ces instructions, il ait envisagé un moyen pour ralentir ou stopper la progression des manifestants, […] le barrage qu’il constituait quasiment seul n’était ni efficace ni inviolé. »

      Compte tenu du risque de blessure grave, et puisque l’homme qui court ne représente aucune menace, l’IGPN conclut que ce geste, choisi « sans doute en une fraction de seconde », constitue « un manquement par un usage disproportionné de la force ». Le ministre a complété au 20 heures : pour cet acte « totalement injustifié », il réclame un conseil de discipline, l’organe interne à la police qui propose des sanctions.

      La deuxième scène, faisant également l’objet d’une enquête judiciaire, montre le journaliste de Brut, Rémy Buisine – même si le rapport prend soin de flouter son nom – recroquevillé au sol, contre un mur, un policier s’agitant au-dessus de lui. Le journaliste a fait savoir, par la suite, que le même agent s’en était pris trois fois à lui dans la soirée. Mais les vidéos de ce moment précis ne permettent pas de discerner, il est vrai, s’il reçoit des coups.

      À ce sujet, le rapport de l’IGPN souligne dans un langage administratif alambiqué que « les constatations réalisées sur la vidéo, malgré l’impression donnée par les images, ne font état d’aucun coup porté par le policier avec les poings ou avec la matraque ». Il résume l’audition du gardien de la paix, qui « nie tout acte de violence, ayant simplement cherché à se dégager d’une situation de corps à corps ».

      Les déclarations de ce policier n’étant « ni corroborées ni infirmées » par d’autres témoignages ou d’autres vidéos, l’IGPN promet de continuer ses investigations « pour compléter et déterminer s’il y a eu usage de la force, pour quelles raisons éventuelles et dans quelles conditions M. Buisine s’est retrouvé allongé au sol ».

      Au détour d’une phrase, le rapport souligne que « l’usager victime n’a pas répondu aux sollicitations de l’IGPN », ce qu’a répété le ministre de l’intérieur sur France 2. « C’est bien évidemment faux, je reste à disposition des enquêteurs dans les plus brefs délais », a répondu Rémy Buisine quelques minutes plus tard.

      Le gardien de la paix mis en cause par Rémy Buisine, appartenant lui aussi à la BAC de nuit du 93, est visible sur d’autres images au cours de la soirée. L’IGPN écarte tout manquement professionnel dans la troisième scène, tendue, où ce fonctionnaire écarte un manifestant d’un coup de pied à l’entrejambe. Car pour l’IGPN, il ne s’agit pas d’un simple coup de pied, mais d’un « chassé frontal », geste technique d’intervention enseigné dans les écoles de police.

      « La technique a été mise en œuvre avec un objectif à ce moment précis de maintien à distance. Le danger (attitude offensive et agressive des manifestants) était réel et de plus en plus imminent. » Ce policier sans casque ni bouclier, qui selon l’IGPN ne disposait pas non plus de gazeuse lacrymogène, « semble avoir utilisé la seule possibilité qu’il avait de repousser ses agresseurs. […] Il a atteint son objectif et n’a pas blessé d’usager ».

      Anticipant, peut-être, les critiques, voire les moqueries, l’IGPN prend soin de rappeler que « tout usage de la force, quelle que soit l’analyse technique et juridique que l’on puisse en faire, est par nature choquant pour des observateurs ». Mais qu’elle se doit de « décortiquer les images » pour en proposer une analyse légale et déontologique. Ce geste, le seul examiné dans son rapport à ne pas faire l’objet d’une enquête pénale, lui semble donc conforme aux canons de la profession.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/261120/evacuation-de-la-place-de-la-republique-le-rapport-vite-fait-mal-fait-de-l

    • #Fabien_Jobard, sociologue, à propos de l’#évacuation de la place de la #République

      #Fabien_Jobard, sociologue, à propos de l’#évacuation de la place de la #République : « Cela illustre la hantise des pouvoirs publics de tout mouvement qui s’installe. Les préfets aujourd’hui sont formés à craindre tout ce qui peut ressembler à une zone d’occupation temporaire ».

      https://twitter.com/_alairlibre/status/1331300451833274372

      Transcription :

      "La hantise de la part des pouvoirs publics de tout mouvement qui s’installe quelque part... Les préfets aujourd’hui sont formés en France à craindre tout ce qui peut, de près ou de loin, ressembler à une #zone_d'occupation_temporaire, voire le pire de tout, une #ZAD.
      En ce qui concerne les migrants, la #peur du #campement.
      Effectivement, on intervient le plus tôt possible, pour éviter que se mettent en place des #habitudes : apporter de la #nourriture, apporter de l’eau, mettre en place des toilettes sèches, que sais-je... qui transforment la Place la république et qui rendent, plus tard, l’évacuation médiatiquement plus difficile. Cela explique une intervention très précoce, brutale, quasi-instantanée, qui a l’avantage en plus, puisqu’on est dans une #bataille_de_l'image... la manifestation... c’est rendre manifeste, rendre visible les choses. Là, elle a l’avantage, en hiver, de se dérouler de #nuit, donc ça explique cette intervention très rapide. Bien sûr les migrants ne sont pas seuls, il y a autour d’eux depuis au moins les années 1970 tout un ensemble d’associations , y compris d’#élus, d’élus locaux, #Audrey_Pulvard, d’élus nationaux comme #Eric_Coquerel... et donc ça donne ces #images difficilement compréhensibles d’élus de la République ne pouvant être entendus, ne parlant presque pas la même langue que des policiers qui semblent exécuter des #ordres venus d’une #autorité très lointaine.

      #Place_de_la_république #points_de_fixation #fixation

    • La #violence comme seul horizon politique

      Inacceptable ; c’est le mot qu’a utilisé le préfet de police de Paris, à propos de l’« #occupation_illicite » de la place de la République après que des exilé·es y ont installé une centaine de tentes, pour justifier la violence rare avec laquelle a été menée, le 24 novembre, leur « #dispersion ».

      Sans doute estimait-il « acceptable » que plusieurs centaines de personnes qui n’avaient pas été prises en charge une semaine auparavant, lors de l’évacuation du campement dans lequel elles survivaient depuis plusieurs semaines porte de Paris, à Saint-Denis, soient privées de toit, contraintes à l’errance et exposées au harcèlement policier.

      Depuis des mois, les violences à l’égard des personnes exilées se sont amplifiées, que ce soit dans le nord-ouest de la France [1], le long de la frontière franco-italienne ou à Paris et dans sa périphérie. Celles infligées lors des opérations de démantèlement de leurs campements – au caractère hautement politique – sont particulièrement impressionnantes.

      Le 17 novembre, une énième expulsion – c’est le 65e démantèlement de grande ampleur en Île-de-France depuis 2015 – mobilise d’importantes forces de police dès 4 heures du matin. Il s’agit, comme chaque fois, de « mettre à l’abri » – provisoirement et dans des hébergements d’urgence [2] – des personnes survivant dans des conditions insalubres et contraires à la dignité humaine. Comme chaque fois, des centaines d’entre elles ne peuvent même pas grimper dans le bus qui les mènerait vers cet hébergement, juste pour souffler. Car, comme chaque fois, l’opération policière n’a pour but que de les faire disparaître. Cette fois encore, les forces de l’ordre ont pourchassé tou·tes ces recalé·es de l’hébergement en banlieue nord et jusque dans les rues de la capitale pour les empêcher de poser leur tente. Au cours des nuits qui ont suivi, la chasse à l’homme a continué avec une violence inouïe.

      Pour que leur sort ne reste pas dans l’ombre, des exilé·es, rejoint·es par des militant·es, ont installé un campement symbolique place de la République en plein cœur de Paris. Dans l’espoir que, leur situation étant ainsi exposée, des solutions de mise à l’abri pérenne leur soient proposées. Mais le préfet de police ne l’entendait pas ainsi et ses troupes, mobilisées en hâte, ne les ont pas lâché·es ; il ne leur a pas fallu plus d’une heure pour sortir les matraques, les grenades lacrymogènes ou de désencerclement et les LBD. Des vidéos, largement diffusées sur les réseaux sociaux, montrent des policiers soulevant des tentes et les secouant pour en faire tomber les occupants, et jetant dans un camion le peu d’affaires que les exilé·es avaient réussi à conserver… Tolérance zéro. Et à nouveau, la traque impitoyable et indigne a recommencé.

      Rarement mises en évidence et condamnées, les violences policières ont cette fois suscité de nombreuses réactions d’indignation, y compris de responsables politiques dont on pourrait attendre qu’ils mobilisent les moyens à leur disposition plutôt que de se contenter de protestations, aussi bienvenues soient-elles. Au demeurant, elles ne peuvent faire oublier que ces violences s’inscrivent dans la continuité de la politique d’éradication des « points de fixation » méthodiquement menée depuis plusieurs années tant à Paris qu’à la frontière britannique ; parce que leur seule présence n’est « pas acceptable », il s’agit d’empêcher que les exilé·es se rassemblent et d’interdire la (re)constitution de tout ce qui peut ressembler à un lieu de vie. Et, pour ce faire, d’entraver et de discréditer l’action de toutes celles et ceux qui tentent de substituer l’entraide à l’isolement, la solidarité au dénuement [3].

      Plusieurs actions sont en cours pour dénoncer ces violences commises devant des journalistes, des membres d’associations et des élu·es, comme la demande de mise en place d’une commission d’enquête parlementaire et le dépôt de plaintes pénales groupées pour violences volontaires et dégradations de biens. On espère qu’elles auront plus de succès que l’enquête confiée à l’IGPN par le ministre de l’intérieur qui s’est dit « choqué » par les événements de la place de la République… feignant d’ignorer qu’ils sont la réplique de l’action constante de ses forces de police et le produit d’une politique délibérée qui prétend ériger le harcèlement en méthode de dissuasion.

      Si le ministre a dû se résoudre à cette désapprobation minimaliste, c’est qu’il ne pouvait que s’incliner devant l’évidence après la circulation de vidéos montrant la violence des forces de l’ordre. Ces images, sans appel, font écho au délit que le gouvernement tente d’intégrer dans la proposition de loi sur la sécurité globale. Les diffuser pourrait, désormais, être passible d’emprisonnement ! En muselant les défenseurs des libertés publiques, le gouvernement veut imposer un monopole policier sur le récit des opérations dites de maintien de l’ordre.

      L’invisibilisation est de longue date un élément central des politiques ignorant les droits et rejetant a priori toute revendication des exilé·es, que les gouvernements voudraient isoler dans un face-à-face à huis clos avec les forces de l’ordre. En cherchant à priver l’ensemble des mouvements sociaux du « droit à l’image », le gouvernement franchit une nouvelle étape de son projet visant à étouffer les voix dissidentes sous la pression policière. Ne le laissons pas faire. Nous ne renoncerons pas à opposer la réalité vécue par les exilé·es aux « éléments de langage » institutionnels.

      https://www.gisti.org/spip.php?article6526

  • Réfugiés : #violences et #chaos dans le nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine
    Traduit et adapté par Manon Rumiz (Article original : https://www.balcanicaucaso.org/aree/Bosnia-Erzegovina/Migranti-caos-Bosnia-204594)

    Squats démantelés, familles déportées et laissées sans aide au bord de la route, violentes manifestations anti-migrants.... Dans le canton d’Una-Sana (nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine), la situation des réfugiés devient toujours plus dramatique.

    « C’est le chaos. » Voilà comment Silvia Maraone, qui coordonne les activités de l’ONG italienne Ipsia (https://www.facebook.com/IPSIA.BIH) à #Bihać, résume la situation actuelle dans le canton d’#Una_Sana, explosive depuis le milieu de l’été. « Les conditions imposées par le gouvernement local n’offrent plus de répit à personne. Même les familles, les femmes et les enfants n’ont plus accès aux #camps officiels. Quant aux transports en commun, ils sont désormais interdits aux réfugiés, ce qui permet aux trafiquants de faire des affaires encore plus lucratives. »

    Dans le même temps, la police expulse les #squats et tous les #camps_informels, renvoyant les réfugiés hors des frontières du canton. La population locale, de son côté, manifeste ouvertement son hostilité face à la présence massive de candidats à l’exil. Les agressions verbales et physiques se multiplient, ainsi que les attaques contre les volontaires.

    “Le canton d’Una Sana est plus que jamais le #cul-de-sac de la route des Balkans.”

    Du fait de la #pandémie et de la proclamation de l’#état_d’urgence, la situation s’est encore détériorée depuis le printemps. Les camps officiels, déjà pleins, n’accueillent plus de nouveaux entrants alors mêmes que les arrivées ont repris depuis la réouverture des frontières au mois de juin. Le canton d’Una Sana est plus que jamais le cul-de-sac de la route des Balkans, d’autant qu’à l’ouest, le jeu de domino entre les polices italienne, slovène et croate se poursuit, aboutissant au #refoulement des migrants interceptés dans cette zone frontalière de l’Union européenne.

    La seule réponse apportée par les autorités locales a été l’ouverture, en avril, d’un « #camp_d’urgence » à Lipa, entre Bihać et #Bosanski_Petrovac, dont le millier places a vite été rempli. Les squats se sont donc multipliés dans les #friches_industrielles et dans les bois. De toute façon, les migrants ne souhaitent pas rester ici et le « #game » continue : chaque jour, ils sont des centaines à tenter de déjouer la surveillance de la frontière croate avec l’espoir de ne pas être arrêté avant d’avoir atteint l’Italie.

    Le début du « chaos » qu’évoque Silvia Maraone remonte à la mi-juillet, avec l’expulsion du camp de fortune qui s’était créé à l’entrée de #Velika_Kladuša, près du camp officiel de #Miral, le long de la rivière #Kladušnica. Officiellement, l’opération a été déclenchée à cause des plaintes répétées des riverains. Début août, la police est revenue pour chasser les migrants qui avaient reconstitué un nouveau camp.

    « #Milices_citoyennes »

    Quelques jours plus tard, le maire de Bihać, #Šuhret_Fazlić, déclarait que la situation était aussi devenue insoutenable dans sa commune. « Cela n’a jamais été pire qu’aujourd’hui. Chaque jour, nous assistons à l’arrivée d’un flux incontrôlé de migrants. Il y en a déjà des milliers qui campent un peu partout. Une fois de plus, on nous laisse seuls », avant de conclure, menaçant : « Nous sommes prêts à prendre des mesures radicales ». Ce n’est pas la première fois que le maire de Bihać tire la sonnette d’alarme. Début 2018, au tout début de la crise, l’édile déplorait déjà le manque de soutien des autorités de la Fédération, l’entité croato-bosniaque dont dépend le canton, et nationales. À l’automne 2019, Silvia Maraone s’inquiétait aussi : « La situation ne fera qu’empirer dans les mois qui viennent si de nouveaux camps officiels ne sont pas ouverts d’urgence ».

    Selon les chiffres officiels, plus de 80% des réfugiés présents sur le sol bosnien se concentreraient dans le seul canton d’Una Sana. « Il sont plus de 5000, dont à peine la moitié hébergés dans des centres d’accueil officiels. Les autres dorment dans des bâtiments détruits ou dans les bois en attendant de tenter le game », poursuit Silvia Maraone. Ces dernières semaines, la population de Velika Kladuša a organisé des manifestations hebdomadaires contre la présence de migrants. Organisées sur les réseaux sociaux, ces rassemblements réunissent des habitants venus de tout le canton.

    Pire, des #milices citoyennes ont commencé à se mettre en place pour refouler les migrants. « Dans certains groupes Facebook, des membres signalent les plaques des véhicules qui transportent des migrants », observe Silvia Maraone. « Des routes ont même été bloquées, des pierres et des bâtons jetés sur les véhicules. » Ce n’est pas tout. « Des citoyens ont attaqué des migrants en pleine rue, tandis que les volontaires leur venant en aide se sont faits dénoncer à la police. » Le 17 août, les forces de l’ordre ont dû intervenir à Velika Kladuša où des dizaines de riverains s’étaient massés et avaient attaqué un bus où se trouvaient des migrants.

    Pour justifier de telles actions coup de poing, on trouve la rhétorique habituelle de l’extrême-droite complotiste : la prétendue violence de ces migrants et la menace qu’ils feraient peser pour la sécurité de la population locale. Des arguments balayés par les statistiques officielles, mais qui font mouche auprès de Bosniens fatigués par des décennies de divisions, de corruption et de misère.

    Deux jours après la violente manifestation du 17 août à Velika Kladuša, la cellule de crise du canton d’Una-Sana a décrété des mesures très dures : l’évacuation de tous les migrants vivant hors des structures d’accueil officielles, perquisition dans tous les lieux privés offrants des services aux migrants, interdiction de quitter les camps officiels, d’utiliser les transports en commun et d’entrer dans le canton pour tous les migrants. Des postes de contrôle ont aussi été mis en place sur les routes d’accès au canton.

    “Ils ont tout brûlé, vêtements, téléphones portables, sacs à dos. Ils nous ont frappés avec des matraques.”

    « Les personnes expulsées des squats n’ont pas toutes pu être accueillies au camp de #Lipa et ont été refoulées en #Republika_Srpska (l’autre entité de Bosnie-Herzégovine) », dénonce Silvia Maraone. « Même les familles avec enfants sont abandonnées sans aucune aide. » Ces restrictions à la #liberté_de_mouvement violent les #droits_humains fondamentaux, comme l’a dénoncé Amnesty International dans un communiqué, le 25 août. Le réseau Transbalkanska Solidarnost (https://transbalkanskasolidarnost.home.blog) demande aux autorités locales et aux organisations internationales de « mettre fin à la politique du silence », de condamner publiquement ces pratiques illégales, de poursuivre les responsables et d’assurer un accueil digne et sûr aux migrants.

    Transbalkanska Solidarnost a recueilli plusieurs #témoignages sur ces expulsions, dont celles de l’ONG No Name Kitchen à Bosanska Otoka. « Nous dormions dans une ancienne usine abandonnée près de Bihać quand la police est arrivée. Il devait y avoir 20 ou 25 policiers. Ils ont tout brûlé, vêtements, téléphones portables, sacs à dos. Ils nous ont frappés avec des matraques, puis nous ont expulsés ici où nous sommes sans nourriture, sans rien. Je me suis échappé d’Afghanistan pour me sauver et là je retrouve cette violence... Pourquoi ?! », se désole A., 16 ans. Selon les chiffres des associations, plus de 500 réfugiés se sont retrouvés bloqués sur la ligne de démarcation entre les deux entités bosniennes, personne ne voulant les prendre en charge.

    Malgré les menaces qui se font toujours plus fortes, les réseaux de #volontaires continuent de venir en aide aux migrants : distribution de produits de première nécessité, de vêtements et signalement des violences et des violations des droits. « Ce n’est pas facile », reconnaît Silvia Maraone. « Tout le monde vous regarde mal et ceux que vous aidez sont détestés… Nous restons prudents. » Son ONG, Ipsia ; intervient toujours dans le camp de Bira, géré par l’#Organisation_internationale_pour_les_migrations (#OIM) où elle gère le Café social et prépare un projet plus vaste, soutenu par des fonds européens, pour développer des activités, hors des camps, visant à améliorer les relations entre migrants et population locale. Il y a urgence. « Jamais le bras-de-fer avec le reste de la Bosnie n’a été aussi tendu. »

    https://www.courrierdesbalkans.fr/refugies-chaos-dans-le-nord-ouest-de-la-bosnie-herzegovine

    #asile #migrations #réfugiés #Bosnie #Bosnie-Herzégovine #Balkans #route_des_Balkans #camps_de_réfugiés #campements #IOM #extrême_droite #solidarité

    –-> « Quant aux transports en commun, ils sont désormais interdits aux réfugiés, ce qui permet aux trafiquants de faire des affaires encore plus lucratives »
    #ségrégation #transports_publics #transports_en_commun #apartheid

    –-> « l’#Organisation_internationale_pour_les_migrations (#OIM) gère le Café social et prépare un projet plus vaste, soutenu par des fonds européens, pour développer des activités, hors des camps, visant à améliorer les relations entre migrants et population locale. Il y a urgence. »
    En fait, ce qu’il faudrait faire c’est ouvrir les frontières et laisser ces personnes bloquées en Bosnie, où elles n’ont aucune intention de rester, de partir...

    ping @karine4 @isskein

  • #CoronaCapitalism and the European #Border_Regime

    As the coronavirus pandemic continues to affect people’s lives all over the world, the violence against migrants and refugees has intensified. This article explores #CoronaCapitalism and the Border Regime in a European context. Corporate Watch uses the term “border regime” as a shorthand to mean all of the many different institutions, people, systems and processes involved in trying to control migrants.

    This article only shares the tip-of-the-iceberg of migrant experiences during the coronavirus pandemic and we know there are many other untold stories. If you would like to share your news or experiences, please contact us.

    Mass Containment Camps

    As the world descended into lockdowns in an attempt to prevent the spread of the virus, tens of thousands of people have been confined in camps in the Western Balkans and Greece, as well as smaller accommodation centres across Europe. New and existing camps were also essentially locked down and the movement of people in and out of camps began to be heavily controlled by police and/or the military.

    The Border Violence Monitoring Network (BVMN) has been trying to track what is happening across the Balkans. They write that in Bosnia-Herzegovina, “more than 5,000 people were detained in existing temporary refugee reception centres. They include about 500 unaccompanied minors and several hundred children with families. Persons in need of special care, patients, victims of torture, members of the LGBTQ population, persons diagnosed with mental disorders, and victims of domestic violence have also been locked down into ‘EU-funded’ camps.” Police officers guard the centres and emergency legislation enables them the right to ‘physically force persons trying to leave the centres to return.’

    120,000 people are locked down in containment camps across Greece and the Greek Islands. Disturbing accounts of refugee camps are ever-present but the pandemic has worsened already unbearable conditions. 17,000 refugees live at Moira Refugee Camp where there are 210 people per toilet and 630 people per shower. Coronavirus, uncertainty over suspended asylum applications and the terrible living conditions are all contributing to escalating violence.

    In detention centres in Drama and Athens in Greece, the BVMN report that, “Respondents describe a lack of basic amenities such as running water, showers, or soap. Cramped and overcrowded conditions, with up to 13 inmates housed in one caravan with one, usually non-functioning, toilet. Requests for better services are met with violence at the hands of officers and riot police. On top of this, there have been complaints that no special precautions for COVID-19 are being taken, residents inside told BVMN reporters that sick individuals are not isolated, and are dismissed as having ‘the flu’.”

    While movement restrictions were lifted for Greek residents on 4th May, lockdown is still extended for all camps and centres across Greece and the Islands. This decision triggered thousands of people to protest in Athens. Emergency legislation adopted at the start of March in Greece effectively suspended the registration of asylum applications and implied immediate deportation for those entering the Greek territory, without registration, to their countries of origin or to Turkey.

    Detention and the deportation regime

    While major country-wide lockdowns are an unusual form of restriction of movement, for decades European states have been locking people seeking safety in detention centres. Immigration Removal Centres are essentially prisons for migrants in which people are locked up without trial or time-limit. In the UK the detention system is mostly run for profit by private companies, as detailed in our UK Border Regime book.

    Despite preparing for a pandemic scenario in January 2020, it took public pressure and legal action before the British government released nearly 1000 people from detention centres. As of the end of May, 368 people were still locked up in the profit-making detention centres and many more are living in ‘accommodation centres’ where they have been unable to access coronavirus testing.

    During the pandemic, people have been revolting in several detention centres across France and Belgium. Residents at a refugee centre in Saxony-Anhalt in Germany went on a hunger strike in April to protest against a lack of disinfectant. Hunger strikes have also taken place at detention centres in Tunisia, Cyprus and France.

    Women in a police holding centre for migrants in Greece went on hunger strike in June. In a statement, they wrote: “We will continue the hunger strike until we are free from this captivity. They will either set us free or we shall die”.

    People staged a rooftop protest at a detention centre in Madrid at the start of the outbreak. This was before all the detention centres in Spain were, for the first time in their history, completely emptied. To put this into context, Spain had 6,473 detainees in 2019. Legal challenges have been leveraging the EU Returns Directive which allows detention pending deportation for up to 18 months, but stipulates that if “a reasonable prospect of removal no longer exists…detention ceases to be justified and the person concerned shall be released immediately”.

    With a worldwide reduction in flights, deportations became unfeasible, however, many are afraid that the deportation machine will restart as things “return to normal”.

    Worsening life in the ‘jungle’

    People living in squats and other improvised accommodation have also faced sweeping operations, with people being rounded up and taken to containment camps.

    For those that remained on the street, pandemic restrictions took their toll. In Greece, movement amidst the pandemic was permitted via letters and text messages. For people who did not have the right paperwork, they were fined 150 euros, sometimes multiple times.

    Similarly, in the French city of Calais, people who did not have the right paperwork were commonly denied access to shops and supermarkets, where they may have previously used the bathrooms or bought food to cook. With many volunteer groups unable to operate due to movement restrictions, the availability of food dramatically reduced overnight. Access to services such as showers, phone charging and healthcare also rapidly reduced.

    People in Calais also faced a rise in evictions: 45 evictions were recorded in the first two weeks of lockdown. These expulsions have continued throughout the pandemic. On Friday 10th July 2020, a major police raid in Calais forced more than 500 people onto buses to be taken to ‘reception centres’ across the region.

    In Amsterdam in the Netherlands, some migrants were forced to live in night shelters and made to leave during the daytime – facing constant risks of contracting COVID-19 and police harassment in the city. They protested “I would stay at home if I had one”.

    Many migrant solidarity groups working on the ground lost huge numbers of volunteers due to travel restrictions and health concerns. Access to material donations such as tents, which are commonly collected at the end of festivals, also reduced. A constant supply of these resources is needed because the police routinely take the migrants’ tents away.

    Militarisation of borders

    The pandemic has seen an increase in military forces at borders and camps, persistent police violence and the suspension of ‘rights’ or legal processes. Using ‘State of Emergency’ legislation, the health crisis has been effectively weaponised.

    In March at the beginning of the pandemic in Europe, FRONTEX, the European Border and Coast Guard Agency deployed an additional 100 guards at the Greek Land Border. This is in addition to the agency’s core of 10,000 officers working around Europe.

    In their 2020 Risk Analysis Report, FRONTEX wrote that “the closing of internal borders is binding border guard personnel, which some border authorities have long stopped planning for”. This illuminates a key complexity in border control. For years, Europe has shifted to policing the wider borders of the Schengen Area. As the virus spread between countries within that area, however, states have tried to shut down their own borders.

    Police forces and militaries have become increasingly mobilised to “protect these national borders”. In Slovenia, this meant the military was granted authority to ‘process civilians’ at the border through the government’s activation of Article 37a of the Defence Act. While in Serbia, the army was deployed around border camps to ensure mass containment. 400 new border guards were also dispatched to the Evros land border between Greece and Turkey in addition to an increase in fencing and surveillance technologies.

    Escalating Police Violence

    Although migrants are no strangers to police brutality, national states of emergency have enabled an escalation in police violence. In mid-April an open letter was published by the Eritrean community of the Calais jungle reporting escalating police brutality. It describes the actions of the CRS police (Compagnies républicaines de sécurité); the general guard of the French police, infamous for riot control and repression:

    “They don’t see us as human beings. They insult us with names such as monkey, bitch etc. And for the past few weeks, they have started to threaten our lives by beating us as soon as the opportunity arises. When for example they found a group of two or three people walking towards the food distribution, or in our tents, when we were sleeping. They accelerate in their vehicles while driving in our direction, as if they wanted to crush us. They also took people with them to places far from Calais, and beat them until they lost consciousness.”

    The statement continues with a chronological list of events whereby people were beaten up, hit, gassed, had their arms broken, and were struck on the head so hard they lost consciousness and were taken to hospital by ambulance.

    With fewer people on the streets during the pandemic, police evictions that were not previously possible due to street-level resistance became successful. This was evidenced in the eviction of the Gini occupation at the Polytechnic University in Exarchia, Greece, a location that the police have not dared enter for decades. Dozens of migrant families were rounded up and taken to a detention centre.

    Violent pushbacks across borders

    There has also been an increase in illegal and violent pushbacks. Pushbacks are the informal expulsion (without due process) of individuals or groups to another country. This commonly involves the violent removal of people across a border.

    For example, on April 22nd in North Macedonia, a group of people from Palestine, Morocco and Egypt were pushed back into Greece. Two men were approached by officers in army uniforms and forced onto a bus where officers began to beat them with batons and guns. So much force was used that one man’s arm was fractured. The other members of the small group were later found and abruptly woken by officers. One man was stamped on and kicked across his body and head. Their shoes were removed and they were told to walk the 2km back to the border where they were met with the other group that had been taken there.

    A group of 16 people in Serbia (including one minor) were told they were being taken to a new camp for COVID prevention. They were then forced into a van and driven for nine hours with no stops, toilet or water. They were released at a remote area of hills and told to leave and cross the border to North Macedonia by the officers with guns. When found attempting to cross again days later they were told by police officers, “Don’t come again, we will kill you”.

    In Croatia, police have also started tagging people that they have pushed back with orange spray paint.

    There are also reports that Greek authorities are pushing people back to Turkey. According to the Border Violence Monitoring Network, many people shared experiences of being beaten, robbed and detained before being driven to the border area where military personnel used boats to return them to Turkey across the Evros river. In mid April in Greece, approximately 50 people were taken from Diavata camp in the morning and removed to a nearby police station where they were ordered to lie on the ground – “Sleep here, don’t move”. They were then beaten with batons. Some were also attacked with electric tasers. They were held overnight in a detention space near the border, and beaten further by Greek military officers. The next day they were boated across the river to Turkey by authorities with military uniforms. Another group were taken to the river in the dark and ordered to strip to their underwear.

    As pushbacks continue, people are forced to take even more dangerous routes. In Romania in mid-April, a group were found drowning in the Danube River after their boat capsized. One person was found dead and eight are still missing, while the survivors suffered from hypothermia.

    Danger at Sea

    During the pandemic, increasing numbers of disturbing accounts have been shared by migrants experiencing violence at sea. Between mid March and mid May, Alarm Phone (a hotline for boat people in distress) received 28 emergency calls from the Aegean Sea.

    On the 29th April, a boat carrying 48 refugees from Afghanistan, Congo and Iran, including 18 children, tried to reach Lesvos Island in the early hours of the day. They were pushed back to Turkish waters:

    “We were very scared. We tried to continue towards Lesvos Island. It was only 20 minutes more driving to reach the Greek coast. The big boat let a highspeed boat down, which hunted us down. There were six masked men in black clothes. They stopped us and made many waves. With a long stick they took away our petrol and they broke our engine. They had guns and knives. Then they threw a rope to us and ordered us to fix it on our boat. Then they started pulling us back towards Turkey. After a while they stopped and cut the rope. They returned to the big boat and took distance from us. It was around 6am.

    Then two other boats of the Greek coastguard arrived which were white and grey and drove very fast towards us, starting to make circles around our boat. They created big waves which were pushing us in the direction of Turkish waters. Our boat was taking in water and the kids were screaming. Our boat started breaking from the bottom. We were taking out the water with our boots. We threw all our belongings in the sea to make our boat lighter. Many of us had no life vests. A pregnant lady fainted. The Greeks continued making waves for a long period. A Turkish coastguard boat arrived and stood aside watching and taking photos and videos for more than six hours. Only after 13:30 o’clock the Turkish coastguard boat finally saved us. We were brought to Çanakalle police station and detained for five days.”

    During two months of lockdown, civil monitoring ships (volunteers who monitor the Aegean sea for migrants arriving via boat) were not permitted. In Italy, ports were closed to rescue ships, with many feared lost at sea as a result. Allegations have also emerged that Greece has been using inflatable rafts to deport asylum seekers. These are rafts without motors or propellers that cannot be steered.

    The Maltese Army also hit the headlines after turning away a boat of migrants by gunpoint and giving them the GPS coordinates for Italy. This is after recent reports of sabotaging migrant vessels, and pushing back migrant boats to Libya resulting in 12 people dying. The Maltese government recently signed a deal with the Libyan government to “to coordinate operations against illegal migration”. This includes training the Libyan coastguards and funding for “reception camps”.

    The threat of the virus and worsening conditions have also contributed to a record number of attempts to cross the Channel. The courage and commitment to overcome borders is inspiring, and more successful crossings have taken place during the pandemic. Between March 23rd (when the UK coronavirus lockdown began) and May 11th at least 853 migrants managed to cross the Channel in dinghies and small boats.

    State Scapegoating and the empowerment of the far right

    Far-right politicians and fascist activists have used the pandemic as an opportunity to push for closed borders.

    The election of a new Far Right government in Slovenia in March brought with it the scapegoating of refugees as coronavirus vectors. News conglomerate, NOVA24, heavily publicised a fake news story that the first COVID-19 patient in Italy was a Pakistani person who came via the Balkan route.

    Meanwhile, Hungary’s Government led by Vicktor Orbán moved to deport resident Iranians after claiming they were responsible for the country’s first coronavirus outbreak.

    In Italy, Matteo Salvini, the populist leader of the opposition Lega party tried to blame the movement of migrants from Africa across the Mediterranean as a “major infection threat” shortly before the country was overwhelmed with the pandemic and its rising death toll.

    The racist scapegoating ignores data that proves that initially the virus was transmited predominatnly by tourists’ and business people’s globe-trotting in the service of global capitalism and the fact that those whose movement is restricted, controlled and perilous, who do not have the power and wealth, are the most likely to suffer from the worst effects of both the virus itself and the shut downs.

    The Aftermath of Asylum suspension

    Access to asylum has drastically shifted across Europe with the suspension of many face-to-face application processing centres and appeal hearings. This ‘legal limbo’ is having a severe impact on people’s lives.

    Many people remain housed in temporary accommodation like hotels while they wait for their claim to be processed. This accommodation is often overcrowded and social-distancing guidelines are impossible to follow there. One asylum seeker in South London even shared to The Guardian how two strangers were made to share his double bed for a week in one room. One of the people was later taken to hospital with coronavirus.

    Closed-conditions at Skellig Accomodation Centre, a former hotel in Cahersiveen, Co. Kerry, Ireland enabled the rapid spread of the virus between the 100 people living there. Misha, an asylum seeker confined there, said she watched in horror as people started falling sick around her.

    “We were sharing bedrooms with strangers. We were sharing the dining room. We were sharing the salt shakers. We were sharing the lobby. We were sharing everything. And if you looked at the whole situation, you cannot really say that it was fit for purpose.”

    People were ordered to stay inside, and meanwhile coronavirus testing was delayed. Protests took place inside and locals demonstrated in solidarity outside.

    Asylum seekers in Glasgow have been protesting their accommodation conditions provided by the Mears Group, who Corporate Watch profiled in 2019. Mears Group won a £1.15 billion contract to run the refugee accommodation system in Scotland, Northern Ireland and much of the north of England. Their profiteering, slum landlord conditions and involvement in mass evictions have been met with anger and resistance. The pandemic has only worsened the experiences of people forced to live in Mears’ accommodation through terrible sanitation and medical neglect. Read our 2020 update on the Mears Group here.

    In the UK, the Home Office put a hold on evictions of asylum seekers during lockdown. The Red Cross stated this spared 50,000 people from the threat of losing their accommodation. Campaigners and tenants fear what will happen post-corona and how many people will face destitution when the ban on evictions lifts this August.

    In addition, a face-to-face screening interview is still needed for new asylum claims. This creates an awful choice for asylum seekers between shielding from the virus (and facing destitution) or going to the interviews in order to access emergency asylum support and begin the formal process. While meagre, the £37.75 per week is essential for survival. One of the reasons the Home Office make face-to-face applications compulsory is because of biometric data harvesting e.g. taking fingerprints of asylum seekers. One asylum seeker with serious health problems has had to make three journeys from Glasgow to Liverpool in the midst of the pandemic to submit paperwork.

    Access to food and other support is also very difficult as many centres and support services are closed.

    Barriers to Healthcare

    It is widely recognised that systemic racism has led to the disproportionate deaths of Black, Asian and minority ethnic people throughout the pandemic. Research has shown Black people are four times more likely to die than white people, and Bangladeshi or Pakistani groups are three times more likely. Many people from these communities are migrants, and many work in the National Health Service and social care sector.

    Research by Patients not Passports, Medact, Migrants Organise and the New Economics Foundation has shown that many migrants are avoiding seeking healthcare. 57% of respondents in their research report that they have avoided seeking healthcare because of fears of being charged for NHS care, data sharing and other migration enforcement concerns. Most people are unaware that treatment for coronavirus is exempt from charging. They also often experience additional barriers including the absence of translation and interpretation services, digital exclusions, housing and long distances from care services.

    Undocumented migrants are incredibly precarious. A project worker interviewed for the Patients not Passports Report shared that:

    “One client lived in a care home where she does live-in care and she has been exposed to Corona but has stated that she will not seek treatment and would rather die there than be detained.”

    Elvis, an undocumented migrant from the Philippines, died at home with suspected coronavirus because he was so scared by the hostility of Government policies that he did not seek any help from the NHS.

    For those that do try to access healthcare, issues such as not having enough phone credit or mobile data, not having wifi or laptops for video appointments, and simply not being able to navigate automated telephone and online systems because of language barriers and non-existent or poor translation, are having a very real impact on people’s ability to receive support. Fears of poor treatment because of people’s past experiences of discrimination and racism even if they access the services is another barrier.

    Exploiting Migrant Labour

    The exploitation of migrant labour has always been essential to sustaining capitalist economies. The pandemic generated contradictory responses from politicians and capitalists alike. Germany’s agricultural sector lobbied hard for opening the border after they were closed, leading the country to lift its ban and let in over 80,000 seasonal workers from Eastern Europe. Yet dilapidated living conditions and overcrowding are sparking new COVID-19 outbreaks, such as the 200 workers that contracted the virus at a slaughterhouse in western Germany.

    In mid May, the Italian government passed a law regularising undocumented migrants, whereby undocumented workers have been encouraged to apply for six-month legal residency permits. There are believed to be about 600,000 undocumented workers in Italy but only people doing ‘essential’ work during the pandemic can apply, mostly in the agricultural sector. Thousands of people live in makeshift encampments near fruit and vegetable farms with no access to running water or electricity.

    Working conditions carry risks of violence. On 18 May, five days after Italy’s regularisation law passed, a 33-year old Indian migrant working in a field outside of Rome was fired after asking his employer for a face mask for protection while at work. When the worker requested his daily wage, he was beaten up and thrown in a nearby canal.

    Conclusion

    The coronavirus crisis has exposed and intensified the brutality required to sustain capitalism – from systemic racism, to violent border controls, to slave labour for industrial agriculture, the list goes on. Despite extremely difficult conditions, undocumented migrants have formed strong movements of solidarity and collective struggle in many European countries. From revolts in detention centres to legal actions to empty them, people are continually resisting the border regime. As people reject a ‘return to normal’ post pandemic, the fall of the border regime must be part of a vision for freedom and liberation in a world beyond capitalism.

    https://corporatewatch.org/coronaborderregime
    #capitalisme #covid-19 #coronavirus #frontières #Europe #migrations #violence #asile #réfugiés #camps #camps_de_réfugiés #containment #rétention #campements #technologie #militarisation_des_frontières #Grèce #Turquie #violences_policières #police #refoulements #push-backs #Balkans #route_des_Balkans #santé #accès_aux_soins #travail #exploitation #pandémie #Frontex #confinement #grève_de_la_faim #fermeture_des_frontières

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  • Mapping covid-19 impact in refugee camps

    Ce virus ne discrimine pas par la couleur de peau, le genre ou le statut. Toutefois, il est certain qu’il affectera dans des proportions plus grandes et des formes plus sévères les plus vulnérables d’entre nous – notamment les réfugiés et personnes déplacées – pour qui, en moyenne, l’accès aux soins, à l’information et les opportunités pour se protéger des ces conséquences socio-économiques sont moindres. C’est pourquoi nous avons décidé avec le soutien des membres de la communauté Techfugees de collaborer ensemble à distance afin de mesurer l’impact du coronavirus sur les communautés réfugiées et identifier les solutions existantes potentiellement prêtes à être déployées localement ou partagées.

    La plateforme collecte des #données quantitative et qualitative sur la manière dont le #coronavirus affecte les communautés réfugiées. D’abord d’un point de vue purement sanitaire & humanitaires, mais aussi capturant des données sur l’#impact_socio-économique et les atteintes aux droits de l’Homme. La plateforme fournit également un éventail de solutions existantes afin de venir en aide et de rendre plus autonome les personnes réfugiées. Ces données sont mise à jour de manière hebdomadaire.


    La carte/the map:
    https://open.sourcemap.com/maps/5e9c38d0344d98be0c8ba221

    Le fichier de données / the spreadsheet:
    https://docs.google.com/spreadsheets/d/1SlaoJl0SSZPDHlkhyPHRWFjX3G0jLv2l2LgTMbgqZD8/edit#gid=418451224

    https://techfugees.com/fr/mapping-covid19-impact
    #coronavirus #cartographie #cartographie_collaborative #cartographie_participative #techfugees #visualisation #camps #campements #réfugiés #asile #migrations #droits_humains #autonomie #camps_de_réfugiés

    via @isskein
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  • https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/17/l-etat-d-urgence-sanitaire-ne-justifie-pas-une-telle-disproportion-dans-l-at

    Pour recenser d’éventuelles violations, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a mis en place un observatoire.

    La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) vient de mettre en place un Observatoire de l’état d’urgence sanitaire et du confinement visant à contrôler la mise en œuvre des mesures coercitives qu’autorise cet état d’exception et à évaluer les éventuelles violations des droits et libertés qui en résulteraient. Le président et la vice-présidente de l’institution, Jean-Marie Burguburu et Laurène Chesnel, partagent leurs premières observations.

    Quelle est la vocation de cet observatoire ?
    Jean-Marie Burguburu : Avec la mise en place de l’état d’urgence sanitaire pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, notre état de droit se trouve mis à mal par des mesures d’exception qui contreviennent à nos droits fondamentaux – liberté de déplacement, de réunion, de travail… Il relève de nos missions de contrôler que l’application de ces mesures demeure nécessaire, proportionnée, exceptionnelle, non discriminatoire et temporaire. Et de surveiller les éventuelles violations des droits et libertés. Cet instrument, créé dans l’urgence, permet des remontées immédiates des associations de terrain. Nos recommandations visent à alerter les pouvoirs publics, en espérant qu’ils y réagissent vite.

    La mission de cet observatoire devrait se poursuivre après le confinement : nous resterons très vigilants au fait que certaines mesures restrictives des libertés ne soient pas subrepticement inscrites dans le droit commun, comme cela a pu se produire à la fin de l’état d’urgence qui avait suivi les attentats. Il serait facile de maintenir des mesures abaissant le niveau de contradictoire du débat judiciaire. En matière de droit du travail, le motif pourrait être tout trouvé quant à l’impérieuse nécessité de remettre l’économie sur pied. Actuellement, nous sommes particulièrement préoccupés par le projet de traçage numérique des citoyens, sur lequel nous préparons un avis.

    #paywall

    • Quels sont vos premiers constats ?

      J.-M. B. : Nous regrettons qu’aucun plan de coordination nationale n’ait été préparé en amont pour prévenir l’impact d’une telle situation sanitaire sur les personnes les plus #précaires. Leur prise en charge a été laissée à la charge quasi exclusive des associations. Les mesures générales prises dans le cadre de l’état d’urgence l’ont été en prenant comme cadre de référence une certaine catégorie de citoyens – salarié, vivant en couple ou en famille, ayant accès à Internet et maîtrisant le français – qui ne saurait refléter la diversité de la population. Ignorer ces réalités, c’est prendre le risque de multiplier les contaminations, mais aussi d’accroître les inégalités.

      Vous alertez sur la situation des personnes migrantes, qu’en est-il ?

      Laurène Chesnel : Ces personnes – dont certaines continuent d’arriver, le confinement n’ayant pas mis fin aux flux migratoires – ne peuvent actuellement plus faire valoir leurs droits. Depuis la fermeture des guichets uniques pour demandeurs d’asile, le 23 mars, aucune #demande_d’asile ne peut être enregistrée. Or le principe du droit d’asile, à valeur constitutionnelle, ne peut faire l’objet de mesures dérogatoires, même durant l’état d’urgence. Nous nous alarmons aussi de la mise en danger des personnes retenues en centre de rétention administrative, et de leurs personnels de garde, alors même que le maintien en rétention n’a plus de justification, les reconduites à la frontière étant actuellement impossibles.

      Concernant la situation aux frontières : à Calais, de nombreuses associations ont dû se retirer pour respecter les consignes sanitaires et protéger leurs bénévoles. Plusieurs centaines de personnes se retrouvent ainsi livrées à elles-mêmes, sans information, aucune mise à l’abri n’a été planifiée, les #campements n’ont pas suffisamment de points d’eau ou de sanitaires, et les distributions alimentaires ont été suspendues. Certains bénévoles encore présents se font verbaliser. A la frontière italienne, les #migrants continuent d’être refoulés dans des conditions non seulement contraires au droit d’asile mais aussi dangereuses pour leur santé.

      Vous alertez aussi sur la situation des #enfants_placés

      L. C. : Pour les foyers d’accueil, maintenir des mineurs dont certains en grande détresse, confinés et sans scolarisation, est un véritable défi. Les espaces réduits et dans certains cas la suspension des liens avec la famille mènent à des violences.
      L’ordonnance adaptant les règles de procédure pénale dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire n’est pas toujours respectée : dans certains services sociaux, les droits de visite ont été remplacés par des contacts téléphoniques une fois par semaine, sans décision du juge et sans consultation préalable des parents et enfants. Dans plusieurs départements, aucune mise en relation par des moyens audiovisuels ne paraît avoir été organisée. Des situations urgentes ne sont pas jugées comme telles, ce qui met parfois les enfants en danger.

      Cette ordonnance donne aussi la possibilité aux juges des enfants de se prononcer sans audience et sans recueil des observations des parties. Le droit de l’enfant à être entendu est pourtant un principe consacré. Or les décisions qui pourront être prises, sans contradictoire et pour de longues durées, seront lourdes de conséquences… L’état d’urgence sanitaire ne justifie pas une telle disproportion dans l’atteinte aux droits des parties.

      La situation des mineurs non accompagnés est aussi préoccupante. Beaucoup sont encore à la rue, en particulier chez les primo arrivants, qui ne savent pas vers qui se tourner. Enfin, nous sommes inquiets de la situation des enfants incarcérés, alors que la protection contre l’épidémie n’est pas assurée en milieu carcéral, où l’accès à l’éducation n’est pas maintenu, et les contacts avec les familles sont rompus.

      Qu’en est-il des personnes en situation de pauvreté ?

      L. C. : Au sein des foyers pauvres, la crainte est désormais de ne pas pouvoir payer le #loyer et de se retrouver à la rue. Si le gouvernement vient d’annoncer le versement d’une aide exceptionnelle pour les familles les plus modestes, cette dernière fait l’impasse sur une partie importante des publics précaires : ceux qui ne bénéficient pas du RSA ou d’une allocation logement.

      Nous constatons aussi des difficultés d’accès à certains services publics, comme la CAF, intégralement dématérialisés du fait du confinement. Les personnes n’ayant pas accès à Internet se tournent vers les permanences téléphoniques, mais celles-ci, en plus d’être saturées, sont souvent payantes.

      « Rappelons que 135 euros d’amende représentent 25 % d’un RSA »

      Nous rappelons aussi que les conditions d’hébergement d’urgence sont inadaptées à un confinement qui dure : nourriture insuffisante, impossibilité de se faire des repas, manque de produits d’hygiène, surpopulation nuisant au respect des « gestes barrière », parfois même interdiction de toute sortie des hébergements de la part des gestionnaires d’hôtel, en contradiction avec les consignes officielles.

      Avez-vous des remontées concernant le reste de la population ?

      L. C. : Nous en avons beaucoup concernant des verbalisations jugées abusives et discriminatoires : pour des gens qui se rendaient à des distributions alimentaires, visitaient un proche malade, des bénévoles qui apportent à manger à des personnes isolées, des contenus de courses jugés arbitrairement comme ne relevant pas de la première nécessité (des serviettes hygiéniques par exemple). Ou ces personnes qui n’ont pas de compte en banque et doivent, pour retirer leurs minima sociaux, se déplacer jusqu’au premier bureau de poste ouvert, parfois éloigné. Rappelons que 135 euros d’amende représentent 25 % d’un RSA.
      Autre problème qui nous remonte, côté droit du travail : l’impossibilité de contester des licenciements jugés abusifs, tribunaux prud’homaux étant fermés.

      Quelles sont vos recommandations sur ces multiples enjeux ?

      J.-M. B. : Nous recommandons urgemment au gouvernement de mettre en place un pilotage national de l’aide aux personnes précaires avec une cellule de crise en coordination avec les associations ; ainsi qu’une cellule de crise concernant les personnes migrantes. Il faut aussi permettre aux associations d’assurer la sécurité de leurs bénévoles, avec du matériel de protection et une attestation permanente de déplacement. La communication sur les mesures liées à l’état d’urgence doit être rendue plus accessible à tous.

      Du côté de la protection de l’enfance, nous recommandons un référencement clair des personnes ou structures joignables, communiqués à tous ; l’équipement des professionnels ; le maintien des liens familiaux des enfants placés. Nous recommandons également l’accélération des remises en liberté et l’arrêt de toute prolongation automatique de détention provisoire pour les mineurs incarcérés. Nous demandons la mise à l’abri de tous les mineurs présumés et la prolongation systématique du délai pour déposer une demande de titre de séjour pour tous les mineurs étrangers ayant atteint la majorité.

      Nous appelons enfin à envisager le déconfinement en priorité pour les familles mal logées, avec une proposition de suivi psychologique et, dans l’attente, de leur proposer un espace de sortie quelques heures par jour.

    • Slovakia is to deploy the army to prevent a potential Covid-19 infection spreading in and out of its Roma settlements.

      The government has launched mass testing and intends possible lockdowns of whole communities, as the epidemic is likely to grow much faster in localities with poor hygienic conditions.
      “It is by no means a demonstration of power,” maintained Igor Matovic, the Slovak prime minister on Wednesday (1 April).

      “We just want to make use of doctors in uniform to start fast testing in the settlements without further overloading the regular health system.”

      “It is necessary for protecting people living in these settlements and also all the others who do not live there,” Matovic added.

      The move comes just days after a Roma village with 80 inhabitants near #Gelnica, in eastern Slovakia, was locked down as a young man at risk of infection - who had just returned from the UK - did not keep to the 14-day obligatory quarantine and instead travelled around.

      The man eventually tested negative but the case sparked general concern over possible consequences of virus spreading within and out of the marginalised Roma communities.

      Some 1,500 inhabitants from 33 Roma settlements recently returned from countries which had the outbreak of coronavirus and did not stay in the state facilities put aside for quarantine, according to Slovak officials.

      People in these locations will be tested by army doctors starting this Friday (3 April) and the authorities will then decide on further measures – including lockdowns of whole communities under the army’s control, if needed.

      Government experts suggest that the speed of the virus spread in places of poor hygienic standards like the Roma settlements, mainly in eastern Slovakia, could mean it reaches 20 new cases for every infected person.

      “We still have some 30,000 people with no access to water,” Peter Pollak, the Slovak Roma MEP of Matovic´s OLaNO [Ordinary People] party, currently taking part in the government crisis team, said at a press conference.

      Some people will worry about the prospect of army involved, Marcel Šaňa, Roma mayor of Kosice city´s Roma borough Lunik IX, told Euobserver.

      “More soldiers or policemen around are always viewed with concern in the marginalised communities. But that is exactly our task – social workers, NGOs and municipalities must explain to them that it is aimed for their protection.”

      “If we do not find out quickly how many people in the slums are infected, it will become a ticking bomb,” Peter Marko, general practitioner in Tatranska Lomnica, in eastern Slovakia, told EUobserver.

      Marko has been involved in several health and research projects involving marginalised Roma communities and he argues that isolation of the infected would not be possible there and would spread fast.

      “People in the settlements will probably be distrustful initially – just as they were when we were taking tiny samples of blood as part of research of hepatitis C infection and they accused me of using them for business. But they are concerned about corona virus so they will get to understand.”

      Dr Marko also said that Romani communities react with strong emotion about the death and illness of their relatives - and the first instance of coronavirus-related victims might lead to “unpredictable wave of panic,” he told Euobserver.

      Baptism of fire

      The new anti-virus measures come just the second week in office of the new Slovak cabinet led by prime minister Matovic and his anti-corruption OLaNO party.

      Days before the four-party ruling coalition was formed, the outgoing PM Peter Pellegrini, of the social democrat SMER-SD party, moved to close schools, churches, the majority of shopping centres and other public facilities in early March, immediately after the first virus infection cases in Slovakia were recorded.

      While the first shut down was originally planned for two weeks, the new government extended it open-ended and predicted that the epidemic could culminate in mid-July in Slovakia, with somewhat milder consequences for the country´s health system as compared with other EU states.

      As of 2 April, there were 426 positive cases and one victim of Covid-19 infection recorded in Slovakia.

      The economic impact will be just as grave as in other parts of Europe however, experts warn.

      Meanwhile, both economists and some politicians have openly criticised Matovic for his suggestion that Slovakia should undertake a total state lockdown for two to three weeks to stop the virus, similar to the Chinese Wuhan experiment.

      #Roms #armée #campements #campements_roms #confinement

  • Les migrants de #Calais abandonnés face au #coronavirus

    Une semaine après l’entrée en vigueur des mesures de #confinement, aucune mise à l’abri n’a été décidée pour protéger les deux mille réfugiés qui vivent dans les #campements du littoral nord de la France. Sur le terrain, les associations sont très inquiètes du fait des #conditions_sanitaires désastreuses.

    « Comment #rester_chez_soi quand on n’a pas de maison », s’interroge Samuel, un jeune Éthiopien, devant la tente qu’il partage avec trois autres personnes en périphérie de Calais. Autour de lui, des centaines de #tentes identiques sont plantées les unes à côté des autres dans des sous-bois jonchés de détritus. Certaines sont couvertes de bâches. Des petits groupes se réchauffent autour de feux de camp, d’autres le font à la bougie, sous les toiles de tente. Les gens se plaignent du froid, mais aussi des rats, nombreux et peu farouches.

    Samuel a effectivement entendu parler du coronavirus et des #gestes_barrière, mais il reste dubitatif : « Les #consignes qu’on nous a données ne sont pas applicables, dit-il en désignant les environs. Nous partageons tout : les tentes, les cigarettes, tout. » Quant au savon qui a été distribué, il le trouve de bien peu d’aide devant l’absence de points d’#eau en nombre suffisant : un robinet est disponible pour plusieurs centaines de personnes, il n’y a pas de douche. « Pourtant, pour le bien de tous, il est important que tout le monde soit protégé », souligne-t-il.

    « Je voudrais partir d’ici mais il n’y a pas d’alternative »

    Dans ce camp d’exilés, mardi 17 mars, le sentiment d’#abandon prévalait. Abi, originaire d’Éthiopie, expliquait avoir obtenu des informations sur l’#épidémie sur internet : « Mais je n’ai reçu aucune information de la part du gouvernement, dit-il. Ce que je vois aujourd’hui, c’est qu’on est entourés de #CRS, qui portent tous des #masques. Donc, je comprends que le coronavirus est un danger. S’il y a un danger, il est réciproque. Pourquoi ne portons-nous pas de masque ? Parce qu’on est perçus comme les personnes porteuses de maladies. Je me sens discriminé. »

    Aucun cas de coronavirus n’a été dépisté, mais au milieu de cette situation anxiogène, Ali, un jeune Iranien, n’était cependant pas tranquille : « Je voudrais partir d’ici mais il n’y a pas d’alternative. J’ai 17 ans, j’ai appelé le 115 [l’aide sociale d’urgence] mais j’attends encore. Je voudrais aller dans un centre d’hébergement, parce que vivre ici, c’est vraiment dur. »

    Des mesures de « #distanciation » ont bien été mises en place lors de la distribution des repas. Les réfugiés pénètrent maintenant au compte-goutte sur l’esplanade grillagée où se tient la distribution, assurée par l’association La Vie active, mandatée par l’État. Ils doivent y respecter une distance de sécurité. Mais, devant le portail, ils sont des centaines à attendre leur tour, les uns sur les autres, sans mesure de sécurité.

    Pourtant, les associations alertent depuis le 5 mars sur le sort de ces personnes fragiles et particulièrement exposées aux maladies. Antoine Nehr, coordinateur au sein de l’Utopia 56, est très inquiet :

    La situation est dramatique depuis longtemps, depuis le démantèlement de la grande jungle en 2016 : les politiques migratoires ont été durcies, avec pour objectif d’empêcher les exilés de s’installer et de rester à Calais. Les gens sont maintenus dans une grande #précarité. Ils sont épuisés, stressés, fatigués, ils vivent à plusieurs dans des tentes, dans des conditions sanitaires déplorables. On estime à plus d’un millier, peut-être 1.400 personnes le nombre de gens dehors ici, à Calais. Il y a aussi beaucoup de monde à Grande-Synthe (Nord). Cette crise est révélatrice d’un manque de prise en charge générale, et dans un contexte comme celui-ci, si aucune mesure n’est prise rapidement, si le virus vient à se développer dans les campements, cela va être grave. »

    « Lors de cette réunion, nous avions avancé plusieurs propositions : une #mise_à_l’abri dans des hébergements à taille humaine, une #clinique_mobile qui interviendrait sur les différents campements. Comment diagnostique-t-on un virus, nous, en tant que bénévoles ? On n’est pas formés à ça. Nous avons vraiment besoin que l’État prenne ses responsabilités. S’il n’y a pas de prise en charge, je pense qu’il aura du sang sur les mains. »

    « Même dans un contexte de crise, les autorités continuent d’appliquer cette politique extrêmement hostile »

    Mercredi dernier, la préfecture des Hauts-de-France a annoncé la mise en place « dans les prochains jours » d’une procédure de détection et d’orientation des cas suspects vers des centres de « desserrement », mais uniquement chez les personnes présentant déjà des symptômes. Lors d’une réunion à distance, jeudi 19 mars, la sous-préfecture a confirmé ce choix. Une mise à l’abri préventive pour les personnes vivant dans ces camps insalubres n’est donc pas envisagée.

    Alors que le confinement contraint les exilés à ne pas s’éloigner du campement, Antoine Nehr dénonce la poursuite de la politique répressive du gouvernement. « Les #évictions du terrain continuent. Depuis plusieurs jours, les gens n’ont plus accès à l’électricité, car elle a été coupée. Le seul accès actuellement reste les générateurs apportés par les associations. C’est d’autant plus inquiétant que les téléphones portables sont plus nécessaires que jamais : pour obtenir des informations, appeler le Samu et rester en contact avec ses proches. »

    « Même dans un contexte de crise, les autorités continuent d’appliquer cette politique extrêmement hostile qui met en danger la vie de plusieurs centaines de personnes. La situation empire au moment où il est urgent de demander un hébergement digne pour ces personnes, déplore Antoine Nehr. C’est incompréhensible. »

    https://reporterre.net/Les-migrants-de-Calais-abandonnes-face-au-coronavirus
    #migrations #asile #réfugiés #campement #répression

    ping @karine4 @thomas_lacroix

  • CAMPEMENTS DE MIGRANTS SANS-ABRI : COMPARAISONS EUROPÉENNES ET RECOMMANDATIONS

    Depuis quelques années, les campements de migrants sans-abri défraient la chronique. Présents dans certains quartiers ou à la périphérie des #villes, ils suscitent des réactions indignées ou exaspérées. Désignés comme un retour des #bidonvilles, ils sont principalement habités par des immigrés aux situations variées : demandeurs d’asile et réfugiés aux dossiers incorrectement traités, ressortissants européens roms, sans-papiers… Ces sites sont régulièrement évacués puis repeuplés. #Visibilité et volume du problème distinguent la France, particulièrement #Paris. C’est ce que montre une enquête réalisée en 2018 dans six capitales européennes (#Bruxelles, #Berlin, #Bucarest, #Londres, #Madrid et #Rome). En ce qui concerne les migrations, la prise en charge des dossiers y repose sur le droit national et les moyens de sa mise en oeuvre. Mais, dans ces métropoles, les autorités locales ont davantage la main face aux campements que dans les villes françaises. Il serait judicieux de s’inspirer de leurs réalisations, tant en ce qui concerne le recensement que le traitement des phénomènes. Comparaison et coopération s’imposent d’autant plus que la dimension proprement européenne de l’#errance et de la grande indigence s’avère cruciale. En tout état de cause, la situation et la politique française, singulièrement à Paris, méritent d’être appréciées à l’aune de ce qui se déroule dans d’autres pays européens. La France ne saurait se résoudre à une #banalisation que l’on ne rencontre pas ailleurs.


    http://www.fondapol.org/etude/campements-de-migrants-sans-abri-comparaisons-europeennes-et-recommandatio
    #campements #migrations #sans-abri #sans-abrisme #SDF #réfugiés #asile #France #rapport #urban_matter #migrerrance

    ping @isskein @karine4

  • Migrants : comment les #territoires ont pris le relais de l’Etat

    L’accueil de migrants, la #prise_en_charge de demandeurs d’asile et l’#intégration des réfugiés sont des #compétences_régaliennes de l’Etat. Cependant, par manque de moyens ou par choix politique, celui-ci s’avère défaillant. Les élus locaux prennent le relais. Les édiles ne peuvent rester inactifs face à l’arrivée de migrants sur leur territoire et à la formation de #campements sauvages dans l’#espace_public. Ils développent et financent des actions pour l’accueil de migrants dont une majorité relève du #droit_d’asile. Les élus sont aussi sollicités pour s’investir dans l’intégration des réfugiés. Ils bénéficient ainsi d’une contractualisation et de moyens de l’Etat. La #Stratégie_nationale_pour_l’accueil_et_l’intégration_des_personnes_réfugiées repose, entre autres, sur eux.

    https://www.lagazettedescommunes.com/dossiers/migrants-comment-les-territoires-ont-pris-le-relais-de-letat
    #villes #migrations #asile #réfugiés #accueil #Etat #compétence #responsabilité #défaillance #POPSU

  • https://www.defenseurdesdroits.fr/fr/communique-de-presse/2018/12/le-defenseur-des-droits-publie-son-rapport-exiles-et-droits

    Le Défenseur des droits publie son rapport « Exilés et droits fondamentaux, trois ans après le rapport Calais »

    À défaut d’une politique nationale assurant un véritable accueil des primo-arrivants, les collectivités locales et les associations caritatives sont contraintes d’agir seules, dans un contexte où se maintient une pénalisation de certains actes de solidarité. Le Défenseur des droits recommande donc d’élargir l’immunité pénale à tous les actes apportés dans un but humanitaire.

    Outre les effets de la politique migratoire de l’Union européenne qui contribuent à réduire de manière drastique les voies légales d’immigration en Europe, l’’externalisation de la frontière britannique en France demeure l’une des principales causes de la reconstitution des campements de fortune à Calais, Grande-Synthe ou Ouistreham, puisqu’elle empêche les exilés qui le souhaitent d’atteindre la Grande-Bretagne. Le Défenseur des droits recommande donc au gouvernement de dénoncer les accords conclus avec la Grande-Bretagne.

    #police #dublin #touquet #noborder #calais #état #raciste

    • Migrants : le Défenseur des droits dénonce une « dégradation » dans les campements depuis 2015

      Le Défenseur des droits Jacques Toubon a dénoncé mercredi une « dégradation » de la situation sanitaire et sociale des migrants vivant sur des campements en France depuis trois ans, avec « des atteintes sans précédents aux droits fondamentaux ».

      Face à une politique « non-accueil », les migrants « se retrouvent dans un état de dénuement extrême, dépourvus de tout abri et ayant comme première préoccupation celle de subvenir à leurs besoins vitaux : boire, se nourrir, se laver », déplore Toubon dans un rapport sur les campements de Calais, Paris, Grande-Synthe (Nord) et Ouistreham (Calvados). « Les difficultés à trouver des solutions durables aggravent le phénomène », estime-il, en déplorant des « stratégies de dissuasion et d’invisibilisation sur le territoire national menées par les pouvoirs publics ».

      En 2015 déjà, Toubon avait dénoncé dans un rapport sévère la situation des migrants dans le bidonville de la « Jungle » à Calais, qui comptait alors plus de 4 000 personnes, et a été démantelé depuis, de même que les grands campements parisiens.

      Mais « la situation s’est en réalité nettement dégradée », note le Défenseur, qui pointe les opérations d’évacuation régulièrement menées par les pouvoirs publics. « Loin d’être conformes aux exigences du droit à un hébergement inconditionnel », ces mises à l’abri « contribuent à la constitution de nouveaux campements » par leur caractère « non durable », assure-t-il dans ce document reprenant divers avis rendus depuis 2015.

      Toubon déplore aussi, pour ces mises à l’abri, le recours à des centres pour étrangers fonctionnant « comme des centres de transit » avec « des critères de tri ». « En lieu et place d’une véritable politique d’accueil, les pouvoirs publics ont préféré mettre en œuvre une politique essentiellement fondée sur la police des étrangers, reflétant une forme de +criminalisation des migrations », assure-t-il dans ce rapport publié au lendemain

      Il s’inquiète particulièrement des méthodes policières, avec des évacuations « pour empêcher tout nouveau point de fixation » et des contrôles d’identité « pour contrôler le droit au séjour ». « Pour servir ces opérations, différentes pratiques ont pu être observées telles que l’usage de gaz lacrymogène », assure-t-il dans ce rapport publié au lendemain de la journée internationale des migrants.

      Faisant état d’« une détérioration sans précédent de la santé des exilés », avec un « développement inquiétant des troubles psychiques », il s’inquiète particulièrement pour les mineurs, « laissés à leur sort » en raison du caractère « largement inadapté et sous-dimensionné des dispositifs » existants.

      Dans ce contexte Toubon souligne le rôle des collectivités locales « contraintes d’agir », et celui des associations qui « se substituent de plus en plus fréquemment aux pouvoirs publics » mais « sont de plus en plus empêchées d’agir ». Le Défenseur déplore enfin des « entraves persistantes à l’entrée dans la procédure d’asile » qui « viennent grossir les rangs des exilés contraints de vivre dans la clandestinité ».

      Mettant en garde contre une « logique d’externalisation de la gestion des flux migratoires », il formule plusieurs propositions, dont la suspension du règlement de Dublin confiant au pays d’enregistrement l’examen de la demande d’asile.

      https://www.liberation.fr/france/2018/12/19/migrants-le-defenseur-des-droits-denonce-une-degradation-dans-les-campeme

    • France: Police harassing, intimidating and even using violence against people helping refugees

      French authorities have harassed, intimidated and even violently assaulted people offering humanitarian aid and other support to migrants, asylum seekers and refugees in northern France in a deliberate attempt to curtail acts of solidarity, a new report by Amnesty International has found.

      Targeting solidarity: Criminalization and harassment of people defending migrant and refugee rights in northern France reveals how people helping refugees and migrants in #Calais and #Grand-Synthe are targeted by the police and the court system.

      “Providing food to the hungry and warmth to the homeless have become increasingly risky activities in northern France, as the authorities regularly target people offering help to migrants and refugees,” said Lisa Maracani, Amnesty International’s Human Rights Defenders Researcher.

      “Migrants and refugees did not simply disappear with the demolition of the ‘Jungle’ camp in 2016 and more than a thousand men, women and children are still living precarious lives in the area. The role of human rights defenders who offer them support is crucial.”

      Two-and-a-half years after the destruction of the so-called ‘Jungle’ camp, more than 1,200 refugees and migrants, including unaccompanied children, are living in tents and informal camps around Calais and Grande-Synthe. They have no regular access to food, water, sanitation, shelter or legal assistance and are subject to evictions, harassment, and violence at the hands of the police.

      One Afghan man told Amnesty International that he was beaten on his back with a baton by police during a forced eviction, and another described how a police officer had urinated on his tent. An Iranian man told Amnesty International: “I left my country looking for safety, but here I face police abuse…The police come every day to take my tent and clothes.”

      The number of camps and tents destroyed in Calais and Grande-Synthe increased last year, with 391 evictions carried out in the first five months of 2019 alone. Once evicted, migrants and refugees are at increased risk of violence and abuse. One local woman who provides migrants with help, told Amnesty International that she witnessed police spray migrants with teargas in the face while they were sleeping in her garden.

      Verbal and physical abuse part of daily routine

      The increased number of evictions is a consequence of France’s “no attachment points” policy, which attempts to deter people from staying in the area by ensuring that camps are not set up. While authorities have put in place an outreach service to enable refugees and migrants access reception centres and asylum offices in France, these centres are a long way from Calais and Grande-Synthe and sometimes there is not enough capacity to accommodate them. In order to alleviate their suffering, human rights defenders have attempted to fill the gap and provide the essential support and services that the French state is failing to offer.

      Instead of recognizing the importance of their work, authorities have obstructed, intimidated, harassed and in some cases started baseless prosecutions and even used violence.

      Several human rights defenders told Amnesty International that acts of intimidation, threats of arrest and abuse have become “part and parcel of their daily work.” One humanitarian worker told Amnesty International that she was violently pushed to the ground and choked by police in June 2018 after she had filmed four officers chasing a foreign national in Calais.

      A report last year by four organisations found that there had been 646 instances of police harassment and abuse against volunteers between November 2017 and June 2018. There have been 72 recorded instances this year, but the real figure is likely to be much higher.

      Eleonore Vigny who took part in the Human Rights Observers project in Calais said that intimidation of volunteers had spiked last summer, with police employing new harassment techniques. “In April and May 2018 there were several body searches, especially of female volunteers, sometimes done by male officers. There was also an escalation in insults, and people have been pushed, sometimes to the ground…Recently we received more threats of legal suits, and threats of arrests.”

      When reporting mistreatment of refugees, migrants, and human rights defenders, complainants say that they are not taken seriously. Charlotte Head, a volunteer who made several complaints about police behaviour to the police’s internal investigatory body, was warned that her complaints were “defamatory in character” and could constitute a “crime”.

      One local human rights organization, Cabane Juridique, filed more than 60 complaints to different authorities and bodies between January 2016 and April 2019. In May 2019, the French Ministry of Justice told Amnesty International that regional courts had received just 11 complaints since 2016, and only one was being investigated by prosecutors.

      Stress, anxiety and the fear of prosecution

      Human rights defenders told Amnesty International that they feel the pressure on them is increasing and having a negative impact on all aspects of their lives. Some have experienced insomnia, stress and anxiety whilst others describe the impact of prosecutions as debilitating.

      Loan Torondel who had been working in Calais told Amnesty International: “I feel that I am caught between the acute needs of people I am trying to help and the intimidation of French authorities who are trying to hamper humanitarian activities and label our activities as crimes. This is not a sustainable working environment for us, and it is the people we help who pay the consequences."

      One human rights defender told Amnesty International: “For the volunteers it’s very difficult. They are scared. We brief them on security and the context and they get scared. We struggle to recruit new volunteers.”

      But despite the harassment, many of those interviewed by Amnesty International are determined to carry on with their vital work. One local volunteer told Amnesty International that she is thankful for the presence of the migrants and refugees: “They have made us more human, they have enriched our lives.”

      “Rather than attempting to make the lives of migrants and refugees as difficult as possible, French authorities should take concrete measures to alleviate their suffering and provide shelter and support to all those living on the streets,” said Lisa Maracani.

      “It is also time to defend the defenders. Rather than treating human rights defenders as the enemy, the authorities should see them as a vital ally, and celebrate acts of solidarity and compassion rather than criminalizing them.”

      BACKGROUND

      Human rights violations faced by human rights defenders must be viewed within the context of the treatment of the people whose rights they defend. It is essential that the rights of refugees and migrants are respected. This means improving the asylum and reception system in France, providing safe and legal routes to the UK and reforming the European asylum system to remove the requirement laid down in the Dublin rules that asylum-seekers seek protection in their first country of entry.

      https://www.amnesty.org/en/latest/news/2019/06/france-police-harassing-intimidating-and-even-using-violence-against-people
      #France

      Le #rapport:
      https://www.amnesty.org/download/Documents/EUR2103562019FRENCH.PDF