L’Anthropocène et l’esthétique du sublime | par #Jean-Baptiste_Fressoz
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Au début des années 2000, le #sublime de l’#Anthropocène occupe également une fonction idéologique. Alors que les classes intellectuelles se convertissent au souci écologique, alors qu’elles rejettent les idéaux modernistes de maîtrise de la nature comme has been, alors qu’elles proclament « la fin des grands récits », la fin du progrès, de la lutte des classes, etc., l’Anthropocène procure le frisson coupable d’un nouveau récit sublime. Sur un fond d’agnosticisme quant au futur, l’Anthropocène paraît donner un nouvel horizon grandiose à l’humanité tout entière : prendre en charge collectivement le destin d’une planète. Dans le contexte idéologique terne de l’écologie politique, du développement durable et de la précaution, penser le mouvement d’une humanité devenue force tellurique paraît autrement plus excitant que penser l’involution d’un système économique. Au fond le sublime de l’Anthropocène rejoue assez exactement la scène finale du chef-d’œuvre de Stanley Kubrick, 2001 l’Odyssée de l’espace : l’embryon stellaire contemplant la terre figurant parfaitement l’avènement d’un agent géologique conscient, d’un corps planétaire réflexif. Et c’est bien pour cela que l’Anthropocène fait tressaillir théoricien·ne·s, philosophes et artistes en herbe : il semble désigner un événement métaphysique intéressant.