• « Nous assistons à une escalade de la #prédation_minière »

    Une nouvelle #ruée_minière a commencé et touche aussi la #France. Au nom de la lutte contre la crise climatique, il faudrait extraire de plus en plus de #métaux. Celia Izoard dénonce l’impasse de cette « #transition » extractiviste. Entretien.

    Basta/Observatoire des multinationales : Il est beaucoup question aujourd’hui de renouveau minier en raison notamment des besoins de la transition énergétique, avec la perspective d’ouvrir de nouvelles mines en Europe et même en France. Vous défendez dans votre #livre qu’il ne s’agit pas du tout d’un renouveau, mais d’une trajectoire de continuité. Pourquoi ?

    #Celia_Izoard : Les volumes de #métaux extraits dans le monde aujourd’hui augmentent massivement, et n’ont jamais cessé d’augmenter. Ce qui est parfaitement logique puisqu’on ne cesse de produire de nouveaux objets et de nouveaux équipements dans nos pays riches, notamment avec la #numérisation et aujourd’hui l’#intelligence_artificielle, et qu’en plus de cela le reste du monde s’industrialise.

    En conséquence, on consomme de plus en plus de métaux, et des métaux de plus en plus variés – aussi bien des métaux de base comme le #cuivre et l’#aluminium que des métaux de spécialité comme les #terres_rares. Ces derniers sont utilisés en très petite quantité mais dans des objets qui sont partout, comme les #smartphones, et de façon trop dispersive pour permettre le #recyclage.

    Et la production de tous ces métaux devrait continuer à augmenter ?

    Oui, car rien ne freine cette production, d’autant plus qu’on y ajoute aujourd’hui une nouvelle demande qui est un véritable gouffre : celle de métaux pour le projet très technocratique de la transition. « Transition », dans l’esprit de nos élites, cela signifie le remplacement des #énergies_fossiles par l’#énergie_électrique – donc avec des #énergies_renouvelables et des #batteries – avec un modèle de société inchangé. Mais, par exemple, la batterie d’une #voiture_électrique représente souvent à elle seule 500 kg de métaux (contre moins de 3 kg pour un #vélo_électrique).

    Simon Michaux, professeur à l’Institut géologique de Finlande, a essayé d’évaluer le volume total de métaux à extraire si on voulait vraiment électrifier ne serait-ce que la #mobilité. Pour le #lithium ou le #cobalt, cela représenterait plusieurs décennies de la production métallique actuelle. On est dans un scénario complètement absurde où même pour électrifier la flotte automobile d’un seul pays, par exemple l’Angleterre ou la France, il faut déjà plus que la totalité de la production mondiale. Ce projet n’a aucun sens, même pour lutter contre le #réchauffement_climatique.

    Vous soulignez dans votre livre que l’#industrie_minière devient de plus en plus extrême à la fois dans ses techniques de plus en plus destructrices, et dans les #nouvelles_frontières qu’elle cherche à ouvrir, jusqu’au fond des #océans et dans l’#espace

    Oui, c’est le grand paradoxe. Les élites politiques et industrielles répètent que la mine n’a jamais été aussi propre, qu’elle a surmonté les problèmes qu’elle créait auparavant. Mais si l’on regarde comment fonctionne réellement le #secteur_minier, c’est exactement l’inverse que l’on constate. La mine n’a jamais été aussi énergivore, aussi polluante et aussi radicale dans ses pratiques, qui peuvent consister à décapiter des #montagnes ou à faire disparaître des #vallées sous des #déchets_toxiques.

    C’est lié au fait que les teneurs auxquelles on va chercher les métaux sont de plus en plus basses. Si on doit exploiter du cuivre avec un #filon à 0,4%, cela signifie que 99,6% de la matière extraite est du #déchet. Qui plus est, ce sont des #déchets_dangereux, qui vont le rester pour des siècles : des déchets qui peuvent acidifier les eaux, charrier des contaminants un peu partout.

    Les #résidus_miniers vont s’entasser derrière des #barrages qui peuvent provoquer de très graves #accidents, qui sont sources de #pollution, et qui sont difficilement contrôlables sur le long terme. Nous assistons aujourd’hui à une véritable #escalade_technologique qui est aussi une escalade de la #prédation_minière. La mine est aujourd’hui une des pointes avancées de ce qu’on a pu appeler le #capitalisme_par_dépossession.

    Comment expliquer, au regard de cette puissance destructrice, que les populations occidentales aient presque totalement oublié ce qu’est la mine ?

    Il y a un #déni spectaculaire, qui repose sur deux facteurs. Le premier est la religion de la #technologie, l’une des #idéologies dominantes du monde capitaliste. Nos dirigeants et certains intellectuels ont entretenu l’idée qu’on avait, à partir des années 1970, dépassé le #capitalisme_industriel, qui avait été tellement contesté pendant la décennie précédente, et qu’on était entré dans une nouvelle ère grâce à la technologie. Le #capitalisme_post-industriel était désormais avant tout une affaire de brevets, d’idées, d’innovations et de services.

    Les mines, comme le reste de la production d’ailleurs, avaient disparu de ce paysage idéologique. Le #mythe de l’#économie_immatérielle a permis de réenchanter le #capitalisme après l’ébranlement des mouvements de 1968. Le second facteur est #géopolitique. Aux grandes heures du #néo-libéralisme, le déni de la mine était un pur produit de notre mode de vie impérial. Les puissances occidentales avaient la possibilité de s’approvisionner à bas coût, que ce soit par l’#ingérence_politique, en soutenant des dictatures, ou par le chantage à la dette et les politiques d’#ajustement_structurel. Ce sont ces politiques qui ont permis d’avoir par exemple du cuivre du #Chili, de #Zambie ou d’#Indonésie si bon marché.

    Les besoins en métaux pour la #transition_climatique, si souvent invoqués aujourd’hui, ne sont-ils donc qu’une excuse commode ?

    Invoquer la nécessité de créer des mines « pour la transition » est en effet hypocrite : c’est l’ensemble des industries européennes qui a besoin de sécuriser ses approvisionnements en métaux. La récente loi européenne sur les métaux critiques répond aux besoins des grosses entreprises européennes, que ce soit pour l’#automobile, l’#aéronautique, l’#aérospatiale, les #drones, des #data_centers.

    L’argument d’une ruée minière pour produire des énergies renouvelables permet de verdir instantanément toute mine de cuivre, de cobalt, de lithium, de #nickel ou de terres rares. Il permet de justifier les #coûts_politiques de la #diplomatie des #matières_premières : c’est-à-dire les #conflits liés aux rivalités entre grandes puissances pour accéder aux #gisements. Mais par ailleurs, cette transition fondée sur la technologie et le maintien de la #croissance est bel et bien un gouffre pour la #production_minière.

    Ce discours de réenchantement et de relégitimation de la mine auprès des populations européennes vous semble-t-il efficace ?

    On est en train de créer un #régime_d’exception minier, avec un abaissement des garde-fous réglementaires et des formes d’extractivisme de plus en plus désinhibées, et en parallèle on culpabilise les gens. La #culpabilisation est un ressort psychologique très puissant, on l’a vu durant le Covid. On dit aux gens : « Si vous n’acceptez pas des mines sur notre territoire, alors on va les faire ailleurs, aux dépens d’autres populations, dans des conditions bien pires. » Or c’est faux. D’abord, la #mine_propre n’existe pas.

    Ensuite, la #loi européenne sur les #métaux_critiques elle prévoit qu’au mieux 10% de la production minière soit relocalisée en Europe. Aujourd’hui, on en est à 3%. Ce n’est rien du tout. On va de toute façon continuer à ouvrir des mines ailleurs, dans les pays pauvres, pour répondre aux besoins des industriels européens. Si l’on voulait vraiment relocaliser la production minière en Europe, il faudrait réduire drastiquement nos besoins et prioriser les usages les plus importants des métaux.

    Peut-on imaginer qu’un jour il existe une mine propre ?

    Si l’on considère la réalité des mines aujourd’hui, les procédés utilisés, leur gigantisme, leur pouvoir de destruction, on voit bien qu’une mine est intrinsèquement problématique, intrinsèquement prédatrice : ce n’est pas qu’une question de décisions politiques ou d’#investissements. L’idée de « #mine_responsable » n’est autre qu’une tentative de faire accepter l’industrie minière à des populations en prétendant que « tout a changé.

    Ce qui m’a frappé dans les enquêtes que j’ai menées, c’est que les industriels et parfois les dirigeants politiques ne cessent d’invoquer certains concepts, par exemple la #mine_décarbonée ou le réemploi des #déchets_miniers pour produire du #ciment, comme de choses qui existent et qui sont déjà mises en pratique. À chaque fois que j’ai regardé de plus près, le constat était le même : cela n’existe pas encore. Ce ne sont que des #promesses.

    Sur le site de la nouvelle mine d’#Atalaya à #Rio_Tinto en #Espagne, on voir des panneaux publicitaires alignant des #panneaux_photovoltaïques avec des slogans du type « Rio Tinto, la première mine d’autoconsommation solaire ». Cela donne à penser que la mine est autonome énergétiquement, mais pas du tout. Il y a seulement une centrale photovoltaïque qui alimentera une fraction de ses besoins. Tout est comme ça.

    Le constat n’est-il pas le même en ce qui concerne le recyclage des métaux ?

    Il y a un effet purement incantatoire, qui consiste à se rassurer en se disant qu’un jour tout ira bien parce que l’on pourra simplement recycler les métaux dont on aura besoin. Déjà, il n’en est rien parce que les quantités colossales de métaux dont l’utilisation est planifiée pour les années à venir, ne serait-ce que pour produire des #batteries pour #véhicules_électriques, n’ont même pas encore été extraites.

    On ne peut donc pas les recycler. Il faut d’abord les produire, avec pour conséquence la #destruction de #nouveaux_territoires un peu partout sur la planète. Ensuite, le recyclage des métaux n’est pas une opération du saint-Esprit ; il repose sur la #métallurgie, il implique des usines, des besoins en énergie, et des pollutions assez semblables à celles des mines elles-mêmes.

    L’accent mis sur le besoin de métaux pour la transition ne reflète-t-il pas le fait que les #multinationales ont réussi à s’approprier ce terme même de « transition », pour lui faire signifier en réalité la poursuite du modèle actuel ?

    Le concept de transition n’a rien de nouveau, il était déjà employé au XIXe siècle. À cette époque, la transition sert à freiner les ardeurs révolutionnaires : on accepte qu’il faut des changements, mais on ajoute qu’il ne faut pas aller trop vite. Il y a donc une dimension un peu réactionnaire dans l’idée même de transition.

    Dans son dernier livre, l’historien des sciences #Jean-Baptiste_Fressoz [Sans transition - Une nouvelle histoire de l’énergie, Seuil, 2024] montre que la #transition_énergétique tel qu’on l’entend aujourd’hui est une invention des #pro-nucléaires des États-Unis dans les années 1950 pour justifier des #investissements publics colossaux dans l’#atome. Ils ont tracé des belles courbes qui montraient qu’après l’épuisement des énergies fossiles, il y aurait besoin d’une #solution_énergétique comme le #nucléaire, et qu’il fallait donc investir maintenant pour rendre le passage des unes à l’autre moins brutal.

    La transition aujourd’hui, c’est avant tout du temps gagné pour le capital et pour les grandes entreprises. Les rendez-vous qu’ils nous promettent pour 2050 et leurs promesses de #zéro_carbone sont évidemment intenables. Les technologies et l’#approvisionnement nécessaire en métaux n’existent pas, et s’ils existaient, cela nous maintiendrait sur la même trajectoire de réchauffement climatique.

    Ces promesses ne tiennent pas debout, mais elles permettent de repousser à 2050 l’heure de rendre des comptes. Ce sont plusieurs décennies de gagnées. Par ailleurs, le terme de transition est de plus en plus utilisé comme étendard pour justifier une #croisade, une politique de plus en plus agressive pour avoir accès aux gisements. Les pays européens et nord-américains ont signé un partenariat en ce sens en 2022, en prétendant que certes ils veulent des métaux, mais pour des raisons louables. La transition sert de figure de proue à ces politiques impériales.

    Vous avez mentionné que l’une des industries les plus intéressées par la sécurisation de l’#accès aux métaux est celle de l’#armement. Vous semblez suggérer que c’est l’une des dimensions négligées de la guerre en Ukraine…

    Peu de gens savent qu’en 2021, la Commission européenne a signé avec l’#Ukraine un accord de partenariat visant à faire de ce pays une sorte de paradis minier pour l’Europe. L’Ukraine possède de fait énormément de ressources convoitées par les industriels, qu’ils soient russes, européens et américains. Cela a joué un rôle dans le déclenchement de la #guerre. On voit bien que pour, pour accéder aux gisements, on va engendrer des conflits, militariser encore plus les #relations_internationales, ce qui va nécessiter de produire des #armes de plus en plus sophistiquées, et donc d’extraire de plus en plus de métaux, et donc sécuriser l’accès aux gisements, et ainsi de suite.

    C’est un #cercle_vicieux que l’on peut résumer ainsi : la ruée sur les métaux militarise les rapports entre les nations, alimentant la ruée sur les métaux pour produire des armes afin de disposer des moyens de s’emparer des métaux. Il y a un risque d’escalade dans les années à venir. On évoque trop peu la dimension matérialiste des conflits armés souvent dissimulés derrière des enjeux « ethniques ».

    Faut-il sortir des métaux tout comme il faut sortir des énergies fossiles ?

    On a besoin de sortir de l’extractivisme au sens large. Extraire du pétrole, du charbon, du gaz ou des métaux, c’est le même modèle. D’ailleurs, d’un point de vue administratif, tout ceci correspond strictement à de l’activité minière, encadrée par des #permis_miniers. Il faut cesser de traiter le #sous-sol comme un magasin, de faire primer l’exploitation du sous-sol sur tout le reste, et en particulier sur les territoires et le vivant.

    Concrètement, qu’est ce qu’on peut faire ? Pour commencer, les deux tiers des mines sur la planète devraient fermer – les #mines_métalliques comme les #mines_de_charbon. Ça paraît utopique de dire cela, mais cela répond à un problème urgent et vital : deux tiers des mines sont situées dans des zones menacées de #sécheresse, et on n’aura pas assez d’#eau pour les faire fonctionner à moins d’assoiffer les populations. En plus de cela, elles émettent du #CO2, elles détruisent des territoires, elles déplacent des populations, elles nuisent à la #démocratie. Il faut donc faire avec une quantité de métaux restreinte, et recycler ce que l’on peut recycler.

    Vous soulignez pourtant que nous n’avons pas cessé, ces dernières années, d’ajouter de nouvelles technologies et de nouveaux objets dans notre quotidien, notamment du fait de l’envahissement du numérique. Réduire notre consommation de métaux implique-t-il de renoncer à ces équipements ?

    Oui, mais au préalable, quand on dit que « nous n’avons pas cessé d’ajouter des nouvelles technologies polluantes », il faut analyser un peu ce « nous ». « Nous » n’avons pas choisi de déployer des #caméras_de_vidéosurveillance et des #écrans_publicitaires partout. Nous n’avons pas choisi le déploiement de la #5G, qui a été au contraire contesté à cause de sa consommation d’énergie.

    La plupart d’entre nous subit plutôt qu’elle ne choisit la #numérisation des #services_publics, instrument privilégié de leur démantèlement et de leur privatisation : l’usage de #Pronote à l’école, #Doctissimo et la télémédecine dont la popularité est due à l’absence de médecins, etc. Dans le secteur automobile, la responsabilité des industriels est écrasante. Depuis des décennies, ils ne cessent de bourrer les véhicules d’électronique pour augmenter leur valeur ajoutée.

    Ces dernières années, ils ont massivement vendu d’énormes voitures électriques parce qu’ils savaient que le premier marché de la voiture électrique, c’était d’abord la bourgeoisie, et que les bourgeois achèteraient des #SUV et des grosses berlines. Donc quand je dis que nous devons réduire notre #consommation de métaux, j’entends surtout par-là dénoncer les industries qui inondent le marché de produits insoutenables sur le plan des métaux (entre autres).

    Mais il est vrai que nous – et là c’est un vrai « nous » - devons réfléchir ensemble aux moyens de sortir de l’#emprise_numérique. Du point de vue des métaux, le #smartphone n’est pas viable : sa sophistication et son caractère ultra-mondialisé en font un concentré d’#exploitation et d’#intoxication, des mines aux usines d’assemblage chinoises ou indiennes.

    Et bien sûr il a des impacts socialement désastreux, des addictions à la #surveillance, en passant par la « #surmarchandisation » du quotidien qu’il induit, à chaque instant de la vie. Là-dessus, il faut agir rapidement, collectivement, ne serait-ce que pour se protéger.

    https://basta.media/nous-assistons-a-une-escalade-de-la-predation-miniere
    #extractivisme #minières #électrification #acidification #contamination #hypocrisie #relocalisation #prédation #guerre_en_Ukraine #militarisation #déplacement_de_populations #dématérialisation #industrie_automobile

  • Pourquoi il est important que les étudiant(e)s apprennent à se passer de #Chat-GPT ?

    Dans un article intéressant intitulé « ChatGPT : le #mythe de la #productivité » Hubert Guillaud nous explique qu’avec les applications de ce type, le but de l’#écriture est de remplir une page, pas de réaliser le #processus_de_réflexion qui l’accompagne. Or écrit-il. C’est justement tout l’inverse dont nous avons besoin ! À l’heure où l’intelligence artificielle (IA) s’immisce de plus en plus dans notre quotidien, il est utile de s’interroger sur son impact sur la formation, en particulier sur l’apprentissage des étudiants. Alors que des outils comme #ChatGPT promettent de faciliter de nombreuses tâches, il s’agit de comprendre pourquoi il est important que les apprenants puissent se passer de ces technologies, notamment dans le cadre de leurs études.

    L’IA et le développement des #compétences_cognitives

    L’un des arguments les plus convaincants en faveur d’un apprentissage sans IA porte sur le développement des compétences cognitives. Comme le souligne Emily M. Bender, linguiste citée par Hubert Guillaud, l’objectif de la rédaction d’un écrit d’étudiant (un mémoire ou d’un rapport de situation sociale) n’est pas de produire plus de connaissances, mais de renforcer les capacités de réflexion critique des élèves.

    Une analogie avec l’entraînement sportif peut vous aider à comprendre pourquoi : de même que s’entrainer à soulever des poids développe la force musculaire nécessaire à diverses disciplines sportives, l’écriture régulière cultive des compétences essentielles pour les futurs professionnels. Or, nous avons besoin de travailleurs sociaux qui pensent par eux-mêmes et s’entrainent sans chercher leurs idées dans des réponses formatées par des chabots.

    L’utilisation d’outils d’IA comme ChatGPT pour réaliser des devoirs équivaut à « amener un chariot élévateur dans une salle de musculation pour entrainer les athlètes ». En d’autres termes, cela prive les étudiants de l’opportunité de développer leur « forme cognitive ». Cette métaphore illustre parfaitement le risque d’atrophie intellectuelle lié à une dépendance excessive à l’IA. Il s’agit d’apprendre à penser par soi-même et d’être capable d’intégrer la pensée nécessaire à la pratique professionnelle. Sinon à quoi bon se former ?

    L’#effort_intellectuel doit être valorisé

    Un autre aspect à ne pas négliger de l’apprentissage sans IA concerne la valeur intrinsèque de l’effort intellectuel fourni par l’étudiant. Bien que certains types d’écriture puissent sembler superflus ou purement académiques, le processus de création de texte, même lorsqu’il n’est pas particulièrement créatif ou évident, a une valeur en soi. Il permet de développer des #compétences, d’approfondir la compréhension d’un sujet et de structurer la pensée. D’où l’intérêt de continuer à demander aux élèves de formaliser leurs pensées en synthétisant et en analysant des textes.

    Le risque d’une utilisation excessive de l’IA est de créer un #cercle_vicieux où la production de textes de qualité médiocre devient la norme. Nous pourrions entrer dans une ère où les documents sont générés à partir de listes à puces par une IA, puis réutilisé par une autre IA pour produire un devoir ou une communication académique. Cette perspective soulève des questions sur la valeur ajoutée réelle de tels processus et sur l’#appauvrissement potentiel de la #réflexion humaines.

    Un risque de #déshumanisation de l’apprentissage

    Distinguons d’abord deux aspects importants qui entrent dans le champ de la formation : la #compétence et l’#intelligence. La compétence correspond à la façon dont vous accomplissez une tâche, tandis que l’intelligence correspond à l’efficacité avec laquelle vous allez acquérir de nouvelles compétences. Cette différenciation nous conduit à comprendre une limitation fondamentale de l’IA : bien qu’elle puisse être extrêmement compétente dans l’exécution de tâches spécifiques (par exemple, résumer un texte), elle manque de la #flexibilité et de l’#adaptabilité qui caractérisent l’#intelligence_humaine. Elle ne dispose pas d’intelligence à proprement parler. Il nous est dit que les étudiants pour obtenir leurs diplômes doivent acquérir des domaines de compétence. Pour autant la pratique du travail social demande surtout de savoir agir avec intelligence. Or ce n’est pas la même chose. James Stacey Taylor, professeur de Sciences humaines au collège de New Jersey, explique bien pourquoi il interdit désormais à ses élèves d’utiliser l’IA.

    Cette technologie risque de nous traiter comme des êtres inférieurs à ce que nous sommes réellement : des créateurs et des interprètes de sens. Un autre argument en faveur de l’abandon de l’IA dans le travail des étudiants concerne son potentiel de « déshumanisation ». L’#IA_générative a tendance à réduire nos attentes, à la fois envers ce que nous lisons et envers nous-mêmes lorsque nous écrivons quelque chose pour que les autres le lisent. Nous banalisons du texte aux kilomètres généré par les #modèles_de_langage et oublions les efforts à fournir qui paraissent alors pour les étudiants de plus en plus démesurés.

    L’acte d’écrire ou de communiquer, même lorsqu’il n’est pas particulièrement original, porte une #signification_profonde pour l’auteur et son audience. Cela concerne aussi bien la #création_artistique que la #communication quotidienne. L’#intention et le contexte humains sont essentiels. L’IA, en se substituant à ces processus, risque de réduire la quantité d’intention dans le monde et d’appauvrir nos interactions qui nous conduisent à forger nos propres opinions.

    L’IA et la promotion de l’#incuriosité

    Rob Horning, philosophe du net, nous met en garde contre le fait que les modèles de langage de grande taille (#LLM) « marchandisent l’incuriosité ». Ces systèmes peuvent fournir des informations, mais ils sont incapables d’expliquer pourquoi ces informations ont été produites ou organisées d’une certaine manière. Cette limitation est particulièrement problématique dans un contexte éducatif, où la compréhension du processus de création et d’organisation des connaissances est aussi importante que les connaissances elles-mêmes.

    L’utilisation de l’IA dans l’#éducation risque de promouvoir une approche assez superficielle de l’apprentissage. L’accent sera mis sur l’obtention rapide de résultats plutôt que sur le processus de réflexion et de #compréhension. Cette tendance va à l’encontre des objectifs fondamentaux de la formation des travailleurs sociaux, qui visent à développer la #pensée_critique et la capacité d’analyse des étudiants.

    Or aujourd’hui que souhaitons-nous pour les futurs travailleurs sociaux ? De nombreux employeurs vous diront qu’ils recherchent des professionnels qui font ce qu’on leur demande de faire sans véritablement se poser des questions. Le résultat importe plus que le processus qui a permis de l’obtenir. Or l’aide et l’accompagnement en #travail_social est justement structuré dans le processus fait d’avancées et de reculs, un parcours qui permettra à la personne aidée de pouvoir à terme prendre son avenir en main. Elle nous oblige à penser l’action au fil du contexte et des évolutions de la situation. Cette réflexion est menée avec la personne accompagnée. Or l’IA vous proposera des réponses qui ne sont pas coconstruites avec elle.

    Le mythe de la productivité

    Un autre aspect problématique de l’utilisation de l’IA dans la formation est la promotion du « mythe de la productivité ». Cette idéologie présuppose que l’économie de temps et d’efforts est toujours préférable à l’engagement dans une activité pour elle-même. Dans le contexte éducatif, cela peut se traduire par une focalisation excessive sur la production d’actions et de contenus au détriment du processus d’apprentissage et de réflexion pour la mise en œuvre de l’action.

    Ce mythe de la productivité risque de réduire l’écriture et d’autres activités éducatives à de simples tâches à accomplir. Il néglige dans le processus d’écriture leur dans le développement intellectuel et personnel des étudiants. Comme le souligne Rob Horning, cette approche correspond à celle de l’idéologie libérale qui privilégie l’efficacité sur le sens et l’expérience.

    Une utilisation excessive de l’IA dans la formation risque également de priver les étudiants de la maîtrise de leur propre apprentissage au nom de la productivité. En automatisant des processus qui devraient normalement impliquer une réflexion et un effort personnels, l’IA peut réduire la capacité des étudiants à développer une compréhension profonde et une expertise dans leurs domaines d’étude.

    Cette perte de maîtrise s’apparente à ce que Rob Horning décrit comme le travail aliéné dans le contexte capitaliste. Au temps du Fordisme, les travailleurs étaient soumis à des processus de travail cadencés par la machine. Ils travaillaient à la chaine. Cela les privait de toute autonomie et surtout de leur créativité. Aujourd’hui, des robots les ont remplacés. L’IA utilisée de la sorte n’en ferait pas autrement. Cela pourrait se traduire par une autre forme de travail à la chaine, où le salarié (et l’étudiant) ne travaillent plus directement leurs textes, mais suivent plutôt ce que l’IA leur a fourni. Cela pourrait provoquer une forme d’aliénation aux outils d’IA, au détriment du développement de la capacité à penser de manière indépendante.

    L’impact sur l’apprentissage

    Les effets potentiellement néfastes de l’utilisation excessive de l’IA nous conduit dans des process un peu absurdes. Comme le souligne Ian Bogost, nous assistons déjà à des scénarios dans lesquels des étudiants génèrent des devoirs avec l’IA, que les enseignants font ensuite corriger par l’IA. On en arriverait vite à marcher sur la tête. Cette situation, qui peut exister, soulève des questions importantes sur la valeur et l’intégrité du processus éducatif.

    Le risque majeur est que cette technologie rende caduc certains des meilleurs outils d’apprentissage, notamment l’écriture elle-même. L’écriture n’est pas seulement un moyen de communiquer des idées, c’est aussi un processus qui permet de clarifier la pensée, d’approfondir la compréhension et de développer des compétences critiques. En remplaçant ce processus par une génération automatisée de contenu, nous risquons de priver les étudiants d’opportunités essentielles pour leur développement intellectuel.

    Il existe une grande différence entre l’apprentissage automatique et la « pensée machine » explique Ron Carucci dans le magazine Forbes. Dès l’instant où nous commençons à considérer l’IA comme une machine pensante, nous sommes dans le pétrin. En effet, cela signifie que nous avons essayé d’externaliser notre propre pensée critique et nos compétences de résolution de problèmes à une machine qui ne fait que répliquer et régurgiter les informations qu’elle a recueillies. Les grands modèles linguistiques recherchent des modèles d’information existants, peut-être même les synthétisent. Mais ils ne peuvent pas exercer d’appréciation, quelle que soit la nuance ou la rapidité de leurs résultats.

    Plus les étudiants utilisent les machines pour réfléchir à leur place, plus ils deviennent dépendants de ces machines, ce qui perturbe les processus cognitifs clés. Utiliser l’IA pour trouver une réponse par raccourci au lieu de la trouver par soi-même diminue leur réserve cognitive, ou si vous préférez les connexions entre les cellules cérébrales. L’hypothèse de la réserve cognitive reflète l’agilité de notre cerveau à résoudre des problèmes et à faire face à des situations inattendues explique Ron Carucci.

    En conclusion

    En conclusion, bien que l’IA offre des possibilités assez vertigineuses dans de nombreux domaines, son utilisation dans la formation, en particulier pour des tâches fondamentales comme l’écriture et la recherche, soulève de sérieuses préoccupations. Il est esentiel que les étudiants apprennent à se passer de ces outils, non pas par rejet de la technologie, mais pour préserver et développer des compétences essentielles qui ne peuvent être acquises que par l’effort et la pratique.

    L’éducation ne consiste pas seulement à acquérir des connaissances, mais aussi à développer la capacité de penser de manière critique, de résoudre des problèmes et de s’adapter à de nouvelles situations. Ces compétences sont primordiales pour le succès futur des étudiants, tant dans leur vie professionnelle que personnelle. Elles sont essentielles pour les étudiants en travail social. Il leur faut continuer à penser par eux-mêmes et non déléguer une quelconque décision à des IA qui n’auront pas dans leur mémoire tous les aspects particuliers d’une situation singulière.

    Alors que beaucoup utilisent l’IA sans le dire, il reste essentiel de trouver un équilibre entre l’utilisation de ces technologies comme outils d’assistance et la préservation des processus d’apprentissage. C’est bien le fait de ne pas utiliser l’IA qui favorise une véritable croissance intellectuelle. Les formateurs, les responsables de filières et les étudiants eux-mêmes doivent être conscients des limites et des risques associés à une dépendance excessive à l’IA dans la formation.

    En fin de compte, l’objectif de la formation devrait être de former des futurs professionnels capables de penser par eux-mêmes, de remettre en question les idées reçues et de contribuer de manière significative à la société. Ces compétences ne peuvent être pleinement développées que par un engagement actif dans le processus d’apprentissage, sans raccourcis artificiels. C’est en préservant ces aspects essentiels que nous pourrons préparer au mieux les étudiants dans un monde où l’IA jouera sans aucun doute un rôle de plus en plus important.

    La quasi-totalité des sources est en anglais, n’hésitez pas à utiliser un traducteur automatique :

    – ChatGPT : le mythe de la productivité | Dans les algorithmes : https://danslesalgorithmes.net/2024/09/17/chatgpt-le-mythe-de-la-productivite
    - Revue Spirale – Esprit critique et pouvoir d’agir. Vers le développement d’une « attitude critique » ? | Cairn.info : https://shs.cairn.info/revue-spirale-revue-de-recherches-en-education-2020-3-page-51?lang=fr
    - AI Reduces Critical Thinking | WVNexus : https://wvnexus.org/opinions/ai-reduces-critical-thinking
    - Why I Ban AI Use in Writing Assignments | Times Higher Education : https://www.timeshighereducation.com/campus/why-i-ban-ai-use-writing-assignments
    - Importance of Critical Thinking for Students | EssayPro : https://essaypro.com/blog/importance-of-critical-thinking-for-students
    - In the Age of AI, Critical Thinking Is More Needed Than Ever | Forbes : https://www.forbes.com/sites/roncarucci/2024/02/06/in-the-age-of-ai-critical-thinking-is-more-needed-than-ever
    - Why Should Students Not Use AI Tools to Write Assignments ? | Academic Assignments : https://www.academicassignments.com/blog/why-should-students-not-use-ai-tools-to-write-assignments

    https://dubasque.org/pourquoi-il-est-important-que-les-etudiantes-apprennent-a-se-passer-de-cha
    #ChatGPT #apprentissage #ESR #étudiants #AI #intelligence_artificielle #IA #université

    voir aussi :
    Guide sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le réseau de l’éducation
    https://seenthis.net/messages/1082156

    • A Student’s Guide to Not Writing with ChatGPT

      OpenAI has published “A Student’s Guide to Writing with ChatGPT”. In this article, I review their advice and offer counterpoints, as a university researcher and teacher. After addressing each of OpenAI’s 12 suggestions, I conclude by mentioning the ethical, cognitive and environmental issues that all students should be aware of before deciding to use or not use ChatGPT.

      “1. Delegate citation grunt work to ChatGPT. AI excels at automating tedious, time-consuming tasks like formatting citations. Just remember to cross-check all source details against original materials for accuracy.”

      That last sentence is probably there for legal reasons, because they know they can’t say ChatGPT will produce accurate results. Formatting citations and bibliographies means presenting metadata according to formal style instructions. This is not natural language. ChatGPT will make errors, which will take time to track and correct. Instead, use a reference manager, such as Zotero. It will format things reliably, exactly as expected. Just clean up the references’ metadata as you collect them, and then your bibliographies will never contain mistakes.

      “2. Quickly get up to speed on a new topic. ChatGPT can jumpstart your research by providing a foundational understanding of a subject.”

      ChatGPT is a human conversation simulator, not an information system or a knowledge base. It has no understanding of anything: it only outputs plausible responses. Do not ask an intermediary who has no capacity to understand information to explain it to you. Instead, go to your university library and look it up yourself, with the help of your local librarians. Actual information is contained in brains, documents and databases.

      “3. Get a roadmap of relevant sources. ChatGPT can guide your research by suggesting relevant scholars, sources, and search terms. But remember: while it can point you in the right direction, ChatGPT isn’t a substitute for reading primary sources and peer-reviewed articles. And since language models can generate inaccurate information, always double-check your facts.”

      (This is even more contentious than point 1, so we get two full sentences that are probably there for plausible deniability.) Because Chat GPT has no understanding of anything, it does not know what things like “a source” or “a true statement” are. Do not trust its directions. You will waste time and make mistakes. Again, ask a human or search for documents and data in a proper information system.

      “4. Complete your understanding by asking specific questions.”

      Because Chat GPT has no understanding of anything, it does not know actual answers to your questions, only plausible answers. It will generate true and false answers indiscriminately. This will set your learning back. Again, seek humans, documents and data directly instead of asking ChatGPT.

      “5. Improve your flow by getting feedback on structure.”

      Because Chat GPT has no understanding of anything, it does not understand what an “expected” or “improved” text structure is, even if you describe it. It can only upgrade your writing to middling quality, or downgrade it to that same level. Both will result in mediocre grades. To actually improve, ask a teacher, or join a group of students who give each other feedback; if such a group does not exist, get some people together and create it—this will be a useful experience by itself.

      “6. Test your logic with reverse outlining.”

      As an Australian study recently showed, ChatGPT does not know how to summarize, only shorten. So far, summarizing remains something only humans do well. So you should learn it: take a summarizing course from an information skills program. (Also, if you can’t summarize your own writing, something is wrong. Do not reverse outline your writing: outline first, then write.)

      “7. Develop your ideas through Socratic dialogue.”

      This is one suggestion that is related to ChatGPT’s actual function: simulating human communication. However, Socratic dialogue implies that you are conversing with someone who has a superior understanding of the topic and who slowly brings you to their level. And, unfortunately, ChatGPT is not Socrates. Using ChatGPT as a “sparring partner” will constrain you to its level: a machine which produces plausible human sentences. Instead, suggest this exercise to your teachers and fellow students, and do it with someone more knowledgeable than you.

      “8. Pressure-test your thesis by asking for counterarguments.”

      To improve your thinking, you must be able to come up with counterarguments, not just answer them. Using ChatGPT to do half the work will stunt your progress. Instead, come up with counterarguments yourself. And if you must ask for help, do not ask ChatGPT: it can only produce weak reasoning, so it will make you plateau into mediocrity. Ask someone who can create strong arguments to make you think harder.

      “9. Compare your ideas against history’s greatest thinkers.”

      ChatGPT can entertain you but it has no ability to design such a complex exercise so that you may learn from it. Suggest this idea to a teacher instead. This is what they are trained to do.

      “10. Elevate your writing through iterative feedback.”

      This is a variant of point 5 about feedback. Again, using ChatGPT will constrain your work to a machine’s idea of the human average. Instead, go for feedback sessions with teachers and fellow students, and make those iterative if needed.

      “11. Use Advanced Voice Mode as a reading companion.”

      (“Avanced Voice Mode” means ChatGPT listens to you reading something out loud and tries to answer your questions about it.) This is a variant of points 2-4 about information. ChatGPT has no understanding of anything. It will not provide reliable interpretations of what you’re reading. Instead, look up the definitions of words you don’t know; find scholarly work that analyzes the text; ask another student working on the same text if you’re unsure of what you’ve read.

      “12. Don’t just go through the motions—hone your skills. […] Try asking ChatGPT to suggest ways to develop your ability to think critically and write clearly.”

      Again, ChatGPT has no understanding of anything. This includes “critical thinking” and “writing techniques”. Look these things up in your university library catalogue; read what you find; ask your teacher about it; and then practice, practice, practice.
      Final words

      ChatGPT is designed to simulate human conversation. Using a probabilistic model of language, it communicates for communication’s sake, to fool you into thinking it’s human. It’s a bullshit machine. It works as a novelty thing, for entertainment. But it’s not a reliable tool for learning, so I believe students should be wary of it.

      Whenever students ask me about ChatGPT, I mention the following three issues:

      - ethics: most of the models were built on stolen data;
      - cognition: using it makes you more dependent and less smart, as studies have started to show (here’s a link to a French one) ;
      - environment: the energy costs of generative AI are an order of magnitude greater than pre-existing technology (and it’s not even profitable, so we’re burning fuel for nothing).

      It’s usually enough to give most of my students some pause. They’re creative young people, so they empathize with robbed creators. They want tools that help them, not hinder them. And a lot of them are (rightly) concerned about the environment, so they’re shocked to learn that ChatGPT takes ten times the amount of energy Google does to answer the same question, usually worse (but Google is catching up, or down I should say).

      The good news is that, as Jared White puts it:

      “You can literally just not use it. […] you can be a fulfilled, modern, very online, technical expert & creator and completely sit out this hype cycle.”

      If you need more information, I strongly recommend out that you check out Baldur Bjarnason’s Need To Know. It’s a website that provides an accessible summary of his deep literature review of the risks behind using generative AI. It’s a great starting point.

      https://www.arthurperret.fr/blog/2024-11-14-student-guide-not-writing-with-chatgpt.html

  • Daniel Moser : « 🚗 The Vicious Cycle of Autom… » - Framapiaf
    https://framapiaf.org/@dmoser@mastodon.social/109748469612404899

    The Vicious Cycle of Automobile Dependency 👇👇

    Unsustainable planning practices reinforce a cycle of increased automobile use, more automobile-oriented community redevelopment, and reduced mobility options.

  • Débat : #Classement_de_Shanghai, un palmarès pas très classe !

    Chaque été sort le 15 août la nouvelle mouture du « classement de Shanghai » – plus précisément le classement de l’Université Jiao Tong de Shanghai. Son but initial était de situer les universités chinoises par rapport à leurs homologues américaines. Il peut d’ailleurs « être considéré comme le symptôme du goût traditionnel de la civilisation chinoise pour l’#ordonnancement et la #classification ».

    Sorti des frontières chinoises depuis sa création en 2003, ce classement est devenu au fil des années un outil de #comparaison universel, non seulement des universités mais aussi des pays entre eux. Cependant, la communication qui l’entoure n’est-elle pas disproportionnée par rapport à sa qualité technique ?

    Une #méthodologie à questionner

    Notons d’abord que ce classement se concentre exclusivement sur l’activité de #recherche des établissements. Certaines disciplines, comme les #sciences_humaines_et_sociales, n’y sont pas prises en compte.

    L’activité d’#enseignement n’y est pas évaluée, pas plus que la #vie_étudiante, les #activités_culturelles ou l’insertion dans les territoires. Autant de dimensions qui sont pourtant essentielles pour un futur étudiant voulant juger de la « #qualité » d’une université. Globalement, ce classement favorise les universités qui sont fortes en #sciences_expérimentales, situées dans les pays où l’on parle l’#anglais.

    Sa méthodologie soulève aussi les critiques, sur le plan de la #bibliométrie, de ses #indicateurs, imparfaits et biaisés, de la difficulté d’homogénéiser les données entre plusieurs pays. C’est le #jugement_subjectif du fournisseur du classement qui détermine les indicateurs les plus importants, sans aucune justification théorique, et qui les impose de fait aux utilisateurs.

    Plus généralement, il est aberrant qu’un classement qui se base sur une seule note globale puisse refléter la #qualité d’une université, structure très complexe et diverse. C’est un peu comme s’il s’agissait de désigner la meilleure voiture du monde. Une Zoé est-elle une « meilleure » voiture qu’une Porsche ou une Kangoo ? Cela dépend bien sûr de l’usage du véhicule, du budget qu’on peut lui consacrer, et aussi de paramètres subjectifs (esthétique, « marque préférée » etc..). Alors pourquoi fait-on pour les universités ce qu’on ne se permettrait pas de faire pour l’automobile ?

    Une #perversité dans les usages

    Même faux, même biaisés, les classements ne poseraient pas un gros problème s’ils n’étaient pas devenus un #produit_de_consommation, une aubaine commerciale et même un dangereux outil de #management stratégique.

    Revenons sur les différentes catégories de « consommateurs » de classements. Au départ, les classements s’adressaient aux étudiants et à leurs familles, afin de les aider à effectuer leurs choix. C’était le cas du premier d’entre eux, celui de US News and World report en 1983, puis aujourd’hui du « classement de Shanghai ».

    https://twitter.com/FR_Conversation/status/1151738587047743489?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E11

    On aboutit ainsi à des sortes de « Guides Michelin » des universités. Comparaison intéressante, car on sait que la légitimité du guide rouge a été fortement remise en cause, à la fois sur des questions de méthodologie (système ancien, flou, manque de transparence), mais aussi d’usage (pression accrue sur les bénéficiaires).

    Mais la comparaison s’arrête là : si je fais confiance à une mauvaise évaluation dans un guide gastronomique, je ferai, au pire, un mauvais repas. Si je n’utilise que les classements pour choisir mes études, je risque de faire un mauvais choix de vie !

    Autres usagers des classements, les #entreprises. Elles embauchent quelquefois plus un diplôme « bien classé » qu’une personne. Dans notre pays, cette tendance existe dans le privé mais aussi dans la fonction publique avec l’exception culturelle des « grands corps », où certaines écoles ont le monopole de certains emplois.

    Les universités elles-mêmes peuvent être tentées de les utiliser pour sélectionner un partenaire étranger. Mais elles peuvent, hélas, aussi construire une stratégie visant à progresser dans les classements, plutôt que se concentrer sur leurs objectifs fondamentaux : qualité des formations, compétitivité des recherches, services rendus à la société. On passe ainsi du classement comme simple « élément d’information et de contexte » à un « élément d’une stratégie ».

    Enfin, l’État a pu considérer la progression dans les classements comme objectif stratégique pour ses universités. De même, le risque existe de voir les classements pris en compte par des organismes de contrôle ou comme variables dans des algorithmes d’attribution de #ressources.

    Du commercial au politique

    Oui, le classement des universités « fait vendre ». Il s’insère dans la passion de la presse magazine pour les #palmarès en tous genres, et est devenu un des principaux marronniers de la presse estivale. L’analyse sémantique montre que c’est paradoxalement la #contre-performance des établissements français qui fait évènement (« les universités françaises piétinent », « les universités françaises restent en retrait »…).

    Comme un club de football, les principaux classements commercialisent aussi de lucratifs produits dérivés : consultance, publicités, congrès, salons, aides à la rédaction de candidatures…

    La manière dont les universités ou les gouvernements communiquent sur ces classements ne peut qu’augmenter ce véritable #cercle_vicieux qui transforme le classement d’un simple outil en un #objectif_stratégique. On ne devrait pas commenter la place de nos universités dans ces classements avec un vocabulaire sportif : les universités ne sont pas dans un championnat.

    Il existe malgré tout un effet positif à cette médiatisation, celui de voir le public s’intéresser à un succès académique. Mais alors, pourquoi aussi peu d’écho à d’autres réussites ? Ainsi, l’attribution à Martin Karplus, professeur à l’université de Strasbourg et à Harvard, du prix Nobel de chimie 2013, est passée quasiment inaperçue en France.

    L’appétence pour les classements ne reflèterait-elle qu’un manque d’information sur la science et l’université ? L’importance prise par les classements comme celui de Shanghai comblerait-elle un vide créé par des universités ne communiquant pas assez avec le grand public ?

    Évaluer, et non classer

    On pourrait dire que tout cela est un argument de « mauvais perdant » : moins bien on est classé, plus on critique les classements ! Or la LERU (League of European Research Universities), qui regroupe les universités européennes les mieux classées, a adopté une position très claire :

    "Les classements sont, au mieux, sans rapport avec les #valeurs de l’université ou, au pire, les saperont. Ils encouragent la convergence vers un modèle dominé par la recherche, réduisant la diversité du système et sapant le potentiel de contribution à la société par d’autres moyens (..) Cela pourrait conduire à une culture obsessionnelle de la #mesure et du #contrôle, et promouvoir l’idée d’« #universités-supermarchés »."

    Mais attention, questionner les classements, mettre en cause leur importance, discuter leur #fiabilité ne veut pas dire que les universités ne veulent pas être évaluées, puisque l’#évaluation est dans leur quotidien.

    Répétons-le, on ne peut pas résumer la diversité et la richesse de nos universités par des chiffres à la fiabilité contestée. Le but de l’université n’est pas de figurer dans les classements. Elle travaille à la réussite de ses étudiants, pour qu’ils approfondissent le plus loin possible leurs savoirs. Elle se consacre à une recherche à la fois désintéressée et tournée vers la société, toute la société. C’est à l’aune de ces objectifs fondamentaux que la qualité de l’université devrait être regardée, analysée, commentée, mais sans classer.

    https://theconversation.com/debat-classement-de-shanghai-un-palmares-pas-tres-classe-142444
    #Shangai #ranking #université #facs #classement #critique

    –—

    Je signalais ici l’entrée de l’#Université_Grenoble_Alpes dans les top 100 du classement :
    https://seenthis.net/messages/871918#message871920

  • Dominique Eddé : « Le #Liban, c’est le monde à l’essai »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/08/16/dominique-edde-le-liban-c-est-le-monde-a-l-essai_6049067_3232.html

    Ce qui s’est passé dans le port de la ville, le 4 août, est le produit d’une #faillite générale, monumentale, qui engage certes et avant tout nos gouvernants criminels, mais aussi le monde entier. Pourquoi le monde entier ? Parce que nous vivons le bon à tirer d’un processus de #décomposition engagé il y a plusieurs décennies dans cette partie du monde. Parce que nous tardons tous à comprendre que le mal est partout dans l’air, à l’image du coronavirus. Le désarroi des Libanais découvrant brusquement qu’ils sont en deuil, sans toit, peut-être bien sans pays, est le raccourci foudroyant du mal qui a dévasté l’Irak, la Syrie, la Palestine…

    • Ce qui s’est passé dans le port de la ville, le 4 août, est le produit d’une faillite générale, monumentale, qui engage certes et avant tout nos gouvernants #criminels, mais aussi le monde entier. Pourquoi le monde entier ? Parce que nous vivons le bon à tirer d’un processus de décomposition engagé il y a plusieurs décennies dans cette partie du monde. Parce que nous tardons tous à comprendre que le mal est partout dans l’air, à l’image du coronavirus. Le désarroi des Libanais découvrant brusquement qu’ils sont en deuil, sans toit, peut-être bien sans pays, est le raccourci foudroyant du mal qui a dévasté l’Irak, la Syrie, la Palestine...

      Nous nous obstinons à ignorer qu’il n’est plus une plaie, plus un pays, plus une partie du corps, plus une partie du monde qui puisse se penser isolément. Les dictatures arabes, les armées islamistes, la brutalité et l’#impunité de la politique israélienne, les grandes et moyennes puissances prédatrices, les solidarités morbides – Nord et Sud confondus –, le règne sans bornes de l’argent, les intérêts communs des ennemis déclarés, le #fanatisme religieux, les trafics d’armements, tout cela est en cause dans le port de Beyrouth. Le langage de la #géopolitique peut encore informer, trier, analyser. Mais il ne peut plus voir au-delà de ce dont il traite . Il est prisonnier de la convention selon laquelle on peut fabriquer et vendre des armes d’un côté et fabriquer la paix de l’autre. Le #clivage est si profond, le #mensonge si bien organisé, que nous pouvons encore feindre la #cohérence. Mais jusqu’à quand ?

      Outre l’effondrement économique et social, nous vivons sous la menace d’un grand danger psychiatrique. Les têtes sont elles aussi au bord de la #faillite. Si rien ne change, au rythme où elles sont menées, elles ne tiendront qu’à l’une de ces deux conditions : perdre la raison ou se robotiser. Les autres, celles qui préfèrent la liberté à la fusion, se cognent déjà un peu partout aux barreaux de l’extrême solitude. Et ce constat qui vaut pour le #Liban vaut bien au-delà. La #fusion, c’est le #fascisme, la #dictature, le pouvoir entre les mains d’une poignée d’hommes ou de #machines.

      Bocal explosif

      A force d’avoir tout vu, tout entendu, tout encaissé, durant les cinquante dernières années, les Libanais sont sans doute mieux armés que d’autres pour traiter avec la #folie. Mais à trop tirer sur la corde, elle risque de se rompre d’un moment à l’autre. Les habitants de ce pays peuvent se serrer les coudes comme ils peuvent s’entre-tuer . Ils peuvent remonter la pente comme ils peuvent s’écraser à jamais. Ils n’en peuvent plus d’être si solidaires et si divisés à la fois . Ils ne pourront s’en sortir que par eux-mêmes, certes, mais, comme tous les grands blessés, ils ne pourront s’en sortir par eux-mêmes sans secours. Ils n’y parviendront que si cette partie du monde sort du #piège dans lequel elle est enfermée. Enfermée par elle-même et par les puissances étrangères. Il y a, ici, un #cercle_vicieux qui sabote toutes les énergies positives.

      Avec un million et demi de réfugiés – plus d’un quart de la population – sur leur sol, les Libanais sont entassés dans un bocal explosif. Pris en otage par leurs chefs de communautés respectives, ils sont animés, pour la plupart, par une égale envie d’en finir mais aussi, compte tenu de leurs réflexes ataviques et de l’absence d’Etat, par une égale incapacité à franchir le pas. Ils ne savent plus qui ils sont. Ils n’en peuvent plus de repartir à zéro. Le Liban était pris en tenaille par la Syrie et Israël. Il l’est à présent par Israël et le Hezbollah. Que s’est-il passé le 4 août à 18 heures ? Deux déflagrations successives se sont produites sur le lieu d’un gigantesque dépôt de nitrate d’ammonium à proximité d’un hangar dont on nous dit qu’il abritait des armes. La criminalité des pouvoirs libanais qui ont endossé cet effroyable stockage est flagrante, indiscutable. Sera-t-elle déterminée, jugée, punie ? Pourquoi le récit séquencé de l’horreur ne nous a-t-il pas encore été livré ? Quelle est l’origine de la première explosion ? Qu’y avait-il dans ce dépôt ? Qui protège qui de quoi ?

      « Raisonnements circulaires »

      Lors de sa visite au Liban, le 6 août, le président Emmanuel Macron a rencontré une vingtaine de personnes issues de la « société civile », dont j’étais. Cette brève rencontre se tenait à l’ambassade de France au terme d’une table ronde entre lui et les chefs de guerre qui s’était tenue dans la pièce à côté.

      A l’issue de l’entretien, il nous a dit notamment cette petite phrase qui, depuis, a fait son chemin : « Je suis frappé par vos raisonnements circulaires. Aussi bien dans la pièce à côté (celle des mafieux) que dans celle-ci (celle où nous nous trouvions) ». J’aurais aimé que la comparaison fût évitée, mais c’est vrai me suis-je dit, sur-le-champ, il a raison, nous sommes prisonniers de raisonnements circulaires. Nous n’arrivons pas à nous organiser. L’opposition commence à peine à s’unir. Puis, tel un souvenir que l’on tarde à s’approprier, la phrase m’a révélé son sens à retardement. Le mot « circulaire » qui évoque le cercle vicieux, la quadrature, l’enfermement, m’est apparu comme « un déplacement » au sens freudien du terme, comme une projection. Le cercle n’était pas dans nos raisonnements mais dans le sujet. Je dirais même que nous avons ici une capacité obligée et quasi inhumaine à penser la complexité.

      C’est elle, c’est la réalité qui tourne en rond. C’est la donne. Le pays. La région. Le manège du monde. La règle du jeu. C’est le jeu qui impose le cercle. La rotation, telle qu’elle est, rejette de tous côtés la moindre velléité de solution. Le Liban est dans l’œil du cyclone. Tout œil extérieur est désormais obligé de comprendre que pour rompre cette spirale infernale, c’est au cyclone qu’il faut s’en prendre. Par « s’en prendre » je veux dire décider, de la base au sommet, d’un coin du monde à l’autre, que la paix régionale est préférable à la guerre. Rien que ça ? L’utopie ou la mort ? Oui. A petite et à grande échelle, je ne vois rien d’autre . « Paix régionale » signifiant l’exact contraire du sordide arrangement qui vient de se faire entre Mohammed Ben Zayed [le prince héritier d’Abou Dhabi] et Benyamin Nétanyahou [le premier ministre israélien] sous la houlette de Donald Trump [le président américain].

      Le Liban, c’est le monde à l’essai. S’il se vide de son #sens, de ses #différences, de sa jeunesse, il sera le signe avant-coureur d’une catastrophe bien supérieure à celle qui se vit actuellement sur son sol. Il est trop tard pour défendre souveraineté et territoires à coups de #murs, de #ghettos et de frontières physiques. Il n’est plus d’autre issue que d’activer à l’échelle de la planète un coup de théâtre hissant la pulsion de vie au-dessus de la pulsion de mort . Le sujet du jour – au Liban aujourd’hui et partout ailleurs dans un second temps –, c’est la #santé_mentale, c’est l’avenir de l’être. Livré à la réalité telle qu’elle est, l’inconscient collectif ne sera pas moins inflammable, à terme, qu’un hangar de nitrate d’ammonium. Il suffira, pour mettre le feu, du largage d’un missile, réel ou symbolique, physique ou verbal. Ce ne seront plus des morceaux de villes mais des morceaux de pays qui partiront en fumée.

  • Flexibiliser le travail et produire des vies illégales

    En France, l’#ubérisation trouve des ressources dans les migrations. Ce phénomène est ici analysé et décrit par un ressortissant de Guinée qui vit à Grenoble depuis 2016, co-auteur d’une recherche-création entre géographie, art et droit.

    Si les migrations vers l’Europe et la France occupent les discours politiques et médiatiques, leurs modalités d’exploitation par le travail y sont bien moins évoquées. Les vies rendues illégales constituent une réserve de #main-d’œuvre exploitable et hyperflexible, dans un contexte précisément de flexibilisation et d’ubérisation du travail, notamment par le développement des applis de VTC ou de #livraison. Dans leurs travaux portant sur les liens entre migrations et travail, Sandro Mezzadra et Brett Neilson précisent que « la flexibilité, qui fabrique de la #précarité, est devenue la norme », tandis que les migrations forment « un terrain crucial d’expérimentation pour de nouvelles formes de "capture" du travail ».

    Cette exploitation du travail en #France, de vies rendues illégales, s’inscrit dans des formes d’exploitations plus larges de la force de travail, notamment d’entreprises européennes et françaises en Guinée pour l’extraction de ressources minières, qui entraînent des destructions sociales et environnementales et des migrations. Autrement dit, les liens entre migrations et exploitation de la force de travail se comprennent depuis un continuum qui dépasse très largement les frontières nationales, et s’inscrit dans des rapports en grande partie hérités de la #colonisation.

    #Pathé_Diallo, ressortissant de Guinée qui réside à Grenoble depuis 2016, décrit cette relation entre migration, exploitation et ubérisation dans le cadre d’une œuvre de création et de recherche intitulée Bureau des dépositions (1), à laquelle participent plusieurs géographes.

    « C’est un cercle vicieux »

    « Les Etats font exprès de ne pas délivrer des papiers à tout le monde pour que d’autres puissent exploiter les #sans-papiers dans des conditions difficiles, sur certains #chantiers ou dans les sites touristiques de ski en montagne, ou dans les travaux de #ménage. Depuis quelques mois à Grenoble, des personnes exploitées et sans papiers font de la #livraison de nourriture sur des #vélos. Ils sont mal payés et la cible de #Uber et des Etats, qui autorisent que le #droit_du_travail soit réduit à rien. C’est comme si les personnes donnaient toute leur énergie pour ne rien avoir.

    « C’est comme dans le domaine de la #sécurité. Dans la sécurité, c’est 12 voire 15 euros de l’heure pour la nuit. Celui qui te sous-traite va te payer 7 ou 8 euros par heure. Toi tu es sur le terrain. C’est parfois mieux que rester toute la journée à ne rien faire. Dans l’attente des papiers, beaucoup deviennent fous. Etre exploité devient préférable pour ne pas rester assis, passer toute la journée sans rien faire pendant des années, sans savoir quand le papier viendra. Ce sont les Etats et les entreprises qui se servent de la #main-d’œuvre qui sont responsables, en n’autorisant pas à travailler. C’est un #cercle_vicieux : pour se régulariser, il faut du travail ; pour avoir du travail, il faut des papiers.

    « Créer un syndicat sans-papiers permettrait de réduire le taux de chômage. En France, la #clandestinisation des travailleurs permet de réduire le #coût_du_travail, aux bénéfices des patrons et de leurs sous-traitants qui ainsi échappent à l’impôt.

    « Il faut respecter l’homme. C’est l’homme qui fait le papier, pas le papier qui fait l’homme.

    « L’exploitation des sans-papiers en Europe entre en écho avec l’exploitation de la main-d’œuvre dans les #mines en #Guinée. Ce sont les mêmes personnes qui exploitent et ce sont les mêmes personnes qui sont exploitées. Un mineur d’or ou de bauxite, en Guinée, peut parvenir à rejoindre la France pour travailler dans des conditions plus précaires encore que la mine. Dans les mines, les patrons sont souvent étrangers. Tout ce qui est exploitable en Guinée est exporté en tant que matière première à l’extérieur : Canada, Etats-Unis, pays d’Europe, comme la France, l’Allemagne… Dans la mine, il y a beaucoup de pollution, qui entraîne des maladies : sinusite, cancer du foie… La poussière mélangée aux produits chimiques crée des colonnes de plusieurs kilomètres, ce qui pollue les cours d’eau. L’eau est puisée par les populations. Les employés des mines ne sont pas bien payés. »


    https://www.liberation.fr/debats/2019/10/02/flexibiliser-le-travail-et-produire-des-vies-illegales_1754677
    #travail #exploitation #illégalisation #asile #migrations #réfugiés #flexibilisation #tourisme #extractivisme #continuum_colonial #post-colonialisme #économie

    ping @albertocampiphoto @reka @karine4

    • Sfruttamento e caporalato tra i migranti della #gig_economy

      #Deliveroo, #Uber_eats, #Glovo, #Just_Eat, da quando le #app di consegna a domicilio sono diventate una realtà di uso quotidiano per migliaia di potenziali fattorini si sono spalancate le porte della «gig economy», i cosiddetti lavoretti gestiti tramite applicazioni per #smartphone. A Milano due terzi di loro sono migranti e sebbene portino in spalla lo zaino delle più famose app di consegna a domicilio, raccontano di non lavorare direttamente con le piattaforme e di avere degli intermediari. Ora anche la Procura di Milano ha annunciato l’apertura di un’indagine conoscitiva sulle condizioni di lavoro dei rider e sulle imprese che ne gestiscono le consegne - con un’attenzione particolare alla sicurezza stradale e al possibile impiego di fattorini stranieri senza i documenti per lavorare e potenzialmente soggetti a caporalato. Lorenzo Pirovano ci fa conoscere la loro quotidianità.

      Michael non era mai riuscito a lavorare in Italia. Ospite di un centro di accoglienza straordinaria a cinquanta chilometri da Milano, aveva passato gli ultimi due anni sospeso tra l’attesa del verdetto sul suo status di rifugiato e la complicata ricerca di un impiego. “Il responsabile della casa non voleva che lavorassimo, soffrivo a starmene fermo e aspettare chissà cosa”.

      Poi nel 2017 a Milano è arrivato il boom delle app di consegna a domicilio in bicicletta (Deliveroo, Uber eats, Glovo e Just Eat) e per migliaia di potenziali fattorini si sono spalancate le porte della gig economy (i cosiddetti “lavoretti” gestiti tramite applicazioni per smartphone).

      Da allora, ogni mattina, cubo termico sulle spalle e mountain bike accessoriata, centinaia di migranti come Michael raggiungono Milano e pedalano per le sue strade nella speranza di effettuare più consegne possibili. “Ci sono giorni che lavoro undici ore” rivela Michael, 33 anni e una fuga dalla Liberia passando per l’inferno libico. “Ma alla fine del mese non ho mai portato a casa più di 600 euro”.

      Michael e i suoi colleghi sono i “migranti della gig economy” che rappresenterebbero quasi due terzi dei rider che effettuano consegne a domicilio per le strade della città. Molti di loro sono ospitati nei Cas (Centri di accoglienza straordinaria) disseminati nell’hinterland milanese o nelle province attigue. Alcuni, come Michael, ne sono appena usciti e condividono una stanza in periferia. Secondo i dati raccolti dall’Università degli Studi di Milano la maggior parte risiederebbe in Italia da più di due anni.

      Come tutti i ‘ciclofattorini’, anche i migranti devono fare i conti con un contratto di lavoro occasionale che riconosce poco più di tre euro a consegna, senza un minimo orario e senza chiare coperture contributive e assicurative. Nonostante questo il settore delle consegne a domicilio si sostiene principalmente sulla loro manodopera, grazie alle permeabili barriere all’entrata (in molti casi non è necessario sostenere un colloquio), alla necessità di guadagno immediato e alla dimostrata possibilità di lavorare anche se sprovvisti di documenti. Molti di loro ammettono di non conoscere i propri diritti di lavoratori, altri raccontano di non avere scelta, trattandosi dell’unica occupazione trovata. Raramente si rivolgono ai sindacati e anche Deliverance, il sindacato auto organizzato dei ciclofattorini milanesi, fa fatica a coinvolgerli. “Rivendichiamo tutti gli stessi diritti ma esiste una spessa barriera linguistica e culturale” ammette Angelo, membro e portavoce del collettivo.

      La settimana scorsa la Procura di Milano aveva annunciato l’apertura di un’indagine conoscitiva sulle condizioni di lavoro dei rider e sulle imprese che ne gestiscono le consegne, con un’attenzione particolare alla sicurezza stradale e al possibile impiego di fattorini stranieri senza i documenti per lavorare. “Che ci sia un’inchiesta in corso, seppur con colpevole ritardo, è una buona notizia” commenta Angelo. “Che non si trasformi però in una caccia alle streghe tra la categoria di lavoratori più vulnerabili, quella dei migranti”.
      “Riceviamo la metà della cifra visualizzata sull’app”

      Sotto Porta Ticinese, nei pressi della Darsena, trovano riparo una decina di rider con gli occhi fissi sullo smartphone in attesa di una consegna da effettuare. Attorno a una delle sue colonne si raccolgono alcuni nigeriani mentre al centro, seduti sugli scalini, un drappello di giovani ragazzi chiacchiera in bambara. Uno di loro approfitta della pausa per togliersi le scarpe, stendere un lenzuolo, inginocchiarsi e pregare.

      Molti di loro, sebbene portino in spalla lo zaino delle più famose app di consegna a domicilio, raccontano di non lavorare direttamente con le piattaforme e di ricevere la paga da alcune aziende italiane.

      L’occhio dei magistrati milanesi potrebbe così cadere anche sulla catena di intermediari che connette i rider in bicicletta all’app da cui ricevono i soldi.

      L’avvento della gig economy – che in origine doveva portare a una totale disintermediazione del lavoro – ha infatti ricreato dinamiche già conosciute: alcune legali, come l’attività delle imprese di intermediazione; altre illegali, come il “subaffitto dei profili” e, appunto, l’impiego di manodopera irregolare.

      Uber eats – costola del colosso Uber, valutato 75 miliardi di dollari e conosciuto in tutto il mondo per il servizio privato low cost di trasporto passeggeri – è attiva a Milano principalmente grazie a due imprese (Flash Road City e Livotti SRL) che si avvalgono della sua applicazione per gestire e spartirsi il lavoro di centinaia di fattorini migranti. “Queste imprese non fanno ufficialmente parte di Uber eats ma il rapporto di collaborazione c’è” raccontano alcuni loro lavoratori, “il risultato è che alla fine del mese puoi ricevere anche solo la metà dell’importo che visualizzi sull’applicazione”

      L’intermediazione infatti ha un costo elevato, un prezzo che però molti migranti sono pronti a pagare per afferrare, come ammettono loro stessi, “un’opportunità unica di lavorare, soprattutto per chi non ha i documenti”.

      Lo schema è semplice: Uber mette l’applicazione, il sistema di pagamento e il marchio al servizio di queste imprese, mentre loro si occupano delle relazioni coi ristoranti e del rapporto con i lavoratori. “Dalle cifre visualizzate sull’app bisogna togliere la nostra parte, ma questo lo diciamo chiaramente ai nostri dipendenti” spiega il rappresentante di un’impresa intermediaria. Così il margine di guadagno per il rider si abbassa notevolmente, come testimoniato da Michael e da altri suoi colleghi stranieri.
      Possibilità e trucchi

      Intermediazione o no, il lavoro tramite app si è convertito in una possibilità anche per chi non ha le carte in regola per lavorare, come dimostrano i primi controlli della Procura di Milano che su una trentina di rider ha individuato tre migranti senza i documenti.

      I rappresentanti delle imprese di intermediazione negano però di impiegare migranti senza permesso di soggiorno. Uno di loro sostiene che “a volte siamo noi stessi ad aiutarli nella pratica per rinnovare il permesso”, mentre Uber e Glovo hanno invece ammesso di non essere in grado di garantire che tutti i rider attivi sulle loro applicazioni abbiano i requisiti per lavorare. “Da parte nostra c’è tutto l’impegno affinché ad operare sulla piattaforma ci siano solo corrieri che hanno i requisiti per farlo” ha dichiarato un rappresentante di Uber in Italia. Glovo aveva dichiarato che “il rischio esiste, ma ogni giorno cerchiamo di monitorare meglio la situazione”.

      Nonostante le quasi inesistenti barriere all’entrata, l’offerta di lavoro supera la domanda e molti aspiranti rider non vengono accettati dalle app. Per un migrante la probabilità di veder approvata la propria candidatura si assottiglia, soprattutto quando non conosce la lingua o non ha i documenti in regola. Nascono così dei meccanismi di reclutamento nascosti che riducono al minimo il margine di guadagno del rider, ultimo anello di una catena fatta anche di trucchi e inganni.

      Pietro, giovane egiziano, si era candidato a lavorare in alcune delle app attive a Milano, senza successo. Poi un amico gli ha proposto una scorciatoia. «Mi ha dato un numero di telefono dicendomi che c’era un account disponibile. Così ho telefonato ad H. ed è iniziata la mia esperienza come rider».

      Pietro ha iniziato quindi a lavorare con il “profilo” di un’altra persona, ricevendo ogni mese i soldi direttamente da H. al netto della sua “trattenuta”. “H. fa così con tutti i profili che affitta. Per farti lavorare si prende il 10% di ogni consegna” racconta. “Non so da dove venga il profilo che uso e non conosco gli altri rider che lavorano in questa maniera”.
      “Molti migranti vogliono lavorare ma non possono”

      “I richiedenti asilo sono una piccola minoranza tra i migranti presenti sul territorio italiano” spiega Pietro Massarotto, avvocato volontario del Naga, associazione milanese che dal 1987 si occupa di cittadini stranieri, soprattutto di quelli privi di permesso di soggiorno e dei richiedenti asilo. “Nella maggior parte dei casi abbiamo a che fare con migranti “ordinari”, il cui permesso di soggiorno dipende strettamente dal lavoro svolto”.

      Consegnare a domicilio tramite le app, seppure senza garanzie e con margini di guadagno assai risicati, può diventare fondamentale per mantenersi “in regola” ed evitare la condizione praticamente irreversibile di irregolarità. Questa, nel caso venga raggiunta per il diniego della richiesta di asilo o per la mancanza di un impiego regolare, si converte nella necessità urgente di trovare alternative per poter sostenersi economicamente. “Qui va sfatato il mito del cittadino straniero che non vuole lavorare” precisa Massarotto. “È vero il contrario: spesso non viene messo nelle condizioni di lavorare”.

      Le risposte della politica sono proseguite però sulla via di un accesso più duro allo status di migrante regolare. “Purtroppo le politiche di gestione dell’immigrazione stanno determinando e determineranno sempre più un incremento esplosivo dei soggetti senza permesso di soggiorno, che per ovvie ragioni lavorano lo stesso”.
      “Fare il rider è meglio di niente”

      Omar è uno dei tanti che di mattina lascia il “campo” dove vive per tornarci solo dopo mezzanotte. Ci sono giorni in cui il bottino è talmente magro da coprire appena il prezzo del biglietto. Viene dal Gambia, ha 22 anni e uno sguardo perso nel vuoto. “Ogni giorno prendo il treno e torno a casa per questo cazzo di lavoro” si sfoga indicando lo zaino termico. È rimasto senza permesso di soggiorno e insieme a quello ha perso la speranza di costruirsi una nuova vita in Italia. “Vorrei impegnarmi in altro, ma qui se non hai i documenti non puoi fare nulla”. A chiedergli se è felice annuisce poco convinto: “fare il rider è meglio di niente, diciamo così. Meglio di niente.”

      https://openmigration.org/analisi/sfruttamento-e-caporalato-tra-i-migranti-della-gig-economy
      #Italie #rider

    • Un vaste #réseau_d’exploitation de chauffeurs #VTC sans papiers démantelé dans les #Hauts-de-Seine

      Cinq personnes soupçonnées d’avoir exploité illégalement une centaine de travailleurs non déclarés ont été mises en examen et écrouées.

      Les chauffeurs ne percevaient qu’« une infime partie des prestations effectuées » et commandées par le biais d’applications comme #Uber, #Kapten, #Bolt ou #Heetch. Cinq hommes soupçonnés d’avoir exploité illégalement une centaine de #travailleurs_non_déclarés, pour la plupart sans papiers et employés comme chauffeurs de voiture de transport avec chauffeur (VTC) ont été mises en examen et écrouées, vendredi 21 février, a annoncé le parquet de Nanterre dans un communiqué.

      Elles ont été mises en examen pour « aide au séjour irrégulier, blanchiment, exécution d’un travail dissimulé, recel, traite des êtres humains commise à l’égard de plusieurs personnes, faux en écriture, faux et usage de faux documents administratifs et abus de biens sociaux », le tout « en bande organisée », a précisé le parquet.

      « Horaires très larges sous la pression »

      Ces cinq hommes sont soupçonnés d’avoir monté deux sociétés au travers desquelles ils employaient une centaine de chauffeurs « travaillant avec des horaires très larges sous la pression de leurs employeurs qui arguaient de leur situation précaire » pour les contraindre à obéir.

      La majorité des profits générés étaient perçus par les cinq hommes. « Les premières investigations ont démontré le caractère particulièrement lucratif de ce trafic, générant des mouvements financiers à hauteur de centaines de milliers d’euros », a précisé le parquet.

      Quelque 195 000 euros ont été saisis sous forme d’argent liquide et de voitures de luxe. Les deux sociétés détenaient une cinquantaine de véhicules. D’après les enquêteurs de la sous-direction de la lutte contre l’immigration irrégulière (SDLII) et de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP) chargée de l’enquête, « ce trafic se déroulait depuis au moins deux années ».

      https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2020/02/22/un-vaste-reseau-d-exploitation-de-chauffeurs-vtc-sans-papiers-demantele-dans

  • Globalization made economic production more vulnerable to climate change
    http://phys.org/news/2016-06-globalization-economic-production-vulnerable-climate.html

    L’#économie plus fragile face au réchauffement
    http://www.journaldelenvironnement.net/article/l-economie-plus-fragile-face-au-rechauffement,71364

    L’économie mondiale devient de plus en plus vulnérable au réchauffement climatique, révèle une étude publiée dans Science Advances. La faute à la #mondialisation des échanges, qui répercute rapidement les pertes de productivité d’un pays sur les autres.

    #climat #cercle_vicieux

  • Aux Etats-Unis, les nouvelles variétés d’#OGM sont tolérantes à plusieurs pesticides - Reporterre
    http://www.reporterre.net/Aux-Etats-Unis-les-nouvelles

    Bienvenue dans la nouvelle ère des OGM ! Le ministère états-unien de l’Agriculture (USDA) et l’Agence pour la protection de l’Environnement (EPA) des Etats-Unis sont en passe de donner leur accord pour la commercialisation et la mise en culture d’une « nouvelle génération » d’OGM destinés aux agriculteurs. #Semences miracles ou plantes à haut rendement capables de pousser sans eau, penserez-vous ? Rien de cela !

    La première génération de plantes génétiquement modifiées commercialisées pour l’agriculture, depuis bientôt vingt ans, consistait surtout en deux types de transgènes intégrés à la majorité des cultures GM (#maïs, #soja, #coton, #colza...) : un transgène de production d’un insecticide par la plante ou un transgène de tolérance à un herbicide, le plus souvent le Roundup de Monsanto (70 % des cultures américaines).

    La seconde génération consiste, elle, à combiner ces modifications dans une même plante, en « empilant les traits », jusqu’à obtenir un OGM capable de produire jusqu’à six #insecticides et tolérer au moins deux #herbicides différents (technologie Smartstax).

    #pesticides #agrobusiness

  • Le cercle vicieux des arnaques.
    Une femme m’appelle ’Allo, j’entends rien, rappelle moi’", je ne rappelle pas, même chose 10 minutes après. Du coup je cherche sur le net, je trouve les deux numéros commentés sur un forum, un appel renverrait vers un 08 payant, bonjour l’arnaque. Je participe de la délation et signale le deuxième numéro à la suite des autres, à la validation de mon post, on me propose de retrouver l’appelant en composant un 08 payant. #cercle_vicieux #arnaque #ahahah