• Le virage thatchérien d’Emmanuel Macron | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/virage-thatcherien-demmanuel-macron/00089886

    La réforme de l’assurance chômage, entièrement à la main de l’exécutif, durcit considérablement les conditions d’indemnisation des demandeurs d’emploi, sans pour autant favoriser le retour à l’emploi. Les chômeurs vont surtout devoir assumer le remboursement de la dette de 37 milliards d’euros de l’assurance chômage. L’addition, qui vise à faire économiser 3,4 milliards d’euros en trois ans au régime, est particulièrement salée pour les plus précaires et les cadres, et elle épargne les entreprises. Quant au futur revenu universel d’activité (RUA) qui doit regrouper plusieurs aides sociales et qui est censé, lui aussi, assurer une bouée de secours aux plus précaires, il sera assorti de contreparties.

    Règles durcies pour les chômeurs

    La porte d’entrée pour toucher une allocation chômage va donc devenir plus étroite. Un allocataire devra avoir travaillé six mois au lieu de quatre aujourd’hui, et sur une période de référence qui ne sera plus de vingt-huit mois, mais de vingt-quatre. Mais c’est surtout le changement des règles de calcul du salaire de référence qui est potentiellement la plus grosse source d’économies pour l’assurance chômage. Technique, la mesure défavorisera les allocataires qui cumulent les contrats courts. Car le calcul actuel leur permet de toucher dans certains cas une allocation deux fois plus élevée mais sur une période deux fois plus courte.

    Des centaines de milliers d’allocataires qui n’ont pas d’autre choix que d’accepter les 40 millions de contrats courts signés tous les ans, perdront des droits Twitter
    Le gouvernement tente ainsi de résoudre les problèmes de cumul emploi-chômage, qu’il juge désincitatif et injuste. La campagne du ministère du Travail sur ces 20 % de chômeurs qui gagneraient plus au chômage qu’en travaillant – des chiffres contestés – a préparé le terrain. Résultat, des centaines de milliers d’allocataires qui n’ont pas d’autre choix que d’accepter les 40 millions de contrats courts signés tous les ans perdront des droits, mais près de 700 000 euros devraient être économisés, selon le chiffrage du ministère du Travail

    PRESTATIONS RSA et prime d’activité dans le viseur du gouvernement

    Autre mesure punitive pour ces demandeurs d’emploi, à moins d’avoir travaillé six mois pendant la période d’indemnisation au lieu de… 150 heures aujourd’hui, soit un mois, ils ne pourront plus recharger leurs droits. Jusqu’à présent, ce système permettait à un chômeur indemnisé qui retrouve un emploi de reporter ses droits au chômage dans le temps, et de ne pas faire recalculer ses droits quand arrive la fin de son indemnisation.

    #chômeurs #chômeurs_en_activité_réduite #austérité #guerre_aux_pauvres

  • ENQUÊTE FRANCEINFO. Comment les agents de Pôle emploi suivent deux fois plus de #chômeurs que les chiffres affichés par la direction
    https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/chomage/enquete-franceinfo-les-chiffres-secrets-des-agents-de-pole-emploi_34900

    Selon un rapport sur Pôle emploi publié au début de l’année 2019 par le député Les Républicains des Vosges, Stéphane Viry, cette taille importante des portefeuilles des agents de Pôle emploi aurait une conséquence sur l’accompagnement des chômeurs. Il dénonce « une dégradation du service rendu en termes d’accompagnement » et souligne que « certains demandeurs d’emploi ne sont pas contactés par leur conseiller pendant plusieurs mois, ce qui est une aberration absolue ». Le député souligne que les agents ne sont pas responsables et qu’ils ne peuvent pas faire un accompagnement digne de ce nom parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Il rappelle « qu’après une première baisse en 2018, le projet de loi de finances 2019 prévoit une nouvelle diminution des effectifs de 800 équivalents temps plein ».

    Le ministère du Travail justifie ces réductions de postes par un début de baisse du chômage et la dématérialisation des services qui permet de gagner du temps sur certaines tâches. À partir du mois de juillet 2019, de nouveaux entrants devraient arriver aux guichets de Pôle emploi. Un décret ouvrant des droits – sous conditions - aux travailleurs indépendants et aux démissionnaires, devrait en effet être publié. La réforme devrait toutefois dans le même temps durcir les règles d’entrée. Au moins 230 000 personnes pourraient donc être exclues du système d’indemnisation.

  • 1,7 millions de personnes cumulent allocation de chômage et salaire (Enquête Unédic) - Previssima
    https://www.previssima.fr/actualite/id-17-millions-de-personnes-cumulent-allocation-de-chomage-et-salaire-enq

    Depuis 20 ans (entre 1995 et 2017), la part d’allocataires de l’Assurance chômage qui travaillent au cours du mois est passée de 22 % à 46 % révèle l’Unédic dans une enquête sur les allocataires qui travaillent, menée en 2018 et publiée le 29 mars 2019.

    En 2017, ils sont 1,7 millions a bénéficié de cette mesure appelée « cumul allocation-salaire » créée dans le but d’inciter les demandeurs d’emploi à la reprise d’activité. (...)

    Les revenus d’activité composent l’essentiel du revenu des allocataires qui travaillent

    83 % en moyenne du revenu disponible de ces allocataires provient des revenus du travail. Ils sont souvent modestes. En moyenne, ceux qui sont indemnisés déclarent un revenu d’activité mensuel de 830 € net et une allocation chômage de 490 €, soit 1 320 € au total.

    Parmi les personnes interrogées par l’Unédic, près de 9 sur 10 vivent dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au niveau de vie médian (1 710 € net par mois) et 40 % des ménages concernés sont en dessous du seuil de pauvreté.

    Parmi les autres sources de revenus, 1 personne sur 10 déclare percevoir la prime d’activité pour un montant moyen de prime de 163 € au mois de juin 2018. (...)

    #chômage #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit #revenu #emploi #allocation

  • Radio | La lutte pour l’Assurance chômage - Paris-luttes.info
    https://paris-luttes.info/fpp-l-actu-des-luttes-la-lutte-11927

    l’ Actualité des Luttes – FPP 106,3 Mhz – est aux côtés de #chômeurs, précaires, agent.es de Pôle emploi, salarié.es en CDI et CDD, intermittent.es et intérimaires dans la lutte contre la reforme de l’Assurance chômage et les nouvelles mesures de contrôle des demandeur.es d’emploi. Bonne écoute !

  • Pôle emploi confirme qu’un chômeur sur cinq touche plus que son ancien salaire [à la demande de la ministre] | Les Echos
    https://www.lesechos.fr/economie-france/social/pole-emploi-confirme-quun-chomeur-sur-cinq-touche-plus-que-son-ancien-salai

    Pour cela, la direction statistique de Pôle emploi a retenu les seuls mois de la période d’affiliation à l’assurance-chômage au cours desquels la personne a travaillé au moins une heure. La précision est d’importance car les syndicats soupçonnaient le ministère du Travail d’avoir calculé la moyenne sur l’ensemble de la période d’affiliation (soit 28 mois légaux, 36 pour les plus de 53 ans), y compris donc en incluant les mois sans travail, ce qui aurait mécaniquement affaibli la moyenne.

    Résultat de tous ces calculs, pour 21 % des #allocataires, le taux de replacement net, c’est-à-dire le ratio entre allocation et moyenne des salaires est supérieur à 100 %. Et les nouvelles règles d’indemnisation issues de la convention Unédic de 2017 ne changent pas grand-chose au constat, assure-t-on aux « Echos ».

    Une activité très morcelée
    Dans le détail, sur les 600.000 personnes concernées sur la période considérée (2015-2017), un quart a eu un taux de remplacement net compris entre 100 % et 109 %, un quart entre 109 % et 123 %, un quart entre 123 % et 147 %, et le dernier quart supérieur à 147 %, toujours selon #Pôle_emploi.

    « Les allocataires ayant un taux de remplacement mensuel net supérieur à 100 % ont connu une activité très morcelée : en moyenne leur nombre total de jours de travail correspond, mis bout à bout, à environ 7 mois. Ces mois travaillés ont été effectués sur une période calendaire de 16 mois en moyenne, dont 11 avec au moins un jour travaillé », a précisé l’opérateur. Ce dernier a ajouté un point qui ne manquera pas de jeter de l’huile sur le feu car toujours lié aux #contrats_courts. A savoir : plus l’activité avant chômage a été morcelée et plus le taux de remplacement est élevé.

    Du montant des allocs concernées, il ne sera rien dit. On sait par ailleurs que parmi les chômeurs indemnisés (minoritaires), la moitié touchent moins de 950 euros mensuels.

    #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit

    • Chômeurs « trop » indemnisés : l’arnaque intellectuelle du gouvernement, 2 avr. 2019, Dan Israel - Mediapart.fr

      (...) Illusion statistique

      Sous pression, Pôle emploi, qui est à l’origine du fameux chiffre du gouvernement, et qui l’avait déjà expliqué à l’oral à certains syndicalistes et à des journalistes (comme ceux des Échos ou d’Alternatives économiques), a finalement publié ce vendredi la note détaillant son calcul.

      Et ce document dévoile une sacrée entourloupe statistique. Il démontre que le gouvernement a cherché coûte que coûte un symbole pour justifier sa future réforme, au mépris de la vraisemblance. Et n’en déplaise aux Échos, qui affirment qu’il est « difficile de voir un loup dans le chiffre avancé par Muriel Pénicaud ».

      Car pour aboutir à son résultat, Pôle emploi a fait baisser artificiellement les salaires pris en compte, en comparant des statistiques qui n’ont en fait rien à voir. D’abord, l’organisme a fait la moyenne mensuelle des salaires touchés durant tous les mois où un salarié a travaillé au moins pendant un jour. Peu importe que durant chacun de ces mois, il ait travaillé une seule journée ou 20 jours, et qu’il ait touché 100 euros ou 1 500 euros.

      Cette base de calcul a ensuite été comparée au montant de l’allocation chômage versée au demandeur d’emploi pendant un mois complet. Et c’est cette comparaison qui a permis de conclure que 20 % des chômeurs sont mieux indemnisés par Pôle emploi qu’ils n’étaient payés lorsqu’ils travaillaient.

      Mais il y a un hic, et de taille : les deux périodes comparées ne sont en fait pas les mêmes ! Car l’indemnité chômage est versée sur une durée égale au nombre de semaines travaillées (une fois que 4 mois de travail au moins ont été cumulés). Que ce nombre de semaines réellement travaillées soit étalé sur une période totale de 6 mois ou d’un an n’y change rien : si tout mis bout à bout, le salarié a réellement travaillé l’équivalent de 4 mois, soit 88 jours, il ne sera payé par Pôle emploi que pendant 4 mois, et pas pendant 6 mois ou un an.

      Mettre côte à côte un salaire moyen touché pendant 6 ou 12 mois et le montant d’une allocation mensuelle versée pendant 4 mois seulement est une aberration. Pour que le calcul ait un sens, il faudrait en fait comparer la moyenne de revenus touchés uniquement pendant les jours réellement travaillés à l’indemnisation versée par Pôle emploi.

    • Est-il vrai qu’un chômeur sur cinq touche plus au chômage qu’en travaillant ?
      https://www.liberation.fr/checknews/2019/04/05/est-il-vrai-qu-un-chomeur-sur-cinq-touche-plus-au-chomage-qu-en-travailla

      (...) Là où cette présentation de Pôle Emploi devient absurde, c’est que dans certains cas, deux personnes avec un même revenu, gagné sur un même laps de temps (et non pas différent, comme dans l’exemple précédent), peuvent afficher deux situations totalement opposées, avec l’une touchant plus que son ancien salaire moyen en allocation, et pas l’autre. C’est l’exemple donné par le chercheur en sociologie Mathieu Grégoire sur son blog.

      En effet, Pôle Emploi explique ne tenir compte, pour calculer le salaire mensuel moyen, que des mois où la personne a travaillé au moins une heure.

      Prenons alors deux personnes qui ont travaillé 6 mois à 1000 euros par mois sur les 12 derniers mois. La première personne, Marc, n’a travaillé qu’un mois sur deux. Pôle Emploi, ne prenant en compte que les mois travaillés, calculera un salaire mensuel moyen de 1000 euros par mois. Son allocation chômage théorique sera de 800 euros par mois. Pôle Emploi rangera cette personne parmi celles dont l’allocation est inférieure au salaire.

      L’autre personne, Jacques, a elle aussi travaillé un mois sur deux à 1000 euros par mois, mais chaque fois à cheval sur deux mois (en travaillant du 15 au 15 de chaque mois). Pôle Emploi estimera alors qu’elle a travaillé les 12 mois, à 500 euros par mois, et non pas 6 mois à 1000 euros par mois comme pour Marc. L’allocation de Jacques sera elle aussi de 800 euros. Mais lui se trouvera rangé dans la catégorie des personnes ayant une allocation supérieure à son salaire moyen (500 euros). Alors qu’il a gagné exactement autant, et sur la même période, que Paul.

      Les autres chiffres de l’Unedic

      De son côté, l’Unedic (qui définit les règles appliquées ensuite par Pôle Emploi) a produit des chiffres qui racontent une autre histoire. Au lieu de comparer une allocation chômage mensuelle avec un salaire mensuel moyen, elle livre une photo des 12 mois précédant l’ouverture des droits et des 12 mois après.

      Autrement dit, combien ont gagné les allocataires sur un an, et combien ils ont touché ensuite en allocation chômage sur les 12 mois suivants.

      Avec cette présentation, on voit que seuls 4% des allocataires ont touché, en moyenne, une allocation supérieure au revenu précédemment perçu. Et il ne s’agit pas de n’importe quelle population : ce groupe a gagné 220 euros par mois en moyenne, avant de bénéficier de 290 euros par mois d’allocation moyenne. Loin d’avoir été incités à rester au chômage, ces allocataires sont aussi ceux qui ont le plus rapidement repris le chemin de l’emploi, puisqu’ils sont 63% à avoir retrouvé un poste dans les trois mois suivant le début de l’indemnisation.

      « Ces personnes sont déjà celles qui subissent la précarité de l’emploi, et ce serait sur ce public que l’on voudrait rajouter la précarité de l’indemnisation, s’étonne Mathieu Grégoire. Sauf que ce n’est pas en rabotant l’indemnisation des salariés les plus flexibles que l’on va dissuader le patronat d’avoir recours aux contrats courts. Si on sucre la moitié de leur indemnité à ces précaires, pas sûr que leur employeur leur propose un CDI. »

    • 20% de chômeurs touchant plus au chômage qu’au travail : le chiffre était donc faux, Mathieu Grégoire, 1 AVR. 2019
      https://blogs.mediapart.fr/mathieu-gregoire/blog/010419/20-de-chomeurs-touchant-plus-au-chomage-quau-travail-le-chiffre-etai

      Un mois après les affirmations du Premier ministre et de la ministre du Travail selon lesquelles 20% des chômeurs percevraient des allocations mensuelles supérieures à leur ancien salaire, Pôle Emploi vient de dévoiler la source et la méthode qui fondent ce chiffre. Il en ressort que l’affirmation du gouvernement ne correspond à aucune réalité avérée et que l’indicateur retenu est farfelu.

      Fin février, le Premier ministre et la ministre du Travail affirmaient, pour justifier une future réforme de l’assurance-chômage, qu’avec les règles actuelles, « un chômeur sur cinq » percevait une allocation mensuelle supérieure à son salaire mensuel moyen.

      Après plus d’un mois sans qu’aucune justification ne soit donnée ni sur les sources, ni sur la méthode utilisées pour établir un tel chiffre, Pôle Emploi a discrètement sorti, vendredi soir, une fiche rédigée « à la demande du ministère du travail » détaillant comment ce chiffre avait été établi.

      La lecture de ce document montre que l’affirmation selon laquelle dans les règles actuelles un chômeur sur cinq perçoit une allocation mensuelle supérieure à son salaire mensuel moyen est une fausse information.

      Et ce pour deux raisons.

      D’une part, contrairement à ce que disent le Premier ministre et la ministre du Travail, ce chiffre ne correspond pas à la réalité actuelle. Le chiffre fourni par Pôle Emploi a été établi sur des données datant de 2015 à 2017. Or les règles actuelles correspondent aux règles établies par la convention de 2017. Et l’un des objectifs principaux de cette réforme était (déjà !) de diminuer les allocations journalières versées aux salariés les plus intermittents c’est-à-dire à ceux qui précisément sont concernés par le chiffre avancé par le gouvernement.

      D’autre part, les allocations dont il est question ne sont pas les allocations réellement perçues par des chômeurs mais des allocations virtuelles. Le chiffre retenu par Pôle Emploi correspond en effet à des allocations mensuelles théoriques, c’est-à-dire à ce que ces chômeurs percevraient s’ils étaient pleinement au chômage pendant toute la durée de leur indemnisation. Mais, encore une fois, la caractéristique principale de ces chômeurs est d’alterner emploi et chômage et, par conséquent, de combiner du salaire et des indemnités chômage. Ils ne perçoivent donc pas tous intégralement cette allocation maximale à laquelle ils auraient droit s’ils étaient uniquement au chômage. Le chiffre serait ainsi nécessairement différent si on prenait en compte les allocations réellement perçues.

      Au-delà, cet indicateur est surtout un artefact statistique qui n’a guère de sens et « prouve » ce qu’il veut prouver au prix d’une manipulation assez troublante des chiffres. Comment parvient-on à tant de chômeurs qui auraient eu droit à des indemnisations plus importantes que leur salaire ? La réponse est simple : en leur attribuant des salaires artificiellement bas. Le #salaire sur lequel s’appuie Pôle Emploi ne correspond pas à une période de travail mais à une période combinant emploi et chômage : chaque mois calendaire durant lequel le salarié a travaillé ne serait-ce qu’une heure est pris en compte. Un exemple (parmi d’autres) du caractère absurde de ce chiffre : un salarié qui a travaillé 6 mois calendaires (en continu ou non) pour 6000 euros a un salaire moyen de 1000 euros et son allocation mensuelle potentielle sera inférieure à son salaire moyen.

      Si en revanche ce même salarié a travaillé six fois un mois en débutant ses contrats le 15 du mois (et non plus le premier), il aura été en emploi pendant les 12 mois calendaires de l’année. Son salaire moyen sera donc, dans cette perspective, de 500 euros. Son allocation moyenne aura toutes les chances d’être supérieure à son salaire moyen. Son « taux de remplacement » sera deux fois supérieur à celui du salarié qui débute ses contrats le 1er du mois.
      La ficelle est énorme : il n’y a aucune raison de considérer différemment des salariés qui ont travaillé exactement la même durée et pour exactement les mêmes salaires au seul motif que les dates des contrats ne sont pas les mêmes. La fiche de Pôle Emploi est d’ailleurs explicite sur ce point : la durée de travail moyenne des salariés concernés est de 7 mois mais, comme elle est étalée sur 11 mois calendaires, le chiffre retenu par le gouvernement se fonde sur un salaire calculé sur 11 mois. Avec un salaire artificiellement bas, on parvient ainsi à « prouver » que les allocations potentielles sont plus hautes. Si l’on prenait en considération la seule durée de travail (ici 7 mois), aucun de ces chômeurs n’aurait un taux de remplacement supérieur à 100%. En effet, le travail paye toujours plus que le chômage.

      Le gouvernement a décidé, au nom de la lutte contre les contrats courts, de réduire les droits des salariés les plus précaires et les plus flexibles. C’est une politique et un pari économique qu’on ne discutera pas ici. Mais ce choix politique pourrait être assumé sans avoir recours à des chiffres qui sont contestables dans leur construction et correspondent à de fausses informations.

  • Assurance-chômage : l’Unédic s’interroge sur des chiffres du gouvernement
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/27/assurance-chomage-l-unedic-s-interroge-sur-des-chiffres-du-gouvernement_5441

    Aujourd’hui, le discours gouvernemental suscite de gros doutes parmi les administrateurs de l’assurance-chômage, composés à égalité de représentants des salariés et des employeurs. Alors qu’elle dévoilait à la presse les prévisions financières de l’Unédic, la présidente du régime, Patricia Ferrand (CFDT), a été interrogée, mardi, sur les 20 % de chômeurs dont l’allocation serait supérieure à leurs revenus d’activité mensuels moyens : « On ne sait pas du tout comment ça a été (…) calculé », a-t-elle répondu, en insistant sur le fait que les règles applicables posent comme principe que le demandeur d’emploi ne peut pas gagner plus que le salaire sur la base duquel sa prestation est déterminée. « On aurait besoin d’un appui technique sur ce chiffre [de 20 % mentionné par l’exécutif] parce que ce n’est pas ce que l’on constate (…) dans notre position de gestion de l’assurance-chômage », a, pour sa part, déclaré Eric Le Jaouen, vice-président (Medef) de l’Unédic.

    #paywall

    • « Non, M. le Premier ministre : le chômage ne paye jamais plus que le travail ! » - Mathieu Grégoire

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/29/non-m-le-premier-ministre-le-chomage-ne-paye-jamais-plus-que-le-travail_5443

      Le sociologue Mathieu Grégoire conteste dans une tribune au « Monde » les raisonnements et les chiffres d’Edouard Philippe et de la ministre du travail au sujet de l’indemnisation des chômeurs.

      Tribune. Il y a plus d’un mois, lors d’une conférence de presse marquant le début de la reprise en main de l’assurance-chômage par le gouvernement, le premier ministre a expliqué qu’il fallait que « le travail paye toujours plus que le chômage » et que ce n’était pas toujours le cas : « Il existe des cas où le montant de l’allocation-chômage mensuelle est plus élevé́ que le salaire mensuel moyen perçu antérieurement. » Pour la ministre du travail, cette configuration d’un « taux de remplacement supérieur à 100 % » concernerait plus d’« un chômeur sur cinq ».

      Pour Edouard Philippe, la conclusion s’impose : « Ce système a évidemment pour conséquence de maintenir les chômeurs dans une forme de précarité́. » Ce chiffre – qui, un mois après, n’a toujours fait l’objet d’aucune publication écrite précisant ses sources et sa méthode – et le raisonnement selon lequel cette « situation » maintiendrait les chômeurs dans une précarité volontaire ont de quoi laisser perplexe pour trois raisons.

      Premièrement, le travail paye toujours plus que chômage. Même dans le cas de figure d’une indemnité mensuelle moyenne supérieure au salaire de référence imaginé par le premier ministre et la ministre du travail, l’affirmation selon laquelle il est plus rémunérateur de chômer que de travailler est fausse. Pourquoi ?

      L’indicateur du gouvernement introduit une confusion
      Dans une période donnée, un allocataire sera toujours mieux rémunéré s’il travaille (au même salaire journalier que son salaire passé dit « de référence ») que s’il perçoit une indemnité chômage. Son indemnité journalière est, par construction, toujours inférieure au salaire journalier de la période de référence sur laquelle est calculée son droit. Dans tous les cas, l’allocation ne peut dépasser 75 % du salaire journalier de référence.

      Par exemple, un salarié payé habituellement au smic journalier, c’est-à-dire 70 euros brut, aura une indemnité journalière d’environ 40 euros brut. Ce chômeur aura toujours intérêt à travailler pour 70 euros plutôt que d’être indemnisé pour 40 euros.

      Deuxièmement, l’hypothèse d’un taux de remplacement supérieur à 100 % n’a rien de choquant. Cette configuration n’a rien à voir avec celle d’un salarié qui percevrait davantage les jours où il chôme que les jours où il travaille. Un taux de remplacement supérieur à 100 % correspond à la situation dans laquelle le cumul des indemnités journalières perçues en moyenne durant un mois est supérieur à l’ensemble des salaires journaliers perçus en moyenne durant les mois passés.
      Cet indicateur retenu par le gouvernement introduit beaucoup de confusion, car il ne compare pas les salaires d’une période exclusivement travaillée à des indemnités de périodes exclusivement chômées. Quoi qu’il en soit, il n’y a dans ces situations certainement plus rares en pratique que ne le prétend le gouvernement, aucune indemnisation abusive et aucun dysfonctionnement. La logique de l’assurance-chômage est d’indemniser les salariés lorsqu’ils ne travaillent pas sur la base de ce qu’ils gagnent quand ils travaillent.

      Une production de statistiques problèmatique

      L’usage de cet indicateur par le gouvernement n’est peut-être que le symptôme d’une volonté de sortir de cette logique d’assurance-chômage pour aller vers une logique de complément résiduel aux revenus salariaux, en faisant au passage des économies sur les salariés les plus flexibles et les plus précaires.

      Enfin, troisièmement, se référer à un chiffre de « un chômeur sur cinq » non publié et invérifiable, assorti d’un raisonnement aussi faux que stigmatisant pour les chômeurs, relève de la démagogie et d’un rapport à la production des statistiques pour le moins problématique.

      Les ordres de grandeur avancés ne correspondent à rien de connu. Surtout, la méthode elle-même pose problème. Le premier ministre et la ministre du travail justifient une future réforme avec des chiffres que seul le gouvernement connaît et dont il ne communique ni les sources, ni le détail, ni la méthode. Est-ce ainsi, en assénant d’en haut des constats invérifiables, que le gouvernement ambitionne de construire le « diagnostic partagé » qu’il appelle par ailleurs de ses vœux ?
      Le crédit que l’on peut accorder aux services statistiques repose sur la confiance dans leur indépendance et sur le fait que les gouvernants se soumettent à leurs constats. De ce point de vue, il est troublant que le gouvernement commence par annoncer des chiffres et demande, dans un second temps, à son administration de confirmer sereinement et en toute indépendance la parole ministérielle. Ce que, manifestement, ils tardent à faire.

      Nb : des procédures judiciaires n’ont pas permis que soient rendues accessibles aux chercheurs les données de l’Unedic, organisme privé auquel a été délégué une "mission de service public".

      #indemnisation_chômage #chômeurs #revenu #emploi #salaire #intox

    • ALLOCATIONS Le chômage paie-t-il plus que le travail ?
      SANDRINE FOULON, 05/02/2019
      https://www.alternatives-economiques.fr/chomage-paie-t-plus-travail/00088190

      Les modalités de calcul des allocations chômage pour les contrats courts peuvent, dans certaines situations, générer des effets d’aubaine. Mais dans l’immense majorité des cas, il est impossible de gagner plus au chômage qu’en travaillant.

      Il faut s’y résigner. La petite musique des demandeurs d’emploi qui rechignent à traverser la rue pour trouver un job n’a pas fini de résonner. Non seulement ils n’auraient pas le goût de l’effort, délaissant même des centaines de milliers d’offres, mais ils se « mettraient au chômage » par intérêt financier. Dans le magazine Challenges, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a remis une pièce dans la machine, soulignant qu’on pouvait « gagner plus en étant au chômage » qu’en travaillant. Le chômage est-il cet eldorado qui garderait au chaud 5,6 millions de personnes inscrites à Pôle emploi ? Revue de détails en quatre points.

      #paywall...

      J’ai lu ailleurs que cela pouvait toucher 5% de chômeurs qui ont eu des salaires si bas q’ils ont plus au chômage. C’est comme les histoires de cumul salaire/alloc (ou RSA), trop compliqué pour savoir qui cela peut concerner et comment ça se passe

      Un seul exemple évident à première vue, et c’est pas costaud... si on dépend d’un salaire de moins de 494e (montant de l’ASS) et qu’on a plus de 50 ans et 5 ans d’emploi sur les dix derniers
      https://www.unedic.org/indemnisation/vos-questions-sur-indemnisation-assurance-chomage/jai-plus-de-50-ans-y-t-il-des

      Le demandeur d’emploi de plus de 50 ans peut choisir l’allocation de solidarité spécifique (ASS) plutôt que l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) si elle lui est plus favorable. Il peut également cumuler ses allocations avec une pension de vieillesse ou une pension militaire jusqu’à l’âge de sa retraite.

    • QUI SONT CES CHÔMEURS QUI TOUCHENT PLUS QUE LEUR PRÉCÉDENT SALAIRE ?
      https://www.capital.fr/votre-carriere/mais-qui-sont-ces-chomeurs-qui-touchent-plus-que-leur-precedent-salaire-1329

      Des chômeurs qui touchent plus que ce qu’ils gagnaient pendant qu’ils travaillaient ? La situation a de quoi étonner, mais elle ne serait pas si rare que cela, à en croire les statistiques révélées par la ministre du Travail Muriel Pénicaud. Ils seraient en effet pas moins de 1 sur 5 dans cette situation… “C’est une donnée issue de Pôle emploi, datant de 2017”, affirme-t-on dans son entourage.

      Dans quel cas cette situation se produit-elle au juste ? Essentiellement lorsqu’une personne multiplie les contrats de courte durée, en alternant avec des périodes d’inactivité. Elle est alors avantagée par le fait que l’allocation chômage est calculée sur la base d’un salaire journalier, et non pas mensuel.

      Prenons l’exemple d’une personne au Smic, qui perçoit donc 1.521,22 euros brut par mois, pendant un an. Son salaire journalier de référence, qui sert au calcul de l’allocation, sera de 1.521,22 x 12 / 365 = 50,01 euros. Son allocation chômage journalière, découlant de ce salaire de référence, sera de 32,125 euros, soit 963,75 euros brut par mois (pour un mois de 30 jours), selon nos calculs.

      Prenons une autre personne, travaillant seulement un jour sur deux, sur la base d’un même Smic. Elle perçoit donc 760,61 euros brut par mois. Son salaire journalier de référence sera de 760,61 x 12 / 182,5 = 50,01 euros, soit exactement le même que la personne travaillant toute l’année à temps plein. Tout comme son allocation chômage mensuelle, de 963,75 euros. Qui sera donc supérieure à son ancien salaire mensuel, d’environ 761 euros brut…

      Le gros bémol, c’est que cette personne ne travaillant que la moitié de l’année ne percevra cette allocation que pendant 6 mois, puisqu’elle n’a travaillé que la moitié du temps. Tandis que notre personne ayant travaillé toute l’année la percevra pendant un an. Au final, si la personne ayant travaillé seulement la moitié de l’année consomme tous ses droits au chômage, elle recevra donc 5.863 euros, soit moins que le cumul de ses salaires de l’année précédente (9.127 euros). Et moitié moins que les sommes perçues par la personne ayant travaillé toute l’année (11.726 euros).

      Bon, j’en cause, j’en cause, mais j’enchaîne pas les #contrats_courts. Merci Capital :)

    • 4 % ont touché une prestation supérieure à leur salaire antérieur.
      https://seenthis.net/messages/764301#message770754

      Dans ce contexte très polémique, la note de l’Unédic, publiée mercredi, fournit une contribution très utile. Elle se penche sur le sort des allocataires, « avant et après le début » de leur prise en charge par l’assurance-chômage, en exploitant des données relatives à novembre et décembre 2017. D’après ce document, ce sont surtout les personnes ayant travaillé « moins de 25 % de l’année précédant leur ouverture de droit » qui ont touché une prestation supérieure à leur salaire antérieur. Or, elles sont peu nombreuses : 4 %, au total, soit un pourcentage très éloigné de celui évoqué par Mme Pénicaud.

    • « Un chômeur sur cinq gagne plus qu’en travaillant » : vraiment ?
      https://www.alternatives-economiques.fr/un-chomeur-cinq-gagne-plus-quen-travaillant-vraiment/00088700

      Il faut s’y résigner. La petite musique des demandeurs d’emploi qui rechignent à traverser la rue pour trouver un job n’a pas fini de résonner. Non seulement ils n’auraient pas le goût de l’effort, délaissant même des centaines de milliers d’offres, mais ils se « mettraient au #chômage » par intérêt financier.

      https://www.alternatives-economiques.fr/chomage-paie-t-plus-travail/00088190
      cet article de Sandrine Foulon déjà cité par @colporteur n’est plus sous paywall
      Sandrine Foulon est rédactrice en chef d’alternatives-economiques.fr depuis décembre 2017

      Chômage vs Travail : les fausses nouvelles du gouvernement
      https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-jeudi-04-avril-2019

  • Actions pour le droit au chômage à Auch, Lille, Noisy-le-Grand (93) et Toulouse - CIP-IDF
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=9326

    Après diverses initiatives de lutte dans l’hexagone [1], l’interpellation de la ministre du travail [2] et d’autres actions, de nouvelles actions ont eu lieu ce jeudi 28 mars à Auch, Lille, Toulouse et Noisy-le-Grand (93).

    Nous exigeons l’abrogation du décret du 30 décembre [3] qui
     planifie les radiations et les sanctions à l’encontre des chômeurs et précaires
     va fabriquer de nouveaux chômeurs privés d’allocation
     détruit la mission d’accompagnement de Pôle Emploi au profit de missions de contrôle et sanctions

    À la direction régionale IdF de Pôle emploi

    #chômeurs #droit_au_chômage #luttes sociales #occupation

  • Retour sur l’envahissement de la plateforme de contrôle des chômeurs de Rennes, et ses suites - Plutôt chômeur que contrôleur
    https://contrelareformechomage.noblogs.org/post/2019/03/09/retour-sur-lenvahissement-de-la-plateforme-de-contro

    Le vendredi 15 février, répondant à l’appel public du Collectif contre la réforme chômage, une cinquantaine de personnes a envahi une plateforme de pôle emploi à Rennes. C’est dans ce lieu que travaillent les agents spécialisés dans le contrôle des chômeurs, autrement dit les agents qui sont amenés à mettre concrètement en œuvre les nouvelles sanctions à l’encontre de ces derniers. Le nombre de ces contrôleurs doit passer de 215 à 1000 au niveau national d’ici la fin de l’année. Depuis que la « loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel » est passée en septembre 2018, un ensemble d’actions a lieu partout en France, s’inscrivant dans le rapport de force de grande ampleur face à la vie chère qui prend notamment place au travers du mouvement des gilets jaunes.
    Le rythme s’est accéléré après la publication du décret du 30 décembre : envahissement d’une plateforme de contrôle à Andrézieux (près de Lyon et Saint-Étienne) le 30 janvier, à Rennes le 15 février, à Paris le 22 et occupation d’une agence pôle emploi à Toulouse le même jour. Depuis ses débuts le collectif rennais est un espace public ouvert qui tient des réunions hebdomadaires, intervient chaque semaine dans l’AG des gilets jaunes et qui a mené nombre d’actions : diffusion de tracts au pôle emploi, CAF et entreprises, réunions publiques sur le contenu de la réforme, occupation de la direction régionale de pôle emploi, CAF et conseil départemental.

    Une semaine après l’action du 15 février, plusieurs articles publiés par les médias locaux (Ouest-France et Télégramme) dont la source est manifestement policière, viennent jouer les auxiliaires de justice par un discours à charge digne d’un procureur. Le vocabulaire utilisé, parlant de « commando » pour désigner les personnes ayant répondu à l’appel du collectif, et de « saccage » pour décrire un envahissement, correspond bien à cette logique de judiciarisation et criminalisation des pratiques de lutte. Dans un communiqué condamnant cette action la CGT Pôle emploi Bretagne renforce cette logique.

    Les actions d’occupation, d’envahissement, de déménagement sont des modalités habituelles de conflits et mouvements sociaux (on peut se rappeler par exemple du déménagement des locaux du Medef à Rennes pendant le mouvement contre la loi travail en 2016). De façon plus spécifique la question de l’occupation et de l’envahissement de Pôle emploi, des administrations et des institutions en charge des chômeurs, précaires et intérimaires est l’une des seules armes dont dispose ces exploités sans lieu de travail. Comment faire grève par exemple quand on ne travaille que sur des missions d’une ou deux semaines ? Comment les livreurs à vélo (travailleurs non-garantis dont le statut est celui « d’auto-entrepreneur ») peuvent-ils s’organiser collectivement contre leur boîte ? Comment des inscrits à Pôle emploi peuvent-ils ne serait-ce que se rencontrer quand les agences ferment de plus en plus souvent et sont désertées du fait de la dématérialisation ?

    L’offensive portée contre le collectif n’est pas isolée, elle s’inscrit dans une dynamique plus large visant les blocages, actions et manifestations notamment des gilets jaunes. Le discours gouvernemental qui désigne tous les participants à des manifs non déclarées comme « casseurs » potentiels va de pair avec les milliers d’arrestations, de poursuites judiciaires et les centaines d’incarcérations. Cette répression attaque la lutte en isolant et divisant ses participants, et cherche à entraver les pratiques qui débordent. Par exemple à Rennes, les récentes descentes du RAID, perquisitions suivies d’arrestations de deux camarades, et le discours journalistique qui l’accompagne, ont pour objectif de provoquer stupeur et effroi dans le mouvement et chez tous ceux qui veulent participer aux luttes actuelles.

    #chômage #chômeurs #contrôle_des_chômeurs #occupation #criminalisation

  • Dans la jungle des contrats courts, Anne Rodier, Bertrand Bissuel
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/03/24/dans-la-jungle-des-contrats-courts_5440588_3234.html

    Dans la jungle des contrats courts

    En 2017, 1,2 million de personnes occupaient, en France, un contrat de moins de trois mois, d’après l’Insee. Le phénomène préoccupe le gouvernement, qui doit dévoiler dans les prochains jours le contenu de sa réforme.

    Il sait ce que le mot précarité veut dire. Durant une dizaine d’années, jusqu’à la fin 2011, Bachir, qui témoigne sous un prénom d’emprunt, fut employé comme maître d’hôtel par Lenôtre, l’un des traiteurs français les plus renommés. On faisait appel à lui pour des « extras » – de courtes périodes d’activité, parfois de quelques heures seulement, sur une journée. Puis la relation s’est éteinte, dans un climat conflictuel. Aujourd’hui âgé de 68 ans, Bachir a fait valoir ses droits à la retraite, tout en continuant à travailler, en tant que serveur dans un grand hôtel de l’hypercentre de Paris. Là encore, il exerce son métier dans l’instabilité, en qualité d’intérimaire.

    « Je fais six à sept jours dans le mois », confie-t-il. Ça lui permet de compléter sa « petite pension » et de subvenir aux besoins du foyer : ses deux filles sont encore à la maison, il a un emprunt sur le dos… Etre intérimaire implique de se mettre « à la disposition » de l’entreprise, rapporte Bachir : « “Ils” n’aiment pas qu’on refuse les missions. Si c’est le cas, ils vous oublient pendant une ou deux semaines et vous restez sur le carreau. » Difficile, dans ce contexte, « de prévoir quelque chose », de « mener une vie normale ». Des plannings sont certes distribués, « à l’avance », mais « parfois, ils rajoutent des jours ou ils en retirent ».

    Chaque année, ils sont des centaines de milliers à signer des contrats courts – c’est-à-dire d’un mois ou moins, selon la définition la plus courante. Cette forme d’emploi a été multipliée par 2,5 entre 2000 et 2016. En 2017, 1,2 million de personnes – soit 5,1 % de la population salariée – occupaient un contrat court, d’après l’Insee, qui retient d’autres critères pour le caractériser (il dure moins de trois mois et prend en compte l’intérim).

    Les enjeux sont aussi d’ordre financier

    La montée du phénomène préoccupe le gouvernement. Pour des raisons sociales, tout d’abord : « Les salariés concernés bénéficient moins que d’autres de formations qualifiantes, alors qu’ils sont moins qualifiés et plus éloignés du marché du travail, explique Gilbert Cette, professeur associé à l’université d’Aix-Marseille. De surcroît, ils ont plus de difficultés à accéder aux prêts bancaires et aux logements locatifs. » Les enjeux sont aussi d’ordre financier. Les personnes abonnées aux contrats courts passent régulièrement par la case assurance-chômage, ce qui a un coût : un peu moins de 2,9 milliards d’euros par an, en tenant compte des intermittents du spectacle et des missions d’intérim de moins d’un mois, selon l’Unédic.

    Au début de l’automne 2018, le premier ministre, Edouard Philippe, a demandé aux partenaires sociaux de s’attaquer au sujet dans le cadre d’une négociation interprofessionnelle. Peine perdue ! Les discussions, étalées sur trois mois et demi, se sont soldées par un échec, à la mi-février, le patronat et les syndicats étant incapables de s’entendre sur des mesures susceptibles de traiter le mal. L’exécutif reprend donc la main sur le dossier et doit dévoiler, dans les prochains jours, le contenu de sa réforme, sur une problématique complexe, qui n’est pas circonscrite à la France.

    De nombreux pays développés sont touchés, mais la France l’est davantage – ainsi que la Belgique –, d’après M. Cette. Au hit-parade de la volatilité de la main-d’œuvre, trois secteurs émergent, dans l’Hexagone : l’hôtellerie-restauration, l’hébergement médico-social et une catégorie fourre-tout appelée « autres activités spécialisées scientifiques et techniques », dans laquelle figurent notamment les instituts de sondage.

    Un recours vital, selon les entreprises

    Comment en est-on arrivé là ? Parallèlement à la tertiarisation de l’économie, la consommation de services s’est fragmentée et les commandes de produits passées au dernier moment ne cessent de s’amplifier. De tels usages plongent les entreprises dans une imprévisibilité croissante et les forcent à moduler leurs effectifs en fonction de ces à-coups.

    Au sein de plusieurs branches professionnelles, le recours aux CDD de quelques jours est présenté comme la seule réponse à des contraintes spécifiques. « Dans notre profession, les contrats courts sont indispensables : beaucoup d’entreprises ont souvent besoin de quelqu’un un jour par-ci, un jour par-là, témoigne Pascal Pelissier, président de la branche café-bar-brasserie du GNI, l’une des organisations patronales du secteur. En “extra”, on essaie de prendre toujours la même personne, pour des questions de confiance et de gain de temps. » Près d’un contrat court sur deux est en emploi de façon quasi continue et 70 % d’entre eux sont réemployés par la même entreprise.

    Dans le secteur médico-social, le discours est similaire : « Le contrat court est structurellement vital pour les établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes [Ehpad]. C’est un secteur féminisé à 85 %, avec beaucoup de congés maternité et d’arrêts-maladie, et qui forme énormément. Or toutes ces absences imposent des remplacements immédiats, du fait de la continuité des soins », plaide Céline Fabre, directrice des ressources humaines du groupe DomusVi.

    « Le secteur nécessite une professionnalisation constante. Nous avons 475 000 heures de formation prévues en 2019 pour 8 500 équivalents temps plein », ajoute-t-elle. En volume, « on conclut 70 000 contrats courts par an, dont six contrats en moyenne par personne. En service de proximité, c’est fondamental d’avoir ses propres salariés, à l’égard des patients et de la clientèle. Un tiers de nos recrutements sont des transformations de CDD en CDI, mais de plus en plus de directeurs d’établissement se heurtent à des salariés qui refusent les CDI ; 60 % des contrats courts sont sur les filières soins, qui sont en grande pénurie. »

    Le besoin de main-d’œuvre dans ce champ-là s’accroît car il y a de plus en plus de personnes fragiles ou d’un grand âge susceptibles d’être accompagnées, complète Sébastien Darrigrand, délégué général de l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES).

    « Plus fréquents dans les emplois routiniers »

    Les mutations technologiques en cours pèsent aussi sur le comportement des patrons. « Bon nombre de sociétés anticipent des transformations majeures en recourant aux contrats courts, car elles sont en train de numériser leurs process et savent que des emplois vont disparaître, estime Alain Roumilhac, président du spécialiste de l’intérim ManpowerGroup France. L’économie française ne pourrait pas fonctionner sans cette forme d’emploi. »

    Les exonérations de charges sur les bas salaires ont également contribué à l’envolée de la précarité, comme l’a souligné une récente étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques

    Les exonérations de charges sur les bas salaires ont également contribué à l’envolée de la précarité, comme l’a souligné une récente étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : ces allègements de charges ont favorisé la création de postes peu qualifiés, « ce qui a eu une incidence à la hausse sur les contrats courts, car ceux-ci sont plus fréquents dans les emplois routiniers », décrypte l’économiste Eric Heyer. Autre élément à mentionner : la diffusion des CDD d’usage (CDDU), un statut ultra-flexible dont les entreprises raffolent – y compris celles qui n’y sont pas éligibles, théoriquement.

    Enfin, les règles de l’assurance-chômage sont également pointées du doigt : « Environ 25 % des demandeurs d’emplois indemnisés gagnent davantage en alternant chômage et activité que s’ils travaillaient en continu dans la même activité », affirme Gilbert Cette – une donnée que le gouvernement a également mise en avant, fin février, en se fondant sur une recherche conduite par Pôle emploi. Autrement dit, dans certaines situations, l’entreprise et le salarié noueraient une sorte de pacte qui privilégierait le CDD fractionné, la première y gagnant en agilité et le second en retirant un avantage financier.

    Mais un point dans ce diagnostic ne convainc pas l’exécutif : c’est celui, répété à l’envi par le patronat, qui consiste à soutenir que certains employeurs ne peuvent pas faire autrement que de conclure beaucoup de CDD très temporaires. « Il serait absurde et aveugle de dire que l’utilisation des contrats courts n’est qu’une question de contraintes économiques », martèle un collaborateur de la ministre du travail, Muriel Pénicaud. « Dans tous les secteurs », poursuit-il, les pratiques peuvent être très différentes entre des sociétés dont la taille et le modèle économique sont identiques. C’est la preuve, pour le ministère du travail, que « la qualité de l’organisation du travail et la pratique managériale » jouent aussi un rôle déterminant dans le turn-over des effectifs.

    Dans un premier temps, le gouvernement a joué la carte du dialogue en exhortant, en 2018, les branches professionnelles à prendre des mesures. Quelques-unes se sont prêtées à l’exercice. Dans la métallurgie, par exemple, un compromis a été trouvé qui prévoit, notamment, de réduire les périodes de carence entre deux CDD ou deux missions d’intérim (ce qui revient à diminuer le nombre de jours durant lesquels la réembauche d’une personne sur un poste donné est interdite).

    Mais le bilan de ces accords « est maigre », considère Marylise Léon, numéro deux de la CFDT : « Peu de chambres patronales ont joué le jeu et véritablement inscrit à l’ordre du jour la qualité de l’emploi. Seuls quelques secteurs – comme la propreté – s’y sont attelés, en articulant cette problématique avec l’organisation du travail. C’est indispensable ! » D’une manière générale, les confédérations de salariés trouvent que le Medef et ses alliés ne sont pas très allants pour résorber la précarité.

    Le gouvernement, qui semble partager cet avis, envisage, aujourd’hui, de manier la carotte et le bâton, par le biais du bonus-malus. Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, ce dispositif module les cotisations d’assurance-chômage des entreprises en fonction du nombre de fins de contrat donnant lieu à une inscription à Pôle emploi : plus les séparations sont nombreuses, plus le patron est mis à contribution, et inversement, selon le principe du pollueur-payeur. Un mécanisme ardemment défendu par plusieurs économistes de premier plan : Jean Tirole, Pierre Cahuc…

    Un dossier bordé par des « lignes rouges »

    Seule petite ombre au tableau : les mouvements d’employeurs s’y opposent. « Nous sommes sceptiques sur cette option d’une taxation, déclare Isabelle Eynaud-Chevalier, déléguée générale de Prism’emploi, l’organisation qui représente les sociétés d’intérim. Elle risque d’avoir des effets inopportuns puisque les études montrent qu’une hausse de 1 % du coût du travail non qualifié se traduit par une diminution du volume d’emploi. »

    Président de la Fédération française du bâtiment (FFB), Jacques Chanut pense que le bonus-malus peut changer « le modèle économique et social » de la profession : à l’intérim se substitueraient le travail au noir et le recours aux autoentrepreneurs, afin d’affronter les pics d’activité. Thierry Grégoire, de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), rappelle que la majoration des cotisations, décidée en 2013 pour certains types de CDD, n’a nullement stoppé leur prolifération.

    L’autre piste à l’étude pour juguler l’inflation des CDD courts vise à revoir les règles de l’indemnisation chômage, afin que le demandeur d’emploi ait toujours intérêt à reprendre une activité durable. Un scénario, là aussi, très critiqué, mais par les syndicats, cette fois-ci, qui redoutent une réduction des droits pour les inscrits à Pôle emploi.

    Autrement dit, le dossier est bordé par des « lignes rouges », qu’il ne faut pas franchir aux yeux des partenaires sociaux. Les solutions consensuelles paraissent introuvables alors que tous les protagonistes s’accordent à reconnaître l’acuité du problème. Le défi est de taille pour le gouvernement.

    #travailleurs_précaires #chômeurs #revenu

  • Assurance-chômage : la Cour des comptes s’attaque à certaines règles d’indemnisation, Manon Malhère
    http://www.lefigaro.fr/social/2019/03/13/20011-20190313ARTFIG00084-assurance-chomage-la-cour-des-comptes-s-attaque-a

    Voilà un document que l’exécutif ne manquera pas de brandir pour défendre sa réforme controversée de l’#assurance-chômage face aux plus sceptiques, à commencer par les syndicats. Dans un référé publié ce mercredi, la Cour des comptes a en effet fustigé certaines règles d’indemnisation qui « s’avèrent inefficientes, voire inéquitables, et complexes pour les #allocataires ». Et c’est rare lorsqu’elle donne du grain à moudre au gouvernement !

    Le sujet est sensible car ces règles s’appliquent bien souvent aux travailleurs précaires

    Les magistrats de la rue Cambon s’attaquent en particulier aux règles permettant de cumuler un #salaire et une allocation qui sont dans le collimateur de l’exécutif. Car si leur but est de favoriser la reprise d’emploi, le gouvernement estime qu’elles peuvent également enfermer les individus dans la précarité en alternant des contrats très courts et une indemnisation, voire ne pas les inciter à retrouver un #emploi durable.

    Dans son référé, la Cour estime que dans un certain nombre de cas limités, ces règles peuvent donner lieu à des « stratégies d’optimisation » et traitements inéquitables entre les individus. Les magistrats ciblent plus précisément « l’#activité_conservée » qui permet à un salarié exerçant plusieurs activités et qui en perd une, de percevoir une allocation en plus de ses revenus. Le sujet est sensible car ces règles s’appliquent bien souvent aux #travailleurs_précaires comme, par exemple, les #assistantes_maternelles. Le problème pointé du doigt ? Le salarié peut parfois cumuler l’intégralité de l’allocation à laquelle il a droit avec ses autres revenus d’activité. Le montant total des revenus d’activité n’est pas pris en compte et aucun plafond n’est prévu pour cette indemnisation. Résultat : cela peut conduire ces salariés « à bénéficier d’un #revenu global très proche d’une activité à temps plein en cumulant revenu d’activité et revenu du chômage », affirmait déjà le gouvernement en septembre dernier, dans sa lettre de cadrage adressée aux syndicats et au patronat pour mener leur négociation sur cette réforme et qui a échoué fin février.

    « Les règles d’indemnisation demeurent trop favorables aux contrats de moins d’un mois »

    Les magistrats examinent également l’impact des règles encadrant les « #droits_rechargeables », qui permettent d’allonger la période d’indemnisation des chômeurs qui multiplient les petits « jobs », ainsi que les modalités de calcul du montant de l’indemnisation. Et leur conclusion est très claire : « les règles d’indemnisation demeurent trop favorables aux contrats de moins d’un mois ».

    Pour rectifier le tir, la Cour recommande d’harmoniser les modalités d’indemnisation des #chômeurs_en_activité_réduite. Enfin, elle préconise de revoir les dispositions relatives à l’accompagnement des chômeurs par Pôle emploi pour éviter l’enfermement de bon nombre d’entre eux dans l’activité réduite.

    #chômeurs #droit au chômage et aussi #prime_d'activité #travail #femmes

    • [Remarques glanées de ci de là] Lorsqu’on doit occuper de tels emplois, il est effectivement plus avantageux, lorsqu’on travaille par exemple uniquement les week-end, de se déclarer sur un contrat de 2 jours chaque semaine et de ne pas ouvrir de droits au chômage tout en restant au RSA plutôt que signer un contrat de 4 mois et se retrouver avec une allocation à 5 euros / jour ! Encore faut-il le savoir. La Cour des comptes pointe l’#optimisation en disant par ailleurs que les règles sont trop complexes pour que les précaires en activité réduite les optimisent.
      Cf. La Cour des comptes s’invite dans le débat sur l’assurance-chômage
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/13/la-cour-des-comptes-s-invite-dans-le-debat-sur-l-assurance-chomage_5435629_8
      Qui optimise, alors ? Les employeurs ? Personne ?

      L’optimisation fiscale qui porte sur des milliards chaque année, on s’en fiche pas mal, mais « l’optimisation » des pauvres qui cherchent à survivre avec quelques centaines d’euros par mois, là, c’est grave, faut sévir ! Laisser entendre qu’il s’agirait d’une fraude, alors qu’il s’agit des règles officielles de cumul emploi (sous-payé) + indemnité (misérable) imposées par Pôle emploi rajoute de la dégueulasserie à la dégueulasserie et ne sert qu’à essayer de faire passer dans l’opinion l’imminente réforme gouvernementale. La manœuvre est grossière, ces gens infects - ne nous laissons pas faire !

    • Un chômeur sur cinq touche plus que son ex-salaire
      https://www.lepoint.fr/societe/un-chomeur-sur-cinq-touche-plus-que-son-ex-salaire-16-03-2019-2301650_23.php

      Cette affirmation contestée de Muriel Pénicaud est statistiquement fondée, mais concerne des chômeurs qui, à 90 %, touchent moins de 1 300 euros par mois.

      Seules les personnes qui ne travaillent pas tout le mois peuvent espérer gagner plus d’argent en étant au chômage.

      Selon la ministre du Travail, un chômeur sur cinq perçoit une allocation supérieure à son salaire moyen antérieur. C’est en tout cas ce qu’elle a déclaré le 26 février dernier lors d’une conférence de presse destinée à présenter les intentions du gouvernement sur la réforme de l’assurance chômage, après l’échec des négociations entre partenaires sociaux. Cette statistique, qui n’est mentionnée dans aucune étude de l’Unédic, a suscité de vives protestations. Ainsi, Laurent Berger, numéro un de la CFDT, a dénoncé un chiffre « caricatural » qui permet à l’exécutif de dire que « les chômeurs profitent du système alors que la plupart ne choisissent pas quand ils travaillent ».

      Mais le chiffre existe bien et vient de Pôle emploi. L’organisme a comparé, à partir des ouvertures de droit, le montant des salaires moyens nets perçus pendant la période de référence au cours de laquelle le demandeur travaillait et le montant de son allocation nette au chômage. Résultat : 600 000 personnes, soit 20 % des chômeurs, touchent une allocation supérieure à ce qu’elles gagnaient en moyenne quand elles travaillaient.

      Le mode de calcul mis en cause

      Un quart d’entre elles bénéficient d’un taux de remplacement (rapport entre le montant de l’allocation et l’ancien salaire) compris entre 100 et 109 %, un quart entre 109 % et 123 %, un autre entre 123 % et 147 % et enfin le dernier quart perçoit un taux supérieur à 147 %.

      Comment cela est-il possible  ? En cause, le mode complexe et spécifique à la France de calcul de l’allocation, basé sur « le nombre de jours travaillés ». C’est en divisant la somme des revenus perçus sur les 12 derniers mois par ce nombre de jours travaillés que l’on obtient « le salaire journalier de référence » qui sert de base pour le calcul de l’allocation mensuelle. Ce mode de calcul est plus favorable aux personnes qui ont des contrats fractionnés, et donc moins de jours travaillés, comme le montre la comparaison de deux personnes qui ont travaillé au smic pendant un an.

      Lire aussi Le chômage atteint son niveau le plus bas depuis 2009 [ce qui n’est p-ê pas sans rapport avec la relance de la chasse, ndc]

      L’une a eu un seul CDD à environ 1 200 euros net. Elle a le droit à un an de chômage, suivant le principe « un jour travaillé = un jour indemnisé », et touchera environ 900 euros par mois. L’autre a fait sur un an douze CDD, de quinze jours par mois, et gagnait donc environ un demi-smic mensuellement, soit 600 euros. N’ayant travaillé que 180 jours sur l’année, elle n’aura le droit qu’à six mois de chômage. Mais elle touchera aussi 900 euros (soit 150 % de son ex-salaire), car ses revenus n’ont été divisés que par 180 et non 365 jours.

      Seules des personnes qui ne travaillent pas des mois complets
      Certains demandeurs d’emploi peuvent donc effectivement gagner plus mensuellement que leur précédent salaire. Mais, mettent en garde les syndicats, cela ne concerne que des gens qui ne travaillent pas des mois complets et donc aux revenus très modestes. Confirmation par Pôle emploi : sur ces 600 000 chômeurs, 16 % touchent une allocation de moins de 750 euros, 33 % entre 750 et 1 000 euros, 41 % entre 1 000 et 1 300 euros.

      Et ils n’ont droit en moyenne à une durée d’indemnisation que de sept mois, deux fois plus courte que celle de l’ensemble des demandeurs. Néanmoins, pour le gouvernement, ce système favorise l’explosion des contrats courts et pose « un problème d’équité » entre demandeurs d’emploi au détriment par exemple de ceux qui travaillent en continu à temps partiel. Pour éviter ces situations, l’une des pistes mises sur la table par le patronat pendant la négociation, et dont pourrait s’inspirer le gouvernement, serait de lier le versement des indemnités au rythme d’acquisition des droits.

      Par exemple, la personne qui a cumulé six mois de travail sur douze mois pourrait voir le versement de ses six mois d’indemnisation étalé sur une période plus longue, avec donc un revenu mensuel plus faible. Les économies seraient potentiellement substantielles, car deux tiers des allocataires sortent de l’indemnisation avant la fin de leur droit.

      Edit, mais non mais non : https://seenthis.net/messages/764301#message770754

  • « L’Etat a bien nationalisé l’assurance-chômage », Jean-Michel Bezat
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/04/l-etat-a-bien-nationalise-l-assurance-chomage_5431115_3232.html

    En reprenant la main après l’échec des négociations sur la convention Unédic, Emmanuel Macron est le premier président à aller au bout de la logique du toujours plus d’Etat, souligne notre journaliste Jean-Michel Bezat dans sa chronique.

    Chronique. Dans le panthéon de l’histoire sociale, deux figures tutélaires se font face et s’opposent : Otto von Bismarck et William Beveridge. A la fin du XIXe siècle, le chancelier allemand (1815-1898) a créé des assurances sociales financées par des cotisations assises sur les revenus du travail. L’économiste britannique (1879-1963), lui, a pensé en 1942 un Etat-providence alimenté par l’impôt, moins généreux mais universel. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la France s’est surtout inspirée du modèle allemand pour fonder la Sécurité sociale, sans renoncer à un idéal d’universalité qui en a fait un système hybride.

    Le gouvernement se tourne désormais vers Beveridge avec le « système de solidarité » proposé par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle. Puisque les droits ne sont plus attachés à un statut social fixe mais à une personne au parcours professionnel plus erratique, analyse le chef de l’Etat, « la protection sociale doit désormais se fonder sur l’individu pour ne laisser personne au bord de la route ». Une philosophie qui s’est imposée pour l’assurance-maladie ou les prestations familiales, et qui vient de s’étendre à l’assurance-chômage.

    Une bonne dose de mauvaise foi

    Car l’Etat a bien « nationalisé » l’assurance-chômage, même si celle-ci reste pour une part financée par les revenus du travail. Le mot a été lâché par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, après l’échec des négociations patronat-syndicats, incapables de s’accorder sur une nouvelle convention pour l’Unédic, qui croule sous une dette de 35 milliards d’euros (financée grâce à la garantie de l’Etat). M. Macron les a tancés, jeudi 21 février : « On est dans un drôle de système où chaque jour, dans le pays, on dit “corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire” et, quand on donne la main, on dit : “Pardon Monsieur, c’est dur, reprenez-la.” »

    Il lui faut une bonne dose de mauvaise foi pour imputer cet échec aux partenaires sociaux. Il ne les a pas « laissé faire », puisqu’il leur a imposé, avant le début des négociations, une lettre de cadrage prévoyant 1 milliard d’euros d’économies par an et un malus pour les entreprises abusant des contrats courts. Il faut aussi un zeste de cynisme pour invoquer les corps intermédiaires, lui qui en a fait si peu de cas depuis son élection. En reprenant la main, M. Macron est le premier président de la République à aller au bout de la logique du toujours plus d’Etat et à tirer les leçons d’une tendance à l’œuvre depuis belle lurette.

    Les pères fondateurs de l’Etat-providence, en 1945, voulaient qu’il soit géré par les salariés. Ils lui assignaient pour mission de « débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain » grâce au remboursement des soins, aux allocations familiales et aux pensions. Des régimes vraiment paritaires sont vite apparus avec l’Agirc (retraite complémentaire des cadres) dès 1947, l’Unédic en 1958 et l’Arrco en 1961, accompagnant la société salariale des « trente glorieuses ». Avant que l’insécurité sociale n’envahisse la société entière dans les années 1980 et n’oblige l’#Etat_social à couvrir de nouvelles populations.

    La fin d’une chimérique démocratie sociale

    Plus personne ne pleure l’esprit des ordonnances de 1945 sur la « Sécu ». A-t-on vu les « gilets jaunes », qui réclament surtout une démocratie participative de nature politique, regretter la fin d’une chimérique démocratie sociale ? Dès 1962, l’élection des administrateurs des caisses a été supprimée ; réintroduite par la gauche en 1983, elle n’a pas résisté au désintérêt croissant des salariés pour les scrutins professionnels.
    La gestion patronat-syndicats n’a pas connu meilleure fortune : elle a progressivement disparu dans les quatre branches de la Sécurité sociale et ne subsiste qu’à l’Arrco et à l’Agirc, où elle est condamnée par la création prochaine d’un régime de retraite couvrant l’ensemble de la population.

    Les chômeurs et les précaires ont afflué à Pôle emploi et aux guichets de l’aide sociale, les malades présentent des ordonnances toujours plus coûteuses, les retraités sont déjà 16 millions… La protection sociale est devenue un bien commun à spectre large. Son mode de financement a été élargi à l’ensemble des revenus avec la CSG, sa gouvernance de facto assurée par l’Etat, son budget encadré par le vote annuel d’une loi de financement au Parlement et placé sous l’œil du ministère des comptes publics… et de Bruxelles.

    Réduire les indemnités chômage des cadres

    A qui fera-t-on croire que les partenaires sociaux, si peu représentatifs, ont vocation à gérer 730 milliards d’euros de prestations, plus de deux fois le budget de l’Etat ? Avec les « ordonnances Pénicaud » sur le code du travail, M. Macron a commencé à « dénationaliser » les négociations sociales (temps de travail…) en les ramenant au niveau des branches ou des entreprises. Dans un mouvement inverse, il « nationalise » la protection sociale. Avec tous les risques politiques d’une reprise en main, qui l’oblige à assumer les décisions difficiles.

    Une première épreuve l’attend. Dans le cadre de la nouvelle convention Unédic définie par décret à l’été, le gouvernement envisage ainsi de réduire les indemnités chômage des cadres, les plus généreuses d’Europe, avec un plafond de 7 750 euros brut par mois. Nul doute que la mesure sera applaudie par les salariés du bas de l’échelle ; et qu’elle scandalisera une partie de l’électorat de M. Macron. L’autre avis de gros temps est annoncé pour la fin 2019, quand il déclenchera le big bang de la réforme des retraites.

    Les syndicats érigent volontiers le modèle beveridgien en épouvantail, symbole de prestations a minima. Il l’est, si l’on prend la version britannique ; beaucoup moins, si l’on constate la générosité des systèmes scandinaves, eux aussi financés par l’impôt. C’est des pays nordiques que M. Macron dit vouloir s’inspirer pour mieux utiliser le « pognon de dingue » de l’#Etat-providence. Cette inspiration est plutôt rassurante pour la France, où il joue un rôle majeur dans la réduction des inégalités. Mais où il est aussi un frein à la mobilité sociale.

    #chômeurs #précaires #Pôle_emploi #retraites #revenu #unedic #droits_sociaux #droit_auchômage

  • Le collectif chômeurs et précaires de Toulouse continue ses actions “coup de poing”, Sylvain Duchampt
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/collectif-chomeurs-precaires-toulouse-continue-ses-acti

    Nouvelle action du collectif chômeurs et précaires à Toulouse. Cette fois, c’est l’agence de Bellefontaine qui a été envahie. Pour le collectif la surveillance et les sanctions des chomeurs prévues dans la réforme de l’assurance chômage ne sont pas acceptables. 

    Après l’Agence Pôle Emploi Place Occitane puis celle de Jolimont, le collectif chômeurs et précaires de Toulouse ont ciblé l’agence de Bellefontaine en fin de matinée. 

    Ce collectif en lien avec le mouvement des Gilets Jaunes veut "la fin de la criminilisation des chômeurs et des précaires par le gouvernement".

    « Il y 6 millions de chômeurs en France et seulement 600 000 offres à Pole Emploi, dénonce Bérengère. Nous réclamons l’arrêt des contrôles à Pôle Emploi et l’abrogation du décret du 30 décembre. En revanche, nous souhaitons le rétablissement de l’Impôt sur la fortune, la suppression du CICE. Il faut aller chercher l’argent là où il est ! »

    Cette militante ne croit pas au Grand Débat lancé par Emmanuel Macron ? « Je n’ai plus aucune confiance dans ce gouvernement qui pratique un enfumage systématique et impose une violence sociale sans précédent, explique-t-elle »

    D’autres actions dans les prochains jours sont d’ores et déjà annoncés par le collectif chômeurs et précaires de Toulouse.

    #contrôle_des_chômeurs #Pôle_Emploi #chômeurs #précaires #luttes

  • Controverse autour des chômeurs qui gagneraient plus qu’en travaillant, Bertrand Bissuel
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/02/controverse-autour-des-chomeurs-qui-gagneraient-plus-qu-en-travaillant_54305

    Edouard Philippe et Muriel Pénicaud ont affirmé qu’un chômeur sur cinq reçoit une allocation supérieure à ses rémunérations antérieures.

    Colère des syndicalistes et perplexité de plusieurs économistes. L’exécutif a déclenché une vive controverse, mardi 26 février, en dévoilant quelques-unes de ses pistes pour transformer le système d’indemnisation des demandeurs d’emploi. « Il faut que le travail paye toujours plus que le chômage », a lancé Edouard Philippe. Or ce n’est pas forcément le cas, a poursuivi le chef du gouvernement, lors d’une conférence de presse à Matignon. Présente à ses côtés, Muriel Pénicaud, la ministre du travail, a précisé qu’un chômeur indemnisé sur cinq touche une allocation supérieure à la moyenne de ses rémunérations mensuelles perçues antérieurement. Un tel « dysfonctionnement » résulte de règles qu’il faut modifier, a-t-elle affirmé.

    Pour défendre une réforme politiquement sensible, l’exécutif s’est donc prévalu d’arguments chocs, qui ont scandalisé les leaders des confédérations de salariés. La statistique mentionnée par Mme Pénicaud est « caricaturale » et permet au pouvoir en place « de dire que les chômeurs profitent du système », s’est indigné Laurent Berger, numéro un de la CFDT. Les autres centrales ont réagi sur le même ton.

    Qu’en disent les économistes, qui connaissent bien les rouages de l’Unédic – l’association paritaire chargée de piloter l’assurance-chômage ? « Je ne vois pas bien comment le gouvernement parvient au ratio évoqué. Mais je ne dis pas que c’est radicalement impossible », confie Bertrand Martinot, ancien responsable de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle. Chercheuse au Centre d’études de l’emploi et travail (CEET), Claire Vivés s’interroge : « Cette statistique correspond sans doute à quelque chose, mais comment a-t-elle été construite ? »

    Travail continu ou fractionné

    « Par Pôle emploi », répond l’entourage de Mme Pénicaud, en indiquant que des compléments d’information seront apportés dans les prochains jours. Le point mis en exergue par la ministre tient aux modalités de calcul de la prestation, qui sont épouvantablement complexes. Au cœur du problème, il y a en particulier le salaire journalier de référence (SJR), sur lequel est basé le montant final de l’allocation. D’après le ministère du travail, le SJR peut, dans certaines situations, conduire à l’octroi d’une indemnisation plus importante que le salaire mensuel moyen de la personne quand elle exerçait une activité. Un peu plus de 600 000 inscrits à Pôle emploi se trouveraient dans ce cas de figure.

    « Je pense que l’ordre de grandeur avancé par le gouvernement est juste. Il illustre une thématique que j’avais déjà abordée dans un livre en 2013 », raconte Bruno Coquet, de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Dans cet ouvrage (L’Assurance chômage, L’Harmattan), le chercheur compare la situation de deux personnes ayant travaillé six mois dans l’année pour un salaire mensuel identique. La seule différence entre elles réside dans le fait que l’une a travaillé de manière continue, tandis que l’autre a été employée de façon fractionnée. « Avec les règles de calcul applicables, on parvenait à la conclusion que l’allocation de la deuxième personne correspondait à près de 160 % de son revenu mensuel moyen, soit un pourcentage deux fois plus élevé que celui de la première. Les dispositions en vigueur aboutissent donc à des inégalités, qu’il convient de corriger », explique M. Coquet.

    Chercheur associé à l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), Jacques Freyssinet considère que la question « est connue de longue date, mais elle n’est devenue problématique qu’avec la prolifération des CDD très courts, observée depuis une quinzaine d’années ». Sous-entendu : le phénomène dénoncé par le gouvernement a attiré l’attention car il concerne un nombre grandissant d’individus.

    « Si les paramètres de l’Unédic changent, ce sont des personnes en situation précaire qui vont en faire les frais », insiste Mme Vivés.
    Il ne faut pas perdre de vue une autre dimension importante ; derrière le chiffre brandi par Mme Pénicaud, il y a des « demandeurs d’emploi dont l’indemnisation porte sur des petits montants », insiste Mme Vivés : « Si les paramètres de l’Unédic changent, ce sont des personnes en situation précaire qui vont en faire les frais. »
    Tout en partageant certains des constats dressés par l’exécutif, M. Coquet souhaite que le gouvernement agisse de façon mesurée, en mettant sur la table tous les éléments : « Il faut un diagnostic précis et partagé – ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle – afin de bien informer le débat public, plaide-t-il. Les changements à venir peuvent être de grande ampleur, pour des populations à petits revenus, ce qui peut justifier des réformes graduelles. » M. Freyssinet, lui, se montre circonspect sur la suite : si le sujet a été placé sur le devant de la scène « pour justifier la lutte contre les CDD très courts, on peut le comprendre », remarque-t-il. En revanche, « s’il s’agit de préparer une réduction des droits des plus précaires, l’appréciation est différente ».
    Le gouvernement a conscience de tous ces enjeux, assure une source proche du dossier. Celle-ci ajoute que la réforme ne se limitera pas à une nouvelle formule pour calculer l’allocation des chômeurs et que tout sera fait pour améliorer l’accompagnement des plus fragiles.

    #chômeurs #précaires #droit_au_chômage #droits_sociaux

    • Chômage [ 20 % des chômeurs ont une allocation supérieure à leur salaire ? ] : quand l’Unédic corrige le gouvernement, Bertrand Bissuel

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/28/chomage-quand-l-unedic-corrige-le-gouvernement_5442574_823448.html

      Pour la ministre du travail, Muriel Pénicaud, 20 % des chômeurs ont une allocation supérieure à leur salaire. L’Unédic avance un chiffre plus faible.

      Le débat sur la réforme de l’assurance-chômage vient de connaître un rebondissement très intrigant. A l’origine de ce nouvel épisode, une note de quatre pages rendue publique, mercredi 27 mars, par l’Unédic, l’association paritaire qui pilote le dispositif d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Ce document remet en cause l’un des arguments-clés de l’exécutif pour transformer le régime : il s’agit de l’idée selon laquelle 20 % des chômeurs bénéficieraient d’une allocation supérieure à leur salaire mensuel moyen, perçu avant de s’inscrire à Pôle emploi.

      Ce chiffre avait été lancé, fin février, par la ministre du travail, Muriel Pénicaud, lors d’une conférence de presse à laquelle participait le chef du gouvernement, Edouard Philippe. Tout deux avaient estimé que le « système » repose sur des règles susceptibles d’engendrer des situations où le travail s’avère moins rémunérateur que l’indemnisation-chômage. Un discours qui avait plongé dans une colère noire plusieurs leaders syndicaux : Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, avait crié à la caricature et reproché au pouvoir en place de vouloir faire passer les demandeurs d’emploi pour des profiteurs.

      Ecarts significatifs

      Dans ce contexte très polémique, la note de l’Unédic, publiée mercredi, fournit une contribution très utile. Elle se penche sur le sort des allocataires, « avant et après le début » de leur prise en charge par l’assurance-chômage, en exploitant des données relatives à novembre et décembre 2017. D’après ce document, ce sont surtout les personnes ayant travaillé « moins de 25 % de l’année précédant leur ouverture de droit » qui ont touché une prestation supérieure à leur salaire antérieur. Or, elles sont peu nombreuses : 4 %, au total, soit un pourcentage très éloigné de celui évoqué par Mme Pénicaud. Précision importante : le cas de figure d’un demandeur d’emploi gagnant mieux sa vie au chômage peut se retrouver dans les catégories qui ont travaillé plus que 25 % des douze mois écoulés, mais « c’est rare », indique l’Unédic, en réponse à une question du Monde.

      Ces résultats ne vont pas vraiment dans le sens des statistiques mises en avant, il y a un mois, par l’exécutif. Le ministère du travail avait alors indiqué qu’il appuyait ses dires sur des recherches effectuées par Pôle emploi. L’opérateur public a, par la suite, apporté des explications orales à plusieurs journalistes, désireux d’en savoir plus, ainsi qu’à des responsables syndicaux. Mais à ce jour, aucun écrit n’a été diffusé – à la presse, tout au moins – pour exposer l’analyse de Pôle emploi.

      Une telle méthode a alimenté les doutes. La présidente (CFDT) de l’Unédic, Patricia Ferrand, a, d’ailleurs, exprimé son scepticisme, mardi, lors d’une conférence de presse consacrée aux projections financières du régime. Interrogée sur les 20 % de chômeurs dont l’allocation excéderait leurs revenus d’activité mensuels moyens, elle a répondu : « On ne sait pas du tout comment ça a été (...) calculé. » Eric Le Jaouen, le vice-président (Medef) de l’association paritaire, a fait chorus : « On aurait besoin d’un appui technique sur ce chiffre [de 20 %] parce que ce n’est pas ce que l’on constate (...) dans notre position de gestion de l’assurance-chômage. » Mme Ferrand a, par ailleurs, rappelé que les dispositions applicables posent comme principe que le demandeur d’emploi ne peut pas gagner plus que le salaire sur la base duquel sa prestation est déterminée.

      Les écarts significatifs qui existent entre la note de l’Unédic et les constats de Pôle emploi ont de quoi laisser perplexe. Comment parvenir à un diagnostic partagé sur l’assurance-chômage, comme le souhaite le gouvernement, si des chiffrages disparates circulent ? Sollicité, jeudi matin, par Le Monde, le ministère du travail n’a pas donné suite.
      Les syndicats, de leur côté, considèrent être confortés dans leurs positions : « Les chiffres du gouvernement tenaient de la communication politique, dans l’optique de faire baisser les droits de l’ensemble des demandeurs d’emploi. Nous avons dit depuis le début qu’ils étaient faux et l’étude de l’Unédic en fait la démonstration », confie Michel Beaugas (Force ouvrière). Eric Courpotin, lui, (CFTC) s’interroge : l’exécutif a-t-il voulu « faire un effet d’annonce » ? Ce qui est sûr, à ses yeux, c’est que les données de l’Unédic peuvent être vérifiées, alors qu’« on ne sait pas d’où sortent » celles de Mme Pénicaud.

  • Allemagne : le chômage à son plus bas depuis la Réunification
    https://www.lesechos.fr/monde/europe/0600816595965-pourquoi-la-baisse-du-chomage-devient-un-souci-pour-lallemagn

    Le pays a enregistré une baisse de 21.000 #chômeurs en février mais le nombre de postes vacants a dans le même temps progressé de 3,4 % sur un mois à 784.000. Le manque de main-d’oeuvre qualifiée touche de plus en plus de secteurs.

    C’est une bonne nouvelle qui augure cependant des lendemains plus difficiles pour l’économie allemande. Le marché du travail n’a jamais été aussi dynamique depuis la Réunification : le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de 21.000 personnes entre les mois de janvier et de février, ce qui fait un total de 2,236 millions de chômeurs en données corrigées des variations saisonnières (CVS), a annoncé vendredi l’Office fédéral du travail. Sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi a reculé de 173.000 personnes, permettant à l’Allemagne de maintenir son taux de chômage à son niveau plancher de 5 %.

    Malgré le ralentissement économique qui s’est enclenché ces derniers mois, cette forte baisse confirme la solidité de l’économie domestique allemande. L’accroissement du nombre d’actifs devrait en outre nourrir le moteur de la consommation, seul à tourner actuellement tandis que celui des exportations souffre des tensions internationales . Mais la progression simultanée du nombre de postes non pourvus (+26.300) inquiète les entreprises.

    La pénurie de main-d’oeuvre menace

    Atteignant un total de 784.000 en février, « le nombre record de postes vacants est un signal d’alarme pour l’Allemagne. La pénurie de main-d’oeuvre qualifiée devient un frein à la croissance », prévient Steffen Kampeter, directeur général de la fédération des employeurs allemands (BDA). Il dénonce les méfaits de l’abaissement de l’âge de départ à la retraite de 67 à 63 ans pour certaines professions alors même que la population vieillit : « Au cours des deux dernières années, environ un quart de million de travailleurs qualifiés ont pris leur retraite prématurément chaque année. C’est beaucoup plus que ce que le gouvernement allemand avait prévu à l’origine », regrette-t-il.

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    Pour l’heure, cette tension accrue sur le marché du travail est en faveur des actifs puisqu’elle pousse les salaires vers le haut (+3,2 % en 2018 et + 4,8 % attendus par le gouvernement allemand en 2019). Bien que mesurée, la hausse de 0,5 % à 1,7 % de l’inflation en février n’est pas sans lien avec

    #plein_emploi_précaire

  • Assurance-chômage : des mesures seront présentées au printemps pour une mise en œuvre à l’été | Gouvernement.fr
    https://www.gouvernement.fr/assurance-chomage-des-mesures-seront-presentees-au-printemps-pour-une-m

    Edouard Philippe et Muriel Pénicaud ont précisé des éléments de méthode et de calendrier concernant la réforme de l’assurance-chômage que le Gouvernement va mettre en œuvre suite à l’échec des négociations entre les partenaires sociaux.
     
    Le Gouvernement reprend le dossier de l’assurance-chômage, avec deux objectifs majeurs : lutter contre la #précarité et inciter au retour à l’#emploi.

    L’enjeu de la transformation est double :
     
    Inciter les #entreprises à proposer des contrats de travail plus longs et privilégier les embauches en CDI ;
    Toujours s’assurer que la reprise d’emploi est plus intéressante que le maintien au chômage.

    Muriel Pénicaud engagera dans les prochains jours de très larges consultations auprès des différents acteurs du marché du travail – partenaires sociaux, mais également associations de #chômeurs, mouvements d’employeurs, parlementaires, organisations de #salariés non représentatives…

    Les mesures seront présentées au printemps. Elles feront l’objet d’un décret qui sera mis en œuvre cet été.

    La piste du #bonus-malus pour lutter contre la multiplication des contrats courts (< 1 mois) est sur la table : « Personne ne nous a proposé de meilleure solution à ce stade » pour lutter contre la précarité, a déclaré le Premier ministre. Le principe est de majorer les #cotisations des entreprises ayant le plus recours aux contrats courts, et de diminuer celles des employeurs dont les effectifs sont stables. Ce mécanisme avait été défendu par le président de la République pendant la campagne.❞

    #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit cuisinés avec un délai #gilets_jaunes

  • Révolution culturelle au NPA : "On observe que la frontière entre emploi et chômage se brouille..."
    Bientôt : « l’Insee a raison de pas qualifier les #chômeurs d’inactifs. Et d’ailleurs... le travail se limite t-il à l’emploi ? »
    https://npa2009.org/actualite/social-autres/assurance-chomage-grave-recession-annoncee

    Comme attendu, les « négociations » ont buté sur la question des contrats courts. Il est important de s’arrêter en détail sur cette question car l’examen de quelques chiffres permet de démonter les idées reçue sur la « générosité » du régime d’assurance #chômage et sur les chômeurs qui « déconnent »…

    On observe que la frontière entre emploi et chômage se brouille et si la catégorie A des demandeurEs d’emploi – ceux qui ne travaillent pas une seule heure – reste stable, les catégories B et C explosent. Comme le rappelle Claire Vivés, sociologue, un demandeur d’emploi sur trois et un allocataire sur deux travaillent, et ceci bien que travailler ne rapporte que 10 % de revenu supplémentaire aux allocataires de l’assurance chômage. En effet, les règles de cumul ne permettent pas de gagner plus que ce que l’on percevait comme salaire auparavant.

    La place centrale des contrats courts

    Dans une étude récente l’Insee livre des chiffres éclairants. En moyenne donc, en 2017, 1,2 million de personnes occupaient un emploi en contrat court, CDD et intérim compris. Si, en moyenne, en 2017, 4,5 % des personnes en emploi étaient en contrat court, soit un contrat de moins de trois mois, près de 75 % des embauches (hors intérim) réalisées sur une année se faisaient sous ce type de contrat, selon une analyse de l’Insee, publiée le 6 février. Parmi les personnes en contrat court, 57 % sont en CDD, et 43 % effectuent une mission d’intérim. En outre, toujours en 2017, 18 % des salariéEs en contrat court à temps partiel souhaitaient travailler davantage et étaient disponibles pour le faire, contre 6 % dans l’emploi total. Plus globalement, ajoute l’Insee, « 29 % des salariés en contrat court (32 % pour l’intérim court et 27 % pour les CDD courts) souhaitent trouver un autre emploi, en remplacement ou en complémentarité de leur emploi actuel ». Ils ne sont que 11 % parmi l’ensemble des personnes occupant un emploi.

    Les jeunes basculeraient plus souvent vers l’inactivité, ou une reprise/poursuite d’études. Ces transitions fréquentes entre emploi en contrat court, chômage et inactivité se traduisent par un taux d’inscription à Pôle emploi plus élevé : 55 % des personnes en contrat court y sont inscrites, contre 40 % des personnes en CDD ou en intérim et 7 % de l’ensemble des personnes occupant un emploi. « Cela dit, les réembauches et renouvellements de contrats chez le même employeur étaient par ailleurs fréquents en 2017, puisque 60 % des personnes en contrat court travaillaient encore dans la même entreprise trois mois plus tard ».

    Taxations et surcotisations sur les contrats courts

    Claire Vivés montre que 1 % de malus sur les CDD de moins d’un mois ne rapporterait que 250 millions, De même les surcotisations qui ont été brièvement appliquées en 2014 sur l’intérim n’ont pas eu d’effet. Le patronat refuse toute mesure réelle de lutte contre la précarité, et toute hausse générale du taux des cotisations, qui n’ont pas augmenté depuis 2003. Or augmenter la cotisation d’assurance chômage de 1 % sur tous les contrats rapporterait 5 milliards, car le CDI demeure majoritaire en termes d’emplois. L’égalité des salaires hommes-femmes, 6 milliards (comme en Islande) et le déplafonnement des cotisations pour les salaires au-delà de 13 000 euros/mois, 800 millions, soit au total près de 12 milliards ! Le déficit (2 milliards en 2018 et 0,9 milliard prévu en 2019) est réglé !

    Et maintenant ?

    Il n’y aura pas d’accord signé sur le dos des chômeurEs comme en 2014 (800 millions d’euros de baisse de droits), mais les « partenaires sociaux » laissent en connaissance de cause la main au gouvernement pour mettre en œuvre son plan de baisse supplémentaire de droits. Le choix patronal renvoie en partie à des débats internes au Medef sur l’utilité de continuer à continuer à participer à la gestion de ce régime. Sans compter que le développement des assurances complémentaires au forfait minimal permettrait aussi de mettre la main sur un gros pactole (37 milliards de cotisations…).

    Avec la suppression des cotisations salariales et leur remplacement par la CSG, le gouvernement a la main sur le financement du régime. La baisse des droits est donc programmée (1,3 milliard/an), la voie vers le forfait minimal est ouverte, les outils pour faire accepter n’importe quoi aux chômeurEs sont en place !

    Tout est donc fait pour dégrader sensiblement les conditions de vie des chômeurEs et de l’ensemble des salariéEs. Depuis le début de l’année, plusieurs actions et/ou occupations (réunissant associations, intermittentEs, syndicats de Pôle emploi) ont eu lieu dans plusieurs villes. La dernière en date a eu lieu vendredi 22 février avec l’occupation du bâtiment de Pôle emploi abritant le centre de contrôle de la recherche d’emploi dans le 18e arrondissement de Paris, avec intervention policière au bout. Ce sont ces actions qu’il faudra continuer pour aller demander des comptes à la direction de Pôle emploi et à Mme Pénicaud !

    La France est-elle trop généreuse avec les chômeurs ? Claire Vives, sociologue rattachée à l’IDHES, chercheuse au Centre d’études de l’emploi et du travail
    https://www.franceculture.fr/economie/la-france-est-elle-trop-genereuse-avec-les-chomeurs

    #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit #travail #droits_sociaux

  • Chômage : le faux suspense du gouvernement | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie/260219/chomage-le-faux-suspense-du-gouvernement?onglet=full

    Une semaine après l’arrêt des négociations entre les syndicats et le patronat sur les nouvelles règles de l’assurance-chômage, le premier ministre et la ministre du travail ont relancé mardi 26 février une grande phase de concertation. Ils ont refusé de dévoiler les contours de la réforme, annoncée pour cet été. Mais les priorités de l’exécutif sont connues, et les perdants du futur système aussi.

    Je croi que la loi s’appelle « loi de confiance dans l’ #équarrissage »

    • ui, pour la réforme des règles régissant l’assurance-chômage, il y a un plan. Et non, il n’est toujours pas l’heure de le dévoiler. C’est le message que se sont employés à faire passer, lors d’une conférence de presse ce mardi 26 février, le chef du gouvernement Édouard Philippe et la ministre du travail Muriel Pénicaud, appuyés par des explications données aux journalistes par le cabinet de la ministre.

      La réaction du gouvernement était attendue, à la suite de l’échec des négociations entre syndicats et organisations patronales, acté la semaine précédente. « Je regrette évidemment très profondément qu’un accord n’ait pu être trouvé, a déclaré Édouard Philippe. J’ai parfaitement conscience qu’il n’était pas facile d’obtenir cet accord, parce que c’est toujours difficile de remettre à l’endroit un système qui s’est constitué par une sédimentation de règles année après année. »

      Cinq jours plus tôt, le président de la République avait été plus tranchant, ironisant devant les présidents de département réunis à l’Élysée sur des « corps intermédiaires » incapables de se mettre d’accord. « On est dans un drôle de système ! Chaque jour, dans le pays, on dit : “Corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire”, s’est-il exclamé. Et quand on donne la main, on dit : “Mon bon monsieur, c’est dur, reprenez-la.” Et le gouvernement va devoir la reprendre, car on ne peut pas avoir un déficit cumulé sur le chômage, comme on a depuis tant d’années. »

      Mais si l’exécutif est bien décidé à prendre la main, il se donne encore un peu de temps avant de dire précisément comment il entend modifier les règles, et donc dévoiler qui seront les perdants de sa réforme. Les décisions finales, qui seront prises par décret et ne passeront donc pas devant le Parlement, ne seront pas annoncées avant plusieurs semaines, dans le cours du printemps. Leur mise en œuvre est annoncée pour l’été, sans plus de précision.

      Édouard Philippe et Muriel Pénicaud, à Matignon le 26 février. © capture d’écran - site internet de Matignon Édouard Philippe et Muriel Pénicaud, à Matignon le 26 février. © capture d’écran - site internet de Matignon

      Dans l’intervalle, va s’ouvrir « une concertation très approfondie et très intense », a annoncé Muriel Pénicaud. Dès ce mercredi, la ministre du travail et son cabinet vont commencer à recevoir, un par un, les représentants des salariés et du patronat, mais aussi des associations de chômeurs, des parlementaires ou des lobbys patronaux non représentatifs. Dans un premier temps pour tenter d’« aboutir à un diagnostic partagé ». Puis une seconde fois pour, enfin, dévoiler les mesures que le gouvernement mettra en place. Une « cinquantaine de réunions » en tout, selon une méthode rappelant celle qui avait abouti à l’adoption des ordonnances réformant le code du travail – et qui avait fortement déplu.

      Sur le papier, rien ou presque n’a donc changé depuis la mi-septembre, quand le gouvernement avait présenté sa lettre de cadrage encadrant la négociation qu’il demandait aux partenaires sociaux d’ouvrir. Cinq mois plus tard, les mêmes thèmes et les mêmes mots reviennent. « Il est vrai que nous avons connu quatre mois de négociation, et que certains sujets sont labourés depuis six ans, reconnaît-on au ministère du travail. Mais des points névralgiques n’ont pas été assez discutés, approfondis. » « Les partenaires sociaux sont passés à côté de certains sujets fondamentaux, assure-t-on. Nous avons envie de repartager les choses le plus clairement possible, pour mieux préparer le terrain pour les solutions. »

      Officiellement, il n’est pas encore question d’évoquer ces « solutions », que le gouvernement entend pourtant mettre en œuvre dans les six mois à venir. Il faut laisser passer la séquence actuelle du grand débat, et sans doute les élections européennes, pour trouver plus tard une fenêtre de tir favorable à la présentation de mesures qui risquent de faire grincer beaucoup de dents.

      Pourtant, aujourd’hui comme au mois de septembre, il n’est pas sorcier de comprendre les axes que l’exécutif souhaite favoriser, et dont beaucoup sont explosifs. Les mots employés dans la lettre de cadrage, ceux-là mêmes qui ont abouti à un échec des négociations entre partenaires sociaux, sont plus que jamais d’actualité. En coulisse, le ministère du travail a affûté ses arguments pour convaincre que ses choix étaient les bons. Le cadre financier d’abord : il s’agit toujours de trouver 4 milliards d’économies en trois ans, même si le cabinet de Muriel Pénicaud assure que « le but poursuivi n’est pas économique » et qu’il s’agit avant tout d’« améliorer le fonctionnement du marché du travail ».

      Les priorités, ensuite. À commencer par le désormais fameux « bonus malus » sur les contrats courts, qui verrait les cotisations patronales sur les salaires modulées en fonction du nombre de contrats courts utilisés dans une entreprise. Emmanuel Macron défend cette mesure depuis sa campagne présidentielle et le ministère du travail assure depuis 18 mois qu’elle sera mise en œuvre si une alternative équivalente n’est pas proposée. Mais le patronat n’en veut absolument pas. Ce mardi, Édouard Philippe a rappelé qu’« à ce stade », « personne » ne lui a « proposé […] une meilleure solution ». « L’instrument est sur la table », a-t-il donc martelé, rappelant que la mesure était à ses yeux une « contrepartie » demandée aux chefs d’entreprise, à qui les ordonnances ont assuré « plus de souplesse et de sécurité » dans le licenciement de leurs salariés.

      Les organisations patronales assurent depuis des années que cette mesure est un contresens car utiliser des contrats courts est obligatoire dans certains secteurs, qui ne peuvent pas s’organiser autrement. Le ministère du travail souligne que cette position ne tient pas la route : « Dans tous les secteurs, pour une même taille d’entreprise, pour le même business et les mêmes contraintes, il existe des pratiques très différentes. » Ainsi, parmi les traiteurs – un exemple régulièrement utilisé par le patron du Medef Geoffroy Roux de Bézieux –, certaines entreprises utilisent quarante fois plus les contrats courts que leurs concurrents. « Il y en a un qui fait subventionner sa flexibilité par les autres », traduit un conseiller, agacé.
      Réduire l’indemnisation des salariés les mieux payés, un précédent dangereux

      Le gouvernement reste tout aussi attaché à une réforme du système qui, selon lui, avantage certains travailleurs précaires, qu’il nomme les « permittents ». Il s’agit des demandeurs d’emploi qui travaillent régulièrement, mais sur de petites périodes. Pour le gouvernement, il faut modifier les règles encadrant les droits rechargeables à l’assurance-chômage. Depuis 2014, il est prévu que si un chômeur travaille pendant qu’il touche son allocation-chômage, il allonge la période pendant laquelle il peut toucher de l’argent de Pôle emploi. Un mécanisme qui peut durer indéfiniment, pour peu qu’il travaille au moins 150 heures, c’est-à-dire environ un mois.

      Ces paramètres sont incontestablement bénéfiques pour les chômeurs et les incitent à trouver un travail, même court et peu rémunéré. Le ministère du travail en convient, mais souligne que depuis 2014, la part de ceux qui se trouvent dans cette situation depuis plus de deux ans « a quasiment doublé, passant de 9 % à 16 % » des demandeurs d’emploi qui utilisent les droits rechargeables. « On enferme les gens dans la précarité plutôt que de les en sortir », assure le ministère. Un argument qui ne devrait guère convaincre les syndicats, logiquement très hostiles à une réforme qui serait défavorable aux plus précaires.

      Le débat devrait être tout aussi virulent sur la question, en apparence technique, du calcul du salaire journalier de référence. C’est en se fondant sur ce calcul qu’est établi le montant de l’allocation chômage versée à chaque demandeur d’emploi. Or, se plaint le ministère, environ 20 % des chômeurs indemnisés « touchent une allocation chômage supérieure à la moyenne de leurs revenus » lorsqu’ils travaillaient. La raison ? Le calcul de l’indemnité est établi en fonction du revenu touché uniquement les jours travaillés, et non selon le revenu mensuel global, qui inclut jours travaillés et jours chômés et qui est donc plus faible. Le système actuel « favorise mécaniquement le fractionnement des contrats de travail », plaide-t-on au ministère, et ne pousse pas assez au retour à l’emploi.

      Cette argumentation met de côté le fait que les règles en vigueur depuis octobre 2017 ont déjà corrigé en grande partie les inégalités pointées par l’exécutif, celles qui concernent les contrats de moins de cinq jours. L’assurance-chômage avait trouvé des cas frappants : deux demandeurs d’emploi ayant travaillé 90 jours pour un même salaire pouvaient toucher 1 000 euros de différence en quatre mois d’indemnisation, si l’un avait travaillé avec un CDD de dix-huit semaines, et l’autre avec dix-huit CDD de cinq jours. La situation a déjà été corrigée, 20 % des demandeurs d’emploi ont vu leurs allocations baisser en conséquence.

      Les salariés concernés par cette future réforme font partie des plus précaires. Est-ce parce qu’il en est conscient que le gouvernement insiste en parallèle pour réduire les droits au chômage des salariés les mieux payés ? « Nous devons revoir notre système qui permet d’obtenir des niveaux d’indemnisation pour les salaires élevés qui sont trois fois supérieurs à ce qui se passe chez nos voisins », a prévenu le premier ministre. Les plus pessimistes craindront qu’en touchant d’abord aux droits des plus riches, le gouvernement ne s’autorise un précédent qui fera peu de mécontents, mais qui installera l’idée qu’il est possible de diminuer les allocations chômage.

      Aujourd’hui, le niveau maximal de l’allocation est fixé à 7 750 euros brut (soit 6 615 euros net). Un plafond qui est le plus haut d’Europe, mais qui concerne… seulement 0,05 % des demandeurs d’emploi, selon l’Unédic – et seuls 5 % d’entre eux touchent plus de 1 810 euros net par mois. Muriel Pénicaud et son cabinet ont tellement envie de convaincre que ce plafond maximal est trop haut qu’ils assurent que « le deuxième pays qui indemnise le plus en Europe » est le Danemark, où le plafond est fixé à 2 700 euros par mois. Problème, selon l’Unédic elle-même, il existe des cas où les niveaux sont plus hauts, sans atteindre celui de la France : presque 5 000 euros au Luxembourg, 4 400 en Allemagne.

      Pour réduire les plus hauts niveaux d’allocation chômage, il y a deux solutions. Mettre en place la dégressivité dans le temps, d’abord. Une idée qui a longtemps séduit l’exécutif, mais qui est unanimement refusée par les syndicats, et battue en brèche par l’immense majorité des études économiques. Une étude de l’OFCE a ainsi rappelé fin 2017 que la dégressivité des allocations était tout sauf efficace.

      L’autre possibilité est de baisser le plafond maximal, et c’est l’option que semble désormais privilégier l’exécutif. Une piste qui serait « légitime », compte tenu d’une « situation de quasi-plein-emploi » chez les cadres, dont moins de 4 % sont au chômage. Au ministère du travail, on détaille que « plus le niveau d’indemnisation augmente, plus la durée d’indemnisation augmente » : 419 jours indemnisés en moyenne pour des demandeurs d’emploi touchant 2 000 à 3 000 euros d’indemnités, contre 575 jours pour ceux qui touchent plus de 5 000 euros, et l’écart se maintient même chez les moins de 50 ans, qui retrouvent plus facilement un emploi.

      « Ce ne sont pas les gens qui sont en cause, ce sont les règles », répètent les conseillers de Muriel Pénicaud, qui conviennent que pour le patronat ou les syndicats, les « diagnostics » alignés par le gouvernement « sont difficiles à poser, à accepter ». De fait, il paraît inconcevable qu’ils deviennent des constats partagés par tous. Mais ce n’est de toute façon pas le but poursuivi par le gouvernement, qui ne cache pas son ambition de mettre en place une « réforme systémique ». Que les organisations qui étaient jusque-là aux manettes l’approuvent ou non.

    • Gagner plus au chômage qu’en travaillant : l’étonnante statistique du gouvernement, Hélène Fily
      https://www.franceinter.fr/economie/gagner-plus-au-chomage-qu-en-emploi-l-etonnante-statistique-du-gouvernem

      Le gouvernement reprend la main sur l’assurance chômage en s’attaquant aux contrats courts et aux règles d’indemnisation. En s’appuyant sur une donnée qui interroge : selon lui, un #allocataire sur cinq perçoit un revenu plus élevé en étant au #chômage qu’en travaillant. Qu’en est-il vraiment ?

      De nouvelle règles seront applicables dès cet été pour le calcul des indemnités chômage, a annoncé mardi le Premier ministre Édouard Philippe, accompagné de la ministre du #Travail, Muriel Pénicaud. Cette dernière reçoit dès cette semaine les leaders syndicaux et patronaux, pour une phase de diagnostic, qui, juge-t-elle, n’a pas été assez creusé ces quatre derniers mois.

      Qui touche quoi ?

      La moitié des allocataires touche moins de 860 euros nets par mois. 45% touchent entre 860 et 1 810 euros. Seuls 5 % des allocataires touchent donc plus de 1 810 euros nets chaque mois.

      Il existe également un plafond. À ce jour, il se situe à 6 615 euros nets mensuels, une somme qui est « versée à 0,05 % des bénéficiaires », précise l’Unedic, soit un millier d’allocataires sur les 2,7 millions de personnes qui sont aujourd’hui indemnisées au titre de l’Assurance chômage. Les cadres représentaient, en 2017, 43 % de la masse salariale soumise à contribution sur l’assurance chômage.

      Comment se calcule l’allocation

      Aujourd’hui, l’allocation minimale versée est de 29,06 euros par jour pour un demandeur d’emploi qui a travaillé à temps plein sur une durée suffisamment longue pour en être bénéficiaire. Le montant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) est calculé à partir de votre salaire journalier de référence (SJR). Ce salaire de référence prend en compte tous vos salaires bruts perçus au cours des 12 derniers mois, primes comprises, mais hors indemnités liées à la rupture de votre contrat.

      En moyenne, précise l’Unédic, l’allocation nette correspond à 72 % de l’ancien salaire, sur la base d’un temps complet et le taux varie en fonction de l’ancien salaire : 79% pour un SMIC net et, par exemple, 64 % sur un salaire de 3 000 euros nets mensuels.

      Comment expliquer la statistique du ministère ?

      Un demandeur d’emploi sur cinq gagne t-il vraiment plus au chômage qu’en travaillant ? Prenons un exemple : entre la situation d’un chômeur qui aurait été salarié à mi-temps pendant douze mois et celle d’un chômeur salarié 15 jours par mois, tous les mois ( donc avec un contrat différent chaque mois), le ministère estime que le système actuel favorise le fractionnement des contrats.

      Car dans le premier cas, celui du salarié à mi-temps, on applique un coefficient de temps partiel. Et pas dans l’autre. La salarié à temps partiel qui se retrouve sans emploi ne touchera que 740 euros par mois. Alors que le salarié qui cumule les contrats percevra 900 euros, plus que lorsqu’il travaillait.

      Mais ce qu’il ne faut pas oublier de préciser, c’est que le contrat de longue durée permet une indemnisation plus longue que les contrats courts. Dans notre exemple, le mi-temps sera indemnisé pendant douze mois, tandis que le salarié qui a cumulé les contrats courts pendant 12 mois ne sera indemnisé, lui, que pendant 6 mois. Son capital est grignoté plus vite parce qu’il a travaillé moins longtemps.

      Le gouvernement tient-il compte de cette donnée ? Inclut-il les chômeurs qui travaillent (la moitié des allocataires), et qui cumulent donc allocation et salaires ? L’Unédic a été bien en peine de trouver la moindre donnée qui confirme cette étonnante statistique.

  • Contrôle des chômeurs : les agences Pôle emploi sous tension - Le Parisien
    http://www.leparisien.fr/economie/controle-des-chomeurs-les-agences-pole-emploi-sous-tension-25-02-2019-801

    Le renforcement des contrôles et des sanctions vis-à-vis des chômeurs crée des crispations dans les agences. Plusieurs ont été la cible des mouvements de colère.

    Des ordinateurs endommagés, des téléphones inutilisables… et plus de 3 000 euros de dégâts. Le 15 février dernier, l’intrusion d’un petit groupe d’une quarantaine de personnes dans les locaux de la plate-forme de Pôle emploi spécialisée dans les contrôles des chômeurs à Chantepie, près de Rennes (Ille-et-Villaine) a laissé des traces.

    Fin janvier, à Saint-Étienne, des chômeurs et des militants associatifs et syndicaux ont débarqué dans une agence quand vendredi dernier, ce sont des sites de Pôle emploi à Paris (dans le XVIIIe arrondissement), Toulouse (Haute-Garonne), Ussel (Corrèze), Lyon (Rhône-Alpes), Besançon (Franche-Comté) ou Nantes (Loire-Atlantique) qui ont été ciblés par des groupes de trente à soixante personnes.

    Des « envahissements » où l’on retrouve pêle-mêle des militants d’extrême gauche, d’associations historiques de défense des chômeurs comme Agir ensemble contre le chômage (AC !), mais aussi de la CGT, de Sud solidaires et même quelques Gilets jaunes. Comme le constate Pôle emploi, ces opérations se passent la plupart du temps de manière pacifique mais reflètent un contexte de crispations grandissantes tant du côté des chômeurs que des salariés.

    #contrôle_des_chômeurs #chômeurs #sanctions #radiations #allocation #droit_au_chômage #Pôle_emploi #occupation

  • Droit au chômage : « On décidera par décret » - Assurance-chômage : le gouvernement va devoir assumer une réforme minée, Bertrand Bissuel, Le Monde
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/02/21/unedic-l-executif-va-devoir-assumer-sa-reforme-de-l-assurance-chomage_542623

    En désaccord sur la question des contrats courts, les partenaires sociaux ont mis fin à leurs négociations.

    Le miracle n’a pas eu lieu. Réunis, mercredi 20 février, pour une dixième séance de négociation sur l’assurance-chômage, les partenaires sociaux ont confirmé leur incapacité à parvenir à un compromis. Plus que prévisible, cette issue est la résultante de profonds désaccords entre les parties en présence pour combattre le recours abusif aux contrats courts. Les syndicats militaient pour un système de bonus-malus, qui augmente les cotisations des entreprises où la main-d’œuvre tourne fréquemment et diminue celles des employeurs dont les effectifs sont stables. Le patronat, hostile jusqu’au bout à un tel mécanisme, suggérait d’autres pistes – jugées insuffisantes par le camp adverse. Chaque protagoniste restant arc-bouté sur ses positions, les discussions ne pouvaient que capoter.

    L’exécutif va, du même coup, reprendre en main un dossier qui s’avère éminemment sensible, puisque l’un des principaux objectifs du processus en cours est de réaliser des économies sur les dépenses d’allocation en faveur des demandeurs d’emploi. Cet épisode risque fort d’accélérer le déclin du paritarisme à l’échelon interprofessionnel.

    Les organisations d’employeurs et de salariés n’ont mis qu’une heure, mercredi, pour sceller le divorce. Pour cette rencontre de la dernière chance, les représentants du Medef, de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et de l’Union des entreprises de proximité (U2P) étaient venus avec une nouvelle proposition : la création d’un fonds pour financer des formations et une indemnisation en faveur des salariés alternant contrats courts et périodes d’inactivité.

    L’idée de ce « pot commun » (alimenté par une contribution spécifique des entreprises sur les #CDD_d’usage) ayant circulé avant les échanges de mercredi, plusieurs responsables syndicaux avaient clairement dit qu’elle n’était pas à la hauteur des enjeux. Dès lors, les conclusions ont vite été tirées : « Nous faisons le constat aujourd’hui que nous ne pouvons trouver suffisamment de points de convergence », a déclaré Hubert Mongon, le chef de file du Medef, à l’issue de la réunion.

    Responsabilité de l’échec

    Comme souvent dans ce type de situation, les acteurs en présence se sont mutuellement renvoyé la responsabilité de l’échec. « Le patronat n’a jamais voulu discuter des moyens de lutter contre la #précarité et d’un système de modulation des #cotisations [s’apparentant au #bonus-malus] », a dénoncé Denis Gravouil (CGT). « Je ne vois pas à quoi ça rime, ce simulacre de négociation », a enchaîné Eric Courpotin (CFTC). L’attitude des organisations de salariés relève du « non-sens », a rétorqué la CPME, dans un communiqué, en soulignant la nécessité de « réagir » face à la #dette « de plus de 30 milliards d’euros » accumulée par l’Unédic, l’association paritaire qui pilote l’assurance-chômage.

    En réalité, la probabilité d’un « deal » était mince, dès le départ, car le gouvernement a placé la barre très haut. Dans la feuille de route transmise fin septembre 2018 aux partenaires sociaux pour cadrer leur réflexion, Matignon a tracé des orientations de nature à mécontenter tout le monde : d’un côté, il y a les économies, de 3 à 3,9 milliards d’euros en trois ans, qui indisposent les syndicats ; de l’autre, la volonté de forger de « nouvelles règles », pour réduire le nombre de précaires constamment réembauchés en CDD ne peut que faire froncer les sourcils des leaders patronaux. Sur ce deuxième volet, le mot « bonus-malus » n’est, certes, pas cité dans le document de cadrage du premier ministre, mais Emmanuel Macron a, lui-même, récemment rappelé qu’il comptait toujours mettre en œuvre cette mesure, inscrite dans son programme de campagne – contribuant, ainsi, à tendre « les positions des uns et des autres », d’après Michel Beaugas (FO).

    Mercredi soir, devant quelques journalistes, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a regretté l’absence d’accord, en précisant que « le gouvernement prendra ses responsabilités ». Autrement dit, c’est lui qui changera les conditions d’accès à l’assurance-chômage et les modalités d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Un événement rarissime depuis la fondation de l’Unédic, au tout début de la Ve République. Il y a trois ans, les négociations s’étaient soldées par un échec – en buttant, déjà à l’époque, sur la question des contrats courts, mais l’exécutif s’était alors contenté de prolonger, par décret, les dispositions en vigueur. En 1982, en revanche, le #gouvernement_Mauroy avait pris des mesures d’une tout autre ampleur, après les discussions infructueuses entre le patronat et les confédérations de salariés : un #décret avait été publié, qui modifiait significativement le « fonctionnement du régime ».

    « On décidera par décret »

    Le pouvoir en place aujourd’hui va-t-il procéder de la même manière ? Les propos de Mme Pénicaud, mercredi, ne laissent guère de place au doute : « On décidera par décret », a-t-elle martelé sur BFM-TV, mais les organisations d’employeurs et de salariés seront consultées au préalable, a-t-elle précisé. Le calendrier de la concertation n’est pas connu, à ce stade.

    Les syndicats craignent que les transformations à venir ne pénalisent durement les demandeurs d’emploi, en particulier ceux qui occupent une activité réduite, avec la possibilité de cumuler leur salaire et une prestation de l’Unédic. L’hypothèse d’un abaissement de l’indemnité maximale plane aussi. Une telle option, si elle était retenue, toucherait fortement les cadres, puisque l’allocation dépend du montant de la rémunération, a mis en garde Jean-François Foucard (CFE-CGC) : « On sera en [position] défensi[ve] pour essayer de limiter les dégâts. » La CGT, pour sa part, a indiqué qu’elle sera attentive au sort des personnes ayant plusieurs employeurs (les #assistantes_maternelles, notamment), puisque les règles applicables à elles sont susceptibles d’être durcies.

    Le patronat fait également grise mine, face à la perspective du bonus-malus. « Le système, tel qu’il est aujourd’hui envisagé, n’a aucun sens pour l’emploi », a répété M. Mongon, mercredi.

    S’il va au bout de ses intentions, l’exécutif se mettra donc à dos l’ensemble des partenaires sociaux et accréditera la thèse selon laquelle il ne tient pas compte des corps intermédiaires, tout en donnant l’impression de s’attaquer aux plus faibles.

    Pas idéal dans le contexte actuel d’ébullition sociale.

    « Une nouvelle ère » est en train de s’ouvrir, a lancé Marylise Léon (CFDT), mercredi. Celle du « paritarisme d’Etat », a complété M. Beaugas. « On implose de l’intérieur », a renchéri Patrick Liébus (U2P). Des formules-chocs pour signifier que les prérogatives dévolues aux organisations de salariés et d’employeurs se réduisent comme peau de chagrin dans la gouvernance de grands dispositifs de protection sociale, les pouvoirs publics exerçant une emprise de plus en plus grande. La fin d’une époque ?

    « Je ne vois pas l’Etat décider seul et signer ainsi l’acte de décès du #paritarisme, nuance Raymond Soubie, président de la société de conseils Alixio et spécialiste du social. Il a intérêt à s’appuyer sur le patronat et les syndicats, surtout dans la période mouvementée que le pays traverse. Mais on entre incontestablement dans une phase de régression des négociations interprofessionnelles. »

    #chômeurs #droit_au_chômage

  • Aides sociales : « Ne luttons pas davantage contre les pauvres que contre la pauvreté », Axelle Brodiez-Dolino, chercheuse au Centre Norbert-Elias (EHESS, universités d’Avignon et d’Aix-Marseille)
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/19/aides-sociales-ne-luttons-pas-davantage-contre-les-pauvres-que-contre-la-pau

    L’historienne Axelle Brodiez-Dolino revient aux racines du discours, récemment remis en avant par Edouard Philippe, sur la « contrepartie » aux aides sociales.

    Tribune. Alors que les « gilets jaunes » focalisent l’attention sur les couches populaires laborieuses, le premier ministre vient de faire diversion, dans le cadre du grand débat national, le vendredi 15 février, en exhumant l’idée de contreparties aux aides sociales. Flattant implicitement ceux qui n’y recourent pas, tout en répondant à son électorat. S’il reconnaît le sujet comme « explosif », c’est qu’il fait référence au concept du #workfare anglo-américain, rarement loué comme un modèle enviable ; et que, (re)lancé en 2011 par Laurent Wauquiez puis Nicolas Sarkozy, puis adopté dans le Haut-Rhin, il a suscité des levées de boucliers.

    Car il englobe deux préoccupations. L’une, économique : faire que chacun, surtout s’il reçoit de la collectivité plus qu’il ne semble apporter, contribue ostensiblement. L’autre, morale : imposer le maintien d’une saine occupation, contre l’oisiveté et les activités illicites suspectées chez les #allocataires.

    Loin d’être nouvelle, l’idée était déjà soulevée par le Comité de mendicité en 1790 : « Si celui qui existe a le droit de dire à la société “Faites-moi vivre”, la société a également le droit de lui répondre “Donne-moi ton travail”. » Elle était au cœur du « grand renfermement », dans les « hôpitaux généraux » (XVIIe-XVIIIe siècles) puis les « dépôts de mendicité » (XVIIIe-XIXe siècles), ainsi qu’en Angleterre et aux Etats-Unis dans les workhouses. Le pauvre « valide », en âge et en état de travailler, bénéficiait, si l’on ose dire, du gîte et du couvert au sein d’un système #disciplinaire carcéral fondé sur la #mise_au_travail. Ce système, que les pouvoirs publics se sont maintes fois évertués à réactiver, a de l’avis général (contemporains de l’époque comme historiens d’aujourd’hui), fait la preuve de sa totale inefficacité. Au point qu’il a fini par être, au début du XXe siècle, discrètement abandonné.

    Un principe récusé par les lois sociales

    Hors son échec historique, ce principe est discutable. Il ne relève pas du hasard que sa disparition coïncide avec l’apparition des lois sociales : en forgeant des #droits, la IIIe République a récusé la #contrepartie. Elle a, avec le solidarisme, renversé l’idée de dette, qui n’était plus celle de l’individu envers la société, mais de la société envers l’individu pour lui assurer sa subsistance.

    « Le “devoir de travailler” n’a de sens qu’avec son corolaire, le “droit d’obtenir un emploi” »

    Du début du XXe siècle à 1988, un droit a donc été un pur droit. Les préambules des Constitutions des IVe et Ve Républiques ont toutefois été prudents : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi (…). Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »

    C’est ce qui a légitimé, dans la loi de 1988 sur le #RMI, l’imposition d’une contrepartie : le contrat d’insertion. Lequel puisait à la pratique alors novatrice d’ATD Quart monde de rééquilibrer le rapport d’assistance en mettant sur un pied d’égalité les contractants. Le « contrat-projet » du rapport Wresinski s’est mué en contrat d’insertion du RMI.

    Mais c’est aussi là qu’il a été dévoyé, vidé des deux grandes caractéristiques du contrat : librement consenti, et équilibré entre les deux parties. On ajoutera que le « devoir de travailler » n’a de sens qu’avec son corolaire, le « droit d’obtenir un emploi » – qui n’existe toujours pas aujourd’hui.

    Déséquilibre entre offre et demande d’emploi

    Car le problème français n’est pas d’occuper les #chômeurs. Il est celui d’un déséquilibre abyssal entre offre et demande d’#emploi : au minimum, un ratio de 1 à 10 ; et qui serait plutôt situé entre 1 à 17 et 1 à 42 (selon le rapport 2017 du Secours catholique). On peut toujours « traverser la rue », selon la formule d’Emmanuel Macron, mais la demande reste très supérieure à l’offre. La France recourt en outre largement à l’emploi précaire et aux contrats très courts, paupérisants, désincitatifs et coûteux (transports, gardes d’enfants, etc.). S’y ajoutent la désadéquation entre formations et emplois disponibles, ainsi qu’entre lieux d’emplois et lieux de vie. Si, comme le dit le premier ministre, « on veut qu’il y ait un avantage objectif à retourner à l’activité », mieux vaudrait aborder le problème sous ces angles-là.
    Mettre en regard, de façon simpliste, chômage et emplois non pourvus, c’est faire fi de ces chantiers politiques et imputer le paradoxe à des chômeurs qui feraient la fine bouche devant les emplois proposés ; donc rendre les plus démunis responsables. Car fondamentalement, le recours aux aides sociales découle du découragement face aux échecs répétés à s’insérer de façon durable et décente sur le marché du travail.

    La ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn veut inscrire la « stratégie pauvreté » annoncée en septembre 2018 « dans la fidélité aux valeurs profondes qui ont construit notre république sociale ». Mais ne choisissons pas la filiation de la Ire République, qui luttait davantage contre les pauvres que contre la pauvreté, mais celle des républiques suivantes. Le slogan de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron est beau : « Faire plus pour ceux qui ont moins. » Ne le dévoyons pas, à peine engendré, en « demandant plus à ceux qui ont moins ».

    #guerre_aux_pauvres

  • Contrats courts : l’hôtellerie-restauration planche sur un nouveau type de CDI
    https://www.lesechos.fr/economie-france/social/0600640966948-contrats-courts-lhotellerie-restauration-planche-sur-un-nouve

    L’Umih, le principal syndicat de la branche cafés hôtels-restaurants, propose de créer un « contrat de mobilités » à durée indéterminée ultra-flexible, sans toucher aux droits d’#indemnisation_chômage des #salariés entre deux #missions. L’employeur aurait une surcotisation à payer.

    Les négociations dans les branches professionnelles sur les contrats courts n’ont pas eu le succès escompté par les partenaires sociaux. On cite volontiers le cas de l’#hôtellerie-restauration qui figure pourtant parmi les secteurs où le recours aux #CDD de très courte durée est massif. Selon les chiffres de la profession elle-même, les contrats de moins d’un mois sont passés de 1,5 million à 3,8 millions en dix ans.

    Pourtant, l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) qui regroupe 740.000 salariés n’est pas restée les bras croisés ces derniers mois. Et le syndicat professionnel a décidé, au vu de la tournure prise par la négociation sur la réforme de l’assurance-chômage, de dévoiler plus tôt qu’il ne l’avait initialement prévu sa proposition, qui vise à sécuriser les parcours professionnels des salariés en contrats de courte durée.

    Flexibilité de la demande

    L’Umih, comme la plupart des branches professionnelles, refuse le #bonus-malus que l’exécutif menace de mettre en oeuvre si la négociation sur l’assurance-chômage échoue. Pour le syndicat, le recours aux contrats courts est intrinsèquement lié aux besoins de flexibilité du secteur, eux-mêmes découlant des exigences des clients de plus en plus habitués à commander ou réserver au dernier moment.

    Pour l’Umih, « face à un marché du travail contraint par les comportements de consommation, on a mis en place un système totalement inadapté, sans garde-fou ». Les effets pervers et les surcoûts entraînés par la « permittence » ne sont donc pas éludés par le syndicat. Et c’est justement pour les supprimer qu’il propose de créer un nouveau contrat de travail.

    Un contrat « ombrelle »

    Baptisé « #contrat_de_mobilités », il s’agirait d’un contrat « ombrelle » à durée indéterminée, porté par une #plate-forme agréée par la branche et qui regrouperait les différentes missions d’un salarié pour différents établissements. Une durée maximum de recours serait imposée pour un même employeur.

    Le coût social de cette flexibilité serait assumé par l’employeur via un double abondement : une cotisation à l’assurance-chômage au taux classique de 4 % du salaire brut, à laquelle s’ajouterait une contribution « sécurisation » sur un compte en euros dont le travailleur pourrait disposer librement lorsqu’il est en inter-missions. Il faudrait encore ajouter des frais de fonctionnement pour la plate-forme en question et un abondement du compte personnel de formation qui représenterait un pourcentage de la rémunération brute du salarié. Ce pourcentage, de même que celui de la contribution « sécurisation », n’a pas été encore fixé (...).

    Sécurité juridique

    Pour le salarié, l’indemnisation entre deux missions serait au même niveau que celle qu’il perçoit aujourd’hui entre deux CDD. La grande différence, c’est que Pôle emploi ne verserait qu’une partie de l’indemnisation due au salarié. Le complément étant assuré par la contribution « sécurisation » de l’employeur.

    L’intérêt du dispositif, qui est une sorte de croisement entre le #groupement_d'employeur et le #CDI_intérimaire, est de transférer une partie du coût de la flexibilité de l’Unedic vers l’employeur (à moindres frais qu’avec l’#intérim). En d’autres termes, l’Umih accepte de renchérir le coût du travail avec une #surcotisation, si cette dernière permet d’assurer la #flexibilité de la main-d’oeuvre, la simplicité administrative et la sécurité juridique des contrats en question.

    La mise en place de ce nouveau contrat suppose une négociation de branche qui démarre à peine. Le Medef pourrait aussi inclure cette proposition dans la liste des solutions qu’il s’est engagé à produire lors de la prochaine séance de négociation sur l’assurance-chômage le 14 février. Avec une difficulté : la mise en place d’un tel contrat déborde largement le cadre des discussions en cours sur la seule assurance-chômage.

    #travail #emploi#droit_au_chômage #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit

  • Appel des gilets jaunes intermittent.e.s chômeur.euse.s précaires
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=9307

    Nous publions cet appel issu de l’assemblée générale du 4 février à la Bourse du travail de Paris. À chacun de le faire circuler, de le faire sien et d’y répondre.
    Depuis deux semaines déjà, rdv est donné le samedi matin au départ du cortège des #Gilets_jaunes de Montreuil. Il en sera de même ce samedi à 10h, soit à la Boissière, carrefour Aristide Briand / bd La Boissière, soit à Croix de chavaux, avant un départ commun vers Paris.

    Appel des gilets jaunes intermittent·e·s chômeur·euse·s précaires

    Nous sommes artistes, technicien·ne·s, personnels administratifs, nous travaillons dans les mondes du théâtre, du cinéma, de la musique, de la danse, du cirque, de l’audiovisuel, des arts de rue. Nous avons décidé de rejoindre le mouvement des gilets jaunes.

    Comme beaucoup d’autres personnes, nous sommes des travailleur·euse·s précaires qui vivons de contrats courts, nous dépendons de plusieurs employeur·euse·s, nous travaillons souvent les soirs et les week-ends, sans possibilité de nous projeter dans le temps. La discontinuité et l’instabilité font souvent partie de nos métiers. Ce que nous refusons, c’est la précarité organisée.
    À l’heure où l’intermittence de l’emploi est la réalité d’un nombre croissant de travailleur·euse·s, une indemnisation chômage inconditionnelle doit être mise en place.

    #chômeurs #intermittents #précaires #droit_sociaux #droit_au_chômage

  • Assistant·es maternelles, aides à domiciles, contre la réforme de l’assurance chômage, manifestation le 2 février - Rebellyon.info
    https://rebellyon.info/Assistant-es-maternelles-aides-a-20122
    https://rebellyon.info/home/chroot_ml/ml-lyon/ml-lyon/public_html/IMG/arton20122.jpg?1548540285

    Les syndicats FO et CGT appellent Assistantes Maternelles et salariés du particulier employeur à se mobiliser massivement le SAMEDI 2 FÉVRIER 2019 entre 10 heures et midi dans toutes la France et à Lyon, rdv place Bellecour

    Le syndicat FO des emplois de la famille et la CGT services à la personne appellent à une journée nationale d’action contre la réforme de l’assurance chômage.

    Dans la lettre de cadrage adressée aux partenaires sociaux, le Gouvernement leur a demandé de réaliser plus de 3 milliards d’économie sur 3 ans.

    Après le renforcement des sanctions contre les demandeurs d’emploi, c’est aux plus précaires que le MEDEF entend demander des efforts supplémentaires.

    Assistantes Maternelles et Salarié(e)s du Particulier Employeur seront lourdement pénalisés par cette réforme si celle-ci aboutit.

    Dans ces métiers où l’on travaille la plupart du temps pour plusieurs employeurs et où les contrats se succèdent au fil des différents événements tels que la scolarisation des enfants, le déménagement des parents, l’hospi-talisation des personnes âgées, le complément d’activité versé par pôle emploi est un élément essentiel pour disposer d’un revenu à peine décent.

    Les scénarios proposés par le MEDEF visant à diminuer le complément d’activé sont totalement inadmissibles pour des salariés qui permettent à des millions de Français de faire garder leurs enfants ou de conserver leur autonomie au domicile.

    Pour les seules Assistantes Maternelles, ce sont plus de 2 millions de parents employeurs qui grâce à elles, peuvent aller travailler chaque jour.

    Dans un contexte social très dégradé, FO et CGT, aux côtés de ces professionnel/les préviennent d’ores et déjà que d’autres actions, y compris une ou des journées nationales de grève pourraient être organisées.
    Les 2 organisations syndicales appellent Assistantes Maternelles et salariés du particulier employeur à se mobiliser massivement le SAMEDI 2 FÉVRIER 2019 entre 10 heures et midi sur tous les points de manife

    Derrière les négociations sur le #chômage, la crainte des #assistantes_maternelles
    HTTPS://WWW.MEDIAPART.FR/JOURNAL/ECONOMIE/010219/DERRIERE-LES-NEGOCIATIONS-SUR-LE-CHOMAGE-LA-CRAINTE-DES-ASSISTANTES-MA

    Partout en France, des assistantes maternelles manifestent ce samedi sous le nom de « Gilets roses ». Elles dénoncent la future réforme de l’assurance-chômage – objet d’un bras de fer entre le patronat, les syndicats et le gouvernement –, qui risque de leur être très défavorable.

    Un petit coup de pression chacun, puis tout revient à la normale. Jeudi 31 janvier, le Medef, suivi par les deux autres organisations patronales, la CPME et l’U2P, a annoncé qu’il acceptait de se rasseoir à la table des négociations pour discuter des nouvelles règles de l’assurance-chômage. Le lundi précédent, les représentants du patronat avaient annoncé qu’ils « suspendaient » leur participation, à la suite des déclarations du président de la République, jeudi 24 janvier, lors au grand débat à Bourg-de-Péage (Drôme). Emmanuel Macron y avait réaffirmé son souhait de voir instaurer un « bonus-malus » sur les cotisations patronales, en vue de limiter le recours aux contrats courts.

    Pour apaiser les choses, c’est le premier ministre qui s’y est collé mercredi 30 janvier à l’Assemblée nationale, appelant le patronat à revenir négocier, en prenant bien soin de ne pas prononcer le terme honni de « bonus-malus ». Le patronat a donc à nouveau consenti à se prêter au jeu. La séance prévue jeudi 31 a été annulée, mais le patronat et les syndicats se retrouveront le 14 février pour discuter une fois de plus, en espérant boucler leur bras de fer pour la fin du mois.

    Bien qu’elle ait largement occupé pendant une semaine les observateurs habituels des dossiers sociaux, cette petite séquence théâtrale, chacun bien dans son rôle, n’a sans doute pas fait évoluer la situation d’un pouce. Démarrées fin septembre à la demande d’Emmanuel Macron, les discussions du patronat avec les syndicats sont toujours très étroitement encadrées, puisque le gouvernement leur demande d’aboutir à des économies de 1 à 1,3 milliard d’euros par an. Le risque est très grand que cette exigence aboutisse à une réduction des allocations accordées aux demandeurs d’emploi (pour rappel, en 2018, moins de la moitié des 5,6 millions d’inscrits à Pôle emploi ont touché de telles allocations).

    Quant aux positions du président, des syndicats et du patronat, elles restent irréconciliables, laissant ouverte la possibilité pour le gouvernement de reprendre les choses en main faute d’accord, et d’imposer ses vues. C’est pour éviter cette issue que les interlocuteurs sociaux ne veulent pas vraiment quitter la table des négociations. Ils perdraient définitivement le droit de décider quelles conditions sont réservées aux chômeurs.

    Rien ne dit pour l’heure comment les positions des uns et des autres pourraient finir par se rapprocher. Le patronat reste farouchement opposé au « bonus-malus », auquel est officiellement très attaché Emmanuel Macron (et l’un de ses principaux conseillers en la matière, l’économiste Marc Ferracci) depuis sa campagne présidentielle. Et les syndicats présentent encore ce dispositif comme une revendication incontournable, même s’ils proposent en fait chacun des solutions alternatives : bonus seulement pour la CFDT, malus uniquement pour la CGT, autre mode de calcul pour FO.

    Depuis l’élection d’Emmanuel Macron, le « bonus-malus » est sans doute le seul point de crispation entre l’exécutif et le patronat. Cela fait plus de 18 mois que le premier assure qu’il va mettre en place le dispositif, malgré l’opposition du second. Il faudra attendre la fin de la pièce qui se joue actuellement pour savoir si, et sous quelle forme, cette promesse sera tenue.

    Mais quelle que soit l’issue de ce point de négociation, on voit mal comment les demandeurs d’emploi, et les plus précaires d’entre eux en particulier, pourront éviter de voir réduit le montant de leurs allocations. Comme nous l’avons détaillé ici, le gouvernement a en effet listé les sujets qu’il souhaite voir remis en cause, et presque tous concernent le calcul ou la répartition des droits des chômeurs. Les quelque 800 000 personnes en situation de « cumul » entre courtes périodes de travail et chômage sont particulièrement visées. Si les syndicats souhaitent aboutir à un accord, il faudra bien qu’ils en acceptent une partie. S’ils refusent, c’est le gouvernement qui imposera les réformes qu’il souhaite.

    Une catégorie de travailleurs – de travailleuses, dans leur immense majorité – a bien compris le danger. Et se mobilise, loin des effets d’estrade des acteurs institutionnels chargés de trancher sur son avenir. Ce samedi 2 février, dans 29 villes de France, les assistantes maternelles se rassemblent sous le label « Gilets roses » pour dire leurs craintes. Elles sont environ 330 000 dans l’Hexagone, et pourraient être parmi les principales victimes de la réforme à venir.

    Les assistantes maternelles sont en effet directement concernées par les révisions annoncées de la règle de « l’activité conservée ». Tout comme les intérimaires ou les journalistes pigistes, ces travailleuses cumulent très souvent plusieurs employeurs. Les règles actuelles de l’assurance-chômage leur permettent d’être bien indemniséeslorsqu’elles perdent un employeur, mais en conservent deux ou trois autres. Cette situation « mérite d’être corrigée afin d’inciter davantage les personnes à privilégier les revenus d’activité », indique la lettre de cadrage du gouvernement envoyée aux partenaires sociaux en septembre.

    Autrement dit, « les assistantes maternelles pourraient, selon nos calculs, perdre de 30 à 300 euros par mois lorsqu’elles perdent un employeur », alerte Laurence Joly, assistante maternelle à Langon, en Gironde. Elle est l’une des cinq administratrices du groupe Facebook des Gilets roses, toutes basées dans ce département. « Aujourd’hui, lorsque nous perdons un employeur parce qu’une famille déménage ou qu’un enfant qu’on nous a confié entre à l’école, Pôle emploi nous indemnise à hauteur de 57 % à 75 % du montant du contrat perdu, jusqu’à ce que nous en retrouvions un nouveau, détaille Laurence Joly. Avec les nouvelles règles, ces modalités seront révisées, soit dans la durée, soit dans le montant. Cela va nous précariser encore plus. »

    La plupart des « cumulards » emploi-chômage ne cherchent pas à optimisent leur situation

    Les collègues de Laurence Joly ont vite flairé l’entourloupe. Alors que le groupe Facebook des cinq assistantes maternelles visait un public départemental, il a vite agrégé plus de 9 000 professionnelles partout en France. « Nous avons écrit des courriers aux maires, aux députés et au gouvernement pour sensibiliser sur notre cas, puis nous avons écrit à tous les syndicats pour qu’ils nous aident à organiser des manifestations », explique Laurence Joly. Véronique Delaitre, secrétaire générale FO pour les services à la personne, et Stéphane Fustec, son coordinateur national CGT du secteur, ont répondu présent et accompagnent les assistantes maternelles dans leur lutte.

    « Nous ne comprenons pas pourquoi nous sommes ciblées, souligne Laurence Joly. Ce n’est pas nous qui décidons d’arrêter un de nos contrats, ce sont nos employeurs. De même, nous ne pouvons pas les démarcher, ce sont eux qui nous sollicitent, nous ne maîtrisons pas le délai qui peut exister entre deux contrats. Et ce n’est pas comme si nous pouvions faire du porte-à-porte en distribuant des CV pour trouver des enfants en âge d’être gardés ! »

    Ce cri du cœur souligne tout le paradoxe de la position gouvernementale sur l’activité réduite, comme sur les contrats courts. Son diagnostic est le bon, mais il risque de faire porter la responsabilité de façon démesurée sur ceux qui pâtissent le plus de la situation : les demandeurs d’emploi eux-mêmes.

    Comme le rappelle régulièrement la ministre du travail Muriel Pénicaud, plus de 80 % des embauches se font aujourd’hui en CDD ou en intérim. Entre 2000 et 2016, le nombre d’embauches en CDD a doublé. Et plus de quatre sur cinq de ces embauches en CDD l’ont été pour une durée inférieure à un mois… Elle a aussi raison de souligner que de ce fait, de nombreux Français se retrouvent dans une situation où ils peuvent cumuler dans l’année des allocations chômage et des salaires.

    Mais la ministre va plus loin, en laissant tout aussi régulièrement entendre que cette situation est recherchée par les salariés. « Une personne qui travaille à mi-temps au Smic perçoit un salaire de 740 euros par mois. Mais si elle alterne 15 jours de chômage et 15 jours de travail dans un mois, elle percevra un revenu de 960 euros. Ce n’est pas normal. On ne doit pas gagner plus en étant au chômage qu’en travaillant », a-t-elle par exemple récemment déclaré au magazine Challenges. Une déclaration qui fait écho à celle d’Emmanuel Macron, le 15 janvier dans l’Eure, estimant que parmi les chômeurs, « il y en a qui font bien et il y en a qui déconnent ».

    Le problème, c’est qu’aucune étude, quantitative ou qualitative, ne donne raison à ces phrases à l’emporte-pièce. Aucune ne dit que les demandeurs d’emploi cherchent majoritairement à « optimiser » leur situation. Au contraire, la dernière étude de l’Unédic sur le sujet, datant de fin octobre, conclut que les allocataires de l’assurance-chômage qui travaillent (c’est-à-dire ceux qui sont en situation de #cumul_allocations-salaires) « ont une connaissance limitée des règles d’indemnisation ».

    Bien sûr, certains salariés précaires sont conscients de l’avantage de rémunération auquel ils ont droit, et sont satisfaits de leur situation. Mais pour leur immense majorité, leur motivation n’est pas de se jouer des règles pour toucher le maximum d’argent possible, mais de multiplier les contrats, mêmes courts et précaires, pour « gagner de l’argent », « augmenter ses chances d’être embauché » ou répondre à « l’envie de se sentir utile et actif ». Et un allocataire « cumulard » sur trois ne sait même pas que travailler lui permet de prolonger ses droits au chômage.

    En revanche, comme le souligne le dossier de référenceétabli par l’Unédic à l’occasion des négociations en cours, les employeurs savent bien ce qu’ils font en privilégiant les contrats courts. L’Unédic souligne ainsi que « les baisses de charges sur les bas salaires ont certainement favorisé l’embauche en contrats courts », puisque ces derniers concernent la plupart du temps des emplois à bas salaires, justement la cible de toutes les baisses de cotisations depuis trente ans. En 2019, ces exonérations équivalaient à presque 55 milliards d’euros par an, contre 11 milliards en 2000, et 21 milliards en 2010…

    Par ailleurs, une enquête du Crédoc réalisée en 2018 pour le compte de l’Unédic souligne que les employeurs ayant recours aux contrats courts le font pour répondre à « des besoins saisonniers » d’activité, mais aussi et surtout pour privilégier une « minimisation des coûts salariaux ». Autant de raisons pour s’attaquer sérieusement aux contrats courts. Mais sans doute pas aux salariés #précaires qui les subissent.

    #chômeuses_en_activité_à_temps_réduit #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit

  • Au-delà des clichés : « Non, il ne suffit pas de traverser la rue pour décrocher un contrat »
    https://www.bastamag.net/Au-dela-des-cliches-Non-il-ne-suffit-pas-de-traverser-la-rue-pour-decroche

    A quoi ressemble la vie, quand on a moins de trente ans et qu’on ne trouve pas de travail ? Neuf récits publiés par les Éditions de l’Atelier livrent quelques réponses, et renversent ce cliché en vogue : « Quand on veut, on peut ! »... « Non, il ne suffit pas de traverser la rue, de se secouer un peu pour décrocher un contrat. Non, il ne suffit pas de quelques judicieuses réformes sociales pour que chacun ait accès à un emploi », répond Patrice Bride, dont l’ouvrage La vie devant nous. Récits de jeunes (...)

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