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  • A Toulouse, sur fond de gilets jaunes, resurgit le spectre d’une affaire Tarnac - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/170219/toulouse-sur-fond-de-gilets-jaunes-resurgit-le-spectre-d-une-affaire-tarna

    Début février, une mise en examen pour association de malfaiteurs et deux perquisitions mobilisant plusieurs dizaines de policiers ont visé des militants de la sphère autonome. Un coup de pression, malgré un dossier vide, sur des éléments classés « anarchistes » et supposés actifs au sein des « gilets jaunes ».

    • Samedi 2 février, R. garde la fille d’une amie chez elle, dans un appartement situé dans le
      quartier de la préfecture. C’est le milieu de la journée, la manifestation de l’acte XII va bientôt démarrer.

      Voyant des policiers contrôler un groupe de personnes dans la rue, il descend fumer une cigarette et observer ce qui se passe. Interpellé pour une vérification d’identité, R. refuse de la décliner et de donner son ADN. Il en a le droit mais il s’agit d’un délit. Il est placé en garde à vue.

      Le 4 février, R. est présenté à la juge d’instruction Élodie Billot, l’un des deux magistrats qui, en janvier 2018, avaient rendu une ordonnance de non-lieu dans le dossier de la mort de Rémi Fraisse à Sivens. Il est mis en examen pour association de malfaiteurs et placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de Seysses.

      Mardi 19 février, la cour d’appel du TGI de Toulouse examinera son ordonnance de placement en détention provisoire. « On veut qu’il bénéficie au moins de mesures de contrôle judiciaire » lui permettant de sortir de prison, annonce son avocate Claire Dujardin.

      Qu’y a t-il dans le dossier ? Le procureur du TGI de Toulouse, Dominique Alzeari, nous oppose le secret de l’instruction en cours. Tout en confirmant l’interpellation, puis la mise en examen de R. pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes de destruction et des dégradations graves » et pour « plusieurs délits connexes, dont le refus de se soumettre aux relevés d’empreintes, le refus de se soumettre aux examens génétiques ou encore l’usurpation d’identité d’un tiers ».

      Mais selon les informations que nous avons pu recueillir auprès de diverses sources proches de l’enquête, rien ne justifierait ce placement en détention. De nombreux « PV de contextes » relatant les manifestations depuis novembre figurent dans le dossier, mais aucune infraction, même mineure, impliquant R. n’y apparaît.

      « Cette association de malfaiteurs n’est caractérisée par aucun fait matériel, déplore son avocate. Pour une instruction pénale, il faut des indices sérieux et concordants ; là, il n’y a même pas le début d’un commencement. On sait que l’association de malfaiteurs est une infraction fourre-tout mais en général, il y a quand même quelques faits caractérisés permettant de faire le raccord. Là, non. » En lieu et place figurent surtout des notes blanches et des « éléments de contexte », dont certains évoquent, de fait, un mauvais remake de « l’affaire Tarnac ».

      Ainsi cette évocation d’un « groupe de 7 personnes, porteuses de sacs volumineux et présentant les caractéristiques des membres de l’ultragauche… »

      Des sacs qui s’avèreront dissimuler des duvets et des « denrées alimentaires sans intérêt »,
      mais peu importe : « Au vu des éléments de
      contexte, des renseignements recueillis et du profil de certains interpellés depuis les 12 samedis de manifestations toulousaines, il est permis de penser que les activistes d’ultragauche et des mouvements
      anarchistes constituent le noyau des casseurs “black bloc” et semblent constituer les leaders du mouvement insurrectionnel », est-il noté dans un procès-verbal.

      « Ce sont des fantasmes complets à coups de “il est permis de penser que…”, s’emporte Claire Dujardin. C’est du prédictif pur ! On suppose qu’il a peut- être, et probablement avec d’autres, commis des infractions… » Au cœur de ces supputations, un « jeu de clefs et de passes » trouvé sur le détenu qui serait, selon la police, « caractéristique du fonctionnement
      des activistes d’ultragauche pilotant le mouvement des gilets jaunes et leurs manifestations, en tout cas sur la
      ville de Toulouse ».

      Consultée par Mediapart, une avocate pénaliste ayant 20 ans d’expérience dans ce type de dossier s’étrangle :
      « C’est une honte absolue, je n’ai jamais vu un
      truc pareil ! Ce n’est pas un dossier de procédure pénale, ce sont des notes blanches déguisées en procédure pénale ! Je ne comprends pas comment un juge d’instruction peut mettre en examen sur de tels éléments. Mais on est où, là ? »

      Il semble que l’appartenance à la sphère autonome de R., de nationalité suisse et n’ayant jamais été condamné, et de G., la femme dont il gardait la fille le jour de son arrestation, ait suffit à éveiller les soupçons
      des enquêteurs. « Ça les excite… » soupire G. Au point que quatre jours après l’interpellation de R., mercredi 6 février, deux perquisitions sont simultanément menées dans leurs domiciles respectifs.

      Il est 20 heures lorsque la fille de G. et sa baby-sitter rentrent de la piscine. L’accès à l’immeuble est bouclé et les policiers ont commencé à s’attaquer aux serrures de la porte de l’appartement. « La personne qui accompagnait ma fille a tout d’abord
      souhaité repartir avec elle, mais ils ont menacé de l’embarquer ; ma fille a donné les clefs. » S’ensuit une perquisition qui va durer une heure et demie, en l’absence de G. « Ils ont saisi tout le matériel informatique, raconte cette dernière. Y compris celui de la baby-sitter, des brochures sur les gilets jaunes, un carnet de notes… Des policières ont demandé à ma
      fille si elle voulait jouer “au jeu des questions”… », provoquant l’incrédulité de l’adolescente de 13 ans, à qui ils ont aussi demandé si sa mère « écrivait ».

      Durant cette perquisition, bien obligés de constater qu’il n’y avait pas grand-chose, les policiers ont fait savoir qu’ils décommandaient les chiens ».

      Ce qui n’a pas été le cas à l’autre bout de la ville,sensiblement à la même heure. Dans la maison où R. vit en colocation avec des amis, ce même 6 février, vers 20 h 30, des policiers s’annoncent et pénètrent dans l’appartement en brandissant un bouclier. « On était en train de préparer à manger, ils sont entrés, non cagoulés, sans trop crier, sur un air du Velvet
      Underground », raconte L., l’une des trois colocataires présentes sur place à ce moment-là.

      Trois chiens sont déployés (a priori pour
      les stupéfiants, les explosifs et l’argent) dans
      l’appartement, dont les habitants sont cantonnés dans la cuisine sous la surveillance de deux policiers et en présence de R., menotté, leur pote détenu depuis deux jours et avec lequel ils n’ont pas le droit de communiquer.

      « Les autres policiers ont investi toutes les
      chambresau rez-de-chaussée et à l’étage, raconte L. D’autres étaient dans le jardin, sûrement pour sécuriser les accès. Il devait y avoir une quarantaine de policiers. Ils ne nous ont d’abord rien dit de ce qui se passait, aucun document ne nous a été présenté.

      À la fin, celui qui semblait être le chef, en civil avec un brassard de police, a fini par nous dire que c’était une perquisition pour une affaire qui concernait notre ami et une association de malfaiteurs. » Les policiers photographient, filment (« Ils nous ont filmés dans la cuisine pendant une heure et demie », assure L.) et finissent par emporter tout le matériel informatique et téléphonique présent dans la maison. « Et aussi des bouquins et des documents administratifs et personnels », ajoute D., un colocataire qui, absent
      ce jour-là, a pu sauver son téléphone mais n’a pas retrouvé son ordinateur en rentrant.

      À 23 h 30, les policiers s’en vont, puis reviennent quelques minutes plus tard et font un dernier tour au garage, avant de quitter définitivement les lieux.

      Deux perquisitions simultanées, des dizaines d’agents déployés, des attitudes intimidantes, des saisies massives, pour quel résultat ? « Les éléments résultant des perquisitions n’ont pas à ce jour donné lieu à mise en examen supplétive ou à des mises en examen d’autres personnes. L’instruction se poursuit », nous
      a répondu par mail, vendredi soir, 10 jours après les faits, le procureur Dominique Alzeari.

      Les paramètres très brumeux de cette séquence toulousaine résonnent avec les récentes consignes du parquet à Paris. Révélées par LeCanard enchaîné le 30 janvier dernier, elles invitent les magistrats à
      inscrire les personnes interpellées dans le cadre du mouvement des gilets jaunes au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ), « même lorsque les fait ne sont pas constitués ».

      À l’échelle locale, cette focalisation sur une
      « ultragauche » qui serait à la manœuvre parmi les gilets jaunes semble faire écho aux préoccupations du maire de la ville qui s’est imposée comme l’un des principaux foyers du mouvement. Jean-Luc Moudenc, après s’être glissé en décembre dans le cortège « en tenue de motard », avait assuré avoir vu
      de ses yeux l’alliance des militants d’extrême droite et d’extrême gauche : « J’ai été frappé par le mano a mano entre extrémistes de gauche et de droite, unis pour lancer des projectiles contre les forces de l’ordre », expliquait-il à Libération début janvier.
      Une intuition assez nettement contredite samedi 9 février, lors de l’acte XIII, où une trentaine de militants d’extrême droite (notamment de Génération identitaire) ont attaqué le cortège, et précisément des
      militants de gauche. Mais c’est bien sur la sphère dite « autonome » que se sont abattues les foudres policières et judiciaires ces derniers jours, pas sur la « fachosphère » toulousaine.

      Mercredi 13 février, G. a adressé à la juge d’instruction un courrier demandant la restitution de ses affaires saisies et contenant une facture de la dégradation de la porte. Concernant R., des requêtes pour nullité de
      procédure sur son interpellation et sa mise en examen ont été déposées vendredi 15 février par son avocate, qui résume : « Je ne sais pas ce que l’on reproche à mon client. »

      La justice a deux mois pour se prononcer.

      Boite noire
      Nous avons rencontré à trois reprises plusieurs des personnes concernées par ces perquisitions et échangé ensuite par téléphone. Elles n’ont pas souhaité que leurs noms apparaissent dans l’article.

    • Wanted Serial Casseurs

      Au-delà des arrestations en flagrant délit, et face aux difficultés pour arrêter les vrais adeptes de la guérilla urbaine, deux cellules d’enquêtes spéciales ont été créés mi-décembre. Depuis la mi-janvier, elles ont déjà permis plus de 40 interpellations.

      Ce qui est inédit en Occitanie et pour la Nouvelle-Aquitaine, c’est le fait de mettre ensemble, dans un même bureau, des agents du renseignement territorial, des brigades anti-criminalité et des enquêteurs de la Sûreté départementale, rassemblés pour analyser des centaines d’heures de vidéos. Il faut y ajouter des profils en cybercriminalité qui ont pu infiltrer, selon nos informations, certains groupes d’activistes en gilet jaune. Au début, certains enquêteurs n’y croyaient pas vraiment, c’était un peu considéré comme le « bureau des punis » affirme l’un d’eux. Mais maintenant, selon l’un de leurs supérieurs, certains ne veulent plus en partir au vu des résultats qu’ils obtiennent.

      Les agents partent de séquences vidéo où l’on aperçoit des manifestants masqués au moment où ils attaquent. L’objectif est alors d’essayer de remonter en amont de leur arrivée sur place, ou de les repérer plus tard, même s’ils ont changé de vêtements. C’est exactement comme cela que plusieurs dizaines de manifestants qui s’étaient affrontés aux gendarmes et aux policiers à Paris début décembre se sont fait rattraper par la patrouille.

      Quatre ou cinq suspects sont désormais interpellés chaque semaine à Toulouse et Bordeaux. Et selon nos informations, à Bordeaux encore une vingtaine de personnes a été repérés, mais ils ne sont toujours pas identifiés formellement. « On en a nous aussi plusieurs dizaines » affirme un enquêteur haut-garonnais, « on distribue chaque samedi leurs portraits au cas où, car ce sont ceux qui ont cherché à fracasser des collègue et on ne les lâchera pas ».

      source : franceinter.fr
      #police

  • Arié Alimi « Pourquoi utilise-t-on du matériel de guerre contre des civils ? » | L’Humanité

    https://www.humanite.fr/pourquoi-utilise-t-du-materiel-de-guerre-contre-des-civils-667883

    Merci @isskein pou le signalement

    Arié Alimi « Pourquoi utilise-t-on du matériel de guerre contre des civils ? »

    "Je suis sidéré par le mépris dont le gouvernement fait preuve à l’égard des victimes. Ce manque de considération est affligeant. Il est révélateur des mécanismes autoritaires mis en lumière dernièrement par le vote de la loi anti-casseurs. Cette dérive dangereuse a commencé à Sivens, où Manuel Valls a créé un précédent, puis pendant les mobilisations contre la loi El Khomri et avec une intensité sans aucune mesure lors des mobilisations des gilets jaunes. Nous sommes face à un phénomène systémique, avec une volonté délibérée du gouvernement de dissuader les gens d’aller manifester, et d’exercer leurs droits de citoyens."

  • (3) Grenade GLI-F4 : révélations sur une arme qui mutile - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2019/01/25/grenade-gli-f4-revelations-sur-une-arme-qui-mutile_1705396

    Mains arrachées, plaies de plusieurs centimètres… La GLI-F4, essentiellement composée de TNT, a fait beaucoup de dégâts lors des manifestations des gilets jaunes. Un rapport de la gendarmerie auquel « Libé » a eu accès révèle que sa dangerosité a été sous-estimée par les forces de l’ordre, ce qui ne les empêche pas de l’utiliser.

    Grenade GLI-F4 : révélations sur une arme qui mutile

    C’est la première fois, en deux mois, que Gabriel Pontonnier a mis des mots sur l’instant où sa main a été en partie arrachée par une grenade tirée par les forces de l’ordre. Jeudi, cet apprenti chaudronnier de 21 ans a été auditionné par la police des polices sur les circonstances de sa grave blessure. L’unique parole pour ce jeune homme dont la vie est suspendue depuis le 24 novembre. Ce jour-là, il participait avec sa mère, son frère et sa sœur, à la première journée parisienne de mobilisation des gilets jaunes. Vers 18 heures, accompagné de son frère Florent, 30 ans, il observe la progression des policiers. Ce dernier raconte la scène  : « On s’est mis à distance pour éviter qu’ils nous prennent pour des casseurs ou des personnes mal intentionnées, juste derrière un petit camion qui vendait de la nourriture, nous étions en sécurité. Je me suis mis à filmer. » La séquence démarre, quelques instants avant l’explosion…

    La ligne des forces de sécurité, visible en arrière-plan, est distante d’environ une trentaine de mètres. Proche des deux frères, un vieux monsieur avec un bonnet rebrousse doucement chemin, un manifestant a les mains en l’air, un autre est au téléphone, tandis que deux personnes marchent tranquillement. Soudain, un homme crie plusieurs fois « attention ». Un blast lumineux survient, ainsi qu’une effroyable détonation. « Je me suis retourné, un nuage de fumée nous recouvrait, poursuit Florent Pontonnier. Mon frère a traversé ce nuage en ma direction, le bras en avant, en criant « putain ma main bordel, j’ai plus de main, j’ai plus de main ». C’est l’image qui restera à vie dans mes pensées et que je vois à chaque fois que je ferme les yeux. Une main éclatée avec les os à l’air libre, un doigt qui pendait sur le côté et plus rien sur le reste. » ­Gabriel est hospitalisé en urgence, il subit douze opérations pour tenter de sauver ce qu’il reste de sa main et retirer les nombreux éclats qui l’ont blessé aux jambes et à la tête. L’amputation totale est toujours envisagée.

    Le même jour, Antonio B., 40 ans, est aussi gravement touché au pied et Maxime W., 30 ans, perd l’audition. Le week-end suivant, deux mains sont arrachées. Celle de Frédéric Roy, 35 ans, à Bordeaux, et celle de Ayhan P., 52 ans, à Tours, qui est aussi gravement blessé à la jambe. Le 8 décembre, c’est la main d’Antoine Boudinet, 26 ans, qui est mutilée. Plusieurs autres personnes ont été grièvement blessées, criblées de plaies de plusieurs centimètres.
    « Déstabiliser »

    L’arme mise en cause dans toutes ces blessures de guerre est la grenade lacrymogène instantanée, dite GLI-F4. Son nom est trompeur car cette arme est surtout composée de tolite, un explosif mieux connu sous le nom de TNT. Elle est utilisée à la fois par la gendarmerie et la police. Cette grenade avait déjà arraché la main de Maxime Peugeot, un manifestant de 21 ans, à Notre-Dame-des-Landes. Le 22 mai 2018, il ramasse la munition, sa main est entièrement arrachée et son corps est touché par plusieurs impacts. Libération a eu accès au rapport du laboratoire scientifique de la gendarmerie réalisé sur cette blessure (et versé à l’enquête), avant le mouvement des gilets jaunes. Il conclut que la dangerosité de la grenade a été sous-estimée par les autorités françaises et le fabricant. Le ministère de l’Intérieur fait pourtant le choix d’en tirer « jusqu’à épuisement des stocks », sans préciser le nombre de grenades encore disponibles. Daté du 11 juillet 2018, ce rapport est effectué par l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Les deux experts, spécialisés en explosifs, effectuent une batterie de tests sur la GLI-F4, pour vérifier qu’elle est bien responsable de la mutilation de Maxime Peugeot.

    « Selon le fabricant, notent les deux experts en explosifs, elle est destinée au rétablissement de l’ordre, par son triple effet lacrymogène, assourdissant et de souffle. Elle permet de déstabiliser les manifestants dans des situations particulièrement difficiles (violences, émeutes). » La dangerosité de la grenade « au contact » est rappelée par les gendarmes. Leur rapport précise que l’« onde de choc générée fragmente les tissus, les os et provoque des blessures très importantes dont la létalité dépend de la zone impactée ». L’IRCGN précise enfin que « l’explosion d’une grenade tenue en main est susceptible de provoquer son arrachement ». En effet, l’arme est composée d’une capsule de gaz lacrymogène, mais surtout de 26 grammes de TNT et de 4 grammes d’hexocire, un autre explosif utilisé pour l’amorçage.

    Pour réaliser son expertise, l’IRCGN déclenche successivement dix grenades et note à chaque fois les effets produits. Test après test, le laboratoire consigne que la puissance de l’arme est bien plus importante que ce qu’annoncent les données théoriques. « La grenade est normalement conçue pour ne pas générer d’éclats, indique-t-il. Cependant, des projections d’éclats transfixiants et de débris divers partiellement calcinés ont été constatées lors de tous les essais. » Ce sont justement ces « éclats transfixiants », autrement dit qui traversent les chairs, qui ont gravement blessé de nombreux manifestants sur tout le corps ces dernières semaines. Le 24 novembre, Florent Pontonnier, le frère de Gabriel dont la main est mutilée, est également touché par ces éclats transfixiants et a dû lui aussi subir une opération. De même pour leur cousin, Marvin, touché par la même grenade et qui doit être opéré prochainement.

    Alexandre S., 27 ans, a été blessé aux cuisses le 1er décembre, place de l’Etoile, à Paris. Vers 15 h 30, il décrit une situation qui « stagnait » avec « les forces de l’ordre d’un côté, les gilets jaunes de l’autre », quand une « grenade assourdissante » est envoyée à ses pieds, « à environ un mètre cinquante ». « La détonation et l’impact des morceaux de la grenade m’ont presque fait tomber au sol. J’ai tout de suite regardé mes jambes, un morceau de la grenade était planté dans ma cuisse droite », poursuit Alexandre S. Aidé par d’autres manifestants, il est évacué par les secours. Hospitalisé pendant deux jours, il est opéré en urgence pour nettoyer et refermer les plaies. « Au réveil, c’était très choquant de découvrir ma jambe si mutilée », raconte-t-il. Des photos prises à l’hôpital permettent de constater que de larges cicatrices lardent ses cuisses. Des semaines d’arrêt de travail et de marche avec l’aide de béquilles ont suivi pour lui. Des photos de blessures équivalentes, provoquées par ces éclats, ont accompagné plusieurs week-ends de mobilisation des gilets jaunes.

    Au-delà de la dangerosité de l’arme elle-même, le cadre légal et les instructions relatives à son utilisation ne sont pas rendues publiques par les autorités. Comme pour de nombreux sujets ­concernant l’usage de la force, le ministère de l’Intérieur se cantonne le plus souvent à des réponses approximatives, voire fait preuve d’une totale opacité. C’est une instruction datée du 27 juillet 2017, consacrée aux armes dites de « force intermédiaires », et commune à la police et la gendarmerie, qui prévoit notamment le cadre légal de tir des GLI-F4. Libération a consulté un compte rendu de ce document réalisé par l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) intitulé « réglementation, utilisation et manipulation des grenades GLI-F4 », daté du 19 juin 2018. Pour faire simple, en dehors de l’usage en situation de légitime défense, cette grenade peut être utilisée en maintien de l’ordre en présence d’un superviseur. Comme pour les autres armes, son utilisation doit être « proportionnée » et « n’est possible que si les circonstances la rendent absolument nécessaire ». Si l’ordre de tir a été donné par l’autorité civile, c’est-à-dire le préfet ou son représentant, les policiers et gendarmes doivent avant tout procéder à deux sommations. Sur le terrain, le commandement peut prendre l’initiative de tir sans sommation, si « des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent ».
    « Responsabilité »

    Le même compte rendu de l’IGGN, synthétise aussi une instruction datée du 19 janvier 2018, là encore non publique. Ce document détaille les modes de lancer de cette grenade explosive. Elle peut être utilisée à la main, « en faisant rouler la grenade au sol afin d’éviter des explosions à hauteur de visage », mais aussi « par balancé du corps [en courbe], par-dessus un obstacle », ou encore par « détente du bras fléchi [en direct] plus précis pour atteindre une fenêtre ou un passage étroit ». Autrement dit, tous les lancers sont possibles. L’arme peut aussi être tirée en courbe, avec un lanceur de grenade.

    Dès 2014 et la mort de Rémi Fraisse à Sivens (Tarn), la GLI-F4 était sur la sellette car composée – en quantité moindre – du même explosif que la grenade qui a tué le jeune homme (de type OF-F1). Mais à l’époque, l’IGGN note dans le cadre de l’instruction que « la cartouche explosive et lacrymogène [de la GLI-F4, ndlr] ne produit aucun éclat dangereux ». « A la suite de la mort de Rémi Fraisse, la décision a seulement été d’interdire une seule de ces deux grenades. Il y a donc une vraie responsabilité politique à ce propos », souligne l’avocat de la famille de Rémi Fraisse, Arié Alimi, qui défend aussi des manifestants blessés récemment.

    Qu’en est-il désormais  ? Pourquoi les récents résultats d’expertise de l’IRCGN n’ont-ils pas conduit à une remise en cause de l’usage de l’arme en vue du mouvement des gilets jaunes  ? Contactée, la procureure de la République de Saint-Nazaire, qui a reçu ce rapport dans le cadre de l’enquête sur la blessure de Maxime Peugeot en mai dernier, répond qu’il ne lui appartient pas « de se positionner sur l’aspect dangereux de l’arme ». Les directions générales de la police et de la gendarmerie n’ont pas répondu à nos questions à ce propos. De son côté, le constructeur, l’entreprise Alsetex, déclare simplement que « la grenade en question n’est plus fabriquée depuis cinq ans ».

    Alors pourquoi les forces de l’ordre continuent-elles à utiliser cette arme qui n’est plus commandée  ? Et quel est l’état des stocks  ? Selon nos informations, la grenade qui a mutilé Maxime Peugeot a été fabriquée en 2004. Même silence des autorités sur cette question. « Il semble évident que la décision qui a été prise, d’arrêt de commande de cette grenade, aurait dû s’accompagner immédiatement d’une suspension de son utilisation. On est inquiets sur les stocks », réagit son avocat, Hervé Gerbi. Une position partagée par Aïnoha Pascual, avocate de la famille Pontonnier  : « Le ministère de l’Intérieur est dans une logique économique alors que des vies sont en jeu. »

    #Police #Armement

  • (3) Grenade GLI-F4 : révélations sur une arme qui mutile - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2019/01/25/grenade-gli-f4-revelations-sur-une-arme-qui-mutile_1705396

    Mains arrachées, plaies de plusieurs centimètres… La GLI-F4, essentiellement composée de TNT, a fait beaucoup de dégâts lors des manifestations des gilets jaunes. Un rapport de la gendarmerie auquel « Libé » a eu accès révèle que sa dangerosité a été sous-estimée par les forces de l’ordre, ce qui ne les empêche pas de l’utiliser.

    Grenade GLI-F4 : révélations sur une arme qui mutile

    C’est la première fois, en deux mois, que Gabriel Pontonnier a mis des mots sur l’instant où sa main a été en partie arrachée par une grenade tirée par les forces de l’ordre. Jeudi, cet apprenti chaudronnier de 21 ans a été auditionné par la police des polices sur les circonstances de sa grave blessure. L’unique parole pour ce jeune homme dont la vie est suspendue depuis le 24 novembre. Ce jour-là, il participait avec sa mère, son frère et sa sœur, à la première journée parisienne de mobilisation des gilets jaunes. Vers 18 heures, accompagné de son frère Florent, 30 ans, il observe la progression des policiers. Ce dernier raconte la scène  : « On s’est mis à distance pour éviter qu’ils nous prennent pour des casseurs ou des personnes mal intentionnées, juste derrière un petit camion qui vendait de la nourriture, nous étions en sécurité. Je me suis mis à filmer. » La séquence démarre, quelques instants avant l’explosion…

    La ligne des forces de sécurité, visible en arrière-plan, est distante d’environ une trentaine de mètres. Proche des deux frères, un vieux monsieur avec un bonnet rebrousse doucement chemin, un manifestant a les mains en l’air, un autre est au téléphone, tandis que deux personnes marchent tranquillement. Soudain, un homme crie plusieurs fois « attention ». Un blast lumineux survient, ainsi qu’une effroyable détonation. « Je me suis retourné, un nuage de fumée nous recouvrait, poursuit Florent Pontonnier. Mon frère a traversé ce nuage en ma direction, le bras en avant, en criant « putain ma main bordel, j’ai plus de main, j’ai plus de main ». C’est l’image qui restera à vie dans mes pensées et que je vois à chaque fois que je ferme les yeux. Une main éclatée avec les os à l’air libre, un doigt qui pendait sur le côté et plus rien sur le reste. » ­Gabriel est hospitalisé en urgence, il subit douze opérations pour tenter de sauver ce qu’il reste de sa main et retirer les nombreux éclats qui l’ont blessé aux jambes et à la tête. L’amputation totale est toujours envisagée.

    Le même jour, Antonio B., 40 ans, est aussi gravement touché au pied et Maxime W., 30 ans, perd l’audition. Le week-end suivant, deux mains sont arrachées. Celle de Frédéric Roy, 35 ans, à Bordeaux, et celle de Ayhan P., 52 ans, à Tours, qui est aussi gravement blessé à la jambe. Le 8 décembre, c’est la main d’Antoine Boudinet, 26 ans, qui est mutilée. Plusieurs autres personnes ont été grièvement blessées, criblées de plaies de plusieurs centimètres.
    « Déstabiliser »

    L’arme mise en cause dans toutes ces blessures de guerre est la grenade lacrymogène instantanée, dite GLI-F4. Son nom est trompeur car cette arme est surtout composée de tolite, un explosif mieux connu sous le nom de TNT. Elle est utilisée à la fois par la gendarmerie et la police. Cette grenade avait déjà arraché la main de Maxime Peugeot, un manifestant de 21 ans, à Notre-Dame-des-Landes. Le 22 mai 2018, il ramasse la munition, sa main est entièrement arrachée et son corps est touché par plusieurs impacts. Libération a eu accès au rapport du laboratoire scientifique de la gendarmerie réalisé sur cette blessure (et versé à l’enquête), avant le mouvement des gilets jaunes. Il conclut que la dangerosité de la grenade a été sous-estimée par les autorités françaises et le fabricant. Le ministère de l’Intérieur fait pourtant le choix d’en tirer « jusqu’à épuisement des stocks », sans préciser le nombre de grenades encore disponibles. Daté du 11 juillet 2018, ce rapport est effectué par l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Les deux experts, spécialisés en explosifs, effectuent une batterie de tests sur la GLI-F4, pour vérifier qu’elle est bien responsable de la mutilation de Maxime Peugeot.

    « Selon le fabricant, notent les deux experts en explosifs, elle est destinée au rétablissement de l’ordre, par son triple effet lacrymogène, assourdissant et de souffle. Elle permet de déstabiliser les manifestants dans des situations particulièrement difficiles (violences, émeutes). » La dangerosité de la grenade « au contact » est rappelée par les gendarmes. Leur rapport précise que l’« onde de choc générée fragmente les tissus, les os et provoque des blessures très importantes dont la létalité dépend de la zone impactée ». L’IRCGN précise enfin que « l’explosion d’une grenade tenue en main est susceptible de provoquer son arrachement ». En effet, l’arme est composée d’une capsule de gaz lacrymogène, mais surtout de 26 grammes de TNT et de 4 grammes d’hexocire, un autre explosif utilisé pour l’amorçage.

    Pour réaliser son expertise, l’IRCGN déclenche successivement dix grenades et note à chaque fois les effets produits. Test après test, le laboratoire consigne que la puissance de l’arme est bien plus importante que ce qu’annoncent les données théoriques. « La grenade est normalement conçue pour ne pas générer d’éclats, indique-t-il. Cependant, des projections d’éclats transfixiants et de débris divers partiellement calcinés ont été constatées lors de tous les essais. » Ce sont justement ces « éclats transfixiants », autrement dit qui traversent les chairs, qui ont gravement blessé de nombreux manifestants sur tout le corps ces dernières semaines. Le 24 novembre, Florent Pontonnier, le frère de Gabriel dont la main est mutilée, est également touché par ces éclats transfixiants et a dû lui aussi subir une opération. De même pour leur cousin, Marvin, touché par la même grenade et qui doit être opéré prochainement.

    Alexandre S., 27 ans, a été blessé aux cuisses le 1er décembre, place de l’Etoile, à Paris. Vers 15 h 30, il décrit une situation qui « stagnait » avec « les forces de l’ordre d’un côté, les gilets jaunes de l’autre », quand une « grenade assourdissante » est envoyée à ses pieds, « à environ un mètre cinquante ». « La détonation et l’impact des morceaux de la grenade m’ont presque fait tomber au sol. J’ai tout de suite regardé mes jambes, un morceau de la grenade était planté dans ma cuisse droite », poursuit Alexandre S. Aidé par d’autres manifestants, il est évacué par les secours. Hospitalisé pendant deux jours, il est opéré en urgence pour nettoyer et refermer les plaies. « Au réveil, c’était très choquant de découvrir ma jambe si mutilée », raconte-t-il. Des photos prises à l’hôpital permettent de constater que de larges cicatrices lardent ses cuisses. Des semaines d’arrêt de travail et de marche avec l’aide de béquilles ont suivi pour lui. Des photos de blessures équivalentes, provoquées par ces éclats, ont accompagné plusieurs week-ends de mobilisation des gilets jaunes.

    Au-delà de la dangerosité de l’arme elle-même, le cadre légal et les instructions relatives à son utilisation ne sont pas rendues publiques par les autorités. Comme pour de nombreux sujets ­concernant l’usage de la force, le ministère de l’Intérieur se cantonne le plus souvent à des réponses approximatives, voire fait preuve d’une totale opacité. C’est une instruction datée du 27 juillet 2017, consacrée aux armes dites de « force intermédiaires », et commune à la police et la gendarmerie, qui prévoit notamment le cadre légal de tir des GLI-F4. Libération a consulté un compte rendu de ce document réalisé par l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) intitulé « réglementation, utilisation et manipulation des grenades GLI-F4 », daté du 19 juin 2018. Pour faire simple, en dehors de l’usage en situation de légitime défense, cette grenade peut être utilisée en maintien de l’ordre en présence d’un superviseur. Comme pour les autres armes, son utilisation doit être « proportionnée » et « n’est possible que si les circonstances la rendent absolument nécessaire ». Si l’ordre de tir a été donné par l’autorité civile, c’est-à-dire le préfet ou son représentant, les policiers et gendarmes doivent avant tout procéder à deux sommations. Sur le terrain, le commandement peut prendre l’initiative de tir sans sommation, si « des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent ».
    « Responsabilité »

    Le même compte rendu de l’IGGN, synthétise aussi une instruction datée du 19 janvier 2018, là encore non publique. Ce document détaille les modes de lancer de cette grenade explosive. Elle peut être utilisée à la main, « en faisant rouler la grenade au sol afin d’éviter des explosions à hauteur de visage », mais aussi « par balancé du corps [en courbe], par-dessus un obstacle », ou encore par « détente du bras fléchi [en direct] plus précis pour atteindre une fenêtre ou un passage étroit ». Autrement dit, tous les lancers sont possibles. L’arme peut aussi être tirée en courbe, avec un lanceur de grenade.

    Dès 2014 et la mort de Rémi Fraisse à Sivens (Tarn), la GLI-F4 était sur la sellette car composée – en quantité moindre – du même explosif que la grenade qui a tué le jeune homme (de type OF-F1). Mais à l’époque, l’IGGN note dans le cadre de l’instruction que « la cartouche explosive et lacrymogène [de la GLI-F4, ndlr] ne produit aucun éclat dangereux ». « A la suite de la mort de Rémi Fraisse, la décision a seulement été d’interdire une seule de ces deux grenades. Il y a donc une vraie responsabilité politique à ce propos », souligne l’avocat de la famille de Rémi Fraisse, Arié Alimi, qui défend aussi des manifestants blessés récemment.

    Qu’en est-il désormais  ? Pourquoi les récents résultats d’expertise de l’IRCGN n’ont-ils pas conduit à une remise en cause de l’usage de l’arme en vue du mouvement des gilets jaunes  ? Contactée, la procureure de la République de Saint-Nazaire, qui a reçu ce rapport dans le cadre de l’enquête sur la blessure de Maxime Peugeot en mai dernier, répond qu’il ne lui appartient pas « de se positionner sur l’aspect dangereux de l’arme ». Les directions générales de la police et de la gendarmerie n’ont pas répondu à nos questions à ce propos. De son côté, le constructeur, l’entreprise Alsetex, déclare simplement que « la grenade en question n’est plus fabriquée depuis cinq ans ».

    Alors pourquoi les forces de l’ordre continuent-elles à utiliser cette arme qui n’est plus commandée  ? Et quel est l’état des stocks  ? Selon nos informations, la grenade qui a mutilé Maxime Peugeot a été fabriquée en 2004. Même silence des autorités sur cette question. « Il semble évident que la décision qui a été prise, d’arrêt de commande de cette grenade, aurait dû s’accompagner immédiatement d’une suspension de son utilisation. On est inquiets sur les stocks », réagit son avocat, Hervé Gerbi. Une position partagée par Aïnoha Pascual, avocate de la famille Pontonnier  : « Le ministère de l’Intérieur est dans une logique économique alors que des vies sont en jeu. »

    #maintien_de_l'ordre

  • Gilets jaunes : le #décompte des #blessés graves

    Après l’acte X, #Checknews compte désormais, au 21 janvier, 109 blessés graves parmi les gilets jaunes et les journalistes, dont 79 par des tirs de #lanceur_de_balle_de_défense. Au moins 15 victimes ont perdu un oeil.

    https://www.liberation.fr/checknews/2019/01/14/gilets-jaunes-le-decompte-des-blesses-graves_1702863

    #statistiques #chiffres #gilets_jaunes #violences_policières #maintien_de_l'ordre #flash-ball #flashball

    Le compte twitter de @CheckNews (de l’équipe de Libé) :
    https://twitter.com/CheckNewsfr

    • Le terrible #bilan de deux mois de violences policières

      Depuis le début de la mobilisation Gilets jaunes, plusieurs recensements font état d’au moins 97 blessés graves par les armes de la police, dont quatre ont eu la main arrachée et au moins quatorze ont perdu un oeil. La faute aux lanceurs de balle de défense, aux grenades #GLI-F4 et à une doctrine de maintien de l’ordre ultraviolente.

      « J’étais en train de filmer avec mon téléphone portable aux Champs-Élysées quand il y a eu un mouvement de foule. J’ai reculé et j’ai senti cette balle de Flash-Ball percuter ma tête. J’ai eu l’impression que ma joue droite éclatait. » Axelle Marquise, 28 ans, a été blessée par un tir de lanceur de balle de défense (LBD) le samedi 8 décembre à Paris, lors d’une manifestation des Gilets jaunes. C’était la première fois de sa vie que cette serveuse à Six-Fours (Var) descendait dans la rue. Les examens médicaux diagnostiqueront une brûlure au deuxième degré, un hématome majeur, une double fracture de la mâchoire et un trismus – contraction constante des muscles de la mâchoire qui l’empêche d’ouvrir la bouche de plus d’un centimètre. « Je dois manger liquide pendant six semaines. J’ai déjà perdu six kilos. Après le rendez-vous le 29 janvier avec la chirurgienne pour vérifier que la fracture est bien réduite, je devrai faire je ne sais combien de séances de kiné pour soigner le trismus. Quand je pourrai enfin ouvrir la bouche, il faudra voir les dégâts au niveau des dents. J’ai perdu un bout de la molaire au fond à droite et je sens que quelque chose ne va pas », décrit-elle à Reporterre.

      La jeune femme s’est vue prescrire dix jours d’incapacité totale de travail (ITT). Pourtant, elle dit avoir eu « énormément de chance » par rapport aux autres blessés qui témoignent avec elle dans une vidéo. Celle-ci a été mise en ligne le 15 janvier par le collectif des « Mutilés pour l’exemple » (attention, images très choquantes). On y voit les cicatrices de Thomas, qui a lui aussi pris un tir de LBD en plein visage. Bilan, « 25 points de suture, une fracture du sinus, la lèvre tuméfiée et l’œil gauche touché ». Et le moignon d’Antoine, 26 ans, qui a eu la main droite arrachée par une grenade GLI-F4.

      Dans un courriel adressé à Reporterre le 17 janvier, le ministère de l’Intérieur a comptabilisé depuis le 17 novembre « 1.800 blessés parmi les manifestants et un millier de blessés parmi les forces de l’ordre » - dont les trois-quarts, selon Le Journal du dimanche, n’auraient pas donné lieu à un arrêt de travail. Ces chiffres ne disent rien de la gravité des blessures. Le 5 décembre, Reporterre recensait trois mains arrachées par des grenades GLI-F4, des blessures à la tête causées par des tirs de LBD et le décès de Zineb Redouane, 80 ans, à Marseille, après qu’une grenade ait été tirée dans son appartement.

      Depuis 2012, le collectif contre les violences d’État « Désarmons-les ! » tient la sinistre comptabilité des blessés graves et tués par la police. « Nous parlons de blessure grave dès lors qu’il y a plaie ouverte avec fracture, traumatisme crânien, perte d’un membre, rupture d’un organe ou blessure à la tête. Les informations nous viennent des réseaux sociaux, de membres du réseau et d’avocats engagés dans la lutte contre les violences policières, explique à Reporterre Ian B., membre du collectif. Quand une information nous parvient, nous demandons confirmation aux proches de la victime ainsi que plusieurs photos à différents stades de la guérison avant de la verser à la liste. » Dans un bilan provisoire mis en ligne le 4 janvier, le collectif dénombrait 97 blessés graves depuis le 17 novembre. « Quasiment les trois quarts ont été blessés à la tête » et plusieurs ont été définitivement mutilés : quatre ont eu une main arrachée, une personne est devenue sourde suite à l’explosion d’une grenade et dix-sept personnes ont été éborgnées.

      Le journaliste indépendant David Dufresne a quant à lui entrepris de signaler blessures et violences les plus graves sur son fil Twitter et au ministère de l’Intérieur. Quand Reporterre l’a rencontré, mercredi 16 janvier, il avait déjà rédigé 307 « signalements ». « La plupart concernent des blessures. D’autres, des manquements à la déontologie ou un non-respect des règles qui sont la matrice de la blessure. Toutes les blessures à la tête causées par des LBD et des Flash-Ball sont interdites, puisque les policiers ne sont pas autorisés à viser la tête et les parties génitales. Les tabassages ne sont pas autorisés non plus. Cette centaine de blessés graves et ce millier de blessés légers sont déshonorants. »

      Le quotidien Libération s’est appuyé sur ces travaux pour établir son propre recensement « non exhaustif ». Bilan le 15 janvier : 94 blessés graves, dont 69 par des tirs de LBD. Et au moins 14 personnes éborgnées.

      Chez ces observateurs, c’est l’effroi qui prime. « J’ai entrepris ce travail à cause d’un sentiment de sidération devant les images de violences policières et le déni politique et médiatique de ces violences, explique David Dufresne, qui avait publié en 2013 un livre d’enquête intitulé Maintien de l’ordre (éd. Fayard). Avec les Gilets jaunes, on a battu les records des mobilisations contre le CIP en 1994, contre le plan Juppé en 1995 et contre le CPE en 2006. Il faut remonter à Mai 68 pour déplorer un tel bilan. Certes, en Mai 68, il y avait eu des morts. Mais là aussi, une dame de 80 ans est morte à Marseille. Une enquête doit établir s’il s’agit d’une victime collatérale, mais elle reste une victime. »

      Même sentiment d’aggravation du côté de Désarmons-les : « Le collectif est né en 2012, quand nous nous sommes rendus compte que des manifestants étaient blessés par les armes de la police et notamment les grenades utilisées depuis les années 2000, raconte Ian B. En février 2014, trois personnes ont été éborgnées à Nantes lors d’une manifestation contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Le nombre de blessés a grimpé en flèche au moment de la mort de Rémi Fraisse à Sivens en octobre 2014, des mobilisations contre la « loi travail » en 2016 et de l’expulsion de la Zad de Notre-Dame-des-Landes en 2018. » Mais la mobilisation des Gilets jaunes fait exploser les compteurs. « Entre 1999 et le 17 novembre 2018, soit environ vingt ans, nous avons recensé 53 blessés graves, dont un grand nombre en-dehors de manifestations. Depuis le 17 novembre, nous en sommes à 97 blessés graves, quasiment tous en manifestations. »

      Comment en est-on arrivé là ? En juillet 2017, l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat) dénonçait dans une note adressée au Défenseur des droits un « tournant majeur dans la doctrine française du maintien de l’ordre » depuis le début des années 2000, avec « le développement des logiques d’interpellation d’une part et la transformation de l’armement d’autre part ». « Allant de pair avec une logique chiffrée de l’action policière, le nombre d’interpellations est devenu un enjeu des opérations de maintien de l’ordre, peut-on y lire. Une interpellation implique un rapprochement au corps à corps, et donc, de facto, un abandon de la logique de mise à distance. » L’évolution de l’armement s’est traduite par l’essor des armes de force intermédiaire – lanceurs de balle de défense dont le #LBD_40, grenades lacrymogènes instantanées GLI-F4 et grenades de désencerclement –, à l’origine de la plupart des blessures graves en manifestation ces dernières années. A noter que seule la France utilise ces armements : ni l’Allemagne, ni le Royaume-Uni, ni la Belgique n’utilisent de grenades à effet de souffle type #GLI-F4 et de #LBD.

      Le maintien de l’ordre en France, « une exception française »

      Cette évolution néfaste s’est faite avec la complicité du politique. Dans leur article « Un splendide isolement. Les politiques françaises du maintien de l’ordre », les sociologues Olivier Fillieule et Fabien Jobard s’intéressent à « la certitude, largement entretenue par policiers et gendarmes, que le maintien de l’ordre ’à la française’ est d’excellence et qu’il est prisé dans le monde entier. Cela fut peut-être vrai par le passé, mais ce n’est plus le cas. » En outre, « cette difficulté à se remettre en question s’adosse à un discours sur les spécificités de la situation française avec l’idée que les casseurs sont d’une détermination jamais vue auparavant et que l’on bascule dans un cycle inédit de violence (...). Le politique se contente de reprendre à son compte les déclarations des principaux syndicats de police, selon lesquels la violence de l’adversaire exonère le dispositif de maintien de l’ordre. (…) Se laissant convaincre par les arguments policiers sur la ’violence extrême’ des adversaires, les ministres de l’Intérieur par cette seule posture s’empêchent tout examen au fond de l’action policière. » La déclaration de Christophe Castaner le 16 janvier à Carcassonne, illustre bien ce soutien sans faille : « Moi, je ne connais aucun policier, aucun gendarme qui ait attaqué des Gilets jaunes. Par contre, je connais des policiers et des gendarmes qui utilisent des moyens de défense de la République, de l’ordre public. »

      Mais de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer la multiplication des blessures causées par les violences policières et réclamer l’interdiction des armes de force intermédiaire. Le 1er décembre, six avocats écrivaient à M. Castaner pour lui demander l’interdiction des grenades GLI-F4. Le 7 décembre, environ 200 personnalités, dont des élus de gauche, des sociologues, des historiens et des écrivains, appelaient à cesser « immédiatement » l’usage des LBD en manifestation. Le 14 décembre, c’était au tour d’Amnesty international de prendre la plume. Le 17 janvier, le Défenseur des droits Jacques Toubon réclamait une nouvelle fois la suspension de l’usage des LBD.

      Il avait déjà préconisé l’interdiction des lanceurs de balle de défense dans un rapport remis le 10 janvier 2018 à l’Assemblée nationale. « Au cours d’une manifestation où, par définition, les personnes visées sont généralement groupées et mobiles, le point visé ne sera pas nécessairement le point touché et la personne visée pourra ne pas être celle atteinte », y lit-on. « Par ailleurs, le caractère “non létal” des armes de force intermédiaire conduit en pratique les agents à les utiliser avec moins de précautions que les armes traditionnelles. Comme le relève Cédric Moreau de Bellaing, sociologue, l’introduction “des armes sublétales a plus d’effets délétères que positifs” car elles induisent “l’absolue certitude qu’au pire on amochera mais qu’on ne tuera pas” , ce qui explique qu’“on les utilise plus souvent” », poursuit le Défenseur des droits.

      « Les victimes sont issues de toutes les franges de la population »

      L’explosion du nombre de blessés joue dans la prise de conscience, mais pas seulement. Avec les Gilets jaunes, le profil des victimes a changé ; plus possible de mettre en avant l’image de « casseurs », « anarchistes » ou « zadistes » qui, quelque part, « l’auraient bien cherché ». « Les victimes ne sont plus issues du monde militant mais de toutes les franges de la population », observe David Dufresne. « Ce sont des citoyens ordinaires, des gens qui travaillent et qui ont une famille, et qui pour beaucoup descendent dans la rue pour la première fois pour défendre leurs droits », confirme Ian B, de Désarmons-les. « Avant d’aller en manifestation, je me disais que les personnes blessées avaient elles-mêmes commis des violences. Je ne pensais pas qu’un manifestant lambda pouvait se faire tirer dessus, témoigne Axelle Marquise. Mais aujourd’hui, quand je vois les images de Fiorina, 20 ans, qui a perdu un œil à cause d’un tir de Flash-Ball, j’ai des frissons dans tout le corps et les larmes aux yeux : comment une fille si jeune, qui allait à sa première manif, a-t-elle pu être mutilée de cette manière ? »

      La riposte judiciaire s’amorce. Le 11 janvier, l’Inspection générale de la police nationale avait été saisie de 207 signalements pour des dénonciations de violences policières, dont 71 enquêtes judiciaires et une enquête administrative, depuis le début du mouvement. 25 réclamations sont actuellement en cours de traitement par le Défenseur des droits, dont certaines concernent des groupes de personnes.

      Axelle Marquise, elle, a porté plainte contre X pour « violence aggravée avec menace ou usage d’une arme ». Elle n’est pas retournée manifester depuis sa blessure : « J’ai pensé accompagner mon compagnon la semaine dernière, mais je n’en ai pas dormi de la nuit. Je me suis vue prendre à nouveau un tir de LBD dans la tête et perdre un œil ou être défigurée à vie. » En revanche, elle se dit prête à répondre à l’appel du collectif des Mutilés pour l’exemple, pour des rassemblements le 2 février devant les commissariats et gendarmeries, avec des manifestants couverts de bandages demandant l’interdiction des armes de force intermédiaire. « Je ne sais pas si on obtiendra cette interdiction. De plus en plus de personnes ont conscience que ces armes peuvent mutiler et même tuer. Mais en même temps, je crains que le gouvernement trouve encore des excuses, en prétendant que les manifestants sont violents, qu’ils n’avaient pas à être là, comme l’a insinué Castaner en disant que ceux qui iraient manifester se rendraient complices des violences. »

      Le courriel du ministère de l’Intérieur n’est pas très encourageant : « Il s’agit d’armes de défense qui sont utilisées par les forces de l’ordre en réponse à des violences, en situation de légitime défense et dont l’usage qui en est fait est proportionné. Les manifestations, à Paris et en province, la plupart non déclarée, ont été caractérisées par des actions particulièrement violentes, et une volonté affichée d’en découdre avec les forces de l’ordre », a-t-il laconiquement répondu à Reporterre.

      https://reporterre.net/Le-terrible-bilan-de-deux-mois-de-violences-policieres

    • Avec les Gilets jaunes, on a battu les records des mobilisations contre le CIP en 1994, contre le plan Juppé en 1995 et contre le CPE en 2006. Il faut remonter à Mai 68 pour déplorer un tel bilan.

      Pourquoi on oublie à chaque fois les méfaits des gouvernements socialistes (Valls) au moment du vote de la Loi Travail (et ANI, etc).

    • La manif pour tous s’est aussi fait tabasser en mars 2013 : nasse, lacrymo, matraque…

      À l’époque « Valeurs actuelles » et autres sites de droite-droite étaient critiques des violences policières et relayaient le défenseur des droits. Une enquête avait été ouverte au Conseil de l’Europe.

      (EDIT : je répondais à un commentaire, depuis effacé)

    • Mais la version officielle dit : 4 gravement blessés à l’oeil...

      Quatre personnes ont été gravement blessées à l’oeil par des lanceurs de balle de défense (LBD) depuis le début du mouvement des « gilets jaunes », a affirmé ce mardi le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner lors d’une audition devant les députés.

      https://www.nouvelobs.com/societe/20190122.OBS8950/seulement-quatre-gilets-jaunes-eborgnes-par-la-police-vraiment.html

      signalé sur seenthis par @davduf :
      https://seenthis.net/messages/754776

  • La matraque n’est pas une réponse politique

    Dénonçant la nouvelle loi anti casseurs, un collectif d’élus et d’intellectuels demande l’interdiction des Lanceurs de Balles de Défense (LBD) et des grenades de désencerclement.

    La répression contre les Gilets Jaunes a été massive. Les chiffres en donnent toute l’étendue, plus de cinq mille six cent interpellations et gardes à vue, plus de mille condamnations. Le bilan officiel à la fin de l’année 2018 recensait environ trois mille blessés et mutilés, des femmes et des hommes dont la vie aura été brisée.

    Le gouvernement a fait le choix d’un maintien de l’ordre brutal et disproportionné face au mouvement, dispositifs policiers démesurés, journalistes bousculés et empêchés de travailler, gardes à vue et arrestations préventives, gazages et matraquages systématiques, évacuations violentes, tirs de LBD et de grenades de désencerclement, drones, hélicoptères et blindés. En annonçant le retour de la loi anti‐casseurs, invention de la droite après le mouvement du mois de mai 1968, le premier ministre affiche la couleur. La désescalade n’est pas l’option du gouvernement. La matraque est désormais sa seule réponse politique.

    Le choix de la force et de l’affrontement est toujours la tentation d’un pouvoir affaibli et ébranlé par une exigence démocratique et sociale qui vient des profondeurs du pays et qui le conteste. L’escalade répressive et l’utilisation intensive des moyens de police finissent d’ailleurs par mettre en danger les gendarmes et les policiers eux‐mêmes.

    Le Président, le gouvernement, la majorité parlementaire et leurs relais médiatiques en appellent aujourd’hui à la défense des institutions et de la république pour mieux se protéger et pour mieux justifier la criminalisation d’un mouvement qui ne saurait se résumer aux violences que nous condamnons. Ce faisant, ils nourrissent la logique infernale de la provocation et de la répression et ils minent en fait encore un peu plus les bases de notre pacte républicain.

    Nous sommes bien en face d’une incompréhension de classe, doublée d’une tentative désespérée de mettre à l’abri une oligarchie qui a permis à Emmanuel Macron d’accéder au pouvoir. Ce choix de la répression et de la violence policière est à l’œuvre depuis longtemps dans les quartiers populaires et il touche particulièrement les pauvres, les précaires, les jeunes et les migrants. Il est également à l’œuvre contre les Zones A Défendre (ZAD) et contre les mouvements d’écologie radicale. Les victimes de ces politiques avaient une vie, des familles et des rêves. Elles ont aussi des noms, Rémi Fraisse à Sivens et Adama Traoré à Beaumont‐sur‐Oise.

    La maladie sécuritaire ne date pas d’aujourd’hui. Emmanuel Macron n’est qu’un accélérateur de particules. Il est le digne héritier des gouvernements précédents, qui avaient bien commencé le travail de régression en matière de libertés publiques et d’attaques contre le pacte social. Rappelons toutes les lois votées qui ont relégué le juge derrière le préfet, le procureur et le policier, suivies par le basculement, par cette nouvelle majorité, de dispositions de l’état d’urgence dans le droit commun. Aujourd’hui, Édouard Philippe n’a plus qu’à piocher dans cet arsenal répressif, co‐construction de la droite et du gouvernement de François Hollande et de Manuel Valls, pour réprimer et diaboliser un mouvement auquel il ne veut pas répondre.

    Les Gilets Jaunes ont mis le doigt sur tout ce qui ne va pas et ils le rappellent à chaque rond‐point. Il est temps de trouver des remèdes pour soulager ce corps malade qu’est devenue la France et d’apporter des réponses concrètes aux attentes de justice et de démocratie exprimées par les manifestants, notamment le rétablissement de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF), la mise en place du Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC), dont les modalités restent à définir, une fiscalité plus juste pour les Petites et les Moyennes Entreprises (PME) et pour les Très Petites Entreprises (TPE), notamment celles travaillant pour la transition écologique, une réelle augmentation du Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance (SMIC) et des minima sociaux et la baisse du prix des produits de première nécessité.

    Nous devons, et nous allons combattre la nouvelle étape annoncée par le premier ministre dans la mise sous tutelle du droit de manifester, inspirée de la proposition de loi du sénateur des Républicains Bruno Retailleau. Aujourd’hui ce sont les gilets jaunes qui sont visés. Demain, nous pourrons l’être toutes et tous.

    Il est grand temps d’abandonner et d’interdire toutes les armes dites non létales dont l’utilisation conduit à des mutilations ou à des morts telles que les LBD et les grenades de désencerclement et d’en finir avec l’arbitraire de l’état policier, des lois et de la justice à deux vitesses, qui garantissent aux puissants et aux forces de l’ordre l’impunité et qui imposent à celles et ceux qui contestent l’ordre établi la répression sans limites.

    Mais au‐delà de ce combat contre la criminalisation et la répression de masse et pour nos libertés, une autre responsabilité nous incombe à toutes et à tous, qui exige la mobilisation la plus déterminée possible, celle de pousser au changement que les Gilets Jaunes et tant de citoyens exigent à raison aujourd’hui.

    Premiers signataires :

    Pouria Amirshahi, Patrick Apel‐Muller, Eliane Assassi, Clémentine Autain, Guillaume Balas, Julien Bayou, Esther Benbassa, Ugo Bernalicis, Olivier Besancenot, Éric Bocquet, Youcef Brakni, Damien Carême, Eric Coquerel, Sergio Coronado, Antoine Comte, Yves Contassot, Laurence De Cock, Didier Éribon, Eva Joly, Geoffroy de Lagasnerie, Pierre Laurent, Marie‐Noëlle Lienemann, Édouard Louis, Noël Mamère, Jean‐Luc Mélenchon, Danièle Obono, Pascal Savoldelli, Thomas Porcher, Assa Traoré, Marie‐Christine Vergiat

    https://www.humanite.fr/la-matraque-nest-pas-une-reponse-politique-666522
    #maintien_de_l'ordre #gilets_jaunes #violences_policières

    Texte complet :
    http://fischer02003.over-blog.com/2019/01/appel-pour-l-interdiction-des-lbd.html

    ping @davduf

  • GLI-F4, LBD 40 : derrière les sigles, une réalité sanglante - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2019/01/17/gli-f4-lbd-40-derriere-les-sigles-une-realite-sanglante_1703699

    La GLI-F4, grenade au souffle puissant

    Petite bombe dotée de 25 grammes de TNT (tolite), la grenade GLI-F4 produit, en plus d’un effet lacrymogène, une forte explosion (165 décibels à 5 mètres) provoquant un effet de souffle particulièrement effrayant pour les manifestants. Depuis l’interdiction de la grenade OF-F1 suite au décès de Rémi Fraisse à Sivens en 2014, c’est la grenade la plus puissante de l’arsenal des forces de l’ordre. « Même pour […] les plus agressifs, il est difficile de se prémunir », notait un rapport commun de l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) et de la police nationale (IGPN), publié le 13 novembre 2014. C’est aussi, et de loin, la plus dangereuse. Ce même rapport reconnaissait ainsi que ces « dispositifs à effet de souffle […] sont susceptibles de mutiler ou de blesser mortellement un individu ». Et « quel que soit le moyen utilisé, comme il s’agit d’un dispositif pyrotechnique, une atteinte à la tête ou sur le massif facial ne peut jamais être totalement exclue ». Depuis le début du mouvement des gilets jaunes, elle est suspectée d’avoir conduit à quatre mains arrachées, un œil endommagé (perte de la vue) et un pied blessé. Cette arme particulièrement mutilante - et que la France est la seule à utiliser en Europe en opérations de maintien de l’ordre - devrait néanmoins appartenir au passé. Les commandes ont cessé, le ministère ayant choisi de la remplacer par la GM2L. Cette dernière produit un effet lacrymogène et assourdissant, mais pas déflagrant comme la GLI-F4, selon le ministère de l’Intérieur. Reste que les stocks actuels seront bien utilisés jusqu’à épuisement.
    Le LBD 40, fusil précis et disproportionné

    En forme de fusil terminé par un gros canon, le LBD 40 (lanceur de balles de défense de 40 millimètres de diamètre) fait florès dans les rangs policiers. Fin décembre, le ministère de l’Intérieur a passé commande de 1 280 nouveaux LBD sur quatre ans. Apparus en maintien de l’ordre en France au début des années 2000, et notamment après les émeutes de 2005, les premiers LBD étaient de type Flash-Ball Super-Pro. De fabrication française, ils ont été progressivement remplacés depuis 2009 par le LBD 40, de fabrication helvétique, plus puissant et plus précis. Une caractéristique qui rend d’autant plus inexplicable le nombre important de blessés graves liés à cette arme - 71 depuis le début du mouvement des gilets jaunes, selon le recensement de Libération. Car sur le papier, l’usage du LBD est très encadré. Le tireur, explique une instruction du ministère de l’Intérieur de septembre 2014, doit viser « de façon privilégiée le torse ainsi que les membres supérieurs ou inférieurs », mais en aucun cas la tête. Chaque tir doit également faire l’objet d’un rapport détaillé. Des recommandations sans grand effet sur le nombre de bavures constatées sur le terrain. Et pour cause : « Dans le cadre d’un rassemblement sur la voie publique, le lanceur de balles de défense ne permet ni d’apprécier la distance de tir ni de prévenir les dommages collatéraux […] Au cours d’une manifestation où, par définition, les personnes visées sont généralement groupées et mobiles, le point visé ne sera pas nécessairement le point touché et la personne visée pourra ne pas être celle atteinte », expliquait le Défenseur des droits dans un rapport de décembre 2017.

    Bref, cette arme détient « un degré de dangerosité disproportionné au regard des objectifs du maintien de l’ordre ». Sensible à ce rapport, le préfet de police de Paris avait fini par renoncer au LBD en maintien de l’ordre… avant de faire machine arrière lors du mouvement des gilets jaunes, continuant ainsi à faire de la France un des rares pays en Europe (avec la Grèce, l’Espagne et la Pologne) à l’utiliser. « Le Royaume-Uni avec ses hooligans ou l’Allemagne avec ses néonazis ont aussi des vraies problématiques de maintien de l’ordre. Et pourtant, ils réussissent très bien à s’en passer », relève David Dufresne. Pour ce journaliste spécialisé, les dérives dans l’usage du LBD en France sont aussi et surtout le fait de policiers non formés au maintien de l’ordre, comme les membres des brigades anticriminalité. Un phénomène qui rejaillit avec les gilets jaunes, et qui a au moins le mérite de mettre en lumière ce « qu’il se passe depuis quinze ans dans les banlieues, sans que personne n’en parle », selon Dufresne.

    #maintien_de_l'ordre

  • Un gendarme condamné pour l’usage d’une grenade sur la #ZAD de Sivens
    https://www.bastamag.net/Un-gendarme-condamne-pour-l-usage-d-une-grenade-sur-la-ZAD-de-Sivens

    Le 8 janvier 2019, un gendarme a été condamné à six mois de prison avec sursis pour avoir grièvement blessé une manifestante opposée à la construction d’un barrage à Sivens (Tarn). Le militaire de 49 ans comparaissait à la chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Toulouse pour « violences volontaires ayant entraîné une ITT de 15 jours avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique ». Le 7 octobre 2014, ce membre du Peloton de surveillance et d’intervention (PSIG) d’Albi tente (...)

    En bref

    / #Luttes_sociales, #Justice, ZAD

  • Sivens : le gendarme qui avait lancé une grenade et blessé une femme condamné à six mois de prison avec sursis
    mardi 8 janvier 2019 à 20:06 - Mis à jour le mardi 8 janvier 2019 à 21:59 Par Bénédicte Dupont et Suzanne Shojaei, France Bleu Occitanie et France Bleu
    https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/sivens-huit-mois-de-prison-requis-contre-le-gendarme-qui-avait-lance-une-

    Six mois de prison avec sursis, interdiction de porter et détenir une arme pendant six mois et 1.000 euros d’amende, condamnation plus clémente que les réquisitions prononcée ce 8 janvier par le tribunal correctionnel de Toulouse à l’encontre du gendarme ayant lancé une grenade dans une caravane à Sivens le 7 octobre 2014, blessant grièvement une zadiste. Le militaire n’aura pas d’inscription dans son casier judiciaire et va pouvoir continuer à exercer son métier. Le parquet avait requis huit mois de prison avec sursis, l’interdiction de porter et détenir une arme pendant un an et l’interdiction d’exercer une mission de maintien de l’ordre pendant trois ans.

    "J’ai fait une erreur « 
    L’affaire avait été éclipsée par une histoire similaire, bien plus dramatique : la mort trois semaines plus tard d’un jeune écologiste sur ce même site, Rémi Fraisse, tué par une grenade lancée par un gendarme là encore Cette fois, la victime, une femme de 25 ans à l’époque, militante anti-barrage avait eu la main grièvement atteinte par des éclats de plombs en caoutchouc. Ce 7 octobre 2014, la scène avait été filmée par l’un des quatre occupants de la caravane, elle a été diffusée pendant l’audience. Le militaire n’avait pas attendu que tous les zadistes sortent et avait lancé la grenade sur un matelas de la caravane. » Vous vous êtes senti menacé ?", a demandé le procureur. « Non, répond le gendarme de 49 ans, expérimenté. Je voulais la lancer à côté de la caravane pour leur faire peur. J’étais fatigué, on travaillait jour et nuit sur le barrage à Sivens. J’ai fait une erreur, c’était inapproprié. » (...)

    #violences_policières #Sivens

  • Maintien de l’ordre et violences policières : ce que l’histoire nous apprend
    http://theconversation.com/maintien-de-lordre-et-violences-policieres-ce-que-lhistoire-nous-ap

    Les manifestations des gilets jaunes de ces dernières semaines ont soulevé à nouveau la question des violences policières et d’un usage accru de la violence par les forces de l’ordre, une question déjà posée en 2016 à l’occasion du mouvement contre la « loi travail ». On voudrait apporter un éclairage historique sur ce phénomène supposé de « retour » de la violence. Il ne s’agit pas de relativiser les agissements policiers, mais d’inscrire les événements dans l’évolution du maintien de l’ordre en France.
    Calmer le « citoyen momentanément en colère »

    Le maintien de l’ordre repose en France depuis longtemps sur des unités spécialisées : les gendarmes mobiles, apparus en 1921, complétés par les CRS, à partir de 1944, avec le recours à certaines périodes à des unités non permanentes comme les compagnies d’intervention de la Préfecture de Police à Paris dans les années 1950-1960.

    A l’origine de ces forces se trouve la préoccupation de ne plus recourir à l’armée, de ne plus traiter le manifestant comme un « ennemi » mais un « citoyen momentanément en colère ».

    La montée de ces forces est aussi liée au développement de la manifestation canonique dans les formes légitimes d’expression politique depuis la fin du XIXème siècle. Les moyens mortels (armes à feu) sont évacués, remplacés après-guerre par des instruments en principe non létaux dont la matraque est l’emblème, puis les gaz à partir de 1947 et enfin les grenades assourdissantes.
    Les grévistes forcent le barrage de police le 20 mars 1906. Wikimedia
    Un matériel plus sophistiqué

    Depuis Mai 68 (qui avait pris la police au dépourvu), la sophistication du matériel s’est accentuée avec le développement des protections individuelles et des véhicules, le perfectionnement de l’armement. Le maintien de l’ordre s’est aussi technicisé, puisqu’après de longues décennies d’apprentissage « sur le tas » au sein des unités, il fait l’objet d’un enseignement spécifique, comme au centre de Saint-Astier, créé par la gendarmerie au lendemain de Mai 68 puis devenu permanent, où les unités s’entraînent régulièrement dans le décor d’une ville fictive. Les agents s’aguerrissent aux manoeuvres et aussi à la maîtrise de soi nécessaire au métier. Un répertoire s’est alors fixé, fondé sur son caractère défensif, la planification, le contrôle à distance des manifestants, le retardement de l’usage de la force, et le dialogue, voire la cogestion avec les organisateurs des manifestations pour faciliter leur encadrement policier. Depuis quarante ans, les effectifs de ces forces sont restés stables, autour de 30 000 hommes (17 000 gendarmes mobiles, 13 000 CRS). Elles peuvent recevoir le renfort d’autres forces de police, dont le maintien de l’ordre n’est cependant pas le « métier ». Ces interventions ont été à l’origine de violences policières (comme la mort de Malik Oussekine à Paris le 6 décembre 1986).
    CRS et manifestants pendant la lutte contre l’extension du camp militaire, Larzac, France, années 1970. Community of the Ark of Lanza del Vasto/Wikimedia, CC BY-ND
    Quel critère pour définir la violence policière ?

    La question du niveau de violence policière et de son évolution est éminemment complexe. Quel critère retenir en effet ?

    Le seul nombre de morts, souvent retenu, montrerait cependant que le maintien de l’ordre devient plus meurtrier en France à partir de 1879, en particulier pendant la période de l’après-guerre, marquée par la guerre froide et la guerre d’Algérie.

    En témoignent les épisodes sanglants du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962, qui ont fait respectivement au moins cent morts et 8 morts à Paris.

    Cette seule courbe contredit l’existence d’un processus séculaire graduel de « réduction de la violence » et de pacification du maintien de l’ordre. En dehors de rares grands événements très meurtriers, il est difficile pour certains spécialistes de juger du niveau de violence policière le critère du nombre de morts dissimule d’autres formes de violence (charges, interpellations et intensité de la répression) et le « niveau de violence » renverrait avant tout aux perceptions de la manifestation.

    Si on s’en tient à ce seul critère mesurable, depuis un siècle, des phases d’apaisement relatif alternent avec des cycles de violence : celui qui oppose les organisations communistes à la police et culmine avec les manifestations contre le général Ridgway en mai 1952, puis la police aux Algériens en 1960-1962. Ces épisodes montrent que la violence policière fait toujours partie du répertoire d’action de l’État et a pu être un recours dans certaines circonstances.
    Contact plus fréquent

    La question du « retour » des violences policières doit être lue à la lumière des transformations du maintien de l’ordre depuis les années 2000. Celui-ci a été modifié par la lutte contre les « violences urbaines », autrement dit les émeutes des quartiers populaires (2005 et 2007). Les unités sont devenues plus mobiles et plus offensives, tant grâce à un armement plus agressif qu’en projetant des forces destinées à interpeller les émeutiers en vue d’une répression judiciaire.

    Il s’ensuit une transformation notable des formes de maintien de l’ordre, où le contact est plus fréquent, avec toutes les occasions de violence que peuvent provoquer de telles situations. Aux dispositifs adoptés lors des manifestations parisiennes des gilets jaunes, on peut appliquer des constats dressés à l’occasion du mouvement contre la loi travail en 2016 .
    Manif du 11 novembre 2018 contre l’invitation de Donald Trump pour les commémorations du 11 novembre 1918 par M. Macron. Jeanne Menjoulet/Flickr, CC BY-SA

    On note ainsi une dimension offensive marquée, avec des tirs de lanceur de balle de défense (LBD) (communément appelé Flashball), le déploiement massif d’unités dédiées à l’interpellation de manifestants par un pouvoir politique désireux d’afficher le soir même « la restauration de l’ordre », en utilisant des agents venus des BAC et de la BRI, et non des professionnels du maintien de l’ordre.

    Tout cela tend à brouiller les frontières entre encadrement des manifestations et police des « violences urbaines ». De telles interventions, perçues comme un usage indiscriminé de la force, ne manquent pas de générer des phénomènes de solidarisation des manifestants et de nouvelles violences.
    Des pratiques françaises pointées du doigt

    A cet égard, les spécialistes pointent des pratiques françaises à rebours des stratégies de « désescalade » menées dans d’autres pays européens, qui passent par le dialogue continu avec les organisateurs et les manifestants : depuis la présence d’officiers de liaison médiateurs, comme les Peace Units aux Pays-Bas, les « officiers de dialogue » en Suède, jusqu’à des panneaux lumineux donnant les instructions de la police à ceux qui défilent.
    Intervention de ‘Peace Units’ néerlandais lors d’une manifestation sportive.

    La sophistication de l’arsenal n’est pas non plus synonyme de pacification : le LBD et les grenades de désencerclement sont des armes susceptibles d’entraîner de graves blessures. Les forces de l’ordre conservent aussi des instruments archaïques, comme les grenades offensives (responsables de la mort de Rémi Fraisse à Sivens en 2014).

    Si l’on peut évoquer un apaisement tendanciel ou relatif de la violence du maintien de l’ordre depuis 1968, la situation reste ouverte : l’usage de la violence dépend in fine du degré de légitimité des protestataires aux yeux de l’autorité politique et des forces de l’ordre.

    #maintien_de_l'ordre

  • Oui, la France est bien le seul pays d’Europe à utiliser des grenades explosives contre les manifestants
    https://rmc.bfmtv.com/emission/la-france-seul-pays-au-monde-a-utiliser-des-grenades-explosives-contre-le

    Cette grenade explosive s’appelle la GLI-F4. C’est celle-ci qui avait arraché la main d’un manifestant de la #ZAD de NDDL qui avait tenté de la ramasser en 2017. C’est cette même grenade qui avait blessé au pied, en août 2017, un manifestant à Bure en Lorraine.

    Une forte explosion

    Cette grenade a trois caractéristiques quand elle explose. Elle libère du gaz lacrymogène, elle provoque un bruit intense estimé à 165 décibels dans un rayon de cinq mètres. C’est, à titre de comparaison, plus fort qu’un avion au décollage qui produit environ 140 décibels. Surtout, elle provoque une forte explosion grâce à un explosif déjà présent dans une autre grenade, la OF-F1. Celle-ci était responsable de la mort de Rémi Fraisse en octobre 2014 à Sivens. Elle a été interdite depuis.

    Même les forces de l’ordre ont reconnu que cette grenade présente un risque. En 2014, les inspections générales de la police et de la gendarmerie ont reconnu dans un rapport que ces dispositifs étaient bien “susceptibles de mutiler ou de blesser mortellement un individu”. Et qu’elles constituaient "le dernier stade avant de devoir employer des armes à feu".

    Utilisée jusqu’à épuisement des stocks

    Si elle n’a pas été interdite, la #GLI-F4 pourrait l’être prochainement. Le 24 mai 2018, selon le bulletin officiel, le ministère de l’Intérieur a indiqué qu’il allait renouveler ses stocks de grenades, mais n’a pas commandé de nouvelles GLI F4. "Il a été décidé de ne plus fabriquer de cette grenade", a expliqué le ministère. Pourtant, celle-ci continuera d’être utilisée jusqu’à épuisement des stocks.

    Elle sera remplacée par la GM2L, qui existe déjà. Selon le ministère de l’Intérieur contient aussi un effet lacrymogène et assourdissant, mais n’a pas l’effet déflagrant de la GLI-F4.

    #Maintien_de_L'ordre

  • Du XIXe siècle aux « gilets jaunes » : vers une pacification du maintien de l’ordre ?
    https://www.franceculture.fr/droit-justice/du-xixe-siecle-aux-gilets-jaunes-vers-une-pacification-du-maintien-de-

    Lors du mouvement des « gilets jaunes », toutes les méthodes de la police sont ainsi scrutées et critiquées : l’utilisation des grenades GLI F4, que la France est le seul pays à employer (les grenades offensives F1, encore plus puissantes, ont été retirées après la mort de Rémi Fraisse en 2014 à Sivens, l’engin s’était coincé entre son corps et son sac à dos), l’usage des Flash-Balls en tirs tendus qui provoquent éborgnements, arrachages de dents ou de gencives. L’utilisation d’additifs pestilentiels dans les canons à eau (issus de sang macérés, normalement destinés à éteindre les incendies), les charges de la cavalerie en plein Paris et le déploiement de véhicules blindés.

    Face aux nombreux blessés, le journaliste David Dufresne interpelle le ministère de l’Intérieur sur son compte Twitter. L’émission Envoyé Spécial sur France 2 a aussi consacré un reportage complet sur ces violences (un jeune homme édenté, une jeune femme éborgnée, un autre amputé de la main pour avoir ramassé une grenade). La police, de son côté, explique n’avoir jamais été confrontée à une telle brutalité et avoir été forcée de répliquer. Jets de pavé, de boules de pétanque, de barreaux de grilles utilisés comme des javelots, France Info cite aussi des manifestants qui brisent du verre sur le sol pour empêcher les chevaux de passer....

    #Maintien_de_L'ordre

  • Gérard Collomb défend sa vision du maintien de l’ordre, Julia Pascual, Le Monde
    https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/06/08/gerard-collomb-defend-sa-vision-du-maintien-de-l-ordre_5311692_1653578.html

    Confrontés à de nouvelles formes d’affrontements, policiers et gendarmes tentent d’adapter leur méthode.

    On imagine qu’il y aura eu des nuages épais de gaz lacrymogènes, que les blindés auront fait des embardées et qu’à petites foulées les uniformes, sous les casques et les boucliers, se seront mus comme un seul homme vers l’adversaire… Vendredi 8 juin, au centre d’entraînement de la gendarmerie nationale à Saint-Astier (Dordogne), les démonstrations conjointes des gendarmes mobiles et des CRS devaient donner l’occasion au ministre de l’intérieur de se livrer à un exercice de communication sur l’évolution du maintien de l’ordre, alors que l’opération à Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) touche à sa fin et que la mobilisation contre Parcoursup s’essouffle. Deux événements dont la gestion est considérée par Gérard Collomb comme un « modèle pour l’avenir ».

    Un intermède avec ces superbes photos souvenirs de Saint-Astier
    https://www.francebleu.fr/infos/societe/dordogne-suivez-la-visite-du-ministre-de-l-interieur-gerard-collomb-15284

    Le maintien de l’ordre a, depuis quelques années, opéré sa mue. Bon gré, mal gré, marqué par la mort de Rémi Fraisse en 2014, tué à Sivens (Tarn) par un tir de grenade offensive ; la présence quasi systématique de black blocs depuis la loi travail de 2016, prêts à s’affronter aux forces de l’ordre, ou encore l’observation constante des fonctionnaires sous l’effet des caméras et autres smartphones. Pour M. Collomb, la période que nous vivons correspond à un moment de bascule, une occasion selon lui de « revisiter nos techniques, notre doctrine ». Police et gendarmerie ont d’ores et déjà cherché à s’adapter pour « réduire les tensions, prévenir les incidents », explique-t-on au ministère de l’intérieur. Cette démarche intervient également quelques mois après la parution d’un rapport du Défenseur des droits qui invitait à une gestion plus « pacifiée » du maintien de l’ordre.

    Des manifestations mieux anticipées

    « Hier, le maintien de l’ordre, c’était la réaction à une manifestation, résume le général Thierry Cailloz, sous-directeur de la défense, de l’ordre public et de la protection de la gendarmerie nationale. Aujourd’hui, on est dans une approche globale, on prend du recul pour gagner en anticipation. L’objectif, c’est de participer au processus de désescalade. »

    Cette anticipation se traduit notamment par la recherche d’une meilleure concertation avec des interlocuteurs identifiés, qu’il s’agisse de responsables d’université en amont d’une évacuation ou de syndicats avant un défilé. « A Notre-Dame-des-Landes, le rôle de médiation mené de bout en bout par la préfecture avec les franges institutionnelles des opposants a été important, souligne le colonel Richard Caminade, qui a piloté l’opération à Notre-Dame-des-Landes. Cela permettait de bien informer tous les intervenants et contribuait à faire redescendre la pression et le niveau d’agressivité de l’adversaire. »

    L’anticipation se décline aussi à travers un travail de renseignement. « A Notre-Dame-des-Landes, on s’est énormément investi aux côtés de la gendarmerie pour guider la manœuvre », souligne Hugues Bricq, chef du service central du renseignement territorial. Plus généralement, dit-il, « nous sommes montés en puissance dans l’identification des casseurs. Nous travaillons à la fois pour prévenir les risques et permettre d’orienter les interpellations lorsqu’il y a des troubles ». La présence d’agents des services de renseignement au sein des postes de commandement des opérations a été « généralisée », fait valoir le ministère de l’intérieur.

    Autre ligne directrice : le renforcement des mesures préventives, à l’image des contrôles d’identité et des fouilles de sacs effectués autour du périmètre de la manifestation sur la base de réquisitions judiciaires. « Ça n’est pas nouveau, mais ils ont pris une dimension systématique et plus qualitative, explique le général Cailloz. Ils servent à la fois un objectif de dissuasion et de détection [d’armes par destination]. » Lors de la dernière manifestation à Paris, le 26 mai, une quarantaine de personnes ont ainsi été interpellées à la suite de ces contrôles préliminaires. « A Notre-Dame-des-Landes, ces mesures ont également été mises en œuvre pour éviter les renforcements de la ZAD venus de l’extérieur », ajoute la Place Beauvau.

    La communication comme arme

    La communication fait désormais partie intégrante de la manœuvre [Subito, Monsieur Jourdain a compris qu’il faisait de la prose, ndc]. A l’heure des réseaux sociaux et des chaînes d’information en continu, « il faut que l’on soit en mesure de justifier l’emploi de nos moyens », poursuit le haut gradé. A Notre-Dame-des-Landes, la captation d’images au moyen de caméras, drones ou encore de l’hélicoptère a été « une priorité, de façon à pouvoir réagir aux accusations », rapporte le général Cailloz. Les médias traditionnels ont été alimentés en vidéos retraçant les opérations d’expulsion de la ZAD, comme à Paris, où chaque manifestation donne lieu à un compte rendu en temps réel et en images de la préfecture de police, destinés aux journalistes.

    Lire aussi : Déblayage et nouvelles expulsions dans la « ZAD » de Notre-Dame-des-Landes
    https://lemonde.fr/planete/article/2018/05/17/notre-dame-des-landes-une-nouvelle-phase-d-expulsions-de-la-zad-a-debute_530

    Interpeller les fauteurs de troubles

    Face à la montée en puissance de certains manifestants désireux d’aller à l’affrontement, « notre objectif ne doit pas être d’interpeller pour interpeller », défend Gérard Collomb. Si les interpellations de masse permettent de faire cesser un trouble, elles se traduisent assez faiblement par des sanctions pénales, faute d’éléments probants imputables aux personnes. Le 1er mai à Paris, par exemple, la préfecture de police a interpellé 283 personnes, parmi lesquelles « seulement » 47 ont été déférées devant l’autorité judiciaire. « Nous devons perfectionner nos techniques d’interpellation ciblées des fauteurs de troubles », encourage M. Collomb. La présence d’officiers de police judiciaire aux côtés des forces mobiles pendant les opérations, comme ce fut le cas à Notre-Dame-des-Landes, doit contribuer à atteindre cet objectif, de même que la présence de magistrats du parquet au sein des postes de commandement des opérations. Une réflexion conjointe aux ministères de l’intérieur et de la justice a également été lancée. Place Beauvau, on plaide pour étudier la possibilité d’intervenir en amont des manifestations, « sur la base d’infractions d’associations de malfaiteurs en vue de commettre des violences en réunion ou de participer à un attroupement armé ».

    Lire aussi : Maintien de l’ordre : ce que révèle le 1er-Mai
    https://seenthis.net/messages/691423

    et aussi : #Maintien_de_l’ordre : la stratégie de la désescalade,
    https://seenthis.net/messages/697257

    "intervenir en amont des manifestations, « sur la base d’infractions d’associations de malfaiteurs en vue de commettre " cela veut dire procéder à des perquisitions et arrestations préventives à domicile et dans des locaux politiques, telles qu’elles étaient pratiquées sous un Giscard finissant.
    Hier un manifestant nantais a été arrêté dans le cadre dune instruction, car il aurait tapé sur une marionette de Micron dont l’incendie a depuis servi de prétexte à la "mise en cause" de 3 personnes.

    On a une espèce de feuilleté, utilisation de l’extrême droite et de la police, surveillance "orwelienne", société de surveillance et république bananière, (..., ...,) dont on peut se me demander si il pourrait finir par tourner au flan.
    #gouvernement #police #renseignement #justice

  • Les véritables questions à se poser face à la mutilation de Maxime Collectif de soutien suite à l’opération du 22 Mai effectué par les forces de l’ordre sur la ZAD de Notre Dame des Landes, ayant causé la mutilation de notre ami.
    https://blogs.mediapart.fr/collectif22mai/blog/250518/les-veritables-questions-se-poser-face-la-mutilation-de-maxime

    Cet article à pour but de mettre sous les projecteurs les véritables questions à se poser suite à ce qui est arrivé à Maxime et de répondre aux grands médias et leur acharnement médiatique.

    Tous les articles de presse sortis dans la hâte du sensationnel brodent autour d’un communiqué sans même plus d’informations, ou même d’accord auprès de la famille, constitués uniquement dans le but d’entacher la personne qui a été blessée et sa famille. Qu’il ait ou non ramassé la grenade n’est pas tant la question, celle que nous avons plutôt tendance à nous poser est la suivante : comment se fait-il que ce genre de grenade puisse faire tant de dégât ?

    Surtout après Sivens avec la mort de Rémi Fraisse ou à Bure avec la mutilation de Robin.

    Soulignons aussi dans les gros titres la redondance de l’identité du méchant zadiste, et donc du présumé coupable, bien plus encline à faire accepter les mutilations policières que lorsque qu’il s’agît d’un étudiant. A croire qu’un « zadiste » qui défend des terres et des constructions afin de bâtir un monde différent de celui qu’on nous propose mérite la répression qui accompagne son évacuation, la mutilation à Notre des Landes, à Bure, ou comme à Sivens la mort.

    Aux vues de la stratégie médiatique développée par l’état qui a été déployée dans nombre de cas de violences policières, la criminalisation des victimes et de leur famille au travers d’un processus de décrédibilisation et d’humiliation, ne nous étonne plus.

    #Zad #gardes_mobiles #maintien_de_l'ordre #armes_à_létalité_réduite #grenade_GLI_F4

  • Black Blocs : de Macron au capitalisme, les raisons de la colère
    Christian Losson , Willy Le Devin et Laure Bretton, Libération, le 2 mai 2018
    http://www.liberation.fr/france/2018/05/02/black-blocs-de-macron-au-capitalisme-les-raisons-de-la-colere_1647382

    « Qui nous sommes est moins important que ce que nous voulons. Et nous voulons tout, pour tout le monde » : c’est l’un des slogans les plus connus des actions Black Bloc. Apparues dans les années 80 en Allemagne, ces opérations ont connu leur apogée médiatique lors des grands sommets internationaux des années 2000. En France, ce sont les manifestations contre la loi travail en 2016 qui leur ont offert une nouvelle vitrine.

    Quel mot d’ordre a été passé avant la manifestation de mardi ?

    C’est essentiellement sur les réseaux sociaux ou des forums identifiés que les consignes de formation du Black Bloc de mardi ont été diffusées. Cinquante ans après Mai 68, à l’heure où les mouvements sociaux se multiplient en France, certains collectifs comme Génération ingouvernable, né début 2017 pour contester la présidentielle, entendaient faire de cette fête des travailleurs un « 1er Mai révolutionnaire », voire une « journée en enfer ». L’appel relayé sur Facebook expliquait que « manifester entre Bastille et République a[vait] largement montré ses limites ». Par conséquent, « nous devons nous attaquer directement à ceux qui sont responsables de notre situation. Ils sont au nombre de trois : les partis politiques, les banques, les multinationales. […] Vous devez réaliser des opérations coup-de-poing par petits groupes de 3 ou 4 personnes maximum », pouvait-on lire dans le texte.

    Début avril, un autre texte publié sur Lespaves.net et traduit en huit langues incitait les militants, français ou étrangers, à « converger » vers Paris à l’approche de ce mai anniversaire. Le texte dénonçait « un monde plus malade qu’il ne l’a jamais été », rongé par l’ubérisation, le capitalisme vert, les migrants fuyant les guerres ou les destructions climatiques, les écosystèmes détruits. « Ils commémorent, on recommence » résonnait comme le mot d’ordre général.

    Citant tour à tour l’expulsion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, les opérations policières contre les facs occupées depuis le début du printemps, les comités de soutien aux migrants, la grève à la SNCF, un communiqué appelait à « transformer ces différents foyers de révolte en une seule vague insurrectionnelle pour faire chuter ce régime détestable ». « C’est un mélange de colère contre Emmanuel Macron et la crise de la politique, et une logique de longue durée contre le capitalisme et le néolibéralisme », analyse le chercheur en science politique canadien Francis Dupuis-Déri, auteur du livre les Black Blocs : quand la liberté et l’égalité se manifestent.

    A quand remonte la première action Black Bloc ?

    Probablement à des actions d’autonomes allemands au début des années 80, quand Berlin-Ouest lance une offensive contre les squats et que s’y oppose un Schwarzer Block. On retrouve ces Autonomen un an plus tard, quand ils se mobilisent contre les néonazis ou le nucléaire. Un tribunal de Francfort veut alors faire condamner des manifestants « membres de l’organisation terroriste Black Bloc ». C’est encore eux qui prennent la rue en 1986 à Hambourg pour lutter contre la traque des squats. Ou leurs camarades qui dénoncent la guerre du Golfe en 1991 à Washington ou ailleurs.

    Ils explosent médiatiquement lors du sommet de l’OMC à Seattle, en 1999, où se multiplient les zones autonomes temporaires. Au sommet du FMI à Prague en 2000, ils seront près de 3 000 activistes, et à Gênes, l’année suivante, la répression policière fait un mort, un jeune altermondialiste, Carlo Giuliani, abattu d’une balle dans la tête. Tous les sommets internationaux des années 2000 sont marqués par une montée en puissance de la violence. On les retrouve ensuite lors du « printemps érable » à Montréal en 2012, lors du printemps arabe en Egypte en 2013, et même au Brésil contre la corruption. Si les actions se concentrent toujours contre les sommets diplomatiques, la focale s’est rapprochée ces dernières années des mouvements sociaux. En France, les Black Blocs ont pris leurs marques dans les ZAD, à Sivens ou à Notre-Dame-Des-Landes, et noyauté les manifestations de soutien à Nantes et à Rennes en 2014. Et la loi travail en 2016 a fait naître une nouvelle génération de Black Blocs français.

    Ce 1er Mai français était-il différent des autres mobilisations des Black Blocs ?

    Les modes opératoires - une apparition massive et instantanée, des tenues noires, des foulards, des bombes incendiaires - et les cibles de ces militants - les symboles de la « pourriture capitaliste » - n’ont pas changé. Les chercheurs s’accordent cependant sur une nouveauté bien française avec la pratique du « cortège de tête » dans les manifestations depuis la mobilisation contre la loi travail. Au prix d’altercations musclées avec les services d’ordre des syndicats, certains manifestants radicaux ont en effet réussi à se placer à l’avant des manifestations sociales depuis deux ans.

    Mardi à Paris, selon la préfecture de police, il y avait trois mouvements : le cortège des partis et syndicats traditionnels (20 000 personnes), un « cortège de tête » (14 500 militants) et 1 200 militants radicaux. « Réussir à se positionner en tête et avec une telle densité, c’est du jamais vu », estime Francis Dupuis-Déri. Selon le professeur à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), « cette pratique du cortège de tête où se mêlent des militants radicaux non cagoulés avec des Black Blocs offre à ces derniers des marges de manœuvre tactique face aux forces de l’ordre ». Plus que de la tolérance, c’est donc un appui qui s’exprime désormais physiquement. « Ce mode opératoire rend les Black Blocs encore plus visibles, abonde Hugo Melchior, doctorant en histoire contemporaine à Rennes-II et spécialiste des mouvements de jeunesse révolutionnaires. Mardi, les Black Blocs étaient enchâssés dans le cortège de tête, qui leur fournissait une protection, une clôture face aux forces de l’ordre. »

    Existe-t-il une idéologie Black Bloc ?

    Renvoyer les Black Blocs à des casseurs sans vergogne ou des voyous sans idéaux est systématique. Ils sont condamnés par les responsables politiques, la plupart des syndicalistes et des médias, et bien des intellectuels de droite comme de gauche. S’ils rejettent toute forme de catégorisation, les participants à ces actions instantanées sont au contraire très politisés. Libertaires, anars, autonomes… le mouvement est loin d’être homogène mais recrute uniquement dans les rangs de l’extrême gauche. « Ils sont tous radicalement antifascistes », précise Francis Dupuis-Déri. Ainsi, certains militants écologistes, queer ou LGBT ont parfois recours à ce type d’action, par envie de dénoncer l’ineptie et la brutalité du système. L’idée est de s’opposer au monopole de la violence « légitime » de l’Etat. « Leur dénominateur commun, c’est la critique radicale de l’ordre établi, de la société capitaliste et consumériste et leur volonté de la subvertir, explique le chercheur Hugo Melchior, ancien militant de la LCR. Parmi les Black Blocs présents mardi, nombreux sont ceux qui défendent le principe de créer une, deux, trois nouvelles ZAD, c’est-à-dire autant de zones libérées du règne de la marchandise. Ils ne croient plus au mythe de la grève générale, qui leur semble hors de portée avec la fragmentation accélérée du salariat. »

    Ce qui les rassemble aussi, c’est d’être hors système, hors partis, hors conformisme, mais agoraphiles, égalitaristes, horizontaux, utopistes. Il y a l’idée de mener une « guérilla imprévisible », une « contre-attaque aux oppressions » contre l’Etat et ses relais, contre la guerre économique qui « fabrique de l’hyperpauvreté », contre les « autoritarismes ».

    Il n’y a évidemment pas de théoricien ou de gourou qui ait inspiré le Black Bloc, mais des influences multiples, piochées ici ou là. Comme Hakim Bey, auteur de TAZ : zone autonome temporaire, anarchie ontologique, terrorisme poétique, paru en 1991. Ou encore le Communiqué au sujet des tactiques et de l’organisation, un manuel de combat publié quelque part dans le Midwest américain en 2001. Selon le chercheur canadien Francis Dupuis-Déri, cet ouvrage est au Black Bloc ce que sont l’Art de la guerre de Sun Tzu et De la guerre de Carl von Clausewitz à toute armée conventionnelle.

  • Affaire de Tarnac : après dix ans de procédure, l’énergie contestataire des « inculpés » est intacte - Royère-de-Vassivière (23460) - La Montagne
    https://www.lamontagne.fr/royere-de-vassiviere/politique/justice/2018/02/27/affaire-de-tarnac-apres-dix-ans-de-procedure-l-energie-contestataire-des-

    Depuis 2008, initiatives rassembleuses et regains de tension sur le plateau de Millevaches

    Depuis 2008, le plateau de Millevaches est resté un foyer actif de « subversion » idéologique. En octobre 2014, la mort de Rémi Fraisse, sur la ZAD de Sivens (Tarn), a entraîné en réaction l’affaire dite du « cadenassage des gendarmeries » entre Creuse, Haute-Vienne et Corrèze. Ce qui a ravivé la surveillance des autorités, pour peu qu’elle se soit relâchée, sur les groupes militants libertaires, écologistes, anti-capitalistes, regroupés parfois dans un but pratique sous le terme d’ « alternatifs » du plateau de Millevaches.

    Dans le même temps, ces mêmes réseaux ont tenu à démontrer leur impact positif et sur le territoire et leur « ouverture », à travers, par exemple, les fêtes de la Montagne limousine.

    #Tarnac

  • De Creys Malville à Sivens : Vital Michalon et Rémi Fraisse (Rediffusion) | France Culture
    https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/de-creys-malville-a-sivens-vital-michalon-et-remi-fraisse-r

    Le 31 Juillet 1977, sur le site dédié à la centrale nucléaire Superphenix, et le 25 octobre 2014, sur le site promis au barrage de Sivens, Vital Michalon et Rémi Fraisse, militants écologistes sont tombés sous les grenades offensives de la gendarmerie. Souvenirs de leurs proches.
    "La mort de Rémi Fraisse nous a tout à la fois bouleversé, nous a relancé et nous a peut-être remis en action."

    #violence_d'état #militer #radio #Sivens #barrage #centrale

    Déjà signalé lors de la 1e diffusion ici :
    https://seenthis.net/messages/417680

  • Lectures pour Remi Fraisse
    https://archive.org/details/LecturesPourRemiFraisse

    Parce que je n’arrive pas à trouver les mots en cette nuit sombre, quelques lectures pour tenter de dire l’indicible. Lettre à Remi Fraisse, par Robin Pagès Une centaine de personnes à Sivens en mémoire de Rémi Fraisse Sivens, Rémi Fraisse, trois ans après, où en est-on ? Forces de l’ordr....This item has files of the following types : Apple Lossless Audio, Archive BitTorrent, JPEG, Metadata

    #audio/opensource_audio #Testet,_Sivens,_ecologie,_Remi_Fraisse,_violences_policieres

  • Suite au 15 août à Bure : autopsie de la grenade « assourdissante » GLI F4 – Désarmons-les via @paris
    https://desarmons.net/2017/08/21/suite-au-15-aout-a-bure-autopsie-de-la-grenade-assourdissante-gli-f4

    Répression qui vient. Un élement de contexte, paru après cet article : Le ministère de l’Intérieur a lancé le 8 août un appel d’offre pour une commande d’un montant de 22 millions d’euros (hors TVA) de "grenades de maintien de l’ordre et moyens de propulsions à retard"

    Au cours de la manifestation contre l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure, des affrontements ont éclatés entre opposantEs au projet Cigéo et gendarmes sur les champs entourrant la commune de Saudron (Meuse). Peu avant la fin des hostilités, les gendarmes ont fait un usage intensif des grenades GLI F4, dite « grenades assourdissantes », occasionnant plusieurs blesséEs grave, dont l’un risque aujourd’hui une amputation des orteils. (...)

    Les précédents (...)

    La grenade offensive suspendue, la GLI F4 maintenue

    Le 26 octobre 2014, lorsque Rémi Fraisse est tué dans le dos par une grenade offensive OF F1 à Sivens, l’inspection de la gendarmerie et de la police tergiversent longuement sur le maintien des deux grenades, sous-pesant les arguments en faveur de l’une et de l’autre (ce soir là, les gendarmes ont lancé 23 grenades offensives et 38 GLI F4, de quoi s’y perdre). Finalement, la GLI F4 est maintenue et l’OF F1 suspendue, pour des considérations purement stratégiques. La police n’utilisant que les GLI F4, elle se fiche éperdument du maintien en service des grenades offensives, mais exerce un lobbying évident pour que la GLI F4 continue de doter les forces de l’ordre. A l’époque, Cazeneuve lui-même s’en fait le défenseur, estimant que les GLI F4 sont « nécessaires pour le maintien à distance ». « Elles sont, en outre, indispensables à la gradation de la réponse pour protéger tout à la fois les forces de l’ordre et les manifestants violents contre les conséquences dommageables d’un contact ».

    Le gouvernement se contente alors de « durcir les modalités d’emploi des grenades lacrymogènes à effet de souffle, dites “GLI” pour grenade lacrymogène instantanée », proposant que l’utilisation de ces munitions se fasse « en binôme, un binôme composé du lanceur lui-même et d’un superviseur ayant le recul nécessaire pour évaluer la situation et guider l’opération ».

    À Bure ce 15 août, il est certain que le ou les superviseurs n’avaient pas le « recul nécessaire » pour les deux dizaines de grenades lancées en moins de 3 minutes…

    C’est quoi cette grenade lacrymogene instantanée ?

    La grenade GLI F4, de calibre 56 mm, pèse 190 grammes, dont 41,2 grammes de masse active. Grenade dite « à effet combiné », elle est composée de 10 grammes de gaz lacrymogène CS pur et de 25 grammes de tonite (TNT). Elle peut être lancée à la main, ou propulsée à l’aide de dispositifs propulseurs DPR de 50, 100 ou 200 mètres et grâce à des lance-grenades Chouka ou Cougar.

    La GLI F4 est constituée d’une ogive en plastique rigide de couleur grise, contenant une cartouche en polystirène blanc dans laquelle on trouve le détonateur et le dispositif d’allumage, ainsi qu’une cartouche en carton avec un couvercle de couleurs rouge et jaune, contenant la masse active de gaz (poudre jaune) et de tonite (poudre noire). Généralement, les deux cartouches sont pulvérisées lors de l’explosion et on ne trouve sur le sol que l’ogive en plastique et le propulseur qui a permis de l’envoyer, ou le bouchon et la goupille si la grenade a été envoyée à la main.

    Produite par l’entreprise LACROIX – ALSETEX sous le code SAE 810, la grenade GLI F4 est classée parmi les grenades à effet de souffle (explosive). La détonation produite par la grenade, dont le niveau sonore peut atteindre jusqu’à 165 décibels (à 5 mètres de l’impact), vise à effrayer l’adversaire. C’est la raison pour laquelle la GLI F4 a toute sa place dans la panoplie des armes à effet psychologique mise en service depuis le début des années 2000. Elle est souvent appelée pour cette raison « grenade assourdissante », bien que la grenade assourdissante corresponde à un autre modèle de grenade produite par Alsetex, la SAE 430, qui n’est pas employée dans le cadre du maintien de l’ordre en France.

    Encadré par l’article R. 431-3 du code pénal et l’article D. 211-17 du code de la sécurité intérieure, l’usage de la Grenade Lacrymogène Instanée (GLI F4) est prévu dans le cadre d’une riposte graduée, jaugée au regard de la violence réelle ou supposée des manifestantEs faisant face aux forces de l’ordre. Son usage intervient si les moyens basiques du maintien de l’ordre, à savoir les matraques, les canons à eau et les grenades lacrymogènes, sont jugés inefficients. Elle est utilisée sur le palier « usage des armes » qui succède au palier « emploi de la force ». Elle précède le palier « riposte » prévoyant l’usage d’armes à feu individuelles.

    Utilisée allègrement lors d’affrontements de moindre intensité, et sans que les manifestantEs n’aient utilisé autre chose que des pierres, la grenade GLI F4 impose un haut niveau de violence et entraîne des blessures de guerre qui sont difficilement prises en charge par les services d’urgence classiques.

    " #armes_non_létales " #Police #militarisation

  • Le parquet requiert un non-lieu : l’affaire Rémi Fraisse étouffée - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/230617/le-parquet-requiert-un-non-lieu-l-affaire-remi-fraisse-etouffee

    Le procureur de Toulouse requiert un non-lieu pour clore le dossier de la mort de Rémi Fraisse à Sivens, après que toutes les demandes de sa famille auprès de la justice ont été rejetées. S’il rend hommage au jeune homme, le magistrat estime qu’aucune faute pénale ne peut être retenue contre qui que ce soit. Les juges d’instruction doivent bientôt rendre leur ordonnance.

    #paywall #crime_policier #violence_policière #injustice

  • Revenons aux faits ...
    Mort de Rémi Fraisse : les responsables sont à Matignon et place Beauvau
    https://reporterre.net/Mort-de-Remi-Fraisse-les-responsables-sont-a-Matignon-et-place-Beauvau

    A Sivens, dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, la mort de Rémi Fraisse est le résultat d’une opération de gendarmerie toute différente de la version officielle, comme l’a révélé Reporterre. Mais les gendarmes n’ont pas agi spontanément : c’est toute une chaine de commandement qui est en cause, et qui remonte jusqu’à Paris.

    Rémi Fraisse : il y avait une équipe fantôme
    https://reporterre.net/Remi-Fraisse-il-y-avait-une-equipe-fantome

    Que s’est-il réellement passé dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, à Sivens (Tarn), lors de la mort de Rémi Fraisse ? À la lumière du dossier d’instruction et de nombreux témoignages, Reporterre révèle les faits. Ils contredisent la version officielle. Une équipe fantôme de gendarmes a agi cette nuit-là. Et n’avait pas pour seul but de défendre la zone.

  • Un militant écolo asperge d’eau le maire d’Agen : 2 mois de prison ferme - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/11/un-militant-ecolo-asperge-d-eau-le-maire-d-agen-2-mois-de-prison-f

    Dire que Balkany court toujours…

    Source : Le Nouvel Obs, 21/10/2016

    Eric Petetin s’enchaîne symboliquement à l’arrivée de son procès, en mai 2014. (JEFF PACHOUD/AFP)

    Eric Petetin avait renversé une carafe d’eau sur le maire UDI d’Agen, en signe de protestation contre un projet controversé de Technopôle près de la ville.

    Le militant écologiste Eric Petetin a été condamné vendredi à deux mois de prison ferme pour avoir aspergé d’eau le maire UDI d’Agen, Jean Dionis du Séjour, en signe de protestation contre un projet controversé de Technopôle près de la ville, a appris l’AFP de source judiciaire. L’activiste de 63 ans a également été condamné à un euro symbolique de dommages et intérêts. Quatre mois de prison ferme avaient été requis.

    Le militant écologiste, qui s’était fait un nom dans les années 1990 pour son opposition acharnée au tunnel du Somport entre la France et l’Espagne, avait fait irruption le 17 septembre 2015, avec d’autres opposants à la Technopôle dans la salle où se tenait une séance du conseil communautaire. Ce dernier venait d’approuver la déclaration d’intérêt général de la Technopôle Agen-Garonne (TAG), projet de 140 hectares situé sur la commune de Sainte-Colombe-en-Bruilhois.

    Eric Petetin avait alors renversé une carafe d’eau sur le maire d’Agen et président de l’Agglomération, Jean Dionis du Séjour. Le militant avait reconnu son geste auprès de l’AFP, disant vouloir dénoncer un “crime contre la nature et les générations futures”. Les opposants fustigent notamment la destruction d’une zone “hautement fertile et irriguée”.

    Ancien occupant de Sivens
    Après plus d’un an d’occupation d’une “zone à défendre” (“ZAD”) par des opposants, à laquelle participaient d’anciens “zadistes” de Sivens (Tarn), où un militant écologiste, Rémi Fraisse, avait trouvé la mort en octobre 2014 à la suite d’un tir de grenade par un gendarme, les lieux avaient été évacués le 31 mai par les forces de l’ordre.

    L’Agglomération défend, elle, une “zone économique indispensable pour le développement du territoire et l’accueil des entreprises qui créeront les emplois de demain”. Le projet avait été déclaré d’utilité publique en 2014.

    Eric Petetin, militant emblématique des luttes écolo-libertaires des deux décennies écoulées, vétéran des “zadistes”, était déjà incarcéré à Mont-de-Marsan depuis le 21 septembre en exécution d’une condamnation datant de 2014.

    Source : Le Nouvel Obs, 21/10/2016

  • Rdv pour rendre hommage à Rémi Fraisse
    http://zad.nadir.org/spip.php?article4155

    #BREST - 18h30 Place de La Liberté en bas des marches de la mairie - Durant l’automne 2014, à Sivens dans le Tarn, la violence de l’Etat s’est exercée comme rarement face aux défenseurs d’une juste cause et a abouti à un drame. Dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, Rémi Fraisse, un jeune bénévole passionné d’écologie, luttant pacifiquement pour la protection de l’environnement a été tué par la gendarmerie française. 2 ans après l’assassinat de Rémi Fraisse sur la ZAD du barrage de SIVENS, rendons lui (...)

    #Collectifs_locaux_contre_l'aéroport

  • Sivens, Europacity, Roybon… Les opposants aux grands projets jugés inutiles ont-ils fait plier les bétonneurs ?
    http://www.bastamag.net/Sivens-Europacity-Roybon-Les-opposants-aux-grands-projets-juges-inutiles-o

    Le quinquennat de François Hollande a été marqué par l’émergence et la multiplication de mouvements contestant la pertinence de certains grands projets d’infrastructures : l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes bien sûr, mais aussi le barrage de Sivens (Tarn), le village artificiel de Roybon (Isère), le méga centre commercial Europacity en région parisienne, la décharge industrielle de Nonant-Le-Pin en Normandie, ou encore la ligne grande vitesse entre Lyon et Turin. Où en sont ces projets ? Les occupations (...)

    #Décrypter

    / Des grands projets... inutiles ?, #Multinationales, Démocratie !, A la une

    #Des_grands_projets..._inutiles_ ? #Démocratie_ !