city:sos

  • MARC COUCKE, LE MEC QUI RÊVE D’ACHETER LA BELGIQUE
    http://labrique.net/index.php/thematiques/lutte-des-classes/928-marc-coucke-le-mec-qui-reve-d-acheter-la-belgique

    Petite cité wallonne de la province du Luxembourg, Durbuy est un lieu entouré de verdure, réputé pour ses activités de détente et pour son centre­ville ayant conservé une allure médiévale. C’est ici que le milliardaire Marc Coucke a décidé d’implanter un projet de tourisme de luxe, Adventure Valley Durbuy, sans considération aucune pour la population locale et l’environnement. Malgré le combat inégal, l’association SOS Durbuy s’organise depuis plus d’un an pour y résister.

    #En_vedette #Lutte_des_classes

  • L’avortement : une lutte non révolue en France ou pourquoi il faut encore se battre | Simonæ
    https://simonae.fr/militantisme/feminismes/lavortement-une-lutte-pas-revolue-en-france-ou-pourquoi-il-faut-encore-se-ba

    A) Les visages multiples des anti-IVG : petit point chronologique

    Dès le passage de la loi de 1975, on a observé l’émergence de commandos anti-IVG catholiques, qui s’introduisaient illégalement dans les centres. Leurs pratiques étaient diverses, des plus « passives », comme des prières collectives devant les chambres, à des actions plus agressives, voire dangereuses, comme entrer de force dans les centres et les salles d’opération, s’enchaîner sur place, déclencher les alarmes… Certain·e·s allaient jusqu’à la violence physique et l’intimidation verbale envers les soignant·e·s pour empêcher les interventions.

    Ce n’est qu’en 1993 que de telles actions deviennent condamnables grâce à la création du délit d’entrave. Cependant, aucune de ces associations n’a été dissoute à la suite d’une condamnation.
    Parmi ces commandos, nous pouvons citer l’association « SOS Tout-Petits » et « La Trêve de Dieu »1. Ces associations sont toujours actives et virulentes en 2017 : SOS Tout-Petits organise des prières de rue de « réparations » et la Trêve de Dieu revendique la poursuite en justice des auteurices de l’IVG.

    Récemment, ces groupes auto-proclamés « pro-life [pro-vie] » ont également envahi Internet. Le site ivg[.]net, par exemple (deuxième site qui apparaît sur Google lorsque l’on cherche IVG), propose un numéro vert au bout duquel un·e bénévole prétendument bienveillant·e tentera de dissuader saon interlocuteurice d’avorter. Le site est également rempli de témoignages culpabilisants, dont il est impossible de vérifier la véracité, de jeunes regrettant d’avoir avorté ou proclamant leur joie d’avoir mené leur grossesse à terme.
    On peut citer également le site sosbebe[.]org, lancé par Alliance Vita, association ouvertement anti-IVG et anti-euthanasie, disposant d’un budget annuel de 1,6 millions d’euros et de 37 000 donateurices.

    Les réseaux sociaux sont également un média privilégié pour atteindre les jeunes : impossible de ne pas mentionner « Les Survivants », association créée en 1998, et qui renaît de ses cendres en 2016 avec une communication catchy et leur site « Afterbaiz ».
    Le délit d’entrave à l’IVG, élargi notamment aux sites Internet pour lutter contre ces nouvelles pratiques, n’a été adopté qu’en février 2017.
    B) Des politiques et mouvances anti-IVG encore d’actualité

    Encore sous Chirac (1995-2007), une majorité de ministres avaient des sympathies anti-IVG. Plus récemment, rappelons que Christine Boutin, cheffe de file des parlementaires anti-avortement et plus tard des « Manifs pour tous », a été ministre du premier gouvernement Fillon sous Sarkozy. Ces abolitionnistes n’attaquent pas frontalement le droit à l’avortement, puisqu’ils ne proposent pas une loi qui le re-criminaliserait, mais leurs actions sont tout autant dangereuses puisqu’iels s’acharnent à créer des lois et amendements qui grignotent son droit de toutes parts : reconnaissance du fœtus comme personne, baisse des subventions aux plannings familiaux et des crédits alloués aux hôpitaux en général et aux CIVG (Centre d’Interruption Volontaire de Grossesse) en particulier.

    Comment ne pas mentionner également la déclaration de Marine Le Pen, qui a qualifié l’IVG d’« avortement de confort » (2012), ou celle de sa nièce Marion Maréchal-Le Pen, qui a dénoncé le Planning familial comme étant « un repaire de militantes » (2015), tentant ainsi de justifier les coupes budgétaires dont il était victime.

    #IVG #femmes #féminisme #masculinisme #historicisation

  • Méditerranée : au moins cinq morts dans un sauvetage « entravé »
    http://www.lemarin.fr/secteurs-activites/divers/29843-mediterranee-au-moins-cinq-morts-dans-un-sauvetage-entrave

    Un pneumatique endommagé en train de sombrer, des grappes humaines suspendues à la coque grise des gardes-côtes libyens et au moins cinq morts dont un bébé parmi plus de 120 personnes entassées dans le canot. Cʼest le bilan de lʼopération de sauvetage « entravée » par les gardes-côtes libyens le lundi 6 novembre au matin dans les eaux internationales à 30 milles des côtes nord-africaines, selon lʼONG allemande Sea Watch.
    À la demande du MRCC de Rome, le Sea-Watch 3 est arrivé sur zone « à peu près en même temps que les gardes-côtes libyens » et a commencé à « embarquer les personnes en détresse ». Les Libyens ont alors « pris des personnes depuis le pneumatique » en détresse, les « battant » et les « menaçant » entraînant un mouvement de panique à bord, selon un communiqué de lʼONG. Leur comportement « violent » et « brutal » a entraîné « au moins cinq morts en Méditerranée centrale », dénonce lʼorganisation.

    Des survivants ramenés en Libye

    Le marin a choisi de ne pas diffuser les vidéos, qui comprennent notamment le massage cardiaque effectué sur un très jeune enfant. « En dépit de ses efforts, lʼéquipe médicale nʼa pas pu réanimer » ce bébé, mais « cinquante-huit personnes sont désormais hors de danger à bord du « Sea-Watch 3 » », a fait savoir lʼONG.
    Les gardes-côtes auraient récupéré de 30 à 50 survivants pour les ramener vers la Libye, pays en proie à une grave crise humanitaire, à de grandes violences et à une situation politique instable.
    Un hélicoptère de la marine italienne est intervenu et lʼaviso Premier Maître LʼHer a embarqué les corps de quatre adultes avant de les transférer à bord du MV Aquarius en début de soirée à environ 60 milles des côtes libyennes. « Ce nʼest pas le cœur léger » mais pour « rendre leur dignité » aux défunts que le navire affrété par SOS Méditerranée accepte de transporter les corps vers lʼItalie à la demande du MRCC de Rome, a souligné Madeleine Habib, sa coordinatrice des opérations de recherche et sauvetage. La question du transfert des survivants est restée entre les mains des autorités hollandaises – pays du pavillon du Sea-Watch 3 – et libyennes.

  • SOS d’un canin en détresse : #CQFDvivra !
    https://nantes.indymedia.org/articles/39092

    On le sait : les appels à soutien, c’est triste comme un jour sans vin. Et par les temps qui courent, c’est un peu trop tous les jours. Si on en est réduit, contraint et forcé, à cette extrémité, ce n’est pas par plaisir de la jouer lacrymal. Mais parce qu’il y a danger mortel pour le Chien rouge. Car oui : CQFD ne va pas bien. Du tout. paru dans CQFD n°159 (novembre 2017), par l’équipe de CQFD, illustré par Etienne Savoye, illustré par Vincent Croguennec

    #Médias #marseille

  • Appel à soutien du journal CQFD
    SOS d’un canin en détresse

    http://lavoiedujaguar.net/Appel-a-soutien-du-journal-CQFD

    On le sait : les appels à soutien, c’est triste comme un jour sans vin. Et par les temps qui courent, c’est un peu trop tous les jours. Si on en est réduit, contraint et forcé, à cette extrémité, ce n’est pas par plaisir de la jouer lacrymal. Mais parce qu’il y a danger mortel pour le Chien rouge. Car oui : CQFD ne va pas bien. Du tout.

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    #presse #critique_sociale #appel

  • Sur la route des Alpes (1/2) : à Briançon, des montagnards solidaires des migrants

    Depuis le blocage de la vallée de la Roya, ils sont de plus en plus nombreux à emprunter la route des #Alpes. Dans le Briançonnais, plus de 1 000 migrants ont été accueillis par des bénévoles depuis fin juillet 2017. Devant l’absence de réaction des pouvoirs publics, les habitants s’inquiètent des drames que risque de provoquer l’hiver. Et s’organisent, comme avant eux ceux de la vallée de la Roya, pour accueillir au mieux les arrivants, majoritairement africains.

    Un appel dans la nuit. Il est 22 heures, les étoiles brillent dans l’air froid du ciel de Briançon (Hautes-Alpes). Sylvie*, une bénévole, regarde fixement son portable sans décrocher. « Je me sens mal, c’est un numéro italien », dit-elle. La jeune femme finit par rappeler. Ce sont deux migrants mineurs qui se sont perdus dans la montagne en tentant de passer la frontière franco-italienne. Ils n’ont pas mangé depuis plusieurs jours, se disent épuisés et le plus jeune ne peut plus marcher. En cette mi-octobre 2017, la température doit flirter avec le zéro là-haut au col de l’Échelle (1 746 mètres), la route des migrants venant d’Italie.

    Sylvie sait qu’elle ne peut pas légalement aller les chercher en voiture, même s’ils sont déjà passés côté français. La semaine précédente, deux militants ont été retenus 48 heures en garde à vue au poste de la police aux frontières (PAF) de Montgenèvre pour avoir fait monter dans leur voiture trois étrangers en situation irrégulière dans la vallée de la Clarée. Selon le procureur de la République de Gap, Raphaël Balland, l’enquête les concernant se poursuit « dans l’objectif de savoir si les actes reprochés à ces deux personnes peuvent bénéficier ou pas de l’immunité humanitaire ». Lors d’une manifestation organisée au col de l’Échelle le 23 septembre, les gendarmes avaient contrôlé les véhicules et leurs occupants un par un. Depuis, les militants pensent être fichés.

    « De toute façon, quand on arrive, ils ont trop peur et se cachent », dit Sylvie. La jeune bénévole finit par trouver une maison amie pour les héberger à Névache, première étape française dans les Alpes. Mais le portable des deux jeunes ne répond plus. Ils n’ont sans doute plus de réseau.

    Depuis fin juillet 2017, plus d’un millier de migrants, majoritairement mineurs et originaires de pays d’Afrique de l’Ouest, ont été accueillis par un réseau de bénévoles à Briançon. Depuis le blocage de la vallée de la Roya, ils sont de plus en plus nombreux à emprunter la route des Alpes. Débarquant en Sicile, ces jeunes hommes – les femmes sont rares – remontent l’Italie en train par Milan et Turin jusqu’à Bardonecchia, la petite station de sports d’hiver frontalière. Il faut ensuite gravir la pente escarpée montant au col de l’Échelle, en évitant la route surveillée par les gendarmes et militaires français.

    Dans la vallée de la Clarée, en montant au col, on croise deux jeeps de l’armée, ainsi que des réservistes de la gendarmerie qui contrôlent chaque véhicule. Selon le procureur de Gap, une quinzaine de passeurs ont été interpellés depuis le début de l’année à la frontière. La plupart ont été condamnés en comparution immédiate à un minimum de six mois d’emprisonnement, avec mandat de dépôt.

    De nuit, sans lumière, ni plan, le trajet s’avère dangereux. Dans la nuit du 19 août 2017, deux Guinéens ont chuté dans un ravin en s’enfuyant à la vue des gendarmes cachés dans un tunnel. Secouru par les CRS de montagne, l’un des migrants, gravement blessé, est toujours hospitalisé à Grenoble. Selon le procureur Raphaël Balland, l’homme, entendu sur son lit d’hôpital le 3 octobre par les gendarmes, serait désormais « hors de danger ». L’enquête sur les circonstances de cette chute, confiée à la section de recherches de la gendarmerie de Marseille, conjointement avec la brigade des recherches de Briançon, a été classée sans suite pour « absence d’infraction » le 13 octobre (lire son communiqué de presse sous l’onglet Prolonger). Mais pour Michel Rousseau, de l’association Tous migrants, « la politique de l’État est illégale et criminogène ». « Peu importe que les gendarmes leur aient couru après ou pas, dit le retraité briançonnais. Par leur simple présence à un endroit aussi dangereux, ils les incitent à prendre plus de risques. »

    Dans leur appartement, l’ancien syndicaliste mécanicien et sa femme hébergent depuis des mois plusieurs migrants, dont Mussah, 16 ans, le rescapé. Plus chanceux que son compagnon de route, il s’en est tiré avec de multiples contusions et de forts maux de tête. Sous son bonnet rouge, le jeune homme montre les cicatrices de sa chute. Un camarade de Côte d’Ivoire assure la traduction de sa langue natale, le malinké, en français.

    « Nous sommes partis vers 23 heures de la gare de Bardonecchia. Nous étions trois, raconte Mussah. Nous ne connaissions pas la route. Nous avons vu des lumières de voitures. Nous avons pris la rivière et nous sommes cachés dans la brousse pendant deux jours. Nous avions des biscuits et de l’eau. Puis nous avons monté les montagnes la nuit. » Il pleure en poursuivant son récit. « Dans un tunnel, nous avons vu des gendarmes. Il n’y avait pas de lumière. Nous ne nous y attendions pas. Je me suis échappé, et je suis tombé. Après, je ne me souviens plus. » « Quand ils sont entrés dans le tunnel, les gendarmes ont allumé leurs lampes torches. Ça les a éblouis et paniqués », complète Michel Rousseau. Sans l’accueil des bénévoles, Mussah se serait retrouvé à la rue à sa sortie de l’hôpital, le département des Hautes-Alpes, chargé de la protection des mineurs non accompagnés, l’ayant décrété majeur.

    « Dans notre immeuble maintenant tout le monde est complice, car ce ne sont plus des migrants anonymes, sur lesquels on peut plaquer une propagande raciste, mais des personnes », dit en souriant Michel Rousseau. Il en est persuadé : « Le droit, pour qu’il s’incarne, il faut le faire vivre. L’hospitalité, ce n’est pas mettre des gens dans des camps. »

    À la gare de Bardonecchia, le lendemain, on tombe sur les deux jeunes Guinéens qui se sont perdus la veille et ont appelé Éva. Allongés sur le sol près du radiateur, ils essaient de se réchauffer. « Des militaires nous ont arrêtés à 1 heure du matin et transférés à la police, puis les policiers nous ont ramenés à la frontière et nous avons marché jusqu’à la gare, qui était fermée », explique Amadou, 17 ans, qui dit être malade. Son camarade sort un refus d’entrée délivré la nuit même par un policier, qui n’a pas réagi à sa date de naissance (en mars 2003, ce qui en fait un mineur, et ce qui, selon la loi française et les conventions internationales, oblige l’État à le protéger).

    Amadou veut rejoindre son frère, qui « travaille à Paris et a deux enfants ». Il montre les cals sur ses mains : « En Italie, on a travaillé pour donner à manger aux moutons, 20 euros par jour, de 7 heures à 20 heures. » Après un café, nous repartons côté français en les laissant devant la gare dans le soleil matinal, l’air déboussolé. « Sinon, on se met dans l’illégalité, soupire Alain, un bénévole de 63 ans qui nous accompagne. C’est dur, mais ils réussiront à passer de toute façon. »

    L’hiver dernier, avec plusieurs guides et professionnels de la montagne, ce retraité a organisé des rondes discrètes en raquettes au col de l’Échelle pour secourir des migrants. « On disait aux gendarmes qu’on faisait des balades aux loups, se souvient-il en riant. On partait le soir avec des sacs de 15 kilos remplis de gants, polaires, nourriture. Et on se postait en haut avec les jumelles et un réchaud. L’hiver, il y a deux mètres de neige, ça descend en dessous de 20 degrés. On ne peut pas laisser des gens en montagne avec des chaussures en plastique pourries. » Ces maraudes ont, selon lui, permis de sauver 24 personnes, dont 4 qui « n’auraient pas pu passer une heure de plus dehors ». « La plupart partent sans eau, ni nourriture. Ils sont déshydratés et gelés », dit-il.

    Alain pointe les couloirs d’avalanche sur le versant menant vers l’Italie. « Ici, on est dans un milieu particulier, dit-il. Ce qu’on voudrait faire comprendre au préfet, c’est que si les forces de l’ordre continuent à bloquer ici cet hiver, les migrants vont emprunter des itinéraires encore plus dangereux et on va retrouver des cadavres au printemps. » Au sein de la vallée de la Clarée, Alain estime que « 80 % » des habitants ont déjà hébergé un migrant. Dans ce milieu montagnard, tout le monde se connaît et les solidarités vont plus loin. « Ici, on est dans la désobéissance civile, avance Michel Rousseau. Si les migrants sont si nombreux à passer, c’est que des gendarmes ferment les yeux. »
    « Ceux qui arrivent ici sont les survivants »

    Mi-juillet, devant l’afflux de migrants, les militants ont obtenu la mise à disposition à Briançon d’une ancienne caserne de CRS par la Communauté de communes du Briançonnais. Le contrat a été signé pour 16 lits, mais le nombre de personnes accueillies est monté jusqu’à 120 cet été. Depuis le 26 juillet, 1 099 migrants y ont dormi, dont 62 % de mineurs, selon les statistiques de l’association CRS (Coordination réfugiés solidaires) créée pour gérer le lieu. Ils viennent majoritairement de Guinée Conakry (57 %), puis de Côte d’Ivoire (18 %), du Mali (6 %), du Sénégal (4 %) et du Cameroun (3 %). Certains arrivent à la CRS, orientés par des policiers ou l’hôpital.

    En ce lundi d’octobre, ils sont 77 migrants. Il n’y a qu’un WC. On enjambe les matelas où se reposent des hommes arrivés épuisés au petit matin. « Ceux qui arrivent ici sont les survivants, ceux qui ne sont pas morts en chemin, dit Jacky, 64 ans, membre de Tous migrants. Ils ont tous connu la Libye, la torture, les rançons. Certains arrivent avec une balle dans le pied. Là-bas, on apprend aux enfants à tirer sur les Noirs. Et on les reçoit comme dans un squat. Des fois, on leur fait la morale, car il faut qu’ils libèrent un lit pour les nouveaux. On a honte. »

    Mais pour ces « survivants », la CRS représente une halte bienveillante, souvent la première depuis leur départ. Après l’enfer de la Libye, « ici, c’est le paradis », intervient spontanément Pierre-Bertrand, un Camerounais malade. « La France est un pays humanitaire, dit-il. Je n’ai jamais vu des gens si accueillants. Ils m’ont tout de suite emmené à l’hôpital. Ils sacrifient les obligations de leurs propres familles pour s’occuper de gens qu’ils ne connaissent même pas. »

    Le jeune homme, informaticien, dit avoir fui son pays après avoir été violé puis menacé de mort par son oncle, « une autorité » dans la toute-puissante armée camerounaise. Comme lui, beaucoup de jeunes gens partent à la suite du décès de leur père, à cause de problèmes familiaux ou d’un avenir bouché.

    Dénoncé par son passeur à son arrivée en Libye, Pierre-Bertrand a passé une semaine dans les geôles libyennes, avant d’être libéré contre une rançon de 400 000 francs CFA. « On est accroupis, tous serrés les uns contre les autres, sans pouvoir dormir, dit Pierre-Bertrand. On vous donne juste un gobelet de semoule et un peu d’eau. Il y a des maladies, la gale. Le chef de la prison vous bastonne. Ça te fait mettre la pression à tes proches pour payer. »

    Avant de monter dans un zodiac début juin, cet homme, chrétien, a fait sa « dernière prière ». « Les souffrances étaient telles, que vivre était égal à la mort, dit-il. J’ai dit à Dieu : “Si tu trouves que tu peux me faire miséricorde, sauve-moi, mais je suis prêt à mourir.” » On ne sait pas si « Dieu » y est pour quelque chose, mais un navire de l’ONG SOS-Méditerranée a, selon lui, secouru les 158 passagers de son zodiac percé. « Ils ont secouru une dizaine de zodiacs, dit le miraculé. À notre arrivée à Catane (Sicile), nous étions 1 700 personnes dans le grand bateau. » Il a passé trois mois dans les camps du sud de l’Italie, sans aucun soin. « Ils se contentent de prendre vos empreintes, de vous enregistrer et vous donnent des effervescents », dit-il, en désapprouvant de la tête. Grâce au smartphone, qui permet une circulation rapide des informations entre migrants, Pierre-Bertrand a trouvé une association à Limoges qui pourrait l’aider, le temps de faire sa demande d’asile. Il s’apprête à reprendre la route dès le lendemain.

    Gérard Fromm, le maire socialiste de Briançon, a également mis à disposition une « maisonnette » où se sont installés Badra*, 25 ans, originaire de Côte d’Ivoire, ainsi que cinq jeunes qui ont demandé l’asile. Arrivé à Briançon le 7 juin 2017, ce jeune homme, vêtu de blanc et à la silhouette longiligne, fait partie des anciens. « Je suis parti contre mon gré, sans savoir où j’allais, dit Badra. Puis, vu que je parle français, que la France nous a colonisés, je me suis dit que je pouvais faire ici une nouvelle vie, oublier ce que j’ai vécu. »

    Grâce au réseau jésuite Welcome, il a été hébergé dans plusieurs familles à Montpellier, Grenoble et Forcalquier, avant de revenir à Briançon, où il se sent bien. Badra a été bénévole lors du passage du Tour de France en juillet, puis à la Croix-Rouge, et il vient de s’engager dans les scouts. Le jeune homme, souriant, se ferme quand on lui demande les raisons de son départ. « Je ne veux pas en parler, dit-il. Ici, la population est très accueillante et je veux m’intégrer. Je veux aider les enfants, leur donner ce que je n’ai pas eu dans mon pays. »

    Après quelques jours de répit, la plupart des hommes adultes repartent, soit pour être hébergés dans des familles du Briançonnais, soit pour prendre le bus de nuit pour Paris. Au plus fort des arrivées cet été, les militants estiment qu’une centaine de familles ont hébergé bénévolement des migrants. « Comme ils viennent de pays profondément corrompus mais pas considérés en guerre, ils n’ont quasiment aucune chance d’obtenir l’asile », dit Alain. Les plus jeunes sont emmenés par les bénévoles à Gap, où le Conseil départemental des Hautes-Alpes les enregistre. S’ils sont reconnus mineurs après évaluation, ils sont censés être mis à l’abri et scolarisés dans un département français.

    Dans l’ancien garage des CRS qui sert de réfectoire, deux migrants regardent un film. Sur le balcon où sèche le linge, Nema, un Guinéen de 15 ans, arrivé la veille, a installé un salon de coiffure éphémère. « J’ai l’habitude de couper les cheveux de mes petits frères, mais moi je veux étudier la biologie en France », dit-il, timidement.

    Trois fois par jour, des bénévoles viennent préparer le repas avec les migrants, à partir de dons et de fins de marché. « Cet été, beaucoup de gens ont donné de leur potager aussi », explique une bénévole. Un vestiaire permet à chacun de trouver des habits chauds à sa taille. « Ce matin, une infirmière est venue faire la literie avant son service à l’hôpital, raconte Jacky. Il y a une institutrice qui nettoie régulièrement les douches et les toilettes. On n’a pas de gardiennage la nuit. Il se passe des miracles tous les jours. »

    Mais après trois mois à assurer l’urgence à la place des pouvoirs publics, les bénévoles briançonnais sont usés. Ils ont calculé qu’il faudrait environ 8 emplois à temps plein pour faire tourner le lieu. « Certains bénévoles sont au bout de rouleau et il y a des engueulades, reconnaît Jacky. Ils ont l’impression de mal faire. » Mi-octobre, l’association Tous migrants a alerté les pouvoirs publics et les grandes ONG pour obtenir de l’aide (lire leur lettre qui résume bien la situation). « Il faudrait des élus courageux comme à Riace (en Calabre), où la mairie a retapé des maisons inoccupées pour les réfugiés », dit Jacky.
    Chez Marcel, on a démarré le poêle

    Sur les hauteurs de Briançon, des jeunes ont investi fin juillet une maison à l’abandon, qui sert de soupape à la CRS. Le squat a été baptisé « Chez Marcel », en hommage à l’ancien propriétaire, un riche agriculteur décédé après un mariage rocambolesque. « Nous voulions faire autre chose que de l’accueil d’urgence, que les personnes puissent se poser », explique Éva, revenue au pays où habitent ses parents.

    Sofiane, un « nomade de passage », tient à rappeler les enjeux politiques. « Ce sont les politiques des États européens qui créent ces morts, dit le jeune homme, une capuche sur la tête. En militarisant les frontières et en externalisant le tri à la Turquie et aux États africains, ils obligent les migrants à prendre de plus en plus de risques. Alors qu’accueillir les 150 000 personnes arrivées par la Méditerranée en 2016, ce n’est rien pour l’Europe ! »

    La baraque est presque prête pour l’hiver. Le poêle à bois fonctionne depuis la veille et l’isolation, réalisée avec des bottes de paille, paraît efficace. Sekouba, un menuisier de 27 ans originaire de Guinée, a aidé à installer les panneaux solaires devant la maison, ainsi que des étagères. À l’étage et au rez-de chaussée, on compte une vingtaine de couchages. Des tentures assurent un semblant d’intimité. Quand ils ne jouent pas aux cartes, bénévoles et migrants se rassemblent autour du punching-ball et du coin lecture.

    Entre deux contrats saisonniers, Camille, auxiliaire puéricultrice de formation, est venue donner un coup de main. « Ça a commencé quand j’ai rencontré quatre personnes dans la vallée de la Clarée, alors que je me promenais, dit-elle en souriant. Je les ai emmenées à la CRS et voilà, ça fait un mois que je vis chez Marcel. »

    En plus des dons, les squatteurs vivent de récupération. Ce soir, sur le parking d’un supermarché, la pêche est bonne : carottes râpées, tartes aux poireaux, nems et même du saumon à peine périmé. Il suffit d’avoir le bras suffisamment long pour atteindre le fond des poubelles.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/021117/sur-la-route-des-alpes-12-briancon-des-montagnards-solidaires-des-migrants
    #alternatives #Roya #Briançon #parcours_migratoires #itinéraires_migratoires #asile #migrations #réfugiés #solidarité #col_de_l'Echelle #vallée_de_la_Clarée #Italie #France #désobéissance_civile #délit_de_solidarité #Bardonecchia #Bardonnèche #frontières

    • Quand les mineurs africains sont abandonnés dans la #montagne

      Depuis le début de l’année, près de 1 500 réfugiés sont arrivés dans le Briançonnais en provenance d’Italie, en passant par les cols aux alentours. Plus de la moitié sont des mineurs. Reportage de Raphaël Krafft avec des enfants qui se sont vus refuser l’entrée sur le territoire français.


      https://www.franceculture.fr/emissions/le-magazine-de-la-redaction/quand-les-mineurs-africains-sont-abandonnes-dans-la-montagne

      #route_des_alpes #Névache

      François Sureau dans le débat après le reportage (à partir de 42’20) :

      « Il y a le choc de deux milieux. Il y a le milieu de la montagne. Le milieu de la montagne c’est celui où (…) la loi des hommes n’existe pas vraiment au sens du code. Il y a la loi du courage, il y a la loi du danger physique. Il y a la loi de la dureté des conditions… des dieux mystérieux qui vivent sur la montagne et qui peuvent provoquer le malheur et la mort. (…) C’est l’arrière-monde de la politique. Ce qui m’a frappé dans ce reportage, c’est que d’un côté vous avez des gens assez simples, qui vous parlent de la dureté de la traversée de la montagne quand on est jeune et on vient de pays qui ne vous ont pas habitués à la dureté de la montagne, du froid, du risque de mort, des mineurs, des enfants dont il faut s’occuper, la non-assistance à personne en danger et même du fait d’aider son prochain. Et puis vous avez, de l’autre, le langage du préfet : le flux migratoire, la pression, l’abstractisation, la réification de tout. Et le langage du gendarme, qui est le langage du code de procédure pénale. Et le choc entre ces deux mondes produit un effet qui en dit long sur notre civilisation. Peut-être faut-il qu’il y ait plus de droits dans la montagne, mais peut-être aussi qu’il faut plus d’humanité dans le droit. »

      –---

      En 2021, Raphaël Krafft sort le #livre :
      LES ENFANTS DE LA CLARÉE


      https://seenthis.net/messages/904096

    • Au col de l’Echelle, des jeunes migrants piégés par le froid et renvoyés par la France

      La #vallée_de_la_Clarée, dans les Hautes-Alpes, est le théâtre d’un concentré de crise migratoire. Les migrants qui franchissent le col de l’Echelle sont majoritairement mineurs - un statut qui n’est, selon le milieu associatif, pas pris en compte par les autorités

      Les premières neiges étaient tombées en début de semaine. Samedi soir dernier, sur la route du col de l’Echelle, à 1762 mètres d’altitude, non loin de la frontière franco-italienne, Alain est inquiet. Il fait froid et le vent souffle à travers les mélèzes. La lune n’est pas encore sortie mais malgré l’obscurité, il voit clair.

      ll est 23 heures et il n’est pas seul. Grands phares allumés, plusieurs véhicules de la gendarmerie arpentent la même route que lui. Alain, accompagnateur en montagne à la retraite, sait que ces cimes, aussi belles soient-elles, cachent des pièges. Mais eux l’ignorent.

      Un bruit. Le Briançonnais allume sa lampe torche. Derrière un tronc, un sac rouge, puis un visage. La silhouette ne bouge pas. « N’ayez pas peur », lance Alain. Ils s’étaient assis dos à la route, derrière un tronc. L’un après l’autre, ils sortent de l’obscurité. Ils sont quatre. Ils se taisent. L’un d’eux porte une doudoune, les autres se contentent d’une veste qu’ils ont boutonnée jusqu’au cou. A leurs pieds, des baskets. « Avez-vous froid ? » Oui. « Soif ? Faim ? » Oui. « Quel âge avez-vous ? » Le garçon en doudoune répond : « 16 ans, Monsieur. Je suis né le 10 octobre 2001. » Ses trois compagnons font de même. Tous affirment avoir moins de 18 ans et acceptent le thé chaud et les galettes de chocolat que leur tend le retraité.
      Une nouvelle route

      C’est un phénomène qui secoue la vallée de la Clarée depuis une année. En 2017, environ 1600 migrants ont franchi le col de l’Echelle. Parmi eux, 900 étaient mineurs. Majoritairement originaires d’Afrique de l’Ouest, ces personnes suivent une route transmise par le bouche-à-oreille. La perméabilité des passages par le sud de la France étant de plus en plus réduite, leur itinéraire s’est déplacé vers le nord. De Turin, un train les dépose à la gare de Bardonecchia. A pied ensuite, ils traversent la frontière italo-française et partent à l’assaut du col. De jour comme de nuit.

      Les pas d’Alain crissent dans la neige. Les quatre jeunes se sont réunis autour de lui. Pas un bruit, si ce n’est le vent. Si le retraité vient leur porter secours, c’est parce qu’il veut éviter le pire. « Il est pour nous impossible d’imaginer que des personnes sont en train de mourir de froid à côté de chez nous. C’est notre devoir de leur venir en aide. » L’hiver dernier, un migrant a dû se faire amputer des deux pieds à la suite de gelures subies lors de son passage. A cette époque, les personnes qui passaient le col se comptaient, par jour, sur les doigts d’une main. « Depuis, leur nombre n’a pas cessé de croître », se souvient le retraité. Un dimanche d’octobre, 50 migrants ont franchi le col de l’Echelle.

      Les habitants de la région sont choqués. D’autant plus qu’à l’afflux migratoire est venue s’ajouter une présence accrue des forces de l’ordre. La police aux frontières a été renforcée par la mobilisation de la gendarmerie nationale. Certains disent aussi avoir vu l’armée effectuer des rondes. L’hospitalité alpine n’est pas un mythe. Dans les villages alentour, on se mobilise. Rares sont, pour l’instant, les voix qui s’opposent fermement à la venue des migrants.

      La quiétude n’est plus

      Tous sont toutefois conscients d’une chose : la quiétude de la vallée de la Clarée fait partie du passé. Il flotte dans les airs comme un parfum hostile. Sur les routes qui serpentent depuis les cols de l’Echelle et de Montgenèvre vers Briançon, les automobilistes voient quotidiennement leur chemin barré par des contrôles de la gendarmerie. Au fil des semaines, ceux-ci se sont intensifiés. Autant à l’encontre des migrants qu’à celle des habitants leur venant en aide. Arrestations, amendes et gardes à vue s’en sont suivies. Dans le milieu associatif, on dénonce une chasse à l’homme, ainsi qu’une politique dissuasive en matière d’assistance à personne en danger.

      Névache est un village qui s’étend tout en longueur au pied du col de l’Echelle. La petite bourgade tranquille, principalement dédiée aux sports de montagne, est le premier patelin français sur lequel tombent les migrants après avoir franchi le col. Bernard Liger y vit depuis des décennies, au rez-de-chaussée d’une maison rurale fermée par une lourde porte en bois massif.

      Pour lui, vétéran de la guerre d’Algérie, décoré de la Légion d’honneur, la question ne se pose pas. « Nous avons l’obligation de venir en aide à ces personnes. Par ces froids, à ces altitudes, elles sont purement et simplement en danger », assène-t-il. Craignent-ils les perquisitions policières renforcées par la nouvelle loi sur la sécurité, qui a remplacé l’état d’urgence ? Appréhendent-ils la peine de 5 ans d’emprisonnement dont est passible l’aide à l’entrée et à la circulation de personnes en situation irrégulière ? « Vous savez, il existe, à l’armée comme ailleurs, une clause de conscience », répond l’ancien officier, laconique.

      Il est assis à la table de sa cuisine. Derrière lui, le cassoulet prend des teintes calcinées, mais la fumée qui émane du four ne le perturbe en aucun cas. L’homme s’appuie sur sa canne. Il fut chef de bataillon et a commandé une compagnie de chasseurs alpins. Les combats, il connaît. Et avec cela, les victoires et les défaites. Lui-même engagé dans l’aide aux migrants, il a constaté depuis quelques jours une présence de deux véhicules de la gendarmerie aux abords de sa maison. « Ce jeu du chat et de la souris avec les policiers ne peut pas durer éternellement. »
      La dernière étape d’un long périple

      « Il y a beaucoup de fraîcheur ici », relève à sa manière l’un des quatre migrants. Il s’appelle Lansana et vient de Guinée-Conakry. Avant d’arriver sur cette route qui sert de piste de ski de fond en hiver, il a traversé un continent, une mer et une péninsule. Les geôles libyennes et les tortures, tout comme la Méditerranée et les embarcations pneumatiques précaires, sont des épreuves qu’il a endurées.
      Ses trois compagnons aussi. S’ils souhaitent venir en France, c’est pour échapper à la rue italienne. « Nous avons des connaissances en France et nous parlons français », expliquent-ils en surveillant la route. A tout instant, un véhicule de la gendarmerie peut les intercepter. « Systématiquement, ils sont renvoyés en Italie », explique Alain.

      L’homme est conscient qu’il est dans une situation délicate. Car la nuance entre le statut de passeur et celui d’aidant est peu claire pour de simples citoyens. Ce flou juridique plane sur les actions entreprises par les habitants de la région.

      Déjà en 2015, ils avaient eu un avant-goût du contexte migratoire. Lors du démantèlement de Calais, la mairie de Briançon s’était portée volontaire pour accueillir une partie des migrants en provenance du nord de la France. Mais très vite, la cité des Hautes-Alpes s’est sentie débordée. Aujourd’hui, la CRS (pour Coordination Refuge Solidaire), un espace mis à disposition par la communauté de commune, ainsi que Chez Marcel, une maison occupée par un collectif, font partie de ces quelques lieux qui offrent un refuge aux migrants.
      Des bénévoles débordés

      Dans le garage qui sert de salle à manger aux migrants, un bénévole de la CRS précise : « Briançon n’est qu’une ville de passage. Les administrations se trouvent dans d’autres villes. Ici, nous nous chargeons de leur porter secours. Lorsqu’ils arrivent de la montagne, ils sont épuisés, traumatisés et parfois blessés ». A l’image de ses collègues, il est débordé. La place manque. Prévu pour abriter 15 personnes, l’espace de la CRS accueillait, ce jour-là, 86 exilés.

      Les parquets de la maison sont couverts de matelas, les douches semblent tourner en permanence et les retraitées bénévoles s’affairent à tous les étages. « C’est devenu une machine, nous n’avons même plus le temps de créer des contacts avec les migrants. Parfois, c’est frustrant », poursuit le jeune homme. Mais dans le chaos qu’il décrit, il tient à préciser une chose : « Le plus gros problème auquel nous devons faire face, c’est celui des mineurs. »

      « Lors des contrôles, le refus d’entrée est systématique. On ne considère ni leur âge ni leur demande d’asile. C’est parfaitement illégal et criminogène », dénonce Michel Rousseau, trésorier de l’association Tous Migrants. En 2015, la photo du petit Aylan mort noyé sur une plage turque avait créé un mouvement d’indignation à Briançon. « Nous n’arrivions pas à nous reconnaître dans la politique européenne en matière de migration. Que la Méditerranée se transforme en cimetière nous est insupportable », déclare-t-il. « Nous ne voulons pas que nos montagnes deviennent une deuxième Méditerranée. La réaction du préfet qui veut refouler ces gens nous choque. Nous avons décidé d’organiser ce que l’Etat ne fait pas : les accueillir. »
      Discours présidentiel

      Les habitants des Hautes-Alpes se sont-ils toujours autant intéressés à la politique ? Non, tant les lois que les décisions de Paris ont dû être apprises sur le tas. Et le 28 juillet, ils se sont sentis particulièrement concernés par le discours d’Emmanuel Macron prononcé dans la salle de cérémonie de la mairie d’Orléans. « Je ne veux plus d’ici la fin de l’année avoir des hommes et des femmes dans les rues, dans les bois. Je veux partout des hébergements d’urgence », disait le président. Mais entre ses paroles et les actes, il y a un monde, dénonce Michel Rousseau : « Le préfet et le procureur ont décidé de militariser la frontière. Cela oblige les migrants à effectuer le passage plusieurs fois. Ils doivent se cacher et passer la nuit en montagne. »

      L’hiver arrivant, ce dernier est lui aussi inquiet. Cet été, à la suite d’une poursuite avec la gendarmerie, deux migrants ont sauté dans un ravin. L’un d’eux est encore hospitalisé. « La simple présence des gendarmes sur leur col incite les exilés à prendre des risques. C’est un miracle qu’il n’y ait pas eu plus d’accidents », souffle le militant.

      A ses yeux, la Convention de Dublin, qui prévoit que les demandes d’asile soient examinées dans le premier pays de débarquement ou d’arrivée, est mal appliquée. Quant à la prise en charge des mineurs, elle ne serait, selon lui, pas respectée. « J’ai vécu Mai 68. A l’époque, on se battait pour avoir des lois. Aujourd’hui, on se bat pour ne pas perdre nos droits », lâche-t-il.

      Joël Giraud, député de la 2e circonscription des Hautes-Alpes et rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale et allié de La République en marche, partage son avis. Il a lui-même eu vent de la situation à la frontière et n’y est pas indifférent. Il affirme avoir sollicité un rendez-vous auprès d’Emmanuel Macron : « Nous espérons, en accord avec la ministre de la Culture Françoise Nyssen, qui a un chalet dans la vallée, que le président se réveillera. Quant au ministre de l’Intérieur, il doit se ressaisir. J’ai l’impression que la France fait le dos rond en attendant que ça passe. Nous sommes dans une situation de non-droit. Quant aux mineurs, les départements ont l’obligation de les accueillir. »
      « Cette situation est intenable »

      Retour au col de l’Echelle. Alain a appelé un ami en renfort. Tous deux veulent emmener les quatre mineurs dans le centre d’accueil de Briançon. Ils embarquent et descendent dans la vallée. Pas de temps pour l’hésitation. Que risquent-ils ? Au volant, le camarade se livre : « Peu importent nos risques, cette situation est intenable. Nous vivons dans un équilibre instable. Si nous ne les prenons pas en charge, ces jeunes sont à la rue. »

      A l’entrée du village de Val-des-Prés, la route se resserre entre les habitations. La gendarmerie barre la route. « Papiers d’identité », somme le représentant des forces de l’ordre. L’opération est interrompue. Les jeunes migrants doivent monter dans la voiture des gendarmes. Quant à Alain et son compagnon, ils retourneront chez eux avec une convocation, le lendemain, au poste. Avant de se séparer, les deux Français demandent les noms des quatre jeunes rencontrés au col. Ils s’appellent Rosé, Thierno, Mamadou et Lansana.

      Dans la montagne, sur la route entre le col de l’Echelle et la station de ski italienne de Bardonecchia, une borne de pierre marque la frontière. C’est ici que les gendarmes les ont laissés après l’interpellation, à une heure du matin dimanche, leur indiquant l’Italie et les invitant à y retourner.
      Majeur ou mineur ?

      L’une des grandes difficultés, pour les forces policières et militaires déployées autour de la frontière franco-italienne, est de déterminer, souvent dans l’urgence, si les migrants auxquels ils font face ont plus ou moins de 18 ans. C’est un critère déterminant dans le traitement qu’ils sont censés leur accorder. Les explications de Déborah Roilette, avocate et spécialiste des questions migratoires :

      ■ L’âge d’un mineur isolé étranger est déterminé par sa propre déclaration et la présentation d’un acte d’état civil.

      ■ En cas de doute, ou en l’absence de document d’état civil, une expertise médico-légale peut être ordonnée par une autorité judiciaire – un juge des enfants ou le procureur de la République. Mais à la seule condition que l’étranger en question donne son accord.

      ■ Un mineur migrant non accompagné appréhendé par la police des frontières est d’abord placé en zone d’attente et y est maintenu pendant 20 jours maximum. Il peut y déposer une demande d’asile. Au moment de son placement en zone d’attente, un administrateur ad hoc doit lui être désigné sans délai. En présence de celui-ci, une audition est menée par un officier de protection de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Si cette assistance ou la demande d’asile est refusée, un recours est possible devant un tribunal administratif. Par la suite, le mineur sortant de la zone d’attente ou le demandeur d’asile est pris en charge par un centre d’accueil.

      ■ Selon la Convention internationale des droits de l’enfant, toute décision impliquant un mineur devrait toujours être prise suivant son intérêt supérieur. Le respect de ce principe implique des garanties envers le mineur migrant.

      ■ S’agissant d’un éventuel renvoi, il est prévu que toute décision à ce sujet doit s’effectuer au profit du mineur et sur la base d’une assistance par des organismes compétents. Autrement dit, ce retour doit être organisé en collaboration avec les autorités du pays de retour afin de remettre l’enfant soit à un membre de sa famille, soit à un tuteur désigné, soit à une structure d’accueil.

      ■ Le renvoi ou l’expulsion d’un mineur isolé étranger est interdit. De plus, le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoit également que les étrangers (majeurs et mineurs) bénéficient d’une protection de 24 heures contre l’expulsion.

      ■ Ce droit, connu sous le nom de « jour franc », est une garantie essentielle car il permet à l’étranger se présentant aux frontières de prendre contact avec son consulat, un membre de sa famille, un proche, un avocat ou une association, avant d’être refoulé. Dans le cas des mineurs isolés étrangers, cela leur permet également de rencontrer un administrateur ad hoc notamment afin d’évaluer sa situation.

      https://www.letemps.ch/monde/2017/11/17/col-lechelle-jeunes-migrants-pieges-froid-renvoyes-france

    • France Culture | Quand les mineurs africains sont abandonnés dans la montagne

      Reconduite illégale à la frontière de mineurs non accompagnés, procédure pénale à l’encontre de citoyens estimant de leur devoir d’humanité de sauver ces enfants des dangers de la montagne et de la mort, le reportage de Raphaël Krafft diffusé vendredi 17 novembre 2017 dans Le Magazine de la rédaction donne à voir les zones d’ombres de la politique aux frontières de la France, mais plus largement de l’Europe.

      https://asile.ch/2017/11/18/france-culture-mineurs-africains-abandonnes-montagne-2

      –-> avec des liens vers reportages et documentation

    • Vu sur Twitter, avec ce commentaire de @cmoreldarleux :

      "Le vrai « esprit de cordée ». Guides sans frontières, accompagnateurs en montagne, moniteurs indépendants écrivent à @EmmanuelMacron et se mobilisent le 17 décembre en soutien aux migrants en péril qui traversent les Alpes."

    • #Col_de_l'Échelle : 5 migrants en perdition après avoir tenté la traversée de la frontière

      Malgré la neige, malgré le froid, ils ont tenté de franchir le col de l’Échelle depuis l’Italie vers la France. Dans la nuit de dimanche à lundi, ce sont cinq migrants qui ont été secourus.

      Deux d’entre eux, les plus gravement touchés, présentaient des engelures aux membres. L’un après avoir perdu ses chaussures dans la neige et l’autre étant sans gants, rapporte le journal Corriere Torino.


      http://www.ledauphine.com/hautes-alpes/2017/12/12/malgre-la-neige-ils-ont-tente-la-traversee-de-la-frontiere-faits-divers-

    • Migrants dans les Hautes-Alpes : “Ne pas trouver des cadavres à la fonte des neiges...”

      Depuis un an, bravant les forces de l’ordre, des habitants du Briançonnais se mobilisent pour apporter soutien et assistance aux centaines de migrants qui franchissent le col de l’Echelle. Entre révolte et découragement.


      http://www.telerama.fr/monde/migrants-dans-les-hautes-alpes-ne-pas-trouver-des-cadavres-a-la-fonte-des-n

    • SOS Alpes solidaires, pour « ne pas laisser les migrants mourir dans les cols »

      Ce sont des professionnels de la montagne (des guides, des accompagnateurs, des moniteurs de ski, des pisteurs, des maitres-chiens d’avalanche) qui invitent les élus et les journalistes à « s’encorder » ce dimanche au col de l’Échelle. Objectif : alerter les pouvoirs publics sur les dangers encourus par les migrants au passage des cols, particulièrement en hiver. Sur le modèle de SOS Méditerranée, ils lancent un SOS Alpes solidaires.

      http://www.rue89lyon.fr/2017/12/15/sos-alpes-les-professionnels-de-la-montagne-ne-veulent-pas-laisser-les-mig

    • « C’est pas comme ça qu’on gère une frontière »

      Les migrants qui tentent le passage de la frontière, la forte présence des autorités, des habitants qui s’organisent pour accueillir les réfugiés. La Clarée vit à ce rythme, où le col de l’Échelle est l’objet de toutes les attentions. Tout cela, Cédric Herrou, agriculteur de la vallée de la Roya, entre Alpes-Maritimes et Italie, l’a connu. Un combat qui l’a mené tant en garde à vue que devant le tribunal.

      http://www.ledauphine.com/hautes-alpes/2017/12/16/c-est-pas-comme-ca-qu-on-gere-une-frontiere

    • "#Cordée_solidaire" dans les Hautes-Alpes : plus de 300 personnes ont montré leur soutien aux migrants qui entrent en France par des cols enneigés, au péril de leur vie
      https://www.franceculture.fr/emissions/journal-de-7h/journal-de-7h-lundi-18-decembre-2017

      Transcription d’une partie de l’émission :
      "Pour Pierre Membert (?), qui loue un gîte à Monêtier les Bains, qui est aussi accompagnateur en montagne, aider ces hommes et ces femmes qui bravent tous les dangers de la montagne, c’est comme les empêcher de se noyer : « Il y a quelques années, quand on entendait parler des gens qui étaient en Méditerranée, j’avais encore l’impression que c’était loin, même si ça me touchait énormément. Je me disais ’C’est pas possible que je ne fasse rien’, jusqu’au jour où il y a des gens qui sont arrivés là. Je me suis dit : ’En fait, c’est chez nous’. Je trouve cela inadmissible que des gens qui ont franchi tous ces obstacles sur leur chemin ont une telle réponse sur la frontière française, c’est une réponse assassine »

    • Communiqué de presse – 17 décembre 2017 Etats généraux des migrations et cordée solidaire dans le Briançonnais

      Pour que les Alpes ne soient pas une autre Méditerranée, et parce que l’hospitalité n’est pas seulement un devoir mais une chance, l’Etat doit urgemment changer ses pratiques vis-à-vis des migrants.


      https://alpternatives.org/2017/12/18/communique-de-presse-17-decembre-2017-etats-generaux-des-migrations-e

    • Retours sur la Journée internationale des migrants

      Dans le cadre de la « Journée internationale des migrants » l’association Tous migrants, la Cimade, Le réseau hospitalité, se sont réunis à Briançon pour des premiers états généraux des migrations avant de se retrouver à Paris en Juin 2018. Près de 500 personnes ont répondu à l’invitation dont des personnalités, des élus, mais surtout des citoyens confrontés chaque jour, parce que frontaliers, au simple devoir d’assistance de personnes en danger face à une machine d’état devenue folle.

      Cédric Herrou, agriculteur solidaire, Edwy Plenel auteur du manifeste « Dire nous » sur le devoir d’hospitalité, également Rachid Oujdi, réalisateur d’un documentaire exceptionnel sur les mineurs isolés « J’ai marché jusqu’à vous. Récit d’une jeunesse exilée » étaient notamment présents. Des juristes, des médecins, des élus de France comme d’Italie, ont tenté d’apporter des réponses juridiques, humaines, au travers de différentes tables rondes, aux interrogations parfois désespérées des habitants.

      https://alpternatives.org/2017/12/17/retours-sur-la-journee-internationale-des-migrants

    • Etienne et Moussa : une seule Humanité !

      « Et tandis que la cordée évoluait pour soutenir la cause des migrants, l’un d’eux a bien failli mourir de froid, à quelques centaines de mètres seulement. Une triste ironie qui démontre comme la solidarité est bien une histoire de vie ou de mort. Étienne Trautmann, co-organisateur de l’événement sous l’égide des Citoyens Professionnels de la Montagne Solidaire n’a pas hésité à venir en aide à Moussa, 22 ans, prisonnier des neiges. « Il avait le numéro d’un ami à moi, je ne sais ni comment ni pourquoi, mais ça lui a sauvé la vie. Mon ami m’a appelé pour me prévenir, et j’ai quitté le groupe de la cordée aussitôt pour le chercher dans un couloir d’avalanche. Les migrants empruntent souvent les pentes très raides, parce que la neige est plus dure. » explique-t-il. Étienne a aussitôt appelé le PGHM, prêt à intervenir si un accident était avéré. Et il lui a fallu 1h15 de marche pour trouver le malheureux : » J’ai essayé de suivre des traces, de jumeler, et j’ai enfin entendu une voix faible. Je l’ai trouvé pieds nus, frigorifié, incapable de faire un pas de plus. J’ai rappelé aussitôt le PGHM, qui devait déjà être parti. En deux minutes, ils étaient là, et ils ont été extraordinaires. » explique Étienne avec une émotion perceptible. Le jeune homme, originaire de Guinée Conakry, a été hélitreuillé puis est entré en urgence à l’Hôpital des Escartons, en état d’hypothermie et avec des gelures de niveau 2 au pied gauche. Étienne s’est enquéri de son état toute la journée. Avec humilité, il confiait son sentiment : « Je suis professionnel depuis 25 ans, et je serais incapable de faire ce qu’il a fait. On ne peut pas gravir des montagnes de neige comme ça, encore moins avec des petites baskets. C’est là toute l’alerte qu’on essaie de donner : c’est bien trop dangereux. Comme il m’a dit, c’est son troisième traumatisme, après avoir survécu à la traversée de la Libye, puis à celle de la Méditerranée, il a bien failli mourir dans la neige. Il faut arrêter de jouer au chat et à la souris avec les forces de l’ordre. Ce n’est pas de leurs faits, ils suivent des instructions, mais des vies sont en danger. Aujourd’hui, on est encore passé à côté d’un drame. » »


      https://alpternatives.org/2017/12/18/etienne-et-moussa-une-seule-humanite

    • Accueil des réfugiés. Dans les Alpes, la montagne accouche d’une belle #solidarité

      Depuis une semaine, quinze exilés sont en #grève_de_la_faim à Briançon. Leur but ? Pouvoir déposer leur demande d’asile en France. Ils sont soutenus par une population solidaire et active qui refuse de voir la région devenir un cimetière.

      https://www.humanite.fr/accueil-des-refugies-dans-les-alpes-la-montagne-accouche-dune-belle-solidar
      via @isskein

    • A piedi nudi nel ghiaccio : è sulle Alpi l’ultima rotta dei migranti

      E’ sulle Alpi, al confine tra Francia e Italia, che passa la nuova rotta, dove si è registrato un incremento dei passaggi e dove il gelo è pericoloso quanto le onde del Mediterraneo

      http://www.corriere.it/esteri/17_dicembre_19/a-piedi-nudinel-ghiacciol-ultima-rottadei-migranti-727bdc38-e434-11e7-8530-

      Ormai passano al ritmo di trenta al giorno. Basta il WhatsApp d’uno che ce l’ha fatta, e dai centri d’accoglienza italiani scappano tutti. Non si passa al Brennero? Niente Ventimiglia? La nuova rotta è scalare i varchi del Piemonte e scendere le vallate di là: 693 nel 2015, dieci volte di più nel 2016, erano già 3.500 quest’estate.

      #chiffres #statistiques (mais à contrôler, vu le ton de l’article et du coup le peu de confiance à faire au journaliste qui l’a écrit).
      En effet, juste après cette phrase, il ajoute : "#Alpi_Express." !!!!!! Comme si le fait de traverser les cols enneigés c’était une promenade...
      Tout son article est une comparaison Méditerranée - Alpes, mais c’est inaudible ! Il s’amuse avec les mots, après "Alpi express", voilà #Snow_People (!), quelques mots après, ces mots d’un policier italien :

      «Non è facile bloccarli — ammette un agente di Polizia italiano —, perché non è gente che vuole essere soccorsa, come nel Mediterraneo. Si nascondono, scappano. Senza rendersi conto di rischiare la vita».

      Et puis :

      Tutti sanno d’avere 72 ore per giocarsi l’Europa: o la va, o si ritorna veloci ai centri d’accoglienza che, per la legge italiana, entro tre giorni sono tenuti a riprendersi i fuggiaschi.

      –-> @sinehebdo, dans ce texte le journaliste utilise le mot #fuggiaschi" (= #fugitifs)

      –-> C’est un journaliste italien qui le dit, de personnes qui de l’Italie veulent passer en France… or il dit « tout le monde sait avoir 72 heures pour se ‘jouer l’Europe’ » —> L’Italie n’est plus Europe ?

      Témoignage intéressant des chauffeurs de bus, qui apparemment sont obligés par la police de reconduire à la frontière des migrants non identifiés, sans documents :

      A Briançon, gli autisti dei pullman navetta per Salice d’Ulzio hanno denunciato d’essere stati bloccati dagli agenti e obbligati a caricare gratis i migranti acciuffati: senza identificazione, senza un documento, basta che li riportino al più presto in Italia...

      Mais avec cette réponse d’un chauffeur, qui fait froid au dos :
      « Non vogliamo fare i passeur — dicono —, il nostro contratto non prevede che dobbiamo caricare queste persone. Dov’è la nostra sicurezza ? »
      –-> "Nous ne voulons pas faire les passeurs, notre contrat ne prévoit pas que nous devons prendre ces personnes. Notre sécurité, elle est où ?"... "Notre sécurité" ? Egoisme pur.

      Et pour finir une information fausse : "c’era un gabonese, semiassiderato, sotto un abete." —> la personne secourue dimanche ne venait pas du Gabon, mais de Guinée Conakry.
      Je vous disais, ne pas faire confiance à ce journaliste !

    • Intorno alle 12.15 una nostra squadra di soccorritori ha raggiunto un gruppo di 6 migranti poco sotto il Colle della Scala, #Bardonecchia (TO). Erano visibilmente infreddoliti e male equipaggiati ma a così breve distanza dalla loro meta finale, non hanno voluto tornare indietro. I soccorritori hanno verificato che la progressione successiva avvenisse in sicurezza prima di tornare a valle. #cnsaspiemonte #cnsas

      https://www.facebook.com/cnsas.piemonte/videos/1124844257652229
      #Bardonnèche

  • « Je ne peux pas imaginer laisser mourir des gens sur cette mer qui est la mienne » | Eugénie Barbezat
    https://www.humanite.fr/je-ne-peux-pas-imaginer-laisser-mourir-des-gens-sur-cette-mer-qui-est-la-mi

    Malgré des conditions météorologiques moins favorables en cette saison, les embarquations de fortune où sont entassés des exilés continuent à quitter les cotes libyennes. L’Aquarius restera donc en Méditerranée cet hiver pour leur porter secours. Rencontre avec Anthony, sauveteur sur ce navire affrété par SOS Méditerranée. Source : L’Humanité

  • EPHAD. Le cri d’alarme inédit des salariés et directeurs de maisons de retraite, Gaëlle Dupont
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/10/20/le-cri-d-alarme-inedit-des-salaries-et-directeurs-de-maisons-de-retraite_520

    Le cri d’alarme inédit des salariés et directeurs de maisons de retraite
    Les professionnels des Ehpad ont lancé un appel au secours commun à Emmanuel Macron pour en finir avec les mauvaises conditions d’accueil.

    « Faites un test : levez-vous le matin, faites votre toilette, votre lit, mettez-vous à petit-déjeuner, chronométrez-vous, vous verrez que vous ne tiendrez pas en quinze minutes. Et pourtant vous êtes en bonne santé. » Le défi est lancé par Anne-Sophie Pelletier, membre de la CGT, ancienne porte-parole des aides-soignantes en grève de la maison de retraite Les Opalines, à Foucherans (Jura). Quinze minutes, c’est le temps dont ces professionnelles disposent pour accompagner dans ces tâches les personnes âgées dépendantes hébergées dans l’établissement où elle travaille. A Foucherans, la grève a duré d’avril à juillet, deux postes supplémentaires ont été obtenus, « mais le sous-effectif perdure ». Comme dans tous les Ehpad de France.

    C’est ce qu’ont dénoncé, dans une lettre ouverte au président de la République rendue publique jeudi 19 octobre, cinq syndicats de salariés du secteur médico-social (CGT, FO, UNSA, CFDT, CFTC) et l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). La démarche est inédite. Parce que l’heure est grave, selon les auteurs de l’appel.

    « Terrible angoisse »

    « Malgré les évolutions du secteur (…), la situation reste extrêmement tendue au regard des besoins et attentes des personnes âgées, écrivent-ils. Ces dernières entrent en établissement avec des handicaps physiques et psychiques de plus en plus importants, auxquels s’ajoutent parfois des pathologies psychiatriques pour lesquelles les personnels ne sont pas préparés ; les personnes âgées sont insuffisamment accompagnées dans les actes de la vie quotidienne, les familles s’épuisent et les professionnels sont au bord de la rupture. »

    Des statistiques de la Caisse nationale d’assurance-maladie montrent une fréquence des accidents du travail trois fois supérieure à la moyenne dans ce secteur d’activité. « La qualité de vie au travail des salariés a une influence directe sur la qualité de séjour des personnes, observe Jean-Claude Stutz, secrétaire national adjoint de l’UNSA Santé-sociaux. Quand on sait que certains directeurs ont pour objectif que leurs résidents aient à manger une fois par jour, c’est inacceptable. »

    « On est dans un soin technique, renchérit Anne-Sophie Pelletier. Comment attirer des jeunes avec des conditions de travail pareilles ? » Elle dénonce également un « glissement de tâches » : « On envoie du personnel de ménage non formé distribuer des médicaments. »

    Les syndicats de salariés et l’association des directeurs d’établissement (qui rassemble secteurs public, associatif et privé) réclament à l’unisson une augmentation du taux d’encadrement obligatoire dans les Ehpad, même si l’objectif final ne fait pas l’unanimité. Les syndicats veulent dix soignants pour dix personnes âgées hébergées, l’AD-PA huit pour dix. Aujourd’hui, ce taux est de 5 pour 10. « C’est une moyenne, rappelle Pascal Champvert, le président de l’AD-PA. Dans certains cas, on peut avoir un aide-soignant pour 50 résidents la nuit, un pour 20 l’après-midi. »

    Sous-dotation

    Une enquête en ligne lancée en mars par la CFDT Santé à destination des personnels paramédicaux, à laquelle 2 587 ont répondu, a montré une charge de travail particulièrement lourde. Les personnes interrogées déclaraient avoir eu la charge de 28 patients en Ehpad dans la journée, et 35 patients en Ehpad avec unité Alzheimer, un record. « La sécurité et la dignité des patients ne sont pas assurées, affirme Nathalie Canieux, secrétaire générale de la CFDT Santé-sociaux. Une terrible angoisse monte de ces établissements. »

    Les salariés font état d’amplitudes horaires considérables, et d’une frustration importante. « Nous ne sommes pas suffisamment pour bien s’occuper des résidents, relate une salariée anonyme. La plupart du temps, ils nous demandent de rester un peu plus longtemps, ils aimeraient parler, mais nous n’avons pas le temps pour cela. Et même les soins comme les toilettes, parfois nous les faisons vite, trop vite. »

    Lire aussi : Les députés s’alarment des conditions de travail dans les maisons de retraite
    http://lemonde.fr/societe/article/2017/09/14/ehpad-les-deputes-s-alarment-des-conditions-de-travail_5185588_3224.html

    Les signataires de l’appel dénoncent la sous-dotation financière du secteur et appellent à suspendre une réforme visant à harmoniser les ressources entre les établissements. « Il s’agit de prendre aux moins pauvres que d’autres pour donner aux plus pauvres, décrit Luc Delrue, secrétaire fédéral de FO Santé. Nous contestons cette logique de fonctionnement au sein d’une enveloppe financière constante. D’autant que les départements, qui financent également les Ehpad par l’allocation personnalisée d’autonomie, sont eux-mêmes étranglés par la baisse des dotations de l’Etat. » Le reste à charge pour les personnes âgées et leurs familles demeure, lui, très élevé. Ce sont elles qui financent 60 % du fonctionnement des établissements.

    Les signataires dénoncent en outre la baisse des contrats aidés, nombreux dans les maisons de retraite. Ils réclament une réorganisation du financement de l’aide à domicile et un renforcement de la formation des personnels du secteur. « Si l’Etat ne nous donne pas de signe sérieux, il faudra poser le problème de l’organisation d’une grève dans toute la France », prévient Luc Delrue.

    « On ne les met pas au lit, on les jette » : enquête sur le quotidien d’une maison de retraite, Florence Aubenas, 18.07.2017

    Une dizaine d’aides-soignantes de la maison de retraite Les Opalines, à Foucherans, ne travaillent plus depuis 100 jours, dans le silence national absolu.

    C’était un matin comme les autres. Il était 7 heures en salle de relève, le début du service, les filles se tenaient prêtes dans leur uniforme blanc. Quelqu’un croit se souvenir que l’une pleurait déjà, mais pas très fort. Personne n’y faisait attention, l’habitude. La question rituelle est tombée : « Est-ce que vous êtes au complet ? »

    La réponse, elles la connaissent toutes aux Opalines, un Ehpad – un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – à Foucherans, dans le Jura. Chaque jour ou presque, les équipes d’aides-soignantes tournent en sous-effectif, pas de remplacement, ni des absentes ni des malades. Et toutes savent comment ça se passe dans ces cas-là derrière les portes fermées des chambres, ce qu’il leur faudra faire pour boucler le service à temps.

    Une deuxième fille s’est mise à pleurer. C’était un matin comme les autres aux Opalines, mais peut-être le matin de trop. Depuis le 3 avril, une dizaine d’aides-soignantes mènent la grève la plus longue de France dans un silence national absolu.

    Aux Opalines de Foucherans, 77 résidents, il faut savoir où on est. Certains ont vendu leur maison pour entrer ici. « Maman a élevé huit enfants seule, on voulait le mieux pour elle. On a attendu une place deux ans », raconte une fonctionnaire.

    Dans cet établissement privé, les prix surplombent ceux de la région : 2 500 euros par mois contre 1 800 euros en moyenne, notamment dans le public. Le bâtiment a belle allure ; il a été inauguré il y a cinq ans, compte un jardin et de vastes chambres. Dans la salle à manger – on ne dit pas le réfectoire –, le personnel porte nœud papillon et chemise blanche, on sert du vin en carafe et l’apéritif le dimanche.
    Salaires planchers

    Le personnel en grève dénonce des conditions de travail incompatibles avec le respect de la dignité des patients et une absence de dialogue avec la direction.

    « Quand papa est arrivé, il était ébloui. Il répétait : “C’est plus beau qu’un hôtel !”, dit un fils. Lui se souvient pourtant d’impressions fugitives, des sonnettes appelant dans le vide, un lit resté souillé, le pas-le-temps, le pas-toujours-très-net. Mais dans ces endroits-là, on ne pose pas vraiment de questions et on n’a pas vraiment de réponses. Chacun regarde ailleurs, espérant se convaincre qu’on ne pourrait pas mieux faire. »

    A Foucherans, aucun mauvais traitement n’a d’ailleurs été signalé, ni rien d’exceptionnel. Le tragique est là, d’une certaine façon : c’est la vie quotidienne dans un Ehpad qu’une poignée de filles à bout de souffle vient soudain de mettre à nu.

    Sur le parking de l’établissement, un vent brûlant secoue la tente des grévistes. On dit « les filles » bien qu’il y ait aussi un garçon, tant le métier est estampillé « boulot de femme », avec son lot d’ingratitudes et ses salaires au plancher : 1 250 euros net à Foucherans, pour des journées de dix heures et deux week-ends travaillés.

    « Les filles », donc, s’efforcent de paraître vaillantes, mais on les sent à cran à plus de trois mois de grève, balançant de l’euphorie au désespoir. A ce stade d’épuisement, elles se sont mises à raconter ce qu’on ne partage pas d’habitude, ou alors seulement entre soi, et encore pas toujours.

    L’une commence, tout doux : « Le matin, on les lève sans leur demander leur avis. On sait déjà qu’on n’aura pas le temps : quinze minutes pour la toilette, l’habillement, le petit déjeuner, les médicaments. Alors, il faut choisir. Est-ce qu’on lave les cheveux ? Ou les dents ? La douche hebdomadaire, c’est rare qu’on la tienne. »
    Certains résidents sont nourris à la cuillère, des plats mixés. « Il m’arrive d’en avoir cinq ou six en même temps », dit une grande brune. Elle tend les bras, mimant le buste qui pivote à toute allure. « J’ai l’impression de faire du gavage. »

    Cadences infernales

    Et d’un coup, le piquet de grève ressemble à un confessionnal dans la fumée des cigarettes. « Quand je rentre à la maison, je suis une pile électrique, explique une autre. Je me sens mal d’avoir dit à celui-là : “Dépêchez-vous !” Comment il peut faire, il a 90 ans ! On cautionne. Je culpabilise. »

    Soudain, les images se mettent à défiler sous la tente des grévistes, les couches qu’on change alors que le résident est debout, en train d’avaler son goûter. Tenir la cadence, toujours. Une autre raconte l’angoisse qui monte à mesure que le soir tombe dans les chambres des Opalines.

    « Vous serez là demain ? », demande un homme à l’aide-soignante. Il est dans les choses graves, il veut raconter. La « fille » répond : « Je reviens tout de suite. » Bien sûr, elle ne revient pas. « On ne fait que leur mentir. » Temps du coucher : 3 min 41. « On ne les met pas au lit, on les jette. » Il faut trouver la bonne distance, ne pas s’attacher, recommandent les formateurs. « C’est difficile. On vit dans leur intimité, on leur lave le sexe », dit l’une. Elle se souvient de l’enterrement d’un résident, où elle en avait appris davantage sur lui que pendant ses années à l’Ehpad.

    Il serait rassurant de voir Foucherans comme une exception. Pas du tout. Il se situe dans la moyenne nationale, avec environ 55 professionnels pour 100 résidents. Pas suffisant. Tout le monde sait qu’il en faut au moins 80. C’est le cas en Allemagne ; la Suisse ou les pays nordiques en sont à 1 pour 1. La France, en revanche, n’a entériné aucune norme – question de budget –, et le secteur compte plus d’accidents et de maladies professionnels que le BTP. Sous la tente des grévistes, une dame dépose en solidarité un sac de courses, pris au supermarché en face. Depuis trois mois, « les filles » vivent de collectes et de colis alimentaires. Elles ont de 20 à 50 ans.

    A Foucherans, des résidents appellent les aides-soignantes « les courants d’air ». Des surnoms circulent, « la libellule » ou « la danseuse étoile ». « Vous avez vu comme elles sont fatiguées ? C’est à cause de nous. J’ai honte », dit madame Z., 91 ans. Parfois, elle voudrait qu’on la conduise aux toilettes : « Je vois qu’elles n’en peuvent plus. Alors je fais dans ma couche. »

    Mais surtout, ne rien dire aux enfants. Ne pas les inquiéter. Monsieur D., 83 ans, est le seul à pousser le déambulateur jusqu’au piquet de grève. « On sait que vous allez les voir », lui aurait glissé l’encadrement. Lui se récrie : « C’est mon droit. » Certains auraient été convoqués pour avoir témoigné. « A table, personne n’en parle, on n’a pas de voix là-dedans », dit monsieur D.

    Questions de principes

    Et à leur tour, les résidents évoquent les histoires terribles et minuscules, qui forment ici leur univers. « Ceux dont les proches rouspètent arrivent à se faire entendre. Mais quand on est tout seul, sans visite, sans famille, on n’existe pas », dit l’une.
    Pour l’inauguration de l’Ehpad, en 2012, « les huiles du département avaient été invitées à boire le champagne. Nous, on était parqués au premier étage sans une cacahuète. Rien de grave, bien sûr, mais ça donne une idée de notre place ici », raconte un autre.

    Un grand soir, pourtant, reste dans les mémoires : « la révolte des raviolis ». Deux repas de suite, des raviolis avaient été servis, « et en petite quantité », se souvient une dame. Toute la salle à manger avait posé la fourchette. « On était fières d’eux », dit une aide-soignante. Pour pallier le débrayage, des vacataires ont été réquisitionnés et quatorze résidents transférés provisoirement.

    Au-delà des Opalines, « c’est le système entier qui génère des formes de maltraitance, une situation totalement niée par notre société, explique Pascal Champvert, de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). Je ne vous dirai pas le nombre de politiques qui m’ont expliqué : “Je ne veux pas le voir, ça me fait trop peur.” »

    En 2012, une proposition avait fait scandale : Jean-Marie Delarue, alors contrôleur des lieux de privation de liberté, revendiquait d’inspecter les Ehpad, comme les prisons ou les hôpitaux psychiatriques. « Un risque important existe d’atteintes aux droits fondamentaux, y compris involontaires », plaide Delarue aujourd’hui encore. Refus du gouvernement.

    Dans le bureau de Véronique Steff, directrice de Foucherans, on entend gazouiller les oiseaux dans la volière et la télé dans le salon. La directrice est à cran. Elle reconnaît « un planning tendu » depuis des mois, « une fatigue des salariées ».

    Deux postes d’aides-soignantes ont été créés pour tenter d’apaiser la grève, grâce à Pierre Pribile, directeur général de l’Agence régionale de santé, qui finance le volet médical des Ehpad, y compris privés.
    De leur côté, « les filles » ont abandonné une revendication : 100 euros d’augmentation par mois. Les pourparlers buttent encore sur la prime du dimanche, fixée à 23 euros, même pas de quoi faire garder les enfants. Les grévistes demandent qu’elle soit doublée. « Ce n’est pas grand-chose », laisse tomber Philippe Gevrey, directeur général de la SGMR-Opalines, dans une interview au Progrès (il n’a pas répondu au Monde). Mais il y voit une affaire de principe.

    Huitième groupe privé français, la SGMR a prévu des négociations globales pour ses 46 Ehpad à l’automne : pas question de lâcher quoi que ce soit avant. Un accord sur une « indemnité exceptionnelle » pourrait débloquer la situation. « Les grévistes y sont d’autant plus attachées qu’elles veulent la reconnaissance par la direction qu’elles en ont bavé », explique la préfecture. Les filles demandent 600 euros. La SGMR bloque : ce sera 375 euros ou rien du tout.

    « Vocation »

    « On ne se bat plus seulement pour les sous, mais pour la dignité », dit Anne-Sophie Pelletier, porte-parole du mouvement. Longtemps, aux Opalines, les filles ne se plaignaient même pas entre elles, par peur d’un conseil disciplinaire.

    Quand elles ont osé le mot « grève », au printemps, « la coordinatrice a posé son stylo et elle a rigolé », se souvient l’une. Puis un cadre leur a lancé : « Vous n’aurez rien, ni aujourd’hui ni demain ni jamais. » Anne-Sophie Pelletier reprend : « On ne s’est pas senties écoutées. » Les autres la regardent comme si elle avait traversé la ligne de feu : « Anne-Sophie est cramée. Qu’est-ce qui lui arrivera après la grève ? Et à nous toutes ? »

    Ici, on se souvient de Melissa, une employée modèle, virée en 2015, alors qu’elle comptait monter une section CGT. « J’ai pas pleuré devant eux, j’ai attendu d’être dans la voiture », dit cette dernière.
    A Foucherans, seules des salariées en contrat à durée indéterminée (CDI) font grève, mais aucune parmi la dizaine en contrat à durée déterminée (CDD). Cynthia ne se le serait pas permis non plus, à l’époque où elle bossait là.

    D’août 2012 à février 2015, elle a enchaîné 79 contrats précaires. Sans permis, sans diplôme, elle ne disait jamais non. Elle a même fini sa vacation le jour de son licenciement, pour une histoire de planning. « Il faut s’écraser. On est des pions », dit-elle. Les prud’hommes lui ont donné raison ; à Melissa aussi. D’autres Ehpad ont déjà fait grève, sans fédérer de revendications nationales. A Foucherans, la CGT et la CFDT ont apporté leur soutien.

    Sous la tente, « les filles » parlent de vocation. « On aime notre travail. » Et puis, il y a les crédits de la maison, de la voiture. « Ailleurs, il faudrait repartir en CDD, ça fait peur. » La grève vient de passer les cent jours, leurs familles en ont pris un coup. Les filles ont envoyé un SOS à la préfecture. « Qu’est-ce qu’il faudrait faire, maintenant ? Qu’une de nous se suicide sur le parking ? »

    #soins #personnes_âgées #Ephad #grève passée, grève à venir

    • #Ephad : Chez Orpea, la fin de vie se paye au prix fort, Mathilde Goanec, Mediapart, 29/1/18

      Le groupe Orpea est un poids lourd de la prise en charge des personnes âgées. Dans son établissement de Neuilly, familles, résidents et salariés dénoncent de graves dysfonctionnements, malgré des prix exorbitants. À Agen, dans une autre résidence du groupe, une femme est décédée sous les coups d’une autre, posant la question de la prise en charge psychiatrique en Ehpad.

      L’habit ne fait pas le moine, et c’est encore plus vrai pour les maisons de retraite. Dans l’établissement Les Bords de Seine du groupe Orpea de la très chic ville de Neuilly, près de Paris, les codes du luxe sont posés dès l’entrée. Moquette moelleuse partout au sol, de grands bouquets de fleurs fraîches sur des tables d’appoint, d’élégants fauteuils capitonnés dans la magnifique salle à manger. L’ambiance feutrée masque pourtant un cocktail de défaillances classique des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) en France. Le sous-effectif chronique, combiné à des économies de bouts de chandelle, finit par produire souffrance au travail pour les salariés et maltraitance pour les résidents.

      Neuilly n’est pas une anomalie, c’est tout un secteur qui est à bout : le 30 janvier 2018, une grève nationale rassemble de manière inédite les syndicats du secteur (CGT, CFDT, FO, Unsa, CFTC, CFE-CGC et Sud), un mouvement soutenu par l’AD-PA (l’association des directeurs au service des personnes âgées), ainsi que la Fédération hospitalière de France. Une pétition, rédigée en soutien par trois médecins à cette occasion, a déjà dépassé les 300 000 signatures.

      Aux Bords de Seine, où la chambre est tarifée autour de 10 000 euros, prix qui peut flirter tout compris autour des 15 000 euros mensuels, le contraste entre l’affichage et le récit des gens qui y vivent ou travaillent est saisissant. « La vitrine est luxueuse mais lorsque l’on gratte, ce n’est pas joli-joli », affirme Yveline Chabot-Canville, la fille d’une ancienne résidente. « On a déjà retrouvé ma mère à 15 heures, toujours en chemise de nuit, qui baignait dans sa couche trempée. Les draps aussi étaient trempés par l’urine. » D’après des témoignages de salariés que nous avons pu recueillir, ce cas n’est pas isolé. Poches urinaires prêtes à craquer, draps souillés par les excréments, pyjamas pleins des urines de la nuit… Les matins peuvent être difficiles. « Ils jouent la carte du haut de gamme, très bien ! Mais si c’est pour donner de l’argent aux fleuristes, je préfère qu’on supprime les orchidées », grogne le fils d’un résident.

      Interrogé sur cette situation, le groupe Orpea concède « des difficultés inhérentes à la prestation de services 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 », sans répondre précisément à nos questions (dans l’onglet Prolonger, nous reproduisons les échanges et notre liste d’interrogations). Mais pour le groupe, deuxième gestionnaire d’Ehpad en France, les problèmes font partie du passé : « L’établissement des Bords de Seine a pu y être confronté sur une période donnée ; mais grâce à nos audits réguliers et indicateurs de suivi, nous avons mis en place les actions nécessaires, avec l’ensemble de l’équipe, pour y remédier de manière réactive. » Quant à l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France, chargée du contrôle de ce type d’établissement, elle confirme avoir effectivement été destinataire de réclamations en 2016. « Toutes ont été examinées et plusieurs rencontres ont été organisées entre la direction de l’établissement, l’ARS et le conseil départemental. L’établissement a fait preuve d’une attitude positive et constructive et s’est engagé à mettre en œuvre des mesures en vue d’améliorer ses pratiques. » L’ARS assure n’avoir pas reçu de nouvelles réclamations en 2017.

      Ce qui va suivre, issu de témoignages récents, ressemble pourtant à une mauvaise liste à la Prévert. Les familles se plaignent que l’établissement rogne sur les produits les plus élémentaires, comme les protections urinaires ou le papier toilette : « Il y a régulièrement des ruptures de stock pour les protections, il faut sans cesse réclamer, ou alors elles ne sont pas adaptées pour les femmes donc ça déborde, raconte une proche d’un résident. Et on ne change les personnes dépendantes que deux fois par jour. Imaginez un bébé, pensez-vous que le changer deux fois par jour soit suffisant ? »
      Les économies ne sont pas réservées aux personnes âgées, elles touchent également le matériel mis à la disposition des soignants. « Nous manquons de gants, et ceux qui nous sont fournis sont de mauvaise qualité et se déchirent, se plaint une salariée, qui souhaite rester anonyme. On nous dit de prendre du papier pour essuyer les fesses. Ou les draps, les taies d’oreiller. » Une autre soulève la difficulté de faire face aux proches, logiquement ulcérés par ce type de traitement. « Voir son père ou sa mère, qu’on a tant aimé, être traité comme ça, c’est horrible », souffle l’aide-soignante. « On sait bien qu’on n’habille pas bien, qu’on ne lave pas bien. Faire face aux familles sachant ça, c’est dur », confirme sa collègue.

      Difficile cependant pour les salariés de protester trop frontalement. Le groupe Orpea est régulièrement mis en cause pour son climat syndical, et Mediapart a eu connaissance d’au moins une élection professionnelle invalidée par la justice, ainsi que d’une tentative de licenciement d’un délégué syndical également retoquée par le ministère du travail. En 2015, Mediapart révélait également que le groupe avait fait espionner ses salariés, en particulier des représentants syndicaux. Alors que la CGT portait l’affaire devant la justice, l’entreprise lui avait proposé un « deal » secret à 4 millions d’euros en échange du retrait de sa plainte, ce que le syndicat avait refusé.

      Aux Bords de Seine, 80 personnes âgées sont logées, réparties par groupes de 23 résidents par étage, à l’exception de l’unité protégée où vivent les personnes présentant des troubles cognitifs, comme la maladie d’Alzheimer. Pour chaque étage, deux aides-soignantes qui disposent de dix minutes environ par chambre pour laver et habiller des personnes parfois très dépendantes. « La règle de trois, vous la connaissez ? C’est un code chez certaines, raconte, amère, l’une d’entre elles. Visage, aisselles et sexe. Mais la peau s’écaille comme du poisson si elle n’est pas lavée… » Dans un texte diffusé à l’occasion de la mobilisation, le syndicat Force ouvrière rappelait ce sinistre acronyme que nombre de salariés connaissent pour qualifier les toilettes express : la « VMC », pour « visage, mains, cul ».

      Malgré un « personnel formé, qui sert les repas à l’assiette dans notre salle de restaurant lumineuse, décorée et très parisienne », selon la brochure publicitaire de la résidence, la nourriture semble ne pas non plus être à la hauteur, à tel point que des cas de dénutrition ont été dénoncés à plusieurs reprises, en interne et auprès de l’ARS. « La plupart des résidents dans la salle à manger mangent “mixé” et quand on mange avec eux, on comprend pourquoi, témoigne la fille d’un résident. Ils ne peuvent pas avaler la viande, elle est beaucoup trop dure. » Alertée à maintes reprises, la direction a répondu que les couteaux allaient être changés, témoigne la famille d’une résidente, choquée. Une vieille femme vivant dans l’établissement témoigne de son désarroi : « Je ne descends plus le soir, c’est immangeable. Je mange un peu de pain et de fromage, dans ma chambre. »

      Viande trop cuite et de mauvaise qualité, des fruits « aussi durs qu’une boule de pétanque », des sauces sans saveur… Guillaume Gobet, délégué syndical CGT et chef de restauration dans un autre établissement du groupe, rappelle la gageure de cuisiner en se fondant sur le coût total de denrées par résident accordé par Orpea : moins de cinq euros par jour. Un ancien directeur d’établissement Orpea dans le sud de la France nous a confirmé ce chiffre. Et la qualité n’est pas la seule cause de dénutrition. Faute de personnel, les personnes trop dépendantes pour manger seules ne sont pas toujours suffisamment accompagnées. « Le plateau repart avec le bol plein. Moi, je me suis vue faire manger les personnes à la table de Maman, parce que leur fauteuil les éloigne trop de la table. Entre l’assiette et la bouche, ça atterrit entre les deux », témoigne Yveline Chabot-Canville.

      Si des familles concèdent des efforts récents de la direction pour améliorer les repas, la déshydratation reste un problème régulièrement convoqué, que ce soit par les salariés ou les résidents. « Nous avons toujours de très gros problèmes de déshydratation et donc d’infections urinaires, s’agace une famille. Ce n’est pas en donnant un verre d’eau à chaque repas que l’on va s’en sortir. » Dans un courrier de résident envoyé en août 2017 à la direction, le manque d’eau est écrit noir sur blanc.

      « Faut pas mourir le samedi ici, ni la nuit »

      « Orpea vend du rêve, rapporte une aide-soignante. Sonnez, il y a toujours quelqu’un derrière la porte. » En effet, l’entreprise ne ménage pas ses efforts pour soigner sa communication. Leader européen, Orpea revendique plus de 80 000 lits dans le monde pour combler les besoins de la « dépendance ». « Soyez assurés que nos équipes pluridisciplinaires, composées de professionnels formés à l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie, proposent une prise en charge sécurisée par des procédures et protocoles rigoureux, afin de veiller au quotidien au confort des résidents », assure le groupe sur son site internet.

      La réalité, faute de personnel, est tout autre, même dans une maison haut de gamme. Selon Guillaume Gobet à la CGT, le ratio en personnel chez Orpea est de 0,47 personne par résident (comprenant l’ensemble du personnel, du pôle administratif à la restauration, en passant par l’animation et le soin), quand les différents rapports publics sur le grand âge préconisent plutôt 0,66 et que la moyenne nationale s’établit à 0,55.

      « Ces numéros de téléphone sur la feuille, là, près de mon lit, ne servent à rien, c’est ce que me répond le directeur lorsque je lui dis que j’appelle sans réponse », témoigne l’une des résidentes. Les sonnettes d’urgence sonnent souvent dans le vide, elles aussi. Que se passe-t-il alors quand quelqu’un tombe ? Selon plusieurs études, une personne âgée qui reste une heure au sol voit s’accroître considérablement le risque de décéder dans les six mois. « J’ai déjà relevé moi-même des personnes qui étaient tombées chez Orpea, ce n’est pas normal », note Yveline Chabot-Canville.

      Maurice, un résident âgé de 95 ans, se souvient de la visite affolée d’une de ses voisines, vivant en couple à son étage : « Son mari était par terre. J’ai cherché une infirmière, une aide-soignante, j’ai mis trois quarts d’heure pour trouver quelqu’un. » Maurice lui-même a passé près d’une heure au sol après une chute la nuit. L’une des résidentes ayant accepté de nous parler livre également un récit qui oscille entre l’incompréhension et la peur de « déranger ». « Faut pas mourir le samedi ici, ni la nuit. J’ai été malade et personne n’est venu me voir et ma famille n’a pas été prévenue. Je suis tombée, mais comme je tombe tout le temps… Je n’ose pas demander de l’aide. Ma famille me dit d’appuyer sur la sonnette et d’attendre. Mais là, j’étais par terre… » Les familles que nous avons rencontrées font tous les mêmes récits et des alertes ont été posées à maintes reprises par les instances internes de l’établissement sur cette question.

      Le problème survient la nuit, confirment les salariés, quand les employés se font plus rares encore. « Récemment, un résident a fait une chute, raconte une aide-soignante. La personne en charge cette nuit-là avait deux étages de plus de vingt résidents, seule. Parfois, on retrouve des gens de l’unité protégée, le matin, au milieu de la salle commune. Ils n’ont pas dormi dans leur lit ! » Une situation que confirment les proches des personnes placées dans ladite unité protégée. La solitude pèse parfois autant que le risque physique : « Un homme comme moi, qui ne souffre pas de quelque chose, on ne lui répond pas. On ne s’occupe pas de moi. Il y a un grand couloir, et je n’y vois personne », se désole Maurice.

      « La composition de notre équipe dépasse historiquement les exigences fixées par la convention tripartite signée avec les autorités de tutelle ; et tous les postes sont effectivement pourvus, répond Orpea. Nous mettons également à la disposition de l’ensemble des collaborateurs (soignants ou non) de nombreux outils pour les aider à accomplir leurs missions quotidiennes, telles que des formations régulières, des protocoles et procédures, ainsi que tous les équipements nécessaires à la bonne prise en charge des résidents. »

      La direction de la maison Les Bords de Seine a bien une solution, calibrée pour sa riche clientèle. Elle conseille aux familles de prendre une “dame de compagnie”. Ceux qui le peuvent n’hésitent pas à sauter le pas et font venir dans la résidence, pour certains quotidiennement, du personnel chargé de distraire ou d’occuper leurs proches vieillissants, même si cela alourdit encore la facture. Rebecca (son prénom a été modifié) était l’une d’entre elles, chargée d’un vieux monsieur aujourd’hui décédé. « Les gens dans cette maison passent leur vie à attendre, tout le temps, que quelqu’un passe. C’est triste. » Il y a pourtant des animations l’après-midi, de qualité, selon les avis presque unanimes, insuffisantes cependant pour rompre la monotonie des journées. « À notre étage, vu qu’il n’y a que des vacataires, nous sommes obligés d’avoir une dame de compagnie, explique le fils d’un résident. Avant cela, je ne compte plus le nombre de fois où nous arrivions et où les trois aides-soignantes étaient en vacances. Ils se foutaient éperdument de la situation, cela ressemblait à un mouroir. »

      Les dames de compagnie ne sont pas censées soigner, nourrir, ou laver les résidents, tâche normalement réservée au personnel soignant qualifié. « Quand je voyais que la toilette n’était pas bien faite, j’appelais, se souvient Rebecca. Mais le personnel est toujours débordé. Et encore, moi j’étais là pour surveiller… Que se passe-t-il pour ceux qui n’ont pas de visite ? » Selon les salariés et les familles, Orpea utilise, pour boucher les trous, une pratique bien connue dans les Ehpad. Si un aide-soignant est absent, malade ou en congé, un ASH (agent des services hospitaliers) peut le remplacer. Sauf que le rôle de l’ASH se borne, selon la loi, au ménage et à la distribution des repas. À l’Ehpad des Bords de Seine, des salariés rapportent qu’ils distribuent même parfois les médicaments, une tâche habituellement réservée à l’infirmier, parfois à l’aide-soignant. Alertée à ce sujet, l’agence régionale de santé d’Île-de-France renvoie sur le code de l’action sociale et des familles : « Lorsque les personnes ne disposent pas d’une autonomie suffisante pour prendre seules le traitement prescrit par un médecin à l’exclusion de tout autre, l’aide à la prise de ce traitement constitue une modalité d’accompagnement de la personne dans les actes de sa vie courante. »

      Les vacataires sont également légion, souvent non formés. Ils font alors « office de », selon le jargon. « Nous avons beaucoup d’escarres dans l’établissement, et pas de personnes formées pour les soigner. Nous sommes censés apprendre les gestes aux nouveaux, en plus de notre travail, mais nous n’avons pas le temps ! Résultat, oui, il y a de la maltraitance passive, et des gens qui s’en foutent de leur travail. » L’aide-soignante qui s’exprime blâme la politique de bas salaires d’Orpea, qui génère un gros turn-over. « On gagne même pas 1 400 euros par mois, qui veut faire ce travail correctement à ce prix-là ? » De fait, vu la faiblesse des salaires, ils sont nombreux à cumuler un temps plein chez Orpea et un autre contrat ailleurs, ou des vacations dans d’autres établissements. « La nuit, certaines s’endorment », confirme le proche d’un résident.

      À Agen, une résidente en unité protégée a roué de coups une autre pensionnaire

      Un ancien directeur d’Orpea, dans le sud de la France, ayant passé de longues années dans le groupe, confirme le tableau qui a été décrit à Mediapart. L’Ehpad des Bords de Seine n’est pas une exception. « Je ne reconnais plus le groupe que j’ai connu. Nous devons appliquer rigoureusement les procédures du siège sans prendre en considération le client, explique cet ex-employé, scandalisé. Il n’y a plus d’humanité. » Comme tous les acteurs privés, Orpea reçoit de l’ARS une enveloppe pour payer son personnel, l’État prenant en charge à 70 % la paye des aides-soignantes et à 100 % celle des infirmières et des médecins. « Pour tout ce qui reste du coût direct, l’hôtellerie, la restauration, le ménage, etc., on nous demande de faire toujours mieux avec moins, poursuit l’ancien directeur. La marge bénéficiaire, elle se fait là, sur le personnel que vous payez, pas sur celui qui est subventionné ! » La pression mise sur la hiérarchie pour tenir les budgets n’est pas sans conséquence. À Neuilly, depuis la création de l’Ehpad en 2010, au moins cinq directeurs se sont succédé.

      Les salariés des Bords de Seine assurent que des postes financés par l’ARS, comme les aides-soignantes diplômées, sont parfois remplacés par une ou deux personnes à temps partiel, sans diplôme, donc moins bien rémunérées. L’ex-directeur interrogé confirme qu’il ne faut « jamais dépasser » l’enveloppe ARS chez Orpea, quoi qu’il en coûte. « L’ARS va nous attribuer de l’argent pour 25 postes, mais si par malheur les salaires localement sont un peu plus hauts, pour cause de rareté par exemple, on aura 22 postes et puis c’est tout. Si au cours de l’année le nombre de résidents augmente, tant pis, c’est aussi au directeur de se débrouiller. » La rigueur est payante. En 2016, le chiffre d’affaires du groupe s’élevait à près de 2,9 milliards, générant un bénéfice net de 257 millions d’euros, avec un nouveau “record” de rentabilité en 2017. En deux ans, les bénéfices ont doublé.

      Pour maintenir sa progression, Orpea s’impose comme ses concurrents un impératif, remplir ses établissements. Avec le risque d’accueillir dans ses murs des résidents qui relèvent davantage de la psychiatrie que d’un Ehpad. Fin décembre 2016, une maison Orpea à Agen en a fait la cruelle expérience. Une résidente âgée de 86 ans, en proie à de graves troubles de la santé mentale, a brutalement attaqué une autre pensionnaire du même âge, la rouant de coups. La victime de l’agression est décédée quelques heures plus tard, après avoir été emmenée aux urgences.

      « La personne qui a fait ça était agressive, on l’avait mise en zone Alzheimer de l’unité protégée en pensant que ça la canaliserait. Mais elle avait de vrais moments de folie. Celle qu’elle a agressée s’est présentée en chemise de nuit dans le salon, et cela a suffi à la mettre hors d’elle, au point de la tabasser à mort », raconte, toujours choqué, un salarié de l’Ehpad d’Agen. « Aujourd’hui, on prend n’importe qui dans nos Ehpad, des gens qui n’ont rien à y faire, qui peuvent être dangereux pour eux-mêmes, pour les autres, pour le personnel », poursuit le salarié. La famille de la victime a, selon nos informations, porté plainte contre Orpea. Depuis, la direction a ajouté un salarié aux personnes chargées la nuit de veiller sur les 85 résidents que compte la résidence. Le groupe précise par ailleurs que « toute demande d’admission fait l’objet d’un avis médical pour veiller notamment à la compatibilité de l’état de santé de la personne à accueillir avec les capacités de soins de l’institution ». « On manque de personnel, c’est clair, persiste le salarié d’Agen. Dans l’unité protégée, il y a une aide-soignante et une ASH, ce n’est pas assez. » Et pourtant, pour vanter l’unité protégée, spécialisée dans l’accueil des personnes désorientées ou atteintes de la maladie d’Alzheimer de l’Ehpad d’Agen, Orpea insiste sur la « prise en charge individualisée », appuyée par « un personnel formé à l’accompagnement des personnes atteintes de maladies neurodégénératives ».

      À Neuilly aussi les salariés craignent l’accident. « Aujourd’hui, nous avons des cas qui relèvent de la psychiatrie pure. Ils demandent beaucoup d’attention. Or la soignante de l’unité protégée a la même fiche de poste que les autres et elle est amenée à quitter l’étage. Parfois elle arrive le matin, la fille de nuit est déjà partie, les résidents sont restés livrés à eux-mêmes ! » Une photo prise à l’unité protégée montre une porte bloquée par un drap, signe de l’impuissance du personnel à trouver une autre solution. « Les salariés nous disent qu’être deux avec 13 ou 14 patients atteints de troubles cognitifs, qui déambulent, posent 50 fois la même question, souvent ne veulent pas manger, c’est très compliqué », constate une famille.

      Si certains salariés ont tiré à plusieurs reprises la sonnette d’alarme, les résidents aussi. Ainsi, Maurice a démissionné du conseil de la vie sociale (obligatoire dans chaque Ehpad, le CVS est formé de résidents, de proches de résidents et de salariés ; il doit être consulté par la direction sur la vie de l’établissement) pour marquer son désaccord. Les proches ne sont pas en reste. Des familles, en désespoir de cause, se sont ainsi carrément introduites au débotté dans une réunion des directeurs régionaux d’Orpea en septembre 2016. « Nous sommes arrivés, tels des syndicalistes, pour perturber leurs discussions et nous faire entendre. Panique à bord, surtout dans une maison de retraite à Neuilly… »

      Mais les directions peinent à satisfaire les demandes : « Souvent, ce sont des commerciaux purs et durs, explique une proche concernée. Certains au contraire sont pleins d’empathie, mais on a l’impression qu’ils se heurtent à un plafond de verre, leurs responsabilités sont assez limitées. C’est au-dessus que ça se passe. »

      Dans un rapport d’expertise réalisé à la suite d’un droit d’alerte en 2016 dans un autre établissement du groupe, et que Mediapart a pu consulter, se retrouvent les mêmes éléments qui taraudent les familles et salariés de Neuilly. Il y est écrit que « l’intensification du travail fragilise la réalisation du travail et le vécu » des employés de l’établissement Orpea. Une « usure » qui « fait le lit des actes d’agressivité envers les résidents comme envers les collègues » et qui fait « que l’on brusque le patient ou qu’on le néglige jusqu’aux violences verbales et physiques ».

      Ce saut du mal-être au travail à la maltraitance passive, voire active, à l’égard de personnes âgées très en demande est une constante de la vie dans les Ehpad. Ainsi, la député Monique Iborra (LREM), dans le rapport rédigé à l’issue d’une mission sur le secteur en septembre 2017, ne peut que constater l’ampleur du problème : « L’organisation du travail est en tension et peut être la source de dégradation importante des conditions d’exercice des métiers de soignants. Dans certains Ehpad, on parle de maltraitance institutionnelle. » Lisa (prénom d’emprunt), une infirmière ayant travaillé quelques années dans deux Ehpad de la région parisienne, est arrivée à la même conclusion, avant de quitter le secteur pour rejoindre l’hôpital : « Tu ne peux pas bien faire ton travail. Par exemple, certains pansements, tu n’as pas le temps de les changer alors que tu devrais le faire, les hydratations, pareil. Je ne m’attendais pas à ça, je savais qu’il y avait des problèmes de personnel, mais pas à courir autant, et tous les jours. Et pourtant, les gens payaient leur chambre 2 000 à 3 000 euros par mois ! » Manifestement, même en triplant le tarif, le service n’y est toujours pas.

    • Les Ehpad, premières victimes de l’austérité budgétaire, Romaric Godin, Mediapart, 28/1/18

      La grève du personnel des établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ce mardi 30 janvier, est une première. Elle traduit une sous-budgétisation continuelle depuis 2010, alors même que les besoins grandissent. Un décalage que les coups de pouce de l’exécutif ne modifieront pas.

      La grève nationale des agents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), mardi 30 janvier, constitue une première dans le secteur. Elle est révélatrice d’une impasse dans laquelle s’engage depuis plusieurs années la gestion du vieillissement de la population en France, comme dans la plupart des pays développés. Derrière la contestation officielle de la réforme du financement de ces établissements, s’accumule un “ras-le-bol” général concernant les conditions de travail et l’environnement général.

      L’intersyndicale n’hésite pas à employer des mots forts et lourds de sens : les agents « n’en peuvent plus » et sont victimes d’une « souffrance au quotidien ». Le reportage de Mathilde Goanec sur la situation dans un Ehpad des “beaux quartiers” témoigne d’une situation que l’intersyndicale juge « à ce point dégradée que l’on peut parler d’urgence nationale sur un sujet de société ».

      La réponse du gouvernement à cette crise profonde et structurelle est très significative : dans les colonnes du Parisien, la ministre de la santé Agnès Buzyn a maintenu la réforme contestée du financement, tout en rajoutant 50 millions aux 100 millions d’euros déjà ajoutés en fin d’année. Des sommes destinées à calmer le mécontentement, mais qui évidemment ne sauraient répondre aux problèmes fondamentaux du secteur. Pour le reste, on est dans les méthodes dilatoires : on promet des évaluations « au cas par cas » et on affiche d’ambitieux objectifs, sans préciser les moyens qui y seront consacrés. Bref, on tente désespérément de faire retrouver aux agents (et aux familles) de la patience.

      Mais cette patience sera inutile. La dégradation de la situation provient en effet de l’approche fondamentalement comptable de ce sujet, qui est pourtant appelé à devenir de plus en plus central dans les prochaines décennies. Le vieillissement de la population est déjà une réalité et la part des personnes très âgées et dépendantes ne cessera d’augmenter. La conséquence est connue : c’est une augmentation continue des besoins de dépenses liées à la dépendance.

      Or l’État, dans sa volonté de “maîtrise de la dépense publique”, mais aussi dans sa stratégie d’allégement des cotisations sociales, refuse d’assurer ce besoin. S’ensuit un écart entre la tendance “naturelle” des dépenses et l’augmentation des moyens mis à la disposition des établissements. Ainsi, en 2018, les dépenses de l’État liées aux Ehpad devraient, selon la commission des comptes de la Sécurité sociale, progresser de 4,5 %. L’objectif de croissance de ces dépenses a été fixé par la loi de financement de la Sécurité sociale à 2,6 %.


      Évolution des plus de 60 et 80 ans dans la population française. © CNSA

      Cette réalité est bien celle d’un secteur soumis à l’austérité. Contrairement à ce que l’on entend souvent, l’augmentation visible des dépenses ou le creusement d’un déficit (ce qui, ici, n’est pas le cas, car les déficits sociaux se résorbent vite) ne constituent pas une “preuve” qu’il n’existe pas d’austérité. Lorsque les besoins croissent et que les moyens croissent moins vite, il faut faire des économies et rogner sur les prestations et les services. Or là encore, contrairement au discours souvent entendu, la France respecte ses objectifs de croissance des dépenses de santé.

      L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est respecté et a permis de contenir depuis 2010 la croissance des dépenses autour de + 2 %, loin des évolutions de la première décennie du millénaire où les dépenses progressaient entre 3 % et 7 % par an. Les défenseurs des équilibres budgétaires, comme la Cour des comptes, estiment que c’est insuffisant. Mais le prix à payer pour cet effort a été une divergence encore plus forte avec les besoins de la population, qui se traduit par la crise ouverte dans les Ehpad aujourd’hui ; laquelle, rappelons-le, n’est que la partie émergée de l’iceberg des misères hospitalières.

      La prise en charge des personnes âgées a d’ailleurs été en première ligne dans l’effort d’économie. L’objectif général des dépenses des établissements médico-sociaux (comprenant à 80 % les Ehpad) a été inférieur à celui de l’Ondam en 2015 et 2016. Deux années au cours desquelles les révisions budgétaires ont encore coupé dans les moyens, alors même que la surconsommation par rapport à l’objectif se réduisait. La situation a été corrigée en 2017 mais, en 2018, l’actuel exécutif a encore ralenti la croissance de l’Ondam médico-social de 2,9 % à 2,6 %. En définitive, compte tenu de la croissance “naturelle” des besoins, et malgré la croissance nominale des dépenses, il paraît difficile d’affirmer avec Agnès Buzyn que « l’État aussi fait son travail » concernant les Ehpad.


      Évolution de l’objectif global des dépenses pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes. © CNSA

      La réforme du financement engagée en 2017 a pour vocation de renforcer encore la maîtrise des dépenses. Elle prévoit non seulement une réforme de la tarification, mais aussi des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) sur cinq ans qui visent à rationaliser les coûts au niveau d’un département et sur plusieurs années. Rien d’étonnant, compte tenu du passé récent que l’on vient de décrire, à ce que les syndicats y voient un moyen supplémentaire de comprimer les dépenses. Et leurs inquiétudes ne sont évidemment pas infondées.

      L’actuel exécutif rejette toute hausse d’impôt et promet même de nouvelles baisses. Il a créé un “bouclier fiscal” pour les revenus du capital qui protège ces derniers de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG). Or, comme l’avait rappelé la commission des comptes de la Sécurité sociale, les diverses exonérations coûtent déjà 30 milliards d’euros à l’État. Plus les impôts baissent, plus l’ajustement se fera par les dépenses. Et les dépenses sociales, à commencer par celles liées au vieillissement, seront en première ligne. Un coup d’œil à la trajectoire budgétaire du gouvernement le confirme : les comptes sociaux et les collectivités locales devront dégager des excédents considérables pour satisfaire à la marche dictée par le gouvernement. In fine, compte tenu de la dynamique des besoins, on ne peut aller que vers une nouvelle dégradation de la qualité des prestations.

      Mais l’on ne sera pas quitte avec cette dégradation. Car si l’État ne veut pas assumer pleinement le coût du vieillissement, la charge se reportera vers les familles, qui peinent déjà à assumer les coûts, et vers le secteur privé qui gère déjà un quart des Ehpad. Dans les deux cas, cette solution semble très périlleuse. Le coût de la dépendance est déjà très lourd pour les classes moyennes et ceux qui ne disposent pas de patrimoine. L’alourdir encore conduira à affaiblir la situation financière de ces ménages et leur sentiment de déclassement.

      Quant au secteur privé, l’exemple d’Orpea présenté dans Mediapart le prouve : il n’est nullement un gage de qualité. Les trois grands du secteur sont soit cotés en Bourse, soit propriété d’un fonds d’investissement. C’est un gage de rentabilité, sans doute, mais nullement de qualité de la prise en charge. Dès lors, l’objectif de ces entreprises ne peut être que l’accroissement de la rentabilité par la “maîtrise” des coûts, ce qui, dans ce secteur, conduit souvent à une dégradation de fait de la qualité du service rendu. Les familles paient donc cher pour un service médiocre.
      Or plus l’écart entre les effets du vieillissement et la compression des dépenses publiques sera élevé, plus le secteur privé prendra de l’importance. Et dès lors, la gestion de la dépendance des personnes âgées sera soumise à deux pressions complémentaires qui s’exercent déjà : la maîtrise des dépenses publiques et l’exigence de rentabilité du secteur privé. Un cocktail qui ne peut que dégrader la prise en charge des personnes âgées.

      La logique de la gestion actuelle de la vieillesse est donc intenable. Penser qu’une réforme du financement dans le même cadre d’une pression continue sur les dépenses pourra assurer la soutenabilité à long terme du secteur est un leurre. De ce point de vue, la crise actuelle et l’appel à la responsabilité des agents qui sont en première ligne doivent agir comme un électrochoc et conduire à s’interroger sur la gestion purement comptable de la dépendance d’êtres humains qui n’ont que le tort d’être trop âgés.

      #austérité

  • Eva Thomas : celle qui en 1986 a brisé le silence sur l’#inceste - L’Obs
    http://tempsreel.nouvelobs.com/rue89/nos-vies-intimes/20171012.OBS5937/eva-thomas-celle-qui-en-1986-a-brise-le-silence-sur-l-inceste.h

    Pour ma génération, les abus sexuels sur les enfants sont indiscutablement l’un des pires crimes que l’on puisse imaginer, des crimes ignobles, insupportables. Dans les années 1990, l’affaire Dutroux et ses marches blanches ont retenti dans les esprits et angoissé une génération de parents. "Ton corps est ton corps", nous apprenait-on alors à l’école.

    Il fut pourtant un temps, pas si lointain, où il en fut autrement. Comme le rappelait un excellent article du "Monde", "notre morale sexuelle a basculé sur la pédophilie".

    Dans les années 1970, dans un contexte de libération sexuelle post-Mai-68, des intellectuels l’ont défendue et leurs idées ont été diffusées dans les colonnes de plusieurs titres de presse (dont "Libération"). Les pro-pédophiles s’appuyaient sur les théories freudiennes en élevant les enfants en figures ultrasexualisées, sans se préoccuper d’un quelconque traumatisme et de l’absence de consentement.

    Au milieu des années 1980, la société entame un profond basculement sur ce qui deviendra le symbole du mal absolu. Les violences sexuelles ou abus sont dénoncés dans un discours nouveau.
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    Une femme courageuse a incarné ce virage : Eva Thomas, qui a désormais 75 ans.

    Eva Thomas chez elle à Grenoble, le 6 octobre 2017. (Emilie Brouze)

    Elle me reçoit un vendredi d’octobre dans son appartement biscornu, au dernier étage d’un immeuble grenoblois. Il faut écouter son histoire car elle raconte un changement sociétal, l’histoire universelle d’une prise de conscience par la libération de la parole. Eva Thomas est aussi un formidable exemple de combativité et de résilience.
    "J’aimerais sortir de la honte"

    Le 2 septembre 1986, à 22 heures passées, son visage est apparu sur Antenne 2, dans "les Dossiers de l’écran". L’émission de débat de société, très populaire, s’attaque ce mardi soir au tabou suprême : l’inceste.

    Sur le plateau, trois femmes victimes de pères ou de frères incestueux ont accepté de témoigner. Deux sont filmées de dos, deux silhouettes anonymes. Et une troisième – c’est une première – parle face à la caméra.

    "J’ai choisi de témoigner à visage découvert parce que j’aimerais sortir de la honte", affirme sur le plateau celle qui vient de signer un livre dans lequel elle relate le viol commis par son père, quand elle avait 15 ans.
    "J’ai envie de dire aux femmes qui ont vécu ça qu’il ne faut pas avoir honte."

    Des cheveux gris entourent son visage animé par ses grands yeux brillants qui oscillent à droite et à gauche. Eva Thomas paraît terriblement émue à l’écran.

    31 ans plus tard, elle s’en souvient comme d’un moment exaltant mais éprouvant. "J’avais l’impression de me jeter dans le vide", dit-elle dans sa petite cuisine, en buvant un café.
    Le saut dans le vide

    Quelques jours avant l’émission, Eva Thomas a averti sa famille par écrit de la publication sous pseudo du "Viol du silence" (éd. J’ai lu, 2000), ainsi que de son intervention télévisée devant la France entière. Elle s’interroge. Quels dégâts cela provoquera-t-il ?

    On allait bientôt la reconnaître dans la rue, lui envoyer des courriers par piles, l’interviewer partout. Eva Thomas est déterminée quand elle prend la parole sur le plateau, ça s’entend. Elle parle posément, sans retenue.

    "Je n’avais aucune idée de ce qui allait se passer après, mais ce n’était pas possible pour moi de ne pas le faire", relate-t-elle aujourd’hui.

    Elle avait en tête, avant de prendre la parole, des images d’explosion, comme des vitres qui se brisent ou des petites bombes qui sautent. Elle voulait à tout prix rompre le silence, s’attaquer à "l’attitude hypocrite et lâche de la société face à l’inceste".
    "Rien ne pouvait m’arrêter."
    Aveuglement et surdité

    Il y avait, à l’époque, une forme "d’aveuglement et de surdité" à l’inceste, explique Anne-Claude Ambroise-Rendu, auteure de "Histoire de la pédophilie" (éd. Fayard, 2014). Il est alors considéré comme un micro-phénomène, qu’on pensait cantonné à la France rurale et reculée.

    Le mot ne figure pas tel quel dans l’ancien Code pénal et si la loi l’interdit, il est aussi implicitement défendu d’en parler.

    Par son intervention, Eva Thomas va faire prendre conscience d’un phénomène beaucoup plus courant et massif qu’imaginé. Son ouvrage "a créé les conditions d’un débat ­public", analysait dans Le Monde Denis Salas, président de l’Association française pour l’histoire de la justice.

    La télévision, comme média de masse, a été un puissant vecteur de ce changement sociétal. "Il a permis de voir et d’entendre ces victimes", complète Anne-Claude Ambroise-Rendu. "Il offre la possibilité de l’empathie, de l’émotion et de l’identification." A ce moment, le visage d’Eva Thomas, en plan serré sur Antenne 2, se suffit à lui-même.

    Ce soir de septembre 1986, "une avalanche" d’appels submerge le standard des "Dossiers de l’écran", le "SVP 11-11". Beaucoup relatent des récits similaires. Une retraitée citée décrit ainsi "l’enfer d’être violée par son père" :
    "Cela me marque encore aujourd’hui."
    "Pas d’inceste heureux"

    Et puis, plus tard, le médiateur de l’émission fait entendre d’autres voix, celles de téléspectateurs semblant découvrir que l’inceste relève de l’interdit. Des paroles représentatives de l’état d’esprit d’une partie de la population, que la fin du silence ennuie et qui préfère parler de "l’inceste avec consentement". Une parole difficilement concevable aujourd’hui.

    "Je suis amoureux de ma fille adoptive. Pourquoi semez-vous la zizanie dans les familles ?", dit un médecin. Un agent technique assume aimer caresser sa fille de 10 ans. "J’ai des relations quotidiennes avec ma fille de 13 ans", témoigne aussi un ingénieur.
    "Pourquoi empêchez-vous les gens d’être heureux ?"

    Pendant que le médiateur lit ces réactions, le visage d’Eva, abasourdie par ce qu’elle entend, est en gros plan sur l’écran. Son expression est plus parlante que des mots. On l’interroge. "Je pense qu’entre un parent et un enfant, il n’y a pas d’inceste heureux", réagit-elle.
    "En tout cas, pour l’enfant ce n’est pas vrai. L’enfant subit une violence."
    Déclencheur

    A la fin de l’émission, apparaissent les coordonnées de l’association qu’elle a créée à l’automne 1985 à Grenoble, "SOS inceste". Elle croulera sous les appels et les courriers les jours d’après.

    Ce numéro des "Dossier de l’écran" fut retentissant. La presse s’en fait largement l’écho. "On parlait partout de l’inceste, c’était assez extraordinaire", se souvient Eva Thomas.

    Eva Thomas sur le plateau d’"Antenne 2", en 1986, dans un article publié sur VSD

    Son témoignage a agi comme un "déclencheur", confirme l’historienne Anne-Claude Ambroise-Rendu. Deux autres émissions dénonçant les abus sexuels sur les enfants ont été importantes – "Médiations" (TF1), en 1989, à laquelle participa Eva Thomas, et un numéro spécial de "Bas les masques", animé par Mireille Dumas, en 1995.

    Sur les plateaux comme dans son livre, Eva Thomas parle des dégâts causés par les abus sexuels – ce qui, à l’époque, avait été mis de côté. "Dans les années 70, les psys que je suis allée consulter m’ont répondu que j’avais le droit de coucher avec mon père", relate la rééducatrice à la retraite. Pour une partie des médecins, les abus n’étaient que le fruit de l’imagination ou de "fantasmes".

    Son premier livre, "Le viol du silence", est le récit, porté par l’énergie de la colère, d’une lutte.
    "La bagarre qu’il a fallu que je mène toute seule, comme beaucoup de personnes à cette époque-là, pour me sauver."
    Le silence

    Eva Thomas parle très bien du mécanisme du silence dont elle s’est échappée. Parce que ce qu’elle avait vécu était inimaginable, vide de sens, elle était sur le lit de ses parents comme pétrifiée quand elle a été violée.

    Les jours d’après, elle a tout gardé pour elle. "J’avais l’impression que si ces mots sortaient, j’allais tout détruire et que j’allais le tuer [son père, ndlr]", racontait-elle sur le plateau des "Dossiers de l’écran".

    Elle n’a pas sombré parce qu’elle s’est accrochée à son projet de jeune fille rebelle qu’elle était : devenir institutrice, comme sa tante. L’écriture et la publication du "Viol du silence" a été, à l’âge de 44 ans, libérateur. Elle n’avait plus peur. Enfin, les choses rentraient dans l’ordre : elle pouvait exister entièrement.

    "Il faut que les femmes parlent, écrivent les violences sexuelles vécues dans leur enfance, parce que parler, c’est déjà agir", écrit-elle sur ces pages.
    "Il faut oser nommer les violences subies, écrire les dégâts sur nos vies de femmes pour que les pères prennent conscience de la gravité de leurs gestes, pour qu’on puisse faire de nouvelles hypothèses à partir de la réalité et non du mythe."

    Son ancien compagnon, le père de sa fille unique, a été le premier homme auprès de qui elle s’est confiée. C’est lui qui l’a convaincue d’écrire une lettre à son père. Alors qu’elle entamait l’écriture de son livre, ce dernier a reconnu les faits et lui a demandé pardon – "une chance incroyable", précise-t-elle. Il a lu son livre, aussi.
    "Il m’a dit que jamais il n’avait imaginé que ça provoquerait de tels dégâts sur ma vie."

    Quand Eva Thomas, née dans une famille d’artisans, revient dans son village normand, une ouvrière de sa grand-mère couturière lui demande de venir la voir. Sur la table, un exemplaire du "Viol du silence".

    "Tu l’as lu ?" s’enquiert-elle.

    "– Oui, tout le village l’a lu."

    Personne ne l’a jamais embêtée à ce sujet, ici. "Dans le village, il y a deux clans", explique la voisine.
    "Ceux qui trouvent que tu es une vraie héroïne d’avoir fait ça, et les autres qui trouvent que c’est un scandale : on n’attaque jamais ses parents."
    "Bravo, vous êtes restée en vie"

    Dans les courriers qui lui sont adressés après "Les Dossiers de l’écran", de nombreuses femmes remercient Eva Thomas d’avoir exprimé ce qu’elles avaient vécu. "Je n’aurais jamais imaginé l’ampleur du désastre", commente la rééducatrice. "Il y avait un tel besoin de paroles..." Internet n’existait pas encore pour les recueillir.

    Dans certaines lettres, des femmes lui racontent avoir vécu l’enfermement psychiatrique après avoir parlé.
    "Je me suis rendue compte que j’avais eu de la chance de me taire – j’avais fait une anorexie mentale pendant quelques mois, mais je n’ai rien dit. Je pense qu’à cette époque-là, c’était le seul moyen de survie. On savait que ce n’était pas audible, qu’on ne nous écouterait pas."

    Quand elle est invitée à participer à des débats public sur le sujet ("Inceste : fantasme ou réalité ?"), Eva Thomas lit des extraits de ces courriers – on le lui demande. Elle devient une porte-parole.

    Au téléphone, les membres de l’association SOS inceste se relaient pour écouter les victimes. "On répondait avec son cœur, en positivant. On leur disait ’bravo, vous êtes restée en vie’. On essayait de les doper psychologiquement : ’Racontez-nous comment vous avez survécu’.
    "C’est vrai qu’arriver à survivre à ça sans se suicider, c’est une victoire. Moi aussi je suis passée par des moments terribles où le suicide était quelque chose de toujours possible, presque sécurisant.
    Jusqu’à la parution de mon livre, j’ai vécu ma vie au jour le jour, en survie."
    "Vous êtes la première à qui je le dis"

    La libération de la parole qui éclate dans les années 80 est euphorisante. "Ça a été une espèce de jubilation collective dans les groupes de paroles", se souvient Eva Thomas. C’était joyeux, au point de désarçonner un journaliste venu en reportage dans le local associatif. "On se vivait comme des guerrières, des combattantes", décrit Eva Thomas.
    "C’était extraordinaire de voir à quel point on était heureuses de se retrouver face à quelqu’un qui nous comprenait puisqu’on avait vécu les mêmes trajets, on était passées par les mêmes chemins.
    C’était très rassurant quand on en parlait ensemble parce que tout à coup, à force d’entendre les mêmes mots, les mêmes phrases, les mêmes itinéraires, la façon dont on s’était battue chacune de notre côté, il y avait une forme de normalité qui ressortait.
    Nous, qui nous étions fait jeter avec l’idée qu’on était un peu folles, hystériques, réalisions qu’on avait eu des réflexes normaux, en réaction à un traumatisme."

    A Grenoble, où Eva Thomas vit depuis 30 ans, on la reconnait et on l’aborde, à l’image de cette dame âgée avec son cabas, un jour de marché.
    "Vous êtes Eva Thomas ? Merci Madame, merci, parce que j’ai vécu ça quand j’étais petite et je n’en ai jamais parlé. Vous êtes la première à qui je le dis."

    La dame a refusé un café : "Non, merci. Ça me suffit de vous l’avoir dit."

    Silence dans la petite cuisine grenobloise.
    "C’est émouvant, hein ? Ça m’est arrivé plusieurs fois."
    Le procès de Saint-Brieuc

    La libération de la parole a un autre effet mécanique, relève Anne-Claude Ambroise-Rendu : le nombre d’affaires jugées augmente. "Vous nous en avez donné, du travail", a un jour glissé à Eva Thomas quelqu’un du monde judiciaire.

    Après la publication de son livre, la rééducatrice comprend l’importance pour les victimes de la reconnaissance par la justice. L’inceste doit être puni :
    "Toute ma bagarre était de faire reconnaître que c’était un crime et que ça se traitait d’abord au tribunal. Peut-être que les psys avaient des choses à faire avec les gens qui allaient mal, mais c’est d’abord une histoire de droit. Quand il a été bafoué, on va au tribunal."

    Eva dit qu’elle a vécu des "rencontres formidables" pendant cette période, par ailleurs épuisante émotionnellement.

    “Jours d’inceste” : mon père, ce violeur
    "J’avais toujours dit que je partirais quand le débat serait bien lancé, que je laisserais les autres continuer", se remémore-t-elle. En 1989, elle s’apprête à s’en aller, quand a lieu le "procès de Saint-Brieuc".

    Claudine, qui a témoigné dans l’émission "Médiations" sur TF1, est jugée pour diffamation. Une épreuve. "Tout était à l’envers", se souvient Eva Thomas, entendue comme témoin.
    "Le procureur de la République défendait le violeur, le père de Claudine."

    Claudine a été condamnée à un franc symbolique. "Elle a été condamnée parce que c’est interdit de parler d’un crime prescrit. Je ne l’avais pas compris."
    "Moi qui croyais en la Justice comme on croit en Dieu, je me suis effondrée."
    "Je ne suis pas victime à vie"

    Eva Thomas est rentrée du procès dans un état terrible. "Je titubais comme une femme saoule, ma tension a chuté sans raison, je ne tenais plus debout. Ma tête ne fonctionnait plus, je n’arrivais plus à penser. Comme si le fait d’être interdit de parole, comme si tout ce que j’avais fait était interdit par la loi."

    Elle s’en remettra en demandant officiellement à changer, sur sa carte d’identité, son prénom de naissance pour Eva. Une forme de reconnaissance juridique – la force des symboles qu’elle aime tant. "On a du mal à l’imaginer mais ça a été magique pour moi."

    Eva Thomas retrouvera la force d’écrire un second livre, "Le Sang des mots" (éd. Desclée de Brouwer), paru en 1992. Puis elle s’éclipsera pour se concentrer à sa vie, avec "gourmandise et bonheur".
    "Je ne suis pas victime à vie, je vais vivre ma vie comme tout le monde."

    D’une manière radicale, elle tourne la page. Elle quitte l’association, brûle une partie des œuvres qu’elle a créée ces années-là, consume dans les flammes les lettres reçues :
    "Je me disais que je ne pouvais pas garder les courriers des victimes. J’ai tout mis dans un grand seau d’eau, j’ai fait de la pâte à papier et j’ai fabriqué une espèce de masque que je suis allée brûler dans la nature. Pour moi, symboliquement, c’était important."
    Une cicatrice comme une autre

    Jusqu’à leur décès, au début des années 2000, Eva Thomas a entretenu une relation apaisée avec ses parents, une fois le pardon accepté.
    "A partir du moment où tout était clair, où tout avait été dit, je me suis réconciliée avec eux. Régulièrement, je suis allée passer des vacances chez eux. J’étais heureuse d’être avec mes parents."

    Il est encore éprouvant pour elle de puiser dans ses souvenirs pour raconter son histoire alors que depuis des années la retraitée, décorée de la Légion d’honneur en 2004, n’y pense plus.

    "On peut vivre avec cette cicatrice-là comme avec une autre", assure-t-elle avec conviction. Les robes multicolores qu’elle coud habillent son salon et sa chambre à coucher. La rayonnante retraitée a atteint une forme de "sérénité joyeuse".

    Mais voilà que récemment, elle a "repris la bagarre". Eva Thomas aimerait que les moins de 15 ans soient protégés par un article de loi spécifique. Avec une amie avocate, elles soutiennent un tel changement législatif :
    "On demande que ce soit clair, que ce qui constitue le crime, c’est l’âge de l’enfant. Les agresseurs ne pourront ainsi plus se défendre en disant qu’il était consentant, qu’il n’a rien dit, qu’il a pris du plaisir, etc."

    Elle croit que c’est le bon moment. Récemment, un homme a été renvoyé en justice pour "atteinte sexuelle" et non "viol", pour avoir eu des relations sexuelles avec une enfant de 11 ans.
    "Je pense qu’il y a encore quelque chose à faire."

    • Ce passage me traumatise :

      Et puis, plus tard, le médiateur de l’émission fait entendre d’autres voix, celles de téléspectateurs semblant découvrir que l’inceste relève de l’interdit. Des paroles représentatives de l’état d’esprit d’une partie de la population, que la fin du silence ennuie et qui préfère parler de « l’inceste avec consentement ». Une parole difficilement concevable aujourd’hui.

      « Je suis amoureux de ma fille adoptive. Pourquoi semez-vous la zizanie dans les familles ? », dit un médecin. Un agent technique assume aimer caresser sa fille de 10 ans. « J’ai des relations quotidiennes avec ma fille de 13 ans », témoigne aussi un ingénieur. « Pourquoi empêchez-vous les gens d’être heureux ? »

      Pendant que le médiateur lit ces réactions, le visage d’Eva, abasourdie par ce qu’elle entend, est en gros plan sur l’écran. Son expression est plus parlante que des mots. On l’interroge. « Je pense qu’entre un parent et un enfant, il n’y a pas d’inceste heureux », réagit-elle. « En tout cas, pour l’enfant, ce n’est pas vrai. L’enfant subit une violence. »

      Est-ce que vous pensez qu’on a fait des progrès de ce côté là (si oui, ce serait en partie grâce à #Eva_Thomas) ? Non pas qu’il y a forcément moins d’inceste, mais au moins qu’il n’est plus possible de ne PAS savoir que ce qui est fait est mal ?

      #télévision #pédophilie #1986 (c’est tard...)

  • Russie : SOS femmes en danger | ARTE Info

    http://info.arte.tv/fr/russie-sos-femmes-en-danger

    « S’il te frappe, c’est qu’il t’aime », un dicton populaire encore solidement ancré dans les mentalités… En Russie, les relations sociales aussi bien qu’individuelles sont souvent imprégnées de violence, physique et psychologique.

    #violence_faite_aux_femmes #russie 14 000 décès par an...

  • Les silhouettes de Dannemarie repartent en justice - France 3 Grand Est
    http://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/silhouettes-dannemarie-repartent-justice-1345511.html

    Au mois de mai 2017, l’association féministe strasbourgeoise Les Effrontées avait introduit un référé pour demander à ce qu’on retire immédiatement les figurines. A l’époque le tribunal administratif de Strasbourg leur avait donné raison, mais le Conseil d’Etat s’était prononcé en faveur du maire.

    Les trois juges du Conseil d’Etat avaient infirmé la décision du tribunal administratif de Strasbourg, car selon eux, il n’y a pas eu d’atteinte à la dignité humaine, ni même à l’égalité entre les femmes et les hommes.

    Le groupe de féministes Les Effrontées qui avaient soulevé la question de la discrimination faite aux femmes, au travers de ces silhouettes, avait pris acte de la décision du Conseil d’Etat.

    « On n’a pas lâché l’affaire, explique Sarah Pyd des Effrontées. Nous avons déposé une nouvelle requête devant le tribunal administratif de Strasbourg, mais cette fois avec les Chiennes de garde et Osez le féminisme 67. Nous voulons obtenir une jurisprudence sur la visualisation des femmes dans les lieux publics et à plus ou moins long terme, une loi. »

    « Les femmes stéréotypées comme objet sexuels ça suffit, on aimerait voir mises en avant des femmes qui changent le monde, des médecins, des chercheures, des spationautes », disent ces défenseuses des égalités entre homme et femmes.

    Autre position pour le maire de Dannemarie, Paul Mumbach :"Cet ultime recours est ridicule, ça ne va pas changer quoi que ce soit et va durer une éternité. On en a pour six ou sept ans. Pour moi ce qu’elle font est contre-productif." Pour lui, la présence des silhouettes à Dannemarie représentaient simplement une décoration liée à l’année de la femme.

    La décoration d’automne va d’ailleurs être mise en place ce week-end, ce qui fera disparaître ces silhouettes. Mais en décembre il y aura la décoration de Noël et là de nouvelles silhouettes féminines réapparaitront.

    Le conseil municipal tiendra-t-il compte des demandes réitérées des feministes ? « Le conseil d’Etat a déclaré qu’il n’y a pas eu d’atteinte à la dignité humaine et que nous avons droit à la liberté d’expression et artistique », précise le maire de la commune. « Elles font ce qu’elles veulent, elles vivent comme elles veulent , mais nous aussi . »

    Claire Toubal du Groupe des féministes Les Effrontées avait évoqué cet été des rendez-vous pour permettre aux mentalités d’évoluer. « C’est un long combat dans le domaine de l’égalité entre hommes et femmes. La femme n’est pas un objet sexuel, qui fait les courses, les enfants et la cuisine. » Pour la jeune femme, les luttes antiracistes ont pris beaucoup de temps et ne sont pas terminées, le combat pour les femmes sera long aussi.

    Osez le féminisme, La nouvelle lune, Sos homophobie et les Effrontées organiseront une première réunion publique le 26 octobre, à la maison des syndicats, place de la bourse à Strasbourg, sur la place des femmes dans l’espace public. L’adjointe au maire aux droits des femmes et l’égalité des genres à la ville de Strasb Françoise Bey sera présente.

  • La CASL : Financés par la BAD, les dirigeants se taisent
    SOS Faim
    https://www.farmlandgrab.org/post/view/27538-la-casl-finances-par-la-bad-les-dirigeants-se-taisent


    https://www.sosfaim.be/wp-content/uploads/2017/10/defis_sud_bad_senegal.pdf

    Situées à une dizaine de kilomètres environ de Ross Bethio, les terres de la #CASL sont bordées sur une bonne partie au nord par le fleuve Sénégal, ce qui facilite fortement l’irrigation. Opérationnelle depuis bientôt trois ans, la Compagnie se vante d’avoir produit, dès sa première saison, plus de 60 000 tonnes de #riz blanc. Dans le long terme, selon les déclarations de certains dirigeants de l’Agence nationale de promotion des investissements (Apix), auprès de laquelle la compagnie a été enregistrée, elle devrait contribuer à produire environ 400 000 tonnes de riz blanc, soit un peu moins de la moitié de ce que le gouvernement du président Macky Sall veut réaliser. Et cela sur environ 400 000 ha de #terres que la compagnie souhaite obtenir avec l’appui des services de l’État.

    Une étude publiée en mars 2017 par le Groupe de réflexion sur la sécurité alimentaire (GRSA) a jugé que l’approche de la CASL comporte des avantages et des inconvénients : l’accès à la terre est négocié avec les paysans, mais les compensations sont minimes. Des aménagements sont réalisés en faveur des paysans, mais ceux-ci auraient quand même préféré les entretenir et les exploiter eux-mêmes.

    Des capitaux français et un fils de chef d’État

    Immatriculée comme entreprise à capitaux français et sénégalais, la CASL est détenue en majorité par une société française dénommée Arthur Straight Investissements (ASI), dirigée par M. Laurent Nicolas. À Saint-Louis, les opérations sont sous la tutelle de M. François Grandry, dont une partie de la famille s’est établie au #Sénégal à l’époque de la colonisation française, et s’est longtemps activée dans l’#agro-industrie.

    • Je suppose qu’il s’agit de :

      Ce soir, dès 18h, « En direct de Mediapart » : Amandine Gay, Cédric Herrou, Olivier Besancenot, Octobre-17, solidaires des migrants
      #Médiapart, le 28 septembre 2017
      https://blogs.mediapart.fr/la-redaction-de-mediapart/blog/280917/ce-soir-des-18h-en-direct-de-mediapart-amandine-gay-cedric-herrou-ol

      Rendez-vous mercredi 4 octobre pour notre nouvelle émission vidéo, retransmise en direct et en accès libre, de 18 heures à 22 h 30. Au menu : retour sur nos enquêtes, un débat sur que faire de la révolution d’Octobre 17, et une soirée spéciale, avec Cédric Herrou, consacrée aux très nombreuses initiatives locales d’aide et de solidarité avec les migrants et réfugiés. Le détail du programme :

      et :

      20h30-22h30. #Réfugiés, #migrants : la #France des solidarités

      Soirée animée par Louise Fessard, Carine Fouteau et Edwy Plenel
      Des solidarités citoyennes contre l’égoïsme des politiques. Invités :
      –Judith Aquien, de l’école diplômante Thot.
      –Issouf, ancien étudiant de Thot.
      –Stéphane Broc’h, marin sauveteur à bord de l’Aquarius affrété par SOS Méditerranée.
      –Anne Gautier, membre du collectif de soutien aux migrants El Manba (la source) et de RESF à Marseille.
      –Agathe Nadimi, investie aux côtés des mineurs isolés à Paris.
      –Nan Suel, bénévole à Terre d’errance, active dans les Hauts-de-France.

      21h20-21h45 : Le grand témoin
      #Cédric_Herrou, agriculteur et militant de l’association Roya citoyenne.

      21h45-22h30 : l’Union européenne face à l’enfer libyen
      –Françoise Bouchet-Saulnier, directrice juridique de Médecins sans frontières, de retour de Libye.
      –Charles Heller, réalisateur et chercheur à l’université Goldsmiths de Londres, associé au projet de recherche Forensic Oceanography qui enquête sur les conséquences mortelles des régimes frontaliers militarisés en Méditerranée.
      –Sara Prestianni, photographe et membre de Migreurop et de l’association italienne ARCI.

  • Biphobie : la première enquête nationale vient d’être lancée - Libération
    http://www.liberation.fr/france/2017/09/22/biphobie-la-premiere-enquete-nationale-vient-d-etre-lancee_1598105

    Alors que se tient ce samedi la journée internationale de la bisexualité et de la pansexualité – une « grande marche » est organisée à partir de 14h place du Colonel-Fabien à Paris –, les associations Bi’Cause, SOS homophobie, Act Up-Paris, le MAG Jeunes LGBT et FièrEs ont dévoilé hier les 88 questions qui composent la toute première enquête consacrée à la biphobie en France. Un projet qui, selon Vincent-Viktoria Strobel, président-e de Bi’cause, se veut être « en continuité » avec l’étude de 2012 portant sur la bisexualité et rendue publique en 2015.

    « Dans l’enquête précédente, 73% des répondants considéraient que les personnes bisexuelles pouvaient faire l’objet de discriminations en raison de leur orientation sexuelle. Il était donc important de se pencher exclusivement sur cette thématique. Aujourd’hui, nous voulons théoriser et quantifier la biphobie dans le pays. » Première étape du collectif : recueillir au moins 2 000 questionnaires d’enquête, en ligne depuis ce matin, avant d’informer sur les premiers résultats.
    Rejet et ignorance

    En juin dernier, le 21e rapport annuel de SOS Homophobie (ici en PDF) informait que 32% des LGBTphobies recensées en 2016 étaient des actes biphobes. Le nombre de témoignages avait doublé. 86% de ces victimes déclaraient souffrir de rejet et ou de l’ignorance, 40% d’entre elles percevaient des discriminations à leur égard et 30% avaient vécu des violences verbales. Trop souvent considérée comme un « effet de mode », une « transition » ou un « moment d’indécision », la bisexualité « dérange parce qu’elle questionne la norme », analyse le président de SOS Homophobie Joël Deumier. « Les stéréotypes et autres discriminations à l’égard des bi ou pan peuvent provenir d’inconnus comme de l’entourage, des amis comme du partenaire, des personnes hétérosexuelles comme des personnes homosexuelles. C’est la double peine », poursuit-il.

    Sans annoncer officiellement de date de publication, les cinq associations espèrent pouvoir dévoiler le rapport de cette enquête le 17 mai prochain, lors de la journée mondiale de lutte contre les LGBTphobies. S’ensuivra alors « une bataille institutionnelle contre la biphobie en France », que Vincent-Viktoria Strobel et ses associés espèrent remporter face aux autorités publiques.
    Anaïs Moran

    #biphobie

  • NDDL : des travaux routiers remis en cause ?
    Modifié le 22/09/2017 à 10:24 | Publié le 21/09/2017 à 19:50

    https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nddl-des-travaux-routiers-remis-en-cause-5262106

    Le Conseil d’État, à la demande d’associations, pourrait réétudier les demandes d’annulation de la déclaration d’utilité publique en raison de l’impact des travaux sur la « masse des eaux ».

    Nouvel épisode dans le dossier de Notre-Dame-des-Landes. Ce jeudi, au Conseil d’État, à Paris, plusieurs associations de protection de la nature (Acipa, CéDpa, France Nature Environnement, Bretagne Vivante, Eaux et rivières de Bretagne, SOS Loire Vivante, notamment) ont demandé la cassation de jugements prononcés en juillet 2015 et novembre 2016 par le tribunal et la cour administrative d’appel de Nantes.

    Pas question, cette fois, de l’aéroport en lui-même, mais du programme des travaux routiers qui l’accompagne et prévoit des modifications de tracés et des aménagements, dans des zones humides protégées. Le rapporteur public, Suzanne von Coester, estime que les deux derniers pourvois concernant ces travaux "méritent à notre avis l’admission".

    Selon elle, la cour nantaise n’a pas apprécié suffisamment l’impact des travaux projetés sur la « détérioration de la masse des eaux », qui couvre quelques milliers d’hectares. Les aménagements auraient forcément des conséquences sur la température, le bilan oxygène et la pollution de ces eaux qui forment l’habitat naturel d’une quantité importante d’espèces protégées.

    Le Conseil d’État rendra sa décision dans les prochaines semaines.

    #NDDL

  • Reprendre racine
    https://lesjours.fr/obsessions/vallee-roya/ep8-migrants

    Merci beaucoup @isskein pour le signalement de cet article

    La migration est une perte de soi. On y laisse son identité, ses repères, et si on n’y perd pas la vie ou la dignité, on finit par se perdre soi-même. On égare ses papiers, on se les fait voler ou on s’en débarrasse, on perd son nom. Mamadou ne s’appelait pas Mamadou au Soudan, dans les monts Nuba, à l’Est du Darfour. Il a fui la guerre, a vu des morts, des viols, a été esclave en Libye, a traversé la Méditerranée sur un rafiot fin 2015. Puis il a été accueilli dans la vallée de la Roya et a décidé d’y rester. « Je suis de la montagne, dit-il tranquillement, un jour d’août, installé en bord de rivière, à Sospel (Alpes-Maritimes). J’aime la montagne, même si ici, elle est très différente. »

  • Jean-Michel Blanquer. Une politique scolaire et de droite et de droite
    https://www.democratisation-scolaire.fr/spip.php?article260

    Toute une partie du discours de Blanquer vise à caresser dans le sens du poil les tenants de l’approche conservatrice. Par exemple la distribution aux élèves des Fables de La Fontaine (auteur injustement instrumentalisé par les tenants du retour en arrière en matière éducative) est saluée à droite. Alain Finkielkraut (inlassable contempteur de la pédagogie) apporte son soutien au ministre et à son directeur de cabinet qui veut « restaurer les grands textes patrimoniaux dès le plus jeune âge » (L’Obs du 24/08/2017). Au demeurant, il faut rappeler qu’après la publication, en 2016, de son livre « L’école de demain » (Odile Jacob), Blanquer était présenté par les médias comme le probable ministre de l’Eduction Nationale de François Fillon. A la veille de sa désignation au ministère, Blanquer accorde un entretien au très conservateur site SOS-Education, proche notamment de la manif pour tous. L’article sera précipitamment retiré du site par l’association éditrice qui ne veut pas « causer du tort au ministre » mais se réjouit bruyamment de sa nomination. Le Figaro, pour sa part, rappelle, en s’en réjouissant, que lorsqu’il était recteur de l’académie de Créteil, Blanquer faisait chanter la Marseillaise aux écoliers et organisait des stages de « tenue de classe » pour les professeurs (Le Figaro, 17/05/2017). Et Blanquer vient de relancer le projet d’apprendre la Marseillaise à tous les écoliers. Il veut aussi développer à nouveau les internats d’excellence et favoriser un recours plus large au redoublement. Après sa prise de fonction, le ministre donne une interview au Monde (un journal plus convenable que SOS éducation) dans laquelle il dénonce le clivage gauche-droite « qui a fait plus de mal que de bien à l’éducation ». Plus de clivage donc, du « pragmatisme ». Parmi les éléments de langage qui réjouissent les conservateurs, il y a la dénonciation par Blanquer de l’égalitarisme. Le titre de son entretien à l’Obs (24/08/2017) est d’ailleurs le suivant : « Le discours égalitariste est destructeur ». Bref Blanquer c’est « la droite complexée » (ou qui avance masquée).

    • Grüne wollen Asylvergabe lockern

      Wegen der dramatischen Verhältnisse im Mittelmeer verlangt die Partei die Wiedereinführung des Botschaftsasyls.

      Ein gewichtiges Problem sei für die Grünen «die unsägliche Situation im Mittelmeer», betont der Fraktionschef. Es sei schlicht unhaltbar, dass die Schweiz via Internationale Organisation für Migration die libysche Küstenwache finanziere. Tatsächlich überwies der Bund hierfür eine Million Franken, wie der SonntagsBlick publik machte.

      https://www.blick.ch/news/politik/unsaegliche-situation-im-mittelmeer-gruene-wollen-asylvergabe-lockern-id725138
      #Glättli #Balthasar_Glättli

    • La Suisse nie toute complicité dans les exactions contre les migrants en Libye

      La protection des droits des réfugiés et des migrants est une priorité absolue, y compris en Libye, assure le gouvernement suisse. Ce en réponse aux accusations d’Amnesty International selon lesquelles les pays européens sont complice des « mauvais traitements infligés aux réfugiés et aux migrants » dans les centres de détention libyens.

      https://www.swissinfo.ch/fre/societe/rapport-d-amnesty-international_la-suisse-nie-toute-complicit%C3%A9-dans-les-exactions-contre-les-migrants-en-libye/43752324
      #complicité

    • La Suisse participe au refoulement des migrants en Libye
      Source : le journal officiel du Département fédéral des affaires étrangères...

      La Confédération a alloué un million de francs aux gardes-côtes libyens. Cette politique a contribué à freiner les traversées, mais elle équivaut à soutenir le racket des migrants, dénoncent plusieurs ONG.

      Un million de francs suisses pour les gardes-côtes libyens. C’est la somme qui a été engagée par la Suisse en 2017 dans le cadre d’un programme européen mené par l’Organisation internationale des migrations (OIT). « Trois modules de formation ont été conduits avec les autorités compétentes en matière de sauvetage en mer et de migrations », rapporte Emmanuelle Jaquet von Sury, porte-parole du Département fédéral de justice et de police (DFJP). « Un focus particulier a été mis sur l’enregistrement des migrants suite aux opérations de sauvetage en mer afin de pouvoir assurer leur suivi, également dans les lieux de détention. »

      Les gardes-côtes ont reçu des équipements de sauvetage, incluant 2500 pièces, dont des gilets de sauvetage, des trousses de premiers secours, et des couvertures, indique le DFJP. La Suisse n’est pas sur place pour vérifier le déroulement de ce programme, « mais la présence dans la majorité des ports à l’ouest de Tripoli de représentants de l’OIM et du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) permet d’assurer une assistance et une certaine protection lors du débarquement et notamment l’enregistrement et la détection de cas particulièrement vulnérables », assure la porte-parole. Cependant, « la situation de conflit en Libye réduit parfois la mobilité du personnel OIM et complique la mise en œuvre du projet. »
      Accusations de racket et d’interceptions meurtrières en mer

      De leur côté, plusieurs ONG accusent les gardes-côtes libyens de participer au racket des migrants. Les équipages des Libyan Coast Guards (LCG) auraient même provoqué des noyades. C’est ce que dit un rapport publié fin 2017 par Amnesty International, qui cite un incident arrivé le 6 novembre, au cours duquel des manœuvres d’une frégate des gardes-côtes auraient contribué à la noyade d’une cinquantaine de personnes.

      Le DFJP déclare ne pas avoir d’informations officielles permettant de confirmer cet incident. « Le nombre alarmant de naufrages en mer Méditerranée, avec 2832 décès en 2017, nous oblige cependant à contribuer à une meilleure protection des migrants. Le projet de l’OIM pour le sauvetage en mer a été mis en œuvre afin de poursuivre cet objectif humanitaire », avance Emmanuelle Jaquet von Sury. Amnesty dénonce un double langage. « Les États européens, qui connaissent parfaitement les graves violations dont sont victimes les réfugiés et migrants en Libye ont choisi de contrôler les migrations en soutenant les autorités libyennes. En stoppant les traversées, ils bloquent des milliers de personnes dans un pays où elles sont systématiquement soumises à des abus et où elles n’ont peu ou pas de chances de trouver une protection. »

      « Les personnes sauvées en mer nous disent qu’elles préféreraient mourir plutôt que de retourner en détention en Libye », rapporte Caroline Abu Sa’Da, directrice de SOS Méditerranée Suisse, association qui participe aux opérations de sauvetage menées par le navire Aquarius. Elle estime qu’il est impossible de faire confiance aux LCG. « Qui sont ces gardes-côtes ? Ce sont plutôt des milices qui opèrent des interceptions et qui ramènent les migrants en détention – où les conditions sont atroces –, empêchant parfois un secours par une ONG. La Suisse ne peut pas se voiler la face en se satisfaisant du fait que ces unités sortent des gens de l’eau. »

      Organisatrice en novembre 2017 à Berne de la troisième rencontre du Groupe de contact pour la Méditerranée centrale, « la Suisse s’aligne sur une politique européenne répressive, qui a pour but d’empêcher l’accès des migrants à l’Europe », estime Vincent Chetail, directeur du Centre des migrations globales de l’Institut de hautes études internationales et du développement à Genève. L’Union européenne (UE) a fourni 46 millions d’euros en 2017 pour renforcer les capacités d’intervention des autorités libyennes. Elle met en avant le fait que cette politique a entraîné l’an passé une diminution sensible des traversées. Cette stratégie a permis le sauvetage en mer des 14 000 personnes, avance le DFJP. « La Libye, qui n’a pas ratifié la Convention de Genève sur les réfugiés, n’est pas un pays d’asile. Il n’est ni sûr, ni protecteur. Il n’y a pas de régime en place et les fonds alloués seront détournés, rétorque le professeur de droit international, qui estime que l’Europe se rend ainsi complice d’abus. »
      Poussés vers des traversées encore plus dangereuses

      L’expert dénonce une politique inefficace et de nature à accroître les dangers. « Les traversées à partir de la Libye ou de la Tunisie empruntent les voies les plus faciles. Si ces accès sont bloqués, les flux migratoires vont se déplacer ailleurs, augmentant les risques de traversées dangereuses pour la vie humaine. » Le fondateur du Centre des migrations globales juge que c’est toute la vision des migrations qui est faussée. « En 2015, le nombre de demandeurs d’asile arrivés en Europe s’est élevé à 1,2 million de personnes, soit 0,2 % de la population de l’UE, et c’était un pic statistique. On ne peut donc pas parler d’afflux massif. Les vrais enjeux consistent à aider à la reconstruction de la Libye et à repenser une poltique migratoire, notamment en ouvrant des voies d’accès légales vers l’Europe. » Selon Amnesty International, près d’un demi-million de personnes auraient pris la mer entre 2015 et 2017, entraînant plus de 10 000 morts. Les exilés présents en Libye dépasseraient les 400 000 personnes, selon l’OIM, avec un total estimé de 20 000 migrants en détention.

      Présent à Berne en novembre 2017 à la troisième rencontre du Groupe de contact, aux côtés du HCR et de l’OIM, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui visite des centres de détention en Libye, rappelle qu’« une politique migratoire doit également avoir pour ambition de réduire l’utilisation de la détention comme moyen de gestion de la migration et de réduire les abus sur les migrants. » L’organisation a recommandé de « renforcer la gestion des restes humains et celle des données sur les personnes décédées et de faciliter la transmission d’informations sur le fait et le lieu de disparition aux familles des disparus », indique Thomas Glass, porte-parole.

      En Méditerranée, l’hiver n’a pas arrêté les traversées. Le mardi 16 janvier, les équipes de l’Aquarius ont mené cinq opérations de sauvetage d’affilée, permettant de secourir 505 personnes. Le même jour, les garde-côtes italiens, qui ont coordonné un total de 11 opérations de sauvetage – par des ONG et de navires marchands – ont calculé que 1400 personnes avaient été secourues au large de la Libye. « Il est impossible de couvrir l’intégralité de la zone de sauvetage avec les trois bateaux d’ONG qui restent sur la zone, a commenté SOS Méditerranée, appelant les États européens à s’engager à mettre en place une flotte de sauvetage européenne pour éviter des milliers de morts annoncées. »

      http://www.revue.ch/fr/editions/2018/02/detail/news/detail/News/la-suisse-participe-au-refoulement-des-migrants-en-libye

  • https://www.youtube.com/watch?v=CMcKrMXzjhg

    Rêve de savoir jouer du piano comme Dollar Brand
    Rêve d’une nouvelle procédure judicaire
    Rêve de ma pendaison par la maladresse de mon père

    C’est un pic-vert
    Opiniâtre
    Qui me réveille

    Le pic-vert matinal
    M’envoie un message
    En morse, ce n’est pas SOS

    Un vent du Nord
    A créé du désordre
    Dans ma chambre

    Le vent du Nord
    Ne savait pas quoi nous apporter :
    De grands fourreaux de nuages

    Le vent du Nord
    Souffle fort au sommet
    Les nuages passent vite

    Le vent du Nord
    Brosse la canopée
    Sans bruit, continument

    Le vent du Nord
    Me donne envie d’un café
    Avec des spéculoos !

    Je reproduis un rituel photographique
    Sans y croire, par pure habitude
    Ma photographie est devenue superstition

    Les fesses froides sur la margelle
    Les doigts qui brûlent autour de la tasse
    Le visage dans les nuages, là

    Le ciel se couvre, plus un rai de soleil
    Émile arrive pour son petit déjeuner
    Je vais aller faire de la peinture

    Tout à l’heure, des nuages gris
    Se découpaient sur ciel bleu,
    Maintenant nuages blancs sur ciel gris

    Un premier rideau de pluie
    Franchit le Bousquillou
    Nous n’y couperons pas

    Je voudrais décrire la beauté
    D’une partie d’échecs avec Émile
    Mais n’est pas Nabokov qui veut

    Le vent du Nord
    Joue avec
    Mes nerfs

    La musique me fait penser à elle
    La poésie me fait penser à elle
    De quelles beautés faut-il me couper ?

    La photographie
    Ne me fait pas penser à elle
    Mais je n’en fais plus, je devrais

    Il n’était pas neuf heures
    Quand ma voisine est venue voir si cela allait
    J’avais déjà peint cinq volets. Ça va mieux !

    Rouge basque
    Rouge basque
    Rouge basque

    Ma voisine a fini de lire hier soir
    Une fuite en Égypte
    Son sourire en dit long. Ému

    Une fois par an, des jurons
    Et un litre de mélange à 4%
    Pour ressusciter la débrousailleuse

    Tous les ans je mesure les progrès
    D’Émile dans sa spatialisation
    En passant la débroussailleuse

    Je délègue le déjeuner aux filles
    Et je retourne sous l’arche
    Manger de la poussière

    Le vent du Nord
    Plein de remords
    A dispersé tous ses nuages

    La factrice apporte le journal
    Abonnement de mes parents
    Zoé : « encore des articles sur Macron ! »

    Un article retrace l’affaire Fillon
    Les dates qui l’émaillent au printemps
    Sont celles de mon histoire avec elle

    Mais mains sont pleines
    De rouge basque et laissent
    De petites tâches sur mon clavier

    D’après le journal, les nouveaux députés
    Macronistes viennent de l’entreprise
    Et parlent de bench marking à l’Assemblée

    Je m’interdis
    La lecture
    Du journal

    Je m’interdis la lecture du journal
    J’ai bien assez de livres comme ça
    Au hasard : Partages d’A. Markowicz

    Les rêves de sieste
    Sont tellement prompts à la fuite
    De vrais lézards sur des murs chauds

    De fins rideaux de pluie se succèdent
    Douchent les velléités de rivière
    Et encouragent le ponçage

    Deux belles parties siciliennes
    Avec Émile, par deux fois
    Les Noirs l’emportent

    La vie des maisons cévenoles
    En hiver donnent du souci
    À leurs habitants en été

    C’est un Juif qui parle
    À un autre Arabe…

    (André Markowicz)

    Pour Philippe De Jonckheere
    À la même table, dans la même vie
    André Markowicz (25 mars 2017)

    Dans la nuit du 24 au 25 mars
    Je m’en souviens
    Elle m’a …

    Le 25 mars au matin
    Je lui ai cuisiné une omelette
    Qu’elle a trouvé parfaite

    Et le 25 mars au soir
    Je la retrouvais dans Paris
    Visiter l’exposition de Twombly

    Le 25 mars, je l’ai photographiée
    De dos devant l’École de Fontainebleau
    C’est l’unique image que j’ai d’elle

    Le 25 mars, nous avons dîné
    De frites et de légumes crus délicieux
    À la terrasse du Père Fouettard

    Le soir du 25 mars, je la déposais
    Devant chez elle, dans un grand rire
    Elle m’a montré ses fesses dans mes phares

    Après mûre réflexion
    Je décide de ne pas
    Arracher la page de dédicace

    Hanno arrive
    Avec Till et Mila
    Je les vois sur la route

    Dîner désordre
    Mais bon
    Mais désordre

    Le soir, les enfants partis dans leurs chambres
    Nous parlons avec Hanno, je lui parle d’elle
    Nous parlons des États-Unis, des Arts Déco

    Nous parlons des États-Unis, des Arts Déco
    Mais nous ne sommes pas d’anciens combattants
    Au contraire des personnes avides de comprendre

    Quelques paroles tellement vraies entre nous
    Tu ne fais plus de photos ? Non, j’écris. Oui, bien sûr
    C’est la différence entre exister un peu, et pas du tout

    Nous reparlons de la mort de mon frère
    De cette douleur de toute une vie
    Hanno se souvient de comment j’étais avant

    On reparle d’amis perdus de vue
    Des voyages à Saint-Dizier
    Et de ma petite voiture, l’AX

    Je suis triste, Hanno me dit
    Que je ne devrais pas. C’est juste
    Le mauvais moment de l’année, fin juillet

    Il est minuit quand nous montons
    Je reçois un gentil message de B.
    Elle me manque

    Je m’endors en relisant le message de B.
    J’ai noté trois mots sur un papier
    Pour ne pas les oublier. Nuit

    #mon_oiseau_bleu

  • Extraction de sable. 2 000 personnes lancent un SOS à Trébeurden
    http://www.ouest-france.fr/bretagne/trebeurden-22560/extraction-de-sable-2-000-personnes-lancent-un-sos-trebeurden-5186537

    Beau temps, belle mer et belle mobilisation sur le port de Trébeurden, ce dimanche matin. 2 000 personnes ont répondu à l’appel des associations et élus engagés dans la lutte contre l’extraction de sable en baie de Lannion. Ensemble, elles ont composé en lettres humaines un SOS, comme Save our sand. Et ceci, à 15 jours de la rencontre à Bercy d’une délégation trégorroise d’opposants, auprès du cabinet de Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des Finances.
    […]
    Et Thierry Soufflé d’ajouter. « On en attend du concret, de cette réunion, avec la suppression pure et simple de ce décret d’autorisation de l’extraction de sable accordé à la Cie armoricaine de navigation (Can), en 2015 mais suspendu jusqu’au 1er septembre. Si ce n’est pas le cas, on ne sera pas en mesure de maîtriser la colère des gens. Les Bretons sont gentils, mais faut pas pousser. »

  • Migrants en mer : « A un moment donné, quand quelqu’un coule, vous le sauvez »
    https://www.mediapart.fr/journal/international/130817/migrants-en-mer-un-moment-donne-quand-quelqu-un-coule-vous-le-sauvez

    © Narciso Contreras/SOS #méditerranée En Méditerranée, plusieurs #ONG interviennent pour sauver de la noyade des migrants embarqués à bord de rafiots de fortune. Ce que leur reprochent les autorités italiennes et européennes : par leurs actions, les associations favoriseraient l’immigration illégale. Une « erreur d’analyse », répond Francis Vallat, président de SOS Méditerranée.

    #International #crise_migratoire #réfugiés

  • Logement : vive polémique sur la baisse de 5 euros des APL à la rentrée
    http://www.latribune.fr/economie/france/logement-vive-polemique-sur-la-baisse-de-5-euros-des-apl-a-la-rentree-7449

    C’est une mesure symbolique certes mais qui en dit long sur la réalité de l’impasse budgétaire et des ennuis qui attendent le gouvernement à la rentrée, alors que Emmanuel Macron a promis de tenir la barre des 3% du PIB de déficit public, mais veut "en même temps" baisser les impôts et les dépenses publiques. L’annonce, samedi à l’AFP, par une responsable du ministère de la Cohésion des Territoires, chargé notamment du Logement, que toutes les aides au logement allaient baisser de 5 euros par mois et par foyer à partir d’octobre n’en finit pas de créer la polémique. Selon le ministère de la Cohésion des Territoires, il s’agit de "l’application d’une réforme d’économie budgétaire décidée sous le quinquennat précédent".

    Que nenni ! a rétorqué dimanche dans le JDD Christian Eckert, l’ancien ministre du Budget : "nous ne l’avons jamais envisagée. Jamais. Je suis formel. Elle ne nous semblait pas juste".
    […]
    Selon Christian Eckert, "à chaque changement de ministre, il se passe le même scénario : la direction du Budget présente une liste de mesures que l’on appelle « #le_musée_des_horreurs », des mesures généralement refusées par les prédécesseurs et qu’elle essaye de replacer". Il a par ailleurs estimé qu’il était trop tôt pour parler de « trou budgétaire ». « L’année n’est pas terminée. Comment peuvent-ils savoir en juin qu’il va manquer 140 millions à la fin de l’année sur un budget de 18 milliards d’euros », s’est-il interrogé.

    De son côté, l’ancienne ministre du logement Emmanuelle Cosse a accusé le gouvernement « de dire n’importe quoi ». « Monsieur Darmanin, n’assumant pas cette mesure de rigueur très dure et qui va faire très mal dans les publics défavorisés, explique que c’est l’application d’une réforme que nous aurions mis en place, ce qui est faux », a-t-elle dénoncé sur France Info. Même dénégation de sa devancière à ce poste, la radicale de gauche Sylvia Pinel. « Cette mesure d’économie revient régulièrement et je m’y suis toujours opposée lorsque j’étais en charge de ce dossier et elle avait d’ailleurs été systématiquement écartée par le précédent gouvernement. Je demande donc au Premier ministre et à son gouvernement de revenir sur cette décision dangereuse et injuste pour les ménages modestes », a-t-elle déclaré sur page Facebook.

  • Le Qatar n’aime pas que la pierre de taille, aussi le terrorisme Le Grand Soir - Jacques-Marie BOURGET - 18 Juillet 2017

    La stratégie suicidaire de l’Arabie Saoudite qui, croyant réduire le Qatar l’a élevé au statut abusif de victime, a un effet sur ce monstre dont Bourdieu disait qu’il n’existe pas : l’opinion publique. Dans les chaumières certains esprits contrits imaginent le Qatar ravalé en Somalie ou Yémen où, pour survivre, il faut manger de l’herbe. Non, qu’on se rassure, inutile de lancer une quête pour un « SOS Qatar ». Si les choses de l’argent sont un peu plus difficiles, tout va bien. Mieux Erdogan et le Pakistan ont expédié des troupes pour défendre Doha… d’une offensive saoudienne qui restera imaginaire. Ne pleurez plus, le Qatar reste le bastion de l’islam le plus obscurantiste et radical, le wahhabisme, et son apparence de victime va conforter son activité messianique. Le 19 juin dernier, à Paris, le Centre International de Géopolitique et de Prospective Analytique (CIGPA) a tenu une cession consacrée aux différents aspects géopolitiques du Qatar. L’aide de Doha au terrorisme était au programme…


    Le premier indice donné par le Qatar, afin de démontrer sa volonté politique majeure, celle de jouer un rôle décisif au Moyen Orient et même au-delà, dans une vision qui se voulait mondial, a été de donner refuge à tous les mouvements terroristes de la planète. A partir du moment où ils étaient d’essence sunnite et non hostiles aux Frères Musulmans.

    Ainsi Doha est devenu un lieu étrange, un peu comparable -mais à rebours- à ce que fût Alger dans les années 60 qui servait alors de base pour l’organisation et l’expression de tous les mouvements marxistes de libérations de peuples. La comparaison s’arrête ici, mais le Qatar a ouvert à Doha des bureaux, avec le statut virtuel d’ambassade, à tous les prêcheurs de djihad, à ceux qui rêvent d’Etat islamique ou de Califat. Cet outil diplomatique, si atypique, est surveillé à la fois par le bureau de l’émir et par les Frères Musulmans qui, au Qatar, sont un état bis.

    La suite . . . . . . .
    https://www.legrandsoir.info/le-qatar-n-aime-pas-que-la-pierre-de-taille-aussi-le-terrorisme.html

    https://www.youtube.com/watch?v=r0fzgGv_sIc

    #Qatar #Arabie_Saoudite #obscurantisme #djihad

  • Sauvetage en mer : l’Europe s’en prend aux ONG mais pas aux garde-côtes libyens
    https://www.bastamag.net/Sauvetage-en-mer-l-Europe-s-en-prend-aux-ONG-mais-pas-aux-garde-cotes-liby

    Elles ont déjà fait l’objet d’enquêtes, sans preuves, pour soi-disant avoir collaboré avec des passeurs et des trafiquants d’êtres humains. Les organisations non gouvernementales (ONG) qui procèdent à des sauvetages en mer Méditerranée pour secourir des migrants, telles l’association SOS Méditerranée, dont le siège est à Marseille, ou l’organisation allemande Sea Watch, sont à nouveau la cible d’attaques des autorités italiennes et européennes. Début juillet, la Commission européenne a proposé un « plan (...)

    En bref

    / #Europe, #Migrations, #Afrique, #Droits_fondamentaux