Covid-19 : les clusters se multiplient dans les hôpitaux
Plusieurs représentants du monde hospitalier appellent à vacciner au plus vite l’ensemble des professionnels de santé.
Si les soignants sont fortement touchés par le Covid-19 depuis le début de l’épidémie, ces dernières semaines, les clusters intrahospitaliers se multiplient dans les établissements. Pas de chiffre à ce jour, pour établir une comparaison entre cette troisième vague avec celles de mars et de novembre 2020, mais un sentiment qui domine : « On est surpris qu’autant de clusters surviennent dans autant d’établissements au même moment », résume Thierry Godeau, à la tête de la conférence nationale des présidents de commissions médicales d’établissement (CME) de centres hospitaliers.
Compiègne, Dieppe, Arras, Le Havre, Niort… La liste s’allonge depuis le début de l’année, constate-t-il. Le Collectif inter-hôpitaux (CIH) cite encore Quimper, Menton, Créteil, Rennes ou Pau, dans un communiqué daté du 24 janvier dans lequel il s’alarme de voir des soignants « massivement contaminés ». « Nous n’avons pas d’explications, rapporte Thierry Godeau, praticien au centre hospitalier de La Rochelle, directement concerné, avec des clusters déclarés dans six services en quelques jours. On a fait appel à la cellule de l’agence régionale de santé qui travaille sur les infections associées aux soins, ils n’ont pas trouvé de réponse pour l’instant. » Dans son établissement, aucun cas de variant britannique, dont la contagiosité est plus forte, n’a été détecté à ce jour.
« L’usure et la fatigue des personnels peuvent entrer en compte, mais ça ne peut se résumer à une question de pratique soignante, estime-t-il. Pas dans autant d’établissements, au même moment, en si peu de temps. » Du côté des centres hospitaliers universitaires (CHU), ce sont environ trois quarts des établissements qui font état d’au moins un cluster dans leurs murs, début février, d’après la conférence des présidents de CME, qui a fait le point sur la situation de 24 CHU (sur la trentaine existant dans le pays). Avec, en général, trois à cinq soignants touchés par cluster, mais jusqu’à 15 à 20 soignants dans quatre établissements.
« Fatigant et compliqué »
« Actuellement, le nombre de clusters est stable, ou en baisse. On ne constate pas l’explosion redoutée avec le variant, rassure François-René Pruvot, à la tête de la conférence des présidents de CME de CHU. Cela impacte l’activité des services, mais il n’y a pas d’hôpitaux qui rencontrent un blocage ou une interruption de l’activité. » Ce qui n’empêche pas les difficultés : « Ce sont des clusters perlés, qui s’éteignent dans un service, se rallument dans un autre, c’est fatigant et compliqué en termes d’organisation. »
« Cela révèle en tout cas combien il est important de vacciner tous les soignants, reprend le docteur Thierry Godeau. On a raisonné dans cette campagne vaccinale en termes de risque individuel, en ciblant d’abord les plus âgés, mais on a oublié le risque sanitaire de se retrouver avec des établissements de santé paralysés. » Jusqu’à aujourd’hui, seuls les soignants de plus de 50 ans ou souffrant de comorbidités font partie des populations auxquelles la vaccination est ouverte.
Lui et ses deux homologues des CHU et des centres hospitaliers spécialisés ont alerté, à la fin janvier, le ministre de la santé, Olivier Véran, dans une lettre commune, appelant à étendre au plus vite la vaccination à « l’ensemble des professionnels au contact des patients en commençant dès maintenant par ceux qui travaillent dans toutes les unités de soins ». Une demande formulée dans le même sens par le CIH : « Les doses vaccinales sont certes insuffisantes, mais le CIH rappelle qu’un hôpital sans soignants ou avec des soignants propagateurs de l’infection ne sera d’aucune utilité dans cette nouvelle vague. »
L’arrivée d’un troisième vaccin, celui d’AstraZeneca, proposé à partir de samedi 6 février à l’ensemble des soignants, comme l’a annoncé le gouvernement jeudi 4 février, devrait répondre à ces interpellations. « On aurait souhaité que ce soit fait avant, mais on ne va pas polémiquer, dit Thierry Godeau. Maintenant, il faut foncer, on peut l’organiser très vite dans nos hôpitaux, il faut juste recevoir les doses. »