• Les #sciences_humaines et sociales face aux #verrous de la #transition | Institut de la transition environnementale de l’Alliance Sorbonne Université
    https://ite.sorbonne-universite.fr/actualites-ite/les-sciences-humaines-et-sociales-face-aux-verrous-de-la-tra

    #videos

    Mercredi 15 novembre
    Introduction
    09 :15 – 09 :45 > Introduction au #colloque
    Organisateur.e.s et Anouk Barberousse, directrice de l’ITE

    Session 1 : La transition : un verrou ?
    Modérateurs : Nelo Magalhães et Luc Elie
    09:45 - 10:15 › S1-1 : Sans transition. Une nouvelle histoire de l’énergie
    #Jean-Baptiste_Fressoz (historien, CNRS)
    10:15 - 10:45 › S1-2 : Retour sur une longue série de sémantiques socio-politiques : Forces et faiblesses de la transition écologique
    Florence Rudolf (sociologue, INSA Strasbourg)
    10:45 - 11:15 › S1-3 : La transition, une métaphore adaptée pour aller vers une société climatiquement neutre
    #Philippe_Quirion (économiste, #CNRS)
    11:15 – 12 :00 › S1-4 : Débat de la session 1

    https://vimeo.com/902875269

  • Quand le #comité_d’éthique du #CNRS se penche sur l’#engagement_public des chercheurs et chercheuses

    #Neutralité ? #Intégrité ? #Transparence ?

    Le Comité d’éthique du CNRS rappelle qu’il n’y a pas d’#incompatibilité de principe, plaide pour un « guide pratique de l’engagement » et place la direction de l’institution scientifique devant les mêmes obligations que les chercheurs.

    Avec la crise climatique, la pandémie de covid-19, l’accroissement des inégalités, le développement de l’intelligence artificielle ou les technologies de surveillance, la question de l’#engagement public des chercheurs est d’autant plus visible que les réseaux sociaux leur permettent une communication directe.

    Cette question dans les débats de société n’est pas nouvelle. De l’appel d’#Albert_Einstein, en novembre 1945, à la création d’un « #gouvernement_du_monde » pour réagir aux dangers de la #bombe_atomique à l’alerte lancée par #Irène_Frachon concernant le #Médiator, en passant par celle lancée sur les dangers des grands modèles de langage par #Timnit_Gebru et ses collègues, les chercheurs et chercheuses s’engagent régulièrement et créent même des sujets de #débats_publics.

    Une question renouvelée dans un monde incertain

    Le #comité_d'éthique_du_CNRS (#COMETS) ne fait pas semblant de le découvrir. Mais, selon lui, « face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée ». Il s’est donc auto-saisi pour « fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public » et vient de publier son #rapport sur le sujet [PDF].

    Il faut dire que les deux premières années du Covid-19 ont laissé des traces dans la communauté scientifique sur ces questions de prises de paroles des chercheurs. Le COMETS avait d’ailleurs publié en mai 2021 un avis accusant Didier Raoult alors que la direction du Centre avait rappelé tardivement à l’ordre, en août de la même année, et sans le nommer, le sociologue et directeur de recherche au CNRS Laurent Mucchielli, qui appelait notamment à suspendre la campagne de vaccination.

    Le COMETS relève que les chercheurs s’engagent selon des modalités variées, « de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog ». Il souligne aussi que les #réseaux_sociaux ont « sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés ».

    La présidente du comité d’éthique, Christine Noiville, égrène sur le site du CNRS, les « interrogations profondes » que ces engagements soulèvent :

    « S’engager publiquement, n’est-ce pas contraire à l’exigence d’#objectivité de la recherche ? N’est-ce pas risquer de la « politiser » ou de l’« idéologiser » ? S’engager ne risque-t-il pas de fragiliser la #crédibilité du chercheur, de mettre à mal sa réputation, sa carrière ? Est-on en droit de s’engager ? Pourrait-il même s’agir d’un devoir, comme certains collègues ou journalistes pourraient le laisser entendre ? »

    Pas d’incompatibilité de principe

    Le comité d’éthique aborde les inquiétudes que suscite cet engagement public des chercheurs et pose franchement la question de savoir s’il serait « une atteinte à la #neutralité_scientifique ? ». Faudrait-il laisser de côté ses opinions et valeurs pour « faire de la « bonne » science et produire des connaissances objectives » ?

    Le COMETS explique, en s’appuyant sur les travaux de l’anthropologue #Sarah_Carvallo, que ce concept de neutralité est « devenu central au XXe siècle, pour les sciences de la nature mais également pour les sciences sociales », notamment avec les philosophes des sciences #Hans_Reichenbach et #Karl_Popper, ainsi que le sociologue #Max_Weber dont le concept de « #neutralité_axiologique » – c’est-à-dire une neutralité comme valeur fondamentale – voudrait que le « savant » « tienne ses #convictions_politiques à distance de son enseignement et ne les impose pas subrepticement ».

    Mais le comité explique aussi, que depuis Reichenbach, Popper et Weber, la recherche a avancé. Citant le livre d’#Hilary_Putnam, « The Collapse of the Fact/Value Dichotomy and Other Essays », le COMETS explique que les chercheurs ont montré que « toute #science s’inscrit dans un #contexte_social et se nourrit donc de #valeurs multiples ».

    Le comité explique que le monde de la recherche est actuellement traversé de valeurs (citant le respect de la dignité humaine, le devoir envers les animaux, la préservation de l’environnement, la science ouverte) et que le chercheur « porte lui aussi nécessairement des valeurs sociales et culturelles dont il lui est impossible de se débarrasser totalement dans son travail de recherche ».

    Le COMETS préfère donc insister sur les « notions de #fiabilité, de #quête_d’objectivité, d’#intégrité et de #rigueur de la #démarche_scientifique, et de transparence sur les valeurs » que sur celle de la neutralité. « Dans le respect de ces conditions, il n’y a aucune incompatibilité avec l’engagement public du chercheur », assure-t-il.

    Liberté de s’engager... ou non

    Il rappelle aussi que les chercheurs ont une large #liberté_d'expression assurée par le code de l’éducation tout en n’étant pas exemptés des limites de droit commun (diffamation, racisme, sexisme, injure ...). Mais cette liberté doit s’appliquer à double sens : le chercheur est libre de s’engager ou non. Elle est aussi à prendre à titre individuel, insiste le COMETS : la démarche collective via les laboratoires, sociétés savantes et autres n’est pas la seule possible, même si donner une assise collective « présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.) ».

    Le comité insiste par contre sur le fait que, lorsque le chercheur s’engage, il doit « prendre conscience qu’il met en jeu sa #responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique ».

    Il appuie aussi sur le fait que sa position privilégiée « crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser ».

    Des #devoirs lors de la #prise_de_parole

    Outre le respect de la loi, le COMETS considère, dans ce cadre, que les chercheurs et chercheuses ont des devoirs vis-à-vis du public. Notamment, ils doivent s’efforcer de mettre en contexte le cadre dans lequel ils parlent. S’agit-il d’une prise de parole en nom propre ? Le thème est-il dans le domaine de compétence du chercheur ? Est-il spécialiste ? A-t-il des liens d’intérêts ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? Le #degré_de_certitude doit aussi être abordé. Le Comité exprime néanmoins sa compréhension de la difficulté pratique que cela implique, vu les limites de temps de paroles dans les médias.

    Une autre obligation qui devrait s’appliquer à tout engagement de chercheurs selon le COMETS, et pas des moindres, est de l’asseoir sur des savoirs « robustes » et le faire « reposer sur une démarche scientifique rigoureuse ».

    Proposition de co-construction d’un guide

    Le COMETS recommande, dans ce cadre, au CNRS d’ « élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public » ainsi que des formations. Il propose aussi d’envisager que ce guide soit élaboré avec d’autres organismes de recherche.

    La direction du CNRS à sa place

    Le Comité d’éthique considère en revanche que « le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements », que ce soit dans l’évaluation des travaux de recherche ou dans d’éventuelles controverses provoquées par un engagement public.

    « La direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs », affirme-t-il. La place du CNRS est d’intervenir en cas de problème d’#intégrité_scientifique ou de #déontologie, mais aussi de #soutien aux chercheurs engagés « qui font l’objet d’#attaques personnelles ou de #procès_bâillons », selon lui.

    Le comité aborde aussi le cas dans lequel un chercheur mènerait des actions de #désobéissance_civile, sujet pour le moins d’actualité. Il considère que le CNRS ne doit ni « se substituer aux institutions de police et de justice », ni condamner par avance ce mode d’engagement, « ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire ». Une #sanction_disciplinaire peut, par contre, être envisagée « éventuellement », « en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur ».

    Enfin, le Comité place la direction du CNRS devant les mêmes droits et obligations que les chercheurs dans son engagement vis-à-vis du public. Si le CNRS « prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution ».

    https://next.ink/985/quand-comite-dethique-cnrs-se-penche-sur-engagement-public-chercheurs-et-cherc

    • Avis du COMETS « Entre liberté et responsabilité : l’engagement public des chercheurs et chercheuses »

      Que des personnels de recherche s’engagent publiquement en prenant position dans la sphère publique sur divers enjeux moraux, politiques ou sociaux ne constitue pas une réalité nouvelle. Aujourd’hui toutefois, face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée. Nombre d’entre eux s’investissent pour soutenir des causes ou prendre position sur des enjeux de société – lutte contre les pandémies, dégradation de l’environnement, essor des technologies de surveillance, etc. – selon des modalités variées, de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog. Par ailleurs, le développement des médias et des réseaux sociaux a sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés.

      Dans le même temps, de forts questionnements s’expriment dans le monde de la recherche. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les modalités de l’engagement public, son opportunité et son principe même. Ils se demandent si et comment s’engager publiquement sans mettre en risque leur réputation et les valeurs partagées par leurs communautés de recherche, sans déroger à la neutralité traditionnellement attendue des chercheurs, sans perdre en impartialité et en crédibilité. Ce débat, qui anime de longue date les sciences sociales, irrigue désormais l’ensemble de la communauté scientifique.

      C’est dans ce contexte que s’inscrit le présent avis. Fruit d’une auto-saisine du COMETS, il entend fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public.

      Le COMETS rappelle d’abord qu’il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre, d’un côté, l’engagement public du chercheur et, de l’autre, les normes attribuées ou effectivement applicables à l’activité de recherche. C’est notamment le cas de la notion de « neutralité » de la science, souvent considérée comme une condition indispensable de production de connaissances objectives et fiables. Si on ne peut qu’adhérer au souci de distinguer les faits scientifiques des opinions, il est illusoire de penser que le chercheur puisse se débarrasser totalement de ses valeurs : toute science est une entreprise humaine, inscrite dans un contexte social et, ce faisant, nourrie de valeurs. L’enjeu premier n’est donc pas d’attendre du chercheur qu’il en soit dépourvu mais qu’il les explicite et qu’il respecte les exigences d’intégrité et de rigueur qui doivent caractériser la démarche scientifique.

      Si diverses normes applicables à la recherche publique affirment une obligation de neutralité à la charge du chercheur, cette obligation ne fait en réalité pas obstacle, sur le principe, à la liberté et à l’esprit critique indissociables du travail de recherche, ni à l’implication du chercheur dans des débats de société auxquels, en tant que détenteur d’un savoir spécialisé, il a potentiellement une contribution utile à apporter.

      Le COMETS estime que l’engagement public doit être compris comme une liberté individuelle et ce, dans un double sens :

      -- d’une part, chaque chercheur doit rester libre de s’engager ou non ; qu’il choisisse de ne pas prendre position dans la sphère publique ne constitue en rien un manquement à une obligation professionnelle ou morale qui lui incomberait ;

      -- d’autre part, le chercheur qui s’engage n’a pas nécessairement à solliciter le soutien de communautés plus larges (laboratoire, société savante, etc.), même si le COMETS considère que donner une assise collective à une démarche d’engagement présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.).

      S’il constitue une liberté, l’engagement nécessite également pour le chercheur de prendre conscience qu’il met en jeu sa responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique. En effet, en s’engageant publiquement, le chercheur met potentiellement en jeu non seulement sa réputation académique et sa carrière, mais aussi l’image de son institution, celle de la recherche et, plus généralement, la qualité du débat public auquel il contribue ou qu’il entend susciter. Le chercheur dispose d’une position privilégiée qui crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser. Le COMETS rappelle dès lors que tout engagement public doit se faire dans le respect de devoirs.

      Ces devoirs concernent en premier lieu la manière dont le chercheur s’exprime publiquement. Dans le sillage de son avis 42 rendu à l’occasion de la crise du COVID-19, le COMETS rappelle que le chercheur doit s’exprimer non seulement en respectant les règles de droit (lois mémorielles, lois condamnant la diffamation, l’injure, etc.) mais aussi en offrant à son auditoire la possibilité de mettre son discours en contexte, au minimum pour ne pas être induit en erreur. A cet effet, le chercheur doit prendre soin de :

      situer son propos : parle-t-il en son nom propre, au nom de sa communauté de recherche, de son organisme de rattachement ? Quel est son domaine de compétence ? Est-il spécialiste de la question sur laquelle il prend position ? Quels sont ses éventuels liens d’intérêts (avec telle entreprise, association, etc.) ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? ;
      mettre son propos en perspective : quel est le statut des résultats scientifiques sur lesquels il s’appuie ? Des incertitudes demeurent-elles ? Existe-t-il des controverses ?

      Le COMETS a conscience de la difficulté pratique à mettre en œuvre certaines de ces normes (temps de parole limité dans les médias, espace réduit des tribunes écrites, etc.). Leur respect constitue toutefois un objectif vers lequel le chercheur doit systématiquement tendre. Ce dernier doit également réfléchir, avant de s’exprimer publiquement, à ce qui fonde sa légitimité à le faire.

      En second lieu, les savoirs sur lesquels le chercheur assoit son engagement doivent être robustes et reposer sur une démarche scientifique rigoureuse. Engagé ou non, il doit obéir aux exigences classiques d’intégrité et de rigueur applicables à la production de connaissances fiables – description du protocole de recherche, référencement des sources, mise à disposition des résultats bruts, révision par les pairs, etc. Le COMETS rappelle que ces devoirs sont le corollaire nécessaire de la liberté de la recherche, qui est une liberté professionnelle, et que rien, pas même la défense d’une cause, aussi noble soit-elle, ne justifie de transiger avec ces règles et de s’accommoder de savoirs fragiles. Loin d’empêcher le chercheur d’affirmer une thèse avec force dans l’espace public, ces devoirs constituent au contraire un soutien indispensable à l’engagement public auquel, sinon, il peut lui être facilement reproché d’être militant.

      Afin de munir ceux qui souhaitent s’engager de repères et d’outils concrets, le COMETS invite le CNRS à élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public. Si de nombreux textes existent d’ores et déjà qui énoncent les droits et devoirs des chercheurs – statut du chercheur, chartes de déontologie, avis du COMETS, etc. –, ils sont éparpillés, parfois difficiles à interpréter (sur l’obligation de neutralité notamment) ou complexes à mettre en œuvre (déclaration des liens d’intérêt dans les médias, etc.). Un guide de l’engagement public devrait permettre de donner un contenu lisible, concret et réaliste à ces normes apparemment simples mais en réalité difficiles à comprendre ou à appliquer.

      Le COMETS recommande au CNRS d’envisager l’élaboration d’un tel guide avec d’autres organismes de recherche qui réfléchissent actuellement à la question. Le guide devrait par ailleurs être accompagné d’actions sensibilisant les chercheurs aux enjeux et techniques de l’engagement public (dont des formations à la prise de parole dans les médias).

      Le COMETS s’est enfin interrogé sur le positionnement plus général du CNRS à l’égard de l’engagement public.

      Le COMETS considère que de manière générale, le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements. En pratique :

      – dans l’évaluation de leurs travaux de recherche, les chercheurs ne devraient pas pâtir de leur engagement public. L’évaluation de l’activité de recherche d’un chercheur ne devrait porter que sur ses travaux de recherche et pas sur ses engagements publics éventuels ;

      – lorsque l’engagement public conduit à des controverses, la direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs ;

      – le CNRS doit en revanche intervenir au cas où un chercheur contreviendrait à l’intégrité ou à la déontologie (au minimum, les référents concernés devraient alors être saisis) ou en cas de violation des limites légales à la liberté d’expression (lois mémorielles, lois réprimant la diffamation, etc.) ; de même, l’institution devrait intervenir pour soutenir les chercheurs engagés qui font l’objet d’attaques personnelles ou de procès bâillons.

      – au cas où un chercheur mènerait des actions de désobéissance civile, le CNRS ne devrait pas se substituer aux institutions de police et de justice. Il ne devrait pas condamner ex ante ce mode d’engagement, ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire. A posteriori, en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur, le CNRS peut éventuellement considérer que son intervention est requise et prendre une sanction.

      Plus généralement, le COMETS encourage le CNRS à protéger et à favoriser la liberté d’expression de son personnel. Il est en effet de la responsabilité des institutions et des communautés de recherche de soutenir la confrontation constructive des idées, fondée sur la liberté d’expression.

      Si le CNRS venait à décider de s’engager en tant qu’institution, c’est-à-dire s’il prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution.

      Pour télécharger l’avis :
      https://comite-ethique.cnrs.fr/wp-content/uploads/2023/09/AVIS-2023-44.pdf

      https://comite-ethique.cnrs.fr/avis-du-comets-entre-liberte-et-responsabilite-engagement-public

      #avis

  • « Sur l’environnement, le divorce entre la Macronie et la communauté scientifique est désormais consommé », Stéphane Foucart
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/18/sur-l-environnement-le-divorce-entre-la-macronie-et-la-communaute-scientifiq

    Que le pouvoir en place bloque la publication d’un rapport d’expertise n’est jamais anodin. En des temps pas si reculés, cette rupture d’une forme de pacte démocratique entre la #science et l’expertise, d’une part, et les responsables aux affaires, de l’autre, apparaissait même comme une transgression majeure et inacceptable, au point d’alimenter l’indignation des revues scientifiques internationales. A l’automne 1997, on se souvient que Nature avait consacré une couverture sans concession aux tentatives de Claude Allègre, alors ministre de la recherche, de bloquer la publication du rapport d’expertise de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) sur l’amiante.

    Un quart de siècle s’est écoulé, et les mêmes manœuvres apparaissent désormais si normales et bénignes que leurs auteurs présumés ne prennent même plus la peine de les démentir. Le ministre de l’agriculture, Marc ["tu as vu, j’ai dit du bien des pesticides"] Fesneau, est ainsi, depuis mi-janvier, en possession d’un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’#alimentation, de l’#environnement et du travail (#Anses) sur les plantes issues des nouvelles techniques génomiques, autrement appelées « nouveaux OGM ».

    De longue date, l’Anses avait annoncé la publication de cette expertise pour début février, c’est-à-dire avant que les députés européens ne se prononcent sur les conditions d’un assouplissement réglementaire de ces nouvelles cultures (ce qu’ils ont fait le 7 février).

    Multiplication de tribunes

    Sur cette question controversée, des lettres ouvertes signées par des centaines de scientifiques circulent et s’opposent, certaines favorables, d’autres hostiles à la dérégulation des nouvelles techniques génomiques. Dès lors, donner accès à une expertise en bonne et due forme sur le sujet aurait été nécessaire à un vote éclairé des eurodéputés. Cela n’a pas été le cas. Selon nos informations, ce rapport de l’Anses a été bloqué sur pression politique et, à l’heure où ces lignes sont écrites, il n’est toujours pas public. On ignore ce qu’il contient, mais il est fort probable qu’il ne soit pas aussi enthousiaste que l’aurait désiré le gouvernement, favorable au déploiement de ces « nouveaux #OGM ». Interrogé le 8 février par Le Monde, le cabinet de M. Fesneau n’a pas démenti le blocage du rapport de l’Anses, se bornant à répondre, deux relances et quarante-huit heures plus tard : « Pas de commentaires pour nous pour l’instant. »

    C’est un autre signe que, sur l’environnement, le divorce entre la Macronie et la communauté scientifique est désormais consommé. Il suffit de parcourir les pages « Débats » des journaux pour réaliser l’étendue de ce désamour. Le 7 février, dans Le Monde, près de 80 chercheurs des organismes publics (CNRS, Inrae, Inserm…), spécialistes des impacts des #pesticides sur l’environnement et la #santé, dénonçaient « une mise au placard des connaissances scientifiques » sur leurs sujets d’expertise.

    La veille, dans L’Obs, plus de 500 chercheurs estimaient que les décisions du gouvernement pour sortir du conflit avec les #agriculteurs contournent les questions structurelles posées par le mouvement et ne font que « préparer la prochaine crise » du secteur. Deux jours plus tard, dans La Croix, 140 autres contestaient la mise à l’arrêt du plan national de réduction des pesticides, expliquant que « l’impact délétère [de ceux-ci] sur la santé et sur l’environnement n’est pas une opinion mais un fait scientifique ». Un peu plus tôt, près de 1 600 scientifiques demandaient, dans une lettre ouverte, l’abandon du chantier de l’A69, l’autoroute entre Toulouse et Castres (Tarn). D’autres prises de position collectives, sur la gestion de l’eau notamment, ne devraient pas tarder.

    Pilule amère pour les chercheurs

    Pour les chercheurs qui constatent que des années d’efforts et de travail, de publications scientifiques et de rapports d’expertise ne servent, en définitive, à rien d’autre qu’à alimenter les indices bibliométriques de leurs organismes, la pilule est amère. Au point que la direction scientifique d’un organisme comme l’Inrae a pris sa plus belle plume pour adresser à tous ses chercheurs engagés dans le programme « Cultiver et protéger autrement » un mot « de soutien, et d’encouragement à continuer nos recherches ».

    Un message d’une nature inédite, qui en dit long sur le moral des troupes. Le directeur scientifique pour l’agriculture de l’Inrae, Christian Huyghe, leur rappelle l’utilité et la nécessité de leurs travaux. « La recherche publique est au bon endroit en pensant loin », leur écrit-il, citant quelques résultats récents montrant l’insoutenabilité du #modèle_agricole dominant actuel. M. Huyghe cite en particulier une étude publiée à l’été 2023 indiquant une chute de 95 % de la biomasse d’insectes au cours des vingt-quatre dernières années, dans les zones de grandes cultures allemandes. Des résultats inquiétants, même s’il est plus terrifiant encore de penser que ceux qui décident aujourd’hui de l’agriculture de demain n’en ont aucune connaissance, n’en comprennent manifestement pas la gravité ou, peut-être, s’en moquent complètement.

    A la seule évolution de son rapport aux sciences de l’environnement, on mesure toute l’amplitude de la trajectoire du macronisme le long du spectre politique. On s’en souvient : en 2017, l’un des gestes forts du premier quinquennat d’Emmanuel Macron fut d’opposer au MAGA (« Make America great again ») de Donald Trump, le Mopga (« Make our planet great again ») du chef de l’Etat français – programme dont le but premier était d’accueillir en France des scientifiques brimés aux Etats-Unis, parce que travaillant sur le climat ou sur la biodiversité. En moins de dix ans, le renversement aura donc été total. Le Mopga, glisse un chercheur désabusé pastichant les codes du marketing politique de la Macronie, est devenu une sorte de Mopdaa (« Make our planet dead after all », « Faire mourir notre planète finalement »).

    #écologie

    • Comment une partie du CNRS a relayé une campagne d’influence en faveur des « nouveaux OGM »
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/02/09/comment-une-partie-du-cnrs-a-relaye-une-campagne-d-influence-en-faveur-des-n


      Des membres de l’Institut de biologie moléculaire des plantes (IBMP) de Strasbourg posent avec un message en faveur des nouvelles techniques génomiques. Photo postée le 5 février 2023 sur X par le compte de l’IBMP. @CNRS_IBMP / X

      Le vote des eurodéputés sur la législation encadrant les nouvelles #techniques_génomiques, le 7 février, a donné lieu à une opération de communication impliquant des instances de l’organisation scientifique. Au grand dam de nombre de ses chercheurs.
      Par Stéphane Foucart, le 09 février 2024

      Le recours à l’#autorité_scientifique est un levier politique puissant. En amont du vote des eurodéputés, mercredi 7 février, sur les conditions d’autorisation en Europe des « nouveaux OGM » (organismes génétiquement modifiés), l’organisation WePlanet a orchestré sur les réseaux sociaux une campagne d’influence fondée sur la mise en avant de chercheurs favorables à la dérégulation de la diffusion de ces plantes, issues des nouvelles techniques génomiques (#NGT pour New Genomic Techniques). L’organisation, qui se présente comme une « ONG éco-moderniste » et milite pour le nucléaire, les OGM et le développement de l’alimentation cellulaire, a bénéficié d’un appui appréciable en France : celui d’une partie du Centre national de la recherche scientifique (#CNRS).

      Deux jours avant le vote, de hautes instances du vaisseau amiral de la recherche française ont, selon les informations du Monde, invité les chercheurs de l’#institut_de_biologie, l’un des dix départements principaux du CNRS, à participer à la campagne de WePlanet, en leur transmettant les éléments de communication concoctés par l’organisation : hashtags, tweets prérédigés, consignes d’interpellation des parlementaires, etc.
      Daté du 5 février, le courriel est adressé par le secrétariat de l’institut de biologie du CNRS à une quinzaine de directeurs d’unités. Sa fuite, dans des listes de diffusion de chercheurs d’universités et d’organismes publics, alimente de nombreux commentaires. Interrogée, la direction de la communication du CNRS assure que la décision de relayer la campagne de WePlanet relève d’une décision de son institut de biologie, « adressée uniquement aux chercheurs de cet institut ».

      « Hold-up »

      « Le CNRS est en faveur d’un assouplissement de la réglementation des OGM sur les NGT afin d’accélérer la recherche et l’innovation à partir de ces nouvelles techniques, lit-on dans le message. A l’occasion de ce débat, #WePlanet a coordonné l’écriture d’une lettre ouverte, notamment signée par Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna, Prix Nobel de chimie 2020, et envoyée aux membres du Parlement européen pour les inciter à voter en faveur d’une réglementation assouplie pour les nouvelles techniques génomiques. »
      Le message relaie la proposition de WePlanet aux scientifiques « de se prendre en photo devant leur laboratoire et de publier leur image sur les réseaux sociaux en utilisant le #GiveGenesAChance [“Donnez une chance aux gènes”] et #NGTs ».

      La lettre ouverte coordonnée par l’organisation WePlanet et relayée par l’institut de biologie du CNRS appelle les parlementaires européens à « examiner attentivement les avantages de l’adoption des NGT », à « rejeter les ténèbres de l’alarmisme anti-science et à se tourner vers la lumière de la prospérité et du progrès ».
      Le texte a été signé par environ 1 500 scientifiques européens, souvent chercheurs en biologie moléculaire ou en génétique végétale, dont un peu moins d’une vingtaine déclarant une affiliation au CNRS. Les NGT sont toutefois l’objet de grandes divergences d’opinions au sein de la communauté scientifique, souvent selon les champs disciplinaires.

      En écologie et évolution, parmi de nombreux chercheurs interrogés par Le Monde, ou s’étant exprimés sur des listes de diffusion scientifiques, la stupéfaction et la réprobation dominent. « Un hold-up de quelques-uns sur la voix et la réputation de nos institutions », grince un professeur du Muséum national d’histoire naturelle. « Consterné par une prise de position publique de certains acteurs au CNRS qui prend en otage l’ensemble de l’établissement », confie au Monde un écologue, directeur de recherche au CNRS. « Hallucinant et scandaleux », dit un autre, généticien à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement.

      « Texte partisan »

      Le biologiste François Parcy, médaille d’argent du CNRS, a pour sa part signé la lettre ouverte de WePlanet et a posté sur son compte X une photo en faveur des NGT. « Je l’ai fait par adhésion au message véhiculé, sans avoir reçu ce mail d’invitation du CNRS, dit-il. Cette démarche est surprenante au regard de la frilosité de nos organismes sur ces sujets, mais je trouve bien que l’institut de biologie [du CNRS] s’engage sur ce sujet, alors que de nombreux chercheurs favorables à ces technologies n’osent pas prendre la parole publiquement. »

      « Ce texte apparaît partisan et néglige les données scientifiques en écologie et en évolution sur les conséquences désastreuses pour l’environnement des OGM, qui n’ont fait qu’augmenter les quantités de pesticides répandues sans améliorer les rendements et ont permis de l’appropriation du vivant par des brevets », fait valoir une chercheuse en génétique et écologie évolutives, directrice de recherche au CNRS et membre de l’Académie des sciences.

      L’institut de biologie du CNRS dit ne pas disposer d’« informations précises » sur l’association. Les responsables de WePlanet assurent, eux, que leur organisation a été fondée en février 2022. Installée à Bruxelles, elle dispose de représentants dans plusieurs pays européens – sa représentante en France est une ex-cadre d’Areva, fondatrice de l’association Voix du nucléaire.

      « Permettre un débat contradictoire »

      Selon l’institut de biologie, « la position officielle du CNRS [en faveur d’une dérégulation des NGT] a été établie au terme de réunions avec cinq autres instituts de recherche européens ». La direction du CNRS reconnaît cependant que cette position n’est pas le fruit d’une confrontation pluridisciplinaire de points de vue.
      La juriste Christine Noiville, directrice de recherche au CNRS et présidente de son comité d’éthique (Comets), dit comprendre que, derrière la position du CNRS, « il y a le spectre des arrachages d’OGM qui plane encore et la nécessité de respecter la liberté académique ». Mme Noiville rappelle toutefois l’un des avis récents du Comets selon lequel « si le CNRS venait à décider de s’engager en tant qu’institution, c’est-à-dire s’il prenait des positions publiques et normatives sur des sujets de société, (…) il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux #chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent – et permettre un débat contradictoire au sein de l’institution ».

      La physicienne Michèle Leduc, directrice de recherche émérite au CNRS, ancienne présidente du Comets, se dit pour sa part très surprise par cette initiative de l’institut de biologie, qui « s’adresse directement à ses directeurs de laboratoire avec des injonctions précises et sans justifier ses options, sur un sujet qui fait l’objet de vifs débats scientifiques, non totalement tranchés et porteurs de graves enjeux politiques ». Elle rappelle « la nécessité du #débat_démocratique éclairé par les scientifiques sur les questions économiques et sociétales ».

      Cet article a été modifié samedi 10 février 2024 pour supprimer les propos d’une chercheuse qui ne souhaite pas être citée.

  • #Université, service public ou secteur productif ?

    L’#annonce d’une “vraie #révolution de l’Enseignement Supérieur et la Recherche” traduit le passage, organisé par un bloc hégémonique, d’un service public reposant sur des #carrières, des #programmes et des diplômes à l’imposition autoritaire d’un #modèle_productif, au détriment de la #profession.

    L’annonce d’une « #vraie_révolution » de l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR) par Emmanuel Macron le 7 décembre, a pour objet, annonce-t-il, d’« ouvrir l’acte 2 de l’#autonomie et d’aller vers la #vraie_autonomie avec des vrais contrats pluriannuels où on a une #gouvernance qui est réformée » sans recours à la loi, avec un agenda sur dix-huit mois et sans modifications de la trajectoire budgétaire. Le président sera accompagné par un #Conseil_présidentiel_de_la_science, composé de scientifiques ayant tous les gages de reconnaissance, mais sans avoir de lien aux instances professionnelles élues des personnels concernés. Ce Conseil pilotera la mise en œuvre de cette « révolution », à savoir transformer les universités, en s’appuyant sur celles composant un bloc d’#excellence, et réduire le #CNRS en une #agence_de_moyen. Les composantes de cette grande transformation déjà engagée sont connues. Elle se fera sans, voire contre, la profession qui était auparavant centrale. Notre objet ici n’est ni de la commenter, ni d’en reprendre l’historique (Voir Charle 2021).

    Nous en proposons un éclairage mésoéconomique que ne perçoit ni la perspective macroéconomique qui pense à partir des agrégats, des valeurs d’ensemble ni l’analyse microéconomique qui part de l’agent et de son action individuelle. Penser en termes de mésoéconomie permet de qualifier d’autres logiques, d’autres organisations, et notamment de voir comment les dynamiques d’ensemble affectent sans déterminisme ce qui s’organise à l’échelle méso, et comment les actions d’acteurs structurent, elles aussi, les dynamiques méso.

    La transformation de la régulation administrée du #système_éducatif, dont nombre de règles perdurent, et l’émergence d’une #régulation_néolibérale de l’ESR, qui érode ces règles, procède par trois canaux : transformation du #travail et des modalités de construction des #carrières ; mise en #concurrence des établissements ; projection dans l’avenir du bloc hégémonique (i.e. les nouveaux managers). L’action de ces trois canaux forment une configuration nouvelle pour l’ESR qui devient un secteur de production, remodelant le système éducatif hier porté par l’État social. Il s’agissait de reproduire la population qualifiée sous l’égide de l’État. Aujourd’hui, nous sommes dans une nouvelle phase du #capitalisme, et cette reproduction est arrimée à l’accumulation du capital dans la perspective de #rentabilisation des #connaissances et de contrôle des professionnels qui l’assurent.

    Le couplage de l’évolution du système d’ESR avec la dynamique de l’#accumulation, constitue une nouvelle articulation avec le régime macro. Cela engendre toutefois des #contradictions majeures qui forment les conditions d’une #dégradation rapide de l’ESR.

    Co-construction historique du système éducatif français par les enseignants et l’État

    Depuis la Révolution française, le système éducatif français s’est déployé sur la base d’une régulation administrée, endogène, co-construite par le corps enseignant et l’État ; la profession en assumant de fait la charge déléguée par l’État (Musselin, 2022). Historiquement, elle a permis la croissance des niveaux d’éducation successifs par de la dépense publique (Michel, 2002). L’allongement historique de la scolarité (fig.1) a permis de façonner la force de travail, facteur décisif des gains de productivité au cœur de la croissance industrielle passée. L’éducation, et progressivement l’ESR, jouent un rôle structurant dans la reproduction de la force de travail et plus largement de la reproduction de la société - stratifications sociales incluses.

    À la fin des années 1960, l’expansion du secondaire se poursuit dans un contexte où la détention de diplômes devient un avantage pour s’insérer dans l’emploi. D’abord pour la bourgeoisie. La massification du supérieur intervient après les années 1980. C’est un phénomène décisif, visible dès les années 1970. Rapidement cela va télescoper une période d’austérité budgétaire. Au cours des années 2000, le pilotage de l’université, basé jusque-là sur l’ensemble du système éducatif et piloté par la profession (pour une version détaillée), s’est effacé au profit d’un pilotage pour et par la recherche, en lien étroit avec le régime d’accumulation financiarisé dans les pays de l’OCDE. Dans ce cadre, l’activité économique est orientée par l’extraction de la valeur financière, c’est à dire principalement par les marchés de capitaux et non par l’activité productive (Voir notamment Clévenot 2008).
    L’ESR : formation d’un secteur productif orienté par la recherche

    La #massification du supérieur rencontre rapidement plusieurs obstacles. Les effectifs étudiants progressent plus vite que ceux des encadrants (Piketty met à jour un graphique révélateur), ce qui entrave la qualité de la formation. La baisse du #taux_d’encadrement déclenche une phase de diminution de la dépense moyenne, car dans l’ESR le travail est un quasi-coût fixe ; avant que ce ne soit pour cette raison les statuts et donc la rémunération du travail qui soient visés. Ceci alors que pourtant il y a une corrélation étroite entre taux d’encadrement et #qualité_de_l’emploi. L’INSEE montre ainsi que le diplôme est un facteur d’amélioration de la productivité, alors que la productivité plonge en France (voir Aussilloux et al. (2020) et Guadalupe et al. 2022).

    Par ailleurs, la massification entraine une demande de différenciation de la part les classes dominantes qui perçoivent le #diplôme comme un des instruments de la reproduction stratifiée de la population. C’est ainsi qu’elles se détournent largement des filières et des établissements massifiés, qui n’assurent plus la fonction de « distinction » (voir le cas exemplaire des effectifs des #écoles_de_commerce et #grandes_écoles).

    Dans le même temps la dynamique de l’accumulation suppose une population formée par l’ESR (i.e. un niveau de diplomation croissant). Cela se traduit par l’insistance des entreprises à définir elles-mêmes les formations supérieures (i.e. à demander des salariés immédiatement aptes à une activité productive, spécialisés). En effet la connaissance, incorporée par les travailleurs, est devenue un actif stratégique majeur pour les entreprises.

    C’est là qu’apparaît une rupture dans l’ESR. Cette rupture est celle de la remise en cause d’un #service_public dont l’organisation est administrée, et dont le pouvoir sur les carrières des personnels, sur la définition des programmes et des diplômes, sur la direction des établissements etc. s’estompe, au profit d’une organisation qui revêt des formes d’un #secteur_productif.

    Depuis la #LRU (2007) puis la #LPR (2020) et la vague qui s’annonce, on peut identifier plusieurs lignes de #transformation, la #mise_en_concurrence conduisant à une adaptation des personnels et des établissements. Au premier titre se trouvent les instruments de #pilotage par la #performance et l’#évaluation. À cela s’ajoute la concurrence entre établissements pour l’#accès_aux_financements (type #Idex, #PIA etc.), aux meilleures candidatures étudiantes, aux #labels et la concurrence entre les personnels, pour l’accès aux #dotations (cf. agences de programmes, type #ANR, #ERC) et l’accès aux des postes de titulaires. Enfin le pouvoir accru des hiérarchies, s’exerce aux dépens de la #collégialité.

    La généralisation de l’évaluation et de la #sélection permanente s’opère au moyen d’#indicateurs permettant de classer. Gingras évoque une #Fièvre_de_l’évaluation, qui devient une référence définissant des #standards_de_qualité, utilisés pour distribuer des ressources réduites. Il y a là un instrument de #discipline agissant sur les #conduites_individuelles (voir Clémentine Gozlan). L’important mouvement de #fusion des universités est ainsi lié à la recherche d’un registre de performance déconnecté de l’activité courante de formation (être université de rang mondial ou d’université de recherche), cela condensé sous la menace du #classement_de_Shanghai, pourtant créé dans un tout autre but.

    La remise en question du caractère national des diplômes, revenant sur les compromis forgés dans le temps long entre les professions et l’État (Kouamé et al. 2023), quant à elle, assoit la mise en concurrence des établissements qui dépossède en retour la profession au profit des directions d’établissement.

    La dynamique de #mise_en_concurrence par les instruments transforme les carrières et la relation d’#emploi, qui reposaient sur une norme commune, administrée par des instances élues, non sans conflit. Cela fonctionne par des instruments, au sens de Lascoumes et Legalès, mais aussi parce que les acteurs les utilisent. Le discours du 7 décembre est éloquent à propos de la transformation des #statuts pour assurer le #pilotage_stratégique non par la profession mais par des directions d’établissements :

    "Et moi, je souhaite que les universités qui y sont prêtes et qui le veulent fassent des propositions les plus audacieuses et permettent de gérer la #ressource_humaine (…) la ministre m’a interdit de prononcer le mot statut. (…) Donc je n’ai pas dit qu’on allait réformer les statuts (…) moi, je vous invite très sincèrement, vous êtes beaucoup plus intelligents que moi, tous dans cette salle, à les changer vous-mêmes."

    La démarche est caractéristique du #new_management_public : une norme centrale formulée sur le registre non discutable d’une prétérition qui renvoie aux personnes concernées, celles-là même qui la refuse, l’injonction de s’amputer (Bechtold-Rognon & Lamarche, 2011).

    Une des clés est le transfert de gestion des personnels aux établissements alors autonomes : les carrières, mais aussi la #gouvernance, échappent progressivement aux instances professionnelles élues. Il y a un processus de mise aux normes du travail de recherche, chercheurs/chercheuses constituant une main d’œuvre qui est atypique en termes de formation, de types de production fortement marqués par l’incertitude, de difficulté à en évaluer la productivité en particulier à court terme. Ce processus est un marqueur de la transformation qui opère, à savoir, un processus de transformation en un secteur. La #pénurie de moyen public est un puissant levier pour que les directions d’établissement acceptent les #règles_dérogatoires (cf. nouveaux contrats de non titulaires ainsi que les rapports qui ont proposé de spécialiser voire de moduler des services).

    On a pu observer depuis la LRU et de façon active depuis la LPR, à la #destruction régulière du #compromis_social noué entre l’État social et le monde enseignant. La perte spectaculaire de #pouvoir_d’achat des universitaires, qui remonte plus loin historiquement, en est l’un des signaux de fond. Il sera progressivement articulé avec l’éclatement de la relation d’emploi (diminution de la part de l’emploi sous statut, #dévalorisation_du_travail etc.).

    Arrimer l’ESR au #régime_d’accumulation, une visée utilitariste

    L’État est un acteur essentiel dans l’émergence de la production de connaissance, hier comme commun, désormais comme résultat, ou produit, d’un secteur productif. En dérégulant l’ESR, le principal appareil de cette production, l’État délaisse la priorité accordée à la montée de la qualification de la population active, au profit d’un #pilotage_par_la_recherche. Ce faisant, il radicalise des dualités anciennes entre système éducatif pour l’élite et pour la masse, entre recherche utile à l’industrie et recherche vue comme activité intellectuelle (cf. la place des SHS), etc.

    La croissance des effectifs étudiants sur une période assez longue, s’est faite à moyens constants avec des effectifs titulaires qui ne permettent pas de maintenir la qualité du travail de formation (cf. figure 2). L’existence de gisements de productivité supposés, à savoir d’une partie de temps de travail des enseignants-chercheurs inutilisé, a conduit à une pénurie de poste et à une recomposition de l’emploi : alourdissement des tâches des personnels statutaires pour un #temps_de_travail identique et développement de l’#emploi_hors_statut. Carpentier & Picard ont récemment montré, qu’en France comme ailleurs, le recours au #précariat s’est généralisé, participant par ce fait même à l’effritement du #corps_professionnel qui n’a plus été à même d’assurer ni sa reproduction ni ses missions de formation.

    C’est le résultat de l’évolution longue. L’#enseignement est la part délaissée, et les étudiants et étudiantes ne sont plus au cœur des #politiques_universitaires : ni par la #dotation accordée par étudiant, ni pour ce qui structure la carrière des universitaires (rythmée par des enjeux de recherche), et encore moins pour les dotations complémentaires (associées à une excellence en recherche). Ce mouvement se met toutefois en œuvre en dehors de la formation des élites qui passent en France majoritairement par les grandes écoles (Charle et Soulié, 2015). Dès lors que les étudiants cessaient d’être le principe organisateur de l’ESR dans les universités, la #recherche pouvait s’y substituer. Cela intervient avec une nouvelle convention de qualité de la recherche. La mise en œuvre de ce principe concurrentiel, initialement limité au financement sur projets, a été élargie à la régulation des carrières.

    La connaissance, et de façon concrète le niveau de diplôme des salariés, est devenu une clé de la compétitivité, voire, pour les gouvernements, de la perspective de croissance. Alors que le travail de recherche tend à devenir une compétence générale du travail qualifié, son rôle croissant dans le régime d’accumulation pousse à la transformation du rapport social de travail de l’ESR.

    C’est à partir du système d’#innovation, en ce que la recherche permet de produire des actifs de production, que l’appariement entre recherche et profit participe d’une dynamique nouvelle du régime d’accumulation.

    Cette dynamique est pilotée par l’évolution jointe du #capitalisme_financiarisé (primauté du profit actionnarial sur le profit industriel) et du capitalisme intensif en connaissance. Les profits futurs des entreprises, incertains, sont liés d’une part aux investissements présents, dont le coût élevé repose sur la financiarisation tout en l’accélérant, et d’autre part au travail de recherche, dont le contrôle échappe au régime historique de croissance de la productivité. La diffusion des compétences du travail de recherche, avec la montée des qualifications des travailleurs, et l’accumulation de connaissances sur lequel il repose, deviennent primordiaux, faisant surgir la transformation du contenu du travail par l’élévation de sa qualité dans une division du travail qui vise pourtant à l’économiser. Cela engendre une forte tension sur la production des savoirs et les systèmes de transmission du savoir qui les traduisent en connaissances et compétences.

    Le travail de recherche devenant une compétence stratégique du travail dans tous les secteurs d’activité, les questions posées au secteur de recherche en termes de mesure de l’#efficacité deviennent des questions générales. L’enjeu en est l’adoption d’une norme d’évaluation que les marchés soient capables de faire circuler parmi les secteurs et les activités consommatrices de connaissances.

    Un régime face à ses contradictions

    Cette transformation de la recherche en un secteur, arrimé au régime d’accumulation, suppose un nouveau compromis institutionnalisé. Mais, menée par une politique néolibérale, elle se heurte à plusieurs contradictions majeures qui détruisent les conditions de sa stabilisation sans que les principes d’une régulation propre ne parviennent à émerger.

    Quand la normalisation du travail de recherche dévalorise l’activité et les personnels

    Durant la longue période de régulation administrée, le travail de recherche a associé le principe de #liberté_académique à l’emploi à statut. L’accomplissement de ce travail a été considéré comme incompatible avec une prise en charge par le marché, ce dernier n’étant pas estimé en capacité de former un signal prix sur les services attachés à ce type de travail. Ainsi, la production de connaissance est un travail entre pairs, rattachés à des collectifs productifs. Son caractère incertain, la possibilité de l’erreur sont inscrits dans le statut ainsi que la définition de la mission (produire des connaissances pour la société, même si son accaparement privé par la bourgeoisie est structurel). La qualité de l’emploi, notamment via les statuts, a été la clé de la #régulation_professionnelle. Avec la #mise_en_concurrence_généralisée (entre établissements, entre laboratoires, entre Universités et grandes écoles, entre les personnels), le compromis productif entre les individus et les collectifs de travail est rompu, car la concurrence fait émerger la figure du #chercheur_entrepreneur, concerné par la #rentabilisation des résultats de sa recherche, via la #valorisation sous forme de #propriété_intellectuelle, voire la création de #start-up devenu objectifs de nombre d’université et du CNRS.

    La réponse publique à la #dévalorisation_salariale évoquée plus haut, passe par une construction différenciée de la #rémunération, qui rompt le compromis incarné par les emplois à statut. Le gel des rémunérations s’accompagne d’une individualisation croissante des salaires, l’accès aux ressources étant largement subordonné à l’adhésion aux dispositifs de mise en concurrence. La grille des rémunérations statutaires perd ainsi progressivement tout pouvoir organisationnel du travail. Le rétrécissement de la possibilité de travailler hors financements sur projet est indissociable du recours à du #travail_précaire. La profession a été dépossédée de sa capacité à défendre son statut et l’évolution des rémunérations, elle est inopérante à faire face à son dépècement par le bloc minoritaire.

    La contradiction intervient avec les dispositifs de concurrence qui tirent les instruments de la régulation professionnelle vers une mise aux normes marchandes pour une partie de la communauté par une autre. Ce mouvement est rendu possible par le décrochage de la rémunération du travail : le niveau de rémunération d’entrée dans la carrière pour les maîtres de conférences est ainsi passé de 2,4 SMIC dans les années 1980 à 1,24 aujourd’hui.

    Là où le statut exprimait l’impossibilité d’attacher une valeur au travail de recherche hors reconnaissance collective, il tend à devenir un travail individualisable dont le prix sélectionne les usages et les contenus. Cette transformation du travail affecte durablement ce que produit l’université.

    Produire de l’innovation et non de la connaissance comme communs

    Durant la période administrée, c’est sous l’égide de la profession que la recherche était conduite. Définissant la valeur de la connaissance, l’action collective des personnels, ratifiée par l’action publique, pose le caractère non rival de l’activité. La possibilité pour un résultat de recherche d’être utilisé par d’autres sans coût de production supplémentaire était un gage d’efficacité. Les passerelles entre recherche et innovation étaient nombreuses, accordant des droits d’exploitation, notamment à l’industrie. Dans ce cadre, le lien recherche-profit ou recherche-utilité économique, sans être ignoré, ne primait pas. Ainsi, la communauté professionnelle et les conditions de sa mise au travail correspondait à la nature de ce qui était alors produit, à savoir les connaissances comme commun. Le financement public de la recherche concordait alors avec la nature non rivale et l’incertitude radicale de (l’utilité de) ce qui est produit.

    La connaissance étant devenue un actif stratégique, sa valorisation par le marché s’est imposée comme instrument d’orientation de la recherche. Finalement dans un régime d’apparence libérale, la conduite politique est forte, c’est d’ailleurs propre d’un régime néolibéral tel que décrit notamment par Amable & Palombarini (2018). Les #appels_à_projet sélectionnent les recherches susceptibles de #valorisation_économique. Là où la #publication fait circuler les connaissances et valide le caractère non rival du produit, les classements des publications ont pour objet de trier les résultats. La priorité donnée à la protection du résultat par la propriété intellectuelle achève le processus de signalement de la bonne recherche, rompant son caractère non rival. La #rivalité exacerbe l’effectivité de l’exclusion par les prix, dont le niveau est en rapport avec les profits anticipés.

    Dans ce contexte, le positionnement des entreprises au plus près des chercheurs publics conduit à une adaptation de l’appareil de production de l’ESR, en créant des lieux (#incubateurs) qui établissent et affinent l’appariement recherche / entreprise et la #transférabilité à la #valorisation_marchande. La hiérarchisation des domaines de recherche, des communautés entre elles et en leur sein est alors inévitable. Dans ce processus, le #financement_public, qui continue d’endosser les coûts irrécouvrables de l’incertitude, opère comme un instrument de sélection et d’orientation qui autorise la mise sous contrôle de la sphère publique. L’ESR est ainsi mobilisée par l’accumulation, en voyant son autonomie (sa capacité à se réguler, à orienter les recherches) se réduire. L’incitation à la propriété intellectuelle sur les résultats de la recherche à des fins de mise en marché est un dispositif qui assure cet arrimage à l’accumulation.

    Le caractère appropriable de la recherche, devenant essentiel pour la légitimation de l’activité, internalise une forme de consentement de la communauté à la perte du contrôle des connaissances scientifiques, forme de garantie de sa circulation. Cette rupture de la non-rivalité constitue un coût collectif pour la société que les communautés scientifiques ne parviennent pas à rendre visible. De la même manière, le partage des connaissances comme principe d’efficacité par les externalités positives qu’il génère n’est pas perçu comme un principe alternatif d’efficacité. Chemin faisant, une recherche à caractère universel, régulée par des communautés, disparait au profit d’un appareil sous doté, orienté vers une utilité de court terme, relayé par la puissance publique elle-même.

    Un bloc hégémonique réduit, contre la collégialité universitaire

    En tant que mode de gouvernance, la collégialité universitaire a garanti la participation, et de fait la mobilisation des personnels, car ce n’est pas la stimulation des rémunérations qui a produit l’#engagement. Les collectifs de travail s’étaient dotés d’objectifs communs et s’étaient accordés sur la #transmission_des_savoirs et les critères de la #validation_scientifique. La #collégialité_universitaire en lien à la définition des savoirs légitimes a été la clé de la gouvernance publique. Il est indispensable de rappeler la continuité régulatrice entre liberté académique et organisation professionnelle qui rend possible le travail de recherche et en même temps le contrôle des usages de ses produits.

    Alors que l’université doit faire face à une masse d’étudiants, elle est évaluée et ses dotations sont accordées sur la base d’une activité de recherche, ce qui produit une contradiction majeure qui affecte les universités, mais pas toutes. Il s’effectue un processus de #différenciation_territoriale, avec une masse d’établissements en souffrance et un petit nombre qui a été retenu pour former l’élite. Les travaux de géographes sur les #inégalités_territoriales montrent la très forte concentration sur quelques pôles laissant des déserts en matière de recherche. Ainsi se renforce une dualité entre des universités portées vers des stratégies d’#élite et d’autres conduites à accepter une #secondarisation_du_supérieur. Une forme de hiatus entre les besoins technologiques et scientifiques massifs et le #décrochage_éducatif commence à être diagnostiquée.

    La sectorisation de l’ESR, et le pouvoir pris par un bloc hégémonique réduit auquel participent certaines universités dans l’espoir de ne pas être reléguées, ont procédé par l’appropriation de prérogatives de plus en plus larges sur les carrières, sur la valorisation de la recherche et la propriété intellectuelle, de ce qui était un commun de la recherche. En cela, les dispositifs d’excellence ont joué un rôle marquant d’affectation de moyens par une partie étroite de la profession. De cette manière, ce bloc capte des prébendes, assoit son pouvoir par la formation des normes concurrentielles qu’il contrôle et développe un rôle asymétrique sur les carrières par son rôle dominant dans l’affectation de reconnaissance professionnelle individualisée, en contournant les instances professionnelles. Il y a là création de nouveaux périmètres par la norme, et la profession dans son ensemble n’a plus grande prise, elle est mise à distance des critères qui servent à son nouveau fonctionnement et à la mesure de la performance.

    Les dispositifs mis en place au nom de l’#excellence_scientifique sont des instruments pour ceux qui peuvent s’en emparer et définissant les critères de sélection selon leur représentation, exercent une domination concurrentielle en sélectionnant les élites futures. Il est alors essentiel d’intégrer les Clubs qui en seront issus. Il y a là une #sociologie_des_élites à préciser sur la construction d’#UDICE, club des 10 universités dites d’excellence. L’évaluation de la performance détermine gagnants et perdants, via des labels, qui couronnent des processus de sélection, et assoit le pouvoir oligopolistique et les élites qui l’ont porté, souvent contre la masse de la profession (Musselin, 2017).

    Le jeu des acteurs dominants, en lien étroit avec le pouvoir politique qui les reconnait et les renforce dans cette position, au moyen d’instruments de #rationalisation de l’allocation de moyens pénuriques permet de définir un nouvel espace pour ceux-ci, ségrégué du reste de l’ESR, démarche qui est justifié par son arrimage au régime d’accumulation. Ce processus s’achève avec une forme de séparatisme du nouveau bloc hégémonique composé par ces managers de l’ESR, composante minoritaire qui correspond d’une certaine mesure au bloc bourgeois. Celles- et ceux-là même qui applaudissent le discours présidentiel annonçant la révolution dont un petit fragment tirera du feu peu de marrons, mais qui seront sans doute pour eux très lucratifs. Toutefois le scénario ainsi décrit dans sa tendance contradictoire pour ne pas dire délétère ne doit pas faire oublier que les communautés scientifiques perdurent, même si elles souffrent. La trajectoire choisie de sectorisation déstabilise l’ESR sans ouvrir d’espace pour un compromis ni avec les personnels ni pour la formation. En l’état, les conditions d’émergence d’un nouveau régime pour l’ESR, reliant son fonctionnement et sa visée pour la société ne sont pas réunies, en particulier parce que la #rupture se fait contre la profession et que c’est pourtant elle qui reste au cœur de la production.

    https://laviedesidees.fr/Universite-service-public-ou-secteur-productif
    #ESR #facs #souffrance

  • #Recherche : les tours de #passe-passe d’#Emmanuel_Macron

    Le chef de l’Etat s’est targué d’un #bilan flatteur en matière d’investissement pour le monde de la recherche, en omettant des #indicateurs inquiétants et des promesses non tenues, tout en vantant une #concurrence délétère.

    Devant un parterre de plusieurs centaines de scientifiques, le 7 décembre, à l’Elysée, le président de la République, Emmanuel Macron, était à l’aise, volontaire, et « en compagnonnage » avec la communauté académique, comme il l’a confessé. Mais c’est moins en passionné de science qu’en magicien qu’il s’est en fait comporté, escamotant ce qui ne rentrait pas dans son cadre, multipliant les tours de passe-passe, sortant quelques lapins du chapeau, pour aboutir à transformer les flatteries adressées à son auditoire en cinglantes critiques. Au point de faire « oublier » un autre discours célèbre, celui de Nicolas Sarkozy en janvier 2009, qui avait lâché : « Un chercheur français publie de 30 % à 50 % en moins qu’un chercheur britannique. (…) Evidemment, si l’on ne veut pas voir cela, je vous remercie d’être venu, il y a de la lumière, c’est chauffé… »

    Premier tour de magie classique, celui de l’embellissement du bilan. Comme une baguette magique, son arrivée en 2017 aurait mis fin à des années de « #désinvestissement_massif ». Sauf que cela ne se voit pas dans le critère habituel de la part du PIB consacrée en recherche et développement (R&D), qui est restée stable depuis le début du premier quinquennat, à 2,2 %. Les estimations indiquent même une baisse à 2,18 % pour 2022.

    Cela ne se voit pas non plus dans la part des #publications nationales dans le total mondial, dont il a rappelé qu’elle a baissé, sans dire qu’elle continue de le faire malgré ses efforts. Même les annexes au projet de loi de finances pour 2024 prévoient que cela va continuer. Pire, côté bilan, compte tenu de l’inflation, la « magique » #loi_de_programmation_de_la_recherche de 2020 donne en fait des #moyens en baisse aux #laboratoires l’an prochain.

    Avec plus de « réussite », le président de la République a littéralement fait disparaître du paysage 7 milliards d’euros. Il s’agit de l’enveloppe, dont se prive volontairement l’Etat chaque année, pour soutenir la recherche et développement des entreprises – le #crédit_d’impôt_recherche – sans résultat macroéconomique. La part des dépenses de #R&D des #entreprises ne suit pas la progression du crédit d’impôt recherche. Mais il n’est toujours pas question d’interroger l’#efficacité du dispositif, absent de l’allocution, comme celle des mesures sur l’#innovation, le 11 décembre à Toulouse.

    Autre rituel classique des discours, faire oublier les précédents. Le chef de l’Etat l’a tenté à deux reprises sur des thèmes centraux de son argumentaire : l’#évaluation et la #simplification. Dans son allocution de 2023, il regrette qu’en France « on ne tire toujours pas assez conséquence des évaluations », quand en novembre 2019, pour les 80 ans du CNRS, il critiquait « un système mou sans conséquence ». Entre ces deux temps forts, il a nommé à la tête de l’agence chargée des évaluations son propre conseiller recherche, #Thierry_Coulhon, qui n’a donc pas réussi à « durcir » l’évaluation, mais a été nommé à la tête du comité exécutif de l’Institut polytechnique de Paris.

    Il y a quatre ans, Emmanuel Macron promettait également la « simplification », et obtenu… le contraire. Les choses ont empiré, au point qu’un rapport publié en novembre du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur enjoint au CNRS de lancer une « opération commando » pour régler des #problèmes_administratifs, qu’un médaillé d’argent, ulcéré, renvoie sa médaille, et que le conseil scientifique du #CNRS dénonce les « #entraves_administratives ».

    #Violence_symbolique

    L’#échec de la #promesse de simplifier pointe aussi lorsqu’on fait les comptes des « #annonces » concernant le « #pilotage » du système. Emmanuel Macron a prévu pas moins de cinq pilotes dans l’avion : lui-même, assisté d’un « #conseil_présidentiel_de_la_science » ; le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ; le « ministère bis » qu’est le secrétariat général à l’investissement, qui distribue des milliards jusqu’en 2030 sur des thématiques pour la plupart décidées à l’Elysée ; auxquels s’ajoutent les organismes de recherche qui doivent se transformer en « #agences_de_programmes » et définir aussi des stratégies.

    Au passage, simplification oblige sans doute, le thème « climat, biodiversité et société durable » est confié au CNRS « en lien naturellement avec l’#Ifremer [Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer] pour les océans, avec l’#IRD [Institut de recherche pour le développement] pour le développement durable » ; enfin, dernier pilote, les #universités, qui localement géreront les personnels employés souvent par d’autres acteurs.

    Finalement, le principal escamotage du magicien élyséen consiste à avoir parlé pendant une heure de recherche, mais pas de celles et ceux qui la font. Ah si, il a beaucoup été question des « meilleurs », des « gens très bons », « des équipes d’excellence » . Les autres apprécieront. Le Président promet même de « laisser toute la #liberté_académique aux meilleurs », sous-entendant que ceux qui ne sont pas meilleurs n’auront pas cette liberté.

    Cette #invisibilisation et cette #privation_de_droits d’une bonne partie des personnels fonctionnaires sont d’une rare violence symbolique pour des gens qui, comme dans d’autres services publics, aspirent à bien faire leur métier et avoir les moyens de l’exercer. Ces derniers savent aussi, parfois dans leur chair, quels effets délétères peuvent avoir ces obsessions pour la #compétition permanente aux postes et aux moyens. Et accessoirement combien elle est source de la #complexité que le chef de l’Etat voudrait simplifier.

    La « #révolution », terme employé dans ce discours, serait évidemment moins d’accélérer dans cette direction que d’interroger ce système dont on attend encore les preuves de l’#efficacité, autrement que par les témoignages de ceux qui en bénéficient.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/12/21/recherche-les-tours-de-passe-passe-du-president-macron_6207095_3232.html
    #ESR #Macron #France #université #facs

  • « Ma médaille d’argent du CNRS m’inspire aujourd’hui du dégoût »
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2023/12/04/ma-medaille-d-argent-du-cnrs-m-inspire-aujourd-hui-du-degout_6203861_1650684

    Dans leurs pétitions, les chercheurs ne demandent pas d’augmentation de salaire, ils ne demandent pas plus de moyens, non, ils demandent simplement qu’on les laisse faire leur travail sereinement, et de disposer efficacement de leurs crédits très souvent gérés par le CNRS, même s’ils proviennent d’autres sources !

    Depuis cet été, un trio de logiciels, acheté à une entreprise privée, a été mis en place pour gérer de A (l’ordre de mission) à Z (la remise des états de frais) les déplacements financés par le CNRS. Le résultat est un calvaire indescriptible pour les missionnaires et les gestionnaires. Les missionnaires doivent faire le travail des gestionnaires (générer la liste des frais dans le système et rentrer tous les justificatifs). La difficulté est telle que nombre d’entre eux renoncent à partir en mission ou à se faire rembourser une mission faite. Les gestionnaires, loin d’avoir des tâches en moins, sont débordés par une multitude de validations et d’opérations bloquées, dont le débogage prend un temps fou. Le stress est généralisé.

    Viscosité du système
    Cette catastrophe administrative n’est qu’une (très grosse) goutte d’eau qui fait déborder le vase des entraves au travail de recherche. La gestion au CNRS est envahie par un juridisme qui rend tout acte de plus en plus pesant chaque année. La moindre action hors du laboratoire ou avec des tierces personnes déclenche une avalanche de signatures de convention et d’arguties juridiques, par exemple sur la propriété intellectuelle. La viscosité du système est telle que les chercheurs en viennent à renoncer à des contrats ou que des projets n’aboutissent pas pour des raisons de délai d’engagement de crédits, par exemple. Ingénieurs et techniciens aussi sont touchés par l’inflation administrative, et sont plus souvent à remplir des formulaires qu’à faire le travail scientifique pour lequel ils ont été embauchés.

    #CNRS #bureaucratisation

    • voilà ce que déclarait en 2008 Pécresse, ministre de l’#ESR

      La deuxième orientation, c’est une simplification résolue des contraintes de gestion des unités mixtes afin de rendre du temps de recherche aux chercheurs, car à l’heure actuelle, leur complexité (circuits administratifs et financiers, gestion des personnels, procédures d’évaluation, valorisation des résultats des travaux de recherche...) engendre une surcharge de travail pour les personnels et responsables de laboratoires. Il est souhaitable de limiter à deux les tutelles scientifiques (l’une nationale, l’autre locale) qui s’exercent sur les unités mixtes de recherche, sachant qu’aujourd’hui, près de 50 % des 1 300 UMR sont soumises à plus de deux tutelles, et 20 % en ont plus de quatre. La généralisation d’un mandat de gestion unique pour l’université ou l’organisme qui héberge l’unité simplifiera les circuits de financement et permettra un octroi plus rationnel des moyens. Le rapport recommande également d’aligner les procédures d’achat et toutes les règles financières, fiscales et comptables des laboratoires sur le régime le plus simple et le plus efficace. En matière d’achats publics, un alignement sur les règles du CNRS qui prévoient une délégation de la signature aux directeurs d’unité est préconisé. Enfin, pour alléger le travail des personnels et éviter des doubles saisies, nous devrons mettre en cohérence les systèmes d’information et développer leur interopérabilité.

      https://www.vie-publique.fr/discours/171598-interview-de-mme-valerie-pecresse-ministre-de-lenseignement-supe
      Quant à Sarkozy, il comparait le CNRS à l’Académie des Sciences de l’Union soviétique. L’action pionnière de Sarkozy, Pécresse jusqu’à Macron et ses sbires ont abouti exactement à ça. Bravo à toutes et tous !

    • Un de ces fameux #logiciels pour gérer les #missions (notamment), s’appelle #Notilus (https://academia.hypotheses.org/54107), CHAUCHEMARDESQUE !!!

      Les autres : #Goelett et #Etamine

      Pour info, ce n’est que grâce à l’action conjointe de toustes les directeurices de labo qu’il a été possible de bloquer les frais de gestion de dossier de mission établi (2 EUR par mission, de l’#argent_public donc !) qui étaient facturés par l’entreprise qui a gagné le #marché_public pour CHAQUE mission.

      Pour info, pour réserver des hôtels et des transports il faut passer par l’entreprise qui a gagné le marché public. Pour nous, il s’agit en ce moment de #FCM_Travel... A noter que c’est systématiquement BEAUCOUP plus cher de passer par cette #agence_de_voyage que si on réserverait par nos propres soins.
      Une collègue m’a dit avoir réservé une chambre d’hôtel (pourrie) en France pour le prix de 200 EUR en passant par FCM Travel alors que la réservation via des plateformes proposait, pour la même nuit, quelque chose comme 120 EUR... juste pour vous donner une petite idée...

      Autre chose intéressante, j’ai dû acheter un billet Grenoble-Marseille. J’ai cherché les options sur FCM travel, et la plateforme ne m’offrait aucune solution... j’ai appelé l’opérateur qui m’a dit qu’il fallait que je réserve 2 secteurs séparément : Grenoble-Valence et puis Valence-Marseille (pratique !!!). C’était quelque jours avant qu’on ait l’info des 2 EUR de frais de gestion, et je me dis que ce n’est probablement pas pour rien... en divisant le voyage en 2 secteurs, probablement quelqu’un empoche 2x2EUR... (donc 8 EUR en tout pour l’aller-retour).

      #université #bureaucratie #recherche #ESR #France #dégoût #bureaucratisation #Pierre_Rochette #Pécresse #Valérie_Pécresse

    • Le SNCS-FSU demande l’abandon du système Etamine, Notilus et Goelett

      Communiqué du SNCS-FSU du 23 novembre 2023

      Les personnels des laboratoires et des délégations du CNRS expérimentent le dysfonctionnement et la complexité des outils numériques Etamine, Notilus et Goelett depuis plus de quatre mois. Le SNCS-FSU dénonçait dès le 14 septembre 2023 le calvaire que ce trio de logiciels fait subir à tous les personnels du CNRS. Depuis, la direction du CNRS a indiqué que les principaux dysfonctionnements auraient été résolus. Cependant, tous les personnels constatent que des dysfonctionnements persistent. Mais le plus inquiétant est certainement la complexité de l’ensemble Etamine, Notilus et Goelett. Même après des mois de familiarisation avec ces outils à travers un nombre significatif de missions, il apparaît que la complexité globale de ce système est trop importante et que son utilisation ne sera jamais assez simple pour les agents souhaitant partir en mission. Le SNCS-FSU considère que c’est la conception même du système qui est à revoir.

      Le SNCS-FSU demande que le système Etamine, Notilus et Goelett soit abandonné et remplacé par un autre système plus simple, qui fonctionne et qui donne satisfaction. Ce système engendre aujourd’hui une dégradation des conditions de travail de tous les personnels des laboratoires et des délégations du CNRS, et il est évident que cela continuera.

      Pour les agent·e·s souhaitant partir en mission, le constat est indiscutable : l’utilisation de ces logiciels est et restera une perte de temps significative par rapport à la situation antérieure, même dans les rares cas où ces missionnaires se seront parfaitement familiarisé·e·s avec ces outils. D’autant plus qu’il est évident que très peu d’agent·e·s pourront se familiariser avec ce système, même en partant souvent en mission, tant il est complexe et rigide.

      Si le travail des agent·e·s des services de gestion pourrait, à terme, bénéficier de la dématérialisation et du report de certaines tâches vers les missionnaires, elles et ils seront beaucoup plus sollicité·e·s dans l’accompagnement de ces missionnaires. Les agents des services de gestion devront, en effet, répondre à leurs innombrables questions, incompréhensions, agacements, exaspérations, frustrations, désespoirs… L’impossibilité pour les agent·e·s des services de gestion de répondre de façon satisfaisante aux attentes de celles et ceux partant en mission est une cause importante de la dégradation des conditions de travail.

      Le SNCS-FSU estime que le système Etamine, Notilus et Goelett constitue un véritable recul. Le SNCS-FSU considère que la meilleure solution est de l’abandonner et de le remplacer par un système qui simplifie les démarches pour tous les personnels et qui libère du temps pour la recherche.

      Le SNCS-FSU appelle à signer et à faire signer massivement la pétition « CNRS : nouveau système de gestion des missions, on n’en peut plus ! » pour sortir de ce système insupportable et mettre fin à ce calvaire.

      Le SNCS-FSU apporte tout son soutien à tou·te·s les agent·e·s confronté·e·s à ces difficultés et à ce système absurde.

      https://academia.hypotheses.org/54107

    • C’est toujours intéressant d’appréhender le réseau qu’il y a derrière.

      Depuis cet été, un trio de logiciels, acheté à une entreprise privée, a été mis en place pour gérer de A (l’ordre de mission) à Z (la remise des états de frais) les déplacements financés par le CNRS.

      L’entreprise en question fcmtravel avait signé en 2021 pour 3 ans… ça a été reconduit ?
      Le groupement FCM, RYDOO et NOTILUS remporte l’appel d’offres lancé par le CNRS et l’AMUE.
      https://www.fcmtravel.com/fr-fr/resources/news-hub/le-groupement-fcm-rydoo-et-notilus-remporte-lappel-doffres-lance-par-le-c

      La mise en place d’une nouvelle plateforme devait permettre la dématérialisation de bout en bout des processus de la demande de voyage, représentant 97 millions d’euros de dépenses annuelles. Pour accompagner leurs 200 000 utilisateurs potentiels, le CNRS et l’AMUE ont donc fait le choix d’une nouvelle solution ambitieuse avec le groupement Rydoo (portail de réservation et base hôtelière), FCM (agence de voyages d’affaires) et Notilus (solution de gestion des ordres de missions et états de frais).

      Une de leur réalisation commune est l’UGAP, centrale d’achat public. (L’Union des groupements d’achats publics est une centrale d’achat publique française, placée sous la double tutelle du ministre chargé du Budget et du ministre chargé de l’Éducation nationale.)

      Notilus, une des pièces du puzzle à reconstituer …
      Notilus Filiale du Groupe DIMO Software. DIMO est issu de Cerg Finance qui en 1998 rachète XRT https://www.lesechos.fr/1998/09/cerg-finance-acquiert-le-numero-un-americain-des-logiciels-de-cash-manageme #cash-management

  • Conflit israélo-palestinien : une #chape_de_plomb s’est abattue sur l’université française

    Depuis les attaques du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, le milieu de la #recherche, en particulier les spécialistes du Proche-Orient, dénonce un climat de « #chasse_aux_sorcières » entretenu par le gouvernement pour toute parole jugée propalestinienne.

    « #Climat_de_peur », « chasse aux sorcières », « délation » : depuis les attaques du Hamas contre Israël, le 7 octobre dernier, et le déclenchement de l’offensive israélienne sur #Gaza, le malaise est palpable dans une partie de la #communauté_scientifique française, percutée par le conflit israélo-palestinien.

    Un #débat_scientifique serein, à distance des agendas politiques et de la position du gouvernement, est-il encore possible ? Certains chercheurs et chercheuses interrogés ces derniers jours en doutent fortement.

    Dans une tribune publiée sur Mediapart (https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/151123/defendre-les-libertes-dexpression-sur-la-palestine-un-enjeu-academiq), 1 400 universitaires, pour beaucoup « spécialistes des sociétés du Moyen-Orient et des mondes arabes », ont interpellé leurs tutelles et collègues « face aux faits graves de #censure et de #répression […] dans l’#espace_public français depuis les événements dramatiques du 7 octobre ».

    Ils et elles assurent subir au sein de leurs universités « des #intimidations, qui se manifestent par l’annulation d’événements scientifiques, ainsi que des entraves à l’expression d’une pensée académique libre ».

    Deux jours après l’attaque du Hamas, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, #Sylvie_Retailleau, avait adressé un courrier de mise en garde aux présidents d’université et directeurs d’instituts de recherche.

    Elle y expliquait que, dans un contexte où la France avait « exprimé sa très ferme condamnation ainsi que sa pleine solidarité envers Israël et les Israéliens » après les attaques terroristes du 7 octobre, son ministère avait constaté « de la part d’associations, de collectifs, parfois d’acteurs de nos établissements, des actions et des propos d’une particulière indécence ».

    La ministre leur demandait de « prendre toutes les mesures nécessaires afin de veiller au respect de la loi et des principes républicains » et appelait également à signaler aux procureurs « l’#apologie_du_terrorisme, l’#incitation_à_la_haine, à la violence et à la discrimination ».

    Un message relayé en cascade aux différents niveaux hiérarchiques du CNRS, jusqu’aux unités de recherche, qui ont reçu un courrier le 12 octobre leur indiquant que l’« expression politique, la proclamation d’opinion » ne devaient pas « troubler les conditions normales de travail au sein d’un laboratoire ».

    Censure et #autocensure

    Le ton a été jugé menaçant par nombre de chercheurs et chercheuses puisque étaient évoquées, une fois de plus, la possibilité de « #poursuites_disciplinaires » et la demande faite aux agents de « signaler » tout écart.

    Autant de missives que des universitaires ont interprétées comme un appel à la délation et qu’ils jugent aujourd’hui responsables du « #climat_maccarthyste » qui règne depuis plusieurs semaines sur les campus et dans les laboratoires, où censure et autocensure sont de mise.

    Au point que bon nombre se retiennent de partager leurs analyses et d’exprimer publiquement leur point de vue sur la situation au Proche-Orient. Symbole de la chape de plomb qui pèse sur le monde académique, la plupart de celles et ceux qui ont accepté de répondre à nos questions ont requis l’anonymat.

    « Cela fait plus de vingt ans que j’interviens dans le #débat_public sur le sujet et c’est la première fois que je me suis autocensurée par peur d’accusations éventuelles », nous confie notamment une chercheuse familière des colonnes des grands journaux nationaux. Une autre décrit « des échanges hyper violents » dans les boucles de mails entre collègues universitaires, empêchant tout débat apaisé et serein. « Même dans les laboratoires et collectifs de travail, tout le monde évite d’évoquer le sujet », ajoute-t-elle.

    « Toute prise de parole qui ne commencerait pas par une dénonciation du caractère terroriste du Hamas et la condamnation de leurs actes est suspecte », ajoute une chercheuse signataire de la tribune des 1 400.

    Au yeux de certains, la qualité des débats universitaires se serait tellement dégradée que la production de connaissance et la capacité de la recherche à éclairer la situation au Proche-Orient s’en trouvent aujourd’hui menacées.

    « La plupart des médias et des responsables politiques sont pris dans un #hyperprésentisme qui fait commencer l’histoire le 7 octobre 2023 et dans une #émotion qui ne considère légitime que la dénonciation, regrette Didier Fassin, anthropologue, professeur au Collège de France, qui n’accepte de s’exprimer sur le sujet que par écrit. Dans ces conditions, toute perspective réellement historique, d’une part, et tout effort pour faire comprendre, d’autre part, se heurtent à la #suspicion. »

    En s’autocensurant, et en refusant de s’exprimer dans les médias, les spécialistes reconnus du Proche-Orient savent pourtant qu’ils laissent le champ libre à ceux qui ne craignent pas les approximations ou les jugements à l’emporte-pièce.

    « C’est très compliqué, les chercheurs établis sont paralysés et s’interdisent de répondre à la presse par crainte d’être renvoyés à des prises de position politiques. Du coup, on laisse les autres parler, ceux qui ne sont pas spécialistes, rapporte un chercheur lui aussi spécialiste du Proche-Orient, qui compte parmi les initiateurs de la pétition. Quant aux jeunes doctorants, au statut précaire, ils s’empêchent complètement d’évoquer le sujet, même en cours. »

    Stéphanie Latte Abdallah, historienne spécialiste de la Palestine, directrice de recherche au CNRS, a été sollicitée par de nombreux médias ces dernières semaines. Au lendemain des attaques du Hamas, elle fait face sur certains plateaux télé à une ambiance électrique, peu propice à la nuance, comme sur Public Sénat, où elle se trouve sous un feu de questions indignées des journalistes, ne comprenant pas qu’elle fasse une distinction entre l’organisation de Daech et celle du Hamas…

    Mises en cause sur les #réseaux_sociaux

    À l’occasion d’un des passages télé de Stéphanie Latte Abdallah, la chercheuse Florence Bergeaud-Blackler, membre du CNRS comme elle, l’a désignée sur le réseau X, où elle est très active, comme membre d’une école de pensée « antisioniste sous couvert de recherche scientifique », allant jusqu’à dénoncer sa « fausse neutralité, vraie détestation d’Israël et des juifs ».

    S’est ensuivi un déluge de propos haineux à connotation souvent raciste, « des commentaires parfois centrés sur mon nom et les projections biographiques qu’ils pouvaient faire à partir de celui-ci », détaille Stéphanie Latte Abdallah, qui considère avoir été « insultée et mise en danger ».

    « Je travaille au Proche-Orient. Cette accusation qui ne se base sur aucun propos particulier, et pour cause (!), est choquante venant d’une collègue qui n’a de plus aucune expertise sur la question israélo-palestinienne et aucune idée de la situation sur le terrain, comme beaucoup de commentateurs, d’ailleurs », précise-t-elle.

    Selon nos informations, un courrier de rappel à l’ordre a été envoyé par la direction du CNRS à Florence Bergeaud-Blackler, coutumière de ce type d’accusations à l’égard de ses collègues via les réseaux sociaux. La direction du CNRS n’a pas souhaité confirmer.

    Commission disciplinaire

    À l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), après la diffusion le 8 octobre d’un communiqué de la section syndicale Solidaires étudiant·e·s qui se prononçait pour un « soutien indéfectible à la lutte du peuple palestinien dans toutes ses modalités et formes de lutte, y compris la lutte armée », la direction a effectué un signalement à la plateforme Pharos, qui traite les contenus illicites en ligne.

    Selon nos informations, une chercheuse du CNRS qui a relayé ce communiqué sur une liste de discussion interne, en y apportant dans un premier temps son soutien, est aujourd’hui sous le coup d’une procédure disciplinaire. Le fait qu’elle ait condamné les massacres de civils dans deux messages suivants et pris ses distances avec le communiqué de Solidaires étudiant·e·s n’y a rien fait. Une « commission paritaire » – disciplinaire en réalité – sur son cas est d’ores et déjà programmée.

    « Il s’agit d’une liste intitulée “opinions” où l’on débat habituellement de beaucoup de sujets politiques de façon très libre », nous précise un chercheur qui déplore le climat de suspicion généralisée qui s’est installé depuis quelques semaines.

    D’autres rappellent l’importance de la chronologie puisque, le 8 octobre, l’ampleur des crimes contre les civils perpétrés par le Hamas n’était pas connue. Elle le sera dès le lendemain, à mesure que l’armée israélienne reprend le contrôle des localités attaquées.

    Autre cas emblématique du climat inhabituellement agité qui secoue le monde universitaire ces derniers jours, celui d’un enseignant-chercheur spécialiste du Moyen-Orient dénoncé par une collègue pour une publication postée sur sa page Facebook privée. Au matin du 7 octobre, Nourdine* (prénom d’emprunt) poste sur son compte une photo de parapentes de loisir multicolores, assortie de trois drapeaux palestiniens et trois émoticônes de poing levé. Il modifie aussi sa photo de couverture avec une illustration de Handala, personnage fictif et icône de la résistance palestinienne, pilotant un parapente.

    À mesure que la presse internationale se fait l’écho des massacres de civils israéliens auxquels ont servi des ULM, que les combattants du Hamas ont utilisés pour franchir la barrière qui encercle la bande de Gaza et la sépare d’Israël, le chercheur prend conscience que son post Facebook risque de passer pour une célébration sordide des crimes du Hamas. Il le supprime moins de vingt-quatre heures après sa publication. « Au moment où je fais ce post, on n’avait pas encore la connaissance de l’étendue des horreurs commises par le Hamas, se défend-il. Si c’était à refaire, évidemment que je n’aurais pas publié ça, j’ai été pétri de culpabilité. »

    Trop tard pour les regrets. Quatre jours après la suppression de la publication, la direction du CNRS, dont il est membre, est destinataire d’un mail de dénonciation. Rédigé par l’une de ses consœurs, le courrier relate le contenu du post Facebook, joint deux captures d’écran du compte privé de Nourdine et dénonce un « soutien enthousiaste à un massacre de masse de civils ».

    Elle conclut son mail en réclamant « une réaction qui soit à la mesure de ces actes et des conséquences qu’ils emportent », évoquant des faits pouvant relever de « l’apologie du terrorisme » et susceptibles d’entacher la réputation du CNRS.

    On est habitués à passer sur le gril de l’islamo-gauchisme et aux attaques extérieures, mais pas aux dénonciations des collègues.

    Nourdine, chercheur

    Lucide sur la gravité des accusations portées à son égard, Nourdine se dit « démoli ». Son état de santé préoccupe la médecine du travail, qui le met en arrêt et lui prescrit des anxiolytiques. Finalement, la direction de l’université où il enseigne décide de ne prendre aucune sanction contre lui.

    Également directeur adjoint d’un groupe de recherche rattaché au CNRS, il est néanmoins pressé par sa hiérarchie de se mettre en retrait de ses fonctions, ce qu’il accepte. Certaines sources universitaires affirment que le CNRS avait lui-même été mis sous pression par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pour sanctionner Nourdine.

    Le chercheur regrette des « pratiques vichyssoises » et inédites dans le monde universitaire, habitué aux discussions ouvertes même lorsque les débats sont vifs et les désaccords profonds. « Des collègues interloqués par mon post m’ont écrit pour me demander des explications. On en a discuté et je me suis expliqué. Mais la collègue qui a rédigé la lettre de délation n’a prévenu personne, n’a pas cherché d’explications auprès de moi. Ce qui lui importait, c’était que je sois sanctionné », tranche Nourdine. « On est habitués à passer sur le gril de l’#islamo-gauchisme et aux #attaques extérieures, mais pas aux dénonciations des collègues », finit-il par lâcher, amer.

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    Sciences Po en butte aux tensions

    Ce mardi 21 novembre, une manifestation des étudiants de Sciences Po en soutien à la cause palestinienne a été organisée rue Saint-Guillaume. Il s’agissait aussi de dénoncer la « censure » que subiraient les étudiants ayant trop bruyamment soutenu la cause palestinienne.

    Comme l’a raconté L’Obs, Sciences Po est confronté à de fortes tensions entre étudiants depuis les attaques du Hamas du 7 octobre. Le campus de Menton, spécialisé sur le Proche-Orient, est particulièrement en ébullition.

    Une boucle WhatsApp des « Students for Justice in Palestine », créée par un petit groupe d’étudiants, est notamment en cause. L’offensive du Hamas y a notamment été qualifiée de « résistance justifiée » et certains messages ont été dénoncés comme ayant des relents antisémites. Selon l’hebdomadaire, plusieurs étudiants juifs ont ainsi dit leur malaise à venir sur le campus ces derniers jours, tant le climat y était tendu. La direction a donc convoqué un certain nombre d’étudiants pour les rappeler à l’ordre.

    Lors d’un blocus sur le site de Menton, 66 étudiants ont été verbalisés pour participation à une manifestation interdite.

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    En dehors des cas particuliers précités, nombre d’universitaires interrogés estiment que le climat actuel démontre que le #monde_académique n’a pas su résister aux coups de boutoir politiques.

    « Ce n’est pas la première fois qu’une telle situation se produit », retrace Didier Fassin. « On l’avait vu, sous la présidence actuelle, avec les accusations d’islamo-gauchisme contre les chercheuses et chercheurs travaillant sur les discriminations raciales ou religieuses. On l’avait vu, sous les deux présidences précédentes, avec l’idée qu’expliquer c’est déjà vouloir excuser », rappelle-t-il en référence aux propos de Manuel Valls, premier ministre durant le quinquennat Hollande, qui déclarait au sujet de l’analyse sociale et culturelle de la violence terroriste : « Expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser. »

    « Il n’en reste pas moins que pour un certain nombre d’entre nous, nous continuons à essayer de nous exprimer, à la fois parce que nous croyons que la démocratie de la pensée doit être défendue et surtout parce que la situation est aujourd’hui trop grave dans les territoires palestiniens pour que le silence nous semble tolérable », affirme Didier Fassin.

    Contactée, la direction du #CNRS nous a répondu qu’elle ne souhaitait pas s’exprimer sur les cas particuliers. « Il n’y a pas à notre connaissance de climat de délation ou des faits graves de censure. Le CNRS reste très attaché à la liberté académique des scientifiques qu’il défend depuis toujours », nous a-t-elle assuré.

    Une répression qui touche aussi les syndicats

    À la fac, les syndicats sont aussi l’objet du soupçon, au point parfois d’écoper de sanctions. Le 20 octobre, la section CGT de l’université Savoie-Mont-Blanc (USMB) apprend sa suspension à titre conservatoire de la liste de diffusion mail des personnels, par décision du président de l’établissement, Philippe Galez. En cause : l’envoi d’un message relayant un appel à manifester devant la préfecture de Savoie afin de réclamer un cessez-le-feu au Proche-Orient et dénonçant notamment « la dérive ultra-sécuritaire de droite et d’extrême droite en Israël et la politique de nettoyage ethnique menée contre les Palestiniens ».

    La présidence de l’université, justifiant sa décision, estime que le contenu de ce message « dépasse largement le cadre de l’exercice syndical » et brandit un « risque de trouble au bon fonctionnement de l’établissement ». La manifestation concernée avait par ailleurs été interdite par la préfecture, qui invoquait notamment dans son arrêté la présence dans un rassemblement précédent « de nombreux membres issus de la communauté musulmane et d’individus liés à l’extrême gauche et ultragauche ».

    La section CGT de l’USMB n’a pas tardé à répliquer par l’envoi à la ministre Sylvie Retailleau d’un courrier, depuis resté lettre morte, dénonçant « une atteinte aux libertés syndicales ». La lettre invite par ailleurs le président de l’établissement à se plier aux consignes du ministère et à effectuer un signalement au procureur, s’il estimait que « [le] syndicat aurait “troublé le bon fonctionnement de l’établissement” ». Si ce n’est pas le cas, « la répression syndicale qui s’abat sur la CGT doit cesser immédiatement », tranche le courrier.

    « Cette suspension vient frontalement heurter la #liberté_universitaire, s’indigne Guillaume Defrance, secrétaire de la section CGT de l’USMB. C’est la fin d’un fonctionnement, si on ne peut plus discuter de manière apaisée. »

    Le syndicat dénonce également l’attitude de Philippe Galez, qui « veut désormais réguler l’information syndicale à l’USMB à l’aune de son jugement ». Peu de temps après l’annonce de la suspension de la CGT, Philippe Galez a soumis à l’ensemble des organisations syndicales un nouveau règlement relatif à l’utilisation des listes de diffusion mail. Le texte limite l’expression syndicale à la diffusion « d’informations d’origine syndicale ou à des fins de communication électorale ». Contacté par nos soins, le président de l’USMB nous a indiqué réserver dans un premier temps ses « réponses et explications aux organisations syndicales et aux personnels de [son] établissement ».

    Interrogé par Mediapart, le cabinet de Sylvie Retailleau répond que le ministère reste « attaché à la #liberté_d’expression et notamment aux libertés académiques : on ne juge pas des opinions. Il y a simplement des propos qui sont contraires à la loi ».

    Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche fait état de « quelques dizaines de cas remontés au ministère ». Il reconnaît que des événements ont pu être annulés pour ne pas créer de #trouble_à_l’ordre_public dans le climat actuel. « Ils pourront avoir lieu plus tard, quand le climat sera plus serein », assure l’entourage de la ministre.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/211123/conflit-israelo-palestinien-une-chape-de-plomb-s-est-abattue-sur-l-univers
    #université #Israël #Palestine #France #7_octobre_2023 #délation #ESR

    • Emmanuel Macron affirme (https://twitter.com/BFMTV/status/1718960210902237424) qu’en langue française, “le #masculin fait le #neutre, on n’a pas besoin d’ajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre lisible”. Pour le CNRS, en français, “pour le cerveau, le neutre n’est pas neutre”.

      Il est désormais bien établi que l’utilisation du #masculin_générique engendre des #représentations_mentales déséquilibrées en faveur du masculin. Pour autant, toutes les formes d’écriture inclusive sont-elles aussi efficaces pour contrer ce biais ? Dans une étude récente parue dans la revue Frontiers in Psychology, une équipe de scientifiques a démontré que les #formulations_neutres, sans marque de #genre_grammatical, ne permettent pas d’éliminer complètement le #biais vers le masculin, au contraire des formes doubles qui mentionnent à la fois le masculin et le féminin (https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2023.1256779/full).

      Pour éclairer le débat, lire Spinelli E., Chevrot J-P., Varnet L. 2023, Neutral is not fair enough : testing the efficiency of different language gender-fair strategies, Frontiers in Psychology ou son compte rendu sur la lettre du CNRS.

      #écriture_inclusive #Macron #Emmanuel_Macron #CNRS #langue #français #langue_française

    • Le rêve d’un abruti sur tout les fronts, ça me rappelle les Ceaucescus qui se targuaient de savoir et de science faux diplômes à l’appui mais n’avaient que la securitate pour s’imposer.

      les misérables à l’œuvre partout s’épaulent pour leurs crimes, du simple langage aux meurtres des enfants

      Bien dit :
      « A travers les mains de ceux qui la bite »

      PS
      Il ne dit pas ’des choses pour la rendre lisible’ mais ’des choses pour la rendre illisible’ et là il est tellement content qu’il boit un verre de vodka pendant que son auditoire de vieux chnocks et chnokesses, jackLang au premier rang applaudit.

      EDIT
      D’ailleurs quelques jours après, en relisant le post, il doit quand même être morveux de sortir une énormité pareille puisqu’il bafouille et noie ensuite ses mots dans son verre de vodka·eau. De fait, c’est comique puisqu’il bafouille « illisible » qui devient dans les médias « lisible » preuve qu’il est inaudible, et est incapable de parler distinctement le français !

    • #Interdiction de l’écriture inclusive : les ressorts d’un procès politique

      Pour une fois, les hommes et les femmes de la chambre haute se sont pressées pour proposer une loi visant à interdire l’écriture inclusive. Mais l’application de cette #prohibition, purement idéologique, ne serait pas sans lourdes conséquences administratives.

      Lundi 30 octobre 2023, les sénateurs et sénatrices françaises (double flexion inclusive avec accord de proximité certifié de tradition française multiséculaire) ont adopté à 221 voix pour et 82 contre une #proposition_de_loi de droite particulièrement intrusive et extensive visant à « protéger la langue française des #dérives de l’écriture dite inclusive » et interdisant, sous peine de nullité, l’usage de certains traits d’inclusivité – le point médian, perçu comme un comédon typographique, est évidemment ciblé – dans les actes juridiques, les modes d’emploi, les contrats de travail ou les règlements intérieurs d’entreprise.

      Le président de la République, Emmanuel Macron, s’est fort opportunément coordonné avec les débats et le vote depuis Villers-Cotterêts, où il inaugurait la Cité internationale de la langue française. S’évertuant à remplir les amples chausses de François Ier, il a tenu à faire part de sa « pensée complexe » en la matière. Il a appelé – leçon de girouette politique – à ne pas « céder aux airs du temps » et rappelé doctement, avec un sens admirable de la précision, que dans la langue française, dont la perfection, l’état d’achèvement ne sont plus à démontrer, « le masculin fait le neutre » et qu’« on n’a pas besoin d’ajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre lisible ».

      On eût aimé que les un·es et les autres, dans leurs « travaux » et gloses diverses sur cette langue divinisée que le monde entier nous envie, se renseignassent un minimum auprès des linguistes et des philologues, des praticien·nes et historien·nes de « la langue », avant de proférer, en l’occasion, les énormités qui constituent la récolte ordinaire du marronnier régulièrement secoué par Le Figaro.

      Mais qu’attendre, en vérité, d’un personnel politique de droite, d’extrême droite et d’extrême centre qui, à l’oral comme à l’écrit, passe sa vie, dans les hémicycles, sur les réseaux sociaux, sur les plateaux de télévision ou dans les studios de radio, à écorcher, appauvrir, atrophier et faire rancir le sacro-saint français ; qui nous bassine avec ses néologismes publicitaires à forte valeur non ajoutée (« start-up nation ») ou ses interdicteurs de pensée et de débat (« islamogauchisme », « wokisme ») ?

      Nous serons assez charitables pour rappeler au président de la République que l’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) ne se réduit pas à l’image d’Épinal du bon père de la Nation qui généralise l’emploi du français, déjà bien présent depuis le Moyen Âge dans les actes notariés dans tout son nuancier dialectal, à l’ensemble des actes administratifs.

      D’abord, de portée très limitée (si on la compare au projet de loi sénatorial), elle ne s’appliquait qu’aux documents de justice ; ensuite, dans un pays fait de plusieurs « nations » (au sens de l’Ancien Régime), dont certaines d’arrimage récent (Bretagne), le français n’était qu’un « langage maternel » parmi d’autres, et ces autres se sont pour une bonne part maintenus, en s’appuyant sur ladite ordonnance, la promotion du « langage maternel françoys » étant entendue comme celle du « langage maternel ou françoys ». L’essentiel était alors que les actes de justice, rédigés en langue vernaculaire, fussent compréhensibles par les habitant·es de la province et non par les seuls hommes de l’art, francophones ou pas.

      Nous signalerons tout aussi charitablement aux sénatrices et sénateurs que le vieux ressort argumentatif rouillé d’une inclusivité non inclusive à l’endroit des personnes dyslexiques et dysorthographiques rendrait un autre son si étaient exigées dans la foulée l’abolition des mots composés et des abréviations, ainsi que la simplification réelle et la mise en cohérence effective de l’orthographie française. Mais telle n’est pas leur ambition. En revanche, l’emploi du mot « dérives » et la distance sanitaire signifiée par l’expression « écriture dite inclusive » nous disent très bien leur présupposé. L’inclusivité elle-même est en sursis probatoire.

      La proposition de loi sénatoriale, si elle était définitivement adoptée, pourrait entraîner des bouleversements considérables, qui plus est rétroactifs, sachant que l’administration n’a pas attendu les « airs du temps » pour pratiquer l’inclusivité. Elle utilise depuis des lustres le banal trait d’union à la place du point médian et la double flexion (elle tolérée par le Palais du Luxembourg).

      Nos arbitres des élégances typographiques se souviennent-ils seulement des bouleversements considérables occasionnés par la dernière « grosse » réforme de modernisation de l’orthographie à avoir été réellement mise en œuvre, en 1835 ? Guizot, alors à la tête du ministère de l’instruction publique, voulait traduire en actes les préconisations de la sixième édition du Dictionnaire de l’Académie française. Les trois principales mesures de cette réforme, déjà poussées en son temps par Voltaire, étaient celles-ci :

      – on passe de [oi] à [ai] là où on prononçait déjà le son \ɛ\, la graphie [oi] étant réservée au son \wa\ (typiquement françois/français, mais sont aussi touchées une bonne partie des formes verbales) ;

      – les mots se terminant jusque-là par [-nt] au singulier et faisant [-ns] au pluriel, comme parent/parens, se finissent désormais en [-nts] ;

      – l’esperluette [&] est remplacée par [et] (un petit mot de rien mais surabondant).

      Point de cris d’orfraie, à l’époque, dans les rangs des assemblées, pourtant encore bien réactionnaires, contre cet « air du temps » là. Adoptée sans opposition notable, cette (petite) révolution en différé, initiée – une fois n’est pas coutume – par l’Académie elle-même, obligea à réimprimer une bonne partie de la littérature du temps et des temps passés (un Armageddon paperassier régulièrement brandi par les contempteurs et contemptrices de l’écriture inclusive). Trois mesurettes, dont la première en forme de rattrapage phonétique, mais conséquences maousses.

      Vu l’accroissement considérable du volume depuis l’époque de Guizot, la proposition de loi du Sénat ressemble fort à une usine à gaz chronophage et dévoreuse de ressources, plus susceptible de mettre le zbeul que de mettre bon ordre à une orthographie officielle qui, nonobstant plusieurs propositions réformatrices de savants et de ministres, a globalement peu bougé depuis 1835, soit près de deux siècles – c’est dire la vigueur des attaques qu’elle a subies.
      Force de frappe idéologique

      À défaut de protéger « la langue », quintessence à jamais inaccessible et assurément fumeuse, la droite sénatoriale et son caudataire présidentiel montrent surtout l’étendue et de leur ignorance et de leurs préjugés. Objectivement, ce n’est pas tant l’inclusivité qui les gêne, celle-ci étant pratiquée diversement en français depuis le Moyen Âge, ainsi que le pôle Correction de Mediapart le rappelait dans ce billet, et même en partie entérinée par l’Académie française elle-même pour les noms de métier.

      Non, ce qui les gêne, c’est que certains milieux militants, notamment féministes mais pas que, s’en soient emparés dès les années 1970, en jouent, continuent de la faire vivre, lui donnent une force de frappe idéologique perceptible, à l’heure des grandes régressions sociales et sociétales, sans réclamer nécessairement, du reste – ce qui serait contradictoire avec la plasticité recherchée – son institutionnalisation, sa normalisation, sa glaciation.

      Pendant qu’on ergote et chicane sans fin sur les effets de graphie, dont la plupart des écrivain·es, des éditeurs et éditrices se sont soucié·es pendant des siècles comme de leur première chemise, y compris aux époques (eh oui, c’est cyclique, mesdames messieurs les déclinistes) du rayonnement international de la lingua franca, on ne travaille pas sur les effets de lexique et de sens (l’inclusivité se loge aussi là), autrement délicats, où se nouent, pour l’essentiel, les rapports de force politiques, voire géopolitiques, de sexe, de classe ou de race, où les discriminations s’expriment et se résolvent parfois.

      Les progrès de l’inclusivité sont encore, au plan éditorial, largement marginaux, nul ne songeant à l’imposer à coups de règle, comme du reste la dernière réformette orthographique de 1990, ce qui rend l’alarme sénatoriale et présidentielle d’autant plus pathétique, pour ne pas dire risible. À la fin des fins, la pratique ordinaire tranchera. Une large partie de l’expression langagière, par nature dérivante (non au plan moral mais au plan linguistique), échappe, hors contexte totalitaire, aux tentatives d’arraisonnement et d’encagement, et ce depuis que notre langue est langue. Mais cela, les intelligences artificielles de certain·es de nos représentant·es et dirigeant·es ont du mal à le concevoir.

      https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/021123/interdiction-de-l-ecriture-inclusive-les-ressorts-d-un-proces-politique

    • Communiqué de presse : « Le masculin fait le neutre… » ou pas

      Dans son discours d’inauguration de la Cité internationale de la langue française prononcé le lundi 30 octobre 2023 à Villers-Cotterêts, le Président de la République a pris position contre « l’écriture inclusive », en affirmant : « le masculin fait le neutre, on n’a pas besoin d’y rajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre illisible ».

      La position surplombante du président donne l’impression de vouloir édicter une règle une fois pour toutes qu’il imposerait, par sa seule parole, à des millions de francophones, en France et hors de France, à rebours du symbole que représente la Cité inaugurée ce jour-là.

      Nous rappelons, en tant que scientifiques spécialistes du langage et des langues – et de la langue française en particulier – que les règles se forment au fil du temps par les pratiques des locuteurs et locutrices, et que c’est l’usage qui finit par s’imposer, et non la volonté d’une autorité, fût-elle académique, ministérielle ou présidentielle. Si les questions d’enseignement et d’orthographe nécessitent des décisions politiques, elles ne sauraient être tranchées par une seule personne, aussi puissante soit-elle.

      Emmanuel Macron semble se positionner contre le point médian et d’autres formes abrégées. Beaucoup, comme lui, feignent de réduire l’écriture inclusive à un seul procédé, au milieu de nombreuses autres possibilités (accord de proximité, mots épicènes…). D’ailleurs, il utilise lui-même des procédés inclusifs dans le discours du 30 octobre comme dans ses autres prises de parole. Les doublets complets (« Françaises, Français… ») existent depuis longtemps, et la littérature classique regorge de rois et reines, de princes et princesses plutôt que rois ou princes quand il s’agit de personnes des deux sexes : ils ressortissent du langage inclusif. En outre, certaines formes abrégées présentes depuis des décennies sur les documents officiels de la République française (dont la carte d’identité ou des formulaires administratifs : « né(e) le… », « domicilié(e) à… ») ne posent aucun problème. Les doublets complets ou abrégés se déploient aujourd’hui sur de nombreux supports (privés, publics, papier, numériques, sites, presse, cartels de musées…) sans être l’apanage d’une poignée de militants ou de militantes, contrairement à l’idée fausse qui est véhiculée. Il ne s’agit pas d’un système d’écriture figé ni imposé, mais d’une série de pratiques dont l’un des objectifs premiers est de préciser la composition de groupes humains.

      La formule « le masculin fait le neutre » est contredite par de nombreux travaux scientifiques qui montrent, à partir de données et d’expérimentations, que le sens premier du masculin, pour les humains, est de désigner des hommes, et que l’emploi dit générique est source d’ambigüité. Moins de femmes répondent aux offres d’emploi rédigées au masculin par exemple. Tout ceci est documenté.

      Le jour de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française, il eût été important de ne pas oublier ces choses élémentaires, de faire davantage appel aux travaux scientifiques, et sans doute encore plus opportun d’évoquer l’un des sujets majeurs pour l’avenir du français et des francophones, à savoir l’orthographe à enseigner : celle de 1990, comme en Belgique et en Suisse ? Ou celle de 1878, comme c’est trop souvent le cas ? Si le Président se soucie de la lisibilité du français, qu’il joigne sa voix aux nombreuses autres, dont des fédérations de professeurs de français et des linguistes (voir Le Monde du 16 octobre dernier), qui demandent une nouvelle réforme de l’orthographe.

      Le collectif des Linguistes atterrées, le 31 octobre 2023

      https://www.tract-linguistes.org/communique-de-presse-communique-le-masculin-fait-le-neutre-ou-pas

    • Écriture inclusive : “Le président ne peut pas faire la loi sur la langue que parlent les Français”

      Le débat sur l’écriture inclusive, relancé lundi par Emmanuel Macron, ainsi que par le Sénat, pose la question de l’action politique sur la langue. Entretien avec le linguiste Michel Launey.

      « Dans cette langue, le masculin fait le neutre. On n’a pas besoin d’y ajouter des points au milieu des mots, ou des tirets ou des choses pour la rendre lisible. » Le discours d’Emmanuel Macron, le 30 octobre, lors de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, et tandis que le Sénat votait une proposition de loi visant à « protéger la langue française des dérives de l’écriture dite inclusive », a relancé le débat autour de celle-ci. Michel Launey, linguiste et auteur de La République et les langues 1, rappelle la dimension politique d’une telle prise de parole. Membre du collectif des Linguistes atterrées, il met en lumière l’importance d’une rationalisation de la langue, venant du peuple et pas de l’État.

      Quand Emmanuel Macron dit qu’il ne faut pas « céder aux airs du temps », que cela signifie-t-il ?
      Les changements linguistiques sont généralement des phénomènes lents, inconscients et collectifs. S’il parle d’une mode passagère, c’est mal poser le problème car la langue est dans son temps : on verra bien si les innovations et les changements restent ou pas. Ce n’est pas le président de la République ou le Sénat qui le décideront, ce sont les jeunes, les vieux, tous les locuteurs. Cela revient à mélanger le phénomène d’innovation linguistique et le phénomène de mode – qui, par ailleurs, n’est ni bon ni mauvais par essence.

      L’écriture inclusive est-elle une mode ?
      Je suis prudent sur le sujet, mais c’est un phénomène intéressant car il s’agit, pour une fois, d’une action consciente d’une partie de la population, alors que généralement les évolutions de la langue ne sont pas concertées. D’ailleurs, quand on parle d’écriture inclusive, on mélange ses trois branches. La première, la féminisation des noms de métiers, est plutôt passée dans le langage courant, c’est un premier combat gagné. Les deux autres concernent l’accord de proximité [accorder avec le nom situé au plus proche, par exemple « les marcheurs et marcheuses sont contentes », ndlr] et le point médian [par exemple un·e écrivain·e, ndlr].

      Pourquoi cette crispation autour du point médian ?
      Une objection au point médian est que les formules ne sont pas facilement lisibles à l’oral. Ceci dit, il peut y avoir une convention qui définirait comment lire « les étudiant·e·s », tout comme on sait prononcer le mot « deux », quand on lit « 2 », c’est le même mécanisme. On est habitués à la différence entre ce qu’on lit et ce qu’on prononce, notamment en mathématiques. Par ailleurs, une partie de la communication écrite n’a pas pour fonction d’être lue à l’oral, donc ce n’est pas choquant tant que c’est compris. L’intérêt de l’écriture inclusive est d’ailleurs relevé par le Haut Conseil à l’égalité : les femmes ont par exemple tendance à moins postuler à une offre d’emploi écrite au masculin, plutôt qu’en écriture inclusive.

      Est-ce à un président ou à l’État de dicter l’usage de la langue française ?
      C’est peut-être le rêve de certains, mais ce n’est pas dans les compétences du président. Il ne peut pas faire la loi sur la langue que parlent l’ensemble des Français et Françaises. On a, en France, le plus grand mal à penser une langue qui présente des variations, qui n’est pas unique. La doxa veut que la langue française, comme la République, soit une, et que tout ce qui s’écarte des standards ne soit plus du français. Or pour moi, c’est très grave. Par exemple dire d’un jeune de banlieue que ce qu’il parle n’est pas du français, alors qu’il ne parle pas une autre langue, revient à l’exclure de la communauté des francophones. On organise une déchéance de langue, une apatridie linguistique.

      Que symbolise la volonté d’un « bon usage » du français ?
      C’est une volonté politique, assurément. Si on prend le français à la création de l’Académie française, en 1634, il était une évolution du bas latin qui avait beaucoup changé en un millénaire. On lui avait retiré les déclinaisons, ajouté des articles, etc. Quand ces changements se sont produits, personne ne les a refusés sous prétexte que leurs ancêtres parlaient différemment. Et, de toute façon, ceux qui ont engendré ces modifications étaient les membres de la communauté linguistique tout entière – le peuple, des gens majoritairement non instruits et illettrés. Il ne s’agissait pas d’une affaire de loi, ni de noblesse, clergé ou bourgeoisie. Le début de la légifération de la langue est arrivé avec la création de l’Académie française.

      Est-il utile de vouloir légiférer sur la langue ?
      Le texte de loi voté au Sénat hier est, selon moi, une stupidité politique. S’il passait l’Assemblée nationale, il serait sans doute bloqué par le Conseil constitutionnel car il ne relève pas de la compétence de l’État. Et même s’il était validé, on ne peut pas mettre en place une police linguistique pour vérifier le non-usage de l’écriture inclusive dans le cadre privé.

      Cela ne veut pas dire que la langue ne doit pas évoluer – surtout son orthographe. Il n’y a pas eu de vrai changement orthographique depuis 1835, il est temps d’une rationalisation, car le français contient beaucoup d’illogismes qui vampirisent le temps d’apprentissage. Il y a une multitude d’exemples, comme le mot « nénuphar » qui n’a aucune raison de s’écrire avec « ph » et pas un « f », aucune racine grecque. Si changement il y a, je crois qu’il n’aura pas lieu à l’Académie française ; il faudrait plutôt un rassemblement international de francophones avec des linguistes, des écrivains, des éditeurs pour réfléchir ensemble, tranquillement à ces sujets.

      https://www.telerama.fr/debats-reportages/ecriture-inclusive-le-president-ne-peut-pas-faire-la-loi-sur-la-langue-que-

    • Pourquoi utiliser l’écriture inclusive ?

      Parce que la langue façonne notre perception du monde, #Marie_Barbier, corédactrice en chef de la revue féministe La Déferlante, défend l’usage de l’écriture inclusive, comme un outil pour ne laisser de côté ni les femmes ni les minorités de genre.

      Pour nous, à La Déferlante, il était évident de ne pas utiliser une langue où le masculin l’emporte sur le féminin. Dès qu’on a commencé à travailler sur la revue, un an avant la publication de notre premier numéro (en mars 2021), c’était certain que la revue des révolutions féministes serait écrite en écriture inclusive.

      Nous avons travaillé avec deux correctrices, Sophie Hofnung et Aurélie Charrier, qui ont réalisé une charte d’écriture inclusive – qui est désormais actualisée par Mélanie Tanous. C’est une charte vivante, on la fait évoluer au fur et à mesure du temps.

      Tout, tout le temps, doit être lisible et compréhensible par nos lectrices et lecteurs, y compris par des personnes qui ne pratiquent pas l’écriture inclusive. Il faut qu’elles ne soient pas rebutées par ça quand elles ouvrent la revue. On tient aussi à respecter les propos des personnes interrogées, donc toujours demander si elles sont d’accord pour que leurs propos soient transposés en écriture inclusive. Pour résumer, on tient à respecter au maximum la parole donnée, tout en étant au clair avec la ligne éditoriale de la revue.

      Depuis notre création, jamais personne ne nous a dit que c’était illisible. On n’a pas du tout ce genre de retours. Ça veut dire qu’en France, il y a des gens capables de lire 144 pages de revue en écriture inclusive de A à Z sans que ce soit un problème de lecture. Les correctrices, Sophie Hofnung, Mélanie Tanous et Sara Roumette, font extrêmement attention à cela.

      Par exemple, dans notre dernière newsletter sur la Palestine (envoyée le vendredi 10 novembre), je pensais écrire « juif·ves », mais la correctrice m’a repris en disant qu’on essayait de ne pas écrire de choses imprononçables. Donc, ici, on a mis le doublé : « juifs et juives ».
      La langue française révèle les discriminations

      Dans les débats récents sur la proposition de loi au Sénat, les sénateurs et sénatrices sont d’une mauvaise foi crasse. Évidemment que la langue française révèle les discriminations qu’il y a dans la société. Ça peut paraître anecdotique, mais ça ne l’est absolument pas.

      C’est très important de redonner la place au féminin dans la langue française. « Le masculin l’emporte sur le féminin », c’est l’apothéose du patriarcat : ce n’est pas possible, nulle part. Que ce soit dans la société, dans la langue, dans tous les domaines possibles, le masculin ne doit pas l’emporter sur le féminin.

      D’autant que l’on peut retracer cette habitude au 17e siècle, lorsqu’on a instauré des normes qui disaient, en substance, que le masculin était plus noble que le féminin. C’est donc une construction de la langue. Comme beaucoup de choses contre lesquelles on se bat, c’est une construction sociale. À un moment donné, les dominants se sont emparés de l’outil qui est la langue pour asseoir leur domination. Ce n’est pas envisageable de ne pas le questionner, au moins.
      Il n’y a pas qu’une écriture inclusive

      Ce n’est pas vrai qu’un point d’ortho-typo peut gêner la lecture. C’est utilisé dans plein d’autres choses. C’est ce que dit aussi la tribune de 130 féministes, dont la grammairienne Éliane Viennot, en réponse à Emmanuel Macron. Par exemple, on utilise le « né(e) le » dans des documents administratifs. Et quel symbole de mettre entre parenthèses le féminin ! Ça dit quelque chose. On ne le met pas entre parenthèses, le féminin est l’égal du masculin dans la langue, et on l’assoit de la manière la plus lisible possible.

      Les conservateurs et les conservatrices sont arcbouté·es sur une vision passéiste de la langue. Ils et elles sont dans une logique de domination, où la langue reflète une domination et une vision de la société, qui fait peu de cas de la place des femmes et des minorités sexuelles.

      Le « Citoyens, citoyennes » utilisé par Macron, c’est le doublé, c’est de l’écriture inclusive. C’est le fait d’intégrer le féminin et de le mettre à égalité avec le masculin. Donc la présidence française utilise l’écriture inclusive. Il y a plein de moyens d’utiliser l’écriture inclusive. À chaque numéro, on fait un petit marque-page avec des techniques d’écriture inclusive, et les gens adorent, ils le scotchent au-dessus de leur bureau.

      On explique par exemple qu’on peut utiliser les mots épicènes, dont la forme ne varie pas selon le genre. Il y a plein de techniques simples qui permettent de reformuler, ça demande juste un petit peu de temps.
      Appliquer l’égalité des genres

      Nous sommes une revue engagée, nous défendons le féminisme, mais au-delà de ça, on est une revue créée par des professionnelles de l’information. Donc, ça nous tient extrêmement à cœur que l’égalité des genres soit retranscrite dans la revue jusque dans son écriture. Il ne s’agit pas d’une lutte anecdotique, contrairement à ce que peuvent dire les gens de droite – qui, soit dit en passant, mettent une énergie démesurée à se battre contre. Non, ce n’est pas anecdotique, parce que la langue qu’on utilise est très révélatrice. Nous, elle nous permet d’appliquer l’égalité des genres jusqu’au bout.

      Ce n’est pas juste une question pour les gens de gauche. Moi, ça m’énerve que l’école ne l’utilise pas, ça m’énerve que Jean-Michel Blanquer (ancien ministre de l’Éducation nationale) s’y soit opposé. J’apprends à mes enfants le point médian, et il n’y a aucun problème avec ça. Ils l’utilisent, et ils savent le faire. C’est tout à fait possible. Les enfants ne sont pas perturbés par ça.

      Au contraire, ça permet de questionner la binarité de genre, de dire que si tu ne te sens pas fille ou garçon, qu’on peut utiliser le point médian et que c’est OK. Ça va au-delà de la question du masculin qui l’emporte sur le féminin, parce que dans la langue française, il y a une binarité très marquée. Le point médian comme le pronom « iel » permettent d’aller au-delà de cette binarité. C’est un des avantages : ça ouvre à des personnes qui ne se reconnaissent pas dans la binarité de genre d’être incluses dans la langue française.

      L’écriture inclusive devrait être utilisée par tout le monde. Ce n’est pas vrai que c’est compliqué, c’est simple et ça permet d’inclure le plus grand nombre et de ne pas rejeter des personnes de la langue française. Ça permet d’inclure les femmes, les personnes non binaires, les personnes trans, tout le monde. Je ne comprends pas pourquoi le fait d’inclure des gens dans la langue et de la rendre plus égalitaire est un problème.

      https://basta.media/pourquoi-utiliser-ecriture-inclusive-Senat

  • Une #université a tué une #librairie

    Une université vient de tuer une librairie. Le #libéralisme a fourni l’arme. Les codes des marchés ont fourni la balle. Et l’université, après avoir baissé les yeux, a appuyé sur la détente.

    Cette université c’est “mon” université, Nantes Université. Cette librairie c’est la librairie Vent d’Ouest, une librairie “historique”, présente dans le centre de Nantes depuis près de 47 années et travaillant avec l’université depuis presqu’autant de temps.

    Une université vient de tuer une librairie. Nantes Université travaillait, pour ses #commandes d’ouvrages (et une université en commande beaucoup …) avec principalement deux #librairies nantaises, Durance et Vent d’Ouest. Pour Vent d’Ouest, cela représentait une trésorerie d’environ 300 000 euros par an, 15% de son chiffre d’affaire. Une ligne de vie pour les 7 salariés de la libraire. Et puis Vent d’Ouest perd ce marché. Du jour au lendemain. Sans même un appel, une alerte ou une explication en amont de la décision de la part de Nantes Université.

    À qui est allé ce marché ? Au groupe #Nosoli, basé à Lyon, qui s’auto-présente comme le “premier libraire français indépendant multi-enseignes” (sic) et qui donc concrètement a racheté les marques et magasins #Decitre et #Furet_du_Nord (et récemment Chapitre.com) et dont le coeur de métier est bien davantage celui de la #logistique (#supply_chain) que celui de la librairie.

    Pourquoi Nosoli a-t-il remporté ce #marché ? Et pourquoi Nantes Université va devoir commander à des librairies Lyonnaises des ouvrages pour … Nantes ? Parce que le code des #marchés_publics. Parce que l’obligation de passer par des #appels_d’offre. Parce le code des marchés publics et des appels d’offre est ainsi fait que désormais (et depuis quelques temps déjà) seuls les plus gros sont en capacité d’entrer dans les critères définis. Parce que les critères définis (par #Nantes_Université notamment) visent bien sûr à faire des #économies_d’échelle. À payer toujours moins. Parce que bien sûr, sur ce poste de dépenses budgétaires comme sur d’autres il faut sans cesse économiser, rogner, négocier, batailler, parce que les universités sont exangues de l’argent que l’état ne leur donne plus et qu’il a converti en médaille en chocolat de “l’autonomie”. Parce qu’à ce jeu les plus gros gagnent toujours les appels d’offre et les marchés publics. C’est même pour cela qu’ils sont gros. Et qu’ils enflent encore. [mise à jour] Mais ici pour ce marché concernant des #livres, ce n’est pas le critère du #prix qui a joué (merci Jack Lang et la prix unique) mais pour être parfaitement précis, c’est le critère du #stock qui, en l’espèce et malgré le recours en justice de la librairie Vent d’Ouest, et bien qu’il soit reconnu comme discriminatoire par le ministère de la culture (en page 62 du Vade Mecum édité par le ministère sur le sujet de l’achat de livres en commande publique), a été décisif pour permettre à Nosoli de remporter le marché. [/mise à jour]

    Alors Nosoli le groupe lyonnais a gagné le marché de Nantes Université. Et les librairies nantaises Durance et Vent d’Ouest ont perdu. Et quelques mois après la perte de ce marché, la librairie Vent d’Ouest va fermer.

    On pourrait s’en réjouir finalement, ou même s’en foutre totalement. Après tout, Nantes Université va faire des #économies. Après tout une librairie qui ferme à Nantes et 7 salariés qui se trouvent sur le carreau c’est (peut-être) 7 personnes du service logistique du groupe Nosoli qui gardent leur emploi. Et puis quoi, une librairie qui ferme à Nantes mais il y en a 6 qui ont ouvert sur les deux dernières années à Nantes. Alors quoi ?

    Alors une université vient de tuer une librairie. Et quand on discute avec les gens qui, à Nantes Université, connaissent autrement que comptablement la réalité de ce qu’était le #marché_public passé avec Durance et Vent d’Ouest, et quand on échange avec celles et ceux qui ont l’habitude, à l’université ou ailleurs, de travailler avec le groupe Nosoli, on entend toujours la même chose : rien jamais ne remplacera la #proximité. Parce qu’avec Durance et Vent d’Ouest les échanges étaient souples, réactifs, pas (trop) systématiquement réglementaires, parce que les gens qui dans les bibliothèques de l’université commandaient les ouvrages connaissaient les gens qui dans les librairies les leur fournissaient, et qu’en cas de souci ils pouvaient même s’y rendre et les croiser, ces gens. Et on entend, en plus de l’aberration écologique, logistique, et sociétale, que les commandes avec le groupe Nosoli sont usuellement et comme avec tout grand groupe logistique … complexes, lentes, difficilement négociables et rattrapables, sans aucune souplesse, sans aucune écoute ou connaissance des besoins fins de l’université “cliente”. Voilà ce que l’on entend, entre autres choses plus âpres et plus en colère.

    Une université vient de tuer une librairie. Et ça fait tellement chier. C’est tellement anormal. Tellement schizophrène. Le même jour que celui où j’ai appris l’annonce de la fermeture définitive de la libraire Vent d’Ouest, j’ai aussi reçu un message de Nantes Université m’informant que, champagne, l’université venait – comme 14 autres universités – de remporter un appel à projet de plus de 23 millions d’euros. La cagnotte lancée par la libraire Vent d’Ouest après la perte du marché de Nantes Université lui avait rapporté quelques milliers d’euros qui lui avaient permis de retarder sa fermeture de cinq mois.

    Vivre à l’université, travailler à Nantes Université, c’est être tous les jours, à chaque instant et sur chaque sujet, confronté au même type de #schizophrénie. D’un côté on collecte des dizaines de millions d’euros dans de toujours plus nébuleux appels à projets, et de l’autre on gère la misère et la détresse. Et on ferme sa gueule. Parce que ne pas se réjouir de l’obtention de ces 23 millions d’euros c’est être un pisse-froid et c’est aussi mépriser le travail (et l’épuisement) des équipes qui pilotent (et parfois remportent) ces appels à projets. Oui mais voilà. À Nantes Université on organise des grandes fêtes de rentrée et on donnez rendez-vous à la prochaine #distribution_alimentaire, la #fête mais la #précarité. Et l’on fait ça tous les jours. Toutes les universités françaises organisent ou ont organisé des #distributions_alimentaires, et toutes les universités françaises remportent ou ont remporté des appels à projet de dizaines de millions d’euros. Mais les financements qui permettraient de recruter des collègues enseignants chercheurs ou des personnels techniques et administratifs en nombre suffisant, et de les recruter comme titulaires, pour garantir un fonctionnement minimal normal, ces financements on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient d’éviter de fermer une librairie avec qui l’université travaille depuis des dizaines d’années et d’éviter de mettre 7 personnes au chômage, on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient à tous les étudiant.e.s de manger tous les jours à leur faim, on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient à l’UFR Staps de Nantes Université de faire sa rentrée on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient aux collègues de la fac de droit de Nantes Université de ne pas sombrer dans l’#épuisement_au_prix et au risque de choix mortifières pour eux comme pour les étudiant.e.s on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient aux collègues de l’IAE de Nantes Université de ne pas s’enfoncer dans le #burn-out, ces financements on ne les trouve jamais. Il n’y a pas d’appel à projet à la solidarité partenariale. Il n’y a pas d’appel à projet à la lutte contre la #misère_étudiante. Il n’y a pas d’appel à projet pour permettre à des milliers de post-doctorants d’espérer un jour pouvoir venir enseigner et faire de la recherche à l’université. Il n’y pas d’appel à projet pour sauver l’université publique. Il n’y en a pas.

    Il n’y a pas d’appel à projet pour la normalité des choses. Alors Nantes Université, comme tant d’autres, est uniquement traversée par des #régimes_d’exceptionnalité. #Exceptionnalité des financements obtenus dans quelques appels à projets qui font oublier tous les autres appels à projet où l’université se fait retoquer. Exceptionnalité des #crises que traversent les étudiant.e.s, les formations et les #personnels de l’université. Exceptionnalité des mesures parfois prises pour tenter d’en limiter les effets. Dans nos quotidiens à l’université, tout est inscrit dans ces #logiques_d’exceptionnalité, tout n’est lisible qu’au travers de ces #matrices_d’exceptionnalité. Exceptionnalité des financements. Exceptionnalité des crises. Exceptionnalité des remédiations.

    Une université vient de tuer une librairie. Cela n’est pas exceptionnel. C’est devenu banal. Voilà l’autre danger de ces régimes d’exceptionnalité permanents : ils inversent nos #représentations_morales. Ce qui devrait être exceptionnel devient #banal. Et ce qui devrait être banal (par exemple qu’une université publique reçoive des dotations suffisantes de l’état pour lui permettre d’exercer sa mission d’enseignement et de recherche), est devenu exceptionnel.

    Une université vient de tuer une librairie. Dans le monde qui est le nôtre et celui que nous laissons, il n’est que des #dérèglements. Et si celui du climat dicte déjà tous les autres #effondrements à venir, nous semblons incapables de penser nos relations et nos institutions comme autant d’écosystèmes dans lesquels chaque biotope est essentiel aux autres. Nantes Université a tué la libraire Vent d’Ouest. Le mobile ? L’habitude. L’habitude de ne pas mener les combats avant que les drames ne se produisent. L’habitude de se résigner à appliquer des règles que tout le monde sait pourtant ineptes. L’habitude du renoncement à l’attention à l’autre, au plus proche, au plus fragile, dès lors que l’on peut se réjouir de l’attention que nous portent tant d’autres. L’#habitude d’aller chercher si loin ce que l’on a pourtant si près.

    Une université vient de tuer une librairie. Le libéralisme a fourni l’arme. Les codes des marchés ont fourni la balle. L’habitude a fourni le mobile. Et l’université, après avoir baissé les yeux, a froidement appuyé sur la détente.

    https://affordance.framasoft.org/2023/09/une-universite-a-tue-une-librairie

    #ESR #enseignement_supérieur

  • Une voiture pilotée à distance percute et blesse deux agents du CNRS à Valenciennes Catherine Bouteille - La Noix du Nord

    L’accident est survenu ce jeudi midi au laboratoire LAMIH, situé sur le campus du Mont-Houy de l’université de Valenciennes, lors d’une démonstration. En redémarrant de manière inopinée, la voiture électrique téléguidée a percuté trois agents du CNRS.

    Une fois les blessés pris en charge par les pompiers et les urgentistes du SMUR, les gendarmes de la compagnie de Valenciennes ont pris le relais. PHOTO « LA VOIX »

    Ce jeudi en fin de matinée, les pompiers, le SMUR et les gendarmes de la compagnie de Valenciennes ont convergé vers le campus du Mont-Houy de l’Université Polytechnique Hauts-de-France. Plus précisément au pied du bâtiment Jonas où se trouve le Laboratoire Automatique, Mécanique, Informatique Humaines (LAMIH). Une unité mixte de recherche entre l’université de Valenciennes et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Depuis 2021, un programme de recherches pour améliorer l’autonomie des voitures hybrides ou électriques y recourt aussi à un robot pour conduire le véhicule.

    C’est « au cours d’une démonstration à destination de personnels administratifs du CNRS » qu’un accident s’est produit vers 11 h 15. Un véhicule électrique piloté à distance a « redémarré de manière inopinée, percutant trois agents », précise l’université dans un communiqué.

    Des nouvelles rassurantes des blessés  
    L’un des agents a été plus sévèrement touché que les autres : il a été transporté jusqu’aux urgences de Valenciennes dans une ambulance médicalisée par le SMUR tandis que le second semblait plus légèrement blessé. La troisième victime, elle, n’a pas nécessité d’hospitalisation.

    Après le départ des secouristes, les gendarmes poursuivaient, de leur côté, leurs constatations afin de mieux déterminer les circonstances de cet accident pour le moins inhabituel. « Les nouvelles reçues sur leur état de santé en début d’après-midi étaient toutefois rassurantes », a fait savoir l’université ultérieurement.

    #université #campus #valenciennes #robot #voitures_hybrides #LAMIH #CNRS #mobilité #accident

    Source : https://www.lavoixdunord.fr/1343738/article/2023-06-22/une-voiture-intelligente-percute-et-blesse-deux-personnes-la-fac-de-val

  • Climatosceptiques : sur Twitter, enquête sur les mercenaires de l’intox | CNRS Le journal
    https://lejournal.cnrs.fr/articles/climatosceptiques-sur-twitter-enquete-sur-les-mercenaires-de-lintox

    Au sein du projet Climatoscope, David Chavalarias et ses collègues étudient la structure, les tactiques et les arguments des réseaux climatosceptiques sur Twitter. Des réseaux bien organisés, particulièrement actifs depuis quelques mois, dont l’objectif est de semer le doute sur la réalité du changement climatique, et de ralentir toutes les actions visant à réduire l’empreinte de l’humanité sur le climat.

    #CNRS #climatoscepticisme #réseaux_sociaux #Twitter

  • Du rififi au Maitron
    http://anarlivres.free.fr/pages/nouveau.html#rififi

    La dernière assemblée générale des Amis du Maitron, en décembre 2022, n’a pas été un long fleuve tranquille. Quelque temps après, on apprenait que, au cours de celle-ci, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) avait mené ce qu’on pourrait appeler un « putsch » : mise à l’écart de Claude Pennetier qui a grandement contribué pendant quarante ans à faire du dictionnaire ce qu’il est aujourd’hui (au côté du fondateur Jean Maitron, puis en tant que directeur), nomination d’Emmanuel Bellanger (Centre d’histoire sociale du CNRS) comme nouveau directeur, pour « remettre à plat le fonctionnement du Maitron dans les six mois qui viennent » (...)

    #Maitron #libertaire #CNRS #AmisduMaitron #dictionnaire #biographie

    • Bien qu’affirmant sa volonté de se maintenir « dans une perspective de science ouverte », il semblerait que ce soit justement l’ouverture du Maitron à des auteurs non universitaires qui constitue l’un des problèmes. Pour prendre exemple sur le dictionnaire des anarchistes, un travail coopératif et collaboratif a permis la publication de l’ouvrage Les Anarchistes. Dictionnaire biographique du mouvement libertaire francophone (Les Editions de l’Atelier, 2014, 526 p.) et surtout la création d’une division consacrée aux anarchistes (plus de 3 000 entrées) sur le site du Maitron. De nombreuses notices anciennes (parues dans les différents tomes de la version papier) ont été révisées et complétées, et de nouvelles ont été créées, directement ou non par des militants (toutes tendances confondues), qui se sont consacrés à l’étude du mouvement, et des historiens, sous le contrôle d’administrateurs qui assuraient la coordination (lire avant-propos).

      La nouvelle direction aurait, entre autres, pour projet de mettre fin à l’action « des administrateurs (corrections, mises à jour, mises en ligne, statistiques…). Il faudrait communiquer les notices sous Word à des salariés du CNRS qui les contrôleraient et les mettraient en ligne par lot au rythme lent de la publication d’un dictionnaire papier. Ce serait la fin de ce que nous avons construit avec la réactivité du site et la fin de l’esprit du Maitron, la fin de sa dynamique », confie Claude Pennetier. Le terme de « gouvernance » peut également faire tiquer. De quoi s’agit-il ? Pour le philosophe Alain Deneault (1), la gouvernance est à l’opposé de la démocratie (2). Ce concept a semble-t-il été élaboré par des néolibéraux au cours des années 1980, niant la chose commune et publique, et tendant à substituer le management à la politique. Plus de débat et de décision élaborés en commun mais une « bonne gestion ». Un dictionnaire des anarchistes, par exemple, sera-t-il compatible avec le mode de gouvernance en cours d’élaboration ?

  • Pour « sauver le climat », préparons un holocauste nucléaire Chez Renart - Tomjo - vendredi 23 septembre 2022
    https://chez.renart.info/?Pour-sauver-le-climat-preparons-un-holocauste-nucleaire

    Ne soyez plus « écologiste », encore moins anti-nucléaire : c’est ringard. Soyez pour la science, les industriels et le progrès ; soyez « pour le climat ».
Ce vendredi, à Lille et partout en France, les jeunes de Fridays for future associés aux Jeunes écologistes d’EELV appellent à la grève, « pour le climat ». Nul doute que leur couverture médiatique dépassera leur mobilisation véritable, et que les organisations politiques ne se ruent pour les récupérer. Que « nos dirigeant.es successifs n’aient pas été à la hauteur de la crise à surmonter », comme dit leur tract, c’est indiscutable. Que « les leaders économiques et politiques [...] investissent massivement pour la transition écologique », c’est malheureusement ce qu’ils font déjà. Non seulement ils ne régleront pas le « problème du climat », mais ils vont y ajouter d’autres calamités, notamment la dictature de la technocratie nucléaire sur notre survie. Voyez donc ci-dessous cette liste de dirigeants « engagés pour le climat », et plus que jamais anti-écologistes.


    Dans les manifestations en marge des COP auxquelles nous avons assisté, à Copenhague en 2009 et Paris en 2015, nous relevions toujours un malentendu derrière le slogan commun « Changeons le système, pas le climat ». Il y avait celles et ceux réclamant de nos dirigeants un « accord ambitieux » ; et ceux, dont nous faisions partie, manifestant pour bloquer sinon annuler ces rendez-vous de pollueurs.
    
Nous n’avons pas besoin d’eux pour inventer une vie désirable. Comme ils n’ont pas plus besoin de nos manifestations pour poursuivre la destruction industrielle du monde. Être « pour le climat » signifie combattre les diktats des scientifiques et les plans gouvernementaux de la prétendue « décarbonation », de la nucléarisation de l’industrie et de la numérisation de tout. Le « système », ce n’est pas eux qui le changeront, mais nous – sans eux et contre eux.

    Les scientifiques et leur monde
    D’abord, il y a les méga-simulateurs informatiques du #GIEC. Ce dernier propose dans son dernier rapport une alliance de sobriété individuelle, d’énergies renouvelables, de « mobilités électriques », de technologies de captage et stockage du CO2, de nucléaire, et de solutions de type « écologie industrielle » (efficacité énergétique des bâtiments, économie circulaire, etc). Rien de particulièrement audacieux, comme nous le verrons.

    Le climatologue #jean_jouzel, prix Nobel, vice-président du GIEC, chercheur au Commissariat à l’énergie atomique (CEA), spécialiste du tritium, et coordinateur de la Conférence citoyenne pour le climat, considère que « très peu de scénarios atteignent l’objectif des 2°C sans nucléaire ». Alors va pour l’atome, comme ta collègue du CEA-GIEC.

    La twittosse #valérie_masson-delmotte, paléo-climatologue et égérie française du GIEC, chercheuse elle aussi au CEA, considère que « Le nucléaire est une technologie mature qui peut fournir de l’électricité bas carbone à grande échelle », que les « technologies numériques », les « véhicules électriques », les navires à « hydrogène » mais encore les « formes urbaines compactes » peuvent « soutenir la décarbonation ». Comme n’importe quel Conseil régional, n’importe quelle agence d’urbanisme de province.

    Le youtubeur #jancovici, polytechnicien, ancien membre de la Fondation Nicolas Hulot et co-auteur en 2007 du « Pacte écologique » pour les candidats à la présidentielle, dirige le lobby nucléariste Shift Project, grâce aux financements de Bouygues, Vinci, Veolia, SNCF, Alstom, SPIE, BNP, et bien sûr EDF, l’exploitant des 58 réacteurs français. Niant les effets des radiations de #Tchernobyl sur les 800 000 liquidateurs et les millions d’habitants des zones contaminées, il répète depuis l’accident de #Fukushima : « Même si tous les 20 ans se produit un accident similaire, le nucléaire évitera toujours plus de risques qu’il n’en crée. » Calculette en main et le regard sur sa calculette.

    Les ordures nucléaristes au garde-à-vous
    #emmanuel_macron, mobilisé « pour le climat » après un été de sécheresses et avoir jeté les recommandations pourtant fort peu ambitieuses du « Conseil citoyen pour le climat », vient d’annoncer l’accélération des implantations d’usines solaires et éoliennes et 16 milliards d’euros pour des usines de microprocesseurs, après avoir subventionné trois usines de batteries pour voitures électriques, et proposé un plan de construction de quatorze usines atomiques. Sobriété, informatique et nucléaire, ses ambitions supposément avant-gardistes ne vont guère plus loin que celles de Giscard d’Estaing à l’époque des chocs pétroliers.

    Ailleurs aux U.S.A., #joe_biden, militant « pour le climat », vient de signer en août 2022 un plan de 369 milliards de dollars pour la fabrication d’usines nucléaires, éoliennes, solaires, mais aussi de voitures électriques et de batteries. Diriez-vous de la première puissance industrielle mondiale qu’elle est écologiste ?

    Son concurrent #xi_jinping promettait quant à lui, en 2020, que la Chine atteindrait la « neutralité carbone » en 2060 en multipliant la production nucléaire par quatre, éolienne par 3,4, et solaire par 6. Coût annoncé : 15 000 milliards de dollars en trente ans. Le chef du Parti communiste chinois nous avait déjà ébahi par un plan d’ingénierie du climat. Rien n’est impossible pour qui applique le socialisme scientifique.

    Le prince saoudien #mohammed_ben_salmane, égorgeur de journalistes et d’opposants, a débloqué en 2021, dix milliards de dollars pour contrôler les nuages par « ensemencement » chimique, et développer les technologies de stockage du carbone. Riche en uranium autant qu’en pétrole, son royaume s’est également lancé dans la production nucléaire (avec EDF notamment), et la construction d’une #smart_city d’un million d’habitants entièrement connectée et électrique : The Line  [1]. Bienvenue chez vous.

    Les Shadoks du CO2
    #Arcelor-Mittal #Dunkerque, le plus gros pollueur français, s’engage lui aussi « pour le climat » en investissant dans l’« acier vert ». Les hauts fourneaux seront en partie électrifiés à l’uranium, et une partie des fumées sera captée à la gueule des cheminées. Un procédé chimique qui, en plus des rejets d’oxydes d’azote et d’ammoniac, consomme beaucoup d’énergie, sépare le CO2 des autres polluants, puis le liquéfie. Le CO2 liquide est ensuite transporté par bateaux propulsés au fuel, ou dans des milliers de kilomètres de gazoducs, pour être enfin stocké sous le sol de la Mer du nord, avec risques d’écocide insoupçonnés en cas de fuite.

    Le Plan France Relance de Macron soutient le Plan « Acier vert » d’Arcelor-Mittal à hauteur de 1,7 milliard d’euros. Quant à la technocratie française, l’#ADEME, le #CNRS et le #BRGM (Bureau de recherche géologique et minière) soutiennent les industriels (Arcelor-Mittal, Eiffage, EDF, TOTAL, Saint-Gobain, etc) au sein du « CLUB CO2 », le lobby du captage-stockage.

    Les défenseurs de la « planification écologique » (EELV et la France insoumise) contre les irresponsables du secteur privé doivent se résoudre au fait que l’État est malheureusement déjà au chevet des pollueurs, et des nucléaristes, mobilisés comme eux « pour le climat ».

    Les techies « pour le climat »
    #elon_musk, première fortune mondiale et militant lui aussi « pour le climat », a reçu depuis 2010 plus de 5 milliards de dollars de subventions d’État pour ses voitures électriques Tesla, ses usines éoliennes Solar City, et ses voyages vers mars. Il remettra aussi 100 millions de dollars, et le prix « #Xprize », à des « solutions » préservant le climat. Écoutez Elon Musk, il voit loin, dans le temps, et dans l’espace.

    #jeff_bezos, patron d’Amazon, engage sa fortune « pour le climat », via notamment sa fondation Bezos Earth Fund , pour inventer des navires, des autobus et des camions de livraison électriques. Il finance aussi depuis 2017 des start-up de l’agriculture verticale, connectée et décarbonnée, pour produire au plus près des consommateurs une alimentation fraîche et bas carbone.

    #bill_gates s’est engagé à alimenter ses usines Microsoft en énergies renouvelables d’ici 2030. Il est aussi un « philanthrope » généreux qui abonde le Breakthrough Energy Venture (avec Bezos et Zuckerberg, le patron de Facebook) en faveur de l’hydrogène, de l’éolien, et des « électrocarburants ».

    Quant aux patrons de Google, #larry_page et #sergeï_brin, ils investissent, « pour le climat », dans la viande synthétique, la recherche de minerais dans l’espace, les voitures volantes, et les dirigeables à l’hélium.

    Les industriels et les dirigeants ne sont pas sourds aux revendications des jeunes pour le climat. Ils les devancent, et parfois les financent, quand elles appuient leur politique industrielle.

    Le climat contre l’écologie ?
    Inutile d’en rajouter des volumes. Même la reine d’Angleterre , pendant la COP26 à Glasgow, fustigeait les inactions gouvernementales, cependant que le roi #charles_III soutient Greta Thunberg et les militants d’Extinction-Rebellion [2]. Lesquels militants d’X-R doivent leur efficacité médiatique aux subsides du Climate Emergency fund, abondé par des industriels du renouvelable et du « biométhanol » à destination des navires de fret. Leurs intérêts mutuels sont bien compris.

    Quand l’écologie politique s’est constituée de manière autonome contre les vieilles boutiques de la gauche, progressistes et étatistes, il ne s’agissait pas seulement de défendre « l’ #environnement » ou la « qualité de la vie », mais de la « réinventer ». L’opposition au nucléaire, que l’ #union_européenne inclut désormais dans les « énergies propres » [3], marque l’origine du seul mouvement réellement révolutionnaire issu de mai 68. Non pas contre les « pollutions », mais contre la société industrielle. Ce mouvement ne combattait pas seulement l’atome par crainte de la radioactivité ou de l’explosion, mais parce qu’une société nucléaire ne peut être que techno-totalitaire. Issue du règne des polytechniciens des Mines, l’industrie nucléaire soumet la survie de millions de personnes, et pour des milliers d’années, à l’expertise des spécialistes et des forces armées.

    Faites un geste pour le climat, balancez vos smartphones et déconnectez #greta_thunberg.

    Tomjo

    Lire aussi :
    Le sens du vent, Arnaud Michon, L’Encyclopédie des nuisances, 2010.

    Le soleil en face,
    Frédéric Gaillard, L’échappée, 2012.

    L’enfer vert,
    Tomjo,
    L’échappée, 2013.
 Notre bibliothèque verte, Renaud Garcia, Service compris, 2022.

    Notes *
    [1] The Good life, 15 janvier 2021.
    [2] Infodurable.fr, 9 septembre 2022.
    [3] Le Monde, 6 juillet 2022.

    • Machiavélons, polpotons : Les vieux votent quand même massivement à droite et extrême-droite. Donc politiquement, il est intéressant d’avoir une mort massive des plus vieux, en moyenne (peu importe que quelques vieux soient gentils), tout en ayant une forte natalité. Ou plus doucement faut interdire le vote après la retraite pour les votes nationaux (présidentielle, législatives). Non pas parce qu’on ne vivrait plus longtemps, mais juste parce qu’un vote national, c’est pas juste pour 5 ans du tout, ça engage des choix d’avenir sur 50 ans ou plus (lancement de projets nucléaires, destruction de droits sociaux, ou inversement 35h, congés payés, etc), donc c’est clairement pas ces gens là qui en auront les conséquences (néfastes ou bonnes).

    • Le pays a voté massivement facho, que ce soit facho à costard ou facho à Rangers.

      Je ne vois vraiment pas quoi ajouter à ça.

      Et ne pas croire que c’est juste un vote de protestation. J’ai fui le bled, parce que c’était de l’adhésion en mode décomplexé, voire revenchard.

      Les gauchos des cambrousses feraient bien de revoir leur projet de vie rapido.

    • La focalisation sur les vieux, c’est fastoche. Bien sur qu’ils sont plus de droite (mais c’est pas nouveau).

      Par contre, idéaliser le vote des jeunes, alors que dans la tranche 18-24, Le Pen arrive deuxième, pas si loin du vote Mélenchon, que dans la tranche 25-34, le Pen arrive encore deuxième, un peu plus loin de Mélenchon (en fait, les 25-34 c’est la seule tranche d’âge où Mélenchon se détache réellement). Clairement la jeunesse n’emmerde pas trop le Front National. Et dans les deux tranches Macron plus Le Pen ça fait déjà 50% des votants. La seule différence c’est que l’absension est énorme (mais j’irais pas mettre ma main à couper sur le vote des clients de Hanouna s’ils se mettaient à voter).

      Et chez les 35-49 ans (généralement considérée comme encore jeunes), et chez les 50-59 ans (pas très vieux) c’est carrément Le Pen nettement devant.

      Sinon, sociologie de l’électorat selon l’âge je veux bien, mais comment ça se corrèle avec le patrimoine et le revenu ? (Puisqu’habituellement, le patrimoine et les revenus augmentent avec l’âge.)

      Sinon, l’idée de pondérer ou limiter le droit de vote parce qu’une partie de la population voterait mal, ah ben pour le coup je suis choqué (alors même que pour ma part je ne suis pas inscrit et je ne vote pas, et surtout pas à la présidentielle). On est à deux doigts de recommander une technocratie, dans laquelle un gouvernement d’experts ne prendrait que de bonnes décisions (puisqu’expert).

    • Bah non ya strictement aucune expertise, les plus jeunes sont pas plus experts que les plus vieux (et même parfois moins si on considère l’expérience). Et peu importe s’ils votent Le Pen a un moment aussi ya aucune idéalisation : c’est juste une histoire de mesures sur le long terme. Tous les votes nationaux engagent des mesures qui durent des décennies, bonnes ou mauvaises (je le remets : nucléaire ou pas, réduction du temps de travail, etc). Donc ceux qui vont en avoir les conséquences le plus longtemps, pourraient possiblement avoir plus de poids que ceux qui ne seront plus là dans quelques années. Si un jeune vote pour le nucléaire, il sait qu’il aura ça sur les bras dans 50 ans encore, alors qu’un retraité de 69 ans non.

    • Ce que je veux dire, c’est qu’à ce train, plutôt que de pondérer un système dont tu expliques qu’il ne fonctionne pas, il vaut mieux militer pour se débarrasser complètement d’un truc qui dans tous les cas ne peut pas être satisfaisant. Notamment l’élection d’un monarque républicain.

      Limiter les pouvoirs de la représentation, limiter l’imposition majoritaire et privilégier la recherche de consensus, légiférer par conseils citoyens formés, etc.

      Outre le fait que ça me semble aussi réaliste (ou irréaliste vue l’ambiance autoritaire du monde), ça me semble nettement plus logique et légitime. (Rester dans un système de représentation majoritaire à la légitimité problématique, mais en sélectionnant qui vote, je trouve pas ça défendable. Genre on aggrave l’illégitimité sans améliorer ce qui justifie un tel système.)

      D’ailleurs Macron a joué au con avec ça : on prétend multiplier les conseils citoyens travaillant sur un temps relativement long (climat, vaccination), pour ensuite tout foutre à la poubelle, mais du coup en ayant initialement légitimé ce mode de fonctionnement. Et en même temps imposer ses décisions jupitériennes à grands coups d’ordonnances. Donc cette question du fonctionnement législatif est déjà connue (évidemment en retenant le pire), et ça me semble plus intéressant que chercher à pondérer un truc qui de toute façon est totalement foireux à la base.

      –----

      Je note d’ailleurs que FI a tout un attirail militant autour du consensus, de la sixième république, de plein d’excellentes idées pour aller vers une démocratie plus réelle, et dans le même temps Méluche en campagne multipliait les coups de menton sur le thème « avec moi ça se passera pas comme ça, moi j’imposerai ceci, moi cela… ».

    • Bah évidemment, si on va par là, on préférerait de encore plus gros changements, genre le système de mandat impératif zapatiste (par le bas, puis ça remonte, et si pas de consensus ça redescend, et ça remonte, jusqu’à trouver la bonne formule, ce qui peut mettre longtemps mais c’est ça la démocratie). Et quand ya besoin de voter, le jugement majoritaire (évoqué plusieurs fois ici notamment pour 2017) :
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Jugement_majoritaire

    • Le #CNRS a lancé une expérimentation sur le #Jugement_majoritaire

      Votez utile, pour la dernière fois !

      Notre #démocratie est malade de son #mode_de_scrutin. Vote utile, vote contre, vote barrage, vote blanc : autant de symptômes d’un système qui dysfonctionne. La recherche Française a conçu un nouveau mode de scrutin, le jugement majoritaire, qui ouvre la voie vers une vie démocratique plus saine.
      Notre but : expérimenter massivement ce nouveau système de vote et ouvrir un débat sur une réforme électorale et les nouveaux modes de scrutins.

      https://mieuxvoter2022.fr

    • j’avais publié ça pour insister sur l’abstention. on en parle souvent comme un vote non réalisé qui ne changerait pas les proportions (si vote obligatoire par exemple). c’est une idée absurde puisqu’elle occulte totalement la manière dont l’abstentionniste se politise, en groupe, dans son coin, en situation (cf les dires relevés par Le Monde à Marseille, par exemple). c’est ignorer l’activité politique (dont le vote est une expression faible).

      je me souviens qu’en 1981, le 10 mai, des foules de réseaux et groupes pas mitterrandistes ou ps, non votants d’habitude, ou votant ailleurs, souvent très hostiles (je cause pas des votes de droite) ont voté pour le gagnant.

      l’échec de LFI, c’est de gagner 500 000 voix en 5 ans là où il en fallait un million, au bas mot (pour le second tour, sortir du monde de la jachère électorale c’était encore une autre paire de manches).
      sauf en terme de style (subvertir la figure du grand homme d’une manière ou d’une autre sous peine d’injurier l’avenir)et de perspective (mettons a minima parmi divers points d’ouverture à une autre réalité : refuser la production pour la production, l’emploi pour l’emploi) , il faut bien prendre le monde de la politique représentative tel qu’on le trouve.
      l’incarnation d’une défense du pauvre a bien marché, c’est donc qu’elle pouvait fonctionner mieux ; coller aux jeunes (précarisés) qui se refusent à être soumis aux conservatismes des boomers a elle aussi fonctionné, plus partiellement.
      le coup du travailleur frontalier ou de la défense de l’emploi, ça suffit pas pour toucher les plus de 35 ans de façon conséquente (ils en ont vu d’autres).
      insister sur la perspective écolo a bien fonctionné dans les grandes villes
      qu’a-t-il manqué ? ou plus fondamentalement qu’est-ce qui pêche ? (et parfois en eux troubles)

      ces graphiques, qui n’occultent ni l’abstention ni les partis non présidentiables en 2022, montrent que les primo-votants (18-24) s’abstiennent moins que ceux qui ont souvent déjà utilisé ce droit (24-35 : ce serait intéressant de voir lesquels ont voté LFI par le passé et pas cette fois), puis les taux d’abstention baissent, avant de remonter après 70 ans. alors sc’usez mais déjà ça rend louche le discours anti vieux, et donc riches, l’abstention est un truc de pauvre, pas seulement de déçus ou de critiques, ou de conviction. tous les vieux ne tournent pas réacs (quoi que, et ça ça demande du travail politique ! tous les vieux ne sont pas riches, et dans les années qui viennent il y aura de plus en plus de pauvres vieux, on verra si ils veulent être défendus « en tant que français » ou si une autre perpective les agrée, au cas où elle se manifeste).

    • une des raisons de l’abstention serait la crainte de se retrouver covidé (900 000 à 1,9 millions de personnes)
      Maître Pandaï

      https://twitter.com/Panda31808732/status/1514350165087371265

      En 2022, il y a eu 2,2 millions d’abstentionnistes en plus par rapport à 2017.

      Dans l’étude de l’Ifop, 15% des abstentionnistes (= 1,9 million de personnes) déclarent que la peur d’être contaminé par le Covid en allant voter a été « déterminante » dans leur choix de ne pas voter (p. 12).
      https://ifop.com/wp-content/uploads/2022/04/118997-Rapport-JDV-PRE22-T1-DET-11.04-1.pdf

      5. Chez BVA, 7% des abstentionnistes (= 900 000 personnes) ont déclaré qu’ils n’étaient pas allés voter par peur d’être contaminés par le Covid.
      https://presidentielle2022.bva-group.com/wp-content/uploads/2022/04/Presidentielle-Sondage-jour-du-vote-BVA-Ouest-France-1

      6. Chez OpinionWay, 13% des abstentionnistes (= 1,7 million de personnes) ont indiqué « qu’il leur semblait risqué d’aller voter à cause du Covid ».
      https://opinion-way.com/fr/component/edocman/opinionway-pour-cnews-et-europe-1-sondage-jour-du-vote-premier-tour/viewdocument/2841.html

  • #Emmanuel_Macron, 13.01.2022

    « Au-delà des questions des moyens, nous avons une question structurelle et on ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. »

    https://twitter.com/caissesdegreve/status/1481963876451340290

    Quand est-ce qu’on l’arrête celui-là ?

    #macronisme #ESR #université #discours #facs #France #destruction #précarité_étudiante #financement #enseignement_supérieur #budget #compétition #compétition_internationale #néo-libéralisme #privatisation #Macron

    La casse de l’université continue...

    Voici ce que j’écrivais en 2020, lors des luttes contre la fameuse LPR :

    Si je lutte ici et maintenant c’est parce que je suis fermement convaincue que si on gagne en France la victoire contre une université néolibérale, on peut faire tache d’huile bien au-delà des frontières nationales. Et si, en France, on ne cède pas au chant des sirènes du néolibéralisme universitaire, je suis aussi fermement convaincue que le supposé « retard » décrié par certain·es aujourd’hui se transformera en avance. Car la grogne grandit aussi dans les autres pays européens, qui se battent pour ce qu’en France, nous sommes en train de perdre, mais nous n’avons heureusement pas encore complètement perdu

    http://www.riurba.review/2020/03/comprendre-le-neoliberalisme-universitaire-francais-a-partir-de-la-suisse

    • La privatisation de l’écoles et de l’université représente une montagne de fric, à côté de laquelle la privation de la Française Des Jeux et des autoroutes sont des cacahuètes apéritives.

      Restera la montagne d’or amassée par les caisses de retraite complémentaires, ce sera pour la quinquennat suivant.

    • Emmanuel Macron expose une #réforme « systémique » de l’université

      Le chef de l’État a estimé que le système actuel d’#études_supérieures était « révolu » et que les universités devaient s’ancrer dans une dimension plus « professionnalisante ».

      À trois mois de la présidentielle, Emmanuel Macron a souhaité jeudi 13 janvier une réforme « systémique » des universités, qu’il veut plus « professionnalisantes », tout en jugeant intenable un système d’études supérieures « sans aucun #prix » pour les étudiants mais avec un #taux_d'échec massif. « Je le reconnais sans ambages, nous avons commencé à colmater les brèches, mais nous devons redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte », a-t-il déclaré, en clôturant en visioconférence le Congrès de la Conférence des présidents d’universités.

      Le chef de l’État a d’abord remis en cause le double système #grandes_écoles - universités. « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de la formation des #élites et l’université de la #démocratisation de l’enseignement supérieur et la gestion des #masses. Ce système est révolu », a-t-il lancé. « Demain ce seront nos universités qui doivent être les piliers de l’#excellence ».

      « Garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi »

      Emmanuel Macron a aussi dénoncé l’« intolérable #gâchis » de l’#échec en première année, où « seuls 50% des étudiants se présentent aux examens », malgré l’injection de nouveaux moyens et la création de 84.000 places. Selon lui, il ne s’agit donc pas d’une question de #moyens. « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où pourtant nous avons tant de précarité étudiante, et une difficulté à financer un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde », a-t-il argué.

      « Je dis les choses avec la clarté et la franchise que vous me connaissez » car « si nous ne réglons pas ces problèmes structurels, nous nous mentirions à nous-mêmes », a-t-il poursuivi. Et d’enchaîner : « Nous avons besoin d’une #transformation_systémique de nos universités ». Celles-ci doivent, selon lui, avoir d’avantage d’#autonomie mais l’État devra passer avec elles « de véritables #contrats_d'objectifs_et_de_moyens ». Notamment « les universités ne doivent plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation mais garantir l’orientation des jeunes vers l’#emploi ».

      « L’université doit devenir plus efficacement professionnalisante », a encore souhaité le chef de l’État : « la logique de l’#offre doit prendre le pas sur la logique de la #demande », ou encore, « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la #nation ». « Quand on ouvre des filières sans #perspective derrière, nous conduisons un #investissement_à_perte », a-t-il dit, après avoir rappelé les nouveaux moyens - 25 milliards d’euros sur 5 ans - de la loi de programmation de la recherche, « un rattrapage » à ses yeux. Manuel Tunon de Lara, président de la Conférence des présidents d’universités, rebaptisée France Universités, a lui réclamé une plus grande autonomie des établissements mais aussi un financement de l’enseignement supérieur « à la hauteur de nos ambitions ».

      https://www.lefigaro.fr/demain/education/emmanuel-macron-expose-une-reforme-systemique-de-l-universite-20220113

      #professionnalisation

    • Le discours a été tenu devant le congrès de la CPU désormais appelée @FranceUniv

      qui représente « un nouvel élan, qui rappelle le rôle de partenaire essentiel des pouvoir publics / force de proposition et de transformation pour l’ESR » d’après M. Macron.

      https://www.youtube.com/watch?v=SwsAPNPyFU4&t=32750s

      –-

      Analyse de Julien Gossa sur twitter :

      Le discours commence par des banalités : « concurrence pour les talents », « décloisonner pour favoriser les synergies », « Shanghai / Saclay »...

      Mais surtout « conjurer notre histoire » avec « le vent de face en raison de la démographie ».
      C’est important pour la suite.

      Le discours se centre sur « repenser totalement le lien entre Lycée et Université » et « la séparation entre les études supérieures et le monde du travail ».
      Il fustige une « aristocratie égalitariste » avec la dichotomie Grandes Ecoles (« exellence ») et Université (« masse »).

      #debunk Il s’agit d’un classique diviser pour regner/l’herbe est plus verte ailleurs.
      Cette opposition (stérile ?) GE/Univ est systématiquement instrumentalisée pour réformer, mais seulement les universités.

      « ce n’est pas qu’une question de moyens » (?)

      D’après M. Macron « ce système est révolu » car « il ne correspond pas à la compétition internationale et crée des segmentations inefficaces ». C’est « le sens de l’Histoire ».

      Il faut donc « une nouvelle politique d’investissement ».

      #Point 1 : l’« intolérable gâchis » en Licence

      « Nous avons injecté 1 Md€ en plus dans le premier cycle / créé 84000 places / et 28000 oui-si... formidable ! et pourtant seulement 50% des étudiants se présentent aux examens de premières année »

      #debunk "Des efforts n’ont pas conduit à des résultats, donc il faut réformer plus en profondeur" est discutable.

      Par exemple, il y a en réalité une hausse des taux de réussite, que le discours doit ignorer volontairement pour atteindre son objectif.

      https://etudiant.lefigaro.fr/article/a-l-universite-un-taux-de-reussite-des-licences-en-pleine-croissan

      De plus, ces résultats ne sont pas évaluables en période de pandémie, parce que tout le système est perturbé, et que tirer des conclusions de mesures qui ont trois ans n’est pas intègre.
      https://www.franceculture.fr/societe/covid-19-la-detresse-croissante-des-etudiants

      Enfin, l’effort est en réalité factice, puisque la dépense par étudiant baisse, essentiellement à l’Université.

      Tout au contraire, si on en croit les indicateurs, l’Université a donc plutôt obtenu des résultats, sans moyen, et dans un contexte difficile.

      https://www.alternatives-economiques.fr/rentree-coutera-t-plus-cher-cette-annee/00100263

      #Discussion L’échec en Licence lui-même est peut-être un problème factice, instrumentalisé pour atteindre des objectifs pratiquement sans rapport, mais qui a le mérite de faire écho à un soucis très concret qu’on rencontre sur le terrain.

      #Point 2 : le financement public et la gratuité des études universitaires.

      Cela conduirait a un enseignement qui n’a « aucun prix » à cause d’« un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde »

      #Debunk Au delà du marqueur idéologique « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur », l’affirmation sur le financement public de l’ESR en France est tout simplement fausse : nous sommes dans la moyenne, et en dessous des pays que nous admirons.

      https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/FR/T165/la_depense_pour_l_enseignement_superieur_dans_les_pays_de_l_ocde

      Plus intéressant encore, si on prend le cas extrême de la Grande Bretagne (GB).

      D’abord l’évidence : moins de financement public, c’est plus de financement privé, donc plus d’endettement des familles.

      E. Macron propose donc de vous endetter plus.

      https://commonslibrary.parliament.uk/research-briefings/sn01079

      Ensuite, le financement "privé" est en réalité sur des prêts garantis par l’État, et qui sont en grande partie (52%) non remboursé, donc payés par le public.

      Ça a couté 12Md€ d’argent public l’an dernier (~50% du budget du MESRI).

      https://www.dailymail.co.uk/news/article-9753557/Almost-10-billion-paid-student-loans-2020-written-off.html

      Et enfin, ça n’a apporté aucun financement supplémentaire aux universités.

      La proposition est donc d’endetter les ménages, même si ça coute encore plus au contribuable, sans rien rapporter aux universités.

      Seuls gagnants : les usuriers.

      #Point 3 : la formation réduite à une forme d’insertion professionnelle

      « les universités [doivent] garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi » avec « de véritables contrats d’objectifs et de moyens ».

      En clair : l’emploi conditionne le financement des formations.

      « la logique de l’offre doit prendre le pas sur la logique de la demande » « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la nation »

      En clair : ce n’est plus ni aux familles ni aux universitaires de décider de l’orientation et des formations, mais à l’Etat.

      D’après E. Macron,ces « besoins de la nation » sont seulement économiques, et tout le reste est un « investissement à perte ».

      C’est du bon sens, mais seulement avec une conception de la formation limitée à l’insertion professionnelle.

      #debunk Si on colle les trois points, on a une forme de logique :
      1. Les jeunes échouent en Licence
      2. Car ils se moquent d’études qui ne coutent rien
      3. Et qui de toutes façons ne mènent à aucun emploi.

      Faire payer les familles apparait alors comme une solution, non pas pour augmenter les financements (ils n’augmenteront pas, au contraire), mais seulement pour augmenter l’implication des familles, et restructurer « l’offre et la demande » de la formation.

      La réussite par l’augmentation de l’implication des familles repose sur la croyance « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur ».

      Quand on regarde les indicateurs, c’est plutôt une question de moyens.


      https://twitter.com/anouchka/status/1481928533308022785

      La restructuration de « l’offre et la demande » imagine une vertu : si les études impliquent un endettement personnel, alors le choix d’orientation sera vers les formations qui permettent de rembourser, donc là où il y a des emplois.
      Et sinon c’est à la charge des familles.

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      17h
      Les formations qui conduisent aux emplois bien payés peuvent augmenter leurs frais d’inscription, donc leur qualité. Les autres ferment ou de toutes façons ne coutent plus rien.

      Le marché comme solution à l’orientation et la formation, donc à la stratification sociale.

      C’est la vision qui a bien fonctionné au XXe siècle. Malheureusement, elle ne fonctionne plus. Tout simplement parce que « démographie » et « besoins [économiques] de la nation » sont désynchronisés.

      Il n’y a pas d’emplois non pourvus en France, il y a du chômage.

      Les emplois qui recrutent ne concernent pas les filières universitaires.

      Les formations universitaires montrent un léger chômage, qui indiquent qu’elles remplissent parfaitement leur rôle de fournisseur de main d’œuvre qualifiée.

      https://statistiques.pole-emploi.org/bmo/bmo?graph=1&in=1&le=0&tu=10&pp=2021&ss=1

      On revient à cette évidence, que le discours de M. Macron semble ignorer : diplômer quelqu’un ne crée pas un emploi.

      En terme d’emplois, la politique proposée est donc vouée à l’échec. Pire, elle enferme dans une sorte d’immobilisme économique.


      https://twitter.com/Taigasangare/status/1481897423437979649

      En toute logique, la politique proposée consiste donc non pas à augmenter le nombre de diplômés, puisque ça ne ferait que baisser le taux d’insertion professionnelle.

      Elle consiste forcément à baisser le nombre d’étudiants, seul moyen d’éviter un « investissement à perte ».

      Et ça nous mène à la question principale qui se pose pour l’avenir, même si on n’ose jamais l’affronter :

      Quel est le rôle des études supérieures ?

      Si c’est seulement économique, sans progrès futurs, alors Macron a raison : il faut endetter et réduire le nombre d’étudiants.

      Mais si c’est plus large que ça, que les études supérieures permettent de former des citoyens qui vont devoir gérer des crises graves... Alors il vaut mieux des chômeurs bien formés que des chômeurs mal formés.

      Et le projet proposé est très dangereux.

      Il est d’autant plus dangereux que la loi ORE a déjà posé des bases très solides pour sa réalisation :

      l’Etat contrôle désormais les places dans toutes les formations publiques. La réduction du nombre d’étudiants est donc techniquement possible.

      #Parcoursup est à la fois une sorte de concours national pour accéder aux places, et en plus une market-place pour les formations, incluant déjà des informations sur les "débouchés" et un module de paiement des frais.

      Toute la technique a été préparée pour ce projet politique.

      Reste que le projet politique de M. Macron, tout idéalisé et idéologisé qu’il soit, se confronte à une question toute simple : Que fait-on des jeunes surnuméraires par rapport aux besoin de l’emploi, si on ne les forme plus ?

      Ce fameux « vent de face de la démographie ».

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      16h
      Pour conclure, le discours de M. Macron est bien rodé, puisqu’il a plus de 50 ans... Mais il est objectivement anachronique.

      Il faudrait un peu de courage, et attaquer vraiment la seule vraie question : Quel est le rôle des études supérieures au XXIe siècle ?

      Rappel qu’il y a une cohérence entre baisser le nombre d’étudiants et réduire le nombre de lycéens qui font des mathématiques.

      Si on n’a pas le courage d’aller jusqu’au bout, on aura donc autant d’étudiants, juste moins bien préparés à nos études.


      https://twitter.com/OlivierMusy/status/1481960693784092673

      NB : Si M. Macron souhaitait vraiment mettre en œuvre ce programme, il lui suffirait de donner une autonomie réelle aux universités, dont l’intérêt est effectivement de réduire le nombre d’étudiants et de les faire payer.

      Sauf que c’est impossible :
      https://blog.educpros.fr/julien-gossa/2021/10/17/selection-impossible-autonomie-fantome

      Ici le verbatim, qui termine sur cette blague « Et que fait-on ce soir, Cortex ? »
      https://t.co/9HYisOq789

      Et bien sûr la plus pathétiques des hypothèses : tout ce projet n’a en réalité aucun sens, complètement dépourvu de vision et d’ambition autre que séduire les présidents d’université dans une perspective tristement électoraliste.

      https://twitter.com/JulienGossa/status/1481996134042193925

    • Présidentielle 2022 : le programme d’Emmanuel Macron devant la CPU “#France_Universités

      Emmanuel Macron a prononcé un discours pour la clôture du 50e anniversaire de la Conférence des présidents d’université1. La vidéo et le verbatim sont disponibles ici2. Ce discours dresse le bilan de la politique du quinquennat en matière d’enseignement supérieur et de recherche, mais trace aussi un cap pour une nouvelle réforme — peut-être pour un nouveau mandat ?

      Le candidat-président Macron fixe dans tous les cas un certain nombre d’objectifs et de lignes directrices qu’il n’est pas inintéressant d’analyser.

      Cet article est tiré d’un fil Twitter (https://twitter.com/CathKikuchi/status/1481942125147312138) écrit à chaud et doit être complété avec d’autres analyses qui ont émergé à la suite de ce discours3. On citera en particulier :
      - Ce fil extrêmement complet de Julien Gossa : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - Cette réflexion de Marianne Blanchard sur la volonté de plus « professionnaliser l’université » : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - En complément, la reprise d’une intervention de l’économiste Elise Huillery au colloque de la Conférence des présidents d’université sur les ressources allouées à l’université française, un fil d’Ana Lutzky : https://twitter.com/anouchka/status/1481924369597308930

      Il est globalement beaucoup question de la politique universitaire, mais un article entier pourrait également être consacré à ce qu’Emmanuel Macron dit de la vie étudiante. Nous laissons ce point à analyser à d’autres.
      « Éclairer le monde tel qu’il va » ou l’abrutir

      « Faire pleinement de la France une avant-garde de la recherche de l’excellence du savoir » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Le discours commence bien sûr par brosser les présidents d’université dans le sens du poil. Beaucoup ont commenté la petite phrase des universités qui doivent « éclairer le monde ». Ce passage s’inscrit dans tout un segment sur l’importance de l’autorité académique, de la reconnaissance des pairs et du cadre scientifique : « Ne laissons personne le remettre en question ». Evidemment, ce n’est pas nous que le contredirons. Mais cette déclaration prend une saveur particulière, alors que Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation, cherche au contraire à dire aux universitaires ce qu’ils doivent chercher et comment en faisant l’ouverture d’un pseudo-colloque ((NDLR : Le président-candidat Macron évoque également la commission Bronner qui vient de rendre son “rapport” Des Lumières à l’ère du numérique.Il en retient la “nécessité d’empêcher la mise en avant ou le financement d’acteurs qui nuisent à l’information, à la cohésion sociale et in fine à la démocratie” — qui résone avec sa menace envers les “universitaires qui cassent la République en deux“.)). ou encore lorsqu’il prétend pouvoir dire quels universitaires constituent un « virus » de la pensée et donc, en creux, ceux qui pourraient en être le « vaccin ».

      « Tous ensemble, nous avons réussi à faire de notre jeunesse une priorité claire avec ces premiers résultats et également à faire de notre jeunesse et de nos étudiants une priorité. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Mais bien sûr, il s’agit d’abord de défendre un bilan. Emmanuel Macron se gargarise de milliers de places nouvelles ouvertes dans diverses filières pour accommoder la vague démographique. C’est bien rapide : ouvrir des places sans construction de bâtiment, sans recrutement de personnel, ne revient-il pas à faire du surbooking ? Changer un chiffre sur un tableur Excel, ne permet pas dans les faits d’accueillir correctement des milliers d’étudiants et d’étudiantes supplémentaires.

      Mais rassurons-nous : la loi de programmation a représenté un engagement financier sans précédent. Sauf que non : l’augmentation du budget de l’ESR stagne et sa légère augmentation, plus faible que par le passé, correspond à l’inflation. Un tour de passe-passe dénoncé par les politiques notamment au Sénat. L’effort budgétaire est principalement reporté sur la prochaine mandature :bel effort personnel pour le président Macron.

      « Justes hiérarchies » ? Parcoursup, reproduction sociale et démocratie

      Parmi les bons points qu’Emmanuel Macron se donne, le satisfecit sur Parcoursup est aussi d’un ridicule achevé. « Un système d’orientation avec des taux de satisfaction et de réponse incomparables, plus lisibles », alors que tous les acteurs du système, des élèves aux enseignants du secondaire, en passant bien sûr par les enseignants du supérieur disent le contraire. Mais peu importe : il s’agit de l’un des grands chantiers du quinquennat, il doit être un succès.

      « Des sociétés démocratiques comme la nôtre qui ont la passion de l’égalité que nous partageons toutes et tous doivent néanmoins défendre à nouveau les justes hiérarchies qu’il doit y avoir dans nos sociétés sans lesquelles tout se dissout » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Macron se lance ensuite dans un grand discours visant à intégrer les universités à la formation de l’élite, dans une optique implicite de démocratisation. Il cite les Idex en exemple. Sauf qu’en termes de démocratisation, les Idex contribuent plutôt à une reproduction de l’élite plutôt qu’à son renouvellement, comme l’on montré les travaux d’Audrey Harroche et ceux de Hugo Harari-Kermadec.

      Cette volonté de s’inscrire dans le cadre de grands établissements va de pair avec une volonté de professionnalisation accrue.colloque

      L.’université « doit devenir plus efficacement professionnalisante car on ne peut pas se satisfaire de l’échec de nos étudiants dans les premiers cycles ni du taux de chômage trop élevé des jeunes qui sortent de certaines filières universitaires. Pour vous y aider, nous devons poursuivre le travail d’amélioration de l’orientation qu’a initié Parcoursup ». (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cet affichage ne peut être balayé d’un revers de main. Evidemment, aucun enseignant digne de ce nom ne peut vouloir que les universités forment des chômeurs. Mais cela passe sous silence que les universités sont déjà professionnalisantes : elles forment des professionnel·les de la recherche et de l’enseignement supérieur et des enseignant·es. Hors Master, , elles forment en licence en lien avec le monde du travail, y compris bien sûr celui hors de l’université et de l’enseignement : c’est vraiment n’avoir jamais regardé l’offre de formation universitaire ni les maquettes de premier cycle que de penser le contraire. S’il y a sûrement des améliorations à effectuer, il serait tout à fait faux de prétendre que les universitaires ne se préoccupent pas du devenir professionnel de leurs étudiant·es.

      « Les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. Il est révolu d’abord parce qu’il ne correspond pas à la compétition internationale, parce que sa forme-même crée des barrières, des segmentations qui sont inefficaces. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cependant, on peut être conscient des nécessités de professionnalisation à l’université tout en considérant que celle-ci a aussi un rôle intellectuel et émancipateur de transmission de savoir et de méthode scientifique. Mais cela, Macron n’en parle jamais pour l’enseignement. Enseigner à l’université est réduit à la formation en lien à des besoins identifiés de la nation. Et si les besoins de la nation, c’était aussi d’avoir des diplômés insérés dans le marché du travail ET capables de réfléchir par eux-mêmes ? Ce serait fou…

      De même la question de l’échec en première année de licence et de l’orientation est un vrai sujet. Mais ne serait-ce pas aussi parce que Parcoursup a accentué ce phénomène ? De nombreuses étudiantes et étudiants, à vue de nez encore plus nombreux qu’auparavant, s’inscrivent dans des formations sans réelle volonté de s’y investir. Alors quelle solution ? Emmanuel Macron évoque le développement de filières courtes et professionnalisantes, ce qui peut être une partie de la réponse. Mais est-ce que l’augmentation de leur capacité d’accueil va à nouveau se faire sans moyen supplémentaire ? Permettons-nous au moins de nous poser la question…

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Malgré tous ces points ambigus, voire volontairement mensongers, le plus inquiétant de ce discours réside dans l’une de ses dernières parties. Cela a été déjà relevé : Emmanuel Macron dénonce un système où l’université n’a « aucun prix pour la grande majorité des étudiants », où on a un tiers de boursiers et où on a « un modèle beaucoup plus financé par l’argent public qu’ailleurs dans le monde ». D’abord, ce dernier point est tout bonnement faux : la France n’investit proportionnellement pas plus d’argent public dans l’université que, par exemple, l’Allemagne, la Norvège, le Danemark ou la Belgique, même si elle en investit d’avantage que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. Elle se situe dans une moyenne légèrement supérieure à celle de l’OCDE.

      Ensuite, le changement systémique auquel il appelle revient bien à faire payer les étudiant·espour leur faire financer leurs propres études. Y compris via un endettement étudiant peut-être ? C’est en tout cas ce que de proches conseillers d’Emmanuel Macron suggéraient. Alors c’est une option bien sûr. Mais ça revient à poser franchement sur la table la nature du modèle universitaire que nous souhaitons et la manière dont l’université est encore un levier d’ascension sociale, ou a minima de formation de toutes les catégories économiques et sociales. Et ce débat-là, évidemment, Macron ne le pose pas clairement.

      Les systèmes de gouvernance [des universités], « il faut bien le dire par tradition, ont eu dans beaucoup de situations pour conséquence d’impuissanter trop souvent les équipes face aux défis qui leur étaient posés. Mais cette autonomie, soyons clairs et sincères entre nous doit aussi être synonyme d’une gouvernance renforcée de nos universités dans laquelle les équipes présidentielles pourront définir et incarner pleinement leur projet. (…) Notre système est très hypocrite – autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense. Et puis autonomie, mais au fond, même localement, on donne des responsabilités, mais on bloque ceux qui sont élus par nous-mêmes » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      De la même manière, on a un passage éminemment confus sur un contrat que les universités devront passer avec l’État, où il est question d’augmenter l’autonomie mais aussi la responsabilité. Selon quelles modalités ? Ce point n’est pas clair, mais il est un passage qui personnellement me fait froid dans le dos. Macron dénonce un système déresponsabilisant : « Notre système est très hypocrite — autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense ».

      Est-ce que cela signifie que l’État se désengagera des universités qui ne répondent pas aux critères d’excellence fixés par le gouvernement ? Que celles-ci ne feront plus partie du système de service public de l’enseignement supérieur ?

      On voit bien où cela peut mener : les grandes universités comme Saclay auront toujours plus, les petites universités au bassin de recrutement local toujours moins. Et si un tel système aide à la promotion de l’enseignement supérieur, à la formation des étudiant·es partout en France, je veux bien manger mon chapeau.

      « La France continuera de jouer son rôle de résistance en défense de l’esprit de connaissance, de recherche, d’un enseignement libre et d’une recherche libre. Parce que je crois que c’est la seule manière de continuer à véritablement conquérir le monde, c’est-à-dire à inventer des possibles nouveaux dans une humanité en paix. Les autres voies, nous les connaissons. Ce sont les obscurantismes, les totalitarismes, les nationalismes appuyés sur la discorde. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      https://academia.hypotheses.org/33766

    • Thread de Marianne Blanchard, 14.01.2022
      Pourquoi ça n’a pas de sens de vouloir plus « professionnaliser l’université » => un thread

      1/ pour Macron, "l’université doit devenir plus efficacement professionnalisante ". Derrière, deux présupposés : a) c’est nécessaire de professionnaliser b) l’université ne le fait pas

      2/voyons déjà le premier. Pour ça je m’appuie (notamment) sur ça : https://sms.hypotheses.org/24385
      On a interrogés des jeunes diplômés d’écoles (commerce/ingé) et d’université, en sciences et en gestion sur les "compétences" dont ils avaient besoin dans leur emploi actuel

      3/ on a distingué les "compétences spécifiques" (en gros tout ce qui est spécialisé, propre à un secteur d’emploi) et "transversales" (en gros, ce qui est général, et mobilisable dans plein de métiers).

      4/ résultat pour les 971 enquêtes : "Le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur emploi" => qu’ils viennent de l’université ou d’école, personne ne se trouve pas assez "professionnalisé"

      5/ les individus déclarent peu de lacunes en compétences spécifiques, car ils les mobilisent qd elles sont trop spécialisées. Qd des déficits sont mentionnés, ils concernent des compétences trop « pointues » ou dépendantes du contexte d’emploi pour être enseignées

      6/ Les jeunes interrogés insistent aussi sur le fait qu’il est possible de se former et se spécialiser en cours d’emploi. + les entretiens révèlent que les compétences spécifiques acquises en formation semblent surtout valorisées dans leur dimension transversale

      7/ ce ne serait pas tant leur caractère technique qui importerait, que les capacités à acquérir d’autres compétences qu’elles suscitent.
      En gros, en apprenant (des choses, plus ou moins "spécifiques"/professionnelles), on apprend aussi à apprendre, à se former.

      8/ il faut donc sortir de la vision « adéquationniste » à la française prônant une professionnalisation et une spécialisation sans cesse accrue des formations initiales. Bcp de diplômé·es n’exercent pas le métier correspondant à leur spécialité de formation,

      9/ C’est le sens de l’ "introuvable" relation formation-emploi dont parlait déjà L. Tanguy.
      Se former, c’est aussi acquérir une culture générale, apprendre à porter un regard critique sur les choses, comprendre le monde pour pouvoir y prendre part en tant que citoyen·ne

      https://twitter.com/MJ_Blanchard/status/1481971200100376577

    • Universités : le renforcement « systémique » promis par Macron cache mal un projet de privatisation

      Le quasi-candidat Macron a souhaité jeudi une réforme « systémique » des universités. Derrière la promesse de les rendre « plus fortes » et de casser la concurrence avec les « grandes écoles », il a posé, en creux, les jalons d’un projet de privatisation.

      Dans un discours de clôture du congrès de la Conférence des présidents d’université (rebaptisée à cette occasion « France Universités »), Emmanuel Macron a fait le bilan de son quinquennat pour l’université et dessiné l’avenir qu’il imagine pour l’enseignement supérieur : une orientation universitaire dont la seule boussole serait le marché du travail, et une formation qu’il veut encore « plus efficacement professionnalisante ». Surtout, il a évoqué, sans prononcer les mots, une augmentation substantielle des frais de scolarité étudiante.

      Fier de son quinquennat, dont il a vanté la loi d’orientation et de réussite des étudiant·es, la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), l’ouverture de places supplémentaires à l’université (sans plan d’ouvertures massives de postes d’enseignant·es-chercheurs et chercheuses ni réels moyens supplémentaires), les entrées et « bonds de géant » des universités françaises dans le classement de Shanghai (pourtant décrié), le président de la République a oublié de citer, par exemple, les déboires de Parcoursup depuis 2018, l’immolation d’un étudiant par le feu devant le Crous de La Madeleine à Lyon en 2019, l’apparition des étudiant·es en masse dans les files d’attente des distributions associatives d’aides alimentaires pendant la crise du Covid-19, et la baisse de la dépense publique par étudiant·e. Tout de même, Emmanuel Macron a reconnu qu’il faudrait « redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte ».

      Ainsi, ce discours face aux présidents d’université était plus celui d’un candidat que celui d’un président en exercice. Le projet dessiné ? Une augmentation des frais de scolarité, et un pas de plus vers la privatisation de l’université.
      Un raisonnement fondé sur des chiffres erronés

      Sans se prononcer explicitement pour une hausse des frais de scolarité, Emmanuel Macron l’a remise sur la table en prenant prétexte de la précarité étudiante et du pourcentage important d’étudiant·es qui abandonnent avant même les examens en première année de licence (50 % selon lui). « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale », a déclaré le chef de l’État.

      Si cette déclaration d’Emmanuel Macron n’est pas claire sur le prix que devront payer les étudiant·es pour accéder à l’université dans le système qu’il semble prôner, elle fait planer la possibilité de la création d’un accès réservé à celles et ceux qui en auront les moyens, ou qui auront accès à un prêt bancaire pour se le payer.

      Le quasi-candidat à la présidentielle semble vouloir calquer sa réforme « systémique » sur les systèmes anglo-saxons, où une bonne partie des étudiant·es s’endettent pour des années afin d’accéder aux études supérieures. Pourtant, aux États-Unis, la dette étudiante a atteint à la fin de l’année 2021 plus de 1 500 milliards de dollars, selon la FED, et représente désormais un véritable boulet pour l’économie.

      Mais cette déclaration présidentielle s’appuie sur des chiffres manifestement erronés. Il est d’abord mathématiquement impossible que « 50 % des étudiants seulement se présentent aux examens de première année », quand « le taux de passage en L2 des néo-bacheliers inscrits en L1 à la rentrée 2019 est de 53,5 % », d’après une note du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation publiée en novembre 2021 (https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/sites/default/files/2021-11/nf-sies-2021-24-15115.pdf).

      Ensuite, le financement du système de l’enseignement supérieur français n’est pas « beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde », puisque selon l’OCDE (tableau C2.2b : https://www.oecd-ilibrary.org/sites/455a2bcc-en/index.html?itemId=/content/component/455a2bcc-en), la France finançait en 2018 à 80 % son système par des fonds publics pendant que, par exemple, l’Allemagne affichait un taux de 84 %, la Suède de 87 % et la Norvège de 95 % ! La réforme « systémique » de l’université française voulue par Emmanuel Macron tient sur des raisonnements scientifiquement peu solides.
      Une orientation dirigée par le marché du travail

      Jeudi, il a également jugé indispensable de pousser les universités à proposer des formations en fonction du marché du travail : « [Elles] ne devront d’abord plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation, mais garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi. » Si cette position pouvait avoir un sens il y a plusieurs décennies, cela fait longtemps que les universités se préoccupent de l’entrée dans la vie active de leurs étudiant·es.

      Les chiffres du ministère de l’enseignement supérieur donnent un taux d’insertion à 18 mois de 89 % pour les masters et de 92 % pour les licences professionnelles. Surtout, la question de l’adéquation entre études et marché du travail est particulièrement délicate : il est impossible de connaître l’avenir de l’emploi plusieurs années après l’entrée dans les études, dans un monde en perturbations permanentes. À titre d’exemple, le sacrifice de la filière informatique à l’université (raconté ici par Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/france/140921/universite-la-start-nation-sacrifie-la-filiere-informatique?onglet=full), à cause d’un manque de moyens, alors même que la demande industrielle est énorme, montre combien la volonté des établissements n’est pas forcément le problème principal.

      À entendre Emmanuel Macron, en tout cas, l’université devrait « devenir plus efficacement professionnalisante ». Elle ne le serait donc pas assez. Mais la sociologue Marianne Blanchard et ses collègues montrent que, lorsqu’on interroge de jeunes titulaires d’un diplôme de niveau bac+5 de master ou d’école, ils et elles considèrent que « le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur(s) emploi(s) ». En clair, ils et elles ne se considèrent pas comme « non professionnalisé·es ». Ces chercheuses et chercheurs expliquent aussi que les jeunes diplômé·es pensent « que leur capacité à acquérir ces nouvelles compétences, et donc à s’adapter à de nouveaux environnements de travail, est une compétence en soi que leur formation a contribué à développer ».
      Une remise en cause superficielle des grandes écoles

      Enfin, dans son discours de jeudi, Emmanuel Macron a semblé vouloir remettre en cause le système « grandes écoles-universités », en lançant : « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, […] où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. [...] Demain, ce sont nos universités qui doivent être les piliers de l’excellence, le centre de gravité pour la recherche comme pour la formation. » Faut-il lire, en creux, une volonté de disparition pure et simple des grandes écoles ? Dès lors, l’ambition serait-elle de chasser des universités les pauvres dont les bourses « coûtent un pognon de dingue », pour y faire venir les étudiant·es plus fortuné·es des grandes écoles ?

      https://www.mediapart.fr/journal/france/150122/universites-le-renforcement-systemique-promis-par-macron-cache-mal-un-proj

      #bilan #frais_de_scolarité #LPPR #classement_de_Shanghai #parcoursup #chiffres #statistiques #financement #taux_d'insertion #moyens

    • Discours de Macron : une réforme « systémique » de l’université pas si nouvelle et fantasque que ça…

      Le congrès du 13 janvier 2022 célébrant les 50 ans de feu la Conférence des Présidents d’Université (CPU) — dorénavant #France_Universités (sic) — aura eu son petit effet médiatique. Cependant, ce n’est pas #FU qui est au centre de l’attention depuis près d’une semaine mais le président Emmanuel Macron, qui y est intervenu en visioconférence, dans un discours verbeux et ampoulé1.

      Une phrase du chef de l’État a en effet suscité des réactions nombreuses et indignées de la part des mondes universitaire [2], étudiant [3], médiatique [4] et politique [5] (dont on peut parfois douter de la sincérité… [6]) :

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. » (p. 6)

      Malgré un flou artistique sur ce que voulait vraiment dire le Président, un consensus s’est formé autour de son probable projet pour l’enseignement supérieur : l’augmentation des frais d’inscription à l’université. En séances parlementaires, la ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (#MESRI), Frédérique Vidal, a été interpelée à ce sujet. Celle-ci y a catégoriquement démenti une telle interprétation des paroles de Macron [7]. Des macronistes se sont ensuite joint·es à elle pour dénoncer cette prétendue intox sur Twitter [8]. Ce SAV du discours du Président par la ministre culmine finalement avec un entretien dans Libération absolument lunaire [9].

      Au-delà de l’interprétation du discours, et du fait que le terme « évoquer » utilisé par Vidal (plutôt que « parler explicitement », cf. tweet de LCP) ne permet en rien de lever nos suspicions, existe-t-il des indications nous permettant de penser que Macron souhaiterait effectivement augmenter les frais d’inscription, en continuité avec sa politique depuis 2017 ? N’y aurait-il pas des précédents pendant son mandat ?

      Spoiler alert : oui, et oui à nouveau.

      Un précédent ?

      Alors que les macronistes égrainent dans leurs tweets une série de mesures qui démontrerait que, sous Macron, jamais les étudiant·es n’ont été aussi protégé·es (ce qui est de toute évidence faux), iels oublient systématiquement une mesure absolument honteuse : la hausse des frais d’inscription à l’université pour les étudiant·es extra-communautaires, passant de 170 à 2 770 euros en licence et de 243 à 3 770 euros en Master. Ce précédent, auquel le Conseil d’État n’a rien trouvé à redire [10], laisse penser qu’une telle hausse pourrait en principe être généralisée à tou·tes [11]. Mais est-ce dans le projet néo-libéral macroniste ?

      Un projet Macron-compatible ?

      Faisons d’abord un détour par l’#Institut_Montaigne, un think-tank néo-libéral. Ce dernier est consulté par le MESRI pour définir sa stratégie et sa politique ESR [12]. La collaboratrice de Vidal recrutée en juillet 2020, #Blanche_Leridon, est même passée par le think-tank de 2015 à 2018 [13]. Ce qui devient intéressant, c’est qu’en avril 2021, l’Institut faisait (à nouveau) des propositions sur une réforme de l’Université impliquant… une hausse des frais d’inscription, sans aucune ambiguïté ici ! [14]

      « [une] augmentation des droits de scolarité en licence à 900 € par an et à 1 200 € en master [qui] concernerait l’ensemble des universités, de manière uniforme » (p. 98–99)

      L’analogie ne s’arrête pas là puisque le think-tank propose, comme Macron (voir tableau en annexe) :

      – d’augmenter la part des #financements_privés dans les #fonds_universitaires ;
      - de résoudre la précarité étudiante par l’augmentation des frais d’inscription (ce que l’Institut Montaigne propose de faire en créant notamment des #prêts étudiants…) ;
      – de « remettre » la recherche au cœur des missions des universités au détriment des établissements de recherche, tels que le #CNRS, qui feraient office d’agences de moyens ;
      – de s’affranchir du « coût » que représente le tiers d’étudiant·es boursier·ères ;
      – la remise en cause du système historique Université–Grande école–EPST ;
      – le renforcement de la professionnalisation des formations universitaires ;
      – le renforcement de la #gouvernance des universités par leur #autonomisation.

      On remarquera tout de même quelques différences, notamment sur la précision de certains calculs puisqu’à l’inverse de Macron, l’Institut Montaigne montre que la France n’est pas la championne mondiale du financement public de ses universités ; le Président n’en étant pas à son premier raccourci grossier dans son discours [15]. Autre divergence notable, la transformation complète des EPST en agences de moyens n’est pas le scénario privilégié par le think-tank.

      Notons enfin que certain·es ont proposé à la suite du discours de Macron que l’augmentation des frais d’inscription serait inconstitutionnelle, sur la base d’une décision du Conseil constitutionnel en 2019 [16]. Cependant, ce dernier n’entérine pas la #gratuité de l’université mais sa « #modicité » ou #gratuité_payante. Un point que l’Institut Montaigne avait déjà bien pris soin de vérifier et qui serait selon lui compatible avec son projet de réforme, donc avec celui de Macron.

      « La question de la constitutionnalité d’une augmentation des droits de scolarité […] Il est donc possible de considérer que la proposition formulée [dans le rapport de l’Institut Montaigne] répond aux préoccupations du Conseil constitutionnel telles que précisées par le Conseil d’État. Des droits de scolarité annuels autour de 1 000 € apparaissent en effet modiques au regard du coût annuel moyen des formations dans l’enseignement supérieur (représentant autour de 10%).

      Ensuite, dans le cadre d’un prêt à remboursement contingent décrit ci-après, l’étudiant n’a à s’acquitter directement d’aucun droit sur la période de sa scolarité et le remboursement ultérieur de son emprunt sera fondé sur ses capacités financières. Un tel système, innovant et équitable, apparaît donc particulièrement adapté pour satisfaire aux obligations constitutionnelles pesant sur les droits de scolarité. » (p. 114–115)

      La comparaison entre le discours de Macron et celui du think tank est bluffante : il semblerait que l’un ait écrit l’autre, sans qu’on puisse savoir qui de la poule et l’œuf2 . L’ensemble des similarités entre le discours de Macron — et la politique ESR de son mandat — avec le rapport de l’Institut Montaigne montre le consensus libéral qui les unit sur la question de l’université. Une idéologie que l’un — l’Institut Montaigne — assume vis-à-vis de la question de l’augmentation des frais d’inscription, alors que l’autre — Macron et son gouvernement — la nie publiquement aussitôt l’avoir « évoquée ».

      Une difficulté à assumer qui en dit long sur l’absence de consensus dans la communauté académique et la société civile autour de ce projet de transformation de l’université.

      NB : au moment de l’écriture de ce billet, d’autres (ici le compte Twitter parodique @realUNIVFrance) ont aussi perçu le lien pour le moins troublant que nous décrivons. Le rapport de l’Institut Montaigne semble donc être une bonne grille de lecture pour comprendre le discours de Macron.

      Tableau annexe





      https://academia.hypotheses.org/33874

  • And the #award goes to… #Frédérique_Vidal !

    L’équipe d’Académia a le plaisir de vous partager une heureuse nouvelle en cette fin d’année 2021.

    En effet, notre ministre de tutelle, Madame Frédérique Vidal, vient d’être nominée à trois reprises pour les #MédiapartAwards, ce « #concours_Lépine du politicien qui a sorti la plus énorme des #fakenews en 2021 ».

    Il s’agit certes d’un #concours qui ne fait que commencer, mais nous tenions à féliciter chaleureusement notre ministre avant même la proclamation des résultats : Madame Vidal ayant été nominée dans une catégorie qui porte son nom.

    Elle est sûre de gagner !

    Voici les fakenews retenues par les instances de Médiapart :

    1. “L’#islamogauchisme gangrène la société dans son ensemble et l’#université n’est pas imperméable”

    2. Sollicite le #CNRS pour une #enquête sur l’islamogauchisme. Le CNRS dénonce en retour un “slogan politique qui ne correspond à aucune réalité”.

    3. Se dit “ravie car ce débat a été salutaire, ses propos ont “levé le tabou”, “les choses se sont nettement améliorées.

    Force est de constater qu’il y en aurait bien d’autres, concernant LPR, Parcoursup, ou bien encore Bienvenue en France, sans oublier l’intégrité scientifique, pour ne citer que quelques exemples. Notons qu’elle vient de réitérer avec le fameux #wokisme, en menaçant ni plus ni moins les universitaires lors de la dernière séance de question au gouvernement.

    Quelle vigoureuse persévérance ! Son prix Mediapart Awards pour la catégorie “Frédérique Vidal” est donc largement mérité. Bravo, Madame la Ministre.

    Pour découvrir l’ensemble des catégories et des nominés, rendez-vous ici : https://twitter.com/Mediapart/status/1471806958017646608

    https://academia.hypotheses.org/33281

    –—

    Longue archive des faits qui ont amené Mediapart à nommer #Vidal pour le prix :
    https://seenthis.net/messages/902062

    #fake_news #prix #récompense

  • Avis du COMETS « Communication scientifique en situation de crise sanitaire : profusion, richesse et dérives » | COMETS
    https://comite-ethique.cnrs.fr/avis-du-comets-communication-scientifique-en-situation-de-crise-

    Le COMETS publie un nouvel Avis « Communication scientifique en situation de crise sanitaire : profusion, richesse et dérives » (n°2021-42), approuvé le 25 juin 2021.

    Accéder à l’avis : https://comite-ethique.cnrs.fr/wp-content/uploads/2021/09/AVIS-2021-42.pdf

    RÉSUMÉ – Le COMETS traite, dans cet avis, des multiples formes prises par la communication scientifique dans le contexte de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de COVID-19, due au SARS-CoV-2. Le recul de près de deux ans de crise permet de dresser un premier bilan des forces et faiblesses de cette communication. Nous examinons tout d’abord de quelle manière la crise a impacté la communication au sein de la communauté scientifique. Puis nous montrons combien la pertinence de la communication offerte au public par l’entremise de diverses sources d’informations a été déterminante dans la perception que les citoyens ont eu de la crise et dans leur adhésion au discours scientifique. Nous abordons la question de l’articulation entre la mission des experts scientifiques et les impératifs des décideurs. Enfin, nous évoquons les difficultés rencontrées par les scientifiques lorsqu’ils sont confrontés à la défiance des citoyens envers la science et à l’émergence d’un « populisme scientifique ». 
    L’avis débute par un constat optimiste : les connaissances sur le SARS-CoV-2 et la COVID-19 ont très rapidement évolué grâce à une mobilisation inédite de la communauté scientifique internationale, au partage des données et à une politique éditoriale d’ouverture des publications, toutes initiatives qui sont les conséquences des récentes avancées permises par la Science Ouverte. Mais, le COMETS porte aussi un regard critique sur certaines dérives éditoriales et notamment sur les écarts à l‘intégrité scientifique, à la déontologie et à l’éthique qui ont accompagné la publication de travaux contestables portant sur des traitements de la COVID-19 par l’hydroxychloroquine. D’une manière plus générale, le COMETS déplore le comportement irresponsable de certains chercheurs qui ignorent, ou veulent ignorer, les fondements de la démarche scientifique que sont la rigueur, l’honnêteté, la fiabilité et la transparence des méthodes utilisées et l’évaluation critique des publications par les pairs. Les dérives constatées sont lourdes de conséquences par leur impact sur la santé et parce qu’elles contribuent à la défiance des citoyens vis-à-vis de la science et des scientifiques. Cette défiance est d’autant plus difficile à lever que les connaissances sur le virus et la pandémie étant en constante évolution, toute information, considérée comme vérité un jour, peut se trouver démentie le lendemain. Les diverses sources d’informations — institutionnelles, presse, médias, mais aussi réseaux sociaux — ont été des vecteurs déterminants pour éclairer les citoyens. Le COMETS tient à souligner le souci de partage des connaissances avec le public de l’ensemble de la communauté scientifique et salue le difficile et indispensable travail des journalistes. Cependant, force est de constater que les dérives ont été nombreuses : certains médias de grande écoute ont favorisé une « communication spectacle » volontiers polémique et entretenu la confusion entre vérité scientifique et opinion. Des médias ont également servi de tribune à des scientifiques pour y développer des thèses contestables. Les nouveaux médiateurs de l’information que sont internet et les réseaux sociaux ont aussi contribué à la désinformation du public et à la propagation des croyances complotistes. Le COMETS tente d’analyser les raisons qui ont conduit certains citoyens à adhérer à ces croyances complotistes et comment a pu se propager une vague de « populisme scientifique » dans laquelle l’opinion prime sur le fait scientifique.
    Le COMETS s’est aussi penché sur la délicate question de l’articulation entre expertise scientifique et décision politique dans un contexte de crise et in fine sur la recevabilité du message de l’expert lorsqu’il est communiqué aux citoyens. 
    En conclusion, la communication de crise a mis à jour une crise de la communication scientifique aux multiples facettes et d’une portée générale. L’un des enjeux pour la résoudre est indubitablement d’élever le niveau de culture scientifique des citoyens mais aussi des décideurs politiques, un devoir éthique auquel les chercheurs doivent contribuer.

    • 2. Des écarts à l‘intégrité scientifique, à la déontologie et à l’éthique lourds de conséquences
      Face à l’urgence de trouver des solutions thérapeutiques à la COVID-19, des acteurs de la recherche et du monde médical ont soutenu que l’intuition ou le « bon sens », médical seraient suffisants pour décider de l’efficacité et de la sécurité d’un traitement. Ils ont déclaré être les tenants d’une « éthique du traitement » qui serait opposée à une « éthique de la recherche ». Ce discours a servi la promotion, par Didier Raoult et son équipe de l’IHU de Marseille, du traitement de la COVID-19 par un antipaludéen connu de longue date, l’hydroxychloroquine (HCQ). Largement ouvert au public, dans des conditions peu respectueuses des règles de déontologie médicale, le traitement a fait l’objet d’un emballement médiatique et politique alors même que son efficacité sur la COVID-19 ne reposait que sur une étude clinique contestable. Les dérives qui ont accompagné la publication de cette étude dans la revue International Journal of Antimicrobial Agents ont alerté la communauté scientifique (voir Annexe 1). Elles sont édifiantes : accepté 24 heures après sa soumission, l’article a eu, dès sa parution, un énorme impact international ; il a été critiqué sur sa méthodologie (élimination de cas, biais statistiques, absence de preuves robustes,) et suscité des commentaires sur le processus de validation par les pairs, l’un des signataires, Jean-Marc Rolain, étant aussi l’éditeur en chef de cette revue. Face à la pression de la communauté scientifique, l’article a été ré-évalué postérieurement à sa publication. L’expertise, rendue publique par la revue, a recommandé le retrait de l’article, ce qui n’a pas été fait, son éditeur en chef l’ayant seulement « ouvert à la discussion ». On ne peut que déplorer une décision qui remet en cause le jugement par les pairs et va à l’encontre des critiques unanimes de ces derniers.

      Près de 40 % des articles publiés dans l’International Journal of Antimicrobial Agents depuis sa création en 2013 ont été co-signés par son éditeur en chef, Jean-Marc Rolain, et un, voire plusieurs, membres de l’IHU de Marseille dont Didier Raoult. De tels conflits d’intérêt jettent la suspicion sur la validité de leurs travaux et sont d’autant plus critiquables que cette autopromotion contribue à l’avancement de carrière des auteurs et au financement de leur recherche, tous deux conditionnés par le nombre de leurs publications. 26 L’article de D. Raoult et son équipe oblige à un questionnement sur la responsabilité des auteurs face à l’énorme impact de leurs résultats en termes de soins. On peut s’inquiéter de ce que cette étude si peu probante ait pu susciter une telle adhésion du public. Il a été impossible par la suite d’en corriger les effets. Comme nous le discutons plus loin, cette situation rassemble beaucoup des ingrédients de ce qui s’apparente au « populisme scientifique ».

    • Dans le contexte de la crise sanitaire, le soutien sans partage d’une partie de la population au traitement à l’HCQ préconisé par Didier Raoult revêt certains traits du populisme scientifique : méfiance à l’égard de ceux qui s’expriment mais ne fournissent pas de clefs immédiates aux questions posées ; préférence pour les solutions simples et rassurantes ; défiance vis à vis des élites supposées ignorantes des réalités de terrain ; opposition de communautés régionales éloignées du centre de gravité parisien de prise des décisions ; rejet des affirmations des scientifiques jugés compromis par leur proximité avec l’instance politique qu’ils conseillent ; enfin une forme de fascination exercée par une « personnalité forte » qui s’affirme par ses défis contre la représentativité académique.

      La dérive populiste de la science peut être aussi le fait d’un responsable politique. Ainsi, Philippe Douste-Blazy, ancien ministre et professeur de santé publique, et Christian Perronne, professeur de médecine, lançaient début avril 2020 une pétition en ligne demandant au gouvernement d ’accélérer les procédures de mise à disposition du traitement à l’HCQ et recueillaient près de 600.000 signatures ! Quelques jours plus tard était publié un sondage du Parisien, largement répercuté dans d’autres médias, qui portait sur « la croyance » du public en l’efficacité de l’HCQ 44. On ne peut que s ’inquiéter que le choix d ’un traitement puisse être décidé par l’opinion publique sur la base d’une pétition ou d’un sondage et que des décisions politiques puissent être prises en se fondant sur des croyances ou des arguments irrationnels, faisant uniquement appel à la peur ou l’émotion.

      #CNRS #éthique #science #méthode_scientifique #populisme_scientifique #communication #vulgarisation #médias #Didier_Raoult

    • Bizarrement, alors que la rédaction du rapport est annoncé comme ayant couru jusqu’à août 2021, aucune mention de Mucchielli dans ce rapport, alors que ses conneries durent depuis plus d’un an donc la même période que le rapport. Et alors que lui il est interne au CNRS, donc le comité d’éthique devrait en parler au moins autant que les personnalités extérieures.

    • Lynchage et reprise en main par la propagande du régime...vous avez des places à sauver ? Ou est la « catastrophe évitée de justesse » que vous imputez à la seule l’HCQ ? Elle est là avec son QR-code et ses bruits de bottes...

    • L’un des enjeux pour […] résoudre [la communication de crise] est indubitablement d’élever le niveau de culture scientifique des citoyens mais aussi des décideurs politiques, un devoir éthique auquel les chercheurs doivent contribuer.

      Et de changer de type de décideurs politiques ?

  • Vaccination et fake news : le CNRS dénonce les abus - Le Point
    https://www.lepoint.fr/sante/vaccination-et-fake-news-le-cnrs-denonce-les-abus-24-08-2021-2439996_40.php


    Ouais, c’est Le Point… C’est dire si c’est le brun !

    Le problème de la désinformation sur la vaccination agite les hautes sphères scientifiques. Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a exigé mardi, dans un communiqué, le respect des règles de déontologie par des scientifiques s’exprimant, sans compétences particulières, sur le sujet de la vaccination contre le Covid. Cette déclaration fait suite aux appels de sociologues et de citoyens exigeant du CNRS une réaction ferme aux propos du sociologue Laurent Mucchielli qui avait affirmé que la vaccination contre le Covid-19 était à l’origine d’une « mortalité inédite » en France. Le CNRS « déplore les prises de position publiques de certains scientifiques, souvent plus soucieux d’une éphémère gloire médiatique que de vérité scientifique, sur des sujets éloignés de leurs champs de compétences professionnelles comme sur la vaccination contre le Covid ».

  • #CNews, première chaîne d’#intox de France… avec le soutien de l’Élysée

    La semaine dernière, CNews a pour la première fois dépassé #BFMTV en audience. Récompense suprême pour la chaîne qui propage des #fake_news sur des #controverses montées de toutes pièces : documentaire censuré à Orléans, #écriture_inclusive imposée à l’école, #Blanche-Neige victime de la “#cancel_culture”… Plus courageux encore, #Pascal_Praud désigne à la vindicte de la #fachosphère des responsables de services publics. Une action civique qui vaut à l’animateur d’être chouchouté par l’Élysée.

    « Merci à vous tous, chers téléspectateurs, salue #Sonia_Mabrouk mardi dernier. Vous avez placé hier CNews leader des chaînes d’information de France. » Devant BFMTV, et sans que cette dernière perde de part d’audience. La chaîne de #Bolloré a donc su attirer un nouveau public. « C’est une confiance qui nous honore, merci encore. » Une confiance de laquelle Sonia Mabrouk sait se rendre digne. « La guerre contre l’écriture inclusive menée par #Jean-Michel_Blanquer qui veut l’interdire à l’école, annonce-t-elle au sommaire de Midi news. L’écriture inclusive, une attaque contre notre langue et derrière, une idéologie. » Rappelons que Sonia Mabrouk, elle, est dépourvue d’idéologie. « Et puis nous parlerons de tags anti-police et donc anti-France d’une violence inouïe. » Ils ont causé des dizaines de blessés parmi les forces de l’ordre.

    « J’ai remercié les téléspectateurs qui ont placé hier CNews comme la chaîne leader des chaînes d’information, rappelle Sonia Mabrouk après le journal. Je remercie également les invités. De tous bords, c’est très important, chaque jour il y a la diversité des sujets et surtout des tendances. » De la droite extrême à l’extrême droite en passant par la gauche d’extrême droite, comme nous allons le vérifier. « Le ministre de l’Éducation a dit : Ça suffit ! Stop l’écriture inclusive à l’école !, relaie la présentatrice. — Il faut savoir l’enfer qu’on vit dans beaucoup de collectivités, gémit #Rudolph_Granier conseiller LR de Paris. À Grenoble, ils ont décidé de la rendre obligatoire dans les délibérations, c’est déjà le cas à la mairie de Paris. » Il faudrait mettre en place une cellule de soutien psychologique pour Rudolph Granier et ses collègues. « Moi, je pense aux personnes qui sont dyslexiques, qui sont aveugles. » Les aveugles ? Ils n’ont pas grand-chose à voir dans cette histoire.

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    « Ça concerne les universités, Sciences Po, l’EHESS, Normale Sup, énumère Élisabeth Lévy. La triade des sciences humaines s’adonne à ça. Et si des profs ne mettent pas leurs demandes de financement en écriture inclusive, ils ont toutes les chances de se faire retoquer. » Information inventée de source sûre. « On est encore l’otage de groupuscules. » Terroristes. Le seul invité de tous bords de gauche prend la parole. « Autant je suis pour qu’on dise “madame la ministre”, revendique #Philippe_Doucet, du PS, mais je suis contre cette histoire d’écriture inclusive. » Ouf, les « socialistes » ne cèdent pas à la pression des preneurs d’otages. « Mais pourquoi le ministre de l’Éducation fait cela ? » s’auto-interroge Sonia Mabrouk pour mieux s’auto-répondre : « L’écriture inclusive et la théorie du #genre ont pris le dessus par exemple au #CNRS, c’est ce que vise le ministre. » Philippe Doucet fait assaut de bonne volonté : « Je suis contre la #culture_woke et pour la République. » Rappelons que l’écriture inclusive menace la République, ses partisans étant notoirement friands de dictature militaire.

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    Sonia Mabrouk psalmodie : « Écriture inclusive, #femellisme, disent certains, mais aussi discours décoloniaux… » Sans oublier l’#islamo-gauchisme racialiste. « Il y a des militants, il faut les appeler ainsi, qui pensent tordre le cou au réel et changer la cité en corrigeant les #mots. » Rappelons que Sonia Mabrouk, elle, n’est pas militante. « Ces révolutionnaires de salon me font sourire, commente #Ludovic_Mendes, de LREM. Quand on dit à un gamin de CP qui a des difficultés parce qu’il est en apprentissage de la lecture qu’on va lui rajouter l’écriture inclusive… » Information fantasmée de source sûre : partout en France, les élèves de CP sont contraints par les professeurs des écoles d’apprendre l’écriture inclusive.

    Sonia Mabrouk résume : « En gros, vous êtes tous d’accord. » Magie de la « diversité des tendances » des « invités de tous bords ». « L’écriture inclusive, vous dites : absurdité et non-sens linguistique. Mais je voudrais vous pousser plus loin. » Un peu plus à droite, si c’est possible. Élisabeth Lévy ne se fait pas prier. « La question, c’est : de quelle minorité sommes-nous otages ? Y compris chez les socialistes, chez les Verts, dans toute l’extrême gauche 3décolonialo-indigéno-je-ne-sais-quoi. On est #otages de gens qui représentent des #groupuscules. — Oui mais parfois les #minorités font l’histoire, alerte Sonia Mabrouk. Quand vous êtes à des postes très élevés, ça peut ruisseler. — Ça peut infuser », confirme Philippe Doucet. C’est d’autant plus dangereux que, selon Élisabeth Lévy, « le combat de la place des femmes dans la société, il est gagné ». L’emploi de l’écriture inclusive conduirait tout droit à une #dictature_féminazie.

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    « Avant de parler de beaucoup d’informations sur la violence qui règne dans nos villes, annonce Pascal Praud la veille au soir, l’écriture inclusive. Vous savez qu’on essaye de mener modestement ce débat. » Cette #croisade. « Dans une interview au JDD, Jean-Michel Blanquer a rappelé l’existence de la circulaire d’Édouard Philippe qui en 2017 interdisait l’usage administratif de l’écriture dite “#épicène”. » Épicène, vraiment ? L’adjectif désigne un mot qui s’écrit au masculin comme au féminin. Blanquer va donc interdire l’emploi du mot « élève », un comble pour un ministre de l’Éducation… Mais puisque c’est une information vérifiée par Pascal Praud… « Et il demande que l’écriture inclusive ne soit pas utilisée à l’école. J’ai envie de dire : Enfin ! Enfin, il se réveille ! » Il a dû regarder CNews, où Pascal Praud mène un combat quotidien contre l’écriture inclusive.

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    L’animateur relaie scrupuleusement les arguments du ministre : « Mettre des points au milieu des mots est un barrage à la transmission de notre langue pour tous, par exemple pour les élèves dyslexiques. » En revanche, apprendre à écrire « du cidre et des crêpes bretons » est une facilité pour les élèves dyslexiques. « Je rappelle que la mairie de Paris fait ses communiqués en écriture inclusive. Je rappelle que le site de France 2 est en écriture inclusive. — L’université est en écriture inclusive, chouine #Ivan_Rioufol. — L’université, quand t’écris pas ta thèse en écriture inclusive, t’es mis dehors ! » Information inventée de source sûre.

    « Vous êtes injuste, proteste toutefois Ivan Rioufol, il me semble avoir entendu Blanquer le dire plusieurs fois. — Y a que nous qui le disons ! À l’université, c’est un scandale ! Tu peux prendre des sanctions, quand même ! » Condamner les profs à des peines de prison. « Pourquoi le président de la République n’a rien dit sur ce coup-là ?, s’étonne #Jean-Claude_Dassier — Il dit rien, le ministre de la Culture non plus… Tous les thèmes qui fâchent, de toute façon ! » À peine s’ils dénoncent l’islamo-gauchisme. « Je crois savoir que c’est assez marginal, tente l’avocate Sophie Obadia. — C’est pas du tout marginal à l’université, réplique Pascal Praud. — En #sciences_sociales, précise Ivan Rioufol. — C’est la terreur ! » Selon des témoignages fabriqués de source sûre.

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    Sophie Obadia se range à la diversité des tendances des invités de tous bords : « Que ce soit enseigné, malheureusement, oui. Mais les étudiants n’y parviennent pas. C’est d’une complexité effarante. — C’est moralement illisible, ajoute Ivan Rioufol. — Sur le plan cognitif, c’est improbable, insiste l’avocate. — Ça devrait être considéré comme nul et non avenu, tranche Jean-Claude Dassier. — Le féminin d’entraîneur, c’est quoi ?, demande Jean-Louis Burgat. — Entraîneuse, répond Jean-Claude Dassier. — Vous voyez, y a des choses qui sont impraticables. — Ce qui est très inquiétant, geint Ivan Rioufol, c’est de voir à quel point une #moutonnerie peut amener à un #conformisme. » Les participants à L’heure des pros, eux, sont aussi anticonformistes que Jean-Michel Blanquer. « En sciences sociales, dans les universités, si vous ne faites pas de thèse en écriture inclusive, vous n’êtes pas lu ou vous avez deux points. » Information fabulée de source sûre. Pascal Praud en ajoute une : « Y a des profs qui ne répondent pas aux mails des étudiants quand ils ne sont pas en écriture inclusive. — Et Mme Vidal ne dit rien, peste Jean-Claude Dassier. — C’est peut-être pas la priorité, tente Sophie Obadia. — Mais c’est la priorité !, rage Pascal Praud. — Ah ben si, c’est la priorité ! », appuie Ivan Rioufol.

    La priorité de mercredi est tout aussi anticonformiste. « Est-ce que dans Blanche-Neige, vous vous souvenez de la fameuse scène du baiser, quand le prince charmant se penche sur Blanche-Neige pour la réveiller ?, demande Sonia Mabrouk. Est-ce que vous y avez vu un baiser non consenti ? » #Olivier_Dartigolles réagit : « La polémique est ridicule » Tellement ridicule qu’elle a été montée de toutes pièces par la fachosphère et relayée par #FoxNews à partir d’un obscur blog qui faisait la promotion d’une nouvelle attraction de Disneyland. Mais, pour Sonia Mabrouk, « ça va loin. Parce que Disney se demande que faire de cette scène, est-ce qu’il ne faut pas la couper ». Information supputée de source sûre. « Évidemment on crie tout de suite à la cancel culture. » Sur CNews.

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    « Qu’est-ce que vous en pensez, #Laurent_Jacobelli ? — Je pense que c’est ridicule », répond le porte-parole du RN. Qui suggère illico la prochaine fake news susceptible de provoquer de passionnants débats ridicules : « En plus, dans le nom Blanche-Neige, il y a “blanche” donc on va nous demander de le changer. Est-ce qu’on doit ridiculiser le débat, l’amoindrir à ce niveau au point de chercher le mal partout ? » Sur CNews, oui, c’est même un credo. « Arrêtons avec cette #censure permanente. » Voyez comme les bobards des journalistes de CNews sont affreusement censurés. « La moindre image, le moindre mot donne lieu à un procès. » Sans parler des terribles remontrances du CSA.

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    « Mais jusqu’où on va aller ?, insiste Sonia Mabrouk Jusqu’où cet activisme peut aller pour effacer… parce qu’il y a de véritables pressions… » À son tour, la journaliste imagine une fake news susceptible de provoquer de passionnants débats ridicules : « Peut-être que la prochaine étape, c’est de dire que les sept nains, c’est un gang bang… » Et Bambi une victime du lobby de la chasse. « Faut-il voir derrière les tenants de l’idéologie intersectionnelle, de la cancel culture, etc. ? » Sur CNews, oui. « Ou est-ce que vous dites : on prête trop d’attention à ces minorités ? » Sur CNews, c’est certain. « Il y a un véritable engagement politique derrière cela. » De l’extrême gauche décolonialo-indigéno-je-ne-sais-quoi, a démontré Élisabeth Lévy.

    #Kevin_Bossuet, enseignant et coqueluche de la fachosphère, s’insurge, absence de preuves à l’appui : « On veut tout dénaturer, tout détruire, tout ce qui constitue le socle de notre identité et de notre civilisation. » Selon nos informations forgées de toutes pièces. « On pointe l’œuvre du #patriarcat partout, c’est profondément ridicule et dangereux. » Il faut sauver le patriarcat. « Le débat sur l’écriture inclusive, c’est exactement le même processus. » Effectivement : on monte en épingle une menace imaginaire pour pouvoir propager des idées réactionnaires. « Vous avez des manuels scolaires, des enseignants qui utilisent de l’écriture inclusive … » Information rêvée de source sûre. « On peut se poser des questions sur l’#idéologie de ces personnes. » En revanche, pas la peine de se poser des questions sur l’idéologie de toutes tendances des invités de tous bords de CNews.

    « On est en train de recréer la censure, se désespère Laurent Jacobelli, de restreindre la possibilité d’exprimer une opinion, on le voit sur les plateaux télé. » Surtout sur CNews. « Il faut arrêter qu’une toute petite minorité impose sa #dictature_intellectuelle à une grande majorité. » D’invités de CNews. L’avocat Carbon de Sèze conclut « C’est pas à des amateurs de révision des œuvres artistiques d’imposer les thèmes de discussion. » Non, c’est à des amateurs de révisionnisme de les imposer sur le fondement de fausses informations.

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    Le 30 avril, Pascal Praud impose un autre « débat » sur un nouveau scandale fantasmé, « l’#affaire_d’Orléans. L’histoire extravagante du programme financé par la mairie qui devait passer sur France 3 Centre-Val-de-Loire et qui finalement est censuré. — Oui, il est censuré », confirme #Serge_Grouard, maire LR d’Orléans et habitué de L’heure des pros. Le bandeau le clame, « France 3 censure un programme sur #Jeanne_d’Arc ». En réalité, comme l’a très bien raconté cet article d’Arrêt sur images, France 3 a renoncé à programmer un #documentaire sur les « #fêtes_johanniques » (qu’elle ne s’était jamais engagée à diffuser) quand elle s’est aperçue qu’il s’agissait d’un film promotionnel réalisé par la municipalité et commenté par la voix de #Charlotte_d’Ornellas, journaliste de Valeurs actuelles, figure de la fachosphère abonnée aux plateaux de CNews.

    Pascal Praud, comme Sonia Mabrouk, préfère « crier à la cancel culture » d’inspiration soviétique : « Qu’il y ait des petits commissaires du peuple dans le service public d’information et notamment à France 3 n’étonnera personne. Ça s’appelle des petits commissaires du peuple, insiste-t-il. Dans le service public, ce sont les rois. » L’animateur s’adonne alors à l’une de ses méthodes favorites : désigner le nom du coupable à la vindicte de centaines de milliers de téléspectateurs nourris de fausses informations.

    « On est en train d’essayer d’appeler M. Basier, il veut pas répondre. » Le lâche. « Jean-Jacques Basier, je vais donner son nom plusieurs fois. Jean-Jacques Basier, directeur régional de France 3 Centre-Val-de-Loire. » Son adresse et son numéro de téléphone, peut-être ? « C’est une police de la pensée, s’insurge Serge Grouard. — Ils ont des mentalités d’épurateurs, ajoute Ivan Rioufol. — Exactement, c’est les mêmes qui auraient tondu à la Libération. » Puisque Rioufol et Praud me tendent la perche du point Godwin, qu’il me soit permis de subodorer que ces Praud et Rioufol sont les mêmes qui auraient dénoncé des juifs sous l’Occupation. Quoiqu’il en soit, leur lynchage public a des effets dans la vie réelle : le directeur régional de France 3 est l’objet d’une campagne de #harcèlement sur les réseaux sociaux mais aussi sur sa propre messagerie vocale. Avec d’explicites #menaces_de_mort, rapporte un communiqué syndical.

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    Une autre affaire montre que ce goût pour la #délation peut avoir de graves conséquences sur les personnes désignées à la furie de la fachosphère.. Jeudi soir, l’émission À l’air libre, réalisée par Mediapart, reçoit #Anne-Laure_Amilhat_Szary, directrice à Grenoble du laboratoire Pacte du CNRS. Je conseille vivement de regarder son témoignage (en accès libre) pour prendre la mesure de la gravité des agissements de M. Pascal Praud. Ce dernier a mis en cause l’universitaire lors de l’affichage des noms de deux professeurs de Sciences Po Grenoble accusés d’islamophobie. Affichage que l’intéressée a toujours vigoureusement condamné. Affichage consécutif à une controverse entre un prof militant et une chercheuse de son laboratoire qu’Anne-Laure Amilhat-Szary a défendue dans un communiqué ensuite falsifié par #Klaus_Kinzler, le prof en question.

    Pascal Praud s’est empressé d’inviter ce professeur, qui déclare alors : « Un grand chercheur directeur de laboratoire de recherche se met en dehors de la science. Il ne comprend même pas, c’est une femme d’ailleurs, elle ne comprend même pas ce que c’est, la science. — Ce laboratoire, Pacte, avec cette dame…, rebondit Pascal Praud. Je vais citer son nom, Anne-Laure Amilhat-Sza… Szaa… Szary. » La délation est un métier. « Cette dame-là, c’est la directrice du laboratoire mais cette dame, c’est une militante. — C’est une militante. C’est des gens qui ne réfléchissent même pas. — Oui mais qui se croient tout permis et qui avancent avec le sentiment d’impunité. C’est très révélateur, on voit le #terrorisme_intellectuel qui existe dans l’université à travers leur exemple. »

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    Sur le plateau de Mediapart, Anne-Laure Amilhat-Szary raconte la suite. « La ministre de l’Enseignement supérieur dit que c’est insensé de livrer des noms d’enseignants-chercheurs à la vindicte des réseaux sociaux, or ça a été mon cas. J’ai fait l’objet d’une campagne diffamatoire avec menaces de mort nombreuses et répétées. » Au point de devoir porter plainte pour « #cyber-harcèlement et menaces de mort ». « Comment vous avez vécu tout ça ?, demande Mathieu Magnaudeix. — Mal. Et comme la preuve que l’intersectionnalité est une bonne grille d’analyse puisque j’ai fait l’objet d’insultes islamophobes, antisémites, sexistes, avec une critique de mon physique avec mon portrait transformé… Je vous laisse imaginer le pire. » Le pire sciemment provoqué par Pascal Praud.

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    « Je n’ai pas de protection judiciaire, regrette Anne-Laure Amilhat-Szary. Elle a été demandée et on n’en a plus jamais entendu parler. La ministre a défendu des personnes qui ont effectivement été mises en danger par des affichages criminels et moi, je me débrouille toute seule. » Comme se débrouillent toutes seules les journalistes #Morgan_Large et #Nadiya_Lazzouni, respectivement victimes d’#intimidations (dont un sabotage de voiture) et de menaces de mort, sans qu’elles obtiennent la #protection_policière demandée — et soutenues par de nombreuses organisations de journalistes.

    En revanche, Emmanuel Macron n’hésite pas à téléphoner à #Eric_Zemmour, quand il est agressé dans la rue, pour l’assurer de son soutien. De même, #Christine_Kelly, la faire-valoir de #Zemmour, est promptement reçue à l’Élysée quand elle reçoit des menaces de mort (évidemment inadmissibles, quoiqu’on pense de son travail).

    Quant à Pascal Praud… Non seulement ses délits de « mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle » (que le gouvernement se vante d’avoir inclus dans la loi Séparatisme) n’entraînent aucune poursuite, mais ils lui valent le soutien enamouré du pouvoir. Dans un article du Monde, Ariane Chemin raconte comment le journaliste de CNews est reçu avec les honneurs à Matignon, à la questure de l’Assemblée (où le reçoit le député Florian Bachelier, habitué de ses émissions) et même à l’Élysée. Emmanuel Macron et son conseiller #Bruno_Roger-Petit entretiennent des contacts réguliers avec Pascal Praud, allant jusqu’à lui livrer des infos en direct. Ariane Chemin explique que Bruno Roger-Petit, « le “M. Triangulation” de l’Élysée, scrute depuis longtemps CNews, qui relaie souvent les obsessions de l’extrême droite et a pour lui le même avantage que Valeurs actuelles : cliver l’opinion en deux camps sans laisser beaucoup de place à d’autres courants de pensée ».

    Ainsi, le pouvoir actuel, et jusqu’à son plus haut sommet, utilise et protège un délinquant d’extrême droite propagateur de fausses nouvelles. La campagne pour la présidentielle s’annonce terrifian… pardon, passionnante.

    https://www.telerama.fr/ecrans/cnews-premiere-chaine-dintox-de-france...-avec-le-soutien-de-lelysee-687576

    #infox

    –—

    ajouté au fil de discussion sur l’#affaire_de_Grenoble :
    https://seenthis.net/messages/905509

    ping @isskein @karine4

    signalé ici aussi :
    https://seenthis.net/messages/915057

    • Duplication de bandes de gel organisées : sur quelques publications de Frédérique Vidal, ministre de l’ESR
      https://academia.hypotheses.org/24479

      cet article porte sur les fraudes commises par Frédérique Vidal comme responsable de salle et première autrice, ainsi que par l’équipe de chercheurs qui a copublié avec elle.

  • #Islamo-gauchisme : « Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus #sombres moments de l’histoire française »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/04/islamo-gauchisme-nous-ne-pouvons-manquer-de-souligner-la-resonance-avec-les-

    Nous écrivons pour exprimer notre profonde consternation devant la récente requête de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Frédérique #Vidal, demandant au Centre national de la recherche scientifique (#CNRS) de diligenter une enquête sur les agissements « #islamo-gauchistes » dans les universités françaises.

    Nous regrettons qu’après le passage par le gouvernement français d’une loi sur le « #séparatisme » ayant déjà accentué la #stigmatisation de musulmans en France, ce soit désormais aux #universitaires d’être accusés de polariser les débats publics. L’idée que l’on puisse surveiller des enseignants-#chercheurs sous prétexte du « dévoiement #militant de la recherche » est dans les faits une #menace directe de censure qui nous inquiète à plus d’un titre.

    Tout d’abord, l’Etat n’a ni le droit ni la compétence pour #censurer les travaux d’universitaires qui s’appuient sur leur expertise pour contribuer à l’avancée du savoir dans nos #sociétés. C’est un précédent dangereux qui ne saurait être toléré dans une #société_démocratique.

    • fin du texte :
      Fanon, Sartre, Bourdieu…
      L’argument selon lequel des universitaires, soi-disant « islamo-gauchistes », risquent de diviser la société est dans les faits un effort visant à diffamer nos collègues. Cette attaque est de surcroît justifiée au nom de la protection de la République face à l’alliance supposée entre une partie de la gauche et un groupe religieux.

      Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus sombres moments de l’histoire française, et notamment avec un discours attaquant les « judéo-bolcheviques » qui déjà servait à créer l’amalgame entre engagements politiques et religieux.

      Lire cette tribune : Islamo-gauchisme : « S’il y a un effet de mode, quant à ce nouveau type de recherche, notre rôle n’est pas de les censurer, mais de les encadrer »
      Par ailleurs, les approches actuellement sous le feu de la critique ont été directement inspirées par quelques-unes des plus brillantes figures de la tradition philosophique, littéraire et sociologique française. En tant que chercheurs travaillant aux Etats-Unis et ailleurs, nous sommes redevables intellectuellement envers la France pour avoir contribué par ses universités à l’émergence de penseurs tels que Frantz Fanon, Albert Memmi, Hélène Cixous, Aimé Césaire, Paulette Nardal, Jean-Paul Sartre, Pierre Bourdieu, Louis Althusser, Jacques Derrida et Michel Foucault.

      La plupart de ces figures n’étaient pas seulement des penseurs, mais aussi des individus impliqués dans des luttes politiques prolongées pour rendre nos sociétés meilleures. Ces intellectuels engagés sont devenus les piliers des diverses approches qui sont désormais attaquées sous le nom de « postcolonialisme. »

      Censure
      Qu’un pays qui a tant contribué à faire avancer la pensée critique tourne ainsi le dos à son patrimoine national n’est pas seulement alarmant, c’est aussi dénué de vision à long terme. Nous ne demandons pas que tout le monde embrasse ces approches et reconnaisse leurs mérites, mais simplement que les universitaires français puissent en débattre et les partager avec leurs étudiants, si tel est leur bon vouloir.

      Lire cette tribune : Islamo-gauchisme : « L’introduction de certains termes, comme “racisé” ou “féminicide”, ne fait que rendre visibles des préjudices déjà existants »
      Enfin, ceux qui gouvernent l’enseignement supérieur feraient mieux de chercher des solutions concrètes au problème de la discrimination raciale en France, plutôt que de se lancer dans une chasse aux sorcières contre des chercheurs. Las, plutôt que de soutenir des universitaires afin de faire avancer la lutte commune pour l’égalité, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche les menace de censure.

      Plutôt que de répondre à la souffrance des étudiants dans un contexte de pandémie globale, ou aux problèmes économiques auxquels est confrontée l’éducation publique, Frédérique Vidal et ses collègues désignent des enseignants comme la principale menace pesant sur les universités françaises.

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’éthique de la recherche, c’est la capacité à distinguer les enjeux, à ne pas glisser de la théorie vers l’idéologie »
      De nombreux signataires de la présente tribune ont bénéficié de leurs échanges prolongés avec des universités françaises, que ce soit avec des individus ou au niveau institutionnel. Nous souhaitons que cette collaboration avec nos collègues français se poursuive dans un esprit de débat ouvert et libre. C’est pourquoi nous attirons à nouveau votre attention sur les graves dangers que ces menaces de censure font peser sur la liberté académique.