• Performing the law / LE #BUREAU_DES_DEPOSITIONS

    Comment qualifier le bureau des dépositions sans passer à côté des causes (déterminées) et des fins (encore inconnues) de ce collectif dont les performances ne sont ni des représentations ni des manifestations mais du “droit en train de se faire”… Nous retrouvons les lignes directrices du Labex performing the law mais dans une dimension encore plus aboutie. Il ne s’agit pas de dire que la #performance en elle-même est plus travaillée mais de souligner ici que la #fabrique_du_droit est encore plus essentielle, intrinsèque au projet.

    Un projet qui correspond parfaitement à une publication sur un carnet de recherches car on avance ici de brouillon en brouillon, l’œuvre collective évoluant au fur et à mesure des rencontres visibles et publiques mais aussi des événements quotidiens qui affectent les différents intervenants. Car la frontière entre vie privée et scène publique se veut ici poreuse puisque nous sommes aux marges de toutes les catégories : privé et public, fiction et réalité, matériel et immatériel, théorie et pratique…

    Le “Bureau des dépositions” est en effet le nom que s’est attribué un groupe d’hommes et de femmes pour rendre compte et désigner l’#œuvre_immatérielle constituée par la #co-présence des #co-auteurs et des co-autrices à un moment donné et en un lieu déterminé. La performance n’est donc pas la représentation d’une œuvre qui préexiste mais bien la réalisation concrète à l’instant-t de l’œuvre dont il est question et dont on pourra par la suite défendre l’#intégrité. Une œuvre qui tend à faire #justice, alors même que les principes brandis par notre pays, clamés haut et fort au titre des gloires nationales, se révèlent insuffisants pour venir en aide concrètement aux migrants. Ici, les migrants sont avant tout des co-auteurs et des co-autrices dont la présence est essentielle à l’intégrité d’une œuvre immatérielle. Le droit d’auteur, le #droit_des_obligations seront ici privilégiés, instruments d’action pour faire valoir non pas la reconnaissance de #droits_fondamentaux à des hommes pressentis nus parce que non élevés au rang de concitoyens mais les droits d’auteurs et d’autrices, inscrits dans des liens d’obligations… Expulser cet auteur, c’est atteindre l’œuvre et entraver sa réalisation et les performances prévues, c’est impliquer les co-auteurs, les co-autrices mais aussi les diverses institutions qui s’impliquent en signant des contrats avec les “#performeurs”.

    Ainsi, le Bureau des dépositions n’est pas né d’une interrogation théorique mais d’une urgence pratique et il s’agit alors de ne jamais perdre de vue que la représentation n’est jamais à entendre dans le sens classique d’un spectacle ou d’une performance artistique mais dans le cadre d’une difficulté à résoudre.

    La performance par la coprésence est une #action, dans le sens juridique du terme, une action qui relève de la capacité à obtenir justice, de la volonté de faire reconnaître un #droit et non d’un mouvement esthétique sans lendemain. Bien sûr, la démarche suppose, pour être visible, de se fondre dans une mise en scène mais il ne s’agit que d’un moyen et pas d’une fin. Pour ouvrir une scène publique qui a deux vocations : avancer en commun par le partage des problèmes et le recueil de solutions et constituer l’objet même de la démarche juridique : l’œuvre immatérielle.

    Être ensemble sur une scène, s’exprimer à la radio… voilà autant de concrétisations qui constituent un cheminement dont nous allons rendre compte, et dans un certaine mesure qui est encore difficile à déterminer, accompagner voire nourrir.

    Le premier plateau-radio d’octobre 2019 :


    https://r22.fr/focus/oeuvrer-les-limites-du-droit-deuxieme-session

    https://imaj.hypotheses.org/2420

    #audio

    #droit_d'auteur #droit_des_étrangers #asile #migrations #réfugiés

    Une initiative de #Sarah_Mekdjian et #Marie_Moreau

    ping @karine4 @isskein

    • A Grenoble, le Bureau des dépositions ne veut plus être empêché de créer

      Le collectif d’artistes projette de saisir la justice contre les procédures d’expulsion qui menacent certains de ses membres, demandeurs d’asile. Avec une arme : le statut de co-auteur.

      Dans leurs contrats figure une clause « d’indivision » qui prévoit l’annulation de la représentation en cas d’absence contrainte de l’un des coauteurs en raison de sa situation administrative. Un paragraphe tout sauf anodin pour Mamadou, Sarah, Ben, Sâa Raphaël, Marie, Pathé, Ousmane, Mamy, Aliou et Elhadj Sory, depuis que le Bureau des dépositions, le collectif d’artistes qu’ils ont fondé il y a un an, a cru voir son élan brisé par l’expulsion de deux membres.

      En mai 2019, deux mesures d’éloignement préfectorales ont mis entre parenthèses le travail artistique engagé par ces dix « auteurs-performeurs », dont la collaboration s’était scellée quatre mois plus tôt, autour d’ateliers d’écriture de lettres sur les violences des politiques migratoires. Trois mois après leur transfert respectif vers l’Espagne et l’Allemagne, Mamadou et Elhadj Sory ont à nouveau franchi la frontière, permettant ainsi au Bureau des dépositions de renouer avec ses ambitions.

      « On s’est dit qu’il fallait faire quelque chose pour se protéger », se souvient Ousmane, l’un des huit demandeurs d’asile originaires de Guinée-Conakry qui ont participé à la création du collectif. « L’agent actif de nos œuvres, c’est-à-dire la nécessaire présence physique des uns et des autres lors des temps de création pour échanger et faire œuvre, a été mis en péril », abonde Marie, coautrice au sein du groupe.
      Notion de coauteur

      À l’exception d’Ousmane, les autres exilés du collectif, âgés de 20 à 29 ans, vivent sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) ou d’un transfert, dit « Dublin », vers le premier pays de l’Europe où leurs empreintes digitales ont été enregistrées. Chaque soir, ils dorment aux côtés d’une soixantaine d’autres demandeurs d’asile au « Patio », un local désaffecté du campus de Grenoble ouvert dans l’urgence au début de l’hiver 2017 pour les abriter.

      https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/02/19/a-grenoble-le-bureau-des-depositions-ne-veut-plus-etre-empeche-de-creer_6030

    • œuvrer une justice spéculative

      Bureau des dépositions. Exercice de justice spéculative est fondé sur une conception pragmatique du droit, à partir de celui déjà existant et de ses limites, à distance du régime moral et compassionnel de la plainte. L’œuvre s’inspire du droit de la propriété intellectuelle, infléchi par les pratiques du logiciel libre, afin d’attaquer le contentieux du droit des étrangers et du droit d’asile. Le fac-similé de la procédure est suivi d’un texte de Sarah Mekdjian et Marie Moreau retraçant les pratiques de cette œuvre signée en co-auctorialité, initiée depuis janvier 2019 au Patio solidaire sur le campus de l’université Grenoble Alpes, et au Magasin, centre national d’art contemporain à Grenoble. Il s’agit d’une création, immatérielle et processuelle, signée par dix auteur·trice·s.

      https://vacarme.org/article3283.html

    • #Bureau_des_dépositions. #Expulsions, #œuvres-milieux et recours au #droit

      Dix personnes, qui forment le Bureau des dépositions, créent des performances à Grenoble depuis 2018. En s’adressant les un·es aux autres et à un public, en ré-agençant les (im)-possibilités de paroles depuis la mise à découvert d’injustices légalement produites, elles, ils élaborent des conditions de trans-formations : langagières, sensibles, politiques. Dans le même temps, plusieurs performeurs sont inquiétés par le contentieux du droit des étrangers et du droit d’asile, expulsés légalement ou encore menacés d’expulsion. Des réponses se formulent auprès des tribunaux : alors que les performances requièrent la co-présence physique de chacun·e, les absences forcées portent atteinte à un milieu de création. Le droit d’auteur et de la propriété intellectuelle est ici convoqué et réinterprété dans le contexte d’expulsions légales et d’œuvres-milieux.

      https://www.multitudes.net/bureau-des-depositions-expulsions-oeuvres-milieux-et-recours-au-droit