• « Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 1169/2011 – Information des consommateurs sur les denrées alimentaires – Mention obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance d’une denrée alimentaire dans le cas où son omission est susceptible d’induire les consommateurs en erreur – Obligation, pour les denrées alimentaires originaires de territoires occupés par l’État d’Israël, de porter la mention de leur territoire d’origine, accompagnée, dans le cas où elles proviennent d’une colonie israélienne à l’intérieur de ce territoire, de la mention d’une telle provenance »
    ARRÊT DE LA COUR (grande chambre) - 12 novembre 2019 (*)
    http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=B93A31FC32E576E779123469D62397B8?text=&docid=22

    (...) 33 Dans la présente affaire, la juridiction de renvoi énonce que les denrées alimentaires en cause au principal sont originaires de « territoires occupés par l’État d’Israël depuis 1967 » et, plus précisément, ainsi qu’il ressort de l’avis ministériel, de la Cisjordanie, en ce compris Jérusalem-Est, et du plateau du Golan.

    34 Or, selon les règles du droit international humanitaire, ces territoires sont soumis à une juridiction limitée de l’État d’Israël, en tant que puissance occupante, tout en disposant chacun d’un statut international propre et distinct de celui de cet État.

    35 En effet, la Cisjordanie est un territoire dont le peuple, à savoir le peuple palestinien, jouit du droit à l’autodétermination, ainsi que la Cour internationale de justice l’a rappelé dans son avis consultatif du 9 juillet 2004, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (CIJ Recueil 2004, p. 136, paragraphes 118 et 149). Quant au plateau du Golan, il fait partie du territoire d’un État autre que l’État d’Israël, à savoir la République arabe syrienne.

    36 Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que le fait d’apposer, sur des denrées alimentaires telles que celles en cause au principal, la mention selon laquelle l’État d’Israël est leur « pays d’origine », alors que ces denrées alimentaires sont en réalité originaires de l’un des territoires visés au point 33 du présent arrêt, serait de nature à tromper les consommateurs.

    37 En outre, afin d’éviter que les consommateurs ne puissent être induits en erreur quant au fait que l’État d’Israël est présent dans ces territoires en tant que puissance occupante et non pas en tant qu’entité souveraine au sens décrit au point 29 du présent arrêt, il apparaît nécessaire de leur indiquer que lesdites denrées alimentaires ne sont pas originaires de cet État.

    38 Partant, la mention du territoire d’origine de denrées alimentaires telles que celles en cause au principal ne saurait être omise et doit donc être regardée comme revêtant un caractère obligatoire en vertu des articles 9 et 26 du règlement no 1169/2011.

    39 En ce qui concerne, en troisième et dernier lieu, la notion de « lieu de provenance », figurant à l’article 26, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1169/2011, celle-ci renvoie, selon l’article 2, paragraphe 2, sous g), première phrase, de ce règlement, au lieu dont provient une denrée alimentaire, mais qui n’est pas le « pays d’origine » de celle-ci. Cette dernière disposition précise toutefois que l’indication du nom, de la raison sociale ou encore de l’adresse du producteur ne saurait tenir lieu d’indication de la provenance de cette denrée alimentaire. (...)

    #colonisation_étiquetée

    • Cour de justice del’Union européenneCOMMUNIQUE DE PRESSE n° 140/19Luxembourg, le 12 novembre 2019
      https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2019-11/cp190140fr.pdf

      Les denrées alimentaires originaires des territoires occupés par l’État d’Israël doivent porter la mention de leur territoire d’origine, accompagnée, lorsque ces denrées proviennent d’une colonie israélienne à l’intérieur de ce territoire, de la mention de cette provenance

      Dans l’arrêt Organisation juive européenne et Vignoble Psagot (C-363/18),prononcé le 12novembre 2019 et portant sur l’interprétation du règlement (UE) no1169/20111, la Cour, réunie en grande chambre, a dit pour droit que les denrées alimentaires originaires de territoires occupés par l’État d’Israël doivent porter la mention de leur territoire d’origine, accompagnée, dans le cas où elles proviennent d’une localité ou d’un ensemble de localités constituant une colonie israélienne à l’intérieur de ce territoire, de la mention de cette provenance.

      Le litige au principal opposait l’Organisation juive européenne et Vignoble Psagot Ltd au ministre de l’Économie et des Finances (France)au sujet de la légalité d’un avis relatif à l’indication de l’origine des marchandises issues des territoires occupés par l’État d’Israël depuis le mois de juin 1967 et exigeant que ces denrées alimentaires soient revêtues des mentions en question. Cet avis faisait suite à la publication, par la Commission européenne, d’une communication interprétative relative à l’indication de l’origine des marchandises issues de ces territoires2. (...)

      Par ailleurs, s’agissant de la question de savoir si la mention « colonie israélienne » revêt un caractère obligatoire, la Cour a tout d’abord souligné que les colonies de peuplement installées dans certains des territoires occupés par l’État d’Israël se caractérisent par la circonstance qu’elles concrétisent une politique de transfert de population menée par cet État en dehors de son territoire, en violation des règles du droit international humanitaire7. La Cour a ensuite jugé que l’omission de cette mention, impliquant que seul le territoire d’origine serait mentionné, est susceptible d’induire les consommateurs en erreur. En effet, ceux-ci ne peuvent pas savoir, en l’absence de toute information de nature à les éclairer à ce sujet, qu’une denrée alimentaire a pour lieu de provenance une localité ou un ensemble de localités constituant une colonie de peuplement installée dans l’un desdits territoires en méconnaissance des règles de droit international humanitaire. Or, la Cour a noté que, en vertu des dispositions du règlement no1169/20118, l’information des consommateurs doit permettre à ces derniers de se décider en toute connaissance de cause et dans le respect non seulement de considérations sanitaires, économiques, écologiques ou sociales, mais également de considérations d’ordre éthique ou ayant trait au respect du droit international. La Cour a souligné à cet égard que de telles considérations pouvaient influencer les décisions d’achat des consommateurs.