• #Marlène_Schiappa, le #fémonationalisme et nous

    Juillet 2020. Dans le cadre d’« opérations de reconquête républicaine », Marlène Schiappa en appelle au « bon sens », entendre : « Si la maison de votre voisin s’effondre, vous l’accueillez. Mais s’il se met à tabasser votre sœur, vous le virez ! » C’est en ces termes qu’elle se félicite de la mise en place, par ses soins, de la #double_peine pour les étrangers coupables de violences sexistes et sexuelles. Accusée de promouvoir le fémonationalisme — c’est-à-dire un féminisme qui instrumentalise les #droits_des_femmes à des fins nationalistes et identitaires —, la porte-voix du gouvernement Macron a répondu n’avoir « aucune leçon de féminisme à recevoir de qui que ce soit ». Plus qu’une participation à la présente polémique, la sociologue et écrivaine Kaoutar Harchi entend ici, en guise de prolongement, rappeler la nécessité de déployer, face aux menées libérales et xénophobes, « un féminisme antiraciste et anticapitaliste ».

    À peine nommée ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, en charge de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, ancienne secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les hommes et les femmes et de la Lutte contre les discriminations, a revêtu les habits neufs — au vrai, pas tant que cela — de la nouvelle fonction politique qui lui incombe. Ces nouvelles attributions ne vont pas sans rappeler d’anciennes prises de position. Se voulant féministes, celles-ci plaidaient, en 2017, tant pour l’instauration d’un congé maternité non indexé au statut professionnel des mères que pour la verbalisation des insultes sexistes proférées au sein de l’espace public. L’alliance, hier comme aujourd’hui, d’un déploiement de dispositifs sécuritaires visant au contrôle des conduites masculines, d’une part, et d’une rhétorique de la protection des femmes contre les violences sexistes et sexuelles, d’autre part, est loin d’être une disposition circonstancielle. Elle peut même relever d’un projet féministe de type carcéro-punitif : déployé au cœur de l’État, il en a pris le pli au point de confier aux institutions de la force — policière et pénitentiaire — le monopole de la gestion protectrice des femmes.

    Ne voir là qu’une passion pour le châtiment et l’enfermement est à la fois nécessaire et insuffisant : l’analyse des alliances réalisées ne peut se faire indépendamment d’une analyse des significations politiques symboliquement induites, ni évacuer les effets empiriques produits sur les vies des hommes et des femmes. Car, au final, de quels hommes et de quelles femmes parle Marlène Schiappa lorsqu’elle défend la mise en place de mesures de lutte contre « le séparatisme » — que le président de la République évoquait déjà, le 18 février 2020, lors de son discours à Mulhouse ? Rien de plus simple, il suffit d’écouter Schiappa s’exprimer : « Lorsqu’un étranger commet des violences sexistes ou sexuelles, il doit cesser d’être accueilli en France. » Ou : « Si vous avez quelqu’un qui se présente comme étant un imam et qui, dans une salle de réunion, ou sur YouTube, ou sur les réseaux sociaux, appelle à la lapidation des femmes parce qu’elles se parfument, il ne faut pas rester sans agir, il faut déposer plainte. Tous les voies et recours doivent pouvoir être étudiés et nous devons pouvoir étudier des manières de renforcer la législation pour réaffirmer les grands principes de la République et notre lutte contre le séparatisme. »

    Ou bien encore : « L’idée, c’est de contrer les groupes organisés de manière hostile et violente vis-à-vis de la République. Il y a des choses qui existent déjà dans la loi : on a fait fermer près de 300 lieux problématiques, débits de boissons ou écoles hors contrat, qui prêchent cet islam politique, cet islamisme et ce séparatisme. […] Et c’est une manière de protéger les musulmans qui nous alertent et nous disent que leur mosquée est prise à partie sur ces questions-là par des groupes qui s’organisent pour parler au nom de l’islam. Il faut être prudent sur les mots et les termes, et c’est pour cela qu’on finalise cette loi et qu’on la présentera à la rentrée. » Et de préciser, enfin : « Je veux être prudente dans les comparaisons qu’on fait et je ne peux pas comparer [les exemples cités plus hauts avec] le diacre qui considère que l’évêché doit être réservé aux hommes. Je ne suis pas d’accord avec lui mais il ne met pas en péril la République. Ce n’est pas la même chose de dire "nos traditions veulent cela" que de dire "j’impose mes lois et je souhaite lapider des femmes", il y a une différence de degré. »

    Bien que nous ignorions encore selon quels dispositifs précis Marlène Schiappa entend mener ce « combat culturel », sa seule manière d’en assurer la performance médiatique nous permet d’identifier sans mal la forme de coalition qui le fonde : coalition d’un argumentaire centré sur la condition sociale inégalitaire à laquelle les femmes sont contraintes, et d’un discours qui se veut à la fois explicatif et prescriptif. Un discours qui fait de la condition des femmes un phénomène imputable, non pas au régime patriarcal tel qu’il se (re)configure au gré des périodes et des espaces, mais à un segment particulier de ce régime. En amalgamant les figures incommensurablement altérisées de l’étranger, du réfugié, du migrant, du musulman, de l’Arabe, du Noir ou encore du jeune de banlieue, ce segment devient le seul qui vaudrait la peine d’être combattu. Ce phénomène rhétorique où féminisme et racisme se rencontrent, se saluent, et s’incarnent en politiques gouvernementales, en programmes éducatifs, en campagnes de prévention ou encore en répertoire d’intégration, a été qualifié de « fémonationaliste » et s’arrime à la famille étendue des nationalismes sexuels.

    Un féminisme au service de la nation

    Forgé par Sara R. Farris à travers l’ouvrage In the name of Women’s Rights — The Rise of Femonationalism, le concept de fémonationalisme décrit, selon l’autrice, « les tentatives des partis européens de droite (entre autres) d’intégrer les idéaux féministes dans des campagnes anti-immigrés et anti-Islam ». Si la critique des convergences de la rhétorique des droits des femmes et celle du chauvinisme-nationalisme a mis en évidence, et avec insistance, les processus de culturalisation des violences faites à celles-ci, Sara R. Farris a œuvré, en tant que féministe marxiste, à déplacer l’analyse vers le terrain fécond du complexe politico-économique. Ainsi a‑t-elle cherché à comprendre les motivations profondes qui tendent, sous l’effet de la surqualification sexiste des hommes non-blancs1, à opposer les intérêts de ces derniers aux femmes non-blanches et, plus encore, à les représenter publiquement comme des figures antinomiques. Et la théoricienne de s’interroger : « De nos jours, particulièrement dans le Sud de l’Europe, les migrants sont fréquemment perçus comme une réserve de main‑d’œuvre bon marché dont la présence menace les emplois et les salaires des travailleurs nationaux. Pourtant, les travailleuses migrantes et les musulmanes en particulier ne sont ni présentées ni perçues de la même manière. Pourquoi ? »

    Pour répondre à cette question, plus redoutable qu’elle n’y paraît, Sara R. Farris a porté son attention sur les secteurs économiques d’intégration des migrant·es. De là, il est apparu que les travailleuses migrantes sont principalement employées par le secteur domestique tandis que les travailleurs migrants sont distribués selon une logique bien plus diversifiée. La féminisation des mondes du travail, l’ouverture du domaine des soins au marché ainsi que la facilitation transactionnelle, organisée par l’État, de recourir à une assistance extérieure — relative, notamment, à la garde d’enfants, à l’aide aux personnes âgées ou aux personnes handicapées — ont grandement et durablement favorisé la constitution des femmes du Sud, non comme « armée de réserve » menaçante mais comme « armée régulière » entretenue permettant aux collectivités blanches de bien vivre.

    Selon l’autrice, l’une des grilles de compréhension de l’appareil justificatoire fémonationaliste tirerait sa force de cette matérialité de l’aide féminine apportée. La lutte pour la conservation de cette aide conduirait alors à représenter et à traiter les femmes non-blanches issues des migrations postcoloniales comme victimes à extirper et à sauver des mains dangereuses de leur époux, père, frère, oncle, cousin, et plus généralement de tout homme de leur groupe ethno-racial supposé ou réel. La logique néolibérale, dont on perçoit bien, ici, l’intimité structurelle qu’elle entretient avec la sexualisation/racialisation de la force de travail, viendrait dès lors infléchir les traitements — mais pas les violences — que des gouvernements de droite et de gauche porteraient sur les femmes migrantes. Inflexions d’autant plus probables et soutenues qu’elles viennent confirmer, si ce n’est créer, un effet de coïncidence avec la définition majoritaire de la figure féminine — a fortiori migrante — émancipée et légitime à vivre sur les territoires nationaux européens : soit une femme libérée de l’emprise familiale et librement présente sur le marché du travail.

    Une séquence fémonationaliste historique

    Dans le contexte spécifique des politiques et législations françaises, il s’agirait alors de comprendre la manière dont la pensée de Sara R. Farris éclaire l’une des séquences contemporaines les plus fondamentales de la longue histoire fémonationaliste française, à savoir celle de l’interdiction du port du voile dans les écoles publiques, en 2004, au nom de la laïcité et de l’égalité filles-garçons. Comme le note la sociologue Christine Delphy, les arguments des féministes en faveur de l’interdiction du foulard, « formulés dès 1989 par Élisabeth Badinter, Régis Debray, Alain Finkielkraut, Élisabeth de Fontenay, Catherine Kintzler2 », ont affirmé l’exceptionnalité de la violence sexiste exercée par les hommes non-blancs, en la rejetant au-delà du cadre de la violence sexiste ordinaire. Nombre de débats publics se sont alors orientés vers le « pourquoi » de cette violence supposée plus violente que toute autre, et ont fait d’elle, lorsqu’elle est observée sur le territoire national, une violence accidentelle — c’est-à-dire importée d’un ailleurs lointain, conséquence de l’immigration d’hommes de confession musulmane, réelle ou supposée — et portant atteinte à l’intégrité de la « démocratie sexuelle ».

    L’association Ni Putes ni Soumises, par exemple, grandement centrée sur l’accompagnement de la population féminine « des quartiers », a incarné le combat contre la « barbarie » patriarcale supposée de la fraction masculine, musulmane et populaire de la société française. Un combat, mené par quelques actrices féminines racisées proches des structures du pouvoir, se voulant représentatives du pendant féminin de ladite fraction, et qui a symbolisé, à lui-seul, l’arrachement des femmes bonnes d’une religion et d’une culture mauvaises. Cela au point que la nécessité d’aider les jeunes filles en question à quitter leur « culture » en quittant leur famille, et plus encore à rompre tout lien avec elles, a progressivement été défendue par les membres de l’association et par nombre d’acteurs et d’actrices institutionnels prohibitionnistes.

    Articulant ces éléments, qui mêlent processus de racialisation (lesquels assurent la pérennité de l’ordre patriarcal) et mécanismes de sexualisation (lesquels confèrent toute sa force à l’organisation racisée), Sara R. Farris y adjoint alors ce que la sociologue Dina Bader a nommé « la dimension du gain3 » : cet intérêt structurel qui mène les gouvernements de droite et de gauche, dans une perspective conservatrice et nationaliste, à s’accaparer le discours féministe, avec la collaboration volontariste de féministes en poste, « car ils ont quelque chose à gagner ». En filigrane de cette manière d’appréhender le phénomène d’un féminisme raciste, nous retrouvons l’hypothèse développée par le philosophe marxiste Alain Badiou selon laquelle « la loi sur le foulard [serait] une loi capitaliste pure [qui] ordonnerait que la féminité soit exposée. Autrement dit, que la circulation sous paradigme marchand du corps féminin [serait] obligatoire et interdi[rait] en la matière — et chez les adolescentes, plaque sensible de l’univers subjectif entier — toute réserve ». Ainsi la logique marchande d’une transparence de la féminité occidentale s’articule aux résidus fondamentaux de la logique (néo)coloniale du dévoilement articulée.

    Dans un paradigme où les femmes racisées, en tant que telles, sont perçues comme ayant toujours quelque chose d’elles à vendre quand, au contraire, les hommes racisés sont appréhendés comme ne disposant pas de ressources pour acheter, aux premières l’accueil sous conditions — celle de ne pas porter le voile, notamment —, aux seconds le rejet inconditionnel.

    Enjeux collectifs

    La rhétorique fémonationaliste à laquelle Marlène Schiappa s’adonne allègrement depuis le ministère de l’Intérieur4 se déploie entre les soupçons d’agressions sexuelles qui pèsent sur Gérald Darmanin : mise en scène révoltante d’un pouvoir qui survisibilise la violence sexiste de certains hommes pour mieux invisibiliser celle d’autres. Cette rhétorique appelle une réponse forte, collectivement organisée. Non parce que nos hommes subiraient le racisme et qu’il faudrait, en tant que leurs femmes, les en sauver — tandis que d’autres hommes chercheraient à nous sauver de ceux-là mêmes —, mais bien parce qu’en tant que femmes de personne, nous jugeons que la lutte antiraciste et la lutte antisexiste ne sauraient être pleinement réalisées que dans cette conscience aiguë que les personnes opprimées par le racisme ne sont pas toutes des hommes non-blancs et que l’oppression patriarcale ne soumet pas uniquement des femmes blanches. Dans cette perspective, et Delphy le remarque justement, les femmes racisées sont contraintes de construire avec et sans les hommes du groupe racisé, avec et sans les femmes du groupe blanc. Ce qui pose la question cruciale des conditions de possibilité liées à la construction d’un espace politique des femmes racisées.

    Que signifie cet « avec » et ce « sans » ? Une infinité de pièges qui parsème les chemins difficiles de l’émancipation politique des membres objectivement solidaires du groupe racisé et des membres objectivement solidaires du groupe féminin — solidarité que la rhétorique fémonationaliste cherche tout bonnement à rompre définitivement en isolant femmes et hommes, en livrant les unes à la dévoration domestique et les autres à la noyade en haute mer ou à l’asphyxie. Cela ne peut ni ne doit durer car personne ne peut être dépossédé de son existence et vivre en se sachant, ainsi, destiné à la mort. Dénoncer et lutter contre la racialisation des questions sexuelles et la sexualisation de la question raciale — auxquelles Schiappa et Darmanin, comme d’autres avant eux, vont en promettant un grand avenir — implique d’affronter une question centrale : si les femmes racisées sont aptes — car construites ainsi par un ensemble de rapports sociaux — à se voir, à se reconnaître et à éprouver une forme d’empathie envers l’homme non-blanc que le racisme violente et envers la femme blanche que le patriarcat oppresse, qui des membres de ces groupes dominés se reconnaissent en elles ?

    Il importe de nous acharner à pointer du doigt la moindre injustice de genre, de classe et de race, produite non seulement par l’instrumentalisation des idées féministes, mais aussi et surtout par le caractère instrumentalisable et donc antiféministe de ces mêmes idées. Cela, de nombreuses personnes qui militent l’ont dit bien des fois. Mais en matière de politique des luttes, se répéter est une manière de dialoguer avec ceux et celles qui entendraient parler de tout cela pour la première fois, comme une manière de ne pas laisser aller à l’apathie ceux et celles qui n’en ont que trop entendu parler. Il importe, aussi, de rompre avec l’idée selon laquelle les hommes racisés seraient substantiellement plus violents que les autres hommes et que les cultures des Suds seraient plus marquées par l’idéologie patriarcale que celles du Nord. Car, dans un cas comme dans un autre, nous sommes entraîné·es à répondre au « pourquoi » moralisant de cette prétendue spécificité, et non au « comment » politique de cette spécification. Cette rupture est absolument fondamentale. Elle conditionne la possibilité d’orienter la lutte, non pas contre les formes les plus monstrueuses du patriarcat — ce qui ne peut que nous conduire à entériner les formes souriantes et galantes de ce dernier — mais bien contre le patriarcat dans tous ses états5. Enfin, il importe de prendre la mesure des concurrences féroces qui ont lieu au sein des espaces du féminisme majoritaire blanc pour la conservation et/ou la conquête du monopole féministe.

    Demeurons vigilant·es quant aux potentielles formes de récupérations de la critique fémonationaliste, non pas dans une perspective révolutionnaire qui profiterait à toutes les membres de la classe des femmes, mais dans une logique de pure distinction stratégique des groupes dominants entre eux. Puisque l’oppression accable sur plusieurs fronts à la fois, nous ne pouvons que réfléchir ensemble et solidairement vers la construction d’espaces étendus. Espaces où les réflexions théoriques et les actions concrètes des femmes qui prônent un féminisme antiraciste et anticapitaliste pourront se déployer plus encore, dans la plénitude de leurs croisements.

    https://www.revue-ballast.fr/marlene-schiappa-le-femonationalisme-et-nous

    #nationalisme #violences_sexistes #violences_sexuelles #protection #châtiment #enfermement #séparatisme #étrangers #combat_culturel #altérisation #islam #musulmans #racisme #nationalismes_sexuels #nationalisme_sexuel #intersectionnalité #islamophobie #anti-réfugiés #culturalisation

    ping @cede

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    Mais je mets ici le texte complet et ajoute des tags

    • In the Name of Women′s Rights. The Rise of Femonationalism

      Sara R. Farris examines the demands for women’s rights from an unlikely collection of right-wing nationalist political parties, neoliberals, and some feminist theorists and policy makers. Focusing on contemporary France, Italy, and the Netherlands, Farris labels this exploitation and co-optation of feminist themes by anti-Islam and xenophobic campaigns as “femonationalism.” She shows that by characterizing Muslim males as dangerous to western societies and as oppressors of women, and by emphasizing the need to rescue Muslim and migrant women, these groups use gender equality to justify their racist rhetoric and policies. This practice also serves an economic function. Farris analyzes how neoliberal civic integration policies and feminist groups funnel Muslim and non-western migrant women into the segregating domestic and caregiving industries, all the while claiming to promote their emancipation. In the Name of Women’s Rights documents the links between racism, feminism, and the ways in which non-western women are instrumentalized for a variety of political and economic purposes.

      https://www.dukeupress.edu/in-the-name-of-womens-rights
      #livre #Sara_Farris

  • La charge des boutiquiers !

    Après plusieurs jours assez tumultueux d’acharnement médiatique et de pressions démesurées, posons nous la question : pourquoi tant de virulence concernant le départ de journalistes et de quelques socios renommés du Média qui avaient signé le manifeste pour un média citoyen ?

    L’être humain sait très bien construire des justifications après coup quand ce qui déclenche le ramdam est insignifiant. Mais que s’est-il passé exactement ? Tout d’abord, on assiste au départ d’une journaliste, suite à la fin d’une période d’essai non concluante. Ensuite, un autre journaliste opte pour une position de précaution face à la difficulté de vérifier la source des images venant de la zone du Ghouta. Pourtant, l’Histoire nous a appris qu’en situation de conflits, les images sont aussi un vecteur de manipulation des opinions pour justifier tel ou tel engagement guerrier.

    Que nous révèle cette période en prenant un peu de hauteur ? Interrogeons nous sur ce que j’appellerais la charge des boutiquiers.

    Au delà des projections de chacun sur ce que devait être Le Média, qui, ce nouveau venu dans le paysage médiatique dérange-t-il autant ? Et pourquoi ?

    Un milieu journalistique « bien pensant » qui ne supporte pas cet autre regard sur l’actualité car il leur renvoie leur propre subjectivité dans leur couverture de l’information ?
    Un milieu politique inquiet de voir une brèche, dans leur storytelling, dans une communication orientée en leur faveur ; que sais-je encore ?

    Dans cette société du tout compétition, où la lutte des places est exacerbée puisqu’il n’y en a pas assez pour chacun.e, les médias n’échappent pas à cette condition. Comme l’information est sujet politique, chacun.e y va de la défense ou de la promotion de son pré-carré en fonction des pouvoirs en place. De cet assujettissement, s’en suit un conformisme aux intérêts des dirigeants des grandes entreprises de presse qui les emploient pour se maintenir en place. Cela se traduit fréquemment par des méthodes journalistiques bien basses pour provoquer l’audience et la réaction émotionnelle.

    Grâce à son indépendance financière, l’arrivée du Média ne s’inscrit pas dans cette conformité ambiante. Il ne faut pas s’étonner qu’en s’attaquant à la « grande messe du 20 Heures », ils provoquent des commentaires qui dénotent d’un manque de tolérance à un traitement différent de l’information. En permettant l’expression d’une parole critique aux politiques sociales, environnementales, économiques, internationales et en donnant la parole à des personnes qui n’ont plus ou pas l’accès aux chaînes de radio-télévision, aux tribunes dans la presse, la différence avec les autres médias est criante. C’est vrai qu’entendre autant de voix critiques ou dissonantes dans les "journaux de 20 H dominants" n’est pas légion. Sans doute, certaines chaînes privilégient d’autres approches pour distraire plutôt que cultiver. Je crois que nous pouvons féliciter Le Média d’avoir pris le chemin inverse.

    Mais, derrière cette profusion de réactions épidermiques, ne ressentons nous pas ici autre chose, comme la peur d’une classe politique et des puissances économiques qui possèdent les grands médias ? Tout ce qui démontrerait que la logique comptable actuelle des projets « libéraux » produit un déficit humain, environnemental et à terme financier, inquiète. Rendre visible cela, c’est mettre en question le pouvoir, la position dominante ou installée d’une oligarchie.

    Nous avons certainement ici la raison pour laquelle celles et ceux qui s’emploient à éclairer les citoyens sont renvoyés au sempiternel manœuvre d’étiquetage politique de toute part. C’est d’ailleurs ce que recherchent tous ces boutiquiers médiatiques qui n’ont pas hésité à le faire avant même son démarrage. En le qualifiant de média insoumis, c’est vouloir l’enfermer, au regard de l’opinion, dans une vision politicienne (ce scénario est en place et va continuer) alors qu’il se définit autour de valeurs.

    Cependant, se déclarer un média engagé dans des causes écologiques, féministes, humanistes est une preuve d’honnêteté qui devrait inspirer celles et ceux qui critiquent cette initiative dans le champ médiatique audiovisuel d’aujourd’hui. Au lieu de cela, certains.es ont beau jeu de se réclamer d’une neutralité qui n’existe pas dans le traitement de l’information. Il s’arroge une objectivité tout en laissant paraître leur orientation sur ce qui serait bien ou ce qui serait mal de penser.

    Y a-t-il des insoumis dans l’équipe du Média ? Il serait difficile de dire le contraire. Mais, en faire l’exclusivité n’est pas juste au regard des personnalités invitées à l’antenne et de la diversité des socios. Dans un contexte de dislocation des partis politiques traditionnels, singulièrement, il ne serait pas étonnant non plus qu’une certaine « gauche socialiste » participe, de concert avec la droite, pour tenter d’isoler une webtélé trop critique à leur goût envers « cette pensée unique du libéralisme ». Tout ce petit monde et ce microcosme « HS » (Hors Sol) se retrouvent unis dans les lieux d’influence, cherchant à défendre leur « boutique de pensée », faisant croire qu’ils ne font pas partis d’une même chaîne de boutiques franchisées.

    Une autre famille médiatique de gauche (dont j’ai pu à une époque m’identifier à leurs analyses), préfère voir l’arrivée de ce nouveau média audiovisuel comme un concurrent, plutôt que rechercher des complémentarités et des coopérations. Elle profite de la situation actuelle pour salir Le Média avec une argumentation digne d’un procès politique ; ce qui révèle bien des choses. Au lieu de prendre de la distance, elle s’inscrit pleinement dans cette querelle de boutiquiers. Elle privilégie le marché d’un lectorat qu’elle voudrait captif plutôt que l’information. Ne serait-ce pas également un signe de fragilité idéologique et d’un conservatisme au regard des enjeux de société ? Quelle déception !

    Pourtant, Le Média n’est pas un mouvement politique. Il présente des témoignages, il confronte des points de vue et propose l’analyse de questions de société en les mettant en débats. Au regard du journal et des émissions, nous l’avons constaté sur sa toute petite période d’existence. Permettre de mieux comprendre le monde, cette globalisation « libérale », me paraît être la démarche sensée du Média pour penser des réponses à ce qui s’annonce ?

    Le climat se réchauffe. La sixième extinction de masse des animaux s’accélère. L’humanité épuise les ressources naturelles. La concentration de richesse mondiale atteint des proportions dangereuses. Les dépenses militaires continuent d’augmenter au niveau mondial etc., autant de sujets qui, je ne doute pas, feront l’objet d’émission un jour. Face à ces enjeux pour les habitants de la planète, combien de leaders d’opinions politiques, médiatiques, économiques nous endorment avec leur novlangue « néolibérale » ? Et de fait, notre intégration consciente ou inconsciente de leur mode de pensée ou notre résignation font de nous des complices.

    Dans ce combat culturel, le courage devient, une des qualités supplémentaires des journalistes existants et futurs du Média et ils peuvent compter sur des abonnés en augmentation pour les soutenir. La charge des boutiquiers en sera pour ses frais.

    #LeMédia #combat_culturel

    https://www.lemediatv.fr/articles/la-charge-des-boutiquiers-article-modifie-et-augmente

    • #AsilePolitiquePourNoël par Gérard Miller :D !

      Ainsi l’émoi médiatique soulevé par le départ d’Aude Rossigneux n’était que l’arbre qui cache la forêt. Naïfs journalistes du Figaro ou de BFM qui pensiez avoir affaire à des insoumis ! Grâce aux révélations de Noël Mamère et à son exfiltration audacieuse de Montreuil, la vérité éclate : le Média citoyen n’était qu’un repaire de rouges, le couteau entre les dents, avec à sa tête rien de moins qu’un « comité des soviets ». Fier de l’amitié que m’a toujours portée Noël, je tiens à saluer publiquement son courage.

      Certes, c’est avec quelques mois de retard qu’il a décidé de fêter le centenaire de la révolution bolchévique, mais j’imagine ce qu’il a dû subir, émission après émission, en se retrouvant plongé dans les heures les plus sombres de la Guerre froide qui opposa les Etats-Unis à l’URSS. Qu’on ne compte donc pas sur moi pour dénoncer le « transfuge » qu’il est aujourd’hui sous le fallacieux prétexte qu’après avoir signé à ma demande le Manifeste du Média, il m’a en revanche lui-même contacté pour participer audit Média, comme en témoigne l’un des messages (parmi quelques autres) que j’ai reçus de lui. Comme le célèbre Viktor Andreïevitch Kravtchenko , auteur de I chose freedom, livre publié à New York en 1946, Noël Andreïevitch Mamère a choisi la liberté.

      Je le dis clairement : le gouvernement d’Edouard Philippe s’honorerait en accordant à Noël l’asile politique et je lance à l’instant même l’hashtag #AsilePolitiquePourNoël. Ayant moi-même parlé de nombreuses fois avec lui ces deux dernières semaines, et encore une heure avant qu’il ne franchisse le mur de Berlin, j’imagine les pressions qu’il a subies pour m’écrire ou me dire sur tous les tons qu’il avait été toujours libre au Média, qu’il avait choisi comme il l’entendait ses thèmes et ses invités, et qu’il gardait toute sa sympathie à une équipe qui lui avait ainsi laissé carte blanche.

      Je connais trop les méthodes des bolcheviks pour ne pas anticiper les railleries que Noël va subir. Certains diront par exemple que le jour même où il faisait sa déclaration bouleversante à Quotidien, il prenait la parole, quelques instants plus tard, à une réunion publique... de la France insoumise, rue Marcadet à Paris, et se faisait photographie, « en homme libre », devant le soviet du 18ème arrondissement. Moi, tout au contraire, j’admire cette duplicité salutaire, qui lui permet d’infiltrer l’ennemi pour mieux le dénoncer ensuite.

      J’apporte donc ici tout mon soutien à Noël Mamère. C’est vrai qu’il dit une chose et son contraire, mais c’est simplement parce qu’il est l’un des dirigeants du mouvement Générations et qu’il lui est plus utile de se contredire que de se répéter. Je l’affirme donc : Noël n’a qu’une parole et elle lui est précieuse. C’est pourquoi, quand il la donne, il la reprend.

  • #LE_MEDIA : C’EST PARTI | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/alberteins/blog/121017/le-media-cest-parti

    Il réunit d’ores et déjà des dizaines de youtubeurs comme #Usul, #Osons_causer, Mr Mondialisation, de blogs comme #Le_Vent_se_lève, lesCrises.fr et d’autres revues indépendantes comme #Ballast. Chacun dans son style et dans ses priorités, en toute indépendance et liberté. Qu’il est heureux de les retrouver tous fédérés pour faire vivre une culture commune.

    Tous les médias alternatifs étaient présents ainsi que #Marianne seul #Médiapart était absent [...]

    • Un nouveau média ? Pour liquider ceux qui font leur travail ?
      Rappelons, que le NON au référendum 2005 n’a pas eu besoin d’un nouveau média.

      Les personnalités sollicitées ne pouvaient donner leur approbation.
      Pour tenir quelques rubriques sur ce média, quelques signataires sont parfaitement à leur place :
      Laurent Baffie , rubrique Féminisme et la dignité.
      Marie-George Buffet , rubrique accords politiques locaux et l’affairisme des elus.
      Aurélie Filippetti , rubrique remplacement du social par la Culture.
      Pierre Joxe , rubrique trucage des budgets.
      Noël Mamère , rubrique l’écologie molle.
      Arnaud Montebourg , rubrique redressement français.
      Karl Zéro , rubrique, médias et affairisme.
      mariane , rubrique simulation, avec médiapart .
      . . . . . .

      Les cinquante premiers signataires du Manifeste pour un nouveau média citoyen
      https://www.legrandsoir.info/liste-des-premiers-signataires-du-manifeste-pour-un-nouveau-media-cito
      Cécile Amar (journaliste), Christian Audouin (directeur de rédaction), Laurent Baffie (chroniqueur), Josiane Balasko (comédienne), Blick Bassy (chanteur), Lucas Belvaux (réalisateur), Marie-George Buffet (députée), Bernard Cassen (président d’honneur d’Attac), Judith Chemla (comédienne), Sophia Chikirou (communicante), Antoine Comte (avocat), Jean-Pierre Darroussin (comédien), Antoine Deltour (lanceur d’alerte), Jack Dion (journaliste), Aurélie Filippetti (ancienne ministre), Bruno Gaccio (auteur), Raquel Garrido (avocate), Frédéric Gros (philosophe), Robert Guédiguian (réalisateur), Thomas Guénolé (politologue), Janette Habel (politologue), Cédric Herrou (agriculteur), Eva Joly (députée européenne), Pierre Joxe (ancien ministre), Jul (dessinateur), Juliette (chanteuse), Aude Lancelin (journaliste), Dany Lang (économiste), L.E.J (chanteuses), Philippe Lioret (réalisateur), Noël Mamère (ancien député), Jean Massiet (youtubeur), Guillaume Meurice (humoriste), Gérard Miller (psychanalyste), Giovanni Mirabassi (pianiste), Tania de Montaigne (écrivaine), Arnaud Montebourg (ancien ministre), Gérard Mordillat (écrivain), François Morel (comédien), Patrick Pelloux (médecin urgentiste), Edouard Perrin (journaliste), Philippe Poutou (ouvrier syndicaliste), Adrien Quatennens (député), François Ruffin (député), Bruno Solo (comédien), Jean Teulé (écrivain), Usul (youtubeur), Jacques Weber (comédien), Martin Winckler (écrivain), Karl Zéro (réalisateur).

    • Cher Le Média, les médias libres te souhaitent la bienvenue
      Reporterre - 13 octobre 2017 / Coordination permanente des médias libres
      https://reporterre.net/Cher-Le-Media-les-medias-libres-te-souhaitent-la-bienvenue


      L’appel à créer un « nouveau média collaboratif, pluraliste, culturel et francophone, humaniste et antiraciste, féministe et pro LGBTI, écologiste et progressif » prépare le lancement de « Le Média », proche de la France insoumise. Les auteurs de cette tribune rappellent que des médias correspondant à ces critères existent déjà partout en France.

      Soutenez les médias citoyens !
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      La suite : https://seenthis.net/messages/637583

    • Son modèle économique et sa gouvernance correspondent aux valeurs de solidarité et d’implication populaire qui font bouger les choses dans tous les domaines : culture, sport, divertissement, actualité. Il réunit d’ores et déjà des dizaines de youtubeurs comme Usul, Osons causer, Mr Mondialisation, de blogs comme Le Vent se lève, lesCrises.fr et d’autres revues indépendantes comme Ballast. Chacun dans son style et dans ses priorités, en toute indépendance et liberté. Qu’il est heureux de les retrouver tous fédérés pour faire vivre une culture commune.

      Tous les médias alternatifs étaient présents ainsi que Marianne seul Médiapart était absent, comme le disait David Koubbi normalement lorsqu’un nouveau média sort il est salué par l’ensemble de ses confrères mais là c’est l’inverse, il ironise sur l’Express notamment mais il aurait également pu citer Médiapart, Europe1 etc . Et de conclure «  si l’on critique autant cette alternative c’est qu’elle fait peur et donc qu’elle est bonne ».