#comité_de_mobilisation_insee

  • Insee, Cour des comptes : comment les fonctionnaires reprennent le droit à la parole | Blogapart | 10.04.23

    https://blogs.mediapart.fr/arnaud-bontemps/blog/100423/insee-cour-des-comptes-comment-les-fonctionnaires-reprennent-le-droi

    Ces dernières semaines, plus de 50 magistrat·es, agent·es, personnels de contrôle de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes se sont mis en grève. C’est inédit. Après le comité de l’INSEE, cela s’inscrit dans un mouvement de réappropriation du droit à la parole des fonctionnaires.
    [...]
    La tradition d’indépendance de ces "grands" corps a souvent tendance à les placer "au-dessus de la mêlée". Ce n’est plus le cas ici. En se mettant en grève, ces fonctionnaires descendent de leur piédestal et rejoignent le mode d’action de tous les salarié·es. C’est un changement majeur.

    Ce changement entraînera-t-il d’autres expressions dans les jours à venir ? « Nous appelons nos collègues fonctionnaires et agents publics à s’exprimer collectivement », précise le collectif d’agents, magistrats et personnels de contrôle de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes dans son dernier communiqué. Ce serait en tout cas une bonne nouvelle. Et un changement intéressant pour réaffirmer la profonde cohérence entre le rôle de fonctionnaire et la fonction de citoyen.

    Post-Scriptum : pour en savoir plus sur le devoir de réserve, ce qu’il empêche vraiment ou comment il est surinterprété, je ne saurais que trop vous recommander l’excellent "guide du devoir de réserve" du collectif Nos services publics.

  • "#Analyse_Retraite" (n°4) consacré à la #pénibilité du #Comité_de_Mobilisation_INSEE DG :

    Nous sommes des agents de l’Insee, l’Institut national de la statistique et des études économiques, mobilisés contre la réforme des retraites du gouvernement. Pour aider à la compréhension des enjeux sociaux et économiques autour de cette réforme, nous mettons en lumière des statistiques publiques dans une collection appelée Analyse Retraites. Ce nouveau numéro est centré sur les questions de pénibilité.


    A télécharger ici :
    https://drive.proton.me/urls/PZQC9YRVT4#c3LuuB7m3wt9

    #analyse #retraites #statistiques #chiffres #rapport #INSEE

    • À l’Insee, la mobilisation contre la réforme des retraites s’organise aussi

      Les agents de l’Insee ont perturbé une conférence de presse cette semaine et ont publié une analyse contre la réforme des retraites. Leur but : mettre au service du mouvement social leur expertise et leur outil de travail, la statistique nationale.

      Mercredi 15 février. Alors que les syndicats ont appelé à une nouvelle journée de manifestation contre la réforme des retraites, l’Insee (l’Institut national de la statistique et des études économiques) fait comme si de rien n’était. Les journalistes économiques ont été convoqués à distance à 10 heures pour la traditionnelle présentation de la « Note de conjoncture » de l’institut de statistiques national. Mais l’écran reste désespérément noir pendant une dizaine de minutes.

      Soudain, une voix s’impose sur l’écran toujours noir. C’est celle d’un responsable du « comité de mobilisation » des agents de l’Insee contre la réforme des retraites. Il rappelle qu’une partie du personnel de l’Insee est vent debout contre la réforme depuis le 19 janvier, que le comité a publié une analyse de quatre pages pour mettre en évidence le caractère inutile de la réforme et, enfin, il invite les journalistes à une conférence de presse le lendemain pour la publication d’une nouvelle analyse du comité sur la question de la pénibilité.

      L’interruption aura été très brève, une poignée de minutes, mais met mal à l’aise le représentant de l’Insee, qui se confond en excuses auprès de la presse. Mis devant la pression du comité, il a dû lui céder la parole, mais insiste sur le fait que ses paroles doivent être différenciées de celles de l’institution.

      Le lendemain, la conférence du comité de mobilisation se tient à la même heure, mais dans des conditions très différentes. Initialement prévue dans les locaux de l’Insee à Montrouge, elle doit se déporter dans un café proche et, pour les journalistes, se passer à distance. À 17 h 20, la veille, dans un mail signé par l’ancienne députée socialiste Karine Berger, devenue en janvier 2020 secrétaire générale de l’Insee, la direction interdit la réunion. « Les réunions syndicales ne sont autorisées dans l’enceinte de l’administration que pour des informations syndicales à destination des seuls agents », rappelle le texte du mail.

      La conférence de presse du comité de mobilisation s’est donc tenue dans des conditions plus difficiles. Les journalistes sont un peu moins nombreux (et assez différents) de ceux de la veille. Mais le texte de l’analyse sur la pénibilité est néanmoins présenté.

      Une analyse au vitriol contre la réforme

      Parfaitement mis en page, ce texte titré « Analyse retraites » n’est pas sans rappeler la charte graphique de l’Insee, ni même le style des notes de l’institut. Un membre du comité assume même le caractère d’« imitation » du document. Tout y est issu des données de l’Insee, et le texte est émaillé de douze références à des articles scientifiques.

      Il s’agit d’un « numéro 4 », qui suit deux premiers numéros publiés lors de la mobilisation contre la précédente réforme des retraites en 2019-2020 et celui du mois de janvier dernier, qui rappelait que les gains de productivité permettaient de compenser le vieillissement de la population, rendant la réforme injustifiée.

      Cette fois, le texte se concentre sur la question de la pénibilité pour mettre en échec un des axes du discours macroniste sur la retraite. En février, le chef de la majorité présidentielle François Patriat, ancien membre du Parti socialiste, avait déclaré que les déménageurs et les couvreurs disposaient désormais d’« exosquelettes ». La note des agents de l’Insee souligne, au contraire, la persistance de la pénibilité et des effets du travail sur la #santé et l’#espérance_de_vie.

      « Ces dernières années ont été marquées par une dégradation des #conditions_de_travail, y compris chez les seniors : accélération des cadences, sous-effectif chronique […], parcellisation et surveillance accrue », souligne la note. En 2019, rappellent les agents, 37 % des salariés se sentaient incapables de tenir dans leur travail jusqu’à l’âge de la retraite. Et ce phénomène touche d’abord les métiers les moins qualifiés.

      L’analyse rappelle aussi que l’espérance de vie sans incapacité n’est que de 63,9 ans pour les hommes et de 65,3 ans pour les femmes, avec là encore un biais fort selon la nature du travail. Cet âge n’est ainsi que de 62,4 ans chez les ouvriers et 64,7 ans chez les ouvrières. En tout, une personne sur quatre présente déjà une incapacité aujourd’hui au moment de son départ en retraite.

      Mais ces différences sont plus globales encore : l’espérance de vie des 5 % les plus pauvres est inférieure de 13 % à celle des 5 % les plus riches. Celle des cadres dépasse de 6,4 ans celle des ouvriers. À 62 ans, 14 % des ouvriers sont déjà morts, contre 6 % des cadres… De quoi relativiser le leitmotiv gouvernemental : « On vit plus longtemps, il faut travailler plus longtemps. »

      Du côté des #contraintes_physiques, le bilan n’est guère plus réjouissant. Certes, certaines d’entre elles ont été réduites, mais elles restent à un niveau élevé. 35 % des salariés et salariées sont ainsi encore exposés à la manutention de charges lourdes à la main. Surtout, l’#intensité_du_travail et la #surveillance_électronique se sont accrues.

      Enfin, l’analyse des agents de l’Insee insiste sur les effets des réformes des retraites sur le #marché_du_travail. Reprenant une étude récente de l’Unédic, le texte rappelle que la réforme de 2010, qui avait porté l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, a créé 100 000 chômeurs supplémentaires et un accroissement des dépenses d’assurance-maladie. « Il y a donc un transfert des coûts de l’#assurance-retraite vers l’#assurance-maladie et l’#assurance-chômage », souligne un agent.

      Mettre son expertise au service du mouvement social

      La démarche de cette analyse mérite d’être soulignée. Les agents mobilisés utilisent leurs compétences pour mettre en lumières des « chiffres publics » qui ne passent pas la « cacophonie médiatique » et, cela n’est pas dit, les cadres existants des publications de l’institut. Il y a donc là, à l’occasion de cette réforme des retraites, une forme de prise de contrôle de l’outil de travail au service du mouvement social, mais aussi une démarche critique vis-à-vis de la communication globale de l’Insee.

      « Ce que l’on essaye de montrer, c’est que notre travail peut servir à autre chose », reconnaît un agent lors de la conférence de presse du comité. Et d’ajouter : « On est en train de dire, en agissant ainsi, qu’on veut un autre type d’expression et de relations avec la société civile. »

      On comprend que les relations avec la direction de l’Insee puissent être tendues, même si un autre agent mobilisé indique que, globalement, jusqu’à mercredi, les rapports étaient plutôt paisibles. Lors de la naissance de cette initiative, au moment de la précédente réforme de 2019-2020, quelques tensions avaient déjà pu se faire sentir, notamment lorsque les agents mobilisés étaient intervenus au cours d’une autre présentation d’une « Note de conjoncture » de l’Insee à la gare de Lyon. La direction avait alors rappelé les agents au « #devoir_de_réserve » qui les oblige à ne pas intervenir dans le débat en tant qu’agents de l’Insee.

      C’est pourquoi ces derniers interviennent au nom global du comité de mobilisation. Depuis, les agents estiment que la direction ne peut pas réellement contester les chiffres mis en avant dans leurs analyses. Un membre du comité estime d’ailleurs que ce travail « participe au rayonnement de l’Insee ». Au reste, il n’y a pas de critique, au sein du comité de mobilisation, de l’Insee en tant que tel. Il y a surtout une volonté d’utiliser les savoirs au service de la lutte contre la réforme.

      En tout, ce comité regroupe « une cinquantaine d’agents », dont une trentaine se réunissent régulièrement. Il est soutenu par quatre syndicats de l’institut : CFDT, CGT, FO et Sud. Mais la mobilisation des agents tend à la dépasser. Selon des membres de ce comité, près de 150 agents ont pu se mettre en grève au cours des semaines de mobilisation. Cela représente près de 10 % des effectifs des services centraux. Un chiffre faible ? Peut-être, mais l’Insee n’est pas un centre traditionnel de la contestation sociale et, affirme un agent membre du comité, « la plupart des agents, comme le reste des Français, sont hostiles à la réforme des retraites ». Jusqu’ici, en tout cas, les publications du comité de mobilisation n’ont pas causé d’hostilité majeure en interne.

      Concrètement, ce mouvement s’est construit autour de celui de 2019-2020. Les cadres de la précédente mobilisation, durant laquelle avaient été publiés déjà deux numéros d’« Analyses retraites », ont été rapidement réactivés. Le comité se structure autour de sous-comités avec des tâches bien précises, notamment la rédaction du quatre-pages. L’assemblée générale se réunit tous les trois ou quatre jours et reçoit des invités, parmi lesquels les économistes Michaël Zemmour ou Nicolas Da Silva, mais aussi les comités interprofessionnels de mobilisation de la région.

      D’ailleurs, les agents mobilisés cherchent de plus en plus à nouer des liens avec les salariés en grève autour du siège de Montrouge. Des agents sont déjà allés sur d’autres lieux de mobilisation pour inciter à l’action. « Cela apporte de la légitimité et du sérieux à la lutte », explique un des agents, qui considère que c’est sur ce point que le personnel de l’Insee peut être utile : « L’Insee a une image de sérieux et de rigueur, et il faut utiliser l’impact que cela peut avoir. »

      L’enjeu, à présent, est de poursuivre et d’amplifier la mobilisation. En poursuivant la rédaction d’analyses, mais aussi en répondant aux coups de frein de la direction, notamment sur la possibilité de réaliser une conférence de presse à distance depuis les locaux de l’Insee. Mais le principal défi sera de voir s’il est faisable d’organiser un blocage et une grève massive à l’institut. « C’est plus difficile, mais je suis optimiste », affirme un agent du comité qui considère que l’usage de l’article 49-3 de la Constitution est de nature à faire franchir le pas à de nombreux agents.

      Déjà, à la direction régionale de Saint-Quentin-en-Yvelines, des agents ont bloqué la production de documents avec l’appui d’une caisse de grève interne. « C’est ce genre d’action que l’on voudrait répéter à la direction générale », indique un agent. Une chose est certaine : à l’institut de statistiques, la colère est la même que dans la plupart des autres entreprises du pays. Et ses agents ont su faire preuve de créativité pour apporter leur expertise au mouvement social.

      https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/170323/l-insee-la-mobilisation-contre-la-reforme-des-retraites-s-organise-aussi