Merci @fil ! Merci @biggrizzly ! Ça fait très plaisir.
J’ai utilisé une multitude de gravures de l’époque, mais je ne pouvais évidemment pas faire comme une BD normale dans laquelle on voit le personnage principal revenir de case en case. Je n’ai en effet aucune gravure de mes personnages principaux. De temps en temps, j’ai pu le faire, comme dans la planche avec Napoléon III. Mais généralement, il fallait trouver d’autres idées.
Certains auteurs conçoivent leurs planches avec un « gaufrier » : des cases régulières à l’intérieur desquelles ils concentrent toute leur attention de dessinateurs. D’autres jouent également avec la forme des cases pour construire une narration. C’est cette option que j’ai choisie. Cela m’a permis à la fois de raconter des chose directement avec la forme de certaines cases et de jouer sur les rythmes de l’histoire.
J’ai fait une page pour expliquer comment j’ai travaillé les planches, avec plusieurs exemples :
▻http://www.meyssan.com/a10
Ceci dit, je pense que le plus important, ce n’est pas la case, ou le dessin dans la case, mais la narration. C’est elle qui, tout d’un coup, donne du sens à une case ou à un dessin.
Je cherche des images qui peuvent se prêter au jeu de ce que je veux raconter. Mais lorsque je n’en trouve pas vraiment, cela peut quand même fonctionner si elles s’inscrivent dans une grande narration. Alors, l’image, quelle qu’elle soit, prend du sens. Et si elle est différente de ce qu’on attendait (moins figurative), alors ce sens s’enrichit.
C’est ce que je trouve le plus intéressant : notre capacité à créer du sens, à faire des liens entre des choses apparemment sans rapport, notre imagination infinie.
Le petit passage sur François Maspero est dans cette veine. J’imagine des liens, je crée des rapprochements, je montre une continuité. Avant, il semblait ne pas y en avoir. Pourtant, une fois que c’est raconté, cela parait évident.
François Maspero dit être resté dans son cœur cet enfant de douze ans et demi, profondément marqué par l’arrestation de ses parents par la Gestapo. Le petit crieur de journaux qu’il s’était donné pour symbole de sa maison d’édition a douze ans et demi (n’est-ce pas évident ?). Il aura toujours cet âge, à travers les époques, de livre en livre, des éditions Maspero aux éditions La Découverte...
Ici, il y a une image, une seule, et toute un histoire.
Le livre fonctionne parce qu’il raconte une histoire et qu’on a envie d’y croire.