Etrange article.
Les polices de caractère vectorielles et un langage de description de page, une sorte d’html sans hypertexte et uniquement 2D, le PostScript. Inventeur ? John Warnock président d’Adobe. Celui-ci eut le génie d’intégrer les courbes de Pierre Bézier dans son langage de description de page et de ce fait fabriquait les premières fontes vectorielles postscripts de Type III. Nous sommes en 1988, à la veille de la révolution évoquée ci-dessus.
Quelques mois plus tard, nous sommes en septembre 1989, Adobe décide de rendre publique son invention (en renoncant principalement à son brevet), le langage Postscript, ainsi que les sources logicielles des polices de Type I qui pour la première fois dans l’histoire de l’informatique permettait grâce à un petit utilitaire Adobe Type Manager, de lisser les compositions à l’écran (wysiwyg).
Voilà. La Révolution est alors en marche (d’autant que Microsoft modernisait son système d’exploitation Dos pour créer l’équivalent de celui d’Apple avec Windows) et nous sommes, typographes du monde entier, aux premières loges pour constater les effets ravageurs de l’évènement, témoins impuissants d’une formidable désagrégation du tissu industriel et social initié par ces inventions. Nombre d’entre nous se souviennent que durant quelques mois, l’on crut dans le petit monde de la communication s’être simplement débarrassé des ateliers de la composition typographique qui réalisaient livres, journaux, campagnes de publicité etc. On déchanta.
En à peine quelques vingt quatre mois, le monde de l’image basculait également et avec, les nombreux professionnels de la retouche, du tirage, et de la photogravure et même de l’imprimerie qui passait aux technologies du CTP (plaques offset directement insolées à partir des fichiers sans passer par l’étape du film offset).
Puis ce fut au tour du Son, qui s’affranchissait des tables de montages analogiques hors de prix, puis celui de la vidéo et du cinéma. Mais si ce n’était que tout le secteur de l’entertainment qui était touché, aucun souci.
Les mêmes agences qui triomphalement s’étaient affranchies des sociétés de typographie, voyaient leur client, les annonceurs s’équiper et faire des pré-maquettes sur Power-Point, enfermant les briefs dans un cadre de plus en plus « borné », délimité. De même que la population des graphistes s’affranchissaient des agences de comm. pour s’installer dans l’indépendance et offrir leurs services de PAO.
De fait les langages postscript et HTML ont concouru à la création d’internet et d’un coup l’informatique de masse interconnectée en réseau a renversé toutes les habitudes professionnelles et domestiques en l’espace de quinze ans. Détruisant sur son passage des millions de petits emplois devenus inutiles parce que permutables sur les consoles de travail de toutes les entreprises. Dactylos, assistant(e)s, secrétaires furent les premiers touchés, puis les techniciens spécialisés, qui virent leur travail récupéré, laminé par la formidable puissance informatique. Les standardistes, et guichetiers disparaissent bien après que le dernier poinçonneur des Lilas... ait troué le dernier billet de métro. Les voyagistes et les compagnies de transport remplacent les hygiaphones par des machines à débiter les billets, quand ce n’est pas tout simplement Internet ou les téléphones mobiles qui prennent le relai de la transaction.
Symptômes d’une destruction sociale annoncée
Vous qui lisez ce billet, si vous êtes webdesigner ou bien développeur ajax, flash ou expert des langages web, cet article ne vous parle pas forcément. Vous vous sentez sur la crête de la vague, protégé et pulsé par la révolution high tech... mais ne vous y trompez pas, la société est un tout, bien plus complexe, et la capillarité des crises qui se succèdent peuvent à leur tour vous atteindre.